ASSISES

INTERNATIONALES
DU JOURNALISME
& DE L’INFORMATION
STRASBOURG
NOVEMBER 2010
M A G A Z I N E 16 - 18 NOVEMBER 2010

UN JOURNALISME
INTERNATIONAL, AN INTERNATIONAL,
EGALITARIAN
ÉGALITAIRE ET AND QUALITY
DE QUALITÉ ? JOURNALISM ?

YES,
WE CAN !
2 MAGAZINE

EDITORIAL
What are the necessary values, condi-
tions and innovations for journalism to
survive and to prosper in these challenging
times? Will our colleague Tamar from
the cover have the same opportunities to
become Editor-in-chief than her male and
white colleagues ? What will the journa-
lism she will be doing look alike ?
Quality journalism needs time, finances,
freedom to operate, diversity, vision,
knowledge and a lot of passion. With our
coverage of the Assises internationales du
journalisme et de l’information, we have found
lots of this united in the speakers and par-
ticipants. They are setting a course for the
future of journalism – and it is even more
us, the young journalists, who will be living
the developments which were discussed
during these inspiring three days.
For the better of journalism to become
reality, we want to see the courage every Photo: Louis Villers (France)
one was calling for - with more internatio-
nal perspective, crossmedial approaches, le Syndicat de la Presse Quotidienne Régio-
minority coverage, new models for finan- Alexis Sarini (France) nale (34 titres) a créé un kiosque sur iPad avec
cing, investements in quality journalism, et Vincenzo Sassu (Italie)
près de 300 titres en vente sur une seule et
and us and you as journalists doing our même application. « Nous vendons près de
job as the incarnation of the fourth pillar L’information mobile va-t-elle révolutionner 1000 journaux par semaine, et ce chiffre est
of democracy.
notre manière de produire et consommer en constante augmentation » précise Vincent
For the sixteen participants of the workshop, l’information ? C’est la question que se sont de Bernardi, directeur du SPQR.
Sebastian Olényi, editor-in-chief. posés les journalistes invités à débattre aux L’iPad offre également la possibilité de
Assises Internationales du journalisme de redonner de la valeur à l’information. « Il faut
Strasbourg. Entre enthousiasme et réticences, remettre dans les mœurs que l’information
Quelles sont les valeurs, les conditions retour sur un débat d’actualité. n’est pas gratuite » explique Eric Villemin.
et les innovations nécessaires pour que L’information mobile matérialisée par les Pour autant, l’apport financier des lecteurs
le journalisme survive et prospère en ces
tablettes et les smartphones, provoque des n’est pas suffisant. La publicité reste une
temps difficiles ? Est-ce que notre collègue
Tamar, sur la couverture, aura la même pro- changements dans la manière dont l’utilisateur source importante de revenu : « Les études
babilité de devenir rédactrice en chef que consomme l’information. Eric Villemin, montrent que les utilisateurs sont moins
ses collègues hommes et blancs ? A quoi directeur des Echos explique que « l’utilisateur gênés par la publicité sur les tablettes. Elle est
ressemblera le journalisme qu’elle fera ? s’approprie beaucoup plus son iPad qu’un généralement mieux conçue, mieux intégrée,
Le journalisme de qualité a besoin de ordinateur. Il fait le choix de ses applications, et peut rendre des services » ajoute-t-il.
temps, de finances, de liberté d’action, de ses outils. L’utilisation est beaucoup plus
de diversité, de vision, de connaissance intuitive...». « C’est un peu comme un brosse à LES EXIGENCES ÉDITORIALES
et de beaucoup de passion. Avec notre D’APPLE
couverture des Assises Internationales dent. On ne prête pas son iPad » ajoute David
du Journalisme et de l’Information, nous Abiker. Une nouvelle manière de construire
avons trouvé beaucoup de ceci chez les des histoires est également apparue. France 24 « Tout évolue en permanence, raconte Benoît
intervenants et participants. Ils sont en a sorti récemment un webdocumentaire spé- Raphaël, consultant spécialiste du journalisme
train de prévoir le futur du journalisme cialement conçu pour iPad. « Cet outil permet participatif. Il y a une vraie continuité des écrans
– et c’est davantage nous, les jeunes de remettre l’écrit et l’histoire au centre. Il est avec des usages différents : les utilisateurs
journalistes, qui vivrons les développe- très simple, sans gadget, très linéaire. En terme passent beaucoup moins de temps à lire de
ments discutés durant ces trois journées
de narration, c’est plus proche du magasine l’info sur l’iPhone que sur l’iPad ». Une sérieuse
inspirantes.
Pour que l’amélioration du journalisme que du webdocumentaire » raconte Sarah question d’indépendance se pose également.
devienne réalité, les approches cross- Leduc et Zoé Lamazou, les auteures. Apple possède en effet un contrôle total sur le
médiales, la couverture de la question contenu qui est produit. Une commission est
des minorités, de nouveaux modèles de UN NOUVEAU MODÈLE chargé de valider la conformité de l’application
financement, les investissements dans le ÉCONOMIQUE par rapport à la charte. « Nous avons eu des
journalisme de qualité, et nous et vous discussions avec eux à cause du sujet de notre
comme journalistes, faisant notre métier
Le marché de l’iPad en quelques chiffres reportage[ndlr. Congo, la paix violée.], il a d’ailleurs
en tant qu’incarnation du quatrième pilier
de la démocratie. c’est 3 millions de vente mondiale dans les été interdit au moins de 12 ans. ». Toutefois,
trois premiers mois, 208 millions d’ici 2014 la sortie prochaine de la tablette Android par
Pour les seize participants de l’atelier, selon les prévisions. C’est un support incon- Google et d’autres concurrents devrait réduire
Sebastian Olényi, rédacteur en chef. tournable pour les médias. A titre d’exemple, la censure des industriels.
ASSISES INTERNATIONALES DU JOURNALISME & DE L’INFORMATION
16 - 18 NOVEMBER 2010 • STRASBOURG, FRANCE
LE PASSAGE DE TÉMOIN
EN SALLE DE RÉDACTION:
UNE AFFAIRE DE CHEFS
« LE MALHEUR, C’EST D’AVOIR UN CHEF » DISAIT-ON DANS LES
ANNÉES 70. QUARANTE ANS PLUS TARD, LA NÉCESSITÉ D’UNE AUTO-
RITÉ DANS LA RÉDACTION SE RÉAFFIRME. PAS COMME DÉMIURGE
MAIS PLUTÔT UN MÉDIATEUR, VOIRE UN PÉDAGOGUE, QUI INITIERAIT
LES NOUVELLES GÉNÉRATIONS AU TRAVAIL DE JOURNALISTE.
Licia Caglioni, Italie
Le débat s’inspire du dernier livret de la coll-
ection « Journalisme Responsable » publié
par l’Alliance International des Journalistes
en collaboration avec la fondation Charles
Leopold Mayer. L’auteur, Thomas Ferenczi,
débattait avec Christian Marie Mannot, Yves
Agnès, Eric Lagneau, Dominique Marchetti
sur les modalités et les contenus du passage
des consignes aux nouveaux journalistes.
Une fois terminée l’école de journalisme,
la formation des jeunes journalistes n’est
qu’un point de départ. Au-delà des connais-
sances théoriques, une partie essentielle du
métier ne peut s’apprendre que dans une
rédaction. Deux des compétences – dites
informelles – à transmettre aux novices: le
« Savoir faire » et le « Savoir être ».
Une ambiance de travail ouverte au
dialogue est fondamentale à la réussite du
premier. Pour cela, une autorité exigeante
est nécessaire. Avec des capacités de modé-
rateur, le chef de service devrait garantir
une ambiance professionnelle mais aussi,
de temps en temps, conviviale. Une qualité
telle qu’un regard attentif qui sache stimuler
l’échange parmi les confrères et promouvoir
une politique de formation permanente
devrait être incontournable.
De leur coté, les différents journaux ont
de plus en plus perdu leurs particularités,
tendant vers une standardisation, voire
une détérioration des « valeurs maison ».
Sérieux, rigueur professionnel et qualité,
vertus de base du métier, devraient s’ac-
compagner d’exemples célèbres qui ont
fait l’histoire du titre. Encore une fois, ça
serait au chef in primis, de donner voix à la
mémoire de l’entreprise qu’il dirige.
Des bons arguments, mais trop de
conditionnel. La salle reprend les interve-
nant en leur rappelant les expériences et
témoignages : « La réalité de certain grands
titres n’est pas celle du territoire, où les
cadres sont encore trop souvent détachés
et indiscutables.» Beaucoup reste à faire
pour que les premiers années de la pratique
journalistique ne se limitent pas à un micro-
trottoir quotidien.
En révisant l’expression libertaire avec
laquelle il a ouvert le débat, Yves Agnès
commente:« Le malheur est avoir un mau-
vais chef ». Si l’importance de cette figure
n’est pas soumise à discussion, c’est aussi
vrai que, malgré l’autorité qu’il incarne, il ne
devrait pas oublier la mission pédagogique
à laquelle il est appelé, en l’ajoutant aux «
valeurs maison » qui constituent l’identité
de son titre.
3
EUROPEAN YOUTH PRESS
European Youth Press is an umbrella
association of young journalists in
Europe. It involves more than 50,000
journalists working for university
magazines, Internet projects, radio
and video productions, or are interns
in editor-rooms, freelance journalists,
journalism students or trainees. With
print magazines or Blogs, PodCasts
and V-Casts, the association wants to
give young media makers from all over
Europe the opportunity to cooperate
directly with each other. Above all, the
aim of all member associations and the
umbrella structure is to inspire young
people to deal with media and take
an active part in society by fostering
objective and independent journalism.
ORANGE MAGAZINE
Fresh. Vibrant. Creative. Orange is a
youth-driven magazine dedicated to
tackling urgent international issues.
Writers and photographers from different
countries with diverse backgrounds
make this magazine unique. They create
multi-faced magazines with new and
interesting contents. Creating it means
having an exciting time in a quite unusual
environment. Reading it means getting
facts and opinions directly from young
and innovative journalists.
POWERED BY
WITH SUPPORT OF
IMPRINT
Publishers line:
Orange Magazine, European Youth
Press, Rue de la Tourelle 23,
BE-1040, Brussels, Belgium
Editor-in-chief:
Sebastian Olényi, Germany
Editorial staff:
Tamar Bouissou, France
Franziska Broich, Germany
Licia Caglioni, Italy
Victoria Graul, Germany
Romain Mielcarek, France
Adrian Morales Ramos, Spain
Eleonore Payro, Switzerland
Alexis Sarini, France
Vincenzo Sassu, Italy
Thomas Seymat, France
Dobriyana Tropankeva, Bulgaria
Louis Villers, France
Photos by:
Heikki Polonen, Finland
Layout:
Dumitru Iovu, Moldova
For photos and videos take a look on:
www.orangelog.eu
All articles do not necessarily represent the
opinions of the magazine.
4 MAGAZINE
UNE COUR EUROPÉENNE
DES DROITS DE L’HOMME
GÉNÉRATRICE D’ESPOIRS
LA COUR EUROPÉENNE DES
DROITS DE L’HOMME A ÉTÉ
CRÉÉE EN 1959 PAR LE CON-
SEIL DE L’EUROPE À STRAS-
BOURG. CHAQUE CITOYEN
PEUT LA SAISIR. VINCENT
BERGER EST CONSULTANT
EN DROIT DE LA COUR ET
ASSURE LA COHÉRENCE
DE SA JURISPRUDENCE
DEPUIS 30 ANS. IL VEILLE
AU RESPECT DE L’ÉGALITÉ
ENTRE LES ÉTATS ET ENTRE
LES JUSTICIABLES DANS UN
SOUCI DE SÉCURITÉ JURI-
DIQUE.
De Franziska Broich, Allemagne
Quel est le cas qui vous a le plus marqué
au cours de votre carrière ?
C’était la première affaire « Sunday
Times ». Il s’agissait de mettre en
balance la liberté d’expression des
médias et la défense des victimes de
la thalidomide, un médicament qui a
entraîné la naissance d´enfants mal
formés. Il fallait respecter l’impar-
tialité et la sérénité de la justice en
Angleterre. J’étais jeune a l´époque.
C’était ma première grande affaire
de liberté d’expression. Je l’ai trouvée
extrêmement intéressante, tant sur le
plan humain que juridique.
Est-ce que le travail a changé pendant
votre engagement ici?
En 30 ans ? Oui, beaucoup. Avant
1998, je travaillais dans l´ancienne
cour.
Ce qui m´a frappé, c´est l’extraordi-
naire élargissement géographique (de
20 a 47 états). Dans le même temps,
les aspects juridiques, géopolitiques,
bioéthiques, de protection de données,
de conflits armés, du respect des
minorités ont beaucoup évolué.
Une autre chose qui m’a énormé-
ment frappée, c´est l’article 9 de la
Convention qui protège la liberté de
religion, de pensée et de conscience.
L´article existe depuis plus de 40 ans,
mais n’est appliqué que depuis une
dizaine d’années.
FORMATION & CARRIÈRE
DE VINCENT BERGER
1966-1974: UNIVERSITÉ
PANTHÉON-ASSAS PARIS
II : DOCTORAT EN DROIT
ET DIPLÔME D’ÉTUDES
SUPÉRIEURES DE
SCIENCE POLITIQUE
1970-1972 : INSTITUT
D’ÉTUDES POLITIQUES
DE PARIS, DIPLÔME
1975-1977: ATTACHÉ À LA
DIRECTION GÉNÉRALE
D’ENTREPRISE JEAN
LEFEBVRE
1977: CHARGÉ
DE MISSION À LA
DÉLÉGATION À L’EMPLOI,
MINISTÈRE DU TRAVAIL
Comment voyez-vous l’avenir de Cour
de droit de l’homme?
C´est une question très difficile, je
ne suis pas un prophète. En Europe,
les gens placent de plus en plus de
confiance et d´espoir dans la Cour.
En même temps, il y a chez beaucoup
de gouvernements de la résistance,
des appréhensions. Cette confiance
est due aux évènements du 11 sep-
tembre et la crise économique et
sociale que connaisse beaucoup de
pays européens depuis 2008.
Aujourd’hui, sans les droits de
l´homme et un système de protection
comme celui de la Cour, les gouver-
nements ne parviendraient pas a se
mettre d’accord.
Les auteurs de la convention des
droits de l’homme en 1949 ne pré-
voyaient certainement pas le déve-
loppement que connait actuellement
l’Europe. Je pense qu’à cette époque,
personne n´imaginait l’explosion du
recours individuel.
ASSISES INTERNATIONALES DU JOURNALISME & DE L’INFORMATION
16 - 18 NOVEMBER 2010 • STRASBOURG, FRANCE 5

TWITTER N’EST PAS JOUER :

PERSONAL BRANDEUR OU
PERSONAL BRANLEUR?
PERSONAL BRANDING,
MARKETING, PROMOTION…
AUTANT DE MOTS QUE NOUS
N’AVONS PAS L’HABITUDE
D’ENTENDRE DANS UN
DÉBAT JOURNALISTIQUE.
POURTANT, ILS ÉTAIENT
AU CENTRE DE L’ATELIER «
FAUT-IL FORMER LES JOUR-
NALISTES AU PERSONAL
BRANDING ? » PAR ERIC
METTOUT, XAVIER TERNI-
SIEN, ALICE ANTHEAUME
ET VINCENT GLAD. RETOUR
SUR CETTE NOTION ENCORE
FLOUE, VOIRE CONTROVER-
SÉE.

Victoria Graul, Louis Villers,

Licia Caglioni et Thomas Seymat

La notion de personal branding a fait son

apparition en 1997, dans un ouvrage
de l’américain Tom Peter (The brand
called you). Il s’agit d’un terme issue de
la mercatique, même si des journalistes
utilisent désormais cette pratique. Avec
l’essor du web et la crise de la presse,
le personal branding apparaît comme un
outil approprié pour les jeunes journa-
listes pour se faire un nom.
La crise que connaissent les médias
a accru les difficultés d’embauche
des nouveaux diplômés dans les
rédactions. Dans le même temps,
Internet offre à ces jeunes journa-
listes la possibilité d’interagir avec
un public important, de se créer un
carnet d’adresses et de se construire
une image. En effet, certains outils,
comme les blogs, les réseaux sociaux
(Twitter, Facebook), leurs permet-
tent de mettre en avant leur travail,
comme l’explique Alice Antheaume,
responsable de la prospective à l’école
de journalisme de Sciences-Po Paris :
« pour beaucoup, il s’agit d’une stra-
tégie de carrière. L’objectif principal
est de se faire connaître pour être
embauché. »
Les rédactions web ne sont pas
insensibles à ces qualités. Eric Met-
tout, rédacteur en chef de l’Express.
IL FAUT:
ENGAGER UN DIALOGUE
AVEC SON AUDIENCE
POSTER
RÉGULIÈREMENT SUR
SON BLOG (1/SEMAINE)
RESPECTER LES RÈGLES
JOURNALISTIQUES
fr, explique : « trop de lecteurs lisent
les actualités sans même savoir de quel
journal elles proviennent. L’idée est
d’attirer un public avec des ‘noms’,
c’est ce que nous faisons par exemple
avec Christophe Barbier ». Les jeunes
journalistes tels que Steven Jambot,
Jeremy Joli ou encore MissPress,
capables de réunir autour de leurs
noms une communauté de lecteurs,
correspondent donc aux profils
recherchés par les employeurs. De
plus, un bon personal brandeur implique
nécessairement la maitrise de la
recherche d’information sur Internet
et sa diffusion efficace et rapide;
deux fondamentaux du métier de
journaliste.
Cependant, les intervenants de la con-
férence ont tenu à mettre en garde les
personal brandeurs. A force de vouloir
être trop présent sur les réseaux soci-
aux, certains oublient le fond, c’est à
dire les articles, enquêtes et autres
reportages. L’apparente célébrité que
leur confère cette présence ne se con-
crétisera sous la forme d’un emploi
que si le fond suit. De plus, chaque
jeune journaliste ne doit pas oublier
que « twitter » des informations est un
travail qui demande une rigueur toute
journalistique (vérification des sources
etc.). En guise de dernier conseil, Eric
Mettout rappelle: « faites attention à
ce que vous publiez, Internet a de la
mémoire. »
IL NE FAUT PAS:
DÉLAISSER LE FOND
POUR LA FORME UTILISER
TWITTER JUSTE POUR
DIFFUSER SON TRAVAIL
ÊTRE GÉNÉRALISTE.
6 MAGAZINE

CHANGER L’IMAGE DES

JEUNES DANS LES MÉDIAS
49% DES FRANÇAIS ONT UNE IMAGE NÉGATIVE DES JEUNES (SONDAGE AUDIREP). CE TRISTE
RÉSULTAT EST SANS CONTESTE LIÉ À LA FAÇON DONT LES MÉDIAS REPRÉSENTENT CETTE
CATÉGORIE DE LA POPULATION.VIOLENCES, CHÔMAGE, DÉCOURAGEMENT, PRÉCARITÉ
SONT LES PRINCIPAUX THÈMES ASSOCIÉS À LA JEUNESSE. C’EST CE QU’ONT ANALYSÉ PUIS
DÉNONCÉ LES RESPONSABLES DE « STOP AUX CLICHÉS », UNE CAMPAGNE VISANT À LUTTER
CONTRE LES CLICHÉS SUR LES JEUNES.

LAURÉATS DU PRIX «
STOP AUX CLICHÉS » :

PRESSE ÉCRITE :
LIBÉRATION, SERIE
«AVOIR 20 ANS
SOUS SARKOZY, LE
BOULANGER JACKY
DURAND», 14/01/09

RADIO : FRANCE
MUSIQUE «SONNEZ LES
MATINES, LES JEUNES ET
L’OPÉRA.»

De Louis Villers et Dobriyana Tro-
pankeva
Les associations « Jets d’Encre », « Réseau
National des Juniors Associations » et
« Anacej », à l’origine de la campagne
débutèrent la conférence par la publica-
tion des résultats de leur enquête rétro-
spective sur le traitement médiatique de
la jeunesse. Sur la totalité de l’année 2009,
ils ont analysé les reportages (télé, écrit,
radio web) abordant cette thématique.
Le résultat est édifiant : sur 54 reportages
de JT (chaînes hertziennes), 21 portaient
sur la violence, 17 sur le chômage. Cette
enquête dénonce l’angle des sujets, princi-
palement portés sur des aspects négatifs,
mais aussi la manière dont ceux-ci sont
traités. En effet, beaucoup d’entre eux
ne donnent pas la parole aux jeunes.
D’autres, par le vocabulaire employé,
installent une distance entre le lecteur
et le jeune, comme cette phrase, publiée
dans Le Point : « Cet argent, il te brûle et tu
vas te refaire [t’habiller], tu achètes des requins
[baskets], de l’Armani, tu pars au ski. » En
traduisant le vocabulaire employé par les
jeunes, le journaliste assimile le jeune à
un étranger, une personne que nous ne
TV : PAS DE PRIX
TRADITIONNEL, MAIS
UN PRIX SPÉCIAL
POUR «C DANS L’AIR»
pouvons pas comprendre. QUI A TRAITÉ DES
Une question s’est ensuite rapide- PROBLÉMATIQUES
ment imposée pendant la conférence : JEUNESSE
quels sont pour ces associations les RÉGULIÈREMENT
critères d’un bon reportage sans cliché ? DURANT L’ANNÉE.
Donner la parole aux jeunes semble
être le critère principal. En effet, trop PRESSE EN LIGNE :
RUE89, «PROPOS
de reportages (sur le chômage ou sur
D’ÉLÈVES DE BONDY
les violences par exemple) ne donnent SUR LA NATIONALITÉ
la parole qu’aux experts, laissant de côté FRANÇAISE,» PAR CHLOÉ
les principaux intéressés. Les associa- LEPRINCE.
tions regrettent par ailleurs le manque
de couverture médiatique des initiatives
positives mises en place par des jeunes.
Ce constat négatif n’a pas empêché sociale qu’ils ont lorsqu’ils diffusent une
la salle d’explorer de nouvelles pistes image négative des jeunes, bien que nous
visant à enrayer cette diffusion de cli- soyons conscients qu’il y ait une certaine
chés dans les médias. Des rencontres représentativité dans leurs propos. »
sont par exemple organisées entre Hier soir, le jury décernait le prix
jeunes et journalistes dans le but de « Stop aux clichés 2010 », à quatre journa-
présenter des actions constructives listes de différents médias ayant traité de
et d’échanger des points de vue sur manière positive la question des jeunes.
l’actualité. Malheureusement, rares Une action concrète qui devrait encou-
sont les journalistes qui répondent aux rager les journalistes à ne pas se foca-
invitations. Cette fois-ci, seulement liser uniquement sur « ce qui va mal ».
quatre d’entre eux assistaient au débat, Tellement plus vendeur…
au grand regret des Marie Camier,
membre du Jury de la campagne : Plus d’informations :
« Notre but premier reste de réfléchir http://www.stopauxcliches.fr/
avec les journalistes sur la responsabilité
ASSISES INTERNATIONALES DU JOURNALISME & DE L’INFORMATION
16 - 18 NOVEMBER 2010 • STRASBOURG, FRANCE 7

LA RUE NE SE RECONNAÎT
PAS DANS LES MÉDIAS
UN MICRO-TROTTOIR RÉALISÉ DANS LE CADRE TRANSFRONTALIER QU’EST L’EURODISTRICT
STRASBOURG-ORTENAU, A RÉVÉLÉ QUE LES RUES FRANÇAISES ET ALLEMANDES
S’ACCORDENT SUR UN POINT : « LES MÉDIAS NE REPRÉSENTENT PAS TOUTES LES MINORITÉS
ET LORSQU’ILS EN PARLENT, C’EST DE MANIÈRE NÉGATIVE ». LES CONCLUSIONS DES DÉBATS
DES ASSISES RENFORCENT CE CONSTAT.

Tamar Bouissou, France

En s’abritant derrière le principe de

l’égalité des citoyens, la France a fait
naître un « contre-mouvement qui
s’illustre dans la propension des médias
à mettre en avant quelques minorités
pour les accuser de tous les maux ».
Cette tendance n’existe qu’à un moi-
ndre degré en Allemagne, car celle-ci
est « moins rigide avec la probléma-
tique des minorités visibles ». Stephan
Seidendorf, chercheur à l’Institut
franco-allemand, souligne également
que ces différences s’atténuent dans la
représentation médiatique : en France
comme en Allemagne on observe que
la presse, grégaire, à un moment donné
se focalise sur une minorité et oublie
le contexte pour ne reproduire que des
stéréotypes. En effet, « rien ne se vend
mieux qu’un cliché » déplore Romy
Strassenburg, journaliste freelance.
L’une des faiblesses des médias
dans chaque pays, c’est sa tendance
à ne réfléchir que de manière spé-
culaire. Si la couverture médiatique
reste enfermée dans un cadre national
rien ne changera, c’est pourquoi des
formations binationales sont néces-
saires. Il faut des journalistes capables
de communiquer avec l’un ou l’autre
public et qui pourront ainsi initier un
processus de transformation dans la
perception de l’Autre. La formation
des futures journalistes est un point clé
d’après les intervenants français. Dans
l’Hexagone, 80% des journalistes sont
originaires de la classe moyenne supé-
rieure. Le système des écoles laisse
peu de chance à la diversité sociale et
donc aux personnes issues des quar-
tiers discriminés qui pour la plupart
ont des origines culturelles différentes
du « journaliste-type ». Sabrina Kassa,
qui forme des jeunes au sein des ate-
liers WADA à Bobigny, estime que ce
Modern Art...? by Lam Thuy Vo
genre d’initiatives permet d’enrichir et
de diversifier le paysage journalistique
français. Elles sont donc incontour-
nables et doivent être développées.
Nordine Nabili, directeur de l’ESJ
Lille-Bondy, est du même avis et va
même plus loin. Pour lui, c’est toute
l’éducation urbaine des médias qui est
à (re)faire car ils ignorent souvent les
nouvelles problématiques de la ville.
Autre problème soulevé et plutôt
surprenant : la hiérarchisation des
minorités. « Lorsqu’on parle de
minorité, on doit se demander : quelle
minorité ? Certaines sont davantage
sous les feux des projecteurs », ces
propos de Sybille Müller, chef du
bureau ARD de Strasbourg, font
écho aux mots de Florian, 19 ans,
qui estime que certaines minorités
sont plus représentées que d’autres. Il
oppose les Noirs et les homosexuels
même s’il concède que les premiers
sont représentés trop souvent sous
un angle négatif.
Il est étonnant que, dans le cadre des
Assises, tous les journalistes s’accor-
dent à dire que la représentation des
minorités dites visibles dans les médias
est incomplète et partiale. La diversité
culturelle et l’intérêt pour le voisin ou
l’étranger n’est pas à l’ordre du jour.
Les journalistes font souvent porter la
faute à leurs rédactions qui privilégient
« ce qui fera vendre » en France et «
ce qui plaira au public traditionnel
» en Allemagne. Mais le journaliste
ne doit-il pas réfléchir à une manière
de susciter l’intérêt de son public ?
Les rédactions ne doivent-elles pas
considérer ces minorités comme une
audience potentielle qu’elles excluent
? Tant que chaque minorité prêchera
pour sa paroisse, les « décideurs » et
les « relais d’opinion » continueront à
s’engouffrer dans la brèche, difficile
à combler, de la disparité. Sabrina
Kassa résume le devoir du journaliste
en demandant « un peu de respect » :
du respect pour les sujets traités, pour
l’éthique de sa profession et pour le
destinataire de l’information.
8 MAGAZINE
INSIGHT TO THE FUTURE
MEDIA TECHNOLOGIES
INVENTIONS IN 21ST CENTURY
SMOOTH JAZZ MUSIC, THE
ELEGANT ASSEMBLY ROOM
OF THE STRASBOURG MUNI-
CIPALITY AND SOME OF THE
MOST INNOVATIVE YOUNG
PEOPLE IN FRANCE WAS THE
SETTING OF THE MEETING OF
“CROSSROADS OF THE POS-
SIBLE”. THE TOP 10 INNOVATIVE
PROJECTS IN THE FIELD OF
INFORMATION AND COMMU-
NICATION WERE PRESENTED
AT THE EVENT, PART OF THE
FOURTH INTERNATIONAL CON-
FERENCE ON JOURNALISM AND
INFORMATION IN STRASBOURG.
Dobriyana Tropankeva (Bulgaria) and
Louis Villers (France)
1. MERCURY
Imagine yourself early in the morning
going to the bathroom, looking at your face
at the mirror and seeing facebook, twitter,
the latest news and gossips from the enter-
tainment industry, checking your e mails…
Mercury is a project that turns your mirror
into a gigantic flat screen and makes you
see world wide web at a glance.
@: www.quentinweisbuch.com/mercury
2. PAPERNET
Papernet is a website where users can
create and choose there own news feeds.
The result is a personalized online news-
paper, created according to what the user
is interested in.
@: www.1year1book.com
3. SAOOTI
With Saooti you can have your own
personal radio – everywhere, any time. You
just need simple tools such as computer,
a microphone, software and the online
connection. Saooti is the website, providing
wikiradio accounts, with which users can
use personal virtual broadcasting studio.
@: www.saooti.com
4. LE VILLAGE ET LE MONDE
“Le village et le monde” (“The village
and the world”) is a project that links the
journalism values with the realities of the
social life. It shall also integrate the notion
of social responsibility in the management
of the website.
@: www.laboate.com/vmwip
5. SONIABOT
Soniabot is a virtual assistant that listens
to you and digitally performs all of your
vocal commands and tasks related to the
management of websites or blogs. It could
be very useful for blind people and users
who are not familiar with web services.
@: www.soniabot.com
6. STRASTV.COM
StrasTV.com is the first Internet televi-
sion in Strasbourg. It is created from a
group of young entrepreneurs that use the
modern media technology to create their
own private online TV. It is citizen media,
covering all of the events in Strasbourg.
@: www.StrasTV.com
7. WALA
Do you want to have your own website?
One easy way is to use WALA. It supports
the necessary software for the complete
management of your site and doesn’t
require any technical competences.
@: www.elteg.com
8. DATAJOURNALISM BY OWNI
Reading the vast amount of thousands
of WikiLeaks documents could be quite
inefficient without the platform created
by OWNI. Datajouralism is a process of
collecting, analyzing and interpreting the
information. It works like a “think tank”
software. For the case with the Iraq War
Logs, OWNI’s created an interface of the
website for all the definitions, maps of the
places and military terms in order to make
the documents easier to understand.
@: www.owni.fr
9. EXPERT-O-TRON
Are you writing extremely complicated
articles on very specific topics which
requires expert consulting? Expert-o-tron
is a search engine that finds the names of
leading experts in the field of your report.
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10. JAIMELINFO
Jaimelinfo (I love info fr.) is a platform
which will enable customers to invest
money in websites or specific stories that
they like. In the field of journalism this
could work as a job market for a huge
variety of topics. If a journalist wants to
write an article, he can promote the topic
and search for investors on the website
Jaimlinfo, which is going to be launched
in 2011.
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ASSISES INTERNATIONALES DU JOURNALISME & DE L’INFORMATION
16 - 18 NOVEMBER 2010 • STRASBOURG, FRANCE
WINNER OF THE “ASSISES
DU JOURNALISME” 2010
FOR THE CATEGORY
“JOURNALISTS”
JORIS LUYENDIJK : People like us, Correspondents
from the Middle-East (Editions Nevicata, November
2009)
Besides the initial reserve of the critics, at the time
of the first publication, the cruel portrait of the
correspondent job that Luyendijk depicts, finally
convinced the jury to award the Dutch writer of this
price.
RÉSEAUX SOCIAUX:
NOUVELLE SOURCE D’INFO?
« LES RÉSEAUX SOCIAUX FONT DE L’INFORMATION
RÉELLE ET NON DU BRUIT ».
Benjamin Muller, journaliste à France Info, participant du « Huis
clos sur le net », une opération inédite : cinq journalistes des RFP
se sont isolés dans un gîte rural au coeur du Périgord, coupés de
tout médias traditionnels. Leur seul accès à l’information : twitter
et facebook. Ils n’allaient pas sur les sites traditionnels, ni télévi-
sion, ni radio, ni presse écrite, ni dépêches d’agence . Seulement
avec le réseaux sociaux.
«SI JUSQU’À HIER LES JOURNALISTES PENSAI-
ENT CHANGER LE MONDE, MAINTENANT C’EST
LE MONDE QUI NOUS CHANGE. DONC C’EST TRÈS
IMPORTANT D’UTILISER LES RÉSEAUX SOCIAUX
AFIN D’AMÉLIORER NOTRE COUVERTURE ET
D’ACQUÉRIR DES CONNAISSANCES ULTÉRIEURES.
JE SUIS CONVAINCU QUE NOUS SOMMES EN TRAIN
9
WINNER OF THE “ASSISES
DU JOURNALISME” 2010
FOR THE CATEGORY
“RESEARCHER”
DOMINIQUE MARCHETTI : Quand la santé devient
médiatique / Les logiques de production de
l’information dans la presse (PUG, 2010)
The essay illustrates the results of a five-years
research on the news management and media
information production. Marchetti’s analysis focuses
in particular on the transformation and the evolution
of media from the point of view of health news.
D’ARRIVER À LA NOTION D’INTELLIGENCE COLLE-
CTIVE QUI FAIT DÉBAT DÉJÀ DEPUIS QUELQUES
ANNÉES.»
François Bougon, journaliste référent Réseaux sociaux de l’AFP.
« LES JOURNALISTES DOIVENT PRENDRE SOIN DE
LA SOCIÉTÉ. EN TANT QUE JOURNALISTES, NOUS
DEVONS OBSERVER L’ÉVOLUTION DE LA SOCIÉTÉ
À TRAVERS LES NOUVELLES TECHNOLOGIES »,
Ruth Barnett (Social Media reporter, SkyNews)
«L’IPAD EST LA RÉALITÉ DANS LA PAUME D’UNE
MAIN, QUAND VOUS LE VOULEZ, OÙ QUE VOUS
SOYEZ »,
Benoit Raphael (Consultant, spécialiste du journalisme partici-
patif et de la monétisation de l’info.)
10 MAGAZINE

WE ASKED THE PARTICIPANTS OF THE ASSISES WHAT THEY THINK ABOUT

THE DEVELOPMENT PROCESS IN JOURNALISM.
HOW WILL JOURNALISM CHANGE WITHIN THE NEXT TEN YEARS?

Jean Francois Lahor- Francoise Tona - Yael Boussidan - tech-

gue - teacher in journa- teacher in journalism nical consultant
lism and education of and education of media “When you listen to
media “New technologies the experts here on the
“There will be a change the circulation conference, they speak
difference between of world’s news. The about this sort of grand
the new generation of most important media reportage, a kind of
journalists and the old for my generation face-to-face journalism.
one. It’s a pity – they were the newspaper I hope we can find a
all share the objective and the radio. For the balance between the
of professionalism, new generation it’s old and new way of
but they use different the Internet: Young journalism.”
technologies. I imagine journalists collect the
a charter of common whole information from
regulations for infor- the computer.”
mation flows.”
ASSISES INTERNATIONALES DU JOURNALISME & DE L’INFORMATION
16 - 18 NOVEMBER 2010 • STRASBOURG, FRANCE 11

By Victoria Graul

Irene Piotroska - judge Reimy le Champion – Alexis Bedu - student in

“Journalism is changing, teacher in media and journalism
but not in the best economics “I want to make jour-
way. I think nowadays “Probably within the nalism on the radio. I
journalists like sensa- next in ten years jour- think radio and news-
tions so much that they nalism is about experts papers have a future
sometimes forget that and being able to pro- on the web. But there
their main responsibility duce quality content, will be also other ways
is to inform people. ” because media makers of doing long paper
believe in fact that journalism in print
people will to pay for media, like in revue 21
quality.” with its photography
reports.”
12
LE SPORT COMME
MODÈLE D’INTÉGRATION ?
PAS SI SÛR…
Fairplay, égalité et respect, les valeurs du
sport prônent une acceptation d’autrui
et apparaissent comme un langage
universel. Pourtant, les discriminations
dans le domaine sont nombreuses. Ce
n’est que depuis récemment que les
athlètes de couleur sont acceptés à
leur juste valeur dans les stades. Si le
public et les professionnels du sport
se sont aperçus, grâce aux campagnes
anti-racisme, aux changements de men-
talités et de lois et à pas mal de temps,
que la couleur de peau n’altérait pas la
qualité d’un sportif, pourtant, d’autres
catégories sont toujours discriminées.
Femmes, homosexuels, ou encore
handicapés se sentent mis à l’écart par
un domaine où l’hyper masculinité et
le culte d’une prétendue perfection
sont légion. Les performances des
hommes en pleine santé étant prises
comme référence, les sportifs « mar-
ginaux » sont toujours comparés à
l’incomparable. Si le genre est admis
comme une construction de la société,
ils existent néanmoins des différences
biologiques expliquant cette disparité
de capacités, et il est évident qu’un
athlète en chaise-roulante ne sera pas
aussi performant qu’un coureur.
Auparavant en dernière page des
journaux, le sport est aujourd’hui le
sujet le plus commenté par le public.
Durant les coupes du monde, les jeux
olympiques et autres compétitions
importantes, les médias du monde
entier sont focalisés sur le sport pen-
dant une période déterminée. Mais
à nouveau, essentiellement sur les
sportifs masculins en bonne santé.
Les équipes féminines sont reléguées
à un bref encart, alors que les para-
lympiques ne sont que brièvement
commentés.
Prisca Bruno Massao, chercheuse à
l’école norvégienne de sport, explique :
MAGAZINE
1995. LES SPRINGBOKS
SUD-AFRICAINS GAGNENT
LA COUPE DU MONDE DE
RUGBY DEVANT LE PREMIER
PRÉSIDENT NOIR D’UN PAYS
MEURTRI PAR UN RACISME
INSTITUTIONNALISÉ. VAIN-
QUANT LES DIFFÉRENCES
ET L’APARTHEID, LE PEUPLE
ENTIER SOUTIENT L’ÉQUIPE
NATIONALE ET SE PROUVE
QU’UN TERRAIN D’ENTENTE
EST POSSIBLE.
Par Eléonore Payró
« le stéréotype disant que le sport c’est
pour les hommes et sur les hommes
est très fortement ancré. La couverture
médiatique du sport féminin n’est que
de 5%. L’audience féminine n’est pas
jugée importante par les médias ».
Le public serait-il responsable ce cet
oubli ? Apparemment non, si l’on en
croit les audiences du documentaire
de Michel Royer « Sport et homosexualité,
c’est quoi le problème ? » et celui diffusé
au Royaume Uni sur Channel 4 «
Inside Incredible Athletes » portant
sur les athlètes handicapés. « Le
public était nombreux, les retours
extrêmement positifs » constate Fiona
Chesterton, ancienne journaliste pour
la BBC et auteure du rapport « Jour-
nalisme sportif, discrimination et racisme ».
Et Michel Royer d’ajouter que Canal +,
la chaîne ayant diffusé son film, a
connu le plus haut taux d’audience
pour un documentaire de son histoire.
ASSISES INTERNATIONALES DU JOURNALISME & DE L’INFORMATION
16 - 18 NOVEMBER 2010 • STRASBOURG, FRANCE
Le public semble ainsi se préoccu-
per des questions des minorités dans
le sport. Pourtant, dans un extrait
du documentaire de Michel Royer
diffusé pendant la conférence, un
journaliste de L’Equipe prétend que
l’homosexualité dans le sport n’est
pas un problème, qu’elle appartient à
la vie privée des sportifs et que ce n’est
pas le rôle des médias de traiter de ces
affaires et de ces rumeurs.
Intervient ensuite Yoann Lemaire.
Footballeur amateur dans un club
français, c’est le premier à avoir fait
son coming out. Les conséquences
de son honnêteté sont surprenantes
dans une nation censée prôner la
liberté, l’égalité et la fraternité : il
s’est vu retiré sa licence. Les premiers
journalistes intéressés par l’affaire
n’étaient pas spécialistes sportifs, mais
de problèmes de société. C’est ensuite
Yoann Lemaire qui, en portant plainte,
a pu s’attirer une attention méritée sur
un problème d’homophobie aggravée.
Il nous explique que grâce à l’interven-
tion de Rama Yade, il a pu obtenir très
rapidement une nouvelle licence dans
13
un club plus tolérant. Il commente le
film de Michel Royer en se basant sur
son vécu personnel : « si les journaux
sportifs pensent que l’homosexualité
dans le sport n’est pas un problème,
c’est qu’il y a véritablement un tabou.
Il faut traiter de ces questions, il faut
les rendre visible et les faire exister
pour régler ce problème ».
Si ce n’est pas nécessairement
aux journalistes de faire changer les
choses, c’est leur rôle de traiter ces
problèmes. En évitant le sujet du
sexisme, du racisme, de l’homophobie
et de la discrimination en générale, ces
problèmes restent invisibles et ne peu-
vent disparaître. Alors que les insultes
homophobes sont monnaie courante,
que la définition des athlètes nationaux
comme étant d’origine étrangère les problèmes de discriminations.
lorsqu’ils perdent est classique, que les Mais qu’en est-il du racisme et des
femmes sportives ne sont là que « pour minorités ethniques ? Le problème
sauver l’honneur » (soit le titre large- est-il réglé ? Prisca Bruno Massao nous
ment répandu des articles traitant de la explique que si les sportifs de couleurs
victoire de l’équipe féminine française sont nombreux dans presque tous les
d’escrime), que les athlètes se voient domaines sportifs, il reste extrême-
forcés de cacher leur orientation ment minoritaires dans les organes de
sexuelle, le sport n’a pas fini de régler direction des associations sportives.
14
EXILE-CURSE
OR OPPORTUNITY?
Kianowsh Ramezani
Kianoush Ramezani is almost like a
hero from the famous autobiographical
comic novel Persepolis. Both the author
Marjane Satrapi and Kioanush Ramezan
were born in an age of war, hard-liners,
protests. This article will take us on a
journey through the life of the Iranian
journalist and cartoonist Kianoush
Ramezani, who experienced one of the
most controversial Iranian epochs.
Kianoush Ramezani had to hide his
secular position through his whole life
since he grew up in an Islamic state.
Religious education was forced in his
life from an early stage. In school the
children were forced to memorise Sura.
Now, it seems hilarious for him that
he won a prize for memorising Sura at
school. ‘In my country children must
learn how to lie and how to be parado-
xical. The definition of being religious
imposed from the Iranian government
is not the right one. I am believer in
my own way. But in Iran we couldn’t
announce that we are not religious. If
you mentioned that you would loose all
of your rights-you couldn’t have a job,
you couldn’t study.’ The duplicity and
contrast of the life as strongly conserva-
Myriam Djebli
tive on the streets and very modern, but
hidden behind the walls of the private
homes, fostered duplicity in their life.
Kianoush Ramezani was always
trying to make a compromise between
the official life and his own believes.
‘Sometimes I behaved like a crazy man
in Iran’, he says. Kianoush Ramezani
was avoiding the compulsory military
service and as a result he had no pass-
port for years.
As a cartoonist Kianoush Rame-
zani had always to consider and self
censured himself. ‘By criticizing the
government you not only put yourself
in a difficult political situation, but you
risk the closing of the entire newspaper.’
However, always searching for ways
to express himself freely, Kianoush
Ramezani found a shortcut: exhibiting
his cartoons and artworks in galleries
in Tehran.
In 2003 he secretly became part of
the organization ‘Cartoonist Rights
Network International’. He was unof-
ficially monitoring and reporting about
the cartoonists who had troubles
because of their published artworks
in Iran.
MAGAZINE
The big change for Kianoush Rame-
zani came with the protests around the
Iranian elections in 2009. He still wears
one promoting green bracelet with the
inscription: “Where is our vote?’, which
he keeps as reminder. ‘A lot of young
people voted to change the government.
But the elections were falsified. And
because of that the young people went
on the streets. Nobody could imagine
that they would be killed just because
they were peacefully defending their
basic right to vote’. Regarding broadcas-
ted videos of the protestants Kioanush
Ramezan said, ‘That was necessary to
shock the world. The video of Neda’s
killing showed that the people opposed
the Iranian government. The name of
the state is Islamic Republic of Iran but
there is no republic. There isn’t any defi-
nition of republic in the current consti-
tution. But Neda’s became famous, I
saw that the world could understand
the difference between the people and
the government.’
The protests changed his life.
Impressed by protestant’s courage,
Kianoush Ramezani broke his self-
censorship. He published cartoons in a
ASSISES INTERNATIONALES DU JOURNALISME & DE L’INFORMATION
16 - 18 NOVEMBER 2010 • STRASBOURG, FRANCE
By Dobriyana Tropankeva Bulgaria
weekly magazine belonging to Iranian
opposition and signed his cartoon
with his real name. This was when his
troubles started. In the same time the
Iranian government began to arrest all
of the active journalists. “Me and my
friends had to choose between prison
and exile. Because of the publication of
my cartoons I had to leave the country.”
After a long and complicated pro-
cedure, now he has refugee status in
France. Nowadays he is drawing car-
toons for the online magazine ‘L’Oeil
de l’exile’. The newly gained liberty
gave him the possibility to freely express
himself. ‘Now I can draw everything
that I want and sign it with my name.
It is very interesting how my cartoons
provoke discussion among French
people. ’ Living far away from his
family, sometimes almost destroyed him.
However, he says, ‘We have to adapt
ourselves. C’est la vie. As journalists, if
we care about human rights, if we are
say that we are fighting for freedom, we
have to continue with our activities. My
mission is to continue my work freely
and express my believes through my
artworks wherever I am’.
IN PARIS,
JOURNALISTS
IN EXILE FIND A
NEW HOME
Franziska Broich, Germany
When journalists stand up for
their opinion, for diversity, for
the freedom of expression, for
democracy, the price to pay can be
high. Sometimes, exile is the only
solution. In Paris, these journalists,
recognized as political refugees,
can find shelter in the “Maison des
journalistes.” The house can host
up to fifteen journalists.
Created in 2002 by the producer
Daniel Voyenne, the house wel-
comed its first host in November
2003. Since then, the demand for
rooms is high. Mirjam Djebli, who
takes care of the art exhibitions
in the house and of “L’Oeil de
l’exilé”, the weekly publication
of its residents explains: “We
have so many requests that we
are in need of a second house”.
But, so far, this is only a dream,
even though the project spawned
similar houses run by other asso-
ciations in Cadiz, Spain as well as
in Berlin, Germany.
The nationalities of the inha-
bitants of the “Maison des jour-
nalistes” change with the global
political situation. As the press
freedom conditions in the Middle
East are currently tensed, many
journalists from this area now live
in the “Maison des Journalistes”
such as the Iranian cartoonist Kia-
noush Ramezani. Furthermore,
refugees from Sri Lanka and Ban-
gladesh as well as journalists from
the African continent are often
searching shelter in the Maison,
tells Djebli.
But how do persecuted jour-
nalists learn about the “Maison
des journalists”? As a matter of
15
fact, the association works closely
together with many NGOs, such
as “Reporters without borders”,
active in countries where press
freedom is restricted. “Today we
also get many requests by e-mail”,
adds Djebli, “but sometimes refu-
gees are already in Paris when they
hear about the opportunity of
the Maison”. On top of this, the
financiers of the project, several
French TV and radio stations as
well as newspapers, spread the
message.
To give hosted journalists an
opportunity to integrate French
media, their main mission during
their stay is to learn French. The-
refore, they work hard – everyday,
even during the weekend. “This
is important”, Djebli explains,
“because the journalists are all
political refugees, they cannot
travel back to their home countries
and have to stay in France. So they
have to try to find medias they
can work for in France.” One rule
of the house is that journalists
are only allowed to stay for six
months – “A short time to learn
a foreign language and establish
working contacts”, admits Djebli.
“However, if they could stay for
an unlimited amount of time, the
refugees would not strive for inte-
gration.” Moreover, like this, there
are always spots available in case
of an emergency. While the majo-
rity of the journalists struggle to
establish themselves in France,
there are also some success stories
such as Rémy Ngono, a former
host, who is now working for
Radio France Internationale.
16
WOULD YOU
CONSIDER YOUR
NATIONAL MEDIA
DISCRIMINATIVE TO
CERTAIN GROUPS OF
THE SOCIETY?
GERMANY
For me the German Media are not neutral at all.
Discrimination is daily business since people love
scandals who blame minorities as in the moment
mostly Muslim immigrants. A good example
for that is the current integration debate in the
German media. Franziska
FRANCE
French media are definitely discriminative to cer-
tain groups of the society. They are supposed to
report about society, some even pretend to be a
voice for the voiceless; at the end, they describe a
world which carries along their own prejudices.
Sans nul doute, les médias français discriminent
certains groupes sociaux. Ils doivent rendre
compte de l’état de la société, certains prétendent
être une voix pour les sans-voix mais en réalité,
leur description du monde charrie leurs propres
préjugés. Tamar
SPAIN
In Spain we have a vast diversity of points of view
or ideologies. For every of them there is a media
channel of some sort, and also an opposing media
to discriminate it, which is mostly around subjects
such as nationalism and in migration. Adrian
MAGAZINE
FINLAND
I think that the Finnish journalists are actively
trying to do their best to give a voice and a face
to the minorities. One recent example is a video,
in which celebrities encouraged homosexuals to
keep courage, as part of an international It Will
Get Better campaign. There’s still a long way to
go, but one step at the time, Finland is becoming
a better place for different ethnic and sexual
minorities. Heikki
SWITZERLAND
Quadrilingues et multiculturels, les médias suisses
ne peuvent pas être unifiés : un journal suisse-alle-
mand ne traitera pas une info de la même manière
qu’une télévision italophone. De plus, dans un
pays neutre, ils ont le devoir de représenter tous
les points de vue, ne laissant pas la place à la
discrimination. Eléonore
BULGARIA
The journalist investigation on Roma in Bulgaria
is extremely difficult, because they live in closed
community and they don’t let strangers in it.
Roma live in their own areas (often ghettos with
poor living conditions) and according to their
own rules (the famous Roma court). I believe that
a good journalistic approach could unveil and
unlock many of the hidden problems and diffe-
rences between the two worlds. Dobriyana
ITALY
Since the eighties the most powerful media is tele-
vision. It has been thirty years now that women
are shown just as semi-naked bodies, with no
competences. At the moment Italian television is
a media for male that discriminates women twice:
both as public and media maker. Licia