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un état de soumission voulu, nous sommes aujourd'hui entrés dans la plus parfaite des dictatures,
une dictature qui aurait les apparences de la démocratie, une prison sans murs dont les prisonniers
ne songeraient pas à s'évader, dont ils ne songeraient même pas à renverser les tyrans. Système
d'esclavage où, grâce à la consommation et au divertissement, les esclaves auraient l'amour de leur
servitude.
Le meilleur des mondes, d'Aldous Huxley
L'intelligence prend fin où commence le racisme. Le racisme, c'est le vers qui ronge le fruit de
l'intelligence, larouille qui corrode et détruit la dignité de la personne. Le raciste, fait de peur et
d'ignorance, traumatisé par le manque d'intelligence et d'estime de soi, et nourri par la haine de
l'autre du fait d'un complexe d'infériorité profond et incoercible, est à la fois le danger et la victime :
un danger pour les autres (l'enfer virtuel, ce n'est pas l'autre, c'est le racisme) et une victime de lui-
même. Une victime qui devient le bourreau de l'autre. Prisonnier de ses préjugés, phobies et
contradictions, le raciste n'aime pas la liberté car la liberté, c'est la diversité, la pluralité d'être et de
choisir. Lui aussi - né du métissage d'un homme et d'une femme - a peur de choisir parmi la diversité
des options, critères et modèles tout comme l'effraient la cohabitation, la communication et le
rapport individuel aux autres. Devoir reconnaître les différences l'angoisse tout comme le métissage -
pureté ô combien audacieuse - l'épouvante.
"Il y a certaines perversions de l'intelligence et de lasociété humaines contre lesquelles il est inutile
de lutter ouvertement. La seule action positive est d'éduquer les enfants de telle manière que ces
perversions leur paraissent inacceptables moindres égarements. De toutes ces perversions, le
racisme est sans doute la plus répugnante"
Le capitalisme une idée simple, vendre aux travailleurs ce qu’ils produisent (eux-mêmes)
« Lorsque les Blancs sont venus en Afrique, nous avions les terres et ils
avaient la Bible. Ils nous ont appris à prier les yeux fermés : lorsque
nous les avons ouverts, les Blancs avaient la terre et nous la Bible. »
Jomo Kenyatta
"C'est drôle comme les gens qui se croient instruits éprouvent le besoin de
faire chier le monde."
(Boris Vian)
"Le fait de pouvoir élire librement des maîtres ne supprime ni les maîtres ni
les esclaves."
Herbert Marcuse
Parler de l’humanité, c’est parler de soi-même. Dans le procès que l’individu intente perpétuellement
à l’humanité, il est lui-même incriminé et la seule chose qui puisse le mettre hors de cause est la
mort. Il est significatif qu’il se trouve constamment sur le banc des accusés, même quand il est juge.
Personne ne peut prétendre que l’humanité est entrain de pourrir sans, tout d’abord, constater les
symptômes de la putréfaction sur lui-même, sans avoir lui-même commis de mauvaises actions. En
ce domaine, toute observation doit être faite in vivo. Tout être vivant est prisonnier à perpétuité de
l’humanité et contribue par sa vie, qu’il veuille ou non, à accroître ou à amoindrir la part de bonheur
et de malheur, de grandeur et d’infamie, d’espoir et de désolation, de l’humanité.
C’est pourquoi je puis oser dire que le destin de l’homme se joue partout et tout le temps et qu’il est
impossible d’évaluer ce qu’un être humain peut représenter pour un autre. Je crois que la solidarité,
la sympathie et l’amour sont les dernières chemises blanches de l’humanité. Plus haut que toutes les
vertus, je place cette forme que l’on appelle le pardon. Je crois que la soif humaine de pardon est
inextinguible, non pas qu’il existe un péché originel d’origine divine ou diabolique mais parce que,
dès l’origine, nous sommes en butte à une impitoyable organisation du monde contre laquelle nous
sommes bien plus désarmés que nous pourrions le souhaiter.
Or, ce qu’il y a de tragique dans notre situation c’est que, tout en étant convaincu de l’existence des
vertus humaines, je puis néanmoins nourrir des doutes quant à l’aptitude de l’homme à empêcher
l’anéantissement du monde que nous redoutons tous. Et ce scepticisme s’explique par le fait que ce
n’est pas l’homme qui décide, en définitive, du sort du monde, mais des blocs, des constellations de
puissances, des groupes d’Etats, qui parlent tous une langue différente de celle de l’homme, à savoir
celle du pouvoir.
Je crois que l’ennemi héréditaire de l’homme est la macro-organisation, parce que celle-ci le prive du
sentiment, indispensable à la vie, de sa responsabilité envers ses semblables, réduit le nombre des
occasions qu’il a de faire preuve de solidarité et d’amour, et le transforme au contraire en co-
détenteur d’un pouvoir qui, même s’il paraît, sur le moment, dirigé contre les autres, est en fin de
compte dirigé contre lui-même. Car qu’est-ce que le pouvoir si ce n’est le sentiment de n’avoir pas à
répondre de ses mauvaises actions sur sa propre vie mais sur celle des autres ?
Si, pour terminer, je devais vous dire ce dont je rêve, comme la plupart de mes semblables, malgré
mon impuissance, je dirais ceci : je souhaite que le plus grand nombre de gens possible comprennent
qu’il est de leur devoir de se soustraire à l’emprise de ces blocs, de ces Églises, de ces organisations
qui détiennent un pouvoir hostile à l’être humain, non pas dans le but de créer de nouvelles
communautés, mais afin de réduire le potentiel d’anéantissement dont dispose le pouvoir en ce
monde. C’est peut-être la seule chance qu’ai l’être humain de pouvoir un jour se conduire comme un
homme parmi les hommes, de pouvoir redevenir la joie et l’ami de ses semblables.
Se Sentir Vivre
I. J'écris ces lignes en pleine période électorale. Les murs sont barbouillés
d'affiches de toutes les couleurs ou on s'en dit de toutes les couleurs, sans
jeu de mots. Qui n'a pas son parti son programme sa profession de foi ? Qui
n'est pas socialiste ou radical ou progressiste ou libéral ou «
proportionnaliste » le dernier cri du jour ? C'est la grande maladie du
siècle, cette abnégation du moi. On est d'une association, d'un syndicat, d'un
parti; on partage l'opinion, les convictions, la règle de conduite d'autrui. On
est le mené, le suiveur, le disciple, l'esclave, jamais soi-même.
Il en coûte moins, c'est vrai. Appartenir à un parti, adopter le programme d'un
autre, se régler sur une ligne de conduite collective, cela évite de penser, de
réfléchir, de se créer des idées à soi. Cela dispense de réagir par soi-même.
C'est le triomphe de la fameuse théorie du « moindre effort », pour l'amour de
laquelle on a dit et fait tant de bêtises.
Certains appellent cela vivre. C'est vrai, le mollusque vit, l'invertébré vit ;
le plagiaire, le copiste, le radoteur vivent ; le mouton de Panurge, le faux
frère, le médisant, et le cancanier vivent. Laissons-les et songeons, nous, non
seulement à vivre, mais encore à nous « sentir vivre ».
II. Se sentir vivre ce n'est pas seulement avoir conscience qu'on accomplit
régulièrement les fonctions conservatrices de l'individu et, si l'on veut, de
l'espèce. Se sentir vivre ce n'est pas non plus accomplir les gestes de sa vie
selon un tracé bien délimité, d'accord avec les déductions d'un livre savant
écrit par quelque auteur ne connaissant de la vie que les cornues, les creusets
et les équations. Se sentir vivre ce n'est certes pas se contenir dans les
allées bien sablées d'un jardin public quand vous appellent les sentiers
capricieux des sous-bois sauvages. Se sentir vivre, c'est vibrer, tressaillir,
frissonner aux parfums des fleurs, aux chants des oiseaux, aux bruits des
vagues, aux hurlements du vent, au silence de la solitude, à la voix fiévreuse
des foules. Se sentir vivre, c'est être sensible à la mélopée plaintive du pâtre
comme aux harmonies des grands opéras, aux rayonnements d'un poème comme aux
voluptés de l'amour.
Se sentir vivre, c'est rendre palpitants ceux des détails de sa vie qui en
valent la peine : faire de celui-là une expérience passagère et de celui-ci une
expérience qui réussisse. Tout cela sans contrainte, sans programme imposé à
l'avance, selon son tempérament, son état d'être du moment, sa conception de la
vie.
IV. Une condition essentielle pour « se sentir vivre », c'est savoir apprécier la
vie. Morales, sensations, lignes de conduite, émotions, connaissances, facultés,
opinions, passions, sens, cerveau, etc., autant de moyens permettant d'apprécier
la vie, autant de serviteurs mis à la disposition du « moi » pour qu'il se
développe et s'épanouisse. Les maîtrisant tous, le « négateur d'autorité »
conscient ne se laisse maîtriser par aucun d'eux. Là ou il succombe c'est par
manque d'éducation de la volonté ; ce n'est pas irréparable. Le «
hors-domination » raisonné n'est pas un peureux, il jouit de toutes choses, mord
à toutes choses, dans les limites de l'appréciation individuelle. Il goûte à
tout et rien ne lui répugne, sous condition de garder son équilibre moral.
L'anarchiste peut seul se sentir vivre, puisqu'il est l'unique parmi les hommes
dont l'appréciation de la vie puise sa source en soi-même, sans le mélange impur
d'une autorité imposée du dehors.
E. Armand
Cette obligation héréditaire, qui sest muée en loi, je la déserterai avec ses
droits et ses devoirs, ses mensonges et ses crimes. Qu’elle croupisse dans son
imbécillité, puisque tel est son désir ; qu’elle sentretue avec la société
voisine puisque tel est son bon vouloir ; qu’elle se meure de la pauvreté des
uns et de la richesse des autres, puisque elle ne veut pas faire autrement !
Mais que je n’aie aucun devoir et aucun droit envers elle, que je ne mente, ne
tue et ne sois tué, ni par elle, ni pour elle. Que je ne sois ni pauvre, ni
riche avec elle. La route m’ôtera cette obligation. Je serai libre de disposer
de mon individu, sans avoir à référer à autrui.
Quand de la vieille cité s’égrèneront les notes des refrains populaires qui ont
charmé mon enfance ; quand sortiront d’entre les vieux pavés disjoints, les doux
souvenirs du passé, et que des chemins branlants montera vers le ciel bleu une
fumée jaunâtre et épaisse, semblable à celle que je regardais étant petit et que
ma pensée se plaisait à suivre dans les remous du vent.
Pourrai-je prendre la route ? Quand je verrai les bons camarades, les chics
copains qui, le sourire aux lèvres, feront involontairement le geste de me
retenir. L’ambiance fraternelle de leur amitié, leurs poignées de mains franches
et loyales sembleront alors m’enchaîner à la cité.
Pourrai-je prendre la route ? Quand je verrai les yeux doux et tristes d’une
maman qui s’embueront de larmes et que sa voix familière me murmurera : Mon
petit.
Pourrai-je prendre la route ? Quand je sentirai autour de mes épaules
l’enlacement de deux bras blancs. La douce caresse de fins cheveux blonds et le
baiser de deux lèvres amoureuses.
Pourrai-je prendre la route ?
Roland Actorie
Etre gouverné :
c’est être gardé à vue, inspecté, espionné, dirigé, légiféré,
réglementé, parqué, endoctriné, prêché, contrôlé, estimé, apprécié, censuré,
commandé, par des êtres qui n’ont ni le titre, ni la science, ni la vertu (…).
Etre gouverné, c’est être à chaque opération, à chaque transaction, à chaque
mouvement, noté, enregistré, recensé, tarifé, timbré, toisé, côté, cotisé,
patenté, licencié, autorisé, apostillé, admonesté, empêché, réformé, redressé,
corrigé. C’est, sous prétexte d’utilité publique, et au nom de l’intérêt
général, être mis à contribution, exercé, rançonné, exploité, monopolisé,
concussionné, pressuré, mystifié, volé ; puis, à la moindre résistance, au
premier mot de la plainte, réprimé, amendé, vilipendé, vexé, traqué, houspillé,
assommé, désarmé, garotté, emprisonné, fusillé, mitraillé, jugé, condamné,
déporté, sacrifié, vendu, trahi, et pour comble, joué, berné, outragé,
déshonoré. Voilà le gouvernement, voilà sa justice, voilà sa morale ! Et dire
qu’il y a parmi nous des démocrates qui prétendent que le gouvernement a du bon
; des socialistes qui soutiennent au nom de la Liberté, de l’Egalité et de la
Fraternité, cette ignominie, des prolétaires qui posent leur candidature à la
présidence de la République ! Hypocrisie ! ... (…) O personnalité humaine ! Se
peut il que pendant soixante siècles tu aies croupi dans cette abjection ?
Pierre-Joseph Proudhon,
« Vivre pour vivre »,
E. Armand