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Addiction

Aspects Théoriques et Cliniques des addictions


Axes de travail

• Axe 1: Définition, classification et catégorisation des addictions


• Axe 2: Approches Psychopathologiques des comportements addictifs
• Axe 3: Prises en charge thérapeutiques, cas cliniques.
Clinique des addictions
L’addiction se caractérise par l’impossibilité répétée de contrôler un comportement poursuivi en dépit de
la connaissance de ses conséquences négatives.

Les substances psycho-actives sont définies par leur capacité à engendrer une intoxication ou ivresse, un
sevrage, un abus ou usage nocif ou une dépendance.

Les pathologies addictives sont d’authentiques troubles psychopathologiques.

La dépendance est une pathologie autonome, souvent associée à des troubles psychiatriques, envahissant
progressivement l’ensemble de la vie psychique du sujet.

La loi française réprime l’usage et le trafic de tout stupéfiant, sans distinction de produit.
L’addictologie est une discipline récente à la croisée des différentes spécialités médicales. Les approches
classiques étaient initialement centrées sur les produits : alcool, drogue, tabac, médicaments.
L’amélioration des connaissances a permis de préciser les définitions et de faire évoluer les concepts,
permettant une meilleure compréhension des troubles.
Définition

Le concept d’addiction décrit la relation de dépendance plus ou moins aliénante que


l’individu établit avec un produit (drogue, tabac, alcool ou médicament) ou avec des pratiques
(jeux, sport, achat, sexe, travail...). Il se caractérise par l’impossibilité répétée de contrôler un
comportement poursuivi en dépit de la connaissance de ses conséquences négatives. Ce
comportement vise à produire du plaisir ou à écarter une sensation de malaise interne.
L’addiction n’est donc pas définie par le produit en lui-même mais par l’utilisation qu’en fait
le sujet.
Les termes d’addiction et de dépendance sont pratiquement équivalents, le terme d’addiction
permettant d’élargir le concept de dépendance à une substance aux addictions
comportementales.
Classifications

La classification internationale des maladies de l’Organisation mondiale de la santé, 10e révision, a individualisé la
catégorie diagnostique des troubles mentaux et du comportement liés à l’utilisation de substances psycho-actives. Ces
troubles sont ainsi identifiés comme des pathologies, au même titre que les troubles de l’humeur ou psychotiques.
Trois grands types de comportements de consommation sont classiquement distingués : l’usage, l’usage nocif et la
dépendance :
1- l’usage est une consommation de substances psycho-actives qui n’entraîne ni complications pour la santé ni troubles du
comportement
ayant des conséquences nocives pour les autres. Il n’est pas considéré comme pathologique et garde un caractère
circonstanciel ou occasionnel ; –
2- l’usage nocif correspond à une consommation répétée induisant des dommages dans les domaines somatiques, psycho-
affectifs ou sociaux, pour le sujet lui-même, mais aussi pour son environnement, sans atteindre la
dépendance ;
3- la dépendance est classiquement définie par la perte de la liberté de
s’abstenir ou la perte de contrôle.
La 5e édition du Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux, parue en 2013, a modifié cette catégorisation,
permettant une approche dimensionnelle des troubles liés à l’utilisation de substances psycho-actives.
Critères diagnostiques de troubles
liés à la consommation d’une substance (DSM-5)
Le trouble est défini par onze critères
L’addiction à une substance est un mode d’utilisation problématique d’une substance psycho-active conduisant à une altération du fonctionnement ou à une souffrance, cliniquement
significative, caractérisé par la présence de deux (ou plus) des manifestations suivantes, observées au cours d’une période continue de douze mois :
1) La substance est souvent prise en plus grande quantité ou pendant une période plus prolongée que prévu.
2) Il y a un désir persistant, ou des efforts infructueux pour diminuer ou contrôler l’usage de la substance.
3) Beaucoup de temps est passé à des activités nécessaires pour obtenir, utiliser la substance ou à récupérer de ses effets.
4) Envie impérieuse (craving) ou fort désir ou besoin pressant d’utiliser la substance.
5) Usage répété de la substance conduisant à l’incapacité de remplir des obligations majeures, au travail, à l’école ou au domicile.
6) Usage continu de la substance malgré des problèmes interpersonnels ou sociaux, causés ou exacerbés par les effets de son utilisation.
7) Des activités sociales, professionnelles ou de loisirs importantes sont abandonnées ou réduites à cause de l’utilisation de la substance.
8) Usage répété de la substance dans des situations où cela peut être physiquement dangereux.
9) L’usage de la substance est poursuivi bien que la personne sache avoir un problème psychologique ou physique persistant ou récurrent susceptible d’avoir été causé ou exacerbé par la
substance.
10) Tolérance, définie par l’un des symptômes suivants :
a. Besoin de quantités notablement plus fortes de la substance pour obtenir une intoxication ou l’effet désiré.
b. Effet notablement diminué en cas d’usage continu de la même quantité de substance.
11) Sevrage caractérisé par l’une ou l’autre des manifestations suivantes : a. Syndrome de sevrage caractéristique de la substance.
b. La substance (ou une substance très proche) est prise pour soulager ou
éviter les symptômes de sevrage.
Trouble d’intensité légère : présence de 2 à 3 symptômes Trouble d’intensité modérée : présence de 4 à 5 symptômes Trouble d’intensité sévère : présence de 6 symptômes ou
plus
L’intensité du trouble est déterminée par le nombre de symptômes. La dépendance est
actuelle, en rémission précoce (pas de critère de dépendance depuis au moins trois
mois, mais depuis moins de douze mois) ou en rémission prolongée (pas de critère de
dépendance depuis au moins douze mois, sauf le critère craving qui peut persister).
La dépendance est donc une pathologie autonome des autres pathologies mentales.
Cette position éclaircit les concepts de comorbidités en distinguant :
– les troubles liés aux substances : intoxication, sevrage et dépendance ;
– les troubles induits par les substances, survenant au cours ou au décours immédiat
de l’intoxication avec des liens de causalité acquis ;
par exemple, les états dépressifs induits par l’alcool ;
– les comorbidités avec des liens de causalité non établis, mais qui, en
cas d’une forte occurrence, amènent des interrogations spécifiques ; par exemple, le
cannabis et les troubles schizophréniques.
Aspects cliniques
La dépendance à une substance est une psychopathologie évolutive débutant habituellement à
l’adolescence ou à l’âge adulte jeune. Elle envahit progressivement l’ensemble de la vie psychique du sujet.
Ce trouble au long cours est sous-tendu par un attrait majeur pour les produits, une ambivalence face à
l’abstinence et une faiblesse de motivation thérapeutique. Les premières demandes de soins sont tardives
et apparaissent lors des complications ou de la décompensation du trouble. L’évolution est émaillée de
rechutes. De fait, le sujet dépendant à une substance ou à un comportement est attiré par son addiction.
Sur le plan clinique, on relève une sous-estimation du niveau de consommation et de ses conséquences, tant
par les patients que les soignants, une sous-verbalisation et une banalisation de la consommation.
Il n’y a pas de corrélation entre le diagnostic de dépendance et le niveau de consommation de substances.
L’épidémiologie des consommations définit des niveaux d’intoxication : expérimentation, occasionnel,
répété, régulier, quotidien. Ces évaluations quantitatives ne permettent pas de poser de diagnostic clinique.
Toutes les personnalités pathologiques, en particulier la personnalité borderline, antisociale et anxieuse, et
toutes les psychopathologies évolutives, thymiques, psychotiques, peuvent se compliquer d’un trouble
addictif. Les comorbidités psychiatriques les plus fréquentes sont la dépression, l’anxiété et les troubles de
la personnalité. Les troubles psychiatriques et les difficultés psychologiques ou existentielles sont des
facteurs de renforcement ou de vulnérabilité qui sont évalués et appréhendés dans la prise en charge.
Psychopathologie des conduites
addictives
Approche Cognitivo-Comportementale
Apprentissage des comportements de l’individu selon continuer : nous parlons de renforcement de la
trois lois: conduite. Par ailleurs, une substance psychoactive
Le conditionnement pavlovien: c’est une répétition sera d’autant plus addictogène que son effet est
du comportement et la mise en place d'un rituel. rapide. Le renforcement sera alors plus important.
exemple de l’alcool : l’individu prend l’habitude, en La troisième loi est celle de l’apprentissage social de
rentrant du travail, de s’installer dans son canapé et Bandura, concept proche de celui de l’identification,
de boire un ou deux verres d’un alcool qu’il où les modèles sont appris par imitation. Autrement
apprécie. Il met en place un rituel qu’il répète chaque dit, si nous reprenons l’exemple de l’alcool,
soir lorsqu’il rentre du travail. De ce fait, au bout de l’individu aura d’autant plus tendance à boire de
quelques semaines, il est conditionné à ce que le l’alcool pour se détendre de sa journée de travail
stimulus « rentrer du travail » apporte la réponse « qu’il aura eu ou a actuellement dans son entourage
boire deux verres d’alcool dans le canapé ». des personnes qui utilisent ce modèle de « stimulus/
La deuxième loi est celle du conditionnement réponse » : « alcool/ détente ».
opérant (ou skinerien). Le rituel mis en place est
répété car il aide l’individu à se détendre, à mettre de
la distance avec les soucis qu’il a rencontrés dans la
journée. Il se sent, après avoir bu, plus calme et
apaisé du stress et/ou de la fatigue ressenti(s). Les
bénéfices apportés par la réponse « boire deux verres
d’alcool dans le canapé » encouragent le sujet à
Addiction et dépression
dépression + conduite addictive = des comorbidités fréquemment associées (travaux de Beck et de ses
collaborateurs.
la conduite addictive: peut être considérée comme une solution à la dépression.
le modèle de développement cognitif conceptualisé par Liese: les expériences chez le jeune enfant lui
permettent de développer ce que l’on nomme des « schémas » cognitifs et des croyances primaires.
Puis à l’âge adulte, à la suite d’« incidents critiques », autrement dit d’un événement négatif ayant un
fort impact émotionnel ou générateur de stress (comme une rupture amoureuse, une perte d’emploi,
etc.), s’activent chez l’individu des « schémas » cognitifs et donc des croyances négatives sur soi, sur
les autres et sur le monde (comme par exemple : « je suis nul(le) », « les autres ne m’aiment pas », « ce
monde est pourri »). Ces croyances vont alors s’accompagner d’émotions négatives (comme la
tristesse), de réponses physiologiques (comme la perte d’appétit) et de comportements (comme la prise
de substances).
Résultat: la dépression est le fruit de l’interprétation de la réalité par l’individu par le « biais » des
croyances négatives activées à la suite de l’événement négatif et la prise de substance peut être alors
considérée comme une stratégie (au sens du coping), face aux réponses émotionnelles et
physiologiques issues des pensées automatiques.
Travaux Beck, Wright, Newman et Liese (1993)

L’hypothèse selon laquelle les croyances addictives à l’égard d’une (ou plusieurs) substance(s)
psycho-active(s) seraient comme des schémas cognitifs dysfonctionnels qui s’activent face à une
situation à risque de consommation de la (ou les) substance(s). Ces croyances addictives peuvent être
de trois sortes:

les croyances anticipatoires: l’individu anticipe un bien-être grâce à la substance, qu’il considère comme un
moyen ou une stratégie dont l’efficacité est accrue et comme une aide lors des interactions sociales. Par
exemple, il existe un phénomène d’attente positive vis-à-vis des effets de la consommation d’alcool qui est au
cœur d’une affirmation très fréquente entendue chez les patients souffrant d’un trouble lié à l’usage d’une
substance : « Je serai mieux après avoir consommé. »
les croyances soulageantes: l’individu anticipe une réduction de l’inconfort. Par exemple : « Si je consomme,
je suis moins anxieux. »
les croyances permissives: l’individu élabore des plans d’actions pour trouver et/ou consommer la substance
grâce à des pensées qui justifient et donc permettent la consommation de cette substance. Par exemple, le
contexte festif : « En soirée, on ne peut pas ne pas consommer. »
Psychopathologie des conduites
addictives
Approche Psychodynamique
ADDICTION

La notion est apparue en 1970 dans la psychiatrie


nord- américaine pour désigner la conduite de
dépendance aux substance psycho-actives. C’est dans
les années 90 que le terme a connu sa fortune en
France.
Addiction en vieux français : donner son corps en
gage pour une dette impayée. Il y a donc une
référence au corps, plus précisément une contrainte
par le corps.
• Définition Pedinielli

To addict signifie en anglais se donner à.


Le terme a été utilisé aux E.U de façon
extensive lorsque la toxicomanie est
devenue un fait de société. Les
américains ont insisté sur la notion de
répétition, le sentiment de dévalorisation.
L’addiction est une « expérience, une
réponse et une source de gratification ou
de sécurité qui annule le sentiment de
défaillance. » (Pedinielli).
• Définition Mc Douggal
En France, c’est Joyce Mc Dougall qui a
réintroduit le terme en France dans une
visée psychanalytique dans son ouvrage
Plaidoyer pour une certaine anormalité.
« Addiction renvoie à l’état d’esclavage,
donc, à la lutte inégale du sujet avec une
partie de lui-même ». Le terme
d’addiction va s’élargir pour englober
toutes les inféodations à des toxiques
(alcool, drogue, et autres pharmaco-
dépendances) et également des
pathologies de l’incorporation (anorexie,
boulimie) et certaines pathologies
comportementales (jeu, cleptomanie,
achats compulsifs...)
• Définition Rado

On note la fragilité narcissique. On parle


d’une dépression anxieuse (Rado). Les
toxiques donne une certaine
augmentation de l’estime de soi et une
certaine euphorie. Rado note que le
patient se détache petit à petit de
l’activité sexuelle et le plaisir
pharmacologique devient le but sexuel du
patient.
• Définition Jeammet forme d’une habitude. On n’accomplit
qu’en cachette un certain nombre
d’activités (boulimie par exemple).
Aujourd’hui, on considère les addictions Un pansement pour la psyché qui tentent
moins comme des conduites morbides de « guérir les blessures narcissiques
mais comme fonction protectrice pour laissées par l’inadéquation de la relation
l’économie psychique, notamment dans avec les premiers objets. » On parle d’un
son rapports aux angoisses paranoïdes. enfant qui est utilisé par le parent pour
P. Jeammet par exemple écrit : Les des fins narcissiques à savoir que les
conduites addictives sont un pansement réponses de l’environnement
pour la psyché. Mais cette contrainte de correspondent davantage à la satisfaction
protection est le signe d’une vulnérabilité des besoins narcissiques du parent qu’à la
psychique. Vulnérabilité signifie que c’est satisfaction des besoins propres de
la dimension narcissique qui prédomine. l’enfant.
Il s’agit d’un narcissisme meurtri et des
défaillances internes. On note également
le besoin de dissimulation qui prend la
• Exemple des troubles alimentaires masochique de l’excitation et l’abandon de la satisfaction
Les troubles alimentaires s’inscrivent dans le groupe des objectale provoquant le plaisir d’une douleur, recherchée et
addictions. maintenue. Il y a une jouissance là où il y a de la douleur.
Etymologiquement, addiction se réfère à un état d’esclavage. L’anorexie relance l’énigme de la féminité.
Mais l’objet (alccol, nourriture...) est un objet qui est à saisir à L’anorexique entretient une relation passionnée à la nourriture.
tout moment pour atténuer des états affectifs vécus comme Le « je n’ai pas faim » est comme une gifle donnée à l’autre.
intolérables. L’objet est perçu comme indispensable. D’un côté, elle veut s’offrir à un regard, regard effrayé ou
L’économie addictive vise la décharge de la tension. La scandalisé. Elle est dans cette problématique du regard. De
décharge totale et rapide de la tension psychique. l’autre, elle maintient une tension entre tension entre le besoin
L’anorexie mentale et le refus de l’apaiser, s’imposant ainsi une excitation sans
Lasègue est le premier à saisir la dimension de plaisir ou de issue. La nourriture est un objet idolâtré et haï en même temps.
jouissance comme forces fondamentales dans l’organisation Se retenant de manger, l’objet nourriture devient un souci
psychique de l’anorexique. L’anorexique nous prévient qu’elle permanent, une représentation obsédante. L’anorexique jouit de
est toute puissante en son anorexie. Elle a ce plaisir de contrôle. la pensée. Cad que la nourriture est
Les travaux de Kestemberg et Decobert ont marqué avec la débarrassée de sa nature d’objet du besoin. Elle est préservée
parution de La faim et le corps un pas théorique important. Ils par une activité de pensée exclusive. La nourriture est pensée,
notent l’impossibilité d’élaborer l’angoisse de castration et mais refusée jusqu’à la mort. Là est le défi de l’anorexique. Il y
l’existence d’un déni qui porte sur la réalité du corps propre. La a un investissement masochique de l’excitation et la recherche
faim conduit à un « orgasme ». L’abandon à des excès d’une douleur.
incontrôlables de consommation alimentaire est ce qui terrifie
Freud, réfléchissant sur le passage de l’auto-conseravtion à la
l’anorexique qui a peur de ne plus pouvoir s’arrêter, ou de s’en
sexualité, inscrit le désir dans la vie psychique de l’humain.
passer. On note l’importance de la tension entre le besoin et le
L’anorexique est plutôt dans le rien. Elle se défend contre des
refus de l’apaiser. Le sujet s’impose une excitation sans issue.
angoisses d’écoulement d’où l’aménorrhée et tend vers une
L’objet nourriture est à la fois idolâtré et haï. Il est l’objet d’une
maîtrise sans faille et une narcissisation de l’esprit.
activité psychique sans relâche. Il y a un investissement
Prises en charge thérapeutiques, cas cliniques.
Cf. documents PDF joints:

Vignette 1: 16 cas cliniques en psychopathologie de ladulte


- troubles alimentaires et problématique identitaire: Eleonore

Vignette 2: 10 entretiens en psychologie clinique de ladulte by Olivier Douville


- Chapitre 3, L’entretien avec des sujets toxicomanes: Clinique d’une rencontre

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