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Faculté de Mathématiques Année 2020 - 2021

2ème année Lic.RO section B


Algèbre 4

Formes linéaires - Dualité

1 Introduction
Les formes linéaires sont un type particulier d’applications linéaires. L’intérêt spécifique qui leur est
porté est motivé par le fait qu’elles jouent un rôle important en algèbre linéaire et multilinéaire ainsi
qu’en analyse. Les résultats concernant les applications linéaires restent naturellement vrais pour ce cas
particulier. Cependant, l’étude des formes linéaires donne lieu à de nouveaux résultats qui ne s’appliquent
que dans ce cas précis.

2 Formes linéaires

Définition 1. Soit E un espace vectoriel sur un corps commutatif K, considéré comme espace véctoriel
sur lui-même. On appelle forme linéaire sur E toute application linéaire de E dans K.
L’espace vectoriel L(E, K) des formes linéaires définies sur E s’appelle le dual de E. Il est noté E ∗ .

Exemples 1. 1. Soit n ∈ N∗ . Pour tout 1 ≤ i ≤ n, l’application

fi : Rn −→ R
(x1 , . . . , xn ) 7−→ xi

est une forme linéaire sur Rn .

2. Soient λ1 , . . . , λn ∈ R. L’application

f: Rn −→ R
(x1 , . . . , xn ) 7−→ λ1 x1 + · · · + λn xn

est une forme linéaire sur Rn .

3. L’application
f : R[X] −→ R
R1
P 7−→ f (P ) = 0 P (X) dX
est une forme linéaire sur R[X].

4. L’application
f : Mn (R) −→ R
A 7−→ f (A) = T r(A) = trace de A
est une forme linéaire sur Mn (R).

1
5. Soit A = (a1 , . . . , an ) ∈ M1,n (R). L’application

f: M1,n (R) −→ R
X = (x1 , . . . , xn ) 7−→ f (A) = A t X = a1 x1 + · · · + an xn

est une forme linéaire sur M1,n (R).

3 Cas où E est de dimension finie


Vous avez vu, dans le cours sur les applications linéaires, que si E et F sont deux K-espaces vectoriels de
dimenion n et m respectivement alors le K-espace vectoriel L(E, F ) des applications linéaires de E dans
F, du fait de son isomorphisme avec Mm,n (K) est de dimension n × m.
Par suite
dim E ∗ = dim L(E, K) = n = dim E.

Construction d’une base de E ∗ à partir d’une base de E.

Proposition 2. Soit B = {v1 , . . . , vn } une base de E. Pour chaque 1 ≤ i ≤ n, considérons la forme


linéaire fi : E −→ K définie sur la base B de E par

 1 si i = j
fi (vj ) = δij =
0 si i 6= j

(δij est le symbole de Krönecker).


La famille B ∗ = {f1 , . . . , fn } est une base de E ∗ appelée la base duale de la base B.

Les fi sont souvent notés vi∗ .


Preuve. Il suffit de montrer que B ∗ est libre. Soient λ1 , . . . , λn ∈ K tels que

λ1 f1 + · · · + λn fn = 0.

On a alors, pour tout 1 ≤ i ≤ n,

(λ1 f1 + · · · + λn fn )(vi ) = 0.

Donc
λi fi (vi ) = λi = 0, ∀ 1 ≤ i ≤ n.

Exemples 2. 1. Soit E = {e1 , e2 , e3 } la base canonique de R3 . Cherchons la base E ∗ = {f1 , f2 , f3 }


de (R3 )∗ duale de la base E .
Les fi vérifient fi (ej ) = δij pour tous 1 ≤ i, j ≤ 3. Donc pour tout (x, y, z) ∈ R3 ,

f1 (x, y, z) = f1 (xe1 + ye2 + ze3 ) = xf1 (e1 ) + yf1 (e2 ) + zf1 (e3 ) = x.

2
De même
f2 (x, y, z) = y et f3 (x, y, z) = z.

Donc
f1 : R3 −→ R, f2 : R3 −→ R, f3 : R3 −→ R.
(x, y, z) 7−→ x (x, y, z) 7−→ y (x, y, z) 7−→ z

2. Cherchons la base duale B ∗ = {f, g} de la base B = {v1 = (2, 1), v2 = (3, 1)} de R2 .
On a
f (v1 ) = 1, f (v2 ) = 0
g(v1 ) = 0, g(v2 ) = 1.

Tout vecteur (x, y) de R2 s’écrit (x, y) = (−x + 3y)v1 + (x − 2y)v2 . Il s’ensuit que

f: R2 −→ R et g: R2 −→ R
(x, y) 7−→ −x + 3y (x, y) 7−→ x − 2y.

Théorème 3. Soient B = {v1 , . . . , vn } une base de E et B ∗ = {f1 , . . . , fn } la base duale de B.


Pour tout vecteur u ∈ E,
u = f1 (u)v1 + · · · + fn (u)vn .
Et pour toute forme linéaire f ∈ E ∗ ,

f = f (v1 )f1 + · · · + f (vn )fn .

Preuve. Pour tout u ∈ E, il existe α1 , . . . , αn ∈ K tel que

u = α1 v1 + · · · + αn vn .

Pour 1 ≤ i ≤ n,
fi (u) = α1 fi (v1 ) + · · · + αi fi (vi ) + · · · + αn fi (vn ),
= αi fi (vi ),
= αi .
D’où
u = f1 (u)v1 + · · · + fn (u)vn .

Soit f ∈ E ∗ , il existe a1 , . . . , an ∈ K tels que

f = a1 f 1 + · · · + an f n .

Pour tout 1 ≤ i ≤ n,

f (vi ) = a1 f1 (vi ) + · · · + ai fi (vi ) + · · · + an fn (vi ) = ai .

D’où
f = f (v1 )f1 + · · · + f (vn )fn .

3
4 Orthogonalité
Vecteur orthogonal à une forme linéaire

Définition 4. Un vecteur v d’un K-e.v. E et une forme linéaire f du dual E ∗ de E sont dits orthogonaux
si f (v) = 0.
On dit aussi que v est orthogonal à f et que f est orthogonal à v.

Exemple 1. On considère la forme linéaire

f: R2 −→ R
(x, y) 7−→ 2x − 3y

Le vecteur v = (−6, −4) ∈ R2 est orthogonal à f car f (v) = −12 + 12 = 0.

Orthogonal d’une partie d’un espace vectoriel

Définition 5. Soit A une partie non vide d’un K-e.v. E.


On appelle orthogonal de A l’ensemble

A⊥ = {f ∈ E ∗ / f (x) = 0, ∀x ∈ A} ⊂ E ∗ .

Caractérisation: Pour tout f ∈ E ∗ ,

f ∈ A⊥ ⇔ f (x) = 0, ∀x ∈ A .

Exemples 3. 1. {0E }⊥ = E ∗ .

2. E ⊥ = {0E ∗ }.

Orthogonal d’une partie du dual d’un espace vectoriel

Définition 6. Soit B une partie non vide du dual E ∗ d’un K-e.v. E.


On appelle orthogonal de B l’ensemble

B ◦ = {x ∈ E / f (x) = 0, ∀f ∈ B} ⊂ E.

Caractérisation: Pour tout x ∈ E,

x ∈ B ◦ ⇔ f (x) = 0, ∀f ∈ B .

4
Exemples 4. 1. {0E ∗ }◦ = E.

2. (E ∗ )◦ = {0E }.

Proposition 7. Soient A une partie non vide d’un K-e.v. E et B une partie non vide du dual E ∗ . Alors

A⊥ est un sous-espace vectoriel de E ∗ et B ◦ est un sous-espace vectoriel de E.

Preuve. • Montrons que A⊥ est un sous-espace vectoriel de E ∗ .


On a A⊥ ⊂ E ∗ et A⊥ 6= ∅ car 0E ∗ ∈ A⊥ .
Soient f, g ∈ A⊥ et λ ∈ K. Pour tout x ∈ A,
(λf + g)(x) = λf (x) + g(x) = λ0 + 0 = 0.
Donc λf + g ∈ A⊥ .
• Montrons que B ◦ est un sous-espace vectoriel de E.
On a B ◦ ⊂ E et B ◦ 6= ∅ car 0E ∈ B ◦ .
Soient x, y ∈ B ◦ et λ ∈ K. Pour tout f ∈ B,
f (λx + y) = λf (x) + f (y) = λ0 + 0 = 0.
Donc λx + y ∈ B ◦ .

Proposition 8. Soient A, A0 deux parties non vides d’un K-e.v. E et B, B 0 deux parties non vides du
dual E ∗ . Alors
1. Si A ⊂ A0 alors (A0 )⊥ ⊂ A⊥ 3. Si B ⊂ B 0 alors (B 0 )◦ ⊂ B ◦
2. A⊥ = (hAi)⊥ 4. B ◦ = (hBi)◦

Preuve. Soient A, A0 deux parties non vides de E et B, B 0 deux parties non vides de E ∗ .
1. Supposons que A ⊂ A0 et montrons que (A0 )⊥ ⊂ A⊥ .
Soit f ∈ (A0 )⊥ , montrons que f ∈ A⊥ . Pour cela, nous devons montrer que pour tout x ∈ A,
f (x) = 0.
Soit donc x ∈ A. Comme A ⊂ A0 alors x ∈ A0 . Par suite, du fait que f ∈ (A0 )⊥ , f (x) = 0. On
déduit que f ∈ A⊥ .
2. Il est clair que A ⊂ hAi. On déduit de (1) que (hAi)⊥ ⊂ A⊥ .
Reste à vérifier que A⊥ ⊂ (hAi)⊥ .
Soit f ∈ A⊥ , montrons que f ∈ (hAi)⊥ . Pour cela, on doit montrer que pour tout x ∈ hAi, f (x) = 0.
Soit donc x ∈ hAi. Il existe a1 , . . . , am ∈ A tels que x = λ1 a1 + · · · + λm am avec λ1 , . . . , λm ∈ K. Par
suite f (x) = λ1 f (a1 ) + · · · + λm f (am ) = 0 car f ∈ A⊥ et ai ∈ A. On déduit que f ∈ (hAi)⊥ .
Exercice : Démontrer de la même manière les propriétés (3) et (4).

5
Remarque 1. On déduit de la proposition 8, que

1. Si F = hv1 , . . . , vm i ⊂ E alors F ⊥ = {f ∈ E ∗ / f (vi ) = 0, 1 ≤ i ≤ m}.

2. Si G = hf1 , . . . , fk i ⊂ E ∗ alors G◦ = {x ∈ E / fi (x) = 0, 1 ≤ i ≤ k}.

Théorème 9. Soient E un K-e.v. de dimension n, F un s.e.v. de E et G un s.e.v. de E ∗ . Alors

1. dim F ⊥ = dim E − dim F.

2. dim G◦ = dim E ∗ − dim G = dim E − dim G.

Preuve.
1. Soit {v1 , . . . , vm } une base de F qu’on complète pour avoir une base {v1 , . . . , vm , vm+1 , . . . , vn } de E.
Soit {f1 , . . . , fm , fm+1 , . . . , fn } sa base duale. Montrons que {fm+1 , . . . , fn } est une base de F ⊥ .
Pour tout 1 ≤ i ≤ m, on a 
 fm+1 (vi ) = 0

..
 .
 f (v ) = 0
n i

Donc fm+1 , . . . , fn ∈ F ⊥ .
Soit f ∈ F ⊥ ⊂ E ∗ , il existe α1 , . . . , αn ∈ K tels que f = α1 f1 + · · · + αn fn .
Pour tout 1 ≤ i ≤ m, on a f (vi ) = 0 = αi (car f ∈ F ⊥ ). On déduit que f = αm+1 fm+1 + · · · + αn fn .
Ce qui signifie que fm+1 , . . . , fn engendrent F ⊥ . Puisque fm+1 , . . . , fn sont linéairement indépendants
(car faisant parties d’une base) alors {fm+1 , . . . , fn } est une base de F ⊥ . Par conséquent
dim F ⊥ = n − m = dim E − dim F.

2. A faire en exercice.

5 Equations d’un s.e.v. en dimension finie

Proposition 10. Soit E un K-e.v. de dimension n.

1. Soient f1 , . . . , fp ∈ E ∗ tels que rg (f1 , . . . , fp ) = r. Alors le sous-espace vectoriel

F = {x ∈ E / f1 (x) = 0, . . . , fp (x) = 0}

est de dimension n − r.

2. Si F 0 est un s.e.v. de E de dimension m alors il existe des formes linéaires linéairement indépendantes
f1 , . . . , fn−m telles que
F 0 = {x ∈ E / f1 (x) = 0, . . . , fn−m (x) = 0}

6
Preuve.
1. G = hf1 , . . . , fp i est un s.e.v. de E ∗ de dimension r. On a

G◦ = {x ∈ E / fi (x) = 0, . . . , fp (x) = 0} = F.

Donc
dim F = dim G◦ = dim E ∗ − dim G = n − r.

2. Soit BF 0 = {v1 , . . . , vm } une base de F 0 . On la complète pour avoir une base


B = {v1 , . . . , vm , vm+1 , . . . , vn } de E. Soit B ∗ = {g1 , . . . , gn } la base duale de B. D’après la preuve
du théorème 9, {gm+1 , . . . , gn } est une base de (F 0 )⊥ . Donc pour tout x ∈ F 0 et tout
m + 1 ≤ i ≤ n, gi (x) = 0. On déduit que

F 0 ⊂ {x ∈ E / gm+1 (x) = 0, · · · , gn (x) = 0}.

Pour l’inclusion dans l’autre sens, soit x ∈ E tel que gi (x) = 0 pour tout m + 1 ≤ i ≤ n. D’après le
théorème 3, x s’écrit

x = g1 (x)v1 + . . . + gm (x)vm + gm+1 vm+1 + . . . + gn (x)vn


= g1 (x)v1 + . . . + gm (x)vm

On déduit que x ∈ F 0 .
Par suite
{x ∈ E / gm+1 (x) = 0, . . . , gn (x) = 0} ⊂ F 0 .

D’où
F 0 = {x ∈ E / gm+1 (x) = 0, . . . , gn (x) = 0}.

Posons, pour tout 1 ≤ i ≤ n − m, gm+i = fi . On a alors

F 0 = {x ∈ E / f1 (x) = 0, . . . , fn−m (x) = 0}.

Exercice 1. 1. Donner la dimension du s.e.v.

F = {(x1 , x2 , x3 , x4 , x5 ) / x1 + x2 + x3 = 0, x1 − x2 + x3 = 0, et x1 + x3 = 0}

de R5 .

2. Dans R4 , on considère les vecteurs v1 = (1, 2, 3, 4), v2 = (4, 3, 2, 1), v3 = (3, 1, 1, 0),
v4 = (5, 0, −3, −7). Soit G le s.e.v. de R4 engendré par v1 , v2 , v3 , v4 . Ecrire G sous la forme
G = {X ∈ R4 / fi (X) = 0}.

Solution

1. Soit E = {e1 , e2 , e3 , e4 , e5 } la base canonique de R5 et soit E ∗ = {e∗1 , e∗2 , e∗3 , e∗4 , e∗5 } la base duale de la
base E . Les e∗i sont les formes linéaires sur R5 vérifiant e∗i (x1 , x2 , x3 , x4 , x5 ) = xi , 1 ≤ i ≤ 5.
Soient f1 , f2 , f3 les formes linéairs sur R5 définies par

f1 (x1 , x2 , x3 , x4 , x5 ) = x1 + x2 + x3 , f2 (x1 , x2 , x3 , x4 , x5 ) = x1 − x2 + x3 , f3 (x1 , x2 , x3 , x4 , x5 ) = x1 + x3 .

7
Dans la base E ∗ , les fi s’écrivent: f1 = (1, 1, 1, 0, 0), f2 = (1, −1, 1, 0, 0), f3 = (1, 0, 1, 0, 0).
On vérifie par échelonnement que rg (f1 , f2 , f3 ) = 2. Par suite la dimension du s.e.v.

F = {(x1 , x2 , x3 , x4 , x5 ) / f1 (x1 , x2 , x3 , x4 , x5 ) = 0, f2 (x1 , x2 , x3 , x4 , x5 ) = 0, f3 (x1 , x2 , x3 , x4 , x5 ) = 0}

est égale à 5 − 2 = 3.

2. On montre par échelonnement que rg (v1 , v2 , v3 , v4 ) = 3. Donc dim G = 3 et G = hv1 , v2 , v3 i.


Complétons la famille v1 , v2 , v3 par u = (0, 0, 0, 1) pour avoir une base B = {v1 , v2 , v3 , u} de R4 . Soit
B ∗ = {f1 , f2 , f3 , f4 } la base duale de la base B. D’après la proposition 10,

G = {(x1 , x2 , x3 , x4 ) ∈ R4 / f4 (x1 , x2 , x3 , x4 ) = 0}.

Déterminons f4 .
Il existe a, b, c, d ∈ R tels que pour tout (x1 , x2 , x3 , x4 ) ∈ R4 on ait

f4 (x1 , x2 , x3 , x4 ) = ax1 + bx2 + cx3 + dx4 .

Comme B ∗ est la base duale de B alors f4 vérifie f4 (v1 ) = 0, f4 (v2 ) = 0, f4 (v3 ) = 0, f4 (u) = 1.
On obtient le système 

 a + 2b + 3c + 4d = 0
4a + 3b + 2c + d = 0


 3a + b + c = 0
d = 1

D’où l’on déduit a = 1/2, b = 0, c = −3/2 et d = 1.


Par suite
1 3
G = {(x1 , x2 , x3 , x4 ) ∈ R4 / x1 − x3 + x4 = 0} = {(x1 , x2 , x3 , x4 ) ∈ R4 / x1 − 3x3 + 2x4 = 0}.
2 2

6 Hyperplans

Définition 11. On appelle hyperplan d’un e.v. E le noyau d’une forme linéaire non nulle ϕ sur E.

Si H = ker ϕ est un hyperplan de E alors on dit que ϕ ou ϕ(x) = 0 est une équation de H.

Proposition 12. H est un hyperplan d’un K-e.v. E si, et seulement si, il existe une droite D telle que
E = H ⊕ D.

Une droite est un s.e.v. de dimension 1, i.e. un s.e.v. engendré par un seul vecteur non nul.

Preuve. On a H = ker ϕ où ϕ est une forme linéaire non nulle sur E. Il existe donc a ∈ E avec a 6= 0 tel
que ϕ(a) 6= 0. Posons D = Ka = hai et montrons que E = H ⊕ D.

8
Soit x ∈ H ∩ D. Il existe λ ∈ K tel que x = λa et ϕ(x) = λϕ(a) = 0. On déduit que λ = 0 et
donc x = 0. Par suite H ∩ D = {0}.
Montrons que E ⊂ H + D.
ϕ(x)
Soit x ∈ E, le vecteur y = x − a appartient à H = ker ϕ car ϕ(y) = 0. Par suite
ϕ(a)

ϕ(x)
x=y+ a ∈ H + D.
ϕ(a)
On déduit que E = H ⊕ D.

Réciproquement, soit H un s.e.v. de E supplémentaire d’une droite D = Ka avec a ∈ E et a 6= 0.


Autrement dit E = H ⊕ D. Montrons que H est un hyperplan de E.
Considérons l’application
ϕ : E = H ⊕ D −→ K
x = h + λa 7−→ ϕ(x) = λ.
C’est une forme linéaire non nulle (car ϕ(a) = 1) dont le noyau est

ker ϕ = {x = h + λa ∈ E = H ⊕ D / ϕ(x) = 0},


= {x = h + λa ∈ E = H ⊕ D / λ = 0},
= H.

On déduit que H est bien un hyperplan de E.

Remarque 2. Les résultats précédents sont valables que E soit de dimension finie ou non.

Dans le cas d’un espace vectoriel de dimension finie, un hyperplan peut-être défini de la manière
suivante.

Proposition 13. Dans un K-e.v. E de dimension finie n, H est un hyperplan de E si, et seulement si,
H est un s.e.v. de dimension n − 1 de E.

Preuve. Soit H un hyperplan de E. Il existe une forme linéaire non nulle ϕ : E → K telle que
H = ker ϕ. On a Im ϕ 6= {0} et Im ϕ ⊂ K. Par suite 1 ≤ rg ϕ ≤ dim K = 1 c’est-à-dire rg ϕ = 1.
D’après le théorème du rang

dim E = dim(ker ϕ) + rg ϕ = dim H + rg ϕ.

On déduit que
dim H = dim E − rg ϕ = n − 1.

Réciproquement, soit H un s.e.v. de dimension n − 1 de E. H admet une base {v1 , . . . , vn−1 } qui
peut se compléter en une base {v1 , . . . , vn } de E.
Pour tout x ∈ E, il existe α1 , . . . , αn ∈ K tels que x = α1 v1 + · · · + αn vn .
Considérons alors l’application ϕ : E → K définie par ϕ(x) = αn . Il est facile de vérifier que ϕ est
une forme linéaire et que ker ϕ = H. Donc H est un hyperplan de E.

9
7 Transposée d’une application linéaire

Définition 14. Soit f : E → F une application linéaire. La transposée de f est l’application linéaire
t
f : F ∗ −→ E ∗
ϕ 7−→ t f (ϕ) = ϕ ◦ f.

Explication
Pour ϕ ∈ F ∗ , l’application ϕ ◦ f : E → F → K est linéaire car composée de deux applications linéaires.
Donc ϕ ◦ f est bien dans E ∗ . Par suite l’application
t
f : F ∗ −→ E ∗
ϕ 7−→ t f (ϕ) = ϕ ◦ f.

est bien définie. De plus elle est linéaire. En effet, soient ϕ, ψ ∈ F ∗ et λ ∈ K,

t
f (ϕ + ψ) = (ϕ + ψ) ◦ f = ϕ ◦ f + ψ ◦ f = t f (ϕ) + t f (ψ).
t
f (λϕ) = (λϕ) ◦ f = λ(ϕ ◦ f ) = λ t f (ϕ).
Donc pour toute application f ∈ L(E, F ), sa transposée t f ∈ L(F ∗ , E ∗ ).

Propriétés 15. Soient E, F et G trois K-espaces vectoriels.

1. ∀f, g ∈ L(E, F ), ∀α ∈ K,
t t
(f + g) = f + t g,
t
(λf ) = α t f.

2. ∀f ∈ L(E, F ), ∀g ∈ L(F, G),


t
(g ◦ f ) = t f ◦ t g.

3. t (idE ) = idE ∗ .

4. ∀f ∈ Aut(E), t
f ∈ Aut(E ∗ ) et
(t f )−1 = t (f −1 ).

Preuve. Soient E, F et G trois K-espaces vectoriels.


1. Pour f, g ∈ L(E, F ) et α ∈ K, les applications t (f + g), t f + t
g et t
(αf ) sont toutes dans
L(F ∗ , E ∗ ).
De plus, pour tout ϕ ∈ F ∗ ,
t
(f + g)(ϕ) = ϕ ◦ (f + g),
= ϕ ◦ f + ϕ ◦ g,
t
= f (ϕ) +t g(ϕ),
= ( t f + t g)(ϕ).
On déduit que t (f + g) = t f + t g.

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De même
t
(αf )(ϕ) = ϕ ◦ (αf ),
= α(ϕ ◦ f ),
= α t f (ϕ),
= (α t f )(ϕ).
On déduit que t (αf ) = α t f.
2. Soient f ∈ L(E, F ) et g ∈ L(F, G). On a
g ◦ f ∈ L(E, G) ⇒ t
(g ◦ f ) ∈ L(G∗ , E ∗ ),

t
f ∈ L(F ∗ , E ∗ ) 
et ⇒ t
f ◦ t g ∈ L(G∗ , E ∗ ).
t
g ∈ L(G∗ , F ∗ )

Donc les deux applications linéaires t (g ◦ f ) et t f ◦ t


g ont même ensemble de départ et même
ensemble d’arrivée.
De plus, pour tout ϕ ∈ G∗ , on a
(t f ◦ t g)(ϕ) = t
f (t g(ϕ)),
t
= f (ϕ ◦ g),
= (ϕ ◦ g) ◦ f,
= ϕ ◦ (g ◦ f ),
t
= (g ◦ f )(ϕ).

On déduit que t (g ◦ f ) = t f ◦ t g.
3. Par définition,
t
(idE ) : E ∗ −→ E ∗
ϕ 7−→ t (idE )(ϕ) = ϕ ◦ idE = ϕ

On déduit que t (idE ) = idE ∗ .


4. Soit f ∈ Aut(E) i.e. f : E → E linéaire et bijective. On sait que t f ∈ End(E ∗ ), montrons que t f
est bijective.
Puisque f est bijective alors elle admet une bijection réciproque f −1 et on a
f ◦ f −1 = f −1 ◦ f = idE .

Par suite
t
(f ◦ f −1 ) = t (f −1 ◦ f ) = t (idE ).

D’après les propriétés (2) et (3),


t
(f −1 ) ◦ t f = t f ◦ t (f −1 ) = idE ∗ .

On déduit que t f est bijective et sa réciproque est t (f −1 ) c’est-à-dire


(t f )−1 = t (f −1 ).

11
8 Matrice de la transposée d’une application linéaire

Proposition 16. Soient E un K-e.v. de dimension n,


F un K-e.v. de dimension m,
B = {v1 , . . . , vn } une base de E,
C = {u1 , . . . , um } une base de F,
B ∗ la base de E ∗ duale de la base B,
C ∗ la base de F ∗ duale de la base C,
f ∈ L(E, F ) et M = M at(f, B, C) la matrice de f relativement aux bases B et C.
Alors la matrice de t f relativement aux bases C ∗ et B ∗ est t M.
Autrement dit
t
(M at(f, B, C)) = M at( t f, C ∗ , B ∗ ).

Preuve. Posons B ∗ = {f1 , . . . , fn } et C ∗ = {g1 , . . . , gm }. On a fi (vj ) = δij et gi (uj ) = δij .


Soit f ∈ L(E, F ), déterminons la matrice de t f relativement aux bases C ∗ et B ∗ .
Posons (aij )1≤i≤m, 1≤j≤n = M = M at(f, B, C).
On a m
X
f (vj ) = akj uk 1≤j≤n (1)
k=1

Posons aussi (bki )1≤k≤n, 1≤i≤m = M at( f, C , B ∗ ).


t ∗

On a n
X
t
f (gi ) = gi ◦ f = bki fk 1 ≤ i ≤ m.
k=1

Par suite n
X
(gi ◦ f )(vj ) = bki fk (vj ) = bji . (2)
k=1

De (1) on a
m
X
(gi ◦ f )(vj ) = gi (f (vj )) = akj gi (uk ) = aij . (3)
k=1

On déduit de (2) et (3) que

bji = aij ∀1 ≤ i ≤ m, ∀1 ≤ j ≤ n.

Ce qui signifie que


M at( t f, C ∗ , B ∗ ) = t M = t M at(f, B, C).

Exemple 2. On considère l’application linéaire

f: R3 −→ R2
(x, y, z) 7−→ (x − y, 2x + 3y + z).

Soient B = {v1 = (1, 1, 1), v2 = (0, 1, 2), v3 = (−1, −2, 0)} une base de R3 et C = {u1 = (1, 2),
u2 = (1, 1)} une base de R2 .

12
La matrice de f relativement aux bases B et C est
 
6 6 −9
M= .
−6 −7 10

Soit B ∗ = {f1 , f2 , f3 } la base de (R3 )∗ duale de la base B et soit C ∗ = {g1 , g2 } la base de (R2 )∗
duale de la base C.
On a fi (vj ) = δij et gi (uj ) = δij .
La transposée de f est l’application linéaire
t
f : (R2 )∗ −→ (R3 )∗
t
ϕ 7−→ f (ϕ) = ϕ ◦ f.

Déterminons la matrice N = M at( t f, C ∗ , B ∗ ) de t f relativement aux bases C ∗ et B ∗ .


Il s’agit d’écrire t f (g1 ) et t f (g2 ) dans la base B ∗ .
Posons t f (g1 ) = αf1 + βf2 + γf3 = g1 ◦ f et t f (g2 ) = α0 f1 + β 0 f2 + γ 0 f3 = g2 ◦ f.
On a d’une part
(g1 ◦ f )(v1 ) = αf1 (v1 ) + βf2 (v1 ) + γf3 (v1 ) = α
(g1 ◦ f )(v2 ) = αf1 (v2 ) + βf2 (v2 ) + γf3 (v2 ) = β
(g1 ◦ f )(v3 ) = αf1 (v3 ) + βf2 (v3 ) + γf3 (v3 ) = γ
D’autre part

(g1 ◦ f )(v1 ) = g1 (f (v1 )) = g1 (6u1 − 6u2 ) = 6g1 (u1 ) − 6g1 (u2 ) = 6


(g1 ◦ f )(v2 ) = g1 (f (v2 )) = g1 (6u1 − 7u2 ) = 6g1 (u1 ) − 7g1 (u2 ) = 6
(g1 ◦ f )(v3 ) = g1 (f (v3 )) = g1 (−9u1 + 10u2 ) = −9g1 (u1 ) + 10g1 (u2 ) = −9
Par suite α = 6, β = 6 et γ = −9.
De la même manière, on trouve α0 = −6, β 0 = −7 et γ 0 = 10.
On déduit que
 
6 −6
N =  −6 −7  = t M.
−9 10

Conséquences 1. 1. ∀M, N ∈ Mn,m (K), ∀α ∈ K,


t t
(M + N ) = M + t N,
t
(αM ) = α t M.

2. ∀M ∈ Mn,p (K), ∀M ∈ Mp,m (K),


t
(M N ) = t N t M.

3. t (idE ) = idE ∗ .

4. ∀M ∈ Mn (K) inversible
t
(M −1 ) = (t M )−1 .

13
Preuve.
1. Soient f l’application linéaire de K m dans K n associée à M et g l’application linéaire de K m dans
K n associée à N relativement aux bases canoniques Em de K m et En de K n . On a
t
(M + N ) = t
(M at(f, Em , En ) + M at(g, Em , En )),
= t
(M at(f + g, Em , En )),
= (M at( t (f + g), En∗ , Em∗ )),
= M at( t f + t g, En∗ , Em∗ ),
= M at( t f, En∗ , Em∗ ) + M at( t g, En∗ , Em∗ ),
= t
(M at(f, Em , En )) + t (M at(g, Em , En )),
t
= M + t N.
On a aussi
t
(αM ) = t
(αM at(f, Em , En )),
= t
(M at(αf, Em , En )),
= M at( t (αf ), En∗ , Em∗ ),
= M at(α t f, En∗ , Em∗ ),
= α M at( t f, En∗ , Em∗ ),
= α t (M at(f, Em , En ),
= α t M.
2. Soient f l’application linéaire de K p dans K n associée à M et g l’application linéaire de K m dans
K p associée à N. La composée f ◦ g est l’application linéaire de K m dans K n associée à M N. On a
t
(M N ) = t
(M at(f, Ep , En ) · M at(g, Em , Ep )),
= t
(M at(f ◦ g, Em , En ),
= M at( t (f ◦ g), En∗ , Em∗ ),
= M at( t g ◦ t f, En∗ , Em∗ )
Or
t
g ◦ t f : (K n )∗ −→ (K p )∗ −→ (K m )∗
En∗ Ep∗ Em∗
Donc
t
(M N ) = M at( t g, Ep∗ , Em∗ ) · M at( t f, En∗ , Ep∗ ),
= t
(M at(g, Em , Ep )) · t (M at(f, Ep , En )),
t
= N t M.
3. Soit f l’isomorphisme de K n dans K n associé à M. On a
t
(M −1 ) = t
(M at(f −1 , En )),
= M at( t (f −1 ), En∗ ),
= M at(( t f )−1 , En∗ ),
= (M at( t f, En∗ ))−1 ,
−1
= [ t (M at(f, En ))]
= ( t M )−1 .

14

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