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NUMÉRIQUE
LE JOURNALISME
NUMÉRIQUE
2e édition entièrement mise à jour
Alice Antheaume
Catalogage Électre-Bibliographie (avec le concours de la Bibliothèque de
Sciences Po)
Le journalisme numérique / Alice Antheaume. – 2e édition entièrement
mise à jour. – Paris : Presses de Sciences Po, 2016. – (Nouveaux débats,
no 43).
RAMEAU :
– Journalisme électronique
DEWEY :
– 070.4 : Journalisme
Avant-propos 11
Chapitre 1
OBJECTIF WEB 13
Le numérique, un point c’est tout 13
L’impact du numérique sur la fonction
journalistique 15
Le virage des rédactions 21
Chapitre 2
ATTENTION TRAVAUX 29
Jouer collectif 29
Organiser la veille journalistique 33
Enquêter sur un nouveau terrain 35
Jongler avec les données 40
Explorer tous les formats éditoriaux 45
« Boucler » en permanence 52
Connaître l’audience 54
Reconnaître ses erreurs 56
Apprendre le code 59
Monter des projets 63
Chapitre 3
LA REINE AUDIENCE 67
L’hyper choix en ligne 68
L’audience au stéthoscope 77
La foire aux contributions 89
Leçons d’interaction 96
6 LE JOURNALISME NUMÉRIQUE
Chapitre 4
MOBILE TOUTE 103
La bascule de l’ordinateur au téléphone 104
Quand les rédactions tentent le tout
pour le mobile 108
La partition des jeunes 112
La bataille du push 115
L’accélération sur mobile 120
Chapitre 5
AVIS DE PRESSION TEMPORELLE 123
Petite histoire du temps réel 124
Rédactions en quête de synchronisation 133
Les autres temps de l’information 138
Chapitre 6
FENÊTRE SUR RÉSEAUX SOCIAUX 147
Des maîtres de la distribution des contenus 148
Des royaumes du partage 152
Des viviers de témoignages amateurs 156
Des sources d’alertes 165
Le pouls de l’audience 168
La délicate équation du journalisme
et des réseaux sociaux 170
SOMMAIRE 7
Chapitre 7
LES ROBOTS DE L'INFORMATION 175
Dans la peau d’un algorithme 175
Les robots de la hiérarchisation 180
Les robots de la diffusion 183
Les robots de la production 186
Fantasmes et frictions 190
Conclusion 195
Lexique* 199
27. Amy Davidson, « The Americans Meet the Internet », The New
Yorker, 10 avril 2014, www.newyorker.com/news/amy-davidson/
the-americans-meets-the-internet
OBJECTIF WEB 27
Jouer collectif
C’est le mot d’ordre du « réseau » de ces journalistes. Habitués
à changer d’équipes, voire de médias, à se croiser sur le terrain,
ils ont déjà travaillé ensemble et/ou savent qu’ils seront amenés
un jour ou l’autre à se côtoyer au sein de la même rédaction.
« Cela nous place dans une situation de “confrères-concurrents”
qui n’est finalement pas très différente de situations de repor-
tages ou d’événements où des dizaines de journalistes couvrent
la même chose 1... », relate Samuel Laurent, du Monde.fr.
6. www.icij.org
ATTENTION TRAVAUX 33
8. http://jaiunphysiquederadiofr.tumblr.com/
9. Propos tenus lors d’une master class à l’École de journalisme
de Sciences Po, 7 octobre 2015.
36 LE JOURNALISME NUMÉRIQUE
L’empreinte numérique
En ligne, rien, jamais, ne se perd. Même averti, même
précautionneux, nul ne peut naviguer sur le Web sans y
laisser de traces. Pour les journalistes d’aujourd’hui, c’est
une mine d’or, même si ce n’est pas nouveau. Preuve en est
le « portrait Google » réalisé en 2008 par la revue Le Tigre 11.
Le sujet du portrait est un dénommé Marc L., une personne
choisie au hasard par la revue, dont la vie est exposée dans
un article exclusivement écrit à partir de liens le concer-
nant sur Internet et sans qu’il ait jamais rencontré l’auteur
du papier. Celui-ci est rédigé comme s’il s’agissait d’une
lettre à Marc L., où le tutoiement est de rigueur : « Tu es
célibataire et hétérosexuel (Facebook). Au printemps 2008,
tu as eu une histoire avec Claudia R. qui travaille au Centre
culturel franco-autrichien de Bordeaux (je ne l’ai pas
retrouvée tout de suite, à cause du caractère “ü” qu’il faut
écrire “ue” pour Google). [...] En tout cas, je confirme, elle
est charmante, petits seins, cheveux courts, jolies jambes.
Tu nous donnes l’adresse de ses parents, boulevard V., à
Bordeaux. Vous avez joué aux boules à Arcachon, et il y
avait aussi Lukas T., le collègue de Claudia au Centre
culturel. » Cet exemple est révélateur de l’usage journalis-
tique possible de l’empreinte numérique.
Il n’y a pas, d’un côté, l’existence en ligne et de l’autre,
la vie hors ligne. Les deux se télescopent sans cesse. Les
photos de victimes de Daesh postées en décembre 2015
par Marine Le Pen sur son propre compte Twitter, suivi
alors par plus de 855 000 abonnés, constituent un
14. Mona Chalabi, « Could Latino Voters Decide the Next Ame-
rican President ? », The Guardian/Datablog, 25 janvier 2016,
www.theguardian.com/us-news/datablog/2016/jan/25/us-his
panic-latino-voters-us-election-2016
15. Heidi Blake et John Templon, « The Tennis Racket »,
Buzzfeed, 17 janvier 2016, www.buzzfeed.com/heidiblake/the-tennis-
racket?utm_term=.snQB7ew6Rn#.jrVv7ZalQJ
ATTENTION TRAVAUX 43
Des PDF, des textes, des chiffres, des photos qui, prétend
Le Monde, constituent « le plus gros “leak” [fuite*] de l’his-
toire [puisque] plus de 2 600 gigaoctets de données
secrètes 19 » ont été analysés avant d’être rendus lisibles,
via des articles, une vidéo publiée par The Guardian
(« comment cacher un milliard de dollars en cinq étapes
faciles 20 ») ou des graphiques animés présentant les
visages des personnages concernés et l’ampleur de leur
implication sur Lemonde.fr.
D’après le journaliste et développeur américain Adrian
Holovaty, fondateur du site d’information locale Every-
Block, « un graphique vaut mille mots. [...] Les journaux
doivent cesser de ne raconter l’actualité qu’en recourant
à des récits en texte 21 ».
Promesse d’une actualité moins périssable, d’une
investigation poussée et adaptée à l’ère numérique,
comptant sur la participation de l’audience, le journa-
lisme de données a de beaux jours devant lui. D’autant
que la quantité de données disponibles et encore inex-
ploitées promet du travail aux journalistes pour des
décennies. « Il faudra de moins en moins de gens pour
rassembler l’information, mais il en faudra de plus en plus
pour analyser ces milliards de tétraoctets et découvrir la
valeur qu’ils recèlent. [...] Certains des postes les plus
Vidéos à gogo
Et si les vidéos supplantaient le texte ? À voir les chif-
fres astronomiques de consultation de vidéos en ligne, on
pourrait le croire. Selon Médiamétrie, en avril 2016 en
France, 35 millions d’internautes 24 ont regardé au moins
une vidéo en ligne depuis un ordinateur, soit trois inter-
nautes sur quatre. Ils passent en moyenne six heures et
treize minutes à visionner ces vidéos en ligne. Un engoue-
ment qui n’intègre pas la lecture de vidéos sur mobile,
laquelle explose pourtant. Près de 60 % de la population
française consultent des vidéos plusieurs fois par jour,
37. Neil Perkin, « The Quartz Curve », Only Dead Fish, 10 octobre
2014, www.onlydeadfish.co.uk/only_dead_fish/2014/10/the-quartz-
curve.html
38. Lewis Dvorkin, The Forbes Model for Journalism in the
Digital Age, San Francisco (Calif.), Hyperink, 2012.
52 LE JOURNALISME NUMÉRIQUE
« Boucler » en permanence
En ligne, point d’heure de bouclage, comme dans les
journaux et magazines, ni de programmation horaire
comme à la radio ou à la télévision. L’impératif est de
traiter l’actualité en temps réel. C’est la rançon de la
promesse éditoriale suivante : les internautes doivent
trouver, chaque fois qu’ils se rendent sur un site ou sur
une application mobile, l’actualité la plus récente. Par
conséquent, le journaliste se trouve dans une situation
de bouclage permanent, un « contre-la-montre » impi-
toyable. Chaque minute engendre de nouvelles informa-
tions, lesquelles doivent être triées, vérifiées et
contextualisées avant d’être diffusées. Lorsqu’un article,
déjà en ligne, donc déjà visible par le lecteur, nécessite
une mise à jour, une poignée de secondes suffit au jour-
naliste pour se connecter à Internet, accéder au système
de publication et compléter l’information.
« Pourquoi doit-on se dépêcher de publier en pre-
mier ? », demande un étudiant lors d’un cours dispensé à
l’École de journalisme de Sciences Po. Cette cadence, évi-
dente pour les journalistes en activité, paraît saugrenue
vue de l’extérieur. Pourtant, être le « premier sur l’info »
– même si la primeur en question se joue parfois à une
courte tête – fait partie de la conquête de la légitimité en
ligne : il suffit que la publication précède de quelques
secondes celle d’un concurrent pour pouvoir en réclamer
la paternité. En ligne plus qu’ailleurs, le média qui a su
« dégainer » le premier construit sa crédibilité. Il gagne la
faveur d’être cité dans les pages de ses concurrents,
contraints de le mentionner s’ils souhaitent reprendre
ladite information.
ATTENTION TRAVAUX 53
Connaître l’audience
Autrefois, connaître son public – son âge, ses goûts, ses
habitudes, ses idées, ses lectures et ses comportements –
était du ressort du service marketing. Aujourd’hui, c’est un
principe fondamental du journalisme en ligne (voir le
chapitre 3).
Emily Bell, de l’École de journalisme de Columbia, à
New York, met les pieds dans le plat : « En classe, je pose
la question à mes étudiants : “Pour qui écrivez-vous ?”.
C’est une question nouvelle 40. » Elle précise : « Aupara-
vant, on ne leur demandait rien de tel, car prévalait encore
le syndrome, très ancré dans la culture journalistique
fera pas, tel quel, le titre d’un article. Et cela ne sera peut-
être jamais imprimé dans le journal 44. »
Dans la panoplie du parfait journaliste en ligne figure une
autre aptitude, qui n’est enseignée nulle part : la capacité à
reconnaître ses erreurs. Et cela arrive, même aux meilleurs.
La rédaction de Politico, par exemple, admet avoir écrit des
centaines de fois « nous sommes désolés » après que des
informations, incomplètes ou fausses, ont été publiées. Celle
de Upworthy s’est fendue d’une charte éditoriale dans
laquelle Eli Pariser, son fondateur, stipule que les rédacteurs
doivent « mettre le même soin à rendre virales nos excuses
que nos autres articles », ce qu’il faut comprendre comme
une injonction à les diffuser largement, réseaux sociaux
compris (voir le chapitre 6).
Mike DeBonis, reporter au Washington Post, conseille,
en cas d’erreur sur Twitter, de faire une capture d’écran
du tweet erroné et d’en écrire un nouveau pointant vers
la capture d’écran assortie d’un commentaire comme « j’ai
écrit cela mais en fait... ». Et quand il lui arrive de sup-
primer un message sur les réseaux sociaux, il ne le fait
pas en douce. Il s’en explique aussitôt 45.
Faire amende honorable et ne pas se cacher derrière
son petit doigt : c’est ainsi que le journaliste annihile les
éventuelles tensions avec son public. Ce n’est malheureu-
sement pas toujours appliqué. Lors des attentats du
13 novembre 2015, à Paris, le site du Point mentionne le
passeport égyptien de Waleed Abdel Razzak, retrouvé près
du Stade de France. Il n’en faut pas plus pour qu’il soit
44. Ibid.
45. Propos tenus lors du festival South by Southwest, mars
2016.
ATTENTION TRAVAUX 59
« On n’a pas le droit à l’erreur, mais dire qu’il n’y a pas d’erreur
est une imposture 46. »
Laurent Guimier, directeur de France Info.
Apprendre le code
Il est impossible d’informer les lecteurs sans maîtriser
la technologie. Les journalistes numériques le savent
bien : ils ont besoin d’apprendre les grands principes de
quelques langages informatiques, comme le PHP, le
HTML*, le Javascript, le XML, et autres. Il ne s’agit pas
d’être développeurs, ces ingénieurs qui agissent en cou-
lisses, « sous le capot » des sujets éditoriaux, en œuvrant
à l’accessibilité des contenus pour le public et à la flui-
dité des interfaces. Mais plutôt de parler la même langue
qu’eux pour pouvoir fabriquer de nouveaux projets,
construire une application mobile, développer un lecteur
de vidéos aux couleurs d’un média, monter un news-
game, ou redessiner les pages d’un site d’information.
Le déluge
Plus de 400 heures de vidéos sont mises en ligne
chaque minute sur YouTube 1 ; 350 millions de photos et
4,5 milliards de likes sont publiés chaque jour sur Face-
book ; plus de 1,21 million d’applications sont disponi-
bles dans l’App Store, et 1,43 milliard sur Google Play,
l’équivalent de l’App Store pour les terminaux Android ;
sans parler des 118 milliards d’emails quotidiens envoyés
dans le monde 2. Ces chiffres disent le gigantisme de ce
flux de données devenu ingérable, les big data*. « À
l’aube de l’an 2020, il y aura 10,4 zettaoctets, soit
3. Ibid.
4. Nick Bilton, I Live in the Future and Here’s How it Works,
New York (N. Y.), Crown Business, 2010, p. 145.
70 LE JOURNALISME NUMÉRIQUE
7. Ibid.
8. Propos tenus à la conférence DLD à Munich, janvier 2015.
74 LE JOURNALISME NUMÉRIQUE
L’audience au stéthoscope
En France, sur 66,6 millions d’habitants, dont 84 % ont
accès à Internet 14, les consommateurs d’information en
ligne butinent à toutes les fleurs : les sites de presse, les
pure players, des applications nées au sein de groupes
audiovisuels (France TV Info, BFM TV), les sites régio-
naux, d’information locale, les sites de la presse spécia-
lisée, et bien sûr, les agrégateurs d’informations (Yahoo!,
MSN, Orange, Google Actualités).
Dans cet environnement numérique sophistiqué, qui
parvient à faire le tri entre des informations venues des
sites de presse, celles des chaînes de télévision, des pure
players, des entreprises de téléphonie et de technologie,
sans parler des contenus produits par des marques de
boisson ? Pour tout dire, c’est le grand flou en ligne. Selon
le « Digital News Report » annuel du Reuters Institute for
the Study of Journalism, qui porte sur 26 pays, dont la
France, « les nouvelles marques du numérique sont surtout
utilisées comme deuxième source d’information et pour
des sujets d’actualité moins brûlants. Le recours aux infor-
mations en ligne se fait avant tout via des acteurs dont le
Engagez-vous, rengagez-vous !
Tous ces indices sont regroupés dans un mot fourre-
tout, l’« engagement* ». Ce terme qui, à l’origine, désigne
les fiançailles en anglais qualifie la nouvelle relation entre
lecteurs et journalistes, les types d’interaction entre le
public et les informations, ainsi que leur mesure (taux de
partage d’un article, nombre de vidéos vues, etc.).
« L’engagement est une notion centrale pour comprendre
l’audience 19 », explique Samantha Barry, directrice des
20. Ibid.
LA REINE AUDIENCE 81
24. Ibid.
25. Propos tenus lors de la conférence sur les nouvelles prati-
ques du journalisme, organisée par l’École de journalisme de
Sciences Po, 2 décembre 2011.
84 LE JOURNALISME NUMÉRIQUE
36. Ibid.
37. Entretien avec l’auteure, février 2016.
38. Franck Nouchi, « Le commentateur et le modérateur »,
Lemonde.fr, 19 mars 2016, www.lemonde.fr/idees/article/2016/
03/19/le-commentateur-et-le-moderateur_4886233_3232.html
90 LE JOURNALISME NUMÉRIQUE
45. Justin Ellis, « What Happened after 7 News Sites Got Rid
of Reader Comments », Nieman Lab, 16 septembre 2015,
www.niemanlab.org/2015/09/what-happened-after-7-news-
sites-got-rid-of-reader-comments/
46. Alice Antheaume, « La chasse aux trolls s’organise »,
Slate.fr/Work In Progress, 4 novembre 2010, http://blog.slate.fr/
labo-journalisme-sciences-po/2010/11/04/la-chasse-aux-trolls-
sorganise/
47. Stéphane Foucart, « Comment les “trolls” radicalisent
l’esprit des lecteurs sur Internet », Lemonde.fr, 14 février 2013,
www.lemonde.fr/sciences/article/2013/02/14/comment-les-
trolls-radicalisent-l-esprit-des-lecteurs-sur-internet_1832973_
1650684.html
LA REINE AUDIENCE 95
Leçons d’interaction
Le « journalisme citoyen » est un vœu pieu qui n’existe
pas. Un amateur, même aguerri, ne peut livrer clé en main
un article avec titre, chapeau, etc. Il ne sait pas, à coup
50. Ibid.
LA REINE AUDIENCE 97
La moissonneuse médiatique
« Facebook it or it never happened » (publie-le sur
Facebook ou on ne croira pas que c’est arrivé). Cette
petite phrase reflète ce qui est devenu un réflexe uni-
versel : photographier sa vie et la documenter en ligne.
Quand c’est l’anniversaire du petit neveu, cela n’a guère
d’importance. Mais lorsque c’est une manifestation, un
concert ou, plus grave, une fusillade, cela intéresse sou-
dain beaucoup de médias.
L’enjeu pour eux est d’utiliser le plus vite possible ces
images anonymes, repérées en ligne. Certaines chaînes de
télévision ont même recruté des salariés à plein-temps
pour les récupérer. C’est une véritable lutte pour obtenir
l’aval de leurs auteurs, sachant que le premier journaliste
arrivé est souvent le premier servi. Mais, pour ces produc-
teurs d’images amateurs qui ont l’impression de voir
98 LE JOURNALISME NUMÉRIQUE
Le journalisme de conversation
Les journalistes sont démoralisés de lire des commen-
taires trop souvent au « ras-des-pâquerettes », tandis que
les producteurs de contenus amateurs nourrissent une
défiance croissante à l’encontre des journalistes. Et si la
solution venait du « journalisme de conversation » ?
100 LE JOURNALISME NUMÉRIQUE
23. Ibid.
24. Joseph Lichterman, « What The Guardian Learned from Its
First Live WhatsApp Live Chat », Nieman Lab, 18 décembre
2015, www.niemanlab.org/2015/12/what-the-guardian-learned-
from-its-first-whatsapp-live-chat/
25. Propos tenus lors de la conférence DLD à Munich, janvier
2015.
MOBILE TOUTE 111
médias 31. Dans cette course pour séduire les jeunes, les édi-
teurs sont persuadés que la réponse s’appelle Snapchat,
l’application aux 150 millions d’utilisateurs actifs quoti-
diens, devenue incontournable dans le paysage médiatique
sur mobile 32. Lancée en janvier 2015, sa page réservée aux
informations, « Discover », accueille les contenus de
dizaines d’éditeurs triés sur le volet, dont CNN, Fusion, Mas-
hable, The Daily Mail, Cosmopolitan, Buzzfeed, People, MTV
et National Geographic 33. Y sont publiés chaque jour des
centaines de reportages éphémères, d’une durée de vie de
24 heures, faits sur mesure pour Snapchat. Ces contenus
sont vus par plus de 60 millions de personnes chaque mois.
« Notre audience passe de plus en plus de temps sur mobile et
sur les plates-formes communautaires. Snapchat est devenu
un élément clé pour nous puisque nous savons qu’il est
utilisé par une audience jeune, diversifiée, qui y consacre
une grande partie de son temps 34 », explique Daniel
Eilemberg, vice-président de Fusion.
Ce temps de consultation est d’autant plus regardé par
les éditeurs que, sur Snapchat, il atteint des sommets. Sur
Snapchat même, les utilisateurs restent accrochés environ
25 à 30 minutes 35. Sur « Discover », les meilleures chaînes
La bataille du push
Dans l’univers mobile, il faut compter avec les notifi-
cations, aussi appelées pushs*, ou alertes envoyées sur les
téléphones qui s’affichent à l’écran comme un SMS. Dans
la seule matinée du 10 février 2016, entre 6 et 13 heures,
un smartphone a pu recevoir 66 pushs de divers médias
français, annonçant ici la victoire de Bernie Sanders et
Donald Trump aux primaires républicaines dans le New
Hampshire, aux États-Unis, là un accident de car scolaire
dans le Doubs, en France, ou encore la démission de
Laurent Fabius du quai d’Orsay. Cette matinée reflète la
bataille du push qui se joue, depuis plusieurs années déjà,
entre les médias, pour occuper les écrans mobiles.
L’objectif est simple : attirer le lecteur avec une informa-
tion importante, lui faire vivre un événement en direct,
lui proposer un résumé de la journée ou du week-end
écoulé, ou « rappeler [à son] bon souvenir la pertinence
de son média dans un marché extrêmement compétitif »,
relève le « Digital News Report 2015 38 ».
Dans le monde, la moitié des propriétaires de télé-
phones autorisent l’envoi de push. Aux États-Unis, 33 %
les acceptent « toujours » ou « souvent », 36 % « parfois »,
L’appât du live
Pour relater en temps réel des événements aussi diffé-
rents que des matchs de football, des débats politiques,
les primaires, des attentats, il y a, outre les pushs, un
format éditorial spécifique, le live, qui permet de mêler
textes, photos, vidéos, contenus issus des réseaux sociaux
et interactions avec l’audience.
Ce format, très exigeant en termes de ressources
humaines, est un « piège » à lecteurs. Selon les estimations,
il récolte au minimum 30 % du trafic d’un site d’informa-
tion généraliste. D’après Nico Pitney, éditeur exécutif du
Huffington Post, le live intéresse deux personnes sur trois.
« Imaginons trois types de lecteurs », détaille-t-il, « les pre-
miers veulent les éléments clés d’une information, une vue
d’ensemble solide qui corresponde à la lecture d’un article
traditionnel. Cette catégorie n’est pas intéressée par le déve-
loppement minute par minute ni par la couverture en live.
La deuxième catégorie connaît déjà l’essentiel de l’infor-
mation mais veut aussi les éléments clés et la couverture
en live. Le troisième type de lecteurs – et nous considérons
que c’est la majorité de nos utilisateurs – veut d’abord un
134 LE JOURNALISME NUMÉRIQUE
Le temps de la mobilité
En France, on recense plus de 72 millions de cartes SIM
en circulation, ce qui laisse penser que certains individus
possèdent plusieurs lignes. 92 % des habitants déclarent
disposer d’un téléphone mobile. C’est plus que ceux (89 %)
qui possèdent un téléphone fixe 25. En plein essor, ces télé-
phones donnent accès à des contenus d’actualité sous une
forme et une temporalité différentes de celles prévalant
sur les sites consultés depuis un ordinateur. Ils accompa-
gnent le consommateur d’informations du soir au matin
(voir le chapitre 4) et en toutes circonstances, à la diffé-
rence de l’ordinateur, plus encombrant, privilégié pendant
les heures de travail.
Le temps passé sur les mobiles est exponentiel. Aux
États-Unis, un utilisateur de téléphone passe en
moyenne 26 heures par mois à consulter, depuis son
mobile, les réseaux sociaux « pour se tenir au courant,
de l’actualité, la culture, la vie de sa famille et de ses
amis », et près de 20 heures sur les applications de diver-
tissements (musique, cinéma, clips, etc.) lors des
moments libres, selon le rapport 2015 de Comscore. Ces
chiffres ne cessent d’augmenter.
Après les attentats de janvier 2015 à Charlie Hebdo,
l’application mobile de BFM TV, dont le slogan est « prio-
rité au direct », est téléchargée en masse, note Julien
Mielcarek, rédacteur en chef numérique du groupe Next-
Radio TV. Selon lui, l’appétit pour le live, où que l’on soit,
est indépassable. « En fonction de l’ampleur de l’actualité,
nous nous ruons sur notre smartphone », indique-t-il lors
Le temps de la déconnexion
Saturés d’informations, toujours joignables, souvent
incapables de poser des limites aux nouvelles technolo-
gies, les utilisateurs ressentent parfois l’envie de « fermer
le robinet ». Or il devient rare, voire exceptionnel, de dis-
poser de moments hors réseau. Les hôtels de luxe propo-
sent des séjours hors ligne à ceux qui, éreintés par ce fil
à la patte perpétuel, veulent s’offrir une retraite. La fon-
datrice du Huffington Post, Arianna Huffington, en fait
un cheval de bataille et qualifie « les effets engendrés par
notre connexion à la technologie 24 h/24 [de l’]un des
plus grands problèmes de l’ère moderne 36 ».
Certains prennent la tangente, comme cette femme de
43 ans, Isabelle Ducau, résidant dans la région lyonnaise,
qui raconte dans une tribune que, pour elle, « éviter les
actualités est devenu un réflexe [...]. Si je tombe sur
France Inter, je zappe. France Info, n’en parlons pas.
Radio Isa, une radio locale, me convient, mais si le flash
arrive, je bascule sur une musicale. À quoi bon savoir
qu’il y a eu un braquage au tabac du coin ou qu’un
grand-père au volant a reculé sur son petit-fils ? Un sujet
m’intéresse ? Je me renseigne, mais je décide du moment.
Cela change tout 37 ».
4. Ibid.
5. Propos tenus lors de la conférence DLD à Munich, janvier 2016.
6. Nick Bilton, I Live in the Future and Here’s How it Works,
op. cit., p. 96.
150 LE JOURNALISME NUMÉRIQUE
par email, etc. C’est d’autant plus complexe que ces propa-
gations ne sont pas linéaires. Elles suivent des chemins
sinueux, qui ressemblent à « des forêts sur le Web », compo-
sées d’arbres de toutes tailles et de toutes formes, observe
Dao Nguyen 17, directrice de publication de Buzzfeed.
Les médias qui se montrent capables de suivre et de
comprendre ces nouveaux chemins de partage seront les
grands gagnants de demain. En effet, en analysant la
radiation des contenus en ligne, ils sauront comment tou-
cher des cercles au-delà des premiers lecteurs évidents, et
donc déployer une toile d’influence encore plus étendue.
En outre, les données ainsi récoltées vont servir aux
annonceurs, très preneurs de statistiques sur les perfor-
mances de diffusion de leurs campagnes publicitaires. Or
« un média sans données pour les publicités ciblées n’a
aucune chance de survie 18 », prévient Jeff Sonderman, le
directeur adjoint de l’American Press Institute.
Fournir le contexte
Combien d’erreurs regrettables ont-elles été commises
lorsque les images provenaient des réseaux sociaux ?
La publication d’une photo d’un tremblement de terre en
Chine de 2008 dans les pages de Libération pour illustrer
le séisme d’Haïti en 2010 en est un exemple. Cette image
est publiée au préalable sur le compte Twitter d’un indi-
vidu qui se prétend d’Haïti et que quelques médias et
agences photos reprennent à la hâte. L’urgence est mau-
vaise conseillère. Le 22 mars 2016, lors des attentats à
Bruxelles, iTélé diffuse à tort des images prises lors d’un
28. Ibid.
162 LE JOURNALISME NUMÉRIQUE
Surveiller le réseau
Surveiller ce qui se dit sur le réseau, sur Twitter, sur Face-
book, sur la plate-forme de blogs Medium permet de relever
ce qui provoque doutes et questions sur l’actualité. Les inter-
rogations soulevées en ligne, souvent légitimes, suscitent
parfois chez les journalistes un sursaut de scepticisme qui
s’avère salutaire pour éviter les dérapages évoqués plus haut.
La communauté en ligne a ainsi été la première à contester
la véracité de la photo montrant Ben Laden mort, en
mai 2011, et de certaines photos relatives au passage de
l’ouragan Sandy sur la côte Est des États-Unis, fin
octobre 2012. Tandis que des clichés se déversent en masse
sur les réseaux sociaux – sur Instagram, jusqu’à dix photos
Le pouls de l’audience
Plonger dans les réseaux sociaux aide à sentir le pouls de
l’audience, à savoir ce que pensent les lecteurs de telle ou
telle information. Ce n’est pas une science exacte ni même
une science tout court. Cela ressemble plutôt à un baromètre
perpétuel. Les journalistes doivent analyser les réactions qui
leur sont envoyées, via des tweets, des messages sur Face-
book, Snapchat, mais aussi tirer les leçons de l’absence de
réaction. « En janvier 2015, alors que la rédaction de Charlie
Hebdo était décimée, nous avons vu arriver sur divers
canaux des centaines de dessins d’hommage, à la fois
d’auteurs et d’anonymes », relate Pauline Croquet, respon-
sable des réseaux sociaux au Monde. « En novembre 2015,
quelques heures à peine après les attentats de Paris et de
Saint-Denis, une fois l’hébétude passée, des lecteurs saturent
nos messageries privées de dessins pour exprimer colère,
chagrin et solidarité [...]. Pour les attentats de Bruxelles,
nous avons reçu beaucoup moins de messages spontanés
[...]. Si le sentiment de deuil était assez unanime en
novembre, cette fois-ci de nombreuses dissonances se font
entendre dans les commentaires : “Pourquoi parlez-vous
plus de cet attentat plutôt que d’un autre ?” 35. »
42. Aurélien Viers, « Il était une fois les journalistes sur Twitter »,
Slate.fr/Work In Progress, 19 juillet 2011, http://blog.slate.fr/
labo-journalisme-sciences-po/2011/07/19/il-etait-une-fois-les-
journalistes-sur-twitter/
43. Jeff Bercovici, « WSJ to Staff Twits : Don’t Be Stupid », Dai-
lyfinance, 3 juin 2009.
FENÊTRE SUR RÉSEAUX SOCIAUX 173
L’ordonnance de Google
Prédominant sur la planète numérique, Google fonc-
tionne avec plusieurs algorithmes, certains pour le mobile,
d’autres pour l’ordinateur, dont l’un, le plus célèbre, a son
petit nom. Il s’appelle « Page Rank », et il décide quelles
sont les pages qui remontent à la suite d’une requête sur
un mot-clé. Dans quel ordre ? Impossible de le dire, car
la formule de cet algorithme est le secret le mieux gardé
du Web. Ses règles sont changées près de 600 fois par an.
De quoi rendre folles les rédactions, car de ces règles
dépend la visibilité des articles. En France, Google est
utilisé par 95 % de la population internaute, et 90 % des
clics sur Google s’effectuent sur la première page des
résultats, c’est dire si le moteur de recherche a du poids.
« Le monde vu par Google est un univers méritocratique
qui confère une visibilité disproportionnée aux sites Web
les plus reconnus », regrette Dominique Cardon. « Il fait
de la planète numérique le terrain d’une gigantesque
compétition pour l’excellence et réserve aux élus un
minuscule nombre de places 5. »
On lui prête même de « l’influence sur les résultats élec-
toraux 6 », car il agirait sur les électeurs indécis. Lorsque
ceux-ci cherchent à savoir pour qui voter, ils s’informent
sur le Web. En fonction des résultats affichés par Google,
ils ont tendance à pencher pour un camp ou un autre. Pour
Politico, cela pourrait même « truquer l’élection
5. Ibid., p. 94.
6. Charles Cuvelliez, « De l’influence de Google sur les résultats
électoraux », Le Monde, 27 janvier 2016, www.lemonde.fr/idees/
article/2016/01/27/de-l-influence-de-google-sur-les-resultats-
electoraux_4854577_3232.html
178 LE JOURNALISME NUMÉRIQUE
11. Will Oremus, « Who Controls Your Facebook Feed », art. cité.
12. Propos tenus à la conférence DLD à Munich, janvier 2015.
LES ROBOTS DE L'INFORMATION 181
14. Nikki Usher, « Why SEO and Audience Tracking Won’t Kill
Journalism as We Know It ? », Nieman Lab, 14 septembre 2010,
www.niemanlab.org/2010/09/why-seo-and-audience-tracking-
won%E2%80%99t-kill-journalism-as-we-know-it-2/
15. Propos tenus lors d’une master class à l’École de journalisme
de Sciences Po, 23 septembre 2015.
184 LE JOURNALISME NUMÉRIQUE
Fantasmes et frictions
Toutefois, du côté des rédactions, les journalistes
s’inquiètent de se voir imposer des choix éditoriaux qui ne
sont pas les leurs, qui n’ont pas leur « patte ». Qui plus est,
lorsque ces choix sont régentés par des géants américains,
pas même humains. En outre, un robot travaille vite, ne dort
pas, ne prend pas de congés et... ne manifeste pas de mau-
vaise humeur. Face à l’automatisation grandissante de
l’information, la perplexité des journalistes s’inscrit dans un
contexte plus large : plus des deux tiers des Américains
vont voir leur profession se robotiser dans les cinquante
prochaines années. « Au XXe siècle, de nombreuses tâches
physiques et répétitives ont été automatisées. Au XXIe siècle,
ce sont les tâches intellectuelles qui vont l’être 27 », prédit
Robbie Allen, le président de la société Automated Insights,
qui fournit clés en main des articles rédigés par des algo-
rithmes à l’agence Associated Press ainsi qu’à Yahoo! News.
Ce discours créé des fantasmes dans l’esprit des jour-
nalistes qui voient leurs rédactions, dont les revenus se
26. Ibid.
27. Alice Antheaume, « SXSW 2016 : allô Austin, on a un pro-
blème », Slate.fr/Work In Progress, 16 mars 2016, http://blog.
slate.fr/labo-journalisme-sciences-po/2016/03/16/fatigue-a-south-
by-south-west-2016/
LES ROBOTS DE L'INFORMATION 191
Des livres
Jean-François Fogel et Bruno Patino, Une presse sans
Gutenberg, Paris, Grasset, 2005.
Jean-François Fogel et Bruno Patino, La Condition
numérique, Paris, Grasset, 2013.
Nick Bilton, I Live in the Future and Here’s How it
Works, New York (N. Y.), Crown Business, 2010.
Nikki Usher, Making News at « The New York Times »,
Ann Arbor (Mich.), The University of Michigan Press,
2014.
Bill Kovach et Tom Rosenstiel, The Elements of Jour-
nalism : What Newspeople Should Know and the Public
Should Expect, New York (N. Y.), Three Rivers Press,
2001.
Gérald Bronner, La Démocratie des crédules, Paris, PUF,
2013.
Dominique Cardon, À quoi rêvent nos algorithmes : nos
vies à l’heure des big data, Paris, Seuil, 2015.
Eric Schmidt et Jonathan Rosenberg, How Google
Works, Londres, John Murray, 2014.
198 LE JOURNALISME NUMÉRIQUE
Des sites
Columbia Journalism Review (Université de Columbia) :
cjr.org
Nieman Lab (Université d’Harvard) : niemanlab.org
Reuters Institute for the Study of Journalism (Univer-
sité d’Oxford) : reutersinstitute.politics.ox.ac.uk
Journalism.co.uk
La section Bits du New York Times : nytimes.com/
column/bits
La section data de The Guardian : theguardian.com/data
Poynter : poynter.org
Google Newslab : newslab.withgoogle.com
Adblock
Logiciel servant à bloquer l’affichage de publicités, qui
crée un manque à gagner pour les éditeurs (voir ce mot)
comptant sur les ressources des annonceurs.
Agence de presse
Il y a quatre agences de presse d’informations généralistes
dans le monde : l’Agence France presse (ou AFP) qui, comme
son nom l’indique, est française, la britannique Reuters,
l’américaine Associated Press (ou AP) et Bloomberg, égale-
ment américaine et plutôt axée sur les marchés financiers.
Elles ont ceci de particulier qu’elles vendent leurs contenus
(les dépêches, des vidéos, des photos, des vidéos, des info-
graphies) à des médias, à des entreprises et à des traders, qui
sont donc leurs clients.
Algorithme
Suite d’opérations qui mène à un résultat. Pour trier des
informations (Google, Facebook), recommander des
contenus (Netflix, Amazon), les algorithmes, conçus par
des développeurs (voir « développeur ») et le plus souvent
invisibles, sont omniprésents.
Application mobile
Logiciel développé pour les besoins d’une marque ou d’un
média, téléchargeable depuis l’App Store (le « magasin »
d’Apple où l’on trouve des applications disponibles, gra-
tuites ou payantes) ou Google Play Store (l’équivalent de
l’App Store pour les téléphones autres que ceux fabriqués
200 LE JOURNALISME NUMÉRIQUE
Désintermédiation
Suppression des intermédiaires. Dans le domaine de
l’information, ce terme se réfère à la capacité des individus
à prendre la parole sur le réseau au travers des blogs, des
forums de discussion, des réseaux sociaux, sans attendre
d’y être invité par un intermédiaire, journaliste ou autre.
Développeur
Expert des langages informatiques (voir « code »), dont le
métier consiste à construire des interfaces, des services, des
sites Web, des algorithmes, des applications, bref, tout ce qui
fait « l’enveloppe » des contenus journalistiques en ligne.
Éditeur
Désigne, dans l’univers numérique, celui qui créé des
contenus et les édite. Un média est un éditeur, il est respon-
sable ce qu’il publie, par opposition aux hébergeurs et aux
plates-formes (voir ce mot) qui hébergent des contenus
mais n’en sont pas responsables a priori, selon la loi pour
la confiance dans l’économie numérique (voir « LCEN »).
Empreinte numérique
Ensemble des traces laissées sur le Web par des individus,
volontairement ou non, et renseignant leur identité, leurs
activités et leurs centres d’intérêts, leur parcours profes-
sionnel, les liens avec leurs proches.
Engagement
Terme utilisé très fréquemment pour qualifier la façon
dont l’audience interagit avec des contenus (temps passé,
nombre de vidéos vues, taux de partage, affinité avec la
rédaction). Plus l’engagement des lecteurs est fort, mieux
c’est pour le média.
Fact-checking
Vérifier les faits, le plus souvent en temps réel, par
exemple lorsqu’un homme politique fait des promesses
LEXIQUE 203
HTML
Acronyme de hypertext markup language, nom d’un stan-
dard informatique qui permet de faire transiter des don-
nées sur Internet.
Infobésité
Contraction des mots « information » et « obésité », le
terme désigne la surabondance d’informations à laquelle
est exposé tout individu sur Internet.
Journalisme de données ou data journalism
Pratique journalistique qui consiste à collecter des don-
nées sur un sujet, à les classer, à repérer des informations
intéressantes dans le tableur, et à les mettre en forme en
vue de rendre compte de ces informations.
LCEN
Acronyme de Loi pour la confiance dans l’économie
numérique. Approuvée par le Parlement français le
21 juin 2004, elle instaure notamment la responsabilité
limitée et a posteriori des hébergeurs.
Leak
Fuite, par exemple d’un document secret qui est porté à
la connaisance d’un journaliste.
Live
Abréviation de live-blogging. Format éditorial qui permet
de suivre, minute par minute, les dernières informations
disponibles soit sur un sujet soit sur l’actualité en général
(les informations du jour), au fur et à mesure qu’elles se
déroulent, en mélangeant mots, images, et interactions
avec l’audience. Cela ressemble à un chat sur une messa-
gerie instantanée entre une rédaction et ses lecteurs.
Live-tweeter
Raconter en direct un événement sur Twitter via une suc-
cession de tweets.
LEXIQUE 205
Métadonnées
Données sur les données, par exemple la taille en pixels
d’une image ou la date de modification d’un fichier.
Millennials
Génération née entre 1982 et 2004 dont la spécifité est
une utilisation accrue de la technologie et des services en
ligne.
Mobile
Terme anglo-saxon, très utilisé en France, qui désigne à
la fois le téléphone, la tablette, le smartphone, bref tout
ce qui permet de se connecter en situation de mobilité.
Modération
Action de veiller à la bonne tenue des échanges sur un
site d’informations ou au réseau social, et de supprimer,
si besoin, les commentaires hors-la-loi (racisme, xéno-
phobie, diffamation, insulte, etc.).
Newsfeed
« Fil d’actualités » en français. C’est le nom de la page
d’accueil de Facebook, où sont visibles les publications
de ses amis, et des médias que l’on suit, dont l’ordonnan-
cement est régi par un algorithme (voir « algorithme »).
Overlinkification
Néologisme anglo-saxon qui désigne la saturation de
l’espace en ligne par des liens.
Page vue
Indice de mesure de l’audience. Comptabilise le volume
de pages entièrement chargées par un internaute.
Partage
Indice de mesure, ou plutôt de popularité, d’un contenu.
Quand un internaute diffuse un contenu journalistique
sur un réseau social, on dit qu’il le partage. Cette action
expose aussitôt ce contenu à d’autres cercles de lecteurs.
206 LE JOURNALISME NUMÉRIQUE
Plate-forme
Désigne de façon générale les hébergeurs de contenus
comme YouTube, Facebook, Snapchat, etc., par opposi-
tion aux éditeurs (voir « éditeur »).
Point Godwin
Terme issu de la loi Godwin, énoncée par l’avocat amé-
ricain Mike Godwin. Point de non-retour dans les
commentaires, moment où la discussion déraille, par
exemple lorsqu’un internaute trouve le moyen de faire
référence au nazisme ou à Adolf Hitler.
Pure player
Publication qui n’existe qu’en ligne, sans support phy-
sique imprimé.
Push
Alerte envoyée à l’occasion d’une information urgente, le
plus souvent sur les téléphones, ou par email.
Reach
Part de la population internaute touchée par un média
pendant une période définie.
Search
Désigne la recherche sur Internet, et par conséquent,
l’accès à un contenu référencé sur un moteur de recherche.
SEO
Acronyme de search engine optimization, l’optimisation
pour les moteurs de recherche. Ensemble de techniques
utilisées pour améliorer le référencement des contenus sur
les moteurs de recherche.
Smartphone
Téléphone disposant d’une connexion Internet et doté de
fonctions telles que le calendrier, l’accès aux messageries,
la navigation sur le Web, la géolocalisation (voir ce mot).
LEXIQUE 207
SMO
Acronyme de social media optimization, l’optimisation
pour les réseaux sociaux. Ensemble de techniques utili-
sées pour améliorer la visibilité des contenus sur les
réseaux sociaux (voir « newsfeed »).
Taguer
Identifier une photo, une vidéo, un texte, avec des mots
(les nom et prénom de la personne représentée sur la
photo, le lieu, etc.).
Temps réel
Acheminement de l’information de la façon la plus rapide
possible, quasiment en même temps que les faits relatifs
à cette information se déroulent.
Trafic
Nombre de personnes qui se connectent sur un site
d’information ou un réseau social. On parle de « journée
à fort trafic » lorsque l’audience est massivement présente.
Troll
Utilisateur nuisible qui commente à tout va et n’importe
comment dans le but d’étouffer le débat.
UGC
Aronyme de user generated content, c’est-à-dire les
contenus générés par les utilisateurs.
URL
Acronyme d’uniform resource locator. Système de notation
de caractères qui permet d’identifier la localisation de la
page Web recherchée. Une URL s’écrit souvent selon le
modèle suivant : http://www.nomdusite.fr/nomdelapage.
Veille
Tâche journalistique, sorte de vigie qui sert à repérer une
information nouvelle, un événement à suivre, via ses
sources, les réseaux sociaux, les blogs, les forums, les
concurrents, les agences de presse (voir ce mot).
Version « beta »
Période de test pour un service en ligne, pendant laquelle
sont identifiés les bugs qui doivent être corrigés au fur et
à mesure.
Vertical
Terme utilisé pour désigner une rubrique en ligne
(rubrique divorce, section élection présidentielle, dossier
corruption, etc.).
Viralité
Un contenu viral est un contenu qui a vocation à beau-
coup « tourner » sur le réseau, à être diffusé largement, à
bénéficier d’un fort taux de partage (voir ce mot), et donc
à être lu par une large audience.
VU ou visiteur unique
Unité de mesure de l’audience, Graal des sites Web pour
le marché publicitaire, l’expression désigne un individu
qui a cliqué sur le contenu d’un site au moins une fois
pendant la période mesurée – généralement un mois. Un
visiteur unique n’est donc pas vraiment unique, car il est
compté une seule fois même s’il surfe sur le site deux fois
dans la journée, la semaine ou le mois.