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C e livre est le fruit du croisement de deux domaines : l’accompagnement et la

méditation. Comment, par la pratique de la pleine conscience, peut-on rendre plus


juste sa posture de coach et, en conséquence, améliorer la qualité de ses
interventions ? Cette posture s’articule autour de cinq piliers : faire preuve de présence
attentive, d’acceptation inconditionnelle, de détachement de soi, d’ouverture et
d’intelligence émotionnelle.
L’auteure s’adresse à tous ceux qui accompagnent : coach, psychothérapeutes,
parents... Atypique et déculpabilisant, l’ouvrage ne se contente pas d’expliciter la posture
à adopter par le coach mais explique aussi pourquoi elle est si difficile à incarner. Des
exercices à mettre en œuvre pour cultiver les qualités requises, avec des éléments issus
des derniers travaux en neurosciences, sont proposés pour guider le lecteur.

Céline Levita, certifiée Executive Coach HEC et diplômée du DU Médecine Méditation


et Neurosciences, accompagne des professionnels depuis près de vingt ans en
entreprise. Formée à la méditation de pleine conscience, elle pratique quotidiennement
depuis environ dix ans et initie des groupes notamment en entreprise. Ses qualités les
plus reconnues et appréciées par ses clients sont : la présence, la profondeur d’écoute
et la justesse de l’action. Qualités qu’elle renforce chaque jour dans sa pratique de
pleine conscience et de méditation.
Céline Levita

Coacher et accompagner en pleine


conscience
Cultiver les 5 piliers d’une posture juste grâce à la méditation
Éditions Eyrolles
61, bd Saint-Germain
75240 Paris Cedex 05
www.editions-eyrolles.com

En application de la loi du 11 mars 1957, il est interdit de reproduire


intégralement ou partiellement le présent ouvrage, sur quelque support que
ce soit, sans l’autorisation de l’éditeur ou du Centre français d’exploitation
du droit de copie, 20, rue des Grands-Augustins, 75006 Paris.

© Éditions Eyrolles, 2018


ISBN : 978-2-212-56888-2
Remerciements

À tous mes enseignants dont j’espère ne pas avoir altéré les enseignements.
À mes examinateurs d’HEC qui m’ont soufflé l’idée folle d’écrire ce livre.
À mes confrères, amis et membres de ma famille qui m’ont encouragée et
soutenue tout au long du chemin.
À Charlotte et Robin dont la patience a été immense.
À Élodie Bourdon et Marguerite Cardoso pour leur regard professionnel.
À Nicolas, Solenne, Nathalie et Flore pour leur relecture minutieuse,
bienveillante et sans complaisance.
À tous mes clients dont le cheminement est pour moi une source
d’inspiration quotidienne.
Sommaire

Votre premier outil : c’est vous !


L’origine du livre
Pour qui ?
Ce que j’entends par coaching et accompagnement
Pourquoi ce livre ?
Comment lire ce livre ?
Un témoignage de mon chemin
Ne croyez rien de ce que je vous dis

PARTIE 1
Les 5 piliers de la posture juste

Premier pilier :
la présence attentive
Qu’entend-on par présence ?
Les enjeux de la présence

Deuxième pilier :
l’accueil inconditionnel bienveillant et non jugeant
Qu’entend-on par l’accueil inconditionnel bienveillant et non jugeant ?
Les enjeux de l’accueil inconditionnel bienveillant et non jugeant

Troisième pilier :
le détachement de soi ou le désengagement de l’ego
Qu’entend-on par détachement de soi ?
Les enjeux du détachement de soi

Quatrième pilier :
l’ouverture
Qu’entend-on par ouverture ?
Les enjeux de l’ouverture

Cinquième pilier :
l’intelligence émotionnelle
Qu’entend-on par intelligence émotionnelle ?
Les enjeux de l’intelligence émotionnelle

Une évidence… pas si évidente


Se regarder vraiment ? Pas dans nos habitudes
Le manque de guide
Conséquence ? Une efficacité des coachings corrélée à la justesse de la
posture

PARTIE 2
Développer les 5 piliers d’une posture juste

La méditation de pleine conscience :


de quoi parle-t-on ?
Définitions
La méditation, ce qu’elle est et ce qu’elle n’est pas
Similitudes entre pleine conscience et coaching
Bénéfices de la pleine conscience : les preuves scientifiques

Développer le premier pilier :


sa présence attentive
Pourquoi est-ce si difficile d’être présent et attentif ?
Pour vous en convaincre – « 1’ chrono »
Pratiques formelles pour développer sa présence attentive
Ce que révèle la pratique
Comment la pratique nous aide-t-elle à développer la présence ?
« Une preuve scientifique ? »
Pour ceux qui ne veulent pas s’asseoir sur un coussin – Pratiques
informelles
En synthèse

Développer le deuxième pilier :


son accueil inconditionnel bienveillant et non jugeant
Pourquoi est-ce si difficile d’accueillir inconditionnellement et sans
jugement ?
Pour vous en convaincre – « 1’ chrono »
Pratiques formelles pour développer l’accueil inconditionnel bienveillant et
non jugeant
Ce que révèle la pratique
Comment la pratique nous aide-t-elle à développer l’accueil inconditionnel
bienveillant et non jugeant ?
« Une preuve scientifique ? »
Pour ceux qui ne veulent pas s’asseoir sur un coussin – Pratiques
informelles
En synthèse

Développer le troisième pilier :


le détachement de soi ou le désengagement de l’ego
Pourquoi est-ce si difficile de ne pas se mettre en travers du chemin ?
Pour vous en convaincre – « 1’ chrono »
Pratiques formelles pour développer le détachement de soi
Ce que révèle la pratique
Comment la pratique nous aide-t-elle à développer le détachement de soi ?
« Une preuve scientifique ? »
Pour ceux qui ne veulent pas s’asseoir sur un coussin – Pratiques
informelles
En synthèse

Développer le quatrième pilier :


son ouverture
Pourquoi est-ce si difficile d’être ouvert ?
Pour vous en convaincre – « 1’ chrono »
Pratiques formelles pour développer son ouverture
Ce que révèle la pratique
Comment la pratique nous aide-t-elle à développer l’ouverture ?
« Une preuve scientifique ? »
Pour ceux qui ne veulent pas s’asseoir sur un coussin – Pratiques
informelles
En synthèse

Développer le cinquième pilier :


son intelligence émotionnelle
Pourquoi est-ce si difficile d’être émotionnellement intelligent ?
Pour vous en convaincre – « 1’ chrono »
Pratiques formelles pour développer son intelligence émotionnelle
Ce que révèle la pratique
Comment la pratique nous aide-t-elle à développer l’intelligence
émotionnelle ?
« Une preuve scientifique ? »
Pour ceux qui ne veulent pas s’asseoir sur un coussin – Pratiques
informelles
En synthèse

Et après ? Pour aller plus loin


Comment la pleine conscience peut-elle nous aider directement en situation
de coaching ?
Faire le point : où en êtes-vous ?
Comprendre n’est pas savoir : pratiquez !
Un dernier élément pour vous encourager ?
Des idéaux à atteindre, un travail de longue haleine
Trouver du temps
Ancrer sa pratique

Bibliographie

Index
Votre premier outil : c’est vous !

« Sans connaissance de soi,


il n’y a aucune base pour la pensée et l’action juste. »

KRISHNAMURTI

L’origine du livre
« Maintenant, vous savez quelle posture adopter et quelles sont les étapes
d’un entretien de coaching : vous pouvez coacher ! » À la deuxième
journée de ma formation qui allait durer un an, j’ai cru que c’était une
plaisanterie. L’essentiel du coaching tiendrait-il uniquement dans ces deux
éléments : la posture et la structure de l’entretien ? ! Et les outils alors ?
Après l’effet de surprise vint le désarroi, car ce n’était pas un canular.
Certes, respecter des étapes était dans mes cordes. Mais il y avait un monde
entre comprendre et incarner véritablement une posture juste pour bien
accompagner. Comme aucun de mes camarades ne semblait troublé, j’ai
pensé être la seule à être inapte.
En quoi consiste cette posture que devraient adopter tous les
accompagnants – qu’ils soient coachs, psychologues, psychothérapeutes,
soignants, formateurs, managers, parents – dont la mission consiste à
permettre à la personne accompagnée d’accéder à toutes ses ressources pour
trouver ses propres solutions ?
Elle s’articule autour de 5 piliers : faire preuve de présence attentive,
d’acceptation inconditionnelle, de détachement de soi, d’ouverture et
d’intelligence émotionnelle. Pour moi, elle ne demandait pas simplement de
« faire comme si » mais d’« être » profondément et en toutes circonstances
non jugeante, ouverte… Un idéal dont je mesurais déjà l’exigence grâce à
ma pratique de méditation en pleine conscience. Je savais n’être qu’en
chemin vers ces idéaux et donc loin de les incarner parfaitement. « Ce que
tu es n’est pas un handicap si tu en es consciente », m’a répondu un
enseignant à l’instar de Goethe qui formule : « Celui qui reconnaît
consciemment ses limites est le plus proche de la perfection. » Au cours de
la formation, je réalise que mes camarades ont finalement une posture tout
aussi « imparfaite » que la mienne. Certains interviennent beaucoup,
d’autres ont des difficultés à vraiment franchir le pont qui mène au monde
du coaché, ou n’osent pas vraiment entrer dans la dimension
émotionnelle… Nous étions tous dans le même bateau : certains peu ou pas
conscients de leurs « lacunes », d’autres l’étant certainement mais ne (se)
l’avouant pas. Mon chemin de méditation me faisant déjà travailler ces
qualités d’être, j’ai soudain réalisé que la pleine conscience pouvait
constituer une voie pour cultiver ces 5 piliers d’une posture juste.
« Méditation et coaching » est ainsi devenu mon sujet de mémoire. Lors de
ma soutenance à HEC, les examinateurs m’ont invitée à continuer à
développer ce sujet essentiel à notre pratique. Lors des partages
d’expériences en supervision, j’ai pu constater chez moi comme chez mes
pairs (tant coachs que thérapeutes) que nombre des difficultés rencontrées
lors de nos accompagnements ont pour origine un pilier branlant dans la
posture. Alors que je suivais le diplôme universitaire Médecine, Méditation
et Neurosciences, où j’ai rencontré médecins, thérapeutes et soignants,
beaucoup m’ont aussi dit être concernés et intéressés par une voie de
développement de cette posture. En effet, si l’on peut parfois sentir quand
elle est juste ou non, nous sommes tous assez démunis pour en cultiver
chacun des aspects. Au fur et à mesure de ma pratique à la fois
professionnelle et de méditation, j’ai pu vérifier les bienfaits du
développement graduel des piliers que je cultivais grâce à la pleine
conscience sur la qualité de mes accompagnements. C’est ce chemin que je
partage ici avec vous.

Pour qui ?
Ce livre s’adresse à ceux en situation d’accompagner des personnes :
coachs, psychologues, thérapeutes, formateurs, managers, DRH,
accompagnants – et même parents – qu’ils soient débutants ou
expérimentés, méditants ou non. Il y a peu, le site de l’International Coach
Federation (ICF) proposait une conférence : « Suis-je un bon coach ? »
Cette question « sommes-nous de bons accompagnants ? », nous nous la
posons tous, directement ou indirectement, que nous soyons novices ou
experts. Ce livre n’y répond pas directement, mais vous invite à vous
regarder lucidement, à identifier vos marges de progrès et propose une voie
de déploiement.
Vous débutez votre pratique professionnelle ? Vous trouverez en quoi
chaque qualité humaine est bénéfique à la relation d’aide centrée sur la
personne et si vous n’êtes pas méditant, comment une pratique de la
pleine conscience peut vous aider à les développer. Si vous êtes déjà
pratiquant, vous pourrez identifier comment votre pratique peut venir
nourrir votre premier outil : la justesse de votre posture.
Vous êtes expérimenté ? Si vous avez seulement une vague idée de ce
qu’est la pleine conscience, ce livre vous expliquera ce qu’elle peut
apporter à votre pratique professionnelle déjà établie tout en vous
donnant des guides pour passer à l’action, si vous le souhaitez.
Vous avez de l’expérience en tant qu’accompagnant et en méditation ?
Alors vous pourrez faire des ponts entre les deux pratiques et voir
comment l’une et l’autre se répondent, ou tout simplement vous sentir
relié à d’autres personnes partageant le même chemin que le vôtre.
Ce livre est le fruit du croisement de deux domaines : l’accompagnement et
la méditation. Il vise à expliquer comment, par la pratique de la pleine
conscience, on peut rendre plus juste sa posture et en conséquence
améliorer la puissance de ses interventions. Par simplicité, et comme ce
livre s’adresse à tous les professionnels de la relation d’aide faisant appel à
des compétences de coach, j’utiliserai à présent les termes « coaching »,
« coach », et « coaché » ou « client ». Mais je vous invite, selon votre
pratique, à les remplacer par « thérapie », « thérapeute » et « patient » ou
« coaching », « manager » et « collaborateur », « aide », « parent » ou
« éducateur », et « enfant », etc.

Ce que j’entends par coaching et


accompagnement
Ici je m’adresse à tous les professionnels de la relation d’aide dont
l’accompagnement est centré sur la personne, lui permettant de trouver par
elle-même les réponses aux questions qu’elle se pose ou aux
problématiques qu’elle rencontre.
L’objectif d’un coaching comme de ce type d’accompagnement en général
est de donner à la personne accompagnée la possibilité, en toute autonomie
dans la réflexion et la prise de décision, de surmonter ses difficultés dans un
cadre bienveillant, grâce à un questionnement à partir duquel elle pourra
envisager de nouvelles options plus adaptées. Il s’agit de faire émerger la
réponse chez elle, de se mettre à son service pour qu’elle trouve ses propres
ressources et solutions en lien avec ses valeurs. L’International Coach
Federation (ICF) précise que le coach est un expert du processus de
coaching et reste maître du cadre. Son rôle de partenaire requiert qu’il soit
dans la position de comprendre les enjeux de son client sans toutefois être
l’expert de sa situation. Le coach posera les bonnes questions, le client
trouvera ses réponses. Le coach – désignons ainsi à présent tous les
accompagnants dans ce type d’approche – est donc responsable du
processus, il a en charge la qualité du partenariat coach/coaché qui va
permettre à la personne accompagnée de trouver ses propres solutions.

Pourquoi ce livre ?
La responsabilité de la solution étant celle du client, le prérequis pour qu’un
coaching produise des fruits est sa coopération. Sans cela, aussi brillant que
soit le coach, quel que soit le nombre d’outils dont il dispose, rien ne se
passera.
Plusieurs recherches1 ont montré que la qualité de l’alliance thérapeutique
est le meilleur prédicteur des résultats (toute forme de psychothérapie et
tout type de patients confondus). On mesure donc l’importance des
processus relationnels dans la relation d’aide. Gageons qu’une étude
analogue sur les autres types d’accompagnement, et sur le coaching en
particulier, validerait la même corrélation directe entre qualité de la relation
et efficacité du travail, indépendamment des méthodes et outils utilisés.
Pour optimiser nos interventions nous devrions donc en premier lieu
chercher à développer l’alliance avec nos clients et donc notre posture.
Nous sommes la main qui tient l’outil. Si deux doigts sont inopérants,
l’utilisation de l’outil sera moins précise et les résultats non optimaux.
Même si la plupart des accompagnants disposent naturellement d’un certain
nombre des qualités favorables à l’alliance, personne ne peut prétendre les
détenir toutes de façon absolue et en toutes circonstances. Nous avons donc
en chacun de nous un gisement inexploité d’efficacité et de profondeur de
nos coachings. Pour y accéder, nous devons nous atteler à cultiver nos
propres qualités d’être, avant d’acquérir de nouvelles méthodes ou outils.
Un jardinier, même avec les meilleurs outils et les meilleures techniques du
monde, ne pourra rien voir fleurir si son sol n’est pas adapté à la culture.
Mon intention avec ce livre est de faire prendre conscience de l’importance
de développer en soi les qualités humaines requises quand nous
accompagnons – que j’appelle les 5 piliers d’une posture juste. Je vous
propose ici de faire un premier pas pour vous donner un avant-goût d’un
chemin possible de transformation afin d’offrir les conditions les plus
propices possibles au travail du coaché.

Comment lire ce livre ?


Ce livre est construit selon un déroulé qui a son importance. Dans la
première partie, vous trouverez pour chacun des 5 piliers d’une posture
juste, la raison de leur importance dans la relation d’accompagnement. La
seconde partie propose pour chaque pilier : les raisons de la difficulté à
l’incarner, des méditations pour le cultiver et une explicitation de la façon
dont la pratique méditative peut aider à développer cette qualité. Quand
j’accompagne des personnes en individuel ou en équipe, j’ai la même
démarche : d’abord, j’explique les enjeux et les difficultés à incarner une
qualité, puis je propose de faire l’expérience de méditer. Ce qui diffère,
c’est que j’engage avec elles un dialogue exploratoire sur leur expérience
vécue en méditation pour en extraire ce que leur pratique met en évidence
pour elles. C’est une démarche qui part de l’expérience de chacun pour en
tirer les enseignements personnels qu’elle met en évidence. Cela a son
importance car personne n’est supposé vous dire ce que vous allez en tirer.
Ne pouvant faire ce travail avec vous, et dans le souci de vous faire
cheminer tout de même, je vous propose une description de la façon dont
ma pratique m’aide à cultiver ces qualités. Je ne témoigne ici que de mon
expérience que j’ai pu faire coïncider avec celle d’autres personnes, même
si cela peut sembler être rédigé comme une vérité (c’est la mienne). Il est
important que vous pratiquiez les méditations proposées et que vous vous
demandiez à l’issue de chacune d’entre elles ce dont vous avez fait
l’expérience ou ce dont vous avez pris conscience avant de lire les
chapitres suivants. Les paragraphes « Ce que révèle la pratique » et
« Comment la pratique nous aide-t-elle à développer (le pilier) » ne sont
que des invitations à observer si ce qui est décrit résonne sur votre propre
expérience. C’est une façon de vous proposer où regarder et non de vous
dire quoi voir. Par essence, ces chapitres ne peuvent remplacer la puissance
d’un dialogue exploratoire sur votre propre vécu avec un enseignant mais
ont tout de même l’intérêt de vous permettre de vous questionner sur ce que
vous tirez de la pratique – ce qui fait partie intégrante du processus de
développement proposé ici.

Un témoignage de mon chemin


Je ne suis ni pratiquante de méditation, ni coach depuis vingt ans. Je ne
prétends avoir de haute expertise ni dans l’un ni dans l’autre domaine.
Toutefois, j’ai pu constater en supervision collective avec des coachs,
psychologues et thérapeutes ou en covision que mes propres difficultés
comme celles de mes pairs ont souvent pour origine première un manque de
justesse dans la posture. J’ai donc pensé que les ponts que j’avais pu établir
entre ces deux pratiques pouvaient être utiles à d’autres. Lisez donc ce livre
comme un partage de mon propre chemin. Je ne prétends pas détenir de
vérité, je parle d’où j’en suis et de ma propre expérience. Je partage ici ce
que j’ai découvert, ce que cela m’a permis de développer et comment le
mettre en œuvre. Si vous pratiquez la méditation, certaines choses vous
paraîtront peut-être incomplètes ou différentes de ce que vous connaissez
car chacun a son propre chemin. Prenez donc ce livre pour ce qu’il est : un
témoignage et non un dogme. Pour savoir ce qui est vrai pour vous, je vous
invite à faire votre propre expérience. Chaque chapitre vous propose des
pratiques pour vous aider à cultiver une qualité mais elles vous emmèneront
probablement bien plus loin encore. Une dernière chose, certains propos
vous paraîtront peut-être évidents. Et beaucoup le sont, intellectuellement.
Si dans cet ouvrage vous avez l’impression à certains moments de lire des
choses que vous savez déjà, je vous invite à méditer car en pratiquant, vous
vous donnerez la chance de transformer un savoir en une connaissance qui
transcende la compréhension.

Ne croyez rien de ce que je vous dis


« La connaissance s’acquiert par l’expérience,
tout le reste n’est que de l’information »

EINSTEIN

Le doute et la mise en question de tout ce que je vous propose sont une


attitude saine. Croire, c’est accepter qu’une chose soit vraie sans l’avoir
éprouvée pour soi, en soi. La seule lecture de cet ouvrage sans prendre le
temps de faire les exercices proposés, même en étant convaincu par ce qu’il
propose, sera insuffisante pour évoluer vers une posture plus juste, tout
comme connaître les 5 piliers/qualités à déployer en coaching ne nous suffit
pas à les mettre en œuvre pleinement. La pratique est au cœur de
l’efficacité. Si vous voulez bénéficier des bienfaits de la pleine conscience,
je vous invite à méditer, ou si vous ne vous sentez pas encore prêt à vous
asseoir, au moins à essayer les exercices informels proposés. Ne restez pas
au niveau du savoir intellectuel, vivez-le, éprouvez-le. N’écoutez pas
seulement le récit du chemin, faites-en l’expérience par vous-même.
En résumé, ce livre n’est qu’une invitation à un voyage. Pour en tirer tous
les bénéfices, suivez le guide mais faites votre propre expérience.

1. « Research summary on the therapeutic relationship and psychotherapy outcome », Lambert A.


et Barley D. in Psychotherapy Theory Research & Practice, 2001. L’étude expose que les
facteurs qui influencent le résultat d’une thérapie pour un patient peuvent être divisés en 4
domaines : des facteurs extra-thérapeutiques, des effets d’attentes, des techniques thérapeutiques
spécifiques et des facteurs communs (tels que l’empathie, la chaleur humaine, la congruence et
la relation thérapeutiques). Les résultats détaillés de cette étude montrent que les facteurs
communs sont plus corrélés avec les résultats de la thérapie que des traitements et interventions
spécifiques. Les auteurs concluent qu’une amélioration de la psychothérapie passe avant tout par
l’amélioration de la capacité du thérapeute à se relier au client et par la qualité de relation qu’il
instaure avec lui.
« Therapist mindfulness, alliance and treatment outcome », Ryan A., Safran J.D., Doran J.M.,
Muran J.C. in Psychother Res, 2012 : l’étude démontre que la disposition à la pleine conscience
du thérapeute était corrélée à sa propre évaluation de l’alliance thérapeutique et à l’évaluation
par le patient de l’amélioration de ses relations interpersonnelles.
PARTIE 1

Les 5 piliers de la posture juste


Premier pilier :
la présence attentive

« La seule chose que vous ayez jamais


à offrir à un autre humain est votre présence. »

RAM DASS

C’est la présence attentive qui ouvre le bal des qualités humaines que le
coach devrait développer car elle est à la source de toutes les autres. C’est la
clé de voûte de tout bon coaching. L’état de présence est, pour Carl Rogers,
père de l’accompagnement centré sur la personne, l’un des cadeaux les plus
thérapeutiques que l’on puisse offrir à nos clients. Même si certains
accompagnants comme les coachs ne sont pas thérapeutes à proprement
parler, la présence peut « soigner » le sentiment d’insuffisance ou
d’inadéquation souvent sous-jacent au travail.

Qu’entend-on par présence ?


Selon la définition donnée par l’International Coach Federation (ICF) c’est
« la capacité à être complètement conscient et à créer une relation
spontanée avec le client, dans un style ouvert, souple et confiant ».
Être présent, c’est être vraiment là, tête, cœur et corps. Être centré sur
l’expérience de l’instant. C’est faire véritablement l’expérience d’être ici et
maintenant. C’est être très engagé, attentif et alerte, connecté à ce qui se
produit dans le moment, prêt à recevoir ce qui émerge.
Avant la séance
Se rendre disponible matériellement, émotionnellement et mentalement
pour accueillir l’autre.
Avoir bouclé ou reprogrammé ultérieurement ce qui pourrait nous
préoccuper ou rester en suspens pour avoir l’esprit clair, disponible et ne
pas être distrait pendant la session.
Être dans l’intention, rester centré et attentif à l’expérience de la séance.

Pendant la séance
Entrer et rester – tête, cœur et corps – dans l’espace et le temps de la
rencontre.
S’enraciner dans l’instant : ne pas se projeter dans le futur (faire de
plan), ni retourner dans le passé (ruminer une erreur).
Être vigilant aux distractions : s’assurer de ne pas s’échapper
mentalement.
Être immergé et vivre pleinement, profondément l’expérience de la
session sans pour autant s’y sentir identifié. Donc être à la fois attentif
au client, et enraciné et présent en soi-même.
Être alerte à tout ce qui se manifeste : intérieurement et extérieurement.
Être conscient et présent à ses perceptions sensorielles et corporelles, à
nos pensées et émotions, voire aux messages ou perceptions
extrasensorielles.
Être présent au niveau d’énergie ressenti : s’il est bon, alors la
dynamique du coaching est bonne. Dans le cas contraire, questionner :
qui travaille le plus ?

Après la séance
Se demander quel était le degré de connexion avec le client, si le travail
a été continu ou entrecoupé de temps morts. Quelle était la qualité de
présence pendant toute la séance ?

Les enjeux de la présence


Être là pour le client, c’est notre métier
Être vraiment présent, c’est être disponible pour accueillir le client et sa
situation. C’est permettre au client de sentir que nous sommes là
uniquement pour lui, que la séance est un temps qui lui est uniquement
dédié. Notre présence attentive est souvent le premier bénéfice ressenti par
les personnes que nous accompagnons : rencontrer quelqu’un qui est là pour
écouter, à qui parler. En effet, souvent les personnes (dirigeants, managers,
patients) se sentent seules face à la difficulté qu’elles éprouvent. Plus
spécifiquement, en tant qu’ancienne dirigeante et avec l’expérience de ceux
que je rencontre, je peux affirmer que la solitude du dirigeant est une
réalité. Il a rarement autour de lui quelqu’un à qui parler de ce à quoi il fait
face avec difficulté. De la même façon, dans un monde où chacun lutte pour
avoir notre attention, pour certaines personnes, c’est parfois en premier lieu
pour être (vraiment) entendues qu’elles viennent nous voir. Offrir une
présence attentive au client c’est lui permettre d’exprimer son problème, de
pouvoir le déposer.
Pour Hycner1, la qualité de présence de l’accompagnant est déterminante
dans le processus de « guérison » ou de résolution de la problématique si
l’on parle du domaine du coaching. Selon lui, elle impacte même plus la
qualité et la profondeur du travail que le choix des outils.

Offrir un cadre propice au travail


Être vraiment présent, c’est se détacher de tout ce qui n’est pas en lien avec
l’ici et maintenant. Cela limite le risque de « polluer » la séance avec des
éléments extérieurs. En effet, si nous nous faisions flasher par un radar
automatique avant d’arriver en séance et ne parvenions pas à nous défaire
de notre contrariété, nous risquerions de créer un climat tendu, et peu
propice au travail.
L’alliance est une volonté commune de progresser ensemble fondée sur la
confiance. Sans elle, il est impossible d’imaginer un accompagnement
efficace. L’alliance, c’est d’abord être en lien. Or comment faire alliance si
nous ne sommes que partiellement là ? Seule notre véritable présence (tête,
cœur et corps) rendra l’alliance possible.
Être présent et attentif, c’est s’impliquer personnellement, s’immerger avec
le client et aller à sa rencontre dans son expérience. Nous sommes alors
intégralement dans l’espace et le temps de l’échange. Faisant l’expérience
d’un autre vraiment présent, le coaché se retrouve confronté à sa propre
envie d’être là et de s’engager.
Se détacher de ce qui n’est pas directement là ici et maintenant, c’est créer
un espace intérieur dans lequel nous pouvons accueillir tout ce que le client
a à déposer. Le vide créé appelle à être rempli, il fonctionne comme un
appel d’air et devient une invitation pour le client à entrer dans sa séance.
C’est aussi cet espace qui lui permet de se sentir à l’aise pour poser tous les
aspects de sa situation. Parfois le simple fait d’avoir pu tout mettre à plat lui
donne l’opportunité de réassembler les pièces de son puzzle différemment,
ou de voir qu’une pièce manque et de trouver sa propre solution.

POINT CLÉ
La présence attentive est une chose tellement rare dans nos sociétés
pressées, qu’être véritablement présent pour l’autre, c’est donner au
moment une dimension unique et précieuse pour que le client le vive
comme un événement important pour lui, un instant à part à exploiter.

Avoir une écoute empathique


L’état de présence attentive nous ancre et nous centre sur le moment
présent, sur l’ici et maintenant de la séance. Il favorise une attention accrue
aux détails. Il permet de percevoir des signaux plus subtils, au-delà de ce
qui est dit : ce que le client manifeste corporellement, signe d’une tension
ou d’une émotion, les variations de ton ou de rythme, les subtilités de
langage et le choix des mots qui révèlent un vécu particulier… C’est ce qui
nous permettra une compréhension plus fine du coaché. Silsbee2 dit : « La
présence est au-delà de la compétence d’écoute et ce qui permet à la réelle
écoute de prendre place. »
La présence attentive nous connecte aussi à nous-mêmes. Nous pouvons
alors être à l’écoute de la façon dont la situation de notre client résonne en
nous. La présence nous enracine également en nous. À partir de ce lieu
d’ancrage, nous pouvons ressentir ce que notre coaché traverse tout en
restant stable en nous, sans nous identifier, sans nous laisser submerger.
Nous pouvons faire l’expérience de la connexion, de l’empathie véritable,
évitant l’écueil de la sympathie – souffrir avec.
Cet état de présence et de stabilité est également ce qui permet au client de
se sentir en sécurité pour exposer ses expériences et vivre ses émotions
difficiles en séance.

Agir avec justesse


Dans les accompagnements dont nous parlons ici, il est important de créer
les conditions pour que le client trouve ses propres réponses. Nous ne
sommes pas là pour les trouver à sa place. Notre valeur ajoutée est avant
tout notre présence en tant qu’altérité pour permettre au coaché de
confronter ses perceptions, ses façons de faire, d’avancer.
Notre réelle présence attentive permet au client de se sentir en confiance.
Elle lui permet de trouver en lui des ressources qu’il ne soupçonnait pas.

RETOUR D’EXPÉRIENCE
Notre capacité à simplement demeurer là, sans chercher à agir,
dans le silence, permet aussi parfois au client de cheminer et
d’aller au-delà de la question posée.

Quand on est présent, on n’est ni préoccupé par le passé, ni par l’avenir, on


est ancré dans l’ici et maintenant attentif et alerte à ce qui émerge dans
l’expérience de l’instant. On peut alors composer plus justement avec ce
que la réalité présente, demande, propose. C’est comme quand on surfe. Les
bons surfeurs savent accorder leurs mouvements à tous les éléments
présents : leur condition physique, leur souplesse, la taille de la vague, sa
vitesse, le vent, le clapot, les caractéristiques de leur planche, la position
des autres surfeurs, etc. Être présent, c’est s’ajuster avec ce qui est là. C’est
donc source d’une action juste et créative dans nos interventions.
Sans présence à soi, on risque de s’oublier. Or en coaching, il est essentiel
que le coach soit à son aise pour travailler. Être présent à ce qui se passe en
nous, nous permet d’identifier si tout se déroule normalement ou si quelque
chose a besoin d’être ajusté pour travailler dans les meilleures conditions
possibles.
Être attentif à ce qui se passe en soi, c’est aussi être modélisant pour le
coaché dont la problématique est souvent également de prendre en compte
toutes les parties de lui-même pour agir.

Ce que l’on peut retenir


Parfois on est physiquement là mais on s’absente mentalement
soit parce que l’on pense subitement à quelque chose, soit
parce que notre esprit se désengage du présent.
Malheureusement, cette absence, pourtant seulement mentale,
ne passe pas inaperçue et est ressentie par l’autre.

Dans la seconde partie, nous verrons comment cultiver cette présence


attentive qui est difficile à maintenir tout au long d’une journée et même
parfois d’une séance.

1. R. Hycner et L. Jacobs, The Healing Relationship in Gestalt Therapy: A Dialogic/Self-


Psychology Approach, Gestalt Journal Press, 1995.
2. D. Silsbee, Presence-Based Leadership: Cultivating Self–Generative Leaders Through Mind,
Body, and Heart, John Wiley & Sons, new edition 2008.
Deuxième pilier :
l’accueil inconditionnel bienveillant et
non jugeant

« Juger, c’est de toute évidence ne pas comprendre


puisque, si l’on comprenait, on ne pourrait pas juger. »

MALRAUX

Qu’entend-on par l’accueil inconditionnel


bienveillant et non jugeant ?
Accueillir, c’est ouvrir les bras et développer une tendresse, une attention,
une douceur vis-à-vis de ce qui se présente en nous et autour de nous. La
question de l’accueil inconditionnel suppose une forme de dualité avec ce
qui est à accueillir. C’est tout embrasser sans distinction, même ce qui nous
est désagréable et que nous n’apprécions pas, permettre aux autres et aux
circonstances d’être ce qu’ils sont. Cela signifie regarder une personne ou
une situation sans activité mentale : dire « oui » à ce qui est, au réel, quel
qu’il soit, « c’est ». « C’est là où en est mon coaché… OK ! » « C’est ainsi
qu’avance le coaching… OK ! » : reconnaître ce qui est à l’instant T. C’est
donner de l’espace et l’attention nécessaire à ce qui est présent afin d’être
en mesure de choisir, de poser l’action juste par rapport à la situation, et non
de chercher à l’ignorer, ou à l’éviter.
Ce que ce n’est pas ? Accepter ne signifie pas être d’accord. C’est juste
reconnaître que c’est ainsi. Ce n’est pas non plus se résigner. Dans
l’acceptation véritable, il y a un calme intérieur. La résignation ou la
soumission s’accompagnent d’émotions de tristesse, de colère, ou
d’impuissance. Accepter n’est pas être indifférent. Quand on accepte
quelqu’un ou quelque chose, on est avec même si nous n’aurions pas fait ce
choix, alors que l’indifférence marque une coupure avec l’autre. La
véritable acceptation, ce n’est pas non plus nier ou mettre un couvercle sur
ce que la situation ou la personne nous fait ressentir de désagréable, sinon
notre acceptation ne serait que partielle.

Avant la séance
Avoir l’intention d’accueillir le coaché même s’il nous semble
« difficile ».
Accepter que le coaché ou sa situation suscite des tensions en nous et
accepter ces tensions.
Accepter ses propres failles, vulnérabilités, zones d’ombre pour les voir
et ne pas y succomber ni s’en défendre.

Pendant la séance
Accueillir les erreurs, errances, difficultés, blocages, réactions de nos
clients avec bienveillance.
Ne pas juger.
Accepter ses propres erreurs, difficultés, émotions négatives survenant
pendant le coaching pour rester disponible et ne pas entamer un discours
avec soi-même et se couper du coaché.

Après la séance
Accepter ce qui a été réussi et aussi ce qui a échoué pour identifier les
raisons de cet échec, en prendre la responsabilité et être en mesure de le
corriger.
Accepter les états internes négatifs comme la frustration, la tristesse, la
colère… au lieu de chercher à nous en distraire pour pouvoir en
identifier l’origine.
Les enjeux de l’accueil inconditionnel bienveillant
et non jugeant
Accueillir inconditionnellement notre client, c’est notre métier
Nos clients viennent en séance parce qu’ils ne parviennent pas seuls à
trouver une solution satisfaisante à leur problématique. Souvent, sans que
nous ayons besoin de le faire, ils se jugent déjà eux-mêmes négativement de
ne pas y parvenir sans que cela leur soit d’aucune utilité pour avancer.
Notre rôle est justement de leur permettre d’accueillir ce qu’ils se
reprochent d’être ou de faire pour qu’ils puissent repérer ce qui motive –
souvent non consciemment – cette situation et leur permettre de trouver une
meilleure issue. Pour cela, nous devons commencer par les accueillir tels
qu’ils sont pour leur permettre de se voir sans déformation. « Le miroir
réfléchit une image parfaite : il ne s’égare pas parce qu’il ne pense pas »
(Fernando Pessoa).

Offrir un cadre propice au travail


En refusant ou en jugeant, on rejette le réel. On imprime cette forme de
violence dans le coaching qui risque de créer des réactions de défense. Si le
client ne se sent pas accepté, compris intégralement, il ressent honte, gêne,
colère, tristesse ou dégoût – émotions négatives qui induisent un mode
défensif. Il risque de se débattre, de fuir le travail ou de se tétaniser.
Le non-jugement permet la responsabilisation du client et l’internalisation
du bien et du mal. Si nous sommes non jugeant, le client ne pourra pas être
tenté d’ajuster son discours ou ses décisions par rapport à nous. Il sera
renvoyé à lui-même, à ce qu’il sent qui est bon ou vrai pour lui, ce qui est
exactement le but recherché en coaching.
Notre aptitude à embrasser tout ce que le client est, dit ou fait – que nous
soyons d’accord avec ou pas – fait de nous un allié sur qui il peut compter.
Pour une fois, avec nous, ce qu’on lui a sûrement maintes fois reproché, ce
qu’il rejette en lui est accueilli. Notre accueil inconditionnel lui permet
enfin d’être tel qu’il est vraiment, sans risque.

RETOUR D’EXPÉRIENCE
Combien il est reposant de trouver une personne qui nous
accueille tel que nous sommes sans avoir à porter de masque
pour faire bonne figure, quelqu’un sur qui nous reposer, capable
de nous écouter, de nous aimer sans nous juger malgré nos
petitesses, nos vulnérabilités !

L’acceptation inconditionnelle est essentielle pour créer un climat de


confiance et d’alliance. Pour Carl Rogers, ce regard positif inconditionnel
est une condition nécessaire au travail. En acceptant le coaché, on le
sécurise. Il n’y a donc plus de risque. Il n’y a plus rien à cacher, tout peut
être dit. Le temps de la séance au moins, il peut se présenter sans fard. Il
peut s’autoriser à être qui il est vraiment sans avoir peur du jugement. Notre
acceptation peut lui permettre d’envisager de s’accepter tel qu’il est. Il peut
recontacter tous ses besoins, désirs… et la motivation sous-jacente qui lui
fait adopter une solution non optimale. C’est l’opportunité pour lui de se
voir vraiment tel qu’il est dans toutes ses dimensions. L’énergie autrefois
utilisée pour masquer ce qu’il n’aimait pas peut alors être mise au service
d’une recherche de solution prenant en compte vraiment tous les aspects,
même les plus intimes de son expérience. La question pour l’accompagnant
n’est donc pas « est-ce que ce que je vois est bien ou mal ? » mais plutôt,
« est-ce que je regarde assez longtemps pour faire le tour du problème ? ».
Lors de la mise en œuvre de nouveaux comportements, le non-jugement du
coach l’aidera aussi, en cas d’échec, à continuer à essayer de nouvelles
choses.

Les bienfaits de l’acceptation inconditionnelle


L’acceptation inconditionnelle limite la peur d’être jugé, rejeté ou
humilié en cas d’échec. Elle offre une plus grande confiance et
ouverture à sortir des sentiers battus pour expérimenter de
nouvelles choses. On le voit avec les enfants : ceux que l’on
juge négativement quand ils se trompent ou échouent lors d’une
première tentative, ont tendance à ne pas réitérer et à rester
dans des chemins connus, à ne plus prendre de risque.
Avoir une écoute empathique
Si nous développons un accueil inconditionnel également de ce que nous
sommes, nous pourrons mieux nous accepter avec nos propres faiblesses et
vulnérabilités. En faisant preuve de bienveillance, de douceur et de
compréhension à notre égard, nous pourrons faire de même avec les autres.

POINT CLÉ
L’acceptation de soi est un préalable indispensable à l’acceptation et à
l’empathie pour l’autre.

Dans accueillir, il y a accepter. Accepter c’est ne plus se débattre contre la


réalité, c’est rester en contact avec ce qui est – ce que nous propose le client
– au lieu de le fuir ou de le nier. Sans accueil inconditionnel nous ne
pourrons pas aller à la rencontre de l’autre ni de sa situation. Juger, c’est
créer une séparation qui mène au rejet ou à l’intolérance. Accepter, c’est se
donner la chance de percevoir l’expérience du coaché depuis son point de
vue et de le comprendre, de ressentir sa souffrance, sa difficulté. Nous ne
sommes alors plus dans l’observation distante, mais capables d’empathie.
De l’acceptation inconditionnelle naît la compassion qui est au cœur du
travail d’accompagnement.
Il semble difficile d’imaginer notre métier sans cet intérêt et cette
gentillesse que l’on attend de ceux vers qui l’on se tourne quand on
demande de l’aide.

Agir avec justesse


Le contraire d’accueillir inconditionnellement c’est juger ou rejeter. Juger
une personne ne définit pas qui elle est mais plutôt qui vous êtes, ce que
vous aimez, appréciez, ce qui a de la valeur pour vous. Or, c’est la façon
dont le client perçoit sa situation qui nous intéresse, et non ce que nous en
pensons.
Quand nous jugeons l’autre, nous croyons détenir la vérité tandis que
l’autre aurait tort. Juger serait en quelque sorte tenir une posture de
« sachant », une posture haute. Accepter c’est avoir la curiosité d’aller
explorer les motivations de notre client, ses raisons, sans vouloir imposer
ses vues. Dans la même idée, c’est au coaché de fixer jusqu’où il peut/veut
aller.

Ce que l’on peut retenir


Rester au rythme du client c’est avoir la sagesse d’accepter les
choses que nous ne pouvons pas changer.

Tout ce que l’on juge mauvais ou mal nous donne envie de réagir pour le
faire disparaître. Si nous ne jugeons pas, rien n’est bon, ni mal, « c’est »
seulement. Cela n’engendre pas de réaction émotionnelle. Notre non-
jugement offre une plus grande justesse dans les décisions et la conduite de
l’accompagnement.
S’abstenir d’exprimer son jugement n’est pas acceptation inconditionnelle.
Comme nos pensées, émotions et comportements sont liés, si nous portons
sur quelqu’un un jugement, il nous sera quasiment impossible – à moins de
n’être plus centré que sur nous-mêmes (et encore !) – de ne pas en produire
une manifestation physique (une expression sur le visage, une crispation, un
recul…) laquelle, même infime et à peine visible, sera captée par notre
interlocuteur. Ce que nous souhaitions ne pas exprimer sera tout de même
perçu avec les mêmes effets délétères. Nous avons donc intérêt à cultiver
profondément en nous cette acceptation inconditionnelle, ce non-jugement
de toute chose.
Troisième pilier :
le détachement de soi ou le
désengagement de l’ego

« Inutile de tirer sur l’herbe pour qu’elle pousse. »

PROVERBE ZEN

Qu’entend-on par détachement de soi ?


Le détachement de soi, c’est cesser de mettre son ego en « travers du
chemin ». C’est cesser de se laisser guider par soi, ses propres préférences,
envies, besoins, peurs, aversions, attractions… mais agir en fonction de ce
que la situation requiert.
Être détaché de soi, c’est agir à partir de ce qui se présente, et non à partir
de ce que nous voudrions que ce soit, de notre vision des choses, de notre
mémoire de situations passées. C’est donc se laisser guider par ce que le
réel exige dans l’unicité de l’instant et non pour son propre intérêt ou besoin
individuel. Cela ne nous empêche pas de maintenir une intention dans
l’action, mais sans nous attacher au résultat. C’est agir avec un engagement
détaché : une action désintéressée qui oublie notre réputation, notre
performance. C’est le concept taoïste de WU WEI ( ) qui peut être
traduit par le non-agir ou la « non-intervention » qui pourtant ne se rapporte
ni à l’inactivité ni à la passivité mais plutôt au non-attachement au fruit de
ses actions, au fait de s’abstenir de toute action dirigée, intentionnelle,
interventionniste.
Se détacher de soi signifie oser quitter ses amarres, ne pas chercher à se
rassurer, ni vouloir manipuler les situations pour les ramener vers le connu,
confortable ou sécurisant, c’est accepter de faire face à l’incertitude, au
différent, à l’inconnu. C’est accepter de ne pas contrôler, donc faire
confiance et être en position de vulnérabilité puisque nous ne nous référons
alors plus à ce que nous connaissons, savons, croyons.

Avant la séance
Lâcher prise avec ses problématiques personnelles.
Ne pas avoir d’intention pour la séance : ne pas avoir fait de projet
(contenu de la séance, méthode ou exercice à utiliser) et se laisser
guider par l’expérience de la séance, par ce que le client amène.
Se détacher éventuellement de l’envie de « presser » le coaching parce
que l’on est encore loin du résultat attendu et qu’il reste peu de séances.
Poser l’intention de n’être centré que sur le coaché et sur ce qui
émergera.

Pendant la séance
S’assurer de n’intervenir qu’au seul bénéfice du coaché.
Vérifier de poser des questions qui aideront le client et non pour nous
permettre de comprendre afin de trouver nous-mêmes la solution.
Ne pas avoir d’intention particulière de vouloir atteindre ou obtenir ceci
ou cela.
Vérifier de ne pas être dans l’effort.
Accepter que le client ne valide pas une hypothèse et lâcher prise avec
l’idée que nous avions commencé à explorer. Lui faire confiance pour
savoir ce qui est juste pour lui à cet instant.
Entendre quand un client nous dit avoir besoin d’autre chose que ce que
nous faisons, et accepter de cesser ce que nous étions en train de faire,
de ne pas aller au bout.
Faire confiance et se laisser guider par ce qui est en train de se passer
même si c’est inhabituel.
Ne pas interférer, insister, forcer, pousser pour que cela aille plus vite ou
dans un sens particulier.
Ne pas ajouter d’intelligence : ne pas interpréter ou ajouter à ce qui a été
exprimé.
Laisser œuvrer les silences.
Ne pas réagir personnellement aux réactions du coaché.

Après la séance
Vérifier que nous n’avons pas plus travaillé que le client.
Si la séance n’a pas avancé, si une résistance s’est manifestée… se
demander en quoi on a trop poussé, on s’est trop imposé ?

Les enjeux du détachement de soi


Être détaché de soi, c’est notre métier
Les accompagnements de type coaching sont des relations qui permettent le
libre développement de la personne accompagnée. Notre métier consiste à
nous mettre au service du client pour lui permettre de trouver lui-même ses
propres ressources et solutions. Nous sommes « l’outil » de la personne que
nous accompagnons, à sa disposition. En cela, nous nous différencions des
consultants : nous ne sommes pas là pour donner notre avis d’expert, nous
agissons comme des sages-femmes, nous aidons le client à faire son travail,
à accoucher de sa solution. Notre vision des choses, ce que nous estimons
juste, nos propres objectifs, nos envies, croyances, etc. n’ont rien à faire ici.
Comme un jardinier, nous créons les conditions, apportons le soin
nécessaire pour que les solutions émergent du client. La non-directivité
dans le déroulement de la séance est au cœur de la démarche.

POINT CLÉ
Ce n’est pas l’accompagnant qui fait progresser le client mais le client qui
progresse grâce à la relation que l’accompagnant aura instaurée avec lui.

Offrir un cadre propice au travail


En nous détachant de nous-mêmes, nous devenons modélisants pour l’autre.
Nous l’invitons, lui aussi, à se détacher de ses propres croyances pour se
donner l’opportunité de voir les choses sous un angle nouveau, et trouver
des réponses plus adaptées à sa situation.
« Les seules connaissances qui puissent influencer le comportement d’un
individu sont celles qu’il découvre par lui-même et qu’il s’approprie » (Carl
Rogers). Fournir les réponses ne conduira pas durablement à un
changement du coaché. Vouloir accélérer le processus non plus. Fritz Perls,
père de la gestalt-thérapie, nous avertit : forcer un changement, même
désiré, engendre une résistance chez le coaché (consciente ou non). Nous
devons donc accepter que le changement ne se fera qu’au moment opportun
pour le client, donc inutile de pousser. C’est pour cela que nous devons
nous détacher de nos propres objectifs, et faire confiance au processus et au
client : le changement se fera au rythme qu’il peut supporter. Les
changements opérés, s’ils ont été choisis uniquement par lui en fonction de
ce qui lui convient vraiment, seront plus durables.

Avoir une écoute empathique


Être attachés à notre côté de la rive – notre vision du monde – nous
empêche de traverser la rivière et d’atteindre celle de l’autre. Nous devons
accepter de lâcher la sécurité de notre « port d’attache », de ce qui est
connu, pour pouvoir traverser et aller dans le monde singulier du client.
Pour vraiment percevoir la situation telle que notre coaché la perçoit et
pouvoir entrer en réelle empathie avec lui, nous devons nous détacher de ce
qui nous tient de notre côté : notre vérité. Une fois que nous parvenons à
écouter sans interpréter, accoler notre expérience ou nos croyances, à nous
laisser guider sans plan préconçu par ce qu’offre la situation, c’est-à-dire à
nous défaire de notre ego, nous pouvons écouter avec le cœur. C’est
seulement ainsi que nous pourrons prétendre avoir une écoute empathique.

Agir avec justesse


Se détacher de soi c’est se détacher de ses savoirs, croyances, valeurs et ne
pas les considérer meilleurs. Ainsi nous éviterons le piège qui consisterait à
croire que l’on sait mieux que le client ce qui est bon pour lui (solutions,
exercices…). Accompagner, détaché de soi, c’est utiliser sa propre
perception comme un autre éclairage possible, sans la tenir pour une vérité ;
c’est faire preuve d’humilité et se laisser guider en confiance par ce qui
émerge et non par la sécurité de ce que nous connaissons déjà. C’est donc
sortir de l’illusion de la toute-puissance, que le succès dépend de nous.
C’est avoir confiance dans le processus lui-même, dans la capacité du
coaché à trouver ses propres ressources et solutions. C’est devenir son outil,
être à son service. C’est vraiment adopter la position basse.
Le processus transférentiel induit des comportements du coaché vis-à-vis du
coach (séduction, agressivité…) qui lui appartiennent et qui ne sont que le
produit de la réactivation d’un moment du passé au cœur de la relation. Ils
sont sans rapport avec nous. Si nous ne sommes pas détachés, nous risquons
de les prendre personnellement et d’y réagir dans un processus contre-
transférentiel. Alors qu’en prendre conscience avec distance nous donne un
élément supplémentaire sur le mode de fonctionnement du client et nous
permet aussi de voir les processus parallèles qui se jouent dans la relation
de coaching.
Notre intention dirige notre attention et la place d’une certaine façon.
Observer sans objectif en étant détaché de soi c’est donc se donner une
chance de ne pas biaiser notre perception. Regarder, écouter, expérimenter
ce qui est véritablement au creux de la séance, sans référence à son propre
cadre de référence, en étant détaché de sa vision du monde, sans préjugé,
sans attente, c’est voir ce qui est là, le plus objectivement possible,
indépendamment de son expérience, de ses habitudes, de son interprétation,
de ses jugements. Quand nous nous relions au présent dénué du filtre
« moi », nous pouvons voir ce que cette session de coaching exige de nous
à cet instant précis pour cette personne. Nous pouvons agir en fonction de
ce qui est nécessaire ici et maintenant et non en fonction de soi, de ses
propres plans – donc agir avec justesse et souplesse.

Ce que l’on peut retenir


Accompagner, c’est choisir ses interventions en fonction de ce
qui se produit dans l’instant, d’y répondre au lieu de vouloir
appliquer un plan établi. C’est ce qui rendra chacune de nos
séances véritablement uniques et sur mesure.
Percevoir la façon dont la situation du client résonne en soi est essentiel
pour le lien, l’alliance, l’empathie, mais cela doit être sans attachement,
sans identification au ressenti, sinon, nous risquons de suragir, de faire à la
place du coaché, avec trop d’intention et de rigidité parfois, pour ne plus
ressentir cela en nous. La résonance détachée est donc essentielle pour des
interventions justes de la part du coach.

Les bienfaits du silence


Les silences sont souvent des moments très fructueux pour le
coaché. Mais nous sommes souvent tellement centrés sur nous
– obnubilés par ce que nous voudrions dire, si inconfortables
avec le silence, ou si pressés d’avancer pour être sûrs
d’atteindre l’objectif – que nous les laissons peu opérer. Or tout
ce qui nous empêche de les laisser exister, c’est notre ego :
notre besoin de raconter notre histoire, notre inconfort que l’on
veut faire cesser… Si nous nous détachons de nous-mêmes,
nous pouvons laisser ces silences faire leur œuvre.

L’ego dirige tellement nos vies que nous ne sommes pas toujours conscients
de tous les moments où il est aux commandes. Pour agir avec détachement
de soi, vous trouverez en seconde partie comment apprendre à repérer et
parvenir à lâcher prise avec son désir de contrôle.
Quatrième pilier :
l’ouverture

« L’esprit du débutant contient beaucoup de possibilités,


mais celui de l’expert en contient peu. »

SHUNRYU SUZUKI (MAÎTRE ZEN)

Qu’entend-on par ouverture ?


Une ouverture, c’est un espace vide qui permet l’accès, l’entrée quelque
part ; c’est un point de communication entre deux endroits. Être ouvert,
c’est se rendre disponible, être curieux et accepter l’inconnu et l’imprévu.
C’est avoir un esprit fluide toujours capable de contacter la singularité et
l’impermanence de chaque instant. C’est garder l’esprit humble et curieux
comme si l’on faisait l’expérience pour la première fois. Être ouvert quand
on accompagne, c’est être prêt à percevoir et accueillir, et se laisser habiter
par tout ce qui émerge de l’expérience en séance : les perceptions
sensorielles venant de chacun des sens (vue, ouïe, odorat, sensations
physiques), les ressentis émotionnels, les idées qui se présentent dans
l’instant, et ce, tant chez la personne ac-compagnée qu’en soi-même.

Avant la séance
Faire de la place en soi en se débarrassant des préoccupations du passé
et du futur.
Avoir l’intention consciente de demeurer en position de réceptivité, de
ne se fermer à rien de ce qui se manifeste.
Rester curieux de son client et de sa situation comme au premier jour :
ne pas chercher à se rappeler les séances passées.
Ne rien présumer savoir à l’avance, ne rien anticiper pour la séance, ou
préjuger de ce qui risque de s’y passer.

Pendant la séance
Être attentif aux signaux de fermeture en soi : contractions, pensées qui
prennent toute la place… et se détendre physiquement pour se rouvrir
mentalement.
Rester curieux même quand on croit deviner, savoir ou pouvoir
anticiper. Ne pas présumer mais faire préciser même ce qui semble
évident. Oser poser des questions naïves. Ne pas se laisser guider par
nos idées préconçues, interroger comme si l’on ne savait rien.
Savoir laisser des questions en suspens, sans réponse.
Être disponible, curieux et ouvert à tout ce qui pointe, le laisser entrer,
ne rien filtrer ou rejeter, qu’il s’agisse d’idées, d’images, d’émotions ou
de sensations corporelles même si elles ne semblent pas avoir de sens.

Après la séance
Être curieux de son propre état interne, de ses pensées, de ses sensations
corporelles à l’issue de la séance.
Revoir la séance en tant qu’observateur neuf, qui la regarderait se
dérouler pour la première fois sous ses yeux.
Être curieux de tous les moments où l’on s’est senti être au bon endroit
et ceux où l’on aurait pu faire différemment.

Les enjeux de l’ouverture


Ouvrir, c’est notre métier
Le plus souvent nos clients ont déjà essayé à maintes reprises de résoudre
leur problématique avant de venir nous consulter et n’ont pas trouvé la
solution pour aller plus loin. Notre métier consiste donc à les aider à ouvrir
des voies de travail inexplorées. Nous devons donc les inviter à envisager
de nouvelles possibilités et pour ce faire, les amener à être curieux et
ouverts. En l’étant nous-mêmes, nous les invitons au plan systémique à en
faire de même. En étant curieux de leur situation, nous les amenons à
questionner leurs évidences et initions d’autres perspectives. En étant
ouverts à l’instant présent, nous les invitons à regarder ce qui est là
maintenant et non pas ce qui a été. Nous leur permettons de se libérer des
projections du passé sur le futur.

Offrir un cadre propice au travail


L’alliance est le point de départ de tout travail. Sans elle, aucun travail
efficace ne peut s’opérer. Pour que le client s’engage avec nous, il doit
sentir que nous nous intéressons à lui. Il est donc essentiel que nous
fassions preuve de curiosité et d’ouverture vis-à-vis de qui il est et de ce qui
le préoccupe.
Rester ouvert et voir le client avec un œil neuf à chaque instant sans
surimposer une vision passée, c’est le libérer de ce qui pouvait
l’emprisonner. C’est lui laisser toutes les possibilités, toutes ses chances de
devenir quelqu’un d’autre, c’est lui ouvrir le champ des possibles.
Par définition, il nous est impossible de penser l’inconnu. Pour envisager de
nouvelles options, nous devons donc nous détacher de ce que nous
connaissons pour voir comme pour la première fois. Être ouvert, c’est
prendre le parti de tout entendre, tout explorer, quoi que ce soit. En limitant
nos propres rigidités, nous pouvons sortir du déjà-vu, imaginer
l’improbable, envisager des combinaisons inédites. Débridant les
possibilités, nous pouvons explorer beaucoup plus d’options sans censure et
permettons ainsi au client d’élargir les siennes. Nous rendons par notre
ouverture la circulation de nouvelles idées possibles.

Avoir une écoute empathique


S’ouvrir, c’est aussi permettre de se laisser toucher par la situation du
coaché, c’est ne pas fermer, mais laisser pénétrer en soi ce que le client
traverse, ne pas rester à distance. C’est être réceptif à la façon dont son
expérience résonne en nous. « Écouter avec la troisième oreille1 » comme
dit Reik, écouter avec le cœur et avec le corps l’expérience vécue à ces
mêmes niveaux par le client. Cette expérience vécue en commun permet de
créer une résonance empathique forte et une écoute plus profonde : pas
seulement intellectuelle ou extérieure.

Agir avec justesse


Être ouverts, c’est lutter contre nos habitudes, contre le confort de ce qui est
routinier. C’est donc remettre en cause les évidences, les croyances, les
savoirs tenus pour vrais. C’est la garantie pour le client que nous ne nous en
tiendrons pas à la partie visible de l’iceberg, qu’il a déjà probablement
explorée, mais que nous irons au-delà pour éclairer les angles morts, les
parties non visibles jusqu’ici – l’essence de notre valeur ajoutée.
Si l’on reste accroché à ce que l’on croit savoir, si l’on regarde ce qui est au
travers du prisme d’hier, de ce que nous avons retenu, on se coupe de tout
ce que l’on ne sait pas et on limite sa perception à ce que l’on connaît déjà,
on risque de rater ce qui est actuel et inédit, on commence à limiter les
possibilités.

RETOUR D’EXPÉRIENCE
Même s’il peut y avoir des similitudes, il n’y a jamais parfaite
identité entre deux coachings. L’ouverture de notre attention
nous permet de capter la singularité de la problématique et de la
situation de notre client à l’instant T et d’adapter notre ac-
compagnement précisément à ce que la situation exige au
présent, limitant l’utilisation systématique de méthodes
préétablies « qui fonctionnent bien dans ce cas-là ».

Être ouvert, c’est aussi savoir se détacher de ses propres savoirs,


croyances… pour pouvoir tout voir tel que c’est. En effet, si nous nous arc-
boutons sur un modèle (par exemple, l’Analyse transactionnelle, la Process
Communication Management, le Myers Briggs Type Indicator – MBTI, la
systémique…) nous risquons de ne retenir de la réalité que ce qui nous sera
utile dans ce cadre, nous coupant du reste de l’expérience.
Le langage corporel, la respiration, le ton ou le rythme de la voix peuvent
venir contredire ou questionner les propos tenus. Il nous faut une attention
très ouverte pour à la fois entendre ce qui est dit et parvenir à percevoir ces
indications complémentaires. Même en ayant capté ces informations non
verbales, il nous faut encore une grande ouverture pour ne rien interpréter,
ni affirmer, et seulement proposer au client d’explorer si cela a un sens. Car
parfois, nous faisons une hypothèse et plutôt que l’envisager comme telle,
elle devient une certitude que nous voulons valider à tout prix. À ce
moment, nous nous fermons, nous restreignons notre exploration, notre
attention, nous sommes davantage au service de notre hypothèse et de nous-
mêmes qu’à celui du client. Rester ouverts, même quand nous croyons être
sûrs de nous, permet de compléter notre perspective en demeurant au
service du client. C’est être dans la posture ou l’attitude du novice, celui qui
ne détient aucune certitude, qui demeure curieux. Être ouverts à tout, même
à accepter la possibilité qu’une chose puisse être vraie, alors que nous
sommes presque certains qu’elle est fausse. C’est laisser la chance à ce à
quoi l’on ne croit pas, ou qui nous paraît a priori impossible… c’est laisser
le client mener la danse, à son rythme, en fonction de là où il est capable
d’aller à l’instant T. C’est faire confiance au coaché pour savoir ce qui est
bon pour lui à cet instant, et au processus.

POINT CLÉ
Plus nous demeurerons ouverts, plus nous pourrons mettre d’informations
en lumière, ce qui permettra au coaché de réévaluer sa situation, et de
trouver sa solution plus pertinente.

Être ouverts, c’est aussi être réceptifs à tout ce que l’expérience fait
émerger en nous ; c’est donc non seulement prendre en compte toutes les
informations de l’environnement mais également les signaux internes qui se
manifestent au cours de la séance, même si nous ne parvenons pas à leur
donner de sens, ou s’ils ne nous semblent pas « rationnels ». Ces éléments
peuvent se produire sous la forme d’images, de sons, de mots, d’idées,
d’émotions, de sensations, et constituer des éléments complémentaires de
réflexion ou des pistes de travail avec le client.
S’en ouvrir, les partager avec le client peut lui permettre de se sentir
profondément compris ou de réaliser ce qui se passe en lui et dont il n’avait
pas conscience. Cela peut lui offrir une perspective nouvelle. En nous
ouvrant à tous ces signaux internes et en les lui communiquant, nous
l’invitons en retour à faire de même et à contacter des éléments sous-jacents
qui peuvent l’aider à trouver son chemin.

Ce que l’on peut retenir


Les habitudes, les similitudes, les raccourcis et la suprématie du
mental nous coupent de notre plein potentiel de réceptivité sans
que nous en ayons toujours conscience. Pour pouvoir remplir
pleinement notre fonction qui consiste à mettre en lumière la
situation de la façon la plus complète possible, nous devons
absolument cultiver notre ouverture, car c’est dans l’éclairage
de ce qui était dans l’ombre que le client trouve ses solutions.

1. T. Reik, Listening with the Third Ear: the Inner Experience of a Psychoanalyst, Farrar, Straus
and Giroux, 1983.
Cinquième pilier :
l’intelligence émotionnelle

« C’est la manière dont nous nous situons par rapport


à nos émotions qui nous enchaîne ou nous libère ».

JACK KORNFIELD

Qu’entend-on par intelligence émotionnelle ?


Faire preuve d’intelligence émotionnelle, c’est être capable d’entrer en
contact, de percevoir, de reconnaître, de prendre en compte sans être sous
leur emprise ses propres émotions et celles des autres.

Avant la séance
Contacter et prendre conscience de son état interne.
Retrouver une forme de neutralité émotionnelle avant de commencer
l’entretien.
Avoir pour intention d’entrer en connexion avec la dimension
émotionnelle de ce que vit le client.

Pendant la séance
Repérer les manifestations émotionnelles en soi.
Prendre en compte ses propres émotions qui émergent en séance :
identifier si elles m’appartiennent (contre-transfert ou si elles indiquent
un besoin non satisfait pour soi et comment y répondre) ou s’il s’agit de
l’émotion du client qui résonne en moi, et déterminer alors comment
s’en servir.
Repérer l’émergence d’une émotion chez le client, refléter ce que l’on
perçoit ou questionner ce qui se passe pour lui dans l’instant.
Accueillir les émotions du client sans chercher à les amoindrir ou à les
faire disparaître.
Laisser la résonance émotionnelle du client s’opérer en nous tout en
restant ancré en soi.
Explorer avec lui l’émotion : d’abord l’accueillir et l’aider à
comprendre le message qu’elle porte.

Après la séance
Contacter l’état interne dans lequel on est. S’il est désagréable
(frustration, fatigue, colère…) l’accueillir et voir ce qu’il dit pour
pouvoir le libérer, et revenir à un point neutre pour le coaching suivant.
S’il est agréable, explorer ce qui nous satisfait et si c’est juste.

Les enjeux de l’intelligence émotionnelle


Éclairer la dimension émotionnelle de la situation, c’est notre
métier
Quand un client se trouve face à une situation insatisfaisante, ou difficile, si
nous nous en tenons aux aspects rationnels ou « techniques », nous risquons
de tourner en rond ou de nous heurter à des résistances, car un enjeu
émotionnel sous-jacent mais prédominant mène le plus souvent la danse. À
titre d’exemple, certaines personnes ne parviennent pas ou hésitent à faire
un choix qu’elles conçoivent pourtant intellectuellement comme « ce qu’il
faudrait faire » ou l’« idéal ». Pourquoi ? Elles cherchent à éviter à tout prix
de ressentir les émotions désagréables (anxiété, gêne, peur…) qu’il
provoque en elles. Elles préfèrent adopter des options non optimales, juste
pour ne pas les éprouver. Ces évitements émotionnels sont souvent la cause
des difficultés de nos clients. Tant qu’ils ne confronteront pas leurs
émotions, ils resteront bloqués dans leur situation, ne pourront pas prendre
la décision adéquate et se mettre en action. Notre métier consiste à éclairer
ce qui se passe pour eux, à mettre au jour la partie dite « irrationnelle » – en
fait émotionnelle – agissante. Pour ce faire, nous devons être à l’aise avec
ce champ d’exploration en nous-mêmes.

Offrir un cadre propice au travail


En restant au plan rationnel, nous ne traitons que superficiellement la
problématique du coaché. Le coach ne pourra explorer en confiance les
émotions difficiles de son client que s’il se sent lui-même confortable avec
les siennes. C’est également la condition pour offrir un cadre sécurisant
pour les explorer en séance. Offrir la permission à son client de vivre ses
émotions par rapport à la situation lui permettra de se défaire de ses
défenses pour pouvoir étudier son problème plus rationnellement. Pour
pouvoir utiliser et exploiter ce qui se joue au plan émotionnel pour le
coaché, le coach doit avoir l’habitude de confronter ses propres émotions et
en connaître les mécanismes.
Nos états émotionnels sont la lentille à travers laquelle nous voyons le réel.
Quand nous sommes dans un état émotionnel négatif, nous voyons le
monde à travers ce filtre et sommes moins à même de trouver de nouvelles
possibilités. Nos émotions désagréables activent dans notre corps des
réactions physiologiques pour nous permettre de nous défendre. Notre corps
est entièrement – cerveau compris – mobilisé pour notre préservation et
n’est plus du tout ouvert à de nouvelles possibilités à cet instant-là. Pour
pouvoir recréer de l’ouverture et explorer de nouvelles voies, il faudra avoir
changé d’état émotionnel. Que ce soit pour notre coaché comme pour nous-
mêmes, sans conscience de la présence d’une émotion désagréable et sans
nous en détacher, nous ne pourrons nous ouvrir aux possibilités qu’offre la
situation. Or masquer, occulter, ou se battre contre ne nous mènera pas à ce
résultat.
Nous devons veiller à créer un climat de travail neutre en nous et chez la
personne accompagnée avant d’entrer dans la phase de recherche de
solution. Par la suite, pour permettre à notre client d’être dans les meilleures
conditions pour réussir, il est important de nous assurer qu’il est confiant
dans la nouvelle option et qu’elle respecte son écologie globale. Nous
devons donc pouvoir vérifier qu’elle génère des émotions positives. Ce sera
alors le signe que cette nouvelle approche est alignée avec qui il est.
Avoir une écoute empathique
Plus la personne se sentira comprise – également au plan émotionnel – par
celui qui l’accompagne, plus l’alliance sera puissante.

POINT CLÉ
Le coach doit pouvoir se laisser toucher par le vécu du coaché pour
pouvoir ressentir une réelle empathie, sinon son écoute risque d’être
distante, froide. Mais pour cela, il doit être à l’aise avec ses propres
émotions désagréables pour ne pas être tenté de fuir celles du coaché et
savoir rester ancré en lui-même pour ne pas être emporté.

Agir avec justesse


Les travaux de Damasio et de LeDoux1, entre autres, confirment
l’hypothèse selon laquelle les émotions jouent un rôle décisif en ce qui
concerne le déclenchement de l’action. Les émotions créent des allers-
retours entre le cortex préfrontal (la raison) et le cerveau limbique,
purement émotionnel. Si l’émotion générée est trop forte, elle l’emportera
toujours sur les éléments rationnels qui ne parviendront pas à la
contrebalancer. Sous l’emprise d’une émotion, c’est-à-dire, sans recul, nous
prenons des décisions dictées par elle et non par la raison. Notre action
n’est alors ni juste, ni objective, mais guidée par nos propres attractions ou
répulsions.

Ce que l’on peut retenir


Si le coach est pris par ses émotions négatives, il risque de
réagir pour les faire disparaître. À l’inverse, si elles sont
positives, il cherchera à les faire durer alors que ce n’est pas
nécessairement le plus approprié dans l’instant. Dans ces deux
cas de figure, il ne serait plus au service de son client, mais
seulement de lui-même.
Notre aptitude à percevoir nos émotions en séance nous permet de prendre
du recul et limite notre réactivité émotionnelle. Être conscient de ses
émotions, c’est aussi pouvoir questionner ce qui se passe pour nous. Est-ce
une résonance de l’histoire du coaché sur notre propre histoire ? Est-ce une
réaction à son comportement en séance réactivant une vulnérabilité ? En
prendre conscience nous met en garde contre tout (contre-)transfert. Est-ce
une indication qu’un besoin n’est pas satisfait pour nous et le cas échéant
comment y remédier pour continuer à travailler dans de bonnes conditions ?
Est-ce un reflet systémique ou une perception de ce qu’éprouve le coaché ?
Le lui exprimer sera peut-être l’occasion d’une conscientisation de ce qui se
joue intimement pour lui.

RETOUR D’EXPÉRIENCE
Les émotions du coach sont un matériau intéressant à utiliser au
bénéfice du coaching.

L’authenticité de l’accompagnant est également une des attitudes


mentionnées par Carl Rogers comme facteur d’efficacité.

Distinguer l’authenticité de la juste authenticité


Partager avec son client ce que l’on ressent est de l’authenticité.
Pour ce faire, il est nécessaire de percevoir, de reconnaître et
d’exprimer ce que nous fait éprouver la situation, donc de faire
preuve d’intelligence émotionnelle pour nous-mêmes.
Mais la juste authenticité dépend de ce qui meut le partage.
Quand nous sommes présents à nos émotions, nous sommes
capables de déterminer si l’envie de partager est à notre service
– s’il s’agit d’une réaction émotionnelle – ou si c’est au bénéfice
du client :
si l’envie de communiquer ce que nous ressentons est
presque irrépressible, cela signifie probablement que nous
sommes sous l’emprise d’une émotion, c’est une réaction
émotionnelle qui risque de n’être qu’au service de nous-
mêmes ;
si nous pouvons nous abstenir de partager ce que nous
éprouvons, ce vécu peut être un élément d’éclairage à mettre
à disposition du coaché.

Parvenir à se mettre à un niveau « neutre » émotionnellement pour une


séance, et être suffisamment ouvert, attentif, permet de ressentir ses états
internes varier et devenir parfois très désagréables brutalement. Au lieu de
chercher à en comprendre l’origine, on peut tout simplement se laisser
guider par cela pour déterminer ce qu’il convient de faire à ce moment-là
pour soi, en particulier quand la sensation est subite ou forte. Ce ressenti
peut être utilisé comme boussole pour revenir à un état plus propice au
travail.

Exemple

Si le coach perçoit une tension soudaine, il peut se laisser


guider par ce que l’invite à faire cette sensation : proposer un
exercice pour se détendre. Si la sensation était le reflet de ce
qui se passait pour le client, ce faisant, le coach l’aidera à
trouver un état plus propice au travail. S’il s’agissait de quelque
chose n’appartenant qu’au coach, être à l’écoute et prendre soin
de cette tension lui permettra d’être plus à son aise pour
continuer d’accompagner son client.

Notre réaction habituelle est de nous couper et de fuir nos états internes
désagréables. Pourtant, ils constituent un radar formidable de ce qui se
passe dans la séance. Plus notre familiarité avec nos émotions est grande et
plus nous accéderons à des informations subtiles, utiles à notre
accompagnement.

1. https://www.amazon.fr/J-Ledoux-and-A-Damasio/dp/B003BMXEQG/ref=sr_1_fkmr0_1?
ie=UTF8&qid=1522312710&sr=8-1-fkmr0&keywords=antonio+damasio
Une évidence… pas si évidente

« Il est de la nature de l’évidence qu’elle passe inaperçue. »

JEAN PAULHAN

Pour renforcer l’efficacité de nos accompagnements, nous devrions


chercher en premier lieu à améliorer la qualité de la relation que nous
instaurons avec nos coachés. C’est le point de départ de tout travail et un
facteur démultiplicateur de nos méthodes et outils. Cultiver nos qualités
humaines est donc essentiel.
Nous devrions nous atteler à travailler sur nous-mêmes pour nous assurer
d’offrir en particulier :
une réelle présence à l’autre ;
une réelle acceptation de l’autre, tel qu’il se présente ;
une réelle non-directivité ;
une réelle ouverture ;
une réelle intelligence émotionnelle.
Et ce, quelles que soient les circonstances.

Se regarder vraiment ? Pas dans nos habitudes


Pour ce faire, il faudrait que nous sachions d’où nous partons. Comme le
disait Arnaud Desjardins, « On ne peut commencer à guérir d’une maladie
qu’en sachant de quoi on souffre ». Il s’agit donc, d’abord, d’avoir une
vision juste de nos propres qualités pour pouvoir ensuite les cultiver plus en
profondeur. Une fois que nous nous serons vus sans nous mentir, dépassant
notre tendance habituelle à nous sur- ou sous-estimer, à nous justifier ou à
nous juger, nous pourrons commencer à progresser.
Malheureusement, le plus souvent, ce n’est qu’en supervision que nous
prenons le temps de nous regarder, quand nous sommes confrontés à une
difficulté ponctuelle dans une situation particulière ou en thérapie quand
nous constatons que nous butons trop souvent sur le même problème, mais
nous ne le faisons pas au long cours.

Ce que l’on peut retenir


Les qualités humaines sont souvent reléguées au second plan,
on ne s’y intéresse que lorsqu’elles créent un réel
dysfonctionnement. Pourquoi ?

Le manque de guide
La grande majorité des accompagnants qui exercent aujourd’hui, a été
formée de façon plus ou moins poussée à des outils, des référentiels, des
méthodes… Mais en ce qui concerne l’attitude à adopter, rares sont les
formations qui vont au-delà de sa description. Même si, lors
d’entraînements, ou dans notre pratique, nous prenons conscience que nous
sommes trop ceci ou pas assez cela, nous ne savons pour autant pas
comment cultiver les qualités requises. C’est à croire que l’on considère
implicitement que tous les accompagnants les détiennent naturellement et
oublient simplement de les mettre en œuvre ou que « savoir est pouvoir ».
Malheureusement, la réalité est différente. Sans voie de développement,
certains préfèrent complètement occulter la question. Ils se concentrent sur
les outils de coaching et non sur leurs qualités intrinsèques comme leur
formation les a invités à le faire. D’autres tentent de faire face à ce
sentiment d’inaptitude, cette conscience inconfortable de ne pas être
toujours vraiment justes dans leur posture et cherchent à la
« contrebalancer » avec encore plus de techniques, d’approches, d’outils.
Beaucoup culpabilisent car même en cherchant à adopter la posture juste, il
est difficile de lutter contre tout ce qui nous conduit à ne plus y être.
Le plus souvent, chacun fait donc avec ce qu’il est, bon an mal an, et quand
la séance n’a pas été optimale, qu’elle aurait pu être plus efficace, qu’il ne
s’est pas passé grand-chose, même si le client est content, notre réflexe est
de nous dire que l’on aurait dû utiliser d’autres outils, d’autres méthodes,
d’autres techniques, ou bien en utiliser plus ou les utiliser mieux. Comme le
dit un proverbe anglais : « Un mauvais ouvrier blâme ses outils. »

Conséquence ? Une efficacité des coachings


corrélée à la justesse de la posture

UN MANQUE DE PRÉSENCE ATTENTIVE

LA SITUATION
Dès les premières séances, le client oublie de réserver une salle puis arrive
en retard et semble attendre beaucoup du coach. Par la suite, il ne fait pas le
travail qu’il s’engageait à faire entre les séances. Pourtant il ne rate aucun
rendez-vous et dit être content du travail effectué. Le coach sent que
quelque chose ne fonctionne pas, ressent une forme de passivité mais pas
franchement ouverte. Alors, il ne dit rien. Voyant les séances s’égrener sans
réelle avancée et la fin approcher, il redouble d’efforts pour faire avancer le
client qu’il veut vraiment aider, avec peu de succès. Il finit par bouillir
d’impatience parce que rien ne se passe et par ressentir beaucoup de tension
vis-à-vis de son client qui semble ralentir à mesure que le coach pousse. Le
coaching se finira en demi-teinte pour le coach et le coaché.

DÉCRYPTAGE
La présence à soi aurait permis au coach de vraiment accueillir et prendre
en compte ce qui se passait pour lui. Il aurait pu l’utiliser au service de la
relation de coaching en demandant par exemple au client ce qu’il pensait de
son avancée par rapport à l’objectif. S’il en était satisfait, le coach aurait pu
aller explorer pourquoi ce rythme créait une telle tension en lui et se
remettre au service du client. Si le client était insatisfait, le coach aurait pu
remettre au centre de l’accompagnement sa sensation « ça n’avance pas »
dans l’intérêt du coaché en partageant son ressenti et en questionnant ce qui
était en train de se passer.

LE PLUS
Souvent, nous ne nous servons pas des premiers signaux internes qui nous
informent de ce qui se passe parce que nous ne sommes pas assez présents à
nous-mêmes.

UN MANQUE D’ACCUEIL INCONDITIONNEL

LA SITUATION
Un client vient avec pour objectif de développer ses aptitudes relationnelles.
Il se plaint beaucoup et reporte sans cesse la faute de ses maux sur ses
collaborateurs, ses collègues, ses patrons… Il se positionne en victime. Cela
fait émerger chez le coach une irritation violente qu’il s’interdit de ressentir.
La réalité est pourtant qu’il lui est insupportable de l’entendre se plaindre
ainsi. Il ne parvient pas à l’accueillir inconditionnellement. Il essaie alors
rapidement de lui faire envisager les situations autrement qu’avec une
perspective de victime, de lui faire prendre conscience que sa
problématique est liée à cette façon de se positionner. Conséquence : le
client ne se sent pas entendu et insiste pour faire comprendre à quel point il
n’a pas de chance dans sa situation, ce qui renforce encore l’agacement du
coach.

DÉCRYPTAGE
Sans réel accueil inconditionnel du client au départ, le coach lui inflige en
quelque sorte la même blessure que celle qu’il vit au quotidien. Il ne peut
donc être un allié. Un phénomène de résistance/contre-résistance s’installe.
L’alliance ne sera jamais vraiment au rendez-vous. Le travail patinera
jusqu’à la fin.
Si le coach était vraiment parvenu à accueillir son client tel qu’il vivait
sa situation, en acceptant – même s’il ne voyait pas les choses ainsi –
que la réalité de son coaché soit celle-là, ce dernier se serait
probablement senti compris et n’aurait plus cherché à « convaincre » le
coach ni à se défendre. L’alliance aurait pu s’instaurer.
Si le coach avait accueilli son irritation au lieu de chercher à s’en
départir, il aurait pu voir la vulnérabilité touchée en lui et veiller à ne pas
lui laisser mener la danse, pour ne pas être en réaction et demeurer au
service de la situation.

UN MANQUE DE DÉTACHEMENT DE SOI

LA SITUATION
Le coaché arrive en séance avec pour objectif de se détendre vis-à-vis d’une
réunion à fort enjeu qui aura lieu juste après le coaching. Sur une échelle de
1 à 10 la détente est évaluée à cet instant par le client à 4/10. Le coach lui
propose un exercice de cohérence cardiaque, un exercice qui vise la
relaxation. Ils pratiquent cet exercice assis. Au milieu de l’exercice, le
coaché dit qu’il sent que cela le détend un peu mais qu’il se sent très agité
et qu’il aurait besoin de se décharger pour pouvoir se sentir mieux. Le
coach sûr de ce qu’il fait – il connaît les bienfaits de cet exercice quand il
est mené à son terme, c’est-à-dire sur une durée de cinq minutes – lui
répond : « Finissons l’exercice et voyons comment vous vous sentez
après. » À cet instant, il est plus dans une position « je dois le détendre et je
sais ce qui est bon pour lui » que dans celle « il doit se détendre et ce que je
lui ai proposé lui a fait prendre conscience de ce dont il avait besoin ». Il
poursuit donc son exercice pour le mener à son terme tel qu’il « doit » être
réalisé, sans l’aménager pour tenir compte du besoin du client. Il l’élude
complètement même. Une fois l’exercice terminé, le coach demande au
client d’évaluer son niveau de détente. La réponse est 8/10. « Que vous a-t-
il manqué pour être à 10 ? », demande le coach. « Bouger en faisant cet
exercice », lui répond le coaché.

DÉCRYPTAGE
Le coach est resté trop centré sur sa technique telle qu’il la connaissait et
dont il avait déjà probablement pu vérifier l’efficacité. Il n’a pas su se
détacher du connu (le protocole) pour se laisser guider par le besoin
exprimé du client et aménager l’exercice afin de mieux répondre à ce que la
situation exigeait.

GRÂCE À L’OUVERTURE…

LA SITUATION
Un coaching se passe dans un salon de thé. Le client vient d’identifier ce
qu’il voudrait vraiment faire, ce qui le motive, ce qui serait extraordinaire et
dont il serait fier. Mais après la joie, vient l’abattement… Cela demande
tellement. Il y a tellement d’étapes à franchir, de personnes à convaincre
avant d’y parvenir. Le client est abattu. Le coach a bien quelques idées de
choses simples par lesquelles commencer, questionne son client pour
l’amener à en identifier quelques-unes, mais le client ne les trouve pas. Ne
voulant rien induire, pour laisser toute autonomie à son client et ne pas
suragir, il s’abstient de lui faire des propositions. À ce moment-là, la
serveuse apporte les thés accompagnés de biscuits. Le coach prend un
morceau du sien et, en le brisant, réalise qu’un message se trouve à
l’intérieur. Alors il a l’idée de proposer au client de lire la phrase du sien et
d’envisager en quoi ce qui est indiqué pourrait l’aider. La phrase du biscuit
du client était « Little and often makes much » (peu et souvent fait
beaucoup). La coïncidence fait sourire le client, change son état émotionnel
et lui permet de lister quantité de petites actions qui feraient la différence et
le conduiraient vers son objectif.

DÉCRYPTAGE
Cette ouverture, cette prise en compte de l’environnement extérieur comme
matériau pour le coaching a permis au client de sortir de son cadre habituel
et de trouver de nombreuses nouvelles options.

GRÂCE À L’INTELLIGENCE ÉMOTIONNELLE…

LA SITUATION
Le client, habituellement avenant, aimable, arrive à la séance les traits
crispés. Quand le coach lui demande comment il va, il répond « bien » la
mâchoire serrée. Quand le coach lui dit qu’il lui semble pourtant contrarié,
il lui explique succinctement, qu’il ne souhaite pas plus en parler mais que
lors de la dernière réunion son patron lui a fait un sale coup. Il a le souffle
court. Manifestement, il est encore mentalement et émotionnellement à
cette réunion. Le coach, lui aussi, sent que son souffle s’est raccourci. Il
ressent un besoin de respirer pour apaiser la tension et l’état interne négatif
que cela a créé dans son corps. Il a besoin de retrouver plus de calme pour
démarrer. Il propose alors un temps de respiration au coaché pour prendre le
temps d’arriver dans la séance. Il ne cherche ni à le forcer à dire ce qu’il ne
souhaite pas dire, ni à éluder ce qui est là, émotionnellement, il le prend en
compte. Au bout de quelques respirations, alors que le coach sent une forme
de décontraction s’installer en lui et se sent prêt à démarrer, le client dit
qu’avoir fait cet exercice a permis de faire descendre d’un cran sa rage et
que maintenant il peut en parler sans risquer d’exploser. Le reste de la
séance portera sur comment se libérer de la colère et de la honte qui
l’habitent.

DÉCRYPTAGE
C’est en tenant compte de l’émotion qui était là – probablement la
réverbération de ce qu’éprouvait le coaché –, et en agissant pour retrouver
une plus grande tranquillité intérieure et être dans de meilleures conditions
d’exercice, que le coach a permis au client de se mettre au travail.
Les cas de coachings évoqués ici vous rappellent peut-être des situations
vécues ou entendues en supervision. On voit ici à quel point la justesse de la
posture du coach est déterminante pour la qualité, la profondeur et
l’efficacité du coaching.

En seconde partie de ce livre vous comprendrez pourquoi les qualités qui


nous conduisent à cette posture juste sont si difficiles à incarner à 100 % et
comment la pleine conscience peut nous aider à les cultiver pas à pas – à la
fois en nous permettant de nous voir lucidement tels que nous sommes, et
en cultivant une à une ces qualités.
PARTIE 2

Développer les 5 piliers d’une posture


juste
La méditation de pleine conscience : de
quoi parle-t-on ?

Définitions
La pleine conscience, aussi appelée « mindfulness » ou encore « pleine
présence », est communément définie ainsi :
Porter attention, délibérément, instant après instant, au moment
présent, sans jugement.
La pleine conscience peut désigner à la fois :
une technique de méditation (une façon particulière d’être attentif au
moment présent) ;
un état momentané résultant de cette façon d’être attentif dans les
pratiques et dans la vie ;
l’objectif ultime, l’aboutissement : l’état permanent.
Ce terme désigne le chemin, le fruit et l’aboutissement, en même temps.
Dans ce livre nous nous intéressons à comment progresser vers l’objectif
ultime, en cultivant et en multipliant ces moments de pleine conscience par
l’utilisation de la technique de méditation.
La pleine conscience en tant que technique, nous conduit à observer ce qui
se passe en nous et autour de nous et à prendre du recul vis-à-vis de nos
réactions mentales pour agir avec plus de conscience.
Ce concept s’enracine à l’origine dans les enseignements bouddhistes. On le
trouve également dans les traditions soufies, taoïstes et chrétiennes. En
1979, la pleine conscience quitte la seule sphère religieuse et se laïcise avec
le programme Mindfulness Based Stress Reduction (MBSR) – un
programme de réduction du stress fondé sur la pleine conscience – que crée
et introduit Jon Kabat-Zinn en milieu médical (University of Massachusetts
Medical Center) aux États-Unis.
Ruth Baer, professeur de psychologie à l’université du Kentucky définit
l’état de pleine conscience comme notre capacité à :
observer ses sensations, perceptions, pensées et émotions ;
identifier avec des mots ces observations ;
ne pas réagir à l’expérience intérieure ;
ne pas juger l’expérience (constater sans condamner) ;
agir avec conscience.
Mais comme le disait Francisco Varela, neurobiologiste et philosophe
chilien, « la mindfulness est une expérience à la première personne, c’est
une science de l’expérience vécue ». En effet, alors qu’en temps normal
notre cerveau fonctionne principalement sur le mode de la pensée
intellectuelle (cerveau gauche), quand on médite, on fait une expérience
directe du réel, notamment par nos sens, qui ne fait pas appel aux concepts
(cerveau droit) et qui devient donc difficilement descriptible avec des mots.
Votre propre pratique, mieux qu’une définition, vous permettra donc de
savoir de quoi il s’agit.

La méditation, ce qu’elle est et ce qu’elle n’est pas


La méditation est simplement un moment que l’on choisit de dédier à
l’exercice de cette qualité d’attention parti-culière. Dans les pratiques
formelles nous ne faisons pas grand-chose hormis rester assis et observer ce
qui se passe dans notre tête pour nous familiariser avec notre mental. Il
s’agit de la première étape. Méditer ne requiert donc aucun talent physique
ou intellectuel particulier (seulement pas mal de persévérance !). Quand
nous aurons réussi à tranquilliser et à stabiliser notre esprit, nous pourrons
ensuite observer ce qui se passe en nous et autour de nous, par
l’intermédiaire de toutes nos perceptions sensorielles.
La méditation permet de :
Nous voir tel que nous sommes : nous observons le fonctionnement de
notre mental. Nous devenons plus familiers avec ses habitudes, ses
modes automatiques, ses contenus, la façon dont nous y réagissons. Elle
est le moyen de nous regarder en action.
Nous détacher de nos « mauvaises habitudes ». En nous observant, nous
prenons du recul, portons un regard critique sur nos automatismes et
retrouvons un espace de liberté et de choix dans nos réponses. À chaque
chapitre, j’expliquerai ce que les pratiques proposées permettent de voir
puis de cultiver.
Comprendre avec les premiers progrès que le pouvoir de nous
transformer est dans nos mains et qu’à tout âge on peut évoluer.
La méditation est donc non seulement un état mais aussi une voie pour
entraîner et développer son esprit pour agir avec plus de justesse, moins
soumis aux exigences de notre mental.
Pour être tout à fait honnête, lorsque je me suis rendue à ma première
séance MBSR, la méditation n’était pas aussi vulgarisée qu’aujourd’hui et
je craignais de me retrouver dans une secte, de devoir chanter, ou d’avoir à
effectuer des rituels… Ce sont aussi peut-être les inquiétudes que vous avez
et il est vrai que la définition de la méditation semble tellement simple que
l’on peut avoir l’impression que l’on ne nous dit pas tout. Je vais tenter ici
d’expliciter aussi tout ce qu’elle n’est pas pour compléter cette définition.

Pas besoin de suivre des rituels, de brûler de l’encens ou de porter des


vêtements particuliers
Ceux qui ont une pratique religieuse de la méditation peuvent méditer ainsi.
Mais je parle ici d’une pratique laïque consistant en un moment
d’intériorisation pour se familiariser avec son mental. Aucune divinité dans
les parages et rien à croire surtout ! Pas de conflit donc avec votre propre
religion.
Quand j’initie des personnes en milieu professionnel, elles sont simplement
assises sur une chaise et en tenue de travail et pas question de faire brûler de
l’encens dans les bureaux sous peine de déclencher l’alarme incendie !
Aucun accessoire n’est donc requis. Toutefois, si vous pratiquez chez vous
vous aurez peut-être envie de vous asseoir sur un coussin au sol et dans ce
cas, une tenue confortable sera peut-être plus appropriée, mais c’est vous
qui verrez !

Nul besoin d’un maître ou d’un gourou


Si vous n’avez pas de quête spirituelle, si vous cherchez seulement à vous
sentir mieux, à développer vos qualités humaines, les exercices proposés ici
pourront vous servir de guide. Faire appel à un instructeur peut toutefois
vous permettre d’aller plus loin dans l’exploration de votre expérience de
méditation et d’en tirer plus de fruits.

La méditation n’est ni un repli sur soi ni une façon de se couper du


monde ou d’éviter les problèmes
Certes, la pratique souvent s’effectue dans un moment à part, où l’on est
seul mais dans une qualité de connexion à soi et à ce qui nous entoure plutôt
meilleure qu’habituellement. Idéalement, méditer en pleine conscience a
pour vocation de vous entraîner à agir ensuite en pleine conscience dans
votre vie quotidienne. À terme, de plus en plus d’activités peuvent
progressivement devenir une méditation en action. Les bienfaits issus de la
pratique sont certes bénéfiques pour soi mais aussi pour ceux qui nous
entourent. C’est d’ailleurs la démonstration que tente de faire cet ouvrage.

La méditation n’est pas une méthode de relaxation ou de bien-être


Détente et bien-être sont des « effets secondaires » non systématiques de la
pratique de la méditation. Les techniques de relaxation visent la détente –
un état différent de l’état actuel. La méditation en pleine conscience
consiste à observer ce qui est là et ne cherche pas à atteindre un état
particulier. Ultimement, la méditation vise la conscience et non la détente
ou le bien-être.

RETOUR D’EXPÉRIENCE
Parfois même devenir conscient de certains aspects de nous-
mêmes ou de nos émotions n’est ni confortable ni relaxant !

La méditation n’est pas qu’être dans le moment présent


Certes être dans le moment présent est une composante de la méditation en
pleine conscience mais elle demande aussi une attention particulière portée
à cet instant, tant intérieure qu’extérieure.

La méditation n’est pas faire le vide dans sa tête


Notre cerveau a pour fonction, entre autres, de créer des pensées. Nous ne
pouvons donc arrêter ce flux : c’est impossible. Chercher à stopper vos
pensées ne fera que les renforcer. Il s’agit donc de les observer sans s’y
attacher et elles s’apaiseront. Méditer c’est constater ce qui est et non pas
chercher à le modifier.

La méditation n’est pas que pour les contemplatifs


J’en suis une preuve vivante. Ceux qui me connaissent vous diront que je
suis plutôt quelqu’un de très actif. Et effectivement, au début, j’imaginais
difficilement comment j’allais pouvoir rester assise à ne rien faire pendant
vingt minutes alors que ma vie de chef d’entreprise, de maman, impliquée
dans la vie associative, sportive, etc. m’attendait. Mais justement comme l’a
dit saint François de Sales « Une demi-heure de méditation est essentielle
chaque jour sauf quand on a une vie très occupée. Dans ce cas, une heure
est nécessaire ». Plus on a d’activités, plus on a de chance d’être pris dans
des pensées, des tourments, etc., qui vont obstruer notre vue lucide des
situations. Méditer, c’est investir du temps pour agir plus efficacement.
Quand j’anime des programmes avec des comités de direction, chacun
parvient à libérer du temps chaque semaine alors qu’ils sont pourtant tous
très occupés.

Similitudes entre pleine conscience et coaching


Dans le coaching comme dans la pleine conscience, on cultive cette
position d’observateur, de témoin non jugeant qui regarde ce qui est de
façon neutre et avec recul. Les deux disciplines apprennent à changer la
relation que nous avions avec notre expérience. Dans la pleine conscience,
nous nous positionnons nous-mêmes en témoin non jugeant de ce que nous
vivons. Dans le coaching, c’est le coach qui permet au coaché de prendre du
recul. Devenant capables de distinguer les faits des émotions qu’ils
provoquent en nous et de notre discours intérieur à leur sujet, nous nous
sentons moins prisonniers de nos expériences et pouvons retrouver un
espace de liberté de choix dans nos réponses. Ce phénomène se produit
autant en pleine conscience qu’en coaching. Ainsi, l’actualisation des
ressources est possible.
Coacher, c’est… Être en pleine conscience, c’est…

Être là pour l’autre Être présent et porter attention à son


expérience

Prendre soin de l’autre Prendre soin de soi

Accueillir inconditionnellement tout ce Accueillir tout ce qui se présente dans notre


que la personne accompagnée amène expérience sans le juger

Rester sans intention, ne pas donner de Rester en position d’observation : n’avoir aucun
conseil, ne pas orienter vers une objectif, ne pas commenter l’expérience ni
solution vouloir la modifier

Être ouvert à tout ce qui émerge pour Accueillir tous les signaux qui nous parviennent
pouvoir questionner et éclairer toutes les par nos sens ou notre perception interne et
dimensions de la situation du coaché avoir une vision plus globale de la situation

Être curieux de la relation émotionnelle Être à l’écoute de notre état interne émotionnel
qu’entretient le coaché avec sa situation

Ouvrir la perception de la situation pour Voir ses propres mécanismes automatiques et


permettre à la personne de trouver une retrouver la liberté du choix d’une réponse en
réponse plus adaptée conscience à la situation

Aider à découvrir de nouvelles Trouver de nouvelles ressources en soi


ressources

Une démarche participative S’impliquer dans son expérience

Coacher c’est donc d’abord être en pleine conscience, ou pleine présence.


Ce livre propose un chemin pour cultiver chacune de ses composantes qui
sont aussi celles de la posture attendue d’un coach.

Bénéfices de la pleine conscience : les preuves


scientifiques
Longtemps nous avons cru que nous ne pouvions plus changer à partir d’un
certain âge, que ce que nous étions devenait figé. Les neurosciences, en
démontrant la neuroplasticité du cerveau, viennent nous apporter un autre
éclairage. Par un entraînement, nous pouvons « reprogrammer » notre
cerveau et donc nos modes de fonctionnements habituels.
Une étude1 conduite par Hölzel et ses confrères, neuroscientifiques de
Harvard, en 2011, consistait à faire des IRM de 16 personnes qui n’avaient
jamais médité avant et après un programme MBSR de huit semaines
(méditations guidées et intégration de la pleine conscience dans leurs
activités quotidiennes), et de les comparer avec un groupe contrôle. Les
résultats indiquent que les participants présentent une augmentation de la
matière grise dans des régions du cerveau associées à la mémoire et
l’apprentissage, à la régulation des émotions, à la conscience de soi et à la
prise de recul. La pratique de la pleine conscience pourrait donc nous
permettre de développer tous ces aspects essentiels en tant que coach.
Une autre étude2, en 2013, a cherché à mesurer l’éventuel impact d’un
exercice de pleine conscience de cinq minutes effectué par le thérapeute en
amont de la séance. Elle conclut que les clients perçoivent les séances
comme plus efficaces quand le thérapeute a réalisé cet exercice.
De nombreuses études scientifiques détaillées dans les chapitres suivants
mettent en évidence que la pleine conscience développe des compétences
telles que :
l’attention et la concentration ;
la conscience émotionnelle et cognitive ;
la compréhension empathique ;
la conscience corporelle ;
la conscience et des compétences interpersonnelles.
Autant d’aptitudes que le coach peut chercher à enrichir.
Voyons ensemble concrètement comment la pleine conscience peut nous
aider à développer chacune de nos qualités nécessaires à un climat
relationnel propice au coaching.

1. « Mindfulness Practice Leads to Increases In Regional Brain Gray Matter Density », Britta K.
Holzel, James Carmody, Mark Vangel, Christina Congleton, Sita M. Yerramsetti, Tim Gard, Sara
W. Lazar, Psychiatry Research, 30 janvier 2011, US National Library of Medicine, National
Institutes of Health.
2. « Effects of Pre-Session Centering for Therapists on Session Presence and Effectiveness », Dunn
R., Callahan J.L., Swift J.K., Ivanovic M., Psychotherapy Research, 2013.
Développer le premier pilier :
sa présence attentive

« Les conditions nouvelles de notre existence,


qui arrachent les hommes à tout recueillement
et les jettent hors d’eux-mêmes… »

STEFAN ZWEIG

Pourquoi est-ce si difficile d’être présent et


attentif ?
Plus l’habitude de faire que d’être
La présence c’est d’abord être, être là. Or, nous vivons dans un monde où il
nous faut sans cesse être productif, rapide et réactif. Le mode faire est
généralement notre « réglage standard » qui fonctionne en pilote
automatique. Preuve en est : un temps mort ? Au lieu de simplement goûter
à la présence, on s’empare de son téléphone, d’un magazine, on regarde la
télévision, on mange une sucrerie, on appelle quelqu’un : tout mais pas ne
rien faire ! Une étude1 de 2014 a montré que, plutôt que de ne rien faire, des
personnes laissées seules dans une pièce disposant pour seule activité
possible d’un appareil permettant d’administrer des chocs électriques,
préféraient pour 67 % des hommes et 25 % des femmes se donner au moins
une décharge en quinze minutes plutôt que de ne rien faire ! Cette habitude
du faire ne nous invite pas à savourer le simple fait d’être là et attentif à ce
qui nous entoure.

La culture de la distraction
Nous sommes continuellement distraits par des notifications (e-mails, SMS,
Facebook, Twitter…). Le fait que l’information soit rapide et instantanée
nous donne l’impression de devoir regarder à chaque instant nos écrans
pour ne rien manquer – phénomène dit de FOMO (Fear Of Missing Out).
Selon Orianna Fielding, auteur de Detox numérique2, nous consultons nos
téléphones portables environ 150 fois par jour ! Parvenir à prêter attention
plus de dix minutes consécutives à quelque chose ou quelqu’un sans avoir
l’attention détournée ailleurs n’est pas évident.

L’illusion du multitasking
Nous croyons pouvoir tout faire en même temps : discuter avec quelqu’un
et répondre à un SMS, rédiger une note de synthèse en écoutant un podcast.
Or le cerveau ne sait pas faire plusieurs choses qui demandent notre
attention simultanément : il les traite les unes après les autres. Quand nous
interrompons une tâche pour une autre, nous ne sommes plus présents à la
première. Notre tendance au zapping nous écarte du chemin de la présence
à ce que nous faisons. Nous nous entraînons à être inattentifs. En novembre
2010, l’université d’Harvard a publié les résultats d’une étude3 montrant
que pendant presque la moitié du temps (46,9 %), les gens n’avaient pas
l’esprit à ce qu’ils étaient en train de faire.

Et notre cerveau s’y met aussi !


Si notre environnement ne nous aide pas, notre cerveau non plus. Dans les
années 1990, des données en neuro-imagerie ont révélé que notre activité
cérébrale est maintenue même lorsque nous ne faisons rien. Elle a été
baptisée « activité du réseau par défaut » et est associée à la perception de
soi, à nos souvenirs, nos pensées, notre imagination… Dès que nous
portons attention à ce qui nous entoure, cette activité s’interrompt et le
réseau de l’attention entre en jeu. Quand un réseau s’active, l’autre s’arrête.
Mais à la moindre interruption attentionnelle – même le temps d’un
clignement d’œil – l’activité du réseau par défaut reprend la main. Une
étude4 réalisée par une équipe du centre de recherche en neurosciences de
Lyon menée par Tomas Ossandon, vient de révéler qu’il interfère avec notre
capacité à être attentifs quand il n’est pas suffisamment désactivé. Si la
stimulation externe n’est pas suffisamment captivante, elle ne parvient pas à
éteindre notre réseau par défaut et notre attention est redirigée vers nos
processus internes (pensées, souvenirs, spéculations…). Voilà pourquoi
malgré notre volonté sincère parfois d’être présent, notre esprit s’égare
ailleurs.

Notre état émotionnel


La persistance d’une émotion peut également rendre difficile notre présence
attentive. En effet, alors les émotions surgissent dans une fulgurance
incroyable, elles persistent bien au-delà de ce qui les a déclenchées. Notre
état émotionnel est désynchronisé du présent et peut mobiliser toutes nos
ressources mentales via le réseau par défaut.

POINT CLÉ
En matière de présence attentive, vouloir n’est pas pouvoir, il nous faudra
donc lutter contre nos mauvaises habitudes pour être plus présents et
attentifs.

Pour vous en convaincre – « 1’ chrono »


Installez un chrono pour une durée d’une minute. Posez simplement votre
attention sur ce qui est là, devant vous pendant soixante secondes.
Demeurez dans l’observation de ce qui vous fait face. Du mieux que vous
pouvez, demeurez attentif à ce qui est là, instant après instant pendant
soixante secondes.

VOTRE JOURNAL : QU’AVEZ-VOUS VÉCU, OBSERVÉ ?


Votre attention s’est peut-être écartée de l’observation de ce qui vous faisait
face et votre esprit vous a complètement échappé. Peut-être avez-vous
remarqué quelque chose qui ne vous plaisait pas, avez-vous commenté
l’objet puis eu envie de modifier quelque chose pour finalement vous
imaginer en train de le faire. Ce faisant vous avez perdu le contact avec
l’expérience directe de ce qui était là, face à vous, dans le présent. Ou bien
votre esprit s’est peut-être tout simplement détourné de ce qui vous faisait
face pour penser à tout autre chose en faisant un lien ou sans aucun rapport :
ce que vous alliez cuisiner ce soir, le déroulé de votre prochaine réunion…
Les pensées ont un pouvoir de distraction puissant.

Pratiques formelles pour développer sa présence


attentive
Retrouvez les enregistrements des méditations en scannant le QR Code ou sur le site
http://celinelevita.e-monsite.com/pages/meditations/ Rubrique Méditations

SCAN CORPOREL

Cet exercice peut se faire assis ou allongé. Quelle que soit la position que
vous choisissez, du mieux que vous pouvez, essayez de demeurer dans une
présence consciente tout au long de l’exercice (attention la position
allongée est associée par le corps au repos : elle risque de vous faire
basculer dans l’endormissement !). Nous allons parcourir le corps pour en
ressentir toutes les parties en commençant par l’arrière du corps et toutes les
parties en contact avec le sol ou la chaise si vous êtes assis. N’essayez pas
de décrire ou de visualiser, essayez de faire l’expérience de ressentir. Si
vous rencontrez des difficultés à sentir certaines parties de votre corps,
notez-le simplement, sans vous juger. La pleine conscience ne demande pas
de sentir ce qui n’est pas là, mais juste d’être en présence de ce qui est là.
S’il n’y a pas de sensation, notez simplement qu’il n’y en a pas. Maintenant
centrez votre attention sur votre respiration. Observez l’air qui entre et qui
sort de votre corps à l’endroit où la perception est la plus saillante pour
vous : l’entrée des narines, la gorge, la poitrine, le ventre. Restez en contact
avec la sensation qui est là, sans rien chercher à changer. Simplement
maintenez votre attention du mieux que vous pouvez sur la partie du corps
que vous explorez.
Nous allons maintenant faire l’expérience d’avoir une jambe gauche : les
orteils un à un, le pied dans toutes ses faces, la cheville, le tibia et le mollet,
le genou, l’avant de la cuisse puis l’arrière. Essayez de ne pas vous
représenter mentalement ces parties mais bien de ressentir les sensations qui
s’y logent et qui vous permettent de savoir qu’elles sont là. Peut-être
noterez-vous qu’à certains endroits les sensations sont fortes et qu’à
d’autres vous les sentez à peine. Simplement observez ces différences.
Sentez toute votre jambe gauche. Et si à un moment vous réalisez que vous
vous êtes échappé dans vos pensées, ou dans une autre partie du corps, dans
des commentaires sur la façon dont votre corps devrait être : ce sont des
distractions. Elles sont normales et les observer fait partie intégrante de la
pratique. Vous n’êtes donc pas en train de rater quoi que ce soit. Le moment
où vous vous en rendez compte est un moment de pleine conscience, alors
félicitez-vous puis revenez ensuite avec bienveillance à l’objet initial de
votre attention. Ici votre jambe gauche.
Faites à présent le même trajet avec votre jambe droite. Contactez les
différentes sensations dans cette partie de votre corps. Peut-être observerez-
vous que les deux côtés sont différents. Si vous sentez une douleur, notez-
la, ne vous y accrochez pas et du mieux que vous pouvez, essayez de ne pas
la « suivre », de ne pas la commenter, la juger ni de chercher à la modifier.
Maintenant posez votre attention sur la zone du bas-ventre (bassin, coccyx,
pubis, organes génitaux, et bas du ventre). Y a-t-il des tensions,
contractions ? Restez là quelques instants en vous recentrant sur cette zone
avec beaucoup de douceur dès que vous réalisez que vous vous en êtes
échappé. Remontez ensuite à votre rythme le long du tronc, du bas du
ventre jusqu’aux clavicules. Ne cherchez pas à modifier ce que vous
observez. La pratique consiste simplement à être conscient de ce qui est là.
Posez maintenant votre attention sur vos mains, vos avant-bras, vos bras,
vos épaules. Quoi que vous sentiez, notez-le et ne le jugez pas. Ne cherchez
pas à le modifier ni à le commenter. Si vous vous égarez dans vos pensées,
simplement revenez à vos épaules. Notez seulement cette tendance qu’a
l’esprit à s’échapper de là où est le corps.
Après quelques instants, remontez le long du cou. Simplement observez.
Sentez ensuite toutes les parties de votre tête, votre visage. Autant que vous
le pouvez, ne cherchez pas à intervenir pour changer ce que vous observez.
Puis, à votre rythme, prenez conscience de toutes les parties de votre corps :
de la tête en passant par les bras et le tronc, la zone du bas-ventre et les
jambes jusqu’aux pieds. Sentez votre corps tout entier, qui simplement
respire. Sentez votre corps qui inspire et le mouvement que la respiration
imprime sur lui ; des poumons au bas-ventre à l’inspiration, et le
relâchement et la détente à l’expiration. Sentez comment vous vous sentez
maintenant dans la conscience de votre corps tout entier. Notez ce que
change la qualité de présence. Et à votre rythme, quittez votre immobilité.

Qu’avez-vous vécu ?

PRÉSENCE À UN OBJET

Prenez un objet du quotidien. Un objet banal qui n’évoque rien de


particulier pour vous. Un objet qui n’est associé ni à un souvenir ni à une
émotion particulière comme un stylo, un câble de téléphone.
Installez-vous confortablement et posez cet objet à une cinquantaine de
centimètres devant vous. D’abord prenez le temps de prendre une posture
assise confortable et ressentez votre assise.
Puis quand vous vous sentez bien installé, prenez 3 inspirations et 3
expirations profondes. Ensuite posez délicatement votre attention sur votre
souffle. Sentez votre corps respirer, sentez-vous être en train de respirer.
Puis laissez l’attention au souffle au second plan et observez l’objet devant
vous. Posez votre attention sur lui, sans tension, sans rigidité, avec douceur,
dans la détente. Voyez comme cet objet vous apparaît. Entrez en contact
avec sa couleur. Ne la commentez pas, simplement percevez. Quelle est sa
forme ? Observez ses contours, la place qu’il occupe dans la pièce. Restez
dans l’observation sans jugement. Quelle est sa brillance, son relief ?
Laissez ces données entrer dans le champ de votre conscience et s’effacer.
Ne cherchez pas à décrire l’objet, ne le commentez pas. Restez simplement
présent à cet objet, faites l’expérience de voir un objet. Ressentez ce que
c’est d’être seulement en train de voir.
Si vous réalisez que votre attention s’est égarée loin de cet objet, ne vous
jugez pas et simplement revenez-y. Ce moment est précisément un moment
de pleine conscience. La pratique consiste en cela : être conscient de ne plus
être présent et attentif, et revenir.
Revenez à l’objet devant vous et notez les parties d’ombre et de lumière, sa
texture, sa granularité, la vivacité de sa couleur, sa souplesse, le(s)
matériau(x) dont il est fait.
Si vous sentez une émotion, une gêne dans le corps ou des pensées émerger
dans l’expérience, ne vous y attachez pas, ne les suivez pas. Notez-les sans
vous y accrocher, laissez-les repartir. Vous êtes comme le gardien d’un
parking : vous notez ce qui entre et sort du champ de votre conscience dans
l’instant présent, mais ne vous y agrippez pas, ne les suivez pas dehors.
Poursuivez cette observation de l’objet encore quelques instants, sans
jugement, sans commentaire, dans ce que l’on pourrait appeler « une
expérience directe », sans intervention du mental. Et à chaque fois que vous
réalisez que vous êtes parti, avec beaucoup de douceur, simplement,
revenez. Quand ce sera suffisant pour vous, lâchez l’attention à l’objet.

De quoi avez-vous fait l’expérience ? Qu’en retirez-vous ?

PRÉSENCE AUX SONS


D’abord centrez votre attention sur chacun des points d’appui de votre
corps.
Puis sur votre souffle pendant 3 respirations profondes.
Ensuite posez votre attention sur les sons qui vous entourent ou plutôt
laissez-vous toucher par tous les sons qui sont présents. Notez tous les sons
qui s’invitent à votre oreille dans l’instant présent.
D’abord peut-être les sons de votre respiration. Écoutez les allées et venues
de l’air dans votre corps et peut-être le bruit de vos vêtements alors que
votre cage thoracique s’élève et s’abaisse. Maintenant posez votre attention
sur tous les sons à l’intérieur de la pièce. D’abord des bruits évidents, puis
des bruits plus subtils auxquels on ne prête généralement pas attention
comme les petits gargouillis de notre ventre. Voyez si cela crée une tension
en vous. Si c’est le cas, simplement notez-le et laissez simplement venir les
sons à vous, sans chercher à les qualifier ou à les nommer. Demeurez dans
une attention ouverte. Ne vous fixez sur rien. Laissez tous les sons de
l’expérience vous parvenir. Pour cela, restez ouvert afin que tout puisse
entrer et ressortir. Peut-être que vous pourrez entendre des sons de plus en
plus lointains. Restez attentif, accueillez les sons et laissez-les s’évanouir
sans chercher à leur donner un sens. Peut-être à un moment réaliserez-vous
que vous êtes distrait de l’attention aux sons extérieurs par le bruit de votre
mental qui commente, et invente. Ne vous en veuillez pas, c’est ainsi qu’il a
l’habitude de fonctionner. Félicitez-vous d’en avoir pris conscience et
portez de nouveau attention à tous les sons environnants qui émergent dans
l’instant. Quels sons vous parviennent maintenant ? Avec la même
attention, écoutez aussi les silences entre les sons. Quand le mental est
silencieux, notez comme votre attention est ouverte et spacieuse comme si
vous passiez en grand angle. Voyez comme le champ de votre conscience
des sons s’élargit, comme votre perception devient vaste. Notez qu’être
présent c’est faire silence en soi, faire taire le mental, pour pouvoir
accueillir tout ce qui s’élève instant après instant dans l’expérience depuis
ce silence qui peut tout contenir. Être présent c’est être assez vaste et assez
ouvert pour pouvoir tout percevoir.
Et quand vous vous sentirez prêt, vous pourrez laisser aller votre attention
au son.
Qu’avez-vous vécu dans cette expérience ?

VOTRE JOURNAL : QU’AVEZ-VOUS VÉCU, OBSERVÉ ?

Mindfulness
Il n’est pas surprenant que la méditation en pleine conscience
ait un impact sur la présence attentive puisqu’elle nous invite à
porter volontairement attention à ce qui se produit dans l’instant
présent. Nous nous exerçons donc à être mentalement là où
nous sommes physiquement. La méditation nous permet de
cultiver le fait d’avoir l’esprit au même endroit que le corps.
S’asseoir pour méditer c’est aussi, l’espace d’un instant, cesser
de faire, cesser d’agir, pour expérimenter la présence, pour
juste être.

Ce que révèle la pratique


S’asseoir sans rien faire n’est pas confortable
Au début de votre pratique vous aurez peut-être quelques réticences ou
difficultés à trouver un temps pour vous poser alors que vous avez encore
mille choses à faire. En observant ce qui s’élève dans notre tête, nous
voyons que face à notre inactivité physique, le mental s’empresse de fuir
ailleurs, de s’occuper, au lieu de simplement constater ce qui est là. Nous
pouvons observer combien nous sommes pressés d’arriver quelque part, à la
fin de la méditation par exemple, à un but, à un état déterminé et à quel
point nous sommes peu à l’aise avec l’incertitude de l’instant. Juste être
présent semble un défi en soi.

Un mental très vagabond


On peut avoir l’impression de savoir faire des pauses pour revenir à
l’instant présent, mais en méditant on réalise qu’il est très difficile d’y rester
très longtemps et qu’une seule pensée distrayante peut, par association,
entraîner un vrai « feu de forêt » dans notre esprit. Partant d’une
focalisation de notre attention sur notre souffle ou sur les sons, nous
pouvons rapidement nous retrouver emportés par nos pensées à revivre
mentalement nos dernières vacances, ou peut-être même nous imaginer
dans un rôle de rock star. Notre mental a beaucoup de peine à rester présent
et est très imaginatif !

Le mental nous coupe de la présence


Ce ne sont pas les circonstances mais la façon dont nous les expérimentons
qui nous distrait. Le plus souvent, nous avons beaucoup de difficulté à
simplement expérimenter le présent, à simplement constater et éprouver.
Nous surajoutons très souvent un commentaire à l’expérience, nous la
qualifions, nous élaborons mentalement à son sujet, ce qui nous coupe de
l’expérience de l’instant suivant.

RETOUR D’EXPÉRIENCE
Quand on réalise que l’on n’est plus présent, que notre esprit
s’est écarté de notre objet initial, au lieu d’être en présence de
cette distraction, de la constater et de revenir au présent, le plus
souvent on se juge, on se culpabilise, et nous nous écartons
alors encore plus et plus longtemps de la véritable expérience
du présent.
Nos jugements, qualificatifs, notre mentalisation du présent nous coupe de
la présence véritable.

Un mental très encombré et agité


Au début, et parfois même avec des années de pratiques, le mental – cette
petite voix dans notre tête – ne peut s’arrêter de « parler ». Il va partir en
tous sens : raconter ce qu’il conviendrait de faire après la séance, affirmer
des positions contradictoires, sauter du coq à l’âne, ressasser le passé,
affirmer ce qui va se passer à coup sûr, ce que vous allez dire à untel, ce qui
est bien… Si nous exprimions à haute voix tout ce que nous pensons, on
nous prendrait pour des fous. Nous sommes tellement encombrés par nos
pensées (au sujet du passé, du présent et du futur – parfois imaginaires), que
l’on n’a plus de place pour être vraiment présents et attentifs à ce qui se
passe ici et maintenant.

Nous vivons dans des concepts


Avec la pratique, on se familiarise avec le fonctionnement de notre mental :
il commente, juge, qualifie « j’aime », « je n’aime pas », étiquette nos
expériences. Nous réalisons petit à petit que nous pensons plus le monde
que nous ne l’habitons, que nous ne l’investissons vraiment. Lorsque nous
sommes attentifs à nos sensations corporelles par exemple, nous les
pensons, commentons plus que nous ne les ressentons. Nous sommes
complètement enfermés dans la conceptualisation du réel et peu présents à
la réalité de l’expérience que nous en faisons.

Une faible présence à nos sensations corporelles


Parfois la méditation, et notamment le scan corporel, nous fait réaliser à
quel point nous sommes peu familiers avec notre corps, comme nous n’y
prêtons quasiment jamais attention, sauf lorsqu’il est douloureux. Idem avec
notre état émotionnel, sauf lorsqu’il est vraiment très fort. Les pratiques
peuvent nous faire prendre conscience de notre manque de présence
attentive à nous-mêmes.

Une persistance et une emprise des émotions


Nous constatons dans nos méditations que plus nous sommes habités par
des émotions difficiles avant la pratique, plus il est ardu d’être vraiment là,
que nos émotions nous emmènent souvent hors du présent à toute allure et
souvent très loin, qu’elles troublent beaucoup notre esprit. Il est très
difficile de s’en détacher, même lorsqu’on les a remarquées. Le plus
souvent nous ruminons et ainsi les entretenons au lieu de laisser passer les
pensées qui les nourrissent. Ou bien nous tentons par tous les moyens de les
chasser au lieu d’y rester présents, ce qui les renforce encore. C’est comme
si elles prenaient le contrôle de notre esprit malgré notre intention d’être là.

Ce que l’on peut retenir


Méditer nous fait prendre conscience de notre état de distraction
dirigé par un mental agité et de notre manque de présence
attentive à ce qui nous entoure et à nous-mêmes. Nous
réalisons aussi notre tendance à penser le monde au lieu d’en
faire l’expérience directe. À n’en pas douter si nous avons de
telles difficultés dans des pratiques assez courtes pourtant
dédiées à cela, notre présence attentive est probablement
largement perfectible dans nos séances d’accompagnement.

Comment la pratique nous aide-t-elle à


développer la présence ?
La pratique formelle est un entraînement à être là
Méditer c’est être là sans rien faire de particulier – si ce n’est être présent,
ouvert et attentif à ce qui se produit dans l’expérience instant après instant.
Nous cultivons ainsi l’habitude de nous installer dans l’instant présent et à
force de pratique nous créons un circuit neuronal qui rend de plus en plus
automatique le maintien de la consigne de vigilance à y rester avec de
moins en moins d’effort. Cette habitude va progressivement s’infuser dans
notre vie de tous les jours et dans nos pratiques d’accompagnement
également.
Un entraînement à l’attention à l’instant présent
Nous nous entraînons à focaliser et à maintenir notre attention d’abord sur
un « objet » (souffle, pensées…), puis sur tout ce qui s’élève dans notre
expérience. À chaque fois que nous réalisons que nous nous sommes égarés
ailleurs, nous sommes invités simplement à relâcher ce qui nous a distraits
et à revenir à l’objet initial de notre attention, sans nous juger. La
méditation agit comme un entraînement à la stabilisation de l’attention. Elle
muscle notre vigilance à la distraction et notre agilité à revenir à l’instant
présent. Ce que nous développons dans nos méditations amènera
progressivement une limitation des distractions dans nos coachings et un
retour plus rapide à la présence en cas d’échappée.

Développer la curiosité et l’observation


La méditation nous entraîne à porter intentionnellement notre attention sur
ce qui se passe en nous et autour de nous, elle nous invite à être plus
curieux et donc à mieux voir nos pensées, émotions, sensations ou
perceptions. Petit à petit nous apprenons à avoir une attention de plus en
plus vaste à notre expérience et donc à être plus présents à la fois à nous-
mêmes et au monde.

Limiter les distractions


En pratiquant, nous apprenons à regarder tous les phénomènes émerger
dans la conscience sans les suivre. Par exemple, au lieu de nous laisser
guider automatiquement par nos pensées comme nous le faisons
habituellement – en agissant ou en enchaînant les pensées – nous les
laissons passer. Nous apprenons juste à constater, à prendre note et à les
laisser repartir pour pouvoir accueillir ce qui se présentera dans l’instant
d’après. Nous musclons ainsi notre attention et pas à pas limitons le pouvoir
des distractions.

RETOUR D’EXPÉRIENCE
Nous parvenons progressivement à être présents à ce qui se
passe sans que cela nous emporte ailleurs mentalement.
Goûter à la véritable présence
Petit à petit, en ne suivant plus nos pensées, nous ne les alimentons plus en
énergie. Nos pensées ont moins de force et leur flot se calme. Entre deux
pensées peut même s’ouvrir un espace de conscience calme et de silence.
Dans ce silence, nous découvrons une qualité de présence toute particulière
qui n’est obstruée ni brouillée par rien. Nous sommes spacieux et pouvons
tout accueillir, tout contenir. Avec la pratique, dans ces moments où le
mental s’apaise, nous pouvons être présents à tout ce qui est là sans être
distraits par quoi que ce soit. Nous pouvons toucher du doigt ce qu’est la
vraie présence. Au-delà de l’idée que nous nous en faisions
intellectuellement, nous la goûtons et la connaissons alors. Avec la pratique
nous touchons plus souvent cet état de présence attentive et nous nous
familiarisons avec ce qu’est être pleinement présents.

Percevoir le manque de présence


Nous devenons par là même également capables progressivement de sentir
quand nous ne sommes plus réellement présents et attentifs dans la qualité
de ce que nous éprouvons. Nous pourrons donc aussi repérer plus
facilement dans nos accompagnements les moments où notre présence
effective est défaillante.

Ce que l’on peut retenir


Nous réalisons que notre présence attentive est en fait toujours
sous-jacente, derrière le brouhaha de nos pensées, comme le
silence derrière les bruits. Plus que vouloir développer quelque
chose que nous n’aurions pas ou peu, pour devenir plus
présents, il s’agit surtout de nous désencombrer de tout ce qui
obstrue notre présence calme et claire. La qualité de présence
tranquille que nous cultivons avec la pratique nous permet
d’accueillir vraiment notre coaché. On devient l’espace pour lui
et pour ce qu’il a à dire. Et quand on se sent être cet espace, on
peut l’accueillir vraiment dans toutes ses dimensions.
« Une preuve scientifique ? »
Plusieurs études5 ont montré que la méditation en pleine conscience
s’accompagne d’un renforcement notable des facultés d’attention.
Une étude conduite par Katherine MacLean de l’université de Californie
indique que pendant et après un entraînement à la méditation, les sujets
étaient plus aptes à maintenir leur attention, même dans des tâches
répétitives et ennuyeuses menant généralement facilement à la distraction
mentale6.
Une étude de la Emory University à Atlanta a démontré que les participants
ayant une plus grande expérience de la méditation ont une connectivité
accrue dans les réseaux neuronaux contrôlant l’attention. Ces connexions
neuronales pourraient être impliquées dans le développement des
compétences cognitives telles que maintenir son attention et se désengager
des distractions. De plus, les bénéfices de la pratique ont également été
observés dans un état de conscience normal durant la journée, ce qui tend à
montrer la transférabilité de ces aptitudes cognitives « du coussin à la vie
quotidienne ». La pratique de méditation étudiée se centrait sur la
respiration7.
Pendant la pratique de la méditation, on relève à l’électroencéphalographie
(EEG) une augmentation des ondes thêta à basse fréquence corrélées à une
attention accrue.
Des études ont montré que l’amélioration de l’attention constatée à l’issue
d’un entraînement à la pleine conscience était maintenue jusqu’à cinq ans
après.

Pour ceux qui ne veulent pas s’asseoir sur un


coussin – Pratiques informelles
Demandez-vous si vous avez vraiment été présent au cours de votre
lecture jusqu’ici. Avez-vous, à un moment (qui vous intéressait peut-
être moins), été distrait par d’autres pensées, au point parfois de ne plus
vraiment savoir ce que vous étiez en train de lire ?
Lors des discussions entre amis, notez les moments où vous vous êtes
complètement absenté de la discussion.
Si vous avez eu une contrariété dans la journée, posez-vous ces
questions le soir : « Ai-je été disponible et présent aux autres
aujourd’hui ? » « Quel impact a eu mon état de contrariété sur mes
relations personnelles et professionnelles, sur ma créativité, etc. ? »
Lors d’une conversation avec un être cher, posez l’intention d’être
présent et notez vos absences : les moments où vous êtes occupé à
élaborer une réponse, où vous attendez de pouvoir dire ce que vous avez
à dire, où vous n’êtes plus présent à ce qu’il dit. Au moment où vous en
prenez conscience, laissez aller vos pensées et revenez à lui.
Quand vous vous brossez les dents, restez présent à l’expérience que
vous êtes en train de vivre : se brosser les dents et seulement cela, et
assurez-vous de ne pas inviter vos clients, votre famille et vos amis dans
la salle de bains avec vous à ce moment-là.
Posez l’intention d’être présent à votre expérience dans une activité que
vous aimez (faire la cuisine, donner le bain à votre enfant, faire une
partie de golf) ou dans un bon moment (déguster votre dessert préféré,
avoir un temps de complicité avec un proche…) : connectez-vous à vos
cinq sens. Soyez présent instant après instant à tout ce qu’ils font
émerger dans votre conscience sans vous y attacher, sans les
commenter.
Fixez-vous une distance à parcourir (30 mètres). Marchez sur cette
distance en étant attentif à vos pas. Une fois arrivé, demandez-vous à
quel endroit et jusqu’où votre esprit a été distrait de la consigne initiale.
Servez-vous des sons des notifications de vos applications comme d’un
rappel à la présence : à chaque fois que vous entendez l’un d’entre eux,
prenez un instant pour vous sentir être là.

EN SYNTHÈSE

À SAVOIR :

nous vivons mentalement près de la moitié du temps hors du


présent ;
nous sommes peu conscients de cette distraction.

LA PLEINE CONSCIENCE NOUS APPREND À :

nous détacher de l’agitation du mental ;


retrouver cet espace de calme intérieur qui constate tout ce
qui se présente dans l’expérience.

1. « The Challenges of the Disengaged Mind », Wilson T et al, Science, 2014.


2. Orianna Fielding, Detox numérique, Éditions de l’Homme, 2017.
3. « A Wandering Mind Is an Unhappy Mind », Killingsworth M. and Gilbert D., Science, 2010.
4. « Transient Suppression of Broadband Gamma Power in the Default-Mode Network Is
Correlated with Task Complexity and Subject Performance », Ossandon, T., Jerbi, K., Vidal, J.
R., Bayle D.J., Henaff M.A., Jung J., Minotti L., Bertrand O., Kahane P. and Lachaux J.P.,
Journal of Neuroscience, 2011.
5. « Mental Training Enhances Attentional Stability : Neural and Behavorial Evidence », Antoine
Lutz, Heleen A. Slagter, Nancy B. Rawlings, Andrew D. Francis, Lawrence L. Greischar and
Richard J. Davidson, Journal of Neuroscience, 2009.
« Neural Correlates of Attentional Expertise in Long-Term Meditation Practitioners », J.A.
Brefczynski-Lewis, A. Lutz, H. S. Schaefer, D. B. Levinson and R. J. Davidson, 2007.
« Mindfulness Training Modifies Subsystems of Attention », Jha AP., Krompinger J., Baime M.,
Cognitive, Affective & Behavioral Neuroscience, 2007.
6. Source : « Losing Focus ? Studies Say Meditation May Help », John Cloud, online TIME Friday,
Aug. 06, 2010.
7. Source : Frontiers in Human Neuroscience, 2013.
Développer le deuxième pilier :
son accueil inconditionnel bienveillant et
non jugeant

« Le paradoxe étonnant, c’est que c’est lorsque je m’accepte


tel que je suis que je peux changer. »

CARL ROGERS

Pourquoi est-ce si difficile d’accueillir


inconditionnellement et sans jugement ?
Difficile d’accepter que l’on n’accueille pas
inconditionnellement
On considère généralement l’acceptation inconditionnelle comme une
qualité naturelle partagée par toutes les personnes qui accompagnent. Notre
difficulté à admettre que ce n’est pas toujours le cas rend difficile d’en
parler et de travailler sur nos difficultés à l’incarner véritablement.

Difficile de s’accepter tel que l’on est


Ce phénomène est l’illustration parfaite de notre société où l’on doit être le
meilleur, tout sécuriser, ne présenter que le meilleur de nous-mêmes. Dans
ce contexte, accepter ses inaptitudes et faiblesses est difficile et
l’empressement à les masquer pour faire bonne figure est grand. Si nous
prenons le temps d’écouter, nous découvrons à quel point nous nous
critiquons incessamment. Malgré les apparences donc, rares sont ceux qui
s’acceptent vraiment complètement. Ne pouvant accueillir nos propres
faiblesses et vulnérabilités, il nous est très difficile d’accueillir celles des
autres.

Le jugement : une opération automatique qui a des effets de


long terme

« Il est plus facile de désintégrer un atome


qu’un préjugé. »

EINSTEIN

Nos croyances au sujet de ce qui est juste/bien ou dangereux/mal se sont


formées au gré de nos expériences. Tout ce qui nous a procuré du bien a été
classé dans la catégorie « OK » (normal, bien) et est recherché. À l’inverse,
tout ce qui nous a causé du désagrément, de l’insécurité a été rangé dans
« pas OK » (anormal, mauvais) et est évité. Juger est un mécanisme
archaïque automatique non nécessairement conscient de comparaison de ce
dont nous faisons l’expérience, avec nos référentiels. Cela nous permet de
savoir si nous sommes potentiellement en danger ou non. Comme notre
jugement à propos d’une personne ou d’une situation s’établit en quelques
secondes à peine, sans que nous disposions nécessairement de toutes les
informations pour établir une évaluation juste, nous nous relions au monde
et aux personnes le plus souvent avec des « préjugés ».
Notre attention s’orientant principalement vers les signes qui valident nos
croyances, il nous est très difficile de nous en détacher par la suite – à
moins d’avoir fait une erreur de jugement manifeste.

Accepter, oui… jusqu’à un certain point !


Nous savons tous ce qu’est l’acceptation ou l’amour inconditionnel car
nous l’avons tous déjà éprouvé, a minima pour nos proches. Nous avons
tous de la bienveillance et de la compassion mais jusqu’à un certain point,
pendant un certain temps ou seulement avec certaines personnes. Tant que
le comportement ou les propos de l’autre restent proches de ce que nous
tenons pour « OK », ils peuvent être accueillis. Mais s’ils correspondent à
des attitudes ou actions étiquetées « pas OK » dans notre banque de
données, nous les rejetons.

RETOUR D’EXPÉRIENCE
Nous savons ce qu’accepter signifie mais nous ne cultivons pas
cette qualité pour la rendre plus résistante à l’adversité,
inconditionnelle.

Le piège de notre métier


Notre mission d’accompagnant consiste à aider l’autre à opérer un
changement. Mais en étant trop centrés sur l’objectif à atteindre, nous
risquons de comparer sans cesse notre client à ce que nous visons
ultimement et donc de le juger plus que l’accepter inconditionnellement à
chaque instant.

Le manque d’habitude d’accueillir nos ressentis difficiles


Par l’action de nos neurones miroirs1, quand nous faisons face à une
personne traversant une situation difficile ou faisant quelque chose que nous
jugeons mauvais ou dangereux, nous éprouvons les mêmes émotions
pénibles que si nous en étions le protagoniste. Or nous sommes peu
habitués à accueillir nos propres ressentis désagréables, notre réflexe le plus
commun est de nous en couper, de chercher à les fuir ou à nous débattre
contre eux. Pour ne plus ressentir l’émotion difficile, nous ignorons, fuyons
ou luttons contre ce qui l’a provoquée. Nous ne sommes alors plus dans une
posture d’acceptation inconditionnelle de ce à quoi nous faisons face, donc
notre client et sa situation tels qu’ils sont.

POINT CLÉ
Adhérer au principe d’acceptation inconditionnelle ou de non-jugement
est parfaitement insuffisant pour l’incarner pleinement. Nous devrons
donc non seulement apprendre à nous voir et à nous accepter tels que
nous sommes mais aussi accepter de nous regarder porter des jugements
pour observer les mécanismes qui en découlent (rejet ou attachement) et
pouvoir devenir de plus en plus aptes à l’accueil inconditionnel.

Pour vous en convaincre – « 1’ chrono »


Pensez à un comportement récurrent que vous avez et que vous n’aimez pas
chez vous. Que se passe-t-il quand vous vous voyez agir de la sorte ?
Pourquoi est-ce difficile pour vous d’accepter ce comportement ? Que se
passerait-il si je vous proposais d’accepter ce comportement au lieu de le
rejeter ? Qu’est-ce qu’accepter permettrait ?

VOTRE JOURNAL : QU’AVEZ-VOUS VÉCU, OBSERVÉ ?

Le contact avec ce comportement que vous n’aimez pas chez vous a peut-
être provoqué de nombreux jugements. Il a probablement été inconfortable
d’y être confronté. Peut-être vous êtes-vous échappé de l’exercice. Accepter
ce comportement : cette proposition vous a-t-elle paru insensée et risquée ?
Avez-vous craint, ce faisant, de prendre le risque de ne jamais pouvoir
changer ? Pourtant reconnaître nos parts d’ombre, en y apportant une forme
de douceur, est ce qui peut nous permettre d’évoluer. Voyons comment.

Pratiques formelles pour développer l’accueil


inconditionnel bienveillant et non jugeant
Retrouvez les méditations guidées en scannant le QR Code ou sur le site www.celine-
levita.fr Rubrique Méditations

ACCUEILLIR ET DIRE « OUI »

Installez-vous confortablement, ajustez votre posture en posant votre


attention sur les points de contact de votre corps avec la chaise ou le
coussin sur lequel vous êtes assis : les pieds sur le sol, l’arrière des cuisses
et les fesses sur la chaise ou le coussin. Prenez le temps de ressentir ces
points de contact sans les juger. Méditer c’est simplement voir ce qui est là,
sans le commenter, le juger. Simplement, ressentez la posture et si
nécessaire ajustez-la en conscience. Ensuite, laissez entrer dans le champ de
votre conscience votre respiration par l’endroit où vous la sentez le plus. Du
mieux que vous pouvez, suivez le mouvement de votre respiration. Quelle
qu’elle soit, accueillez-la, acceptez-la telle qu’elle est, dites-lui
« bienvenue » si cela peut vous aider. Restez dans l’expérience de la
respiration. Il n’y a rien à changer. Juste à observer. Peut-être vous verrez-
vous la juger trop comme ci ou pas assez comme cela. Alors dites
mentalement « c’est OK » et revenez à l’observation de la respiration.
Acceptez-la telle qu’elle est. Laissez-la être telle qu’elle est à cet instant.
Au bout d’un moment peut-être que votre attention se sera échappée et que
vous ne serez plus attentif à votre respiration. En être conscient est un
moment de pleine conscience. Notez votre distraction et dites simplement
« c’est OK » avec beaucoup de douceur car cela arrive même à des
méditants très expérimentés. Revenez à l’instant présent et à votre
respiration sans vous juger et avec tendresse. Quand vous serez prêt, soyez
attentif à vos sensations dans le corps et simplement constatez-les, acceptez
les sensations dans votre corps exactement telles qu’elles sont, sans
chercher à les modifier. Essayez de rester présent aux sensations qui se
manifestent et qui changent à chaque instant. Ne vous accrochez pas à une
sensation en particulier. Puis prêtez attention au corps dans son ensemble.
Peut-être qu’à un certain moment vous prendrez conscience d’être distrait.
Dites simplement « OK » et revenez paisiblement aux sensations de votre
corps dans l’instant présent. Au bout de quelque temps, vous commencerez
peut-être à ressentir des tensions dans votre dos ou vos épaules, ou des
fourmillements dans vos pieds. Notez comme il est difficile de rester dans
l’expérience nue de la sensation quand elle est désagréable, comme les
commentaires, les jugements s’enchaînent et comme cela donne envie de
corriger l’expérience. Voyez comme il peut être difficile de rester dans le
simple accueil. Essayez encore un moment de rester en contact avec ces
sensations désagréables sans les commenter, ni réagir puis si c’est vraiment
trop douloureux, en conscience, changez de position. Ne vous jugez pas.
Revenez simplement et avec beaucoup de douceur au présent. Alors que
vous terminez cette méditation, voyez comment vous pouvez emporter cet
accueil inconditionnel dans votre vie du quotidien.

Notez ce qui s’est passé pour vous.

L’ACCEPTATION DE SOI

Installez-vous confortablement et prenez quelques instants pour vous établir


dans l’ici et maintenant. Posez-vous et accueillez-vous à l’intérieur de vous-
même. Dites « bonjour » à chaque partie de votre corps. Portez votre
attention à chaque composante de votre posture et accueillez-la telle qu’elle
se présente dans l’instant : votre assise, vos jambes, votre dos, vos épaules,
vos mains, votre tête. Demandez-vous comment vous vous sentez :
physiquement et en termes d’humeur. Accueillez tout ce qui est là, dans le
corps et dans l’esprit, avec bienveillance et sans jugement, avec douceur et
tendresse. Comme vous accueilleriez un être cher, ressentez cette
autocompassion vis-à-vis de vous-même. Entrez en amitié avec vous-même
et ce qui est là, sans le juger, que vous l’aimiez ou non. Accueillez-vous tel
que vous êtes, comme vous ouvririez la porte à un ami avec ses qualités et
ses imperfections, ses bonheurs et ses souffrances. Soyez doux avec vous-
même. Quoi que vous ressentiez ou voyiez, faites preuve de bienveillance et
de chaleur, laissez-le être là.
Invitez maintenant dans votre conscience un aspect de vous-même avec
lequel vous n’êtes pas à l’aise, que vous avez tendance à rejeter. Essayez de
voir cette partie de vous-même que vous n’aimez pas, et prenez un temps
pour l’accueillir, le reconnaître simplement. Voyez ce que cela fait. Peut-
être n’est-ce pas si facile de rester face à cette partie de vous-même. Du
mieux que vous pouvez, essayez de l’accueillir avec beaucoup de douceur.
Ayez de la compassion pour vous-même car nous faisons toujours du mieux
que nous pouvons en fonction des ressources dont nous disposons à
l’instant T. Soyez attentif aux pensées que cela fait naître et étiquetez les
pensées pour revenir avec tendresse à l’accueil bienveillant de vous-même.
Simplement reconnaissez ces pensées ou images de vous-même. Ne vous y
agrippez pas, ce ne sont que des pensées, elles n’ont rien de réel. Dites
« OK, j’ai ces pensées ». Puis voyez ce que cela fait dans votre corps de
faire face à cet aspect de vous-même que vous n’aimez pas, ce que cela crée
en vous, à quel endroit cela se situe. Posez une douce attention sur ces
réactions et dites « OK, cela crée cela en moi ». Descendez encore un peu
plus loin et observez l’émotion qui est présente. Est-ce de la colère, de la
déception, de la tristesse, de la honte ? Quelle est l’émotion ici ?
Reconnaissez qu’elle est là, et avec beaucoup de tendresse pour vous-
même, accueillez-la, regardez-la, comme vous le feriez avec un petit enfant.
Ne vous jugez pas. Dites « bienvenue » à cette émotion. Prenez un moment
pour vraiment accueillir avec beaucoup de douceur cette partie de vous que
vous n’aimez pas, pour l’étreindre avec tendresse comme vous le feriez
avec un enfant triste ou en colère. Restez en contact avec elle sans la rejeter,
restez en sa présence, écoutez-la, comme si elle exprimait ses besoins, ses
colères, sa souffrance. Laissez-la s’exprimer. Que dit-elle ? Quel est son
besoin ? Imaginez-vous lui donner depuis le fond de votre cœur tout ce
qu’elle souhaite, sans limitation, jusqu’à ce que sa soif s’apaise. Jusqu’à ce
que cette partie, cet autre vous-même se sente comblé et n’ait plus de
revendication. Notez ce qui est présent là maintenant. Comment est cette
partie de vous-même ? Tend-elle à disparaître ? Sentez, ressentez. Quelque
chose a-t-il changé ? Avant de quitter la méditation, prenez quelques
instants pour rester présent.
Qu’avez-vous vécu ? Que tirez-vous de cette expérience ?

L’AMOUR BIENVEILLANT

Installez-vous confortablement, fermez cette fois-ci les yeux, détendez


votre corps et centrez-vous sur votre posture : les pieds bien à plat au sol si
vous êtes assis sur une chaise, le contact de vos jambes avec le coussin ou
de l’arrière des cuisses avec la chaise, le dos bien droit mais pas raide, vos
mains sur vos cuisses ou vos genoux, votre menton légèrement rentré.
Tout en gardant les yeux fermés, pensez à une personne proche de vous,
vivante ou décédée, que vous aimez beaucoup et qui vous a témoigné un
amour inconditionnel, qui vous a accepté tel que vous êtes, malgré vos
défauts, vos erreurs sans vous critiquer ou vous faire de reproches…
Imaginez-la vous souhaiter d’être heureux, en sécurité et en bonne santé.
Ressentez ce que cela fait de se sentir accueilli inconditionnellement, les
sensations que cela provoque en vous. Maintenant imaginez-vous être
entouré de toutes les personnes qui vous aiment ou vous ont aimé tel que
vous êtes, sans vous critiquer ou vous reprocher ce que vous êtes, avec vos
qualités et vos défauts et qui vous souhaitent d’être heureux, en sécurité et
en bonne santé. Baignez dans la chaleur de ce moment et ressentez ce que
cela génère en vous. Fort de ce que vous avez reçu, souhaitez-vous
maintenant à vous-même d’être heureux, en sécurité et en bonne santé.
Maintenant revenez à la première personne et renvoyez-lui tout ce qu’elle
vous a apporté de bénéfique. Tout comme vous, cette personne souhaite être
heureuse. Envoyez-lui vos meilleurs vœux de bonheur, de sécurité et de
santé.
À présent adressez-vous à toutes les personnes qui vous acceptent tel que
vous êtes et qui souhaitent également, tout comme vous être heureuses.
Envoyez-leur en retour vos meilleurs vœux de bonheur, de sécurité et de
santé.
Ensuite, représentez-vous un ami avec lequel vous avez de bonnes relations.
Cette personne est comme vous, elle cherche aussi à être heureuse.
Envoyez-lui vos meilleurs vœux de bonheur, de sécurité et de santé.
Maintenant, représentez-vous quelqu’un de neutre pour vous, qui ne
provoque pas de réaction émotionnelle particulière comme une personne
que vous croisez tous les jours sans la connaître vraiment. Elle aussi, tout
comme vous, cherche à être heureuse. Souhaitez-lui vos meilleurs vœux de
bonheur, de sécurité et de santé.
Maintenant, si c’est possible pour vous, représentez-vous quelqu’un avec
qui vous avez ou avez eu des relations difficiles. Voyez si vous pouvez vous
départir un instant du ressentiment, de la colère ou du sentiment négatif que
vous entretenez vis-à-vis de lui en tentant de vous connecter au fait que,
comme nous tous, cette personne cherche à être heureuse, et vit également
de la peine, de la souffrance. Voyez s’il est possible pour vous de souhaiter
à cette personne bonheur, de sécurité et de santé.
À présent, élargissez votre perspective et représentez-vous tous les êtres
vivants en visualisant la Terre. Envoyez vos meilleurs vœux à tous les êtres
qui, comme vous, recherchent à être heureux. Souhaitez à tous vos
meilleurs vœux de bonheur, de sécurité et de santé.
Pour conclure cette méditation, revenez à vous-même et souhaitez-vous
d’être heureux en sécurité et en bonne santé.
Inspirez puis expirez profondément. Prenez encore une respiration et laissez
aller. Notez comment vous vous sentez après cette méditation.

Notez aussi ce qui s’est passé pour vous pendant cette méditation.

VOTRE JOURNAL : QU’AVEZ-VOUS VÉCU, OBSERVÉ ?


Mindfulness
La mindfulness est une invitation à l’accueil de tout ce qui se
présente dans l’expérience sans distinction : accueillir nos
pensées, accueillir nos émotions, accueillir nos sensations, etc.
Elle nous demande d’observer tout ce qui entre dans le champ
de notre conscience sans le juger et avec bienveillance. Méditer
c’est juste dire « oui » à ce qui est, qu’on l’aime ou non. C’est
pour cela que l’on ne doit surtout rien vouloir changer, ce serait
dire « non » à ce qui est. Ce ne serait plus méditer.

Ce que révèle la pratique


On passe notre temps à juger !
Quand on pratique, on constate que nous jugeons tout et tout le temps :
notre posture pas assez droite, le temps qui ne passe pas assez vite, notre
voisin qui respire trop fort, notre mental trop agité, notre « bonne » ou
« mauvaise » méditation. Nous jugeons donc sans cesse notre
environnement et nous nous jugeons aussi beaucoup nous-mêmes. Il nous
est très difficile de rester au simple stade de l’observation. Nous ajoutons
sans cesse un commentaire à tout ce qui entre dans notre champ de
perception. Nous avons tout simplement du mal à accueillir une situation
telle qu’elle est. Dès qu’elle n’est pas conforme à ce que nous en voulons,
espérons, attendons… notre première réaction est le jugement.

Juger nous coupe de l’ici et maintenant


Le jugement est une pensée. Lorsque l’on juge, on n’est plus dans
l’expérience du présent mais seulement dans notre monde mental, le monde
de nos idées. Nos jugements sont souvent le point de départ d’une longue
période de distraction. Ils se forment tellement rapidement qu’ils ne nous
laissent pas le temps d’appréhender la totalité de la réalité, et la figent très
vite dans une vue tronquée. Quand on qualifie quelque chose de « moche »,
on a tendance à ne plus voir ce qui pourrait aussi être beau. Les étiquettes
que nous collons sur les choses limitent notre capacité à entrer
véritablement à leur contact. Dans les espaces où nous parvenons à
suspendre notre jugement, nous voyons ce qui nous entoure tel que c’est,
sans filtre, donc beaucoup plus vastement.

Tension et jugement
La pratique nous permet d’observer que l’acceptation véritable laisse le
corps détendu. Le refus crée une tension parfois subtile mais réelle dans le
corps.

L’inconsistance d’un jugement


Une même sensation corporelle – une douleur par exemple – peut nous
sembler irritante parce qu’elle crée une agitation dans notre méditation un
jour, puis devenir intéressante le jour d’après parce que notre méditation
nous invite justement à l’explorer. Nos jugements peuvent être
complètement contradictoires sur un même objet. Un même fait peut être
perçu, jugé complètement différemment selon notre état d’esprit, etc. La
phrase qui dit qu’un jugement parle plus de nous que de la personne jugée
prend tout son sens. On réalise combien notre jugement est relatif à la
relation que nous entretenons avec l’objet et non à l’objet lui-même. À
mesure de notre pratique, nous donnons moins de crédit à nos jugements,
devenons curieux de ce que cela peut dire de nous et de ce dont ils nous
coupent.

Quel paradoxe !
On découvre que plus on veut changer quelque chose et moins cela change,
plus on l’accepte et plus cela a de chance de changer. Seule l’expérience
nous permet d’appréhender cela. Pour notre mental, c’est abscons. Ce que
l’on n’aime pas crée une tension en nous. L’accepter la détend. Lorsqu’on
porte attention aux sensations du corps dans nos pratiques, nous pouvons
ressentir des douleurs. Si nous commençons à commenter ces douleurs et à
chercher à les faire disparaître, elles vont occuper tout notre espace mental
et se renforcer. Il est assez surprenant de réaliser qu’en les accueillant
pleinement, sans chercher à les changer, elles se relâchent toutes seules et
peuvent même finir par s’évaporer. Il en est de même pour toutes nos
expériences désagréables, nos émotions… Si Jung disait « on ne saurait
changer ce que l’on n’accepte pas », la pratique permet de faire
l’expérience qu’accueillir inconditionnellement, avec bienveillance et sans
jugement permet un changement d’état.

Ce que l’on peut retenir


Accepter que, pour l’instant, il y ait quelque chose que je ne
peux pas accepter et que « pour l’instant c’est comme ça » est
souvent le premier pas vers l’acceptation et le changement.

Comment la pratique nous aide-t-elle à


développer l’accueil inconditionnel bienveillant et
non jugeant ?
Cultiver le non-jugement
La méditation en pleine conscience requiert que nous portions attention
sans jugement à tout ce qui est présent dans l’instant. Nous nous entraînons
donc à porter un regard d’observateur neutre, dépourvu de qualificatif sur
ce qui est là. Sans jugement, ce qui se manifeste dans l’expérience n’a pas
de coloration particulière. Alors tout devient plus facile à accueillir.
Méditation après méditation nous cultivons plus globalement ce nouveau
rapport au monde : « ce qui est, est » indépendamment de ce que nous en
pensons, que nous l’aimions ou pas. Nous apprenons à accueillir sans le
qualifier tout ce qui se présente à nous dans l’expérience d’une séance de
méditation, que ce soit agréable ou non. Ce que nous vivons dans notre
pratique infuse hors de ce cadre méditatif et nous abordons pas à pas le
monde avec plus d’acceptation.
Nous accepter tels que nous sommes

« Celui qui comprend l’être humain en lui-même


le comprend en tous les hommes. »

MONTAIGNE

La méditation requiert que nous nous acceptions avec bienveillance tels que
nous sommes, tout entiers, quels que soient la forme, la santé de notre
corps, la teneur ou le niveau de notre bien-être psychologique ou
émotionnel. Elle nous invite à tout accueillir sans l’étiqueter « bien/mal » :
« Il y a ça qui s’élève (pensée, perception, jugement, émotion…) : OK. » La
pratique est le lieu où nous n’avons tout simplement qu’à laisser être ce qui
est, à nous autoriser à être nous-mêmes. Progressivement, nous cherchons
de moins en moins à modifier ce que nous sommes (notre respiration, nos
pensées), même quand cela ne nous plaît pas. Alors, nous pouvons nous
observer, nous étudier sur le vif, regarder nos réactions face au réel, nous
voir dans notre nue vérité. Nous pouvons faire face à nos limites, nos
vulnérabilités… sans blâme ni complaisance. Nous avons une vision plus
juste et moins idéalisée de nous-mêmes. Nous parvenons à mieux nous
accepter tels que nous sommes vraiment dans notre imperfection. Nous
gagnons en tranquillité, en sécurité ontologique.
En acceptant nos fragilités, nos points faibles, nous devenons plus aptes à
accepter et à comprendre ceux des autres.
La méditation, en développant l’autocompassion, cultive notre compassion
pour l’autre.

Constater les ratés sans juger


Dans les pratiques, nous n’avons qu’à observer ce qui se présente dans
l’expérience du moment, instant après instant, que cela nous plaise ou non.
Si nous réalisons que nous sommes distraits ou que nous jugeons, il nous
est demandé de le noter sans nous juger et simplement avec douceur vis-à-
vis de nous-mêmes de revenir au présent. Distraction après distraction,
jugement après jugement, nous développons une forme de patience et de
non-jugement envers nous-mêmes. Nous éprouvons les difficultés à changer
de vieilles habitudes.

RETOUR D’EXPÉRIENCE
La patience que nous développons avec la pratique vis-à-vis de
nous-mêmes, développe également une plus grande patience et
acceptation des autres aux prises avec leurs difficultés.

Se voir juger et apprendre à se détacher du jugement


À chaque méditation, quand nous réalisons que nous sommes en train de
juger notre expérience, nous sommes invités à ne pas nous juger, à le
reconnaître et à simplement revenir au présent avec bienveillance. Dès que
l’on devient conscient d’un jugement sur soi ou sur les autres, on n’est plus
associé à ce jugement, un arrêt dans nos fonctionnements automatiques se
produit. Au début, nous nous rendons compte après-coup que nous avons
jugé, puis nous parvenons à ne plus nous laisser mener par nos jugements.
Avec la pratique la prise de conscience s’opère de plus en plus tôt, au point
qu’elle nous permette parfois de voir le moment où le jugement est sur le
point de se former. L’habitude de tout juger s’estompe petit à petit. Nous
devenons ainsi de plus en plus vigilants à nos jugements, aptes à nous en
détacher et agiles pour revenir à l’expérience directe. Dans notre vie
quotidienne aussi, nous repérons de mieux en mieux quand nous avons
quitté notre position d’observateur neutre. La pratique nous amène
progressivement à être moins jugeants ou moins conditionnés par nos
jugements. Méditer c’est apprendre à devenir intime, familier avec la réalité
et à voir les choses telles qu’elles sont sans comparaison à nos critères.

Remettre en cause nos jugements


La méditation, en nous apprenant à nous détacher de nos jugements, nous
permet petit à petit d’interroger ce qui les sous-tend : nos croyances, ce que
nous tenons pour vrai, pour juste. Après examen, nous pouvons constater
que beaucoup de nos convictions sont fondées sur ce que l’on nous a
raconté quand nous étions enfants, donc sur nos conditionnements.
Relativisant ainsi la valeur de vérité de nos jugements, qui sont des pensées
comme les autres, nous nous donnons l’opportunité d’entendre et
d’accueillir plus aisément le point de vue de l’autre et donc de l’accueillir
plus globalement quoi qu’il pense ou dise. Ce point semble sûrement
intellectuellement évident, cependant faire ce chemin dans sa propre
expérience interne amène cette compréhension à un autre degré de
profondeur et d’enracinement.

Faire un avec ce qui est

« Nous sommes en contact avec ce que c’est d’être un tout,


nous nous sentons unis à toutes choses.
Quand nous nous sentons unis à toute chose,
nous nous sentons comme un tout. »

JON KABAT-ZINN

Alors que juger crée une distance, apprendre à se positionner en observateur


neutre, développe une forme de douceur face à tout ce qui se présente dans
l’expérience. Cela limite la séparation que nous mettons entre nous et les
autres et le monde. Souvent en méditant, notamment dans la méditation de
l’Amour bienveillant proposée plus haut, nous éprouvons un sentiment
d’interconnexion, moins de différence entre soi et l’autre.

Ce que l’on peut retenir


Alors que l’accueil inconditionnel semble une évidence pour les
accompagnants, sa réelle incarnation demande un travail en
profondeur pour lutter contre notre habitude enracinée de tout
juger. Pratique après pratique, la valeur que nous accordons à
nos jugements s’estompe et la réelle acceptation de l’autre
devient possible.
« Une preuve scientifique ? »
Une étude2 a montré que l’entraînement à la compassion développe les
réponses altruistes. Les pratiquants expérimentés de méditation ont présenté
des réponses neuronales empathiques plus importantes que le groupe de
contrôle quand ils entendaient des sons d’autres personnes en train de
souffrir. Il a été mis en évidence que cette pratique affecte les régions du
cerveau qui nous rendent plus aimants vis-à-vis de soi et des autres.
Une étude3 de l’Emory University confirme que la pratique de la méditation
équivalente à celle appelée « Amour bienveillant » dans ce livre augmente
l’aptitude à entrer en empathie avec les autres.
L’étude4 de l’université de Stanford montre que la pratique de la méditation
sur l’Amour bienveillant augmente les émotions sociales positives.

Pour ceux qui ne veulent pas s’asseoir sur un


coussin – Pratiques informelles
Dans les transports, à votre fenêtre, dans un lieu fréquenté, observez les
gens et tentez de rester au stade de l’observation. Au bout de combien
de temps le premier jugement est-il apparu ?
Au cours d’une journée, du mieux que vous le pourrez, soyez attentifs à
la fréquence à laquelle vous jugez les autres et les situations.
Notez les jugements que vous formulez le plus souvent.
Prenez une personne envers laquelle vous avez un jugement très négatif,
qui vous irrite au plus haut point. À votre avis, sa mère, son conjoint
pensent-ils la même chose que vous ? Tel un explorateur, tentez de
trouver des indices qui prouvent que cette personne n’est pas aussi
(votre jugement) que ce que vous voulez bien le penser.
Ou bien trouvez 5 bonnes raisons (blessures de l’enfance, accident de la
vie, etc.) qui pourraient conduire une per-sonne à se comporter comme
cela.

Exemple
Quand vous faites une erreur, au lieu de vous blâmer, de vous
dire « mais c’est pas vrai ! », dites « OK ». Non pas pour dire
que vous vous résignez à ne rien faire pour corriger, mais « OK,
c’est ce qui est ». Rien ne vous empêche ensuite de rectifier la
situation et voyez la différence que cela produit.

EN SYNTHÈSE

À SAVOIR :

il est très difficile de rester simple observateur de ce qui est ;


nous jugeons tout et tout le temps.

LA PLEINE CONSCIENCE NOUS APPREND À :

dire « oui » à la réalité de l’instant quoi qu’il s’élève dans


l’expérience ;
développer notre compassion.

1. Catégorie de neurones qui s’activent autant en exécutant une tâche, qu’en observant quelqu’un
d’autre l’accomplir ou en s’imaginant en train de la réaliser.
2. « Regulation of the Neural Circuitry of Emotion by Compassion Meditation : Effects of
Meditative Expertise », Lutz, Brefczynski-Lewis, et al., Bernhard Baune, James Cook
University, Australia, 2008.
3. « Compassion Meditation May Boost Neural Basis of Empathy, Study Finds », Science Daily,
04/10/2012.
4. « Loving Kindness Meditation Increases Social Connectedness », Cendri A. Hutcherson, Emma
M. Seppala, and James J. Gross, Stanford University, 2008.
Développer le troisième pilier :
le détachement de soi ou le
désengagement de l’ego

« La carte n’est pas le territoire. »

ALFRED KORZYBSKI

Pourquoi est-ce si difficile de ne pas se mettre en


travers du chemin ?
L’impossible objectivité
On voudrait interférer et laisser le moins de traces possible dans nos
accompagnements. Mais notre façon d’expérimenter le réel et d’y répondre
est indissociable de nous. Nous ne pouvons complètement échapper à notre
subjectivité. La psychologie cognitive nous enseigne que nous percevons le
réel au travers du filtre de nos conditionnements, et que ce que nous en
comprenons est en fait une représentation que nous élaborons à partir de ce
qui est déjà stocké dans notre mémoire à long terme. Nous ne pouvons donc
pas accéder à la réalité objective, mais seulement à notre expérience de la
réalité. Nos réponses et nos accompagnements sont donc inévitablement
affectés par ce que nous sommes.

Notre besoin de sécurité


On ne supporte pas l’incertitude, on veut tout ramener au connu. C’est notre
réponse à la vulnérabilité de notre condition, l’héritage de notre statut de
proie. Au quotidien, quoi que nous entreprenions, notre esprit a la même
démarche : il anticipe, prédisant que les choses se passeront d’une certaine
façon en se fondant sur ce qu’il a connu par le passé et cherche à tout mettre
sous contrôle. Nous nous attendons donc à ce que les choses se passent
comme nous l’avons prévu et faisons beaucoup de plans. Est qualifié de
« normal » ce qui se produit et qui avait été anticipé ou était prévisible. En
revanche, ce que nous n’avions pas prédit est vu comme une chance ou
« anormal », et doit alors être rectifié.
Nous agissons sans cesse pour rendre le réel conforme à ce que nous
voulons pour nous sécuriser.

Performance et contrôle
Dans notre culture, on imagine que les plus performants sont ceux qui ont
eu le meilleur contrôle des événements. Alors nous cherchons à contrôler ce
qui se passe en séance, quitte à pousser ou à tirer, pour atteindre nos
objectifs. Nous envisageons plus difficilement de faire confiance à ce qui se
passe dans le moment présent et de nous laisser guider par ce qui arrive
pour y parvenir. Pour la plupart d’entre nous, ne rien préparer et juste
travailler avec l’incertitude de l’instant nous donnerait moins de chance
d’être efficaces. Nous imaginons que sans un minimum de contrôle de notre
part, le coaching ne mènerait nulle part.

La compulsion du faire
Si nous ne sommes pas actifs nous avons peur de ne plus être en
développement, d’être moins efficaces, moins productifs, voire même, avec
ce monde qui court sans cesse en avant, de reculer. Les expressions « si tu
n’avances pas, tu recules » ou « up or out » (évolue ou pars) entendues dans
les milieux professionnels en sont bien la manifestation. Le « non-agir »
peut sembler effrayant.

Nous tenons à notre identité


Nous associons notre identité à nos pensées, valeurs, croyances,
expériences, notre position sociale… Nous pensons que cette image
composée définit qui nous sommes. Il est alors très difficile de nous en
détacher. Défendre et faire reconnaître par les autres la vision que nous
avons de nous-mêmes et du monde est sous-jacent dans la plupart de nos
actions pour maintenir notre identité. Notre action est donc rarement
totalement détachée.

Le circuit de la récompense
Nous disposons dans le cerveau d’un circuit neuronal qui favorise
l’approche de ce qui nous crée du plaisir et l’éloignement de ce qui nous
procure des sensations désagréables. Intrinsèquement donc, nous sommes
davantage portés à aller dans le sens de ce qui nous fait plaisir et à
repousser ou à éviter ce qui nous gêne. Ces réactions automatiques souvent
peu ou non conscientes sont complètement dirigées par notre petit moi,
notre ego.

POINT CLÉ
Souvent nous considérons que ce qui a été bon pour nous est bon pour les
autres, à cela s’ajoute notre tendance à vouloir tout rendre conforme à ce
que nous croyons juste ou aimons. Nous agissons donc motivés par la
satisfaction de notre ego et sommes rarement vraiment détachés de nous-
mêmes.

Pour vous en convaincre – « 1’ chrono »


Pensez à une situation où tout ne s’est pas passé comme vous l’imaginiez.
Idéalement une situation pas trop grave. Ce peut être un résultat inattendu
positif comme négatif. Prenez un temps pour identifier toutes les causes et
circonstances qui ont conduit à cette situation. Pouvez-vous vraiment
identifier tout ce qui a contribué à ce résultat ? Pensez-vous vraiment
pouvoir reproduire exactement le même résultat ? Pourquoi aviez-vous été
surpris du résultat ?

VOTRE JOURNAL : QU’AVEZ-VOUS VÉCU, OBSERVÉ ?


En faisant cet exercice, peut-être avez-vous réalisé le nombre incroyable de
causes et de conditions qui ont créé ce résultat et qu’il est difficile de les
imaginer toutes. Vous réalisez que pour obtenir un résultat parfaitement
identique, il vous faudrait réunir exactement les mêmes paramètres et que
c’est absolument impossible. Peut-être avez-vous réalisé que votre action a
contribué au résultat final, mais qu’elle n’en est pas la seule cause, que tout
ne dépend pas de votre seule volonté, de votre seule action. Si le résultat
vous a surpris, n’est-ce pas parce que vous étiez très centré sur votre
illusion « si je fais ceci alors cela devra arriver » et pas suffisamment
conscient de tout ce qui entrait en jeu à ce moment-là ?

Pratiques formelles pour développer le


détachement de soi
Retrouvez les méditations guidées en scannant le QR Code ou sur le site www.celine-
levita.fr Rubrique Méditations

PRÉSENCE À LA RESPIRATION
Installez-vous confortablement et prenez un instant pour noter comment
vous vous sentez. Lâchez vos objectifs et votre volonté d’atteindre un état
particulier. Sentez-vous assis en portant votre attention sur vos sensations
corporelles, vos appuis sur le sol ou la chaise. Sentez vos mains déposées
sur vos genoux, détendues, n’ayant rien à faire. Restez dans cette présence
attentive au corps quelques instants. Centrez ensuite votre attention sur
votre respiration. Juste, observez votre souffle entrer et sortir de votre corps,
tel qu’il le fait, à son propre rythme. Assurez-vous de simplement faire
l’expérience de respirer et d’observer votre respiration, sans chercher à la
changer, sans lui imposer un rythme. « Laisser agir » l’organisme, le laisser
faire ce qu’il fait la majeure partie du temps en toute autonomie et sans
intervention de votre part. Il n’y a ni bonne ni mauvaise respiration,
simplement celle qui est là. Assurez-vous d’être dans la seule attention à
votre souffle, et laissez la respiration aller et venir à son rythme, celui qui
est le sien sans intervenir. Observez l’alternance et la profondeur de votre
respiration. À l’inspiration, accueillez l’instant et à l’expiration laissez
l’expérience se dissoudre pour faire de la place pour accueillir l’instant
suivant. Inspirer : se laisser inspirer. Expirer : laisser l’air repartir. Voyez
comme cela respire tout seul. Ne cherchez qu’à être présent à ce qui se
présente dans l’instant de l’expérience sans vouloir rien d’autre. Accueillez
ce qui vient sans chercher à le changer. Si vous vous égarez, ou si vous
observez que vous avez pris le contrôle de votre respiration, revenez-y en
ressentant les mouvements qu’elle imprime dans le corps. Soyez en contact
avec ses effets : à l’entrée des narines et dans la gorge, le ventre, les
poumons. Allez jusqu’au bout de l’inspiration jusqu’au moment de bascule
où le souffle fait marche arrière. Allez jusqu’au bout de l’expiration, point
de bascule où l’on inspire de nouveau. Observez comme l’inspiration et
l’expiration se déclenchent seules, observez la magie de la respiration qui
nous maintient en vie. Même quand nous n’y sommes pas attentifs. Cycle
après cycle de respiration demeurez dans l’observation du trajet du souffle
dans votre corps. En suivant le trajet de l’air, prenez conscience de vos
organes qui fonctionnent sans arrêt en toute autonomie : cœur, poumons,
estomac, foie, intestins, reins. Sentez votre corps tout entier respirer. Vous
noterez peut-être que votre souffle est devenu plus lent et plus profond au
fur et à mesure de l’exercice. Alors que vous êtes sur le point de cesser cet
exercice, ayez pour intention d’être attentif pendant la journée aux moments
où vous sentez que vous tentez de contrôler une situation. Faites alors de
votre mieux pour que les choses aillent dans le meilleur sens possible, tout
en acceptant que le résultat final ne soit pas uniquement le produit de votre
action.

Notez ce qui s’est passé pour vous dans cette méditation.

LES SENSATIONS DÉSAGRÉABLES

Installez-vous confortablement. Prenez un temps pour vous poser, et vous


sentir dans votre assise. Notez les points de contact avec le sol ou le siège :
vos pieds, vos cuisses, vos fesses, puis sentez votre dos droit sans rigidité,
reflétant votre dignité et votre tête avec le menton légèrement rentré
témoignant de votre humilité. Sentez-vous être assis ici et maintenant.
Ressentez votre corps dans son ensemble : l’espace qu’il occupe dans la
pièce, les sensations qui émergent. Scannez votre corps en commençant par
les pieds, en remontant vers le bassin. Si des tensions ou des douleurs se
manifestent, notez-les, amenez votre respiration dans ces points si cette
image vous parle, et passez à la partie suivante du corps. Remontez et
observez maintenant les sensations dans votre tronc, jusqu’aux épaules. Si
des tensions sont présentes, observez-les simplement sans rien chercher à
modifier. Descendez le long de vos bras jusque dans vos mains. Observez
s’il y a des crispations inutiles. Sentez vos mains sur vos genoux, les points
de contact. Essayez de sentir où s’arrêtent les sensations de vos mains et où
commencent celles de vos genoux. Ensuite remontez et posez votre
attention sur votre cou. Soyez présent aux sensations qui sont là sans rien de
spécial à faire. Puis passez aux sensations sur votre visage, sur votre cuir
chevelu. Y trouvez-vous des tensions ? Quoi que vous sentiez, simplement
observez sans rien chercher à modifier. Peut-être observez-vous notre
tendance à vouloir se défaire de ce qui est désagréable et à faire durer ce
que nous apprécions ? Maintenant observez votre corps dans son ensemble
et en partant de l’intérieur, essayez de sentir où est la limite avec l’extérieur.
Y a-t-il une sensation désagréable particulière qui se manifeste ? Une
tension dans les épaules, des fourmillements dans les pieds, un pincement
dans la hanche, une douleur dans le dos ? Centrez votre attention sur la
partie la plus inconfortable de votre corps. Restez en contact avec vos
sensations sans chercher à rien modifier. Soyez curieux de ce que cela vous
fait de devoir observer une sensation désagréable sans la changer. Constatez
l’activité de votre mental. Observez les pensées et l’émotion présentes. À
tout moment, si la situation devient trop inconfortable, ajustez votre
position en conscience, mais si ce n’est pas trop insupportable, un moment
encore restez dans l’observation de la sensation désagréable et voyez si des
tensions, des résistances se sont formées autour de la partie douloureuse.
Essayez de respirer dans cette partie, d’accueillir simplement cette
sensation. Que ressentez-vous à présent ? Et dans le reste du corps ? Alors
que cette méditation touche à sa fin, reprenez contact avec votre respiration
et les sensations de votre corps tout entier assis ici dans cette pièce. Et à
votre rythme reprenez le cours normal de votre journée.

Quelle a été votre expérience ?

UN OBJET CONNOTÉ

Pour cette pratique, choisissez un objet qui vous évoque un souvenir


agréable et posez-le quelques centimètres devant vous.
Prenez une posture droite, sans raideur et humble. Faites l’expérience d’être
assis ici et maintenant. Ressentez les sensations dans votre corps associées à
votre assise : les points de contact du corps avec la chaise ou le coussin, vos
pieds sur le sol, votre dos droit sans rigidité, votre tête et les sensations sur
votre visage. Maintenant, posez votre attention sur l’objet devant vous.
Regardez cet objet un instant. Restez en contact avec cet objet dans l’instant
présent. Observez sa forme, sa taille, sa couleur, la façon dont la lumière se
reflète dessus. Faites l’expérience un instant d’être en contact visuel avec
cet objet. Peut-être qu’au bout d’un certain temps vous réaliserez que cet
objet vous a détourné de l’instant présent et vous a emmené ailleurs, dans
vos souvenirs. Si tel est le cas, notez qui en est le héros principal. Quelles
émotions sont présentes ? Qu’êtes-vous en train de penser ? Voyez comme
tout cela est sans lien avec le réel de la situation présente. Si vous vous étiez
échappé du présent, revenez-y avec beaucoup de douceur et portez de
nouveau votre attention sur l’objet tel qu’il se présente devant vous ici et
maintenant sans le commenter. Faites simplement l’expérience de voir cet
objet ici et maintenant tel qu’il est à cet instant sans ajouter d’histoire ou de
souvenir. Voyez comme il est difficile de rester en contact direct avec
l’objet sans référence à ce que nous en savons, connaissons, avons
expérimenté. Revenez à l’objet devant vous. Si vous réalisez que vous êtes
parti dans des évocations, commentaires ou jugements, revenez simplement
et avec beaucoup de bienveillance à l’objet devant vous. Soyez attentif à
vos mains. Sont-elles détendues ? Si une légère crispation est présente,
relâchez vos doigts. Puis revenez simplement à l’observation de l’objet.
Alors que cette méditation touche à sa fin, élargissez votre regard et voyez
l’objet dans la pièce puis cessez l’exercice. Essayez, si vous le souhaitez, de
rester vigilant à la façon très personnelle dont vous vous reliez aux objets
du quotidien, souvent associés à des contextes particuliers.

Notez ce qui s’est passé pour vous dans cette méditation.

VOTRE JOURNAL : QU’AVEZ-VOUS VÉCU, OBSERVÉ ?

Mindfulness
La méditation en pleine conscience est une invitation au
détachement de soi :
elle requiert de ne pas se fixer d’objectif, de lâcher toute
attente de résultat immédiat, de ne rien vouloir ni rechercher
en particulier qui soit différent de ce qui est ;
elle demande également de tout accueillir indifféremment,
que cela nous soit agréable ou non, sans nous y attacher ou
le rejeter ;
elle nécessite enfin que nous soyons présents à ce qui est là
ici et maintenant, dans l’expérience directe du réel, nous
détachant de toute activité mentale (jugements, souvenirs,
souhaits…), donc de nos filtres et représentations.
La méditation en pleine conscience permet de cultiver le
désengagement actif de l’ego.

L’ego s’active et prend le contrôle de nos actions pour se protéger dès qu’il
se sent menacé. Bien se connaître et faire la paix avec toutes les parties
souffrantes en soi est donc préalable au désengagement de l’ego. La
présence à soi et l’acceptation de ce que nous observons de nous – incluant
nos parts d’ombre et de vulnérabilité – cultivées par la pleine conscience
nous y aident.

Ce que révèle la pratique


Notre difficulté à ne rien faire
Il est difficile de trouver du temps pour s’asseoir simplement sans intention
particulière autre que celle de porter attention sans jugement à ce qui est
présent. En général, on se dit que l’on a mieux à faire. Mais si l’on attend
d’avoir effectué tous les points de notre « to do list », on ne méditera jamais
car nous trouverons toujours quelque chose de plus urgent à faire passer
avant. Le mode habituel dans lequel nous vivons s’affole à l’idée de ne rien
faire. Alors notre esprit s’agite. Il nous est très difficile d’accueillir ce qui
est là sans vouloir immédiatement agir dessus, sans vouloir intervenir,
surtout si cela ne nous convient pas. Nous restons rarement simplement au
stade de l’observation. Nous nous retrouvons rapidement à exploiter ce que
nous observons. Nous prenons conscience à quel point nous voulons
toujours faire, agir.

Notre tendance à vouloir tout contrôler


En voyant notre impatience et notre frustration grandir face à notre
difficulté à demeurer observateur non jugeant par exemple, nous réalisons
que nous transformons rapidement nos méditations en objectifs à atteindre
et nous nous décourageons de « ne pas y arriver ». Il nous est difficile de
pratiquer sans chercher à accomplir quelque chose (une respiration plus
profonde par exemple). Il est tellement inconcevable pour nous que des
bienfaits et des changements puissent venir d’une pratique où l’on ne fait
rien que nous pensons devoir bien faire nos méditations pour en tirer les
fruits. Nous les transformons en exercices à réussir. Nous pensons que sans
un certain interventionnisme de notre part, rien ne peut se produire. Au
quotidien aussi, il nous est très difficile d’agir sans être attachés au résultat.
Nous réalisons que la plupart de nos actions sont empreintes de notre
volonté de contrôler le réel, de le rendre conforme à ce que nous voulons.

Le paradoxe de l’objectif
Nous nous rendons également compte que plus nous nous mettons de
pression sur l’atteinte d’un objectif quand nous méditons et moins nous y
parvenons. À l’inverse, pratiquer en se détachant du résultat nous permet
paradoxalement d’avancer dans le bon sens.

Exemple

Face aux sensations désagréables, ne rien vouloir, pas même


les faire disparaître, juste entrer en contact avec elles, peut
nous permettre d’en voir diminuer l’inconfort.

La difficulté à ne pas réagir


Nous observons que lorsque les conditions – la lumière, le bruit, etc. – que
nous voudrions pour notre méditation ne sont pas réunies, nous réagissons.
Nous éprouvons des difficultés à simplement rester présents et à accueillir
ce qui ne nous laisse pas indifférent. Si quelque chose est agréable, nous
cherchons à le faire perdurer, si quelque chose est désagréable, nous
cherchons à le fuir ou à le faire disparaître. Si l’on se sent bien dans une
méditation, on essaie de faire durer la sensation. Si au contraire, on ressent
des tensions ou une émotion désagréable, on a beaucoup de mal à en
demeurer le témoin neutre sans intervenir. Nous parvenons bien à rester
détachés tant que la situation vécue ne procure ni plaisir ni déplaisir
particulier mais dès lors que les choses ne nous laissent pas indifférent,
notre ego réagit.

On compare avec ce que l’on connaît


Nous passons notre temps à comparer notre expérience à ce que nous avons
déjà vécu. Au début des pratiques, nous allons par exemple peut-être
comparer la méditation à des cours de sophrologie ou de yoga que nous
avons suivis, à ce que nous avions lu au sujet de la méditation. On projette
donc les expériences anciennes sur le présent et en conséquence, on a du
mal à véritablement vivre ce qui se présente dans l’ici et maintenant.

Les lunettes du moi


Il nous est très difficile de demeurer au stade de l’observation nue sans
nommer, juger, étiqueter ou qualifier. La pratique nous permet de constater
que nous ramenons tout ce que nous percevons à nous : nous le comparons
à ce que nous croyons bon, juste, etc. Nous voudrions que le monde tourne
selon nos critères et quand ce n’est pas le cas nous nous disons « quelque
chose n’est pas normal ici », puis « je dois faire quelque chose pour y
remédier », et nous réagissons pour le rendre conforme à nos vues. Nous
avons une vision très autocentrée de la façon dont les choses « devraient »
se passer.

L’attachement à nos pensées


La méditation, en nous rendant observateurs de ce qui se passe en nous,
nous fait prendre conscience que souvent une pensée entraîne une émotion,
laquelle nous donne envie d’agir. Soit nous réagissons intérieurement (en
s’imaginant des scenarii ou en développant l’idée mentalement), soit
extérieurement. Par exemple si une idée « géniale » nous vient, nous
mourrons d’envie de nous lever soit pour la développer, soit pour la noter
pour ne pas l’oublier, et nous avons beaucoup de mal à rester assis sur notre
coussin et à rester attentif au moment présent. On perçoit dans nos pratiques
comme notre dialogue intérieur dirige en mode automatique nos envies de
réagir et in fine, nos actions. La méditation nous fait réaliser que nous
sommes les esclaves de nos pensées.

Ce que l’on peut retenir


Beaucoup de nos actions sont conditionnées par ce que nous
dicte de faire cette petite voix dans notre tête : notre ego. En
particulier quand l’expérience que nous faisons risque de le
mettre en danger.

Notre monde
On prend conscience que l’on a beaucoup de difficultés à rester observateur
seulement de ce qui est dans le champ de notre expérience ici et maintenant.
On ne voit pas la rose qui est là devant nous mais la somme des expériences
passées que nous avons eues avec des roses que nous encapsulons sous le
mot « rose ». Il nous faut faire un effort pour voir le réel et non notre
réalité : cette rose-là et non ma rose.

Moi : une entité pas si solide que ça


La méditation nous entraîne à l’observation de ce qui se passe en nous, à
être le témoin de notre expérience, à nous mettre en position « méta » vis-à-
vis de nous-mêmes : nous nous voyons penser et agir. Alors petit à petit, si
nous acceptons de nous regarder vraiment sans nous juger, nous observons
que nous ne sommes pas tout le temps « quelqu’un qui est à l’écoute »,
« une personne qui est bienveillante » car, de fait, parfois nous ne le
sommes pas. Nous devenons capables de voir que nous ne sommes pas
aussi monolithiques que nous voudrions le faire croire. Nous percevons
progressivement l’histoire que nous nous racontons au sujet de nous-mêmes
et l’identité que nous essayons – dans nos actions et interactions – de
maintenir mais qui n’est finalement pas si « solide » que cela.
Comment la pratique nous aide-t-elle à
développer le détachement de soi ?
Apprendre à faire avec ce qui est là
La méditation nous permet de voir que rien n’est jamais identique ni
permanent. Elle nous permet donc de cultiver une familiarité et un confort
avec l’impermanence des choses, une détente face à l’imprévisible et
l’inattendu. Elle invite à nous déposer dans la pleine acceptation de ce qui
se produit instant après instant, dans ce mouvement changeant constant.
Cela nous apprend à ne pas lutter, refuser, chercher à transformer ce qui est
là. C’est apprendre à lâcher prise avec ce que notre ego veut, attend, exige
pour se sécuriser et à faire avec ce qui se présente dans la justesse de
l’instant.

Se détacher de l’objectif
Évidemment, nous commençons souvent à méditer parce que nous
souhaitons changer quelque chose dans notre vie. Pour autant, la méditation
exige que nous laissions de côté nos objectifs et que nous pratiquions sans
chercher à atteindre quoi que ce soit. Nous apprenons donc à agir, guidés
par une intention mais détachés du résultat immédiat, faisant confiance au
processus pour nous amener à bon port. Nous apprenons à nous défaire de
notre tendance à vouloir contrôler le résultat et à nous ouvrir à l’expérience
avec curiosité, sans espoir ni attente donc décentrés de nous-mêmes.

Voir des changements s’opérer sans avoir cherché à


contraindre ce qui était là
On s’apercevra au bout d’un certain temps de pratique que sans rien avoir
cherché à modifier, sans nous être crispés sur notre objectif, juste en
observant ce qui est, nous avons changé. Nous changeons de regard sur
notre volonté de contrôle et son apparente efficacité, et nous acceptons
progressivement qu’être présents, conscients et engagés envers notre
intention permet à beaucoup de choses de se produire au moment voulu.
Ce que l’on peut retenir
Infusant dans notre vie quotidienne, nous apprenons petit à petit
à agir, à orienter nos actions dans le sens de notre intention
mais en nous détachant du résultat. Nous lâchons prise sur la
volonté de contrôle.

Voir ses réactions sans y succomber


La pratique formelle demande de tout accueillir puis de le laisser aller
l’instant d’après. Elle cultive notre détachement de tout ce que notre mental
nous propose. Dans les méditations, quand nos ambitions, nos désirs, nos
colères, nos craintes, etc. parviennent à notre conscience sans que nous
puissions les satisfaire immédiatement, nous apprenons aussi à ne pas leur
obéir aveuglément. Nous musclons notre capacité d’autocontrôle et limitons
notre impulsivité. L’emprise de notre mental est moins forte sur nous.
Progressivement, nous pouvons de mieux en mieux accueillir ce qui se
présente, même si nous ne l’aimons pas ou si c’est désagréable, sans réagir.
Nous nous détachons progressivement de nos réactions égotiques.

Se détacher de notre vision pour voir vraiment


Méditer c’est apprendre à ne plus regarder le monde avec des concepts, des
étiquettes, et à en faire l’expérience directe sans la rapporter à soi. C’est se
détacher de nos pensées, préjugés, savoirs, a priori – de notre ego – pour
expérimenter la réalité nue via nos perceptions. Nous nous entraînons à
rester au stade de la réalité sensorielle (perçue par nos sens) non déformée
par nos expériences, nos conditionnements passés qui la transforment sinon
en notre réalité conceptuelle. Nous apprenons à faire la différence entre le
réel et le virtuel : entre ce qui se produit vraiment et ce que nous nous
racontons à son sujet (commentaires, jugements…). Petit à petit, nous
parvenons de mieux en mieux à nous détacher de nous-mêmes pour faire
l’expérience directe du réel, à vivre l’instant directement en y étant
complètement présent sans créer d’interférence avec notre moi, à faire un
avec ce qui est et à ne pas laisser de trace.
De « porter attention » à « constater »
Lorsque nous parvenons à entrer dans un état de calme mental, nous
n’avons plus besoin de diriger notre attention pour demeurer présent. Nous
n’avons plus besoin de prêter attention ce qui suppose une action, une
volonté, une direction donnée, qui demande une forme d’effort,
d’investissement personnel. Nous pouvons devenir les témoins de ce qui
est, de tout ce qui se présente à nous.

RETOUR D’EXPÉRIENCE
Nous dépensons moins d’énergie et sommes moins
interventionnistes, tout en demeurant malgré tout très présents.
Nous apprenons le non-faire dans l’action.

Laisser le silence agir


En méditant, on cultive le « non-faire ». On apprend à être à l’aise dans le
silence. Il devient moins stressant. L’urgence à agir, à le combler, à le faire
cesser devient moins pressante. Nous voyons comment nous pouvons
progresser nous-mêmes dans le silence. Nous apprenons à laisser faire, à
laisser le processus œuvrer de lui-même. Nous acceptons et laissons
progressivement plus de temps au silence dans nos interactions. Nous
laissons le silence agir comme catalyseur et ne cherchons plus nous-mêmes
à intervenir à ce moment-là.

De l’acceptation de soi au détachement de soi


La méditation, en nous invitant à cultiver l’accueil in-conditionnel, nous
amène à une meilleure acceptation de soi dans toutes ses dimensions, parts
d’ombre et vulnérabilité comprises. Ce faisant, nous nous réconcilions petit
à petit avec tout ce que nous sommes, nous nous débattons moins contre
certains aspects et trouvons une forme de tranquillité, nous sommes, pas à
pas, moins attachés à défendre une image de nous-mêmes. Nous avons
moins besoin d’affirmer ou de justifier nos positions pour nous sentir à
l’aise.
RETOUR D’EXPÉRIENCE
En développant la connaissance et l’acceptation de soi nous
avons de moins en moins besoin de chercher l’approbation de
l’autre. Nous avons moins besoin de convaincre que nous avons
raison. Nous pouvons agir de plus en plus détachés.

« Une preuve scientifique ? »


Selon l’étude1 de J.A. Brewer, parue en 2011, le « réseau par défaut »,
responsable de la distraction mentale et associé aux pensées sur soi, se
calme chez ceux qui ont une pratique au long cours de la méditation
entraînant chez eux moins de ruminations sur eux-mêmes et leur place dans
le monde.
Une étude2 de 2011, conduite par Saron et Wallace, montre que les
participants à une retraite de méditation ont développé une meilleure
aptitude à s’autoréguler et donc à limiter leur impulsivité que le groupe
contrôle.
Les méditants de longue date semblent également avoir une partie du
cerveau associée au plaisir et à l’addiction appelée « nucleus accumbens »
plus petite que les autres. Selon Goleman et Davidson3 cette région
participe au phénomène d’attachement ou d’aversion qui amène le mental à
rechercher à obtenir quelque chose qui semble gratifiant et à se débarrasser
de ce qui lui est déplaisant.
On constate également chez les méditants une baisse de l’activité du lobe
pariétal droit qui reflète la dissolution de la frontière entre le soi et le non-
soi.

Pour ceux qui ne veulent pas s’asseoir sur un


coussin – Pratiques informelles
Formez-vous une image mentale d’un chien. Demandez à une autre
personne de faire le même exercice. Maintenant demandez-lui de vous
décrire le chien qu’elle s’est imaginé. Comparez avec le vôtre. Voyez
combien nos représentations peuvent être différentes derrière un même
mot et combien il nous faut nous détacher de notre vision du chien pour
pouvoir discuter de la même chose avec l’autre personne.
Dans une discussion informelle et non professionnelle, soyez attentif à
la vitesse à laquelle vous voulez ajouter quelque chose, corriger, donner
votre expérience sans laisser l’autre finir son propos. Contactez
l’urgence de dire ce que vous avez à dire. Puis, quand vous notez cette
envie pressante, au lieu de cela, posez-lui une question sur lui. Notez
combien de temps vous avez tenu avant d’intervenir ou avant d’en avoir
eu envie la première fois. Au final, combien de temps a-t-il parlé ? Et
vous ? Qu’est-ce qui a été le plus facile ? Le plus difficile ?
Dans vos coachings, observez comme lorsqu’une idée vous vient, il
devient difficile de rester à l’écoute. Observez ce qui se passe à ce
moment-là. Ressentez-vous le besoin de la noter de peur de l’oublier ?
Attendez-vous avec impatience le moment où vous allez pouvoir la
formuler ?
Essayez, dans une situation où il ne se passe rien (file d’attente,
transport en commun, salle d’attente…), ou une situation légèrement
inconfortable (trop chaud ou trop froid dans une pièce, quelqu’un trop
près de vous dans un transport en commun) de ne rien faire. Que se
passe-t-il pour vous ? Avez-vous pu vous retenir d’intervenir pour
corriger la situation ? Si oui, avez-vous intérieurement pesté et ragé, ou
êtes-vous parvenu à rester en contact avec tout ce qui se produit en
vous, sans réagir ?
Face aux légères émotions négatives (petit agacement, petite déception,
petite honte…) essayez juste d’y rester présent sans rien faire.

EN SYNTHÈSE

À SAVOIR :

nous sommes attachés à notre vision du monde et de nous-


mêmes ;
nous voulons tout contrôler.

LA PLEINE CONSCIENCE NOUS APPREND À :


lâcher notre illusion de contrôle et agir en nous détachant du
résultat ;
nous désidentifier de nos pensées, émotions – de notre ego ;
limiter notre réactivité.

1. « Meditation Experience Is Associated with Differences in Default Mode Network activity and
connectivity », National Acad Sciences, 2011.
2. « Enhanced Response Inhibition During Intensive Meditation Training. Predicts Improvements
in Self-Reported Adaptive. Socioemotional Functioning », Emotion, 2011.
3. D. Goleman, R. Davidson, Altered Traits, Avery, 2017.
Développer le quatrième pilier :
son ouverture

« Notre aptitude à expérimenter quelque chose


est inversement proportionnelle à la quantité de connaissance
que nous avons accumulée à son sujet. »

SADHGURU

Pourquoi est-ce si difficile d’être ouvert ?


Toutes nos perceptions ne parviennent pas à notre
conscience
Nous sommes constamment bombardés des milliers de stimuli extérieurs.
Or notre mémoire de travail a une capacité limitée. Nous avons donc besoin
de filtrer les informations entrantes pour ne pas être submergés et pouvoir
comprendre le monde. C’est le rôle que joue notre attention en contraignant
notre champ perceptif. Elle provoque « l’effondrement de l’attention
périphérique » qui explique que l’on ne voit plus ce qui se passe autour de
nous quand nous regardons l’écran de notre téléphone par exemple. Nous
ne percevons donc du monde que ce qui entre dans le champ de notre
attention. Notre attention crée en outre des trous dans le temps car
lorsqu’elle est mobilisée sur un point, elle n’est pas capable de saisir autre
chose pendant 500 millisecondes. De plus, notre attention se tourne
automatiquement davantage vers certaines choses en fonction de nos
habitudes, des émotions qu’elles suscitent en nous, de nos intentions. Elle
se porte sur certains aspects du présent sans que nous décidions
consciemment lesquels la plupart du temps. Et sans une application
particulière portée à tous nos sens, elle fonctionne à l’économie.

POINT CLÉ
Sans une ouverture volontaire de notre attention, nous passons à côté
d’une grande partie de l’information que peut nous offrir le monde.

Un « réglage » du cerveau
La psychologie sociale a montré que nous faisons plus attention aux stimuli
qui vont confirmer ou soutenir nos croyances, et que nous avons tendance à
filtrer les autres au lieu de rester ouverts et réceptifs à tout ce qui nous
entoure. Ce phénomène de « filtrage cognitif » a lieu à un niveau non
conscient et nous fait perdre une large partie de l’information réellement
disponible. Quand on écoute, on est plus réceptif à ce que l’on connaît déjà
qu’au reste. L’écoute « adhère » plus facilement sur le connu, limitant notre
ouverture. Pour le coach, il existe un risque d’une écoute partielle et
sélective non consciente.

La force de l’habitude
À l’âge adulte, nous remettons de moins en moins en cause nos modes de
fonctionnement, nos pensées… Quand le cerveau note quelques points
communs avec une situation connue, dans un souci d’économie d’énergie, il
reproduit ce qui a fonctionné jusque-là dans des situations vaguement
analogues. Avec le temps, ces répétitions renforcent des chemins neuronaux
et finissent par créer des sortes d’autoroutes que nous empruntons sans
même y réfléchir. Progressivement et insidieusement ces automatismes
orientent nos vies et nos décisions. Nous finissons par appliquer
mécaniquement les mêmes schémas, sans réévaluer au préalable la
pertinence de nos jugements ou actions au regard de la situation actuelle. Il
en est de même pour nos pratiques professionnelles et d’accompagnement.
Il arrive que deux ou trois signaux suffisent à nous aiguiller rapidement et
sans plus de distinction, sur des voies déjà maintes fois empruntées avec
succès, sans examiner la justesse de l’option choisie dans le contexte précis
de l’instant.
L’intellect avant tout
Dans nos sociétés occidentales, l’importance accordée aux fonctions
intellectuelles est grande. Nous sommes invités à développer nos capacités
à mémoriser, à analyser, à comprendre… mais peu à ressentir notre corps ou
nos émotions. Nous appréhendons donc essentiellement le monde via des
concepts, des pensées qui raccourcissent par définition l’expérience. Nous
n’avons, pour la plupart d’entre nous, pas développé l’écoute de notre corps
et de nos sens qui pourtant nous relient intimement au présent.

Ce que l’on peut retenir


Nous vivons coupés de notre corps, parfois même de nos
émotions, et ne sommes donc pas pleinement ouverts au
présent dont nous ne pouvons pourtant faire la réelle
expérience que par nos sens.

Pour vous en convaincre – « 1’ chrono »


Prenez dans vos mains et observez un objet du quotidien pendant 45
secondes.
Maintenant mettez-vous dans la peau d’un bébé d’un an qui ne sait donc pas
parler, ne dispose pas des mots pour faire l’expérience du réel, mais
uniquement de son expérience directe, sans concept. Comment percevez-
vous ce même objet ? Qu’est-ce qui change ? Quelle différence ?

VOTRE JOURNAL : QU’AVEZ-VOUS VÉCU, OBSERVÉ ?


Le présent a du mal à retenir notre attention quand il nous est trop familier
ou sans intérêt particulier pour nous. Peut-être avez-vous éprouvé plus de
joie dans la deuxième option, une saveur nouvelle, une curiosité, un
étonnement parce que vous n’étiez plus pris dans vos concepts, dans ce que
vous croyiez savoir. Les pensées se sont peut-être dissipées faisant place à
un état de conscience éveillé, curieux qui perçoit plein de nouvelles choses.

Pratiques formelles pour développer son


ouverture
Retrouvez les méditations guidées en scannant le QR Code ou sur le site www.celine-
levita.fr Rubrique Méditations

DÉGUSTATION DE POP-CORN

Pour cette pratique, nous allons utiliser un aliment. Je re-commande de


prendre des pop-corns, mais vous pouvez faire l’expérience avec l’aliment
de votre choix. Trouvez une position confortable qui vous permette d’avoir
le dos droit et d’être détendu. Dans cet exercice de pleine conscience vous
allez faire l’expérience d’un pop-corn avec vos cinq sens : vous allez le
voir, le sentir, le goûter, le toucher et l’entendre comme si c’était votre
première rencontre avec cet objet « non identifié ». Soyez ouvert à cette
expérience. Tenez l’objet non identifié dans une main et observez sa
texture, son poids, sa température, est-il dur ou souple ? Observez-le
simplement, n’étiquetez pas avec des concepts, faites l’expérience
d’observer. Soyez pleinement présent au contact avec cet objet non
identifié. Puis regardez-le comme si c’était la première fois que vous en
voyiez un. Observez sa couleur, notez les ombres à sa surface, ses reliefs.
Maintenant sentez cet objet non identifié. Du mieux que vous pouvez,
essayez de ne pas commenter, mais de rester au niveau de l’expérience
sensorielle. En pressant légèrement dessus ou en le faisant rebondir dans
votre main, voyez le bruit qu’il fait. Prenez votre temps. Faites l’expérience
par vos sens de cet objet non identifié. Respirez-le, laissez son odeur vous
parvenir. Sentez toutes les sensations dans votre corps alors que vous entrez
en contact avec tous vos sens avec cet objet non identifié. Voyez comme
peut-être le mental vous rattrape en commentant ce que vous êtes en train
de faire. Si c’est le cas, laissez passer ces pensées. Quand vous êtes prêt,
placez-le sur vos lèvres et notez le contact, la sensation que cela procure. À
votre rythme, sans le croquer, mettez-le dans la bouche. Notez vos
sensations quand vous le faites voyager sur votre langue, vos dents, votre
palais. Observez si la texture change. Notez son goût. Goûtez-le vraiment.
Vous pouvez le croquer et observer ce que cela fait. Observez les sensations
dans votre bouche. Notez les goûts subtils qui en émanent progressivement,
les premiers puis les suivants, comment ils apparaissent et s’effacent. Notez
quelle sensation et quelle émotion générale s’élèvent dans votre corps tout
entier alors que vous faites la pleine expérience de goûter cet objet non
identifié. Re-commencez avec un autre et continuez à concentrer toute votre
attention sur lui. Ressentez ce que cela fait de manger ainsi, de cette façon.
Ressentez ce que cela fait d’être pleinement présent au fait de manger.
Soyez simplement présent au goût, à la texture et à l’odeur. En concluant
cette méditation, voyez si vous pouvez apporter dans vos repas et dans
chaque moment de votre vie une partie de cette expérience de manger en
pleine conscience.

Quelle a été votre expérience ?


MARCHE EN CONSCIENCE

Pour cette méditation en mouvement, dédiez, comme pour les méditations


formelles, un moment particulier. Nous allons décomposer notre marche et
marcher très lentement. Il est donc préférable de trouver un endroit où vous
pourrez vous sentir à l’aise de marcher à ce rythme. Pour commencer,
trouvez une position debout, stable, ouverte et droite. Prenez un temps pour
vous sentir debout. Sentez tout votre corps reposer sur vos pieds, sentez
comment votre poids s’équilibre sur la plante des pieds et ajustez-vous pour
trouver votre ancrage en basculant légèrement à l’avant puis à l’arrière et
sur les côtés jusqu’à trouver votre aplomb. Une fois posé, prenez un temps
pour vous sentir être debout. Comment vous sentez-vous dans votre corps à
cet instant ? Que se passe-t-il dans votre tête ? Et au plan émotionnel ?
Posez également votre attention sur votre souffle. Maintenant, vous allez
tout doucement déplacer votre poids sur le pied droit pour permettre à
l’autre d’avancer. Vous allez avancer délicatement le pied gauche et poser
avec beaucoup de douceur d’abord le talon au sol puis la plante du pied. À
ce moment, portez votre attention sur le transfert de poids qui s’opère et sur
le talon droit qui se soulève. Quand vous êtes pleinement à plat sur le pied
gauche, c’est le pied droit qui est prêt à se soulever. Procédez ainsi
lentement à chaque pas en portant votre attention sur vos pieds et le
transfert de poids. Après quelque temps ouvrez votre conscience aux
mouvements de vos articulations : chevilles, genoux, hanches. Puis portez
votre attention sur les mouvements de vos muscles qui se contractent et se
relâchent à chaque pas. Enfin portez votre attention sur vos jambes entières
qui se déplacent. Dès que votre attention s’envole ailleurs, revenez sur
l’objet de votre attention sans blâme. Restez un moment attentif au
mouvement de votre corps tout entier qui se déplace. À votre rythme, vous
pourrez ajouter à votre champ d’observation votre respiration et essayer de
synchroniser respiration et mouvement. Inspirez quand le pied se décolle,
expirez quand il se pose. Au début cette synchronisation n’est pas aisée. Et
si vous prenez conscience que cela vous a emporté mentalement ailleurs,
dans des jugements, des émotions désagréables, revenez sans jugement à la
respiration et à la marche. Donnez-vous une distance à parcourir et du
mieux que vous pouvez, essayez de maintenir votre attention pendant la
marche alors que le rythme de la respiration et celui de la marche petit à
petit se synchronisent. Il n’y a rien à réussir. Juste à être présent à ce qui est
là sans jugement. Quand vous parvenez à trouver plus d’aisance, essayez
d’ouvrir aussi votre attention à ce qui vous entoure : les sons, les sensations
de vos vêtements sur la peau alors que vous marchez… Observez toute la
richesse qu’offre le fait de marcher en conscience. Lorsque ce sera bon pour
vous, passez en position statique et prenez un temps pour observer ce qui se
passe après cette marche consciente pour vous aux trois plans : tête
(pensées), cœur (sentiments) corps (sensations), avant de cesser l’exercice.

Prenez un temps pour faire le bilan de votre expérience.

S’OUVRIR À LA PLEINE EXPÉRIENCE DU PRÉSENT

Asseyez-vous confortablement. Trouvez une posture digne et détendue : le


dos bien droit sans raideur, le menton légèrement rentré. Sentez les points
de contact du corps avec le support sur lequel vous êtes assis avec une
sensation de stabilité au sol, les mains déposées sur les cuisses. Entrez en
contact avec votre respiration et établissez-vous quelques instants dans
l’expérience de respirer. Quand vous vous sentirez prêt, soyez curieux de
votre expérience d’être assis, ici. D’abord, dans votre corps : sentez votre
corps dans son intégralité, ses contours extérieurs, la place qu’il occupe
dans la pièce, ses différentes parties, quelles sont vos sensations
corporelles ? Voyez comme les manifestations du corps sont changeantes
d’instant en instant. Maintenez du mieux que vous pouvez l’attention sur
votre corps et si vous vous égarez, félicitez-vous de l’avoir observé et
revenez à votre corps. Explorons les perceptions. Que voyez-vous juste
devant vous ? N’étiquetez pas « sol », « tapis ». Restez dans l’expérience de
voir ce qui est devant vous puis, progressivement élargissez votre attention
à l’ensemble de votre champ de vision. Notez les différences instant après
instant, comme ce que vous regardez change en fonction de la luminosité,
etc. Laissez votre conscience visuelle en arrière-plan et explorez votre
expérience olfactive. Sentez-vous quelque chose ? Laissez les odeurs entrer
et sortir du champ de votre conscience. Laissez cela au second plan pour
accueillir maintenant aussi les sons. D’abord ceux présents dans la pièce,
sans chercher à les nommer mais en contactant leur volume, leur rythme,
leur tonalité. Élargissez le champ de votre conscience auditive. Notez
comme chaque instant est différent du précédent. Vous pourrez à certains
moments contacter également le silence, toujours présent et seulement
recouvert par les bruits. Laissez l’attention aux sons en arrière-plan et faites
appel à votre conscience gustative. Sentez-vous un goût dans la bouche ?
Maintenant ressentez votre corps tout entier assis ici. Qu’est-ce qui
l’habite ? Est-il fatigué, en forme ? Explorons le contenu de votre tête alors
que vous êtes assis ici. Quelles pensées vous traversent ? Des images ? Des
souvenirs ? Des anticipations ? Notez-les simplement et observez comme
les contenus de votre esprit varient sans cesse à chaque moment. Soyez
attentif à la qualité de votre esprit : est-il paisible ? Agité ? Fatigué ? Restez
un moment en contact avec l’expérience de votre esprit. Quand vous serez
prêt, tournez votre attention vers votre cœur : quel état émotionnel vous
habite ? De la paix, de l’ennui, de l’agacement ? Comment le percevez-
vous ? Notez comme cet état peut varier au cours de la méditation. Restez
l’observateur de tout ce qui se manifeste, ne cherchez rien à contrôler, à
modifier. Il s’agit seulement de rester le témoin de ce qui se produit en vous
dans l’expérience, sans préférence, comme si vous regardiez passer les
nuages dans le ciel. Si une chose retient votre attention et vous distrait,
constatez comme votre champ d’attention se réduit, se referme et comme
dès que vous la relâchez, il s’ouvre à nouveau. Revenez au présent dans
toutes ses dimensions, rouvrez le champ de votre conscience. Écoutez aussi
les silences quand le mental ne fait pas de bruit. Soyez à l’écoute de ce
silence d’arrière-plan que l’on peut contacter entre deux pensées. Peut-être
pourrez-vous percevoir comme tout se dépose dans ce silence. Essayez de
vous reposer dans ce silence d’arrière-plan et de voir émerger les différentes
sensations, pensées, émotions depuis ce silence. Voyez comme le champ de
votre conscience devient vaste, comme ce silence contient tout. Observez
combien s’établir dans ce silence nous permet d’être ouverts à tout ce qui se
présente dans l’expérience.

Prenez un temps pour faire le bilan de votre expérience.

VOTRE JOURNAL : QU’AVEZ-VOUS VÉCU, OBSERVÉ ?


Mindfulness
La pleine conscience nous aide en premier lieu à nous
désidentifier de notre mental et à nous installer dans le calme
sous-jacent. Depuis cet endroit vaste, il devient possible, grâce
à la présence attentive et au non-jugement cultivés d’ouvrir le
champ de son attention à tout ce qui s’invite dans cet espace.

Ce que révèle la pratique


Difficile de rester présents et curieux de ce que nous
connaissons ou croyons connaître
Nous observons que plus l’objet de méditation nous est familier et plus vite
nous sommes distraits au début. En général, nous le regardons avec le
prisme de ce que nous connaissons déjà, et il est très difficile de rester
attentif et curieux de ce que l’on croit connaître. Dans la pratique elle-même
aussi : parfois, on ressent de la lassitude à faire toujours les mêmes
méditations et il est difficile d’aborder chacune d’entre elles avec la même
fraîcheur et la même ouverture que la première fois. La lassitude est le
signe du manque d’ouverture, du manque de curiosité. De la même façon,
plus vous aurez lu sur la méditation, plus vous vous attendrez à vivre
certaines choses que vous allez chercher à retrouver, au lieu de rester
curieux et ouvert à ce qui se présente. Chercher à retrouver ce que l’on croit
connaître, ce n’est pas être ouvert. Notre impatience aussi est un frein à
l’ouverture : en méditant, on attend des résultats tangibles et s’ils tardent à
se manifester, la déception et l’abandon peuvent survenir, au lieu de rester
curieux. Si nous stagnons, la lassitude peut s’installer et une pratique
automatique manquant de curiosité avec.

RETOUR D’EXPÉRIENCE
Pourtant, c’est en restant prêt à accueillir ce que l’on n’attend
pas ou plus que de belles prises de conscience peuvent
survenir.

Nos raccourcis
On réalise que l’on étiquette tout compulsivement. Certes, il est plus simple
pour communiquer et vivre ensemble d’avoir une « étiquette » commune
pour désigner le même type d’objets, mais ce faisant, nous nous coupons de
la réalité unique d’instant en instant de toute chose. Nous ramenons la
singularité de l’expérience de l’instant à une généralité qui la raccourcit, la
limite et la rigidifie. En méditant, nous observons notre habitude à nous
relier au monde par ces concepts. Il nous est difficile de voir quelque chose
sans l’étiqueter instantanément au lieu de rester au stade de sa perception.
Nous prenons ainsi conscience que nous pensons plus le réel que nous ne
l’éprouvons. Notre expérience du présent est surtout mentale et peu
connectée au cœur et au corps.

Stimulus Perception Étiquetage


(processus automatique)

Nous réalisons que nous avons tendance à rester à la surface des choses à
cause de ces étiquettes et à manquer de curiosité. À partir du moment où
nous parvenons à ne pas étiqueter et à demeurer au stade de l’expérience
par nos sens alors beaucoup de détails et de singularités nous apparaissent.

Sensations et émotions
Les méditations nous font prendre conscience de notre difficulté à entrer en
contact avec nos sensations dans le corps et nos états internes. Nos
perceptions corporelles, sensorielles et émotionnelles sont souvent
atrophiées à cause d’un mental omniprésent. Il ne laisse que très peu de
place pour permettre à toutes ces autres dimensions de pénétrer le champ de
notre conscience. Nous sommes peu familiers avec notre corps et nos
émotions. Si nous percevons leurs signaux, c’est souvent de manière assez
grossière et lorsqu’ils sont vraiment très manifestes. Ce que nous constatons
sur le coussin nous invite à être plus attentifs et nous fait réaliser que nos
perceptions sensorielles ou émotionnelles ont peu de place dans notre vie
quotidienne, stoppées par l’intervention quasi immédiate et automatique du
mental qui qualifie et commente l’expérience au lieu de la laisser s’épanouir
en nous.

Richesse de l’expérience
L’exercice du pop-corn nous fait réaliser la richesse de la dégustation d’un
simple grain de maïs quand elle est vécue en conscience en portant attention
à tous nos sens. Le simple fait d’être attentifs nous révèle une quantité
d’informations qui passent habituellement sous nos radars. Il peut être
fascinant de prendre conscience pour la première fois de sa vie, qu’un pop-
corn fond dans la bouche !

Unicité de chaque instant


Avec la répétition des pratiques, à force de poser notre attention sur les
mêmes objets (souffle, corps, objet du quotidien) nous allons à chaque fois
découvrir de nouvelles choses et surtout nous rendre compte par
l’expérience que rien n’est jamais exactement identique à l’instant d’avant
ou à l’idée que nous nous en faisons. Même si, au plan intellectuel, cela
semble une évidence car nous savons qu’à chaque instant des cellules de
notre corps se renouvellent par exemple, en prendre conscience dans
l’expérience et pas seulement au plan mental amène ce savoir à un autre
niveau de conscience. Nous pouvons de moins en moins dans la vie
quotidienne dire « je connais ça ! », et sommes invités à rester curieux et
ouverts.

Entre deux pensées, deux étiquettes, il y a un espace


Quand on parvient à s’établir dans un calme mental, on découvre dans cet
espace toute l’épaisseur du présent. Nous pouvons alors accueillir
simultanément dans le champ de notre conscience devenu vaste, tout ce que
l’expérience fait émerger en nous. On mesure tout ce à côté de quoi l’on
passe quand on est pris par nos concepts, nos pensées, nos émotions, tout ce
que l’on manque en étant occupés par notre mental.

Ce que l’on peut retenir


On réalise que, très souvent, notre perception des choses n’est
ni pleine ni claire car obscurcie ou interrompue par des « films »
que l’on se raconte, des pensées, des souvenirs, des
projections.

Comment la pratique nous aide-t-elle à


développer l’ouverture ?
Nous avons vu que la méditation nous permettait de cultiver la présence
attentive, qui est une condition sine qua non pour pouvoir être ouverts à ce
qui est là. En nous aidant à cultiver l’accueil inconditionnel, elle limite nos
rejets, nos refus, nos visions parcellaires. En la pratiquant, nous nous
détachons aussi progressivement de notre besoin de contrôle et de ce que
nous savons, nous élargissons ainsi également notre spectre de vision. Ce
qui signifie que les pratiques proposées précédemment peuvent tout aussi
bien vous conduire à développer votre ouverture ; car la méditation en
pleine conscience est en elle-même une invitation à la curiosité et à
l’accueil vaste puisqu’elle consiste à prendre un temps spécifique
simplement pour observer tout ce qui est là. En devenant curieux de ce qui
se passe en soi, on développe aussi sa curiosité pour l’autre.

Développer le regard curieux du débutant


Méditer en pleine conscience, c’est porter volontairement attention à ce qui
est présent ici et maintenant. C’est donc s’asseoir et prendre du temps pour
observer ce que l’on ne prend plus la peine de regarder habituellement.
C’est donc s’entraîner à rester un cran avant l’étiquette que l’on pose
compulsivement sur toute chose et qui la réduit et la fige, pour voir tout ce
qui est là par-delà le concept. La pratique, en nous invitant à rester au stade
de nos perceptions, nous conduit à voir directement ce qui se présente à
nous, sans passer par le mental (nos souvenirs, nos jugements, notre
expérience). Nous cultivons donc le « regard du débutant » puisque nous ne
pouvons nous référer à rien de connu. Nous observons chaque moment avec
la fraîcheur des premières fois instant après instant, avec la curiosité et
l’ouverture naïve d’un enfant. Nous nous offrons la possibilité de voir
l’extraordinaire dans l’ordinaire, de voir la singularité de chaque situation
au-delà de ce que l’on croit connaître.

Lutter contre l’habituation


Tout ce que nous (re)découvrons en prêtant attention dans la pratique,
cultive notre envie de moins survoler nos expériences dans notre vie
ordinaire. Nous luttons contre le phénomène dit d’« habituation » qui
consiste à ne plus prêter attention aux nouvelles informations d’un
environnement supposé connu. Nous nous rouvrons aux choses du
quotidien que l’on croyait connaître parfaitement, aiguisant notre curiosité,
portés par la joie de la présence sans concept. Nous apprenons à voir
l’unicité dans l’ordinaire.

Développer une attention de plus en plus large


Au commencement de notre pratique, nous développons surtout notre
capacité à focaliser notre attention sur un seul objet pour apprendre à
calmer notre mental. Méditation après méditation nous parvenons plus
rapidement à accéder à l’espace calme et spacieux qu’offre un esprit apaisé.
Depuis cet endroit, notre attention ouverte accueille toutes nos perceptions,
pensées, émotions et sensations, et les voit disparaître. Nous cultivons pas à
pas une observation de plus en plus vaste et globale des phénomènes entrant
dans le champ de notre conscience. Nous devenons aptes à prendre en
compte de plus en plus d’informations.

De l’ouverture à soi à l’ouverture aux autres


Il peut être effrayant de prendre le risque d’être confronté à soi-même dans
l’immobilité de la pratique. C’est une aventure et faire preuve d’ouverture
que d’aller voir ce qui se cache dans le silence de la méditation.

RETOUR D’EXPÉRIENCE
En devenant curieux de ce qui se passe en soi, on développe
aussi sa curiosité pour l’autre.

Voir plus clair


La méditation en pleine conscience nous amène à nous détacher de nos
pensées, de nos émotions, de nos jugements… Elle conduit l’esprit dans un
état tranquille et clair. C’est un peu comme avec une boule de neige, ce petit
objet que l’on achète à la montagne. Si elle a été agitée, on ne voit pas bien
le décor qui se cache à l’intérieur. On peut à peine voir à travers les flocons.
Mais dès que le mouvement s’apaise et qu’ils se déposent au fond, on
distingue clairement le paysage. Le simple fait de cesser l’agitation du
mental nous permet d’accéder avec plus de clarté à l’expérience du présent
dans toutes ses dimensions. Parfois des idées émergent de ce calme,
semblant venir de nulle part. Attentifs à tout ce qui se présente, nous
pouvons aussi les prendre en compte et décider ou non de nous en servir.
Dans nos accompagnements, ces intuitions peuvent amener de la créativité,
permettre d’ouvrir une nouvelle porte ou guider notre exploration.

S’ouvrir et affiner ses perceptions sensorielles


La méditation nous exerce de façon répétée à porter attention à nos
perceptions sensorielles. Tout comme un œnologue averti a des papilles
plus affûtées et sait distinguer une grande palette de goûts, la pratique
récurrente aiguise nos cinq consciences sensorielles et ce que les
bouddhistes appellent la « conscience du sixième sens mental » (conscience
imaginale des ressentis, des pensées, des affects, des états d’âme, des
émotions). Plus nous pratiquons, plus nous développons notre sensitivité.
Nos sens perçoivent petit à petit une information de plus en plus subtile :
nous affinons le grain de nos perceptions comme si l’on descendait du TGV
et que l’on se promenait à pied – au lieu de ne percevoir que des taches de
couleurs – nous pouvons voir les insectes sur les fleurs dans les prés. La
pratique développe la finesse de perception de nos sens et par là même la
finesse de notre perception de nos expériences. Nous devenons
progressivement ouverts et aptes à capter des informations de plus en plus
subtiles.

S’ouvrir et affiner ses sensations corporelles


La pleine conscience nous invite à être attentifs à tout ce qui se passe en
nous. À mesure que nous pratiquons, nous percevons des signaux de plus en
plus ténus du corps. Des recherches ont montré le rôle des tripes dans la
collecte d’informations. Notre corps a cette capacité aussi de stocker et de
partager de l’information. En développant nos perceptions corporelles, nous
devenons plus aptes à remarquer des changements de sensation interne de
plus en plus subtils dans notre corps. Nous avons alors le choix de nous en
servir comme une information à partager, à questionner dans nos
accompagnements. Ces interventions peuvent parfois sembler « magiques »
ou « extrasensorielles » au coaché alors qu’il ne s’agit que de perceptions
fines.

Les bienfaits de la méditation


La méditation, en nous apprenant à nous défaire de l’agitation
du mental qui nous coupe de l’expérience, nous permet de nous
rouvrir et de redevenir curieux de toute la richesse de l’instant
présent captée par le corps. En nous entraînant à porter notre
attention à ce qui nous parvient par les sens, nous affinons leur
acuité et pouvons avoir accès à des éléments de plus en plus
subtils de l’expérience. Notre perception et notre
compréhension de l’instant présent deviennent plus fines et plus
vastes.

« Une preuve scientifique ? »


Dans l’étude1 de Slagter, Davidson et Lutz, parue en 2007, une série de
lettres était affichée au hasard sur un écran d’ordinateur dans une
succession rapide sur une durée de 1 000 millisecondes. Deux chiffres
étaient intercalés au milieu des lettres. Les participants, à la fin du
visionnage de la série, devaient indiquer les nombres qu’ils avaient vus. Les
sujets ayant réalisé trois mois intenses de méditation ont fait preuve d’un
meilleur contrôle de la distribution de leur attention et de leurs ressources
perceptuelles. Ils ont alloué moins de ressource cérébrale à chaque lettre et
ont pu enregistrer plus de lettres et mieux percevoir les chiffres que le
groupe témoin.
Dans une autre étude2, Eileen Luders et ses collègues au UCLA Laboratory
of Neuro Imaging ont découvert que les méditants de longue date avaient
un plus grand nombre de gyrifications (sortes de replis du cortex) que les
non-méditants. Les scientifiques pensent qu’elles sont responsables d’un
traitement plus rapide de l’information, d’une meilleure prise de décision,
d’une meilleure formation de la mémoire et d’une meilleure attention.
Une enquête3 du Center for Mindful leadership a montré que 61 % des
personnes interrogées déclaraient avoir l’impression de survoler leurs
activités professionnelles. Après un entraînement à la pleine conscience
seulement 25 % d’entre elles avaient encore cette sensation.

Pour ceux qui ne veulent pas s’asseoir sur un


coussin – Pratiques informelles
Sur votre trajet quotidien, essayez de noter chaque jour une chose
différente.
Demandez-vous quelle est la dernière fois que vous avez fait quelque
chose pour la première fois.
Allez vous promener dans la nature et où que vous soyez, observez le
monde autour de vous sans poser d’étiquette sur ce que vous voyez.
Essayez de rester le plus longtemps possible au stade de vos
perceptions.
Regardez votre conjoint comme on observe une personne pour la
première fois : on regarde d’abord ses cheveux, ses yeux, ses mains, sa
bouche. Puis lorsqu’il commence à parler, on découvre le son et le
timbre de sa voix, ses gestes, la façon dont il s’exprime, réagit, bouge,
etc.
La prochaine fois que quelque chose d’inattendu se produit, observez la
fraîcheur et l’ouverture de votre regard.
Au prochain malentendu, prenez conscience de ce que vous teniez pour
acquis.
Quand vous prendrez votre café, soyez attentif à tout : la chaleur de la
tasse dans vos mains, l’odeur du café, la chaleur qui augmente sur vos
lèvres à mesure que vous approchez la tasse, le contact du café sur vos
lèvres, le goût du café une fois en bouche, puis comment il s’atténue
progressivement après l’avoir dégusté, la sensation de chaleur dans
votre gorge et dans l’œsophage, etc.

EN SYNTHÈSE

À SAVOIR :

nous restons souvent à la surface des choses avec nos


« étiquettes » ;
nous sommes peu familiers avec nos perceptions
sensorielles.

LA PLEINE CONSCIENCE NOUS APPREND À :

développer notre curiosité ;


nous reconnecter et développer nos sens ;
percevoir plus largement et finement.

1. « Mental Training Affects Distribution of Limited Brain Resources », Slagter H.A., Davidson
R.J., Lutz A., PLOS Biology, 2007.
2. « The Unique Brain Anatomy of Meditation Practitioners:alterations in Cortical Gyrification »,
Frontiers in Human Neuroscience, 2012.
3. « Mindful Leadership at Work. What Does the Reasearch Show ? », 2011.
Développer le cinquième pilier :
son intelligence émotionnelle

« Ne pas chercher à ne pas souffrir ni à moins souffrir,


mais à ne pas être altéré par la souffrance. »

SIMONE WEIL

Pourquoi est-ce si difficile d’être


émotionnellement intelligent ?
Les émo-quoi ?
Nous vivons dans un monde où s’il est normal d’éduquer l’intellect, on ne
se préoccupe aucunement de l’éducation du cœur et de nos affects.
Résultat : près de 50 % des individus éprouvent des difficultés à identifier
ce qu’ils ressentent exactement. Ils se sentent juste « mal » ou « bien ».
Nous vivons donc dans un monde supposé purement « rationnel » dans
lequel il y a peu de place pour les émotions, encore moins dans le monde de
l’entreprise qui exige qu’on « les laisse à la porte ».

POINT CLÉ
Il y a peu de terrains de jeux propices à l’expression et à l’exploration des
émotions.
La peur de la thérapie
Le coaching se distingue de la psychothérapie et du conseil par le fait qu’il
ne s’intéresse ni à la personne ni à la situation en tant que telle, mais à la
relation que le coaché entretient avec elle. Les émotions ressenties vis-à-vis
de la problématique sont donc bien dans le champ du coaching. Pourtant,
trop souvent, les émotions sont associées – dans les représentations
habituelles au domaine de la psychothérapie. Les coachs et autres
accompagnants non formés à la psychologie peuvent craindre de franchir
une limite qui les conduirait de ce côté, sans être compétents pour cela. Les
clients aussi, car nous ne sommes pas habitués à faire face à nos émotions.

Un verrou de protection
On a tendance à fuir nos émotions désagréables car lorsque nous étions tout
petits, elles représentaient quelque chose de trop effrayant, de trop
douloureux que nous ne pouvions gérer. Nous nous sommes donc souvent
protégés, voire coupés, de nos émotions pour faire face aux coups durs de la
vie. À cela s’ajoutent nos conditionnements parentaux visant à les faire
taire. Nous avons alors pris l’habitude de les rejeter, de nous en dissocier, et
de tout faire pour ne pas nous y confronter tant intérieurement (mécanismes
de défense pour ne pas les ressentir) qu’extérieurement (tous les évitements
de situations qui pourraient les générer) par peur de craquer, de ne plus agir
rationnellement, ou de perdre la face.

Une terre inconnue


Nous craignons d’ouvrir notre cœur et envisageons menaçant, pour notre
sécurité ou notre aptitude à penser et agir justement, de confronter nos
émotions. Peu d’entre nous sont donc vraiment familiers avec leurs
émotions, beaucoup les craignent. Face à elles, le réflexe le plus courant
consiste à nous en couper ou à réagir pour « éteindre » les émotions
négatives. Nous n’avons donc pas pris l’habitude d’explorer ce champ pour
nous-mêmes, hormis peut-être dans un cadre très particulier –
thérapeutique.

La peur des émotions des autres


Les émotions désagréables des autres réveillent des émotions désagréables
en nous. Ayant pris l’habitude non consciente d’éteindre les nôtres, il nous
est difficile d’aller nous confronter à celles des autres de peur d’en être
« contaminés » ou de ne pas être capables de vraiment les accueillir.
Comme nos émotions ont tendance à nous emporter, nous craignons, si
nous entrons en contact avec celles de nos clients, de perdre notre neutralité
et de basculer dans la sympathie ou l’antipathie, et la réactivité
émotionnelle. Alors, nous cherchons le plus souvent à les fuir ou
rapidement à les faire taire chez l’autre. Quand nous voyons une émotion
pointer chez le coaché, notre réaction automatique peut être celle de
l’évitement.

La pression du temps : un obstacle à notre compassion


Une étude1 demandait à des étudiants en théologie de rédiger une homélie
sur le thème du « bon Samaritain ». Il leur était ensuite demandé d’aller
l’enregistrer dans un studio d’un quartier voisin. En chemin, ils croisaient
un complice allongé et gémissant sous une porte cochère, rappelant la
situation face à laquelle s’était retrouvé le bon Samaritain. Dans le groupe
sur lequel une pression du temps avait été exercée, seules 10 % des
personnes s’étaient arrêtées pour le secourir.

Pour vous en convaincre – « 1’ chrono »


Pensez à une situation qui génère en vous une émotion quelque peu
désagréable. Restez présent pendant une minute à cette émotion.

VOTRE JOURNAL : QU’AVEZ-VOUS VÉCU, OBSERVÉ ?


Stratégies d’évitement
Le plus souvent, on cherche à faire disparaître l’émotion difficile
en la chassant de notre esprit, en tentant de « rationaliser » la
situation, en imaginant ce qu’on pourrait ou aurait pu faire pour
ne pas se retrouver dans cette situation ou y remédier. On peut
aussi se retrouver à le commenter, le juger et à nous échapper
dans un discours mental ou encore à nous en distraire par toute
autre idée. Parce que ce n’est pas confortable de ressentir une
émotion désagréable, notre esprit cherche des échappatoires.
Ces réactions sont des stratégies d’évitement. Finalement on
pense plus souvent l’émotion qu’on ne la ressent.

Pratiques formelles pour développer son


intelligence émotionnelle
Retrouvez les méditations guidées en scannant le QR Code ou sur le site www.celine-
levita.fr Rubrique Méditations

L’ÉTAT INTÉRIEUR ET LE RESSENTI ÉMOTIONNEL


Installez-vous confortablement, prenez le temps d’arriver dans votre
méditation. Asseyez-vous de manière à être stable, le dos détendu et droit
avec une posture digne et humble. Sentez-vous assis ici et maintenant
quelques instants. À votre rythme, posez votre attention à l’intérieur.
Observez ce qui est là dans votre tête : vos pensées ; votre corps : vos
sensations ; votre cœur : vos émotions. Du mieux que vous pouvez, restez
dans la position de l’observateur, ne vous accrochez à rien. Il s’agit juste de
s’accueillir. Quel est votre état interne ? Comment vous sentez-vous ? Si
une émotion est là reconnaissez-la. Comment se manifeste-t-elle ? Parfois
on n’observe rien de particulier. Il n’y a rien à inventer. Parfois, c’est juste
que l’on est assez peu familiers avec nos émotions. Alors retournez vers vos
sensations corporelles. Si vous ne sentez rien, demandez-vous ce que cela
fait et ce qui se passe quand on ne sent rien. Y a-t-il des tensions ?
Ressentez votre gorge, votre poitrine, votre abdomen ou votre estomac et
constatez ce qui est là : un poids, une contraction ? Restez suffisamment en
contact avec vos sensations. Tentez de ne pas chercher à vous représenter
votre corps, mais plongez vraiment dans ce que vous ressentez, dans vos
perceptions sensorielles, sans intervention du mental, et contactez ce qui est
présent, ce qui a besoin d’attention là maintenant. À mesure que vous serez
au contact de cette sensation, voyez si elle garde la même consistance ou si
au contraire elle se dissout. En perdant sa solidité, peut-être resterez-vous
en contact avec l’énergie, l’émotion qui l’habitait. Observez ce que vous
ressentez dans votre cœur. Une émotion est-elle timidement là ? Pouvez-
vous lui faire de l’espace, la laisser être vraiment là en lui portant toute
votre attention sans la juger ? Ressentez cette émotion sans vous y
accrocher. Ne vous attachez pas à son contenu. Dites-lui simplement
« bonjour », restez à son contact. Laissez-la être ici sans la fuir ni la suivre.
Observez-la, détendu. Respirez dans votre émotion là où elle est la plus
présente pour vous dans votre corps. Inspirez dans l’émotion, expirez
depuis l’émotion, laissez-la se détendre avec le souffle. Observez la texture
de l’émotion qui – peut-être – change. Restez présent ici et maintenant avec
l’émotion et le souffle. Notez comment vous vous sentez maintenant.
Reprenez doucement contact avec vos points d’appui sur le sol ou sur la
chaise, rouvrez les yeux s’ils étaient fermés et reprenez contact avec votre
environnement extérieur.

Notez ce qui s’est passé pour vous.


LES ÉMOTIONS NÉGATIVES PUIS POSITIVES

Doucement, trouvez une position assise confortable. Détendez votre visage,


les muscles de votre mâchoire et posez votre attention sur votre respiration.
Du mieux que vous pouvez, essayez de sentir votre stabilité dans la posture,
votre ancrage. Peut-être pouvez-vous trouver ce lieu dans lequel vous
essayez de vous réfugier en vous et qui est votre centre de sécurité, votre
centre de paix. Peut-être se trouve-t-il dans votre bas-ventre ou ailleurs.
Restez un instant dans ce lieu où vous vous sentez en sécurité. Dans cette
méditation nous allons accueillir deux types d’émotion : désagréables et
agréables. Chacun a une énergie particulière qui est différente. Nous allons
commencer par explorer l’émotion de tristesse. Je vous invite à choisir un
souvenir qui vous procure ce sentiment.
Soyez doux avec vous-même, ne choisissez pas un souvenir qui soit trop
dur ni trop frais pour vous. Nous cherchons à cultiver notre capacité à
reconnaître et à ressentir l’énergie des émotions dans le corps. Une légère
émotion de tristesse est suffisante pour cet exercice. Invitez le souvenir dans
votre conscience et accueillez ce qu’il amène avec lui en vous. À mesure
que vous revisitez ce souvenir, sentez comme vous vous teintez de tristesse
et ce qui se passe dans votre corps. Peut-être une pointe dans votre
poitrine ? Quoi d’autre ? Votre réponse est très personnelle. Notez
seulement l’effet de ce souvenir sur votre corps ici et maintenant. Respirez
dans ces sensations, avec ces sensations dans votre corps. Restez présent à
vos sensations et à votre respiration. Voyez comment vous vous sentez.
Maintenant, détachez-vous de ce souvenir, des pensées associées à ce
souvenir et restez seulement dans l’émotion. Ressentez-la, restez à son
contact sans y rattacher l’histoire, le contenu. Notez ce que vous ressentez.
Permettez-vous d’être simplement avec l’énergie de l’émotion. Continuez à
respirer et restez ouvert à l’expérience de ce moment. Maintenant, ramenez
votre conscience dans votre respiration. Soyez attentif à votre respiration et
lâchez toutes les pensées, toutes les histoires. Et si votre esprit s’égare,
revenez simplement à la respiration.
Demandez-vous maintenant ce que vous avez mangé la veille au dîner.
Prenez un temps pour ressentir de nouveau les points de contact de votre
corps avec ce qui vous soutient et remémorez-vous à présent un souvenir
heureux qui vous remplit de joie. Prenez le temps de revivre mentalement
chaque moment de cette histoire. Laissez monter en vous les émotions de
joie qui vous habitaient alors. Observez les effets de cette émotion dans
votre corps maintenant. Observez l’énergie qu’elle libère, les sensations
qu’elle apporte. Continuez de revivre chaque instant et de ressentir le plaisir
que cela vous a apporté. Notez comment, où vous ressentez ce bonheur.
Installez-vous dans les sensations. Maintenant lâchez la main au souvenir et
aux pensées liées au souvenir, et demeurez dans l’énergie de l’émotion et
des sensations. Où la sentez-vous ? Explorez avec curiosité le flot de
l’énergie dans le corps, toutes les sensations que cela vous procure.
Plongez dedans. Notez si elle change, disparaît ou se transforme en une
autre émotion. Ne cherchez pas à contrôler, simplement observez et
ressentez ce que ça change. À votre rythme, lâchez tout et posez votre
attention sur les points de contact de votre corps avec le sol. Revenez ici et
maintenant dans cette pièce. Quand ce sera le moment pour vous, rouvrez
les yeux.

Notez vos observations issues de la pratique.

LA SOUFFRANCE DE L’AUTRE

Trouvez une position assise stable et confortable. Prenez un instant pour


vous installer ici et maintenant, en contactant les différents points de la
posture – vos pieds, votre assise, votre dos, votre menton, vos mains –, puis
sentez tout votre corps, sentez-vous être assis ici avec ce sentiment de
stabilité dans votre assise. Si vous l’avez trouvé installez-vous dans votre
centre de paix intérieur et sinon installez-vous dans votre bas-ventre et
ressentez la sensation d’ancrage que cela peut procurer. À présent, ouvrez
votre conscience à votre respiration. Sentez-vous respirer du bas de la
colonne vertébrale jusqu’au sommet du crâne, sentez votre respiration
traverser votre corps et installez-vous dans votre souffle. Faites l’expérience
de votre état interne. Comment vous sentez-vous ? Invitez maintenant dans
votre conscience le souvenir de quelqu’un que vous aimez et qui traverse
une période un peu compliquée. Soyez doux avec vous-même : ne
choisissez pas tout de suite une personne très proche dans une situation
dramatique. Simplement quelqu’un que vous appréciez et qui rencontre une
difficulté passagère (financière, relationnelle, amoureuse). Pensez à cette
personne dans sa situation actuelle et voyez ce que cela fait émerger en
vous. Observez le flux des pensées. Constatez aussi les changements dans
votre corps physique. Ces pensées ont-elles créé des tensions, des douleurs
dans le corps ? Prêtez attention à votre ressenti émotionnel. Quelle émotion
l’évocation de cette personne en difficulté provoque en vous ? À quel
endroit cette émotion est-elle la plus perceptible ? Observez ce qui se
produit maintenant au plan mental : quelles sont les pensées présentes ? Et
qu’éprouvez-vous dans le corps ? Une sensation d’ouverture, d’expansion
ou au contraire un repli, un rétrécissement ? Soyez le témoin de la façon
dont ce que vit cette personne résonne en vous aux trois plans : tête, cœur et
corps. Cette personne n’est pourtant pas là à cet instant précis, voyez tout ce
que la simple évocation mentale agite en vous. Essayez de rester dans
l’observation de ces phénomènes sans vous y attacher, en les laissant passer.
Maintenant, imaginez que cette personne soit face à vous et vous raconte ce
qu’elle traverse. Observez ce que cela produit en vous. Sentez-vous une
ouverture ou au contraire une sensation de contraction ? Que se passe-t-il
dans votre tête ? Qu’avez-vous envie de dire ? Quelle émotion est
présente ? Comment ces trois niveaux : tête, cœur et corps se répondent-
ils ? Qui a le dessus ? Avec qui restez-vous le plus facilement en contact ?
Pouvez-vous un instant porter plus particulièrement votre attention sur le
plan émotionnel et entrer en contact avec l’émotion et la sensation physique
associée sans chercher à vous en départir ? Observez vos réactions. Pouvez-
vous encore rester au contact de votre émotion, l’observer sans chercher à la
manipuler ou à la modifier ? Parvenez-vous à rester tranquille avec
l’émotion ? Maintenant laissez votre esprit libre un instant, laissez-le faire
ce qu’il veut. Revenez ici et maintenant, là où vous êtes assis.

Que tirez-vous de cette expérience ?

VOTRE JOURNAL : QU’AVEZ-VOUS VÉCU, OBSERVÉ ?


Mindfulness
La pleine conscience nous invite à être le témoin de tout ce qui
se présente dans l’expérience. À mesure que notre attention
s’affine, nous devenons plus réceptifs à ce qui se passe autour
de nous mais également en nous. Elle constitue un
entraînement à la présence à notre état interne, émotionnel.

Ce que révèle la pratique


Pas habituel de contacter ses émotions !
Instinctivement, on n’a pas toujours envie de contacter ses émotions (en
particulier négatives !) au moment où l’on s’apprête à faire l’exercice. Petit
à petit, on arrive à percevoir que dans la vie quotidienne aussi, on a plus
tendance à réprimer, à masquer, à nier ou à minimiser nos émotions
désagréables qu’à les rencontrer. La pratique nous fait également prendre
conscience que c’est le refus de nos émotions qui les rend souffrantes.

On n’a pas accès facilement à nos émotions


En conséquence, lorsque l’on essaie de les contacter, soit on ne sent rien,
soit on évite de les ressentir en versant rapidement dans le commentaire
mental : la cause de mon émotion, ce que je devrais faire, ce que je n’aurais
pas dû tolérer… Très rapidement, nous nous trouvons pris au piège d’un
scénario ou de pensées liées à l’émotion, qui l’entretiennent sans que nous
n’y plongions vraiment. On réalise que l’on sait que l’on a une émotion par
la prise de conscience d’une sensation physique. La méditation, en nous
invitant à cultiver notre conscience corporelle, nous permet d’entrer en
contact plus facilement avec la présence de nos émotions. En questionnant
notre corps, nous pouvons recueillir des indices et recontacter une émotion
sous-jacente.

Repousser ses émotions désagréables ne résout rien


On réalise que l’on ne peut pas se débarrasser d’une émotion désagréable en
la repoussant et que cela produit même l’effet inverse à celui recherché car
l’émotion réprimée gagne en intensité. Nous en libérer exige d’aller à sa
rencontre et non de nous en couper. C’est par le corps que nous pouvons
contacter notre émotion. En laissant ses manifestations physiques
s’exprimer pleinement tout en y demeurant présents sans ajouter de
commentaire mental, nous libérerons l’émotion de la prison dans laquelle
on la retenait en nous. Elle perd de son énergie car elle n’est plus alimentée
par le carburant ni de nos pensées ni de la contrainte que l’on exerçait sur
elle. Aller à la rencontre d’une émotion réprimée c’est comme ouvrir la
porte à quelqu’un qui veut absolument vous dire quelque chose. S’il a
frappé et attendu longtemps, d’abord, il va être agité, beaucoup insister pour
être sûr d’être entendu puis se calmer progressivement, à mesure qu’il se
sent écouté. Il pourra ensuite repartir calmement sans laisser de trace. Une
fois l’émotion pleinement libérée et accueillie avec bienveillance et
compassion, se sentant entendue, elle n’a plus besoin de faire autant de
bruit. Son emprise s’amoindrit.

Une émotion cache un refus


Quand nous sommes dans une réelle acceptation d’une situation, elle ne
crée pas d’émotion. Nous pouvons observer que nos émotions désagréables
sont toujours liées à un refus : le refus que la réalité soit telle qu’elle est et
non telle que nous voudrions qu’elle soit.

Les émotions sont inoffensives


Petit à petit avec la pratique, on se rend compte que l’on peut ouvrir la porte
à des émotions de plus en plus fortes et qu’elles sont aussi inoffensives que
n’importe quelle pensée bien qu’elles soient parfois très désagréables ou
effrayantes. Les explorer peut être déplaisant, mais ne peut pas nous tuer.
Seules les actions dirigées par les émotions – mais pas les émotions elles-
mêmes – peuvent être dangereuses. On se rend compte que l’on peut les
accueillir sans les craindre. Il est certain qu’à cet endroit, être accompagné
par quelqu’un qui a déjà fait le chemin permet de surmonter cette peur de
ne faire plus qu’un avec l’émotion quand elle est forte. Par la pratique nous
réalisons qu’il est possible, sans prendre de risque, de s’ouvrir de plus en
plus à elles et que l’on peut baisser la garde. On peut progressivement les
accueillir comme n’importe quelle autre information de l’expérience et les
prendre en compte au même titre que le reste pour agir avec justesse. Notre
vision des émotions pourrait bien progressivement changer, lentement, et
pour toujours.

Derrière une émotion désagréable, se cache une


vulnérabilité
La pratique, en nous invitant à nous observer, nous permet de mieux nous
connaître. Nous observons de mieux en mieux les expériences qui
déclenchent des émotions désagréables en nous et des réactions
émotionnelles. En accueillant avec bienveillance et compassion la partie
souffrante en nous, nous pouvons, avec la familiarisation avec nos
émotions, contacter nos vulnérabilités sous-jacentes. Nous réalisons
combien elles sont réactives et nous entraînent dans des réponses
automatiques quand nous n’en sommes pas conscients. Quand nous les
accueillons, nous pouvons voir comment, dans la situation, répondre au
besoin non satisfait et éviter la réactivité émotionnelle.

Les émotions des autres résonnent en nous


Les émotions désagréables des autres parfois font écho en nous à des
situations passées. Alors souvent, au lieu de rester présents à soi et à l’autre,
nous réagissons pour fuir ou faire taire ce que nous ressentons.

Ce que l’on peut retenir


Nous avons tendance à vouloir aider l’autre pour ne plus
ressentir ce que nous ressentons de désagréable. Nous
devenons surtout à l’écoute de nous-mêmes.

Comment la pratique nous aide-t-elle à


développer l’intelligence émotionnelle ?
L’idéogramme japonais signifiant la pleine conscience – KOKORO - est
composé de deux parties en interaction : celle du haut « maintenant » et
celle du bas : « cœur ». La pleine conscience inclut la présence à ses
émotions. En développant la présence attentive, l’accueil inconditionnel,
l’ouverture et le détachement de soi, la pleine conscience nous aide à
développer l’intelligence émotionnelle. Elle nous entraîne à être attentifs à
tout et en particulier à nos émotions, à les accueillir, à être curieux du
message qu’elles portent, sans chercher à les contrôler ou à les faire
disparaître.

Développer la conscience du corps aide à développer celle


des émotions
En développant notre conscience du corps, la méditation nous permet
d’entrer plus facilement en contact avec nos émotions. Nous permettant de
constater le lien entre une sensation de contraction, de fermeture ou de vide
et la présence d’une émotion désagréable, elle nous invite à nous interroger
sur la signification émotionnelle d’une sensation pénible perçue dans le
corps (plus facile à repérer que les émotions dans un premier temps).

Développer la curiosité de nos états internes


La méditation en pleine conscience nous invite à être curieux et à observer
nos états internes. Comme nous les voyons, nous n’y sommes plus
identifiés. Nous pouvons progressivement les regarder sans qu’ils nous
perturbent. Nous apprenons à les accueillir et à les accepter ; à ne pas les
chasser trop vite. Comme nous réalisons progressivement que les émotions
ne sont pas dangereuses, nous avons moins peur et sommes plus en
confiance pour les explorer. Nous en devenons progressivement même
curieux.

Voir l’enchaînement automatique émotion-réaction


En étant présents à ce qui se passe en nous dans nos pratiques, nous voyons
nos automatismes à l’œuvre. Si nous repensons à une situation injuste, nous
percevons quasi simultanément de la colère monter, et immédiatement et
automatiquement l’envie de réagir pour corriger l’injustice.
Le voir, reconnaître ce qui se produit nous permet de porter un regard
critique sur des schémas récurrents pas toujours adaptés et de trouver un
espace qui permet de choisir notre réponse. Une « mise à jour » de nos
programmes devient possible. Sentir les émotions monter en nous et
conscientiser ces mécanismes automatiques nous permet de retrouver le
choix de nous y soumettre ou pas. La pratique nous rend de plus en plus
conscients de nos états émotionnels et de plus en plus précocement, quand
ils n’ont pas encore trop de force. Pas à pas, nous devenons de plus en plus
à même de ne plus nous laisser emporter « aveuglément » par tout ce qui
nous touche et à réintroduire de la conscience dans nos réponses.

Limiter notre réactivité émotionnelle


La pratique, nous aidant à cultiver l’acceptation inconditionnelle, nous
amène au long cours à moins refuser le réel, à voir ce qui est tel que c’est,
limitant nos réactions émotionnelles. Au début, nous devenons seulement
moins réactifs à de petits désagréments du quotidien, puis avec
l’entraînement à l’acceptation inconditionnelle, à des situations de plus en
plus costaudes. Pendant longtemps, elle nous amènera toutefois surtout à
nous voir en train de refuser, ce qui nous aidera à limiter l’emprise de nos
émotions sur nos réponses.
RETOUR D’EXPÉRIENCE
Rien ne nous empêche pour autant d’agir si la situation ne nous
convient pas, mais sans être sous l’emprise émotionnelle. Nous
offrirons alors une réponse juste à la situation et non une
réaction émotionnelle.

Utiliser le message de l’émotion


La fréquentation plus régulière de nos émotions nous permet de voir
qu’elles sont constituées de deux choses : d’énergie et de l’indication qu’un
de nos besoins n’est pas satisfait. Progressivement, nous apprenons à les
accueillir et libérons ainsi leur énergie. Nous parvenons à les questionner
plus qu’à les repousser. La conscience d’une émotion nous invite à nous
demander : « Quel besoin n’est pas satisfait pour moi ici ? » Nous
reprenons donc la responsabilité de notre émotion et sommes moins tentés
de tenir l’autre pour coupable de ce que nous ressentons. Nous prenons
également soin de nous, en tant qu’accompagnant pour pouvoir bien
accompagner. Progressivement nous trouvons de moins en moins justes nos
réactions émotionnelles qui équivalent à considérer que l’autre est coupable
de notre émotion. Cela nous conduit à limiter les contre-transferts.

Limiter l’emprise des émotions


Avec la pratique, nous l’avons dit, nous constatons que certaines émotions
perdent de leur force quand nous les accueillons vraiment. En méditant
régulièrement, nous devenons de plus en plus aptes à nous départir d’abord
d’émotions légères puis de plus en plus fortes, dans nos méditations puis
dans notre vie quotidienne. Nous ne contrôlons pas mieux l’émergence de
nos émotions, mais devenons plus aptes à les laisser s’exprimer et s’en aller,
ou tout au moins à les voir et à les laisser être à nos côtés sans qu’elles nous
submergent. Nous passons alors petit à petit de la situation courante où nous
étions pris par une émotion à celle où nous avons une émotion.

Ne pas entretenir nos émotions désagréables


Certaines émotions intenses peuvent durer longtemps, telles qu’un gros
choc, une grosse déception… En apprenant à repérer et à nous départir de
nos pensées en méditation, nous apprenons à le faire avec nos ruminations
qui entretiennent nos émotions. Nous donnons moins de « carburant » à nos
états émotionnels et pouvons nous en défaire plus rapidement. En cultivant
l’accueil inconditionnel, d’une certaine façon nous légitimons leur
présence, nous leur permettons d’être là le temps qu’il leur sera nécessaire
pour s’apaiser sans prendre toute la place. Nous parvenons donc à rester
présents à la fois à ce qui nous habite et à l’environnement extérieur. Alors
même si nous sommes en tant qu’accompagnant dans un état émotionnel
fort, nous pouvons parvenir à faire tout de même de la place pour nos
coachés et nos séances.

Sentir les résonances émotionnelles


Historiquement, dans un monde de prédateurs, notre survie était liée à notre
capacité à coopérer, donc à nous comprendre. Seuls les plus aptes à lire les
états internes des autres ont survécu. Nous avons donc hérité de cette
capacité. Face à quelqu’un qui éprouve une situation, les mêmes circuits
neuronaux que les siens sont activés dans notre cerveau2 et l’on ressent ce
que la personne expérimente. Toutefois nous n’en sommes pas toujours
conscients. D’après une recherche de l’Institut HeartMath (McCraty, 2002),
le cœur possède un champ électromagnétique très puissant qui affecte nos
interactions émotionnelles. Le signal électromagnétique émis par le cœur
d’une personne peut être mesuré dans les ondes cérébrales de celles qui
l’entourent. Sans s’en rendre compte, en particulier quand l’alliance est
installée, nous nous synchronisons au plan physiologique. Nous captons
donc les états émotionnels de notre coaché. En devenant avec la pratique
plus attentifs à nos propres états internes et corporels de plus en plus subtils,
on devient également plus conscients de leurs modifications subites. Elles
peuvent alors devenir un matériau pour explorer l’état émotionnel du
coaché ou pour guider l’entretien.

Repérer les émotions des autres


La pratique nous familiarise avec le fonctionnement des émotions : ce
qu’elles nous font nous dire (langage et pensées) et comment elles agissent
dans notre corps (respiration, chaleur, port de tête, maintien, regard). Ainsi
à force de les côtoyer, nous repérons avec de plus en plus de facilité ces
signaux aussi chez les autres. Nous pouvons nous en servir dans nos
accompagnements pour questionner l’émotion présente pour l’autre.

La finesse de perception des émotions


À force de pratique, on apprend à voir l’émotion principale et les émotions
secondaires, à démêler la pelote. On affine aussi notre perception de la
subtilité des émotions ressenties. Au début, on mélange anxiété, peur et
doute, et puis on apprend à les distinguer. Par exemple, dans l’anxiété, on se
rend compte que l’on craint quelque chose que l’on ne peut pas nommer.
Dans la peur, on peut nommer ce que l’on redoute. On se familiarise
progressivement avec une palette très variée d’émotions. On devient plus
aptes à les distinguer et à entendre ce qu’elles ont à nous dire, alors que la
plupart des gens sont capables de qualifier au maximum 12 à 15 émotions.

RETOUR D’EXPÉRIENCE
En ayant une perception plus fine de tous les degrés
émotionnels et de leur manifestation corporelle en nous, nous
devenons de plus en plus capables de décrypter ce que vit le
coaché et dont il n’est peut-être même pas conscient. Nous
pouvons mieux le guider.

Développer sa confiance
À force de méditer, d’identifier et de rester en présence de nos émotions,
nous avons moins peur d’aller les explorer en nous-mêmes ou chez nos
coachés. Plus nous serons allés à la rencontre de nos propres émotions
douloureuses, plus nous aurons appris à nous en libérer et découvert ce
qu’elles venaient apporter comme information.

Ce que l’on peut retenir


La pratique régulière nous donne confiance dans la puissance
de ce travail et nous rend compétents pour guider le client en
sécurité dans l’exploration de ses propres émotions.

« Une preuve scientifique ? »


Le psychothérapeute Dr Ron Alexander affirme dans son livre Wise Mind,
Open Mind3 que se familiariser et se distancier des commandements de
l’ego par la méditation augmente la force mentale, la résilience et
l’intelligence émotionnelle.
Une étude4 de 2011 montre que la pratique de la méditation en pleine
conscience augmente l’activité dans les zones cérébrales associées à la
régulation des émotions et à la prise de recul. L’amygdale qui s’active en
situation de stress et qui produit nos réactions flight/fight/freeze (qui fait
que nous nous énervons subitement par exemple) est moins activée par les
mêmes situations de stress – nous sommes donc moins réactifs face à ces
mêmes situations – après une formation de pratique de méditation à la
pleine conscience.
Une autre étude5 en 2012 a montré que les personnes qui pratiquent la
pleine conscience se remettent plus vite dans un esprit positif, sont moins
impulsives, se catastrophent moins, se blâment moins, et ruminent moins
après une situation difficile.
Une étude menée par des chercheurs de l’université du Sussex au Royaume-
Uni a montré que les pratiquants de la pleine conscience font preuve d’une
plus grande pause entre les pulsions inconscientes et leur action. La pleine
conscience limite donc la réactivité émotionnelle en nous rendant plus
conscients de notre esprit inconscient et de nos pulsions6.
L’étude7 menée par Daniel Lim, Paul Condon, David DeSteno de
l’université de Boston, en 2015 montre que la pratique de la pleine
conscience développe des comportements compassionnés.
Sara Lazar montre dans son étude8 de 2005 que la méditation développe les
aires corticales en lien avec l’empathie.
La méditation en pleine conscience, en nous rendant plus attentifs à nos
états internes, active davantage notre insula et notre cortex cingulaire
antérieur qui nous permettent d’avoir une meilleure conscience de soi et de
mieux lire les autres (Singer et al., 2004).
Richard Boyatzis dans son étude9 de 2010 montre l’utilité de promouvoir
un état émotionnel positif en coaching. Ainsi, susciter un état émotionnel
positif au lieu de se focaliser sur ce qui a besoin d’être changé active le
système neuroendocrinien stimulant le fonctionnement cognitif et
l’ouverture du client, le rendant plus réceptif aux apprentissages.

Pour ceux qui ne veulent pas s’asseoir sur un


coussin – Pratiques informelles
Faire le test « Reading the Mind in the Eyes Test » :
https://www.questionwritertracker.com/quiz/61/Z4MK3TKB.html
Voyez ce qui se passe en vous quand une personne vous évoque une
situation difficile.
Régulièrement dans la journée, accordez-vous des mini-pauses où vous
vous posez la question « Comment ça va, là maintenant ? Qu’est-ce que
je ressens ? ».
Quand vous sentez une douleur corporelle, prenez un temps pour la
contacter, sans chercher à la faire disparaître, et constatez si une
émotion est sous-jacente. Laquelle ? Questionnez-vous : de quoi auriez-
vous besoin pour vous sentir mieux ?
À l’issue de vos coachings, prenez un temps pour vous et faites le point
sur votre état interne. Comment vous sentez-vous ? Tentez de ressentir
où cela se manifeste dans votre corps. Quelles sont les sensations
associées ? Si vous n’êtes pas dans un état de confort et de tranquillité,
qu’est-ce qui a pu créer cela dans votre séance ? Que se passe-t-il pour
vous ? Que cela dit-il de votre action ?
Quand vous êtes dans une situation inconfortable, pénible… cherchez à
contacter votre émotion au lieu de chercher à vous distraire pour ne plus
la ressentir. Considérez-la comme un jeune enfant qui a besoin d’être
entendu, pas forcément obéi.

EN SYNTHÈSE
À SAVOIR :

nous avons tendance à fuir les émotions désagréables ;


les émotions des autres résonnent en nous.

LA PLEINE CONSCIENCE NOUS APPREND À :

recontacter nos propres émotions ;


nous détacher de leur emprise ;
écouter le message qu’elles portent.

1. « «From Jerusalem to Jericho”: A Study of Situational and Dispositional Variables in Helping


Behavior », Darley J. M., and Batson C. D., Journal of Personality and Social Psychology, 1973.
2. Neurones miroirs, Preston et De Waal, 2002
3. Ron Alexander, Wise Mind, Open Mind, New Harbinger Publications, 2009.
4. « Does Mindfulness Training Improve Cognitive Abilities ? A Systematic Review of
Neuropsychological Findings », Chiesa A., Calati R. and A Serretti A., Institute of Psychiatry,
University of Bologna, 2011.
5. « Effects of Mindfulness Based Cognitive Therapy on Cognitive Emotion Regulation and
Impulsivity », Jeanningros R., André C. et Billieux J., communication présentée au Congrès de
l’European Association of Behavioural and Cognitive Therapies, Genève, 2012.
6. Source : New Scientist, 27 juin 2016.
7. « Mindfulness and Compassion: An Examination of Mechanism and Scalability », J. David
Creswell, Carnegie Mellon University, United States, 2015.
8. « Meditation Experience Is Associated with Increased Cortical Thickness. », Psychiatric
Neuroimaging Research Program, Massachussetts General Hospital, Boston, USA, 2005.
9. « Coaching with compassion: En FMRI Study of Coaching to the Positive or Negative
Emotional Attractor », Academy of Management Annual Meeting, 2010.
Et après ?
Pour aller plus loin

Comment la pleine conscience peut-elle nous aider


directement en situation de coaching ?
La pratique formelle nous permet de développer les qualités nécessaires à
une posture juste quand nous accompagnons. Elle devrait donc nous
permettre d’être dans une relation à l’autre plus propice à un travail profond
et efficace. Nous l’avons dit, la méditation est une forme d’entraînement à
la pleine conscience dans un environnement protégé. L’objectif est bien
évidemment de transférer nos acquis dans notre vie quotidienne et, plus
spécifiquement dans nos accompagnements. Ici vous sont donc proposées
des façons de mettre en œuvre la pleine conscience dans votre pratique
professionnelle. Évidemment, plus vous aurez médité formellement, plus ce
qui est proposé ci-dessous sera facile à actionner.

AVANT : pour se préparer à une séance


Méditations guidées disponibles en scannant le QR Code ou sur le site www.celine-
levita.fr Rubrique Méditations

Pour s’ancrer dans l’instant pour être dans la séance :


« Scan corporel » ou « respiration consciente ».

Pour muscler son attention si agitation mentale :


Se centrer sur une seule chose pendant 3 minutes.

Pour se détacher d’une émotion avant la séance :


Entrer en contact avec l’émotion par les sensations corporelles.
Accueillir et rester en contact avec l’émotion.
Respirer dans l’émotion.

Pour se détacher d’une émotion que génère le client ou le coaching :


« l’Amour bienveillant » pour le client.

PENDANT : la méthode C.O.A.C.H. dans les situations


difficiles

CONTACTER quand on n’est plus dans la posture juste


SENTIR, RESSENTIR, PERCEVOIR
À force de pratiquer vous allez vous familiariser avec les états réels de
présence, d’acceptation inconditionnelle, de détachement de soi,
d’ouverture et d’équanimité.
Ce que l’on sait de ces états au plan uniquement intellectuel n’est que
partiel. La véritable connaissance de ces qualités d’être, passe par leur
expérience. À force de pratiquer, vous les goûterez, saurez ce qu’elles
signifient vraiment dans votre corps et vous reconnaîtrez quand vous les
incarnerez pleinement. Vous allez de plus en plus rapidement vous rendre
compte dans votre expérience quand vous ne serez plus présents, non
jugeants, ouverts, détachés de vous-même, ou libre de toute emprise
émotionnelle.

RETOUR D’EXPÉRIENCE
À force de pratiquer nous nous familiarisons avec l’état que nous
recherchons et contactons de plus en plus rapidement quand
nous ne le sommes plus, sans avoir à attendre de nous être
égarés trop loin.

OUVRIR à ce qui se passe en soi


(s’)

QUE M’ARRIVE-T-IL ? COMMENT SUIS-JE EN TRAIN DE


DÉRAPER ?
Voir si :
Une pensée (au sujet du présent ou du futur, ou sans rapport avec le
présent) vous a distrait.
Une émotion prend tout l’espace et le contrôle.
Une tension apparaît dans le corps.
Une envie irrépressible de dire ou de faire quelque chose monte.

RETOUR D’EXPÉRIENCE
On pourrait penser que faire ce bilan nous éloigne encore plus
de la présence. Au contraire, c’est une façon de revenir dans le
présent. C’est aussi parfois un temps qu’il faut savoir investir
pour revenir à un état adéquat pour accompagner correctement.

ACCUEILLIR INCONDITIONNELLEMENT ce qui est en train de


se passer

RECONNAÎTRE SIMPLEMENT CE QUI EST EN TRAIN DE SE


PASSER, CONSTATER SANS AUTRE ACTIVITÉ MENTALE
Avec la pratique vous apprendrez à ne pas vous juger et juste à observer et
accueillir ce qui se produit.
POINT CLÉ
En repoussant, vous risquez de renforcer ce qui est à l’œuvre !

Si vous vous jugez d’être distrait, vous le serez plus longtemps.


Si vous vous jugez d’éprouver une émotion négative, vous la renforcerez
alors que parfois, simplement la reconnaître et la prendre en compte suffit à
la faire disparaître.

COMPRENDRE ce qui se passe pour moi ici et maintenant


QU’EST-CE QUI M’AMÈNE À NE PLUS AVOIR LA POSTURE
JUSTE ?
Est-ce un manque d’attention passager ou un ennui qui s’installe ? Mon
envie de réagir est-elle à mon service ou à celui de mon client ? Puis-je
m’abstenir de partager mon point de vue ? L’émotion que je ressens est-elle
la résultante d’un conflit non résolu, la résonance de celle de mon client ou
l’indication que j’ai un besoin que je ne prends pas en compte ?

DE QUOI AI-JE BESOIN POUR REVENIR DANS LA POSTURE JUSTE


ET ACCOMPAGNER DANS LES MEILLEURES CONDITIONS ?
Cette étape est particulièrement importante si la situation persiste malgré la
reconnaissance et l’acceptation de la situation, si cela n’a pas suffi à vous
réinstaller dans la posture juste. Il s’agit de consulter la situation pour
comprendre ce qu’elle dit de nous et de nos besoins.
Qu’est-ce qui a déclenché ce qui est en train de se produire en moi ? Au-
delà de ce qui se passe factuellement, que suis-je en train d’ajouter ? Il se
passe cela, et… ? Quel commentaire fais-je à son sujet et qui déclenche
cela ?

HOP !
RÉPONDRE EN CONSCIENCE
En général, l’étape précédente clarifie ce qu’il convient de faire, la réponse
juste à la situation émerge.
On distingue ce qui nous appartient et que nous devrons éventuellement
traiter en supervision ou thérapie, de ce que la situation exige. Accepter ce
qui nous appartient, nous en défaire consciemment pour le temps de la
séance et voir ce qui reste juste pour la séance et pour le client.

APRÈS : faire le point sur sa séance


Après la séance nous pouvons faire un bref bilan aux trois niveaux :

Tête
Ce que je me dis/à quoi je pense/les idées qui me viennent/comment est
mon mental, paisible ou agité ? Ai-je eu une posture juste ? Un
accompagnement adéquat ? De nouvelles idées me viennent-elles ?

Cœur
Quel est mon état interne ? Comment puis-je le nommer ? De quel besoin
non satisfait est-il l’expression ? À quoi devrai-je être vigilant la prochaine
fois ?

Corps
Comment est-ce que je me sens ? Plein d’énergie ? Épuisé ? Que cela dit-il
d’une éventuelle émotion sous-jacente ? Que dois-je faire pour me sentir
plus à l’aise la prochaine fois ?
Parfois on ressent de l’agitation, de la tension ou de la frustration ou au
contraire du calme de la détente et de la joie. Ces éléments nous informent
sur ce qui s’est passé dans la séance : avec le client, dans la relation ou
quelque chose que l’on n’a pas traité qui est resté en suspens, ou quelque
chose à apporter en supervision.
La pleine conscience est une pratique contemplative qui nous permet de
nous observer agir. Nous serons donc plus aptes à faire un bilan objectif de
notre séance, à faire un point sur ce qui s’est passé pendant la session.
L’acceptation inconditionnelle que nous aurons cultivée nous invitera à ne
pas craindre de nous regarder dans notre nue vérité, la compassion nous
permettra de ne pas nous blâmer et de mettre notre énergie au service d’axes
de progrès.
La pleine conscience cultive notre curiosité, nous serons plus curieux de
faire ce point, nous aurons cette curiosité de nous regarder faire.

RETOUR D’EXPÉRIENCE
Si vous pratiquez régulièrement, vous pourrez voir que plus
qu’une technique, la pleine conscience est un véritable art de
vivre. De plus en plus de moments de votre vie en seront
imprégnés.

Faire le point : où en êtes-vous ?


Pour mesurer votre aptitude à la pleine conscience au démarrage et ensuite
les progrès que la pratique vous aura permis d’accomplir, vous pouvez
remplir ce questionnaire avant de débuter votre pratique et régulièrement à
mesure que vous avancez.

Test de pleine conscience de Ruth Baer : Kentucky Inventory


of Mindfulness Skills1
Échelle de notation
Notez chaque affirmation suivante en utilisant l’échelle ci-dessous. Indiquez
le chiffre décrivant le mieux votre opinion, ce qui est généralement vrai
pour vous.
Il ne s’agit pas de noter si vous « savez » faire mais si vous le faites
effectivement.

1 2 3 4 5

Jamais ou très rarement Rarement Vrai Souvent Très souvent ou toujours


vrai vrai parfois vrai vrai

Les 39 items
1. Je remarque les changements dans mon corps
comme ma respiration qui ralentit ou
s’accélère. Score : ______
2. Je trouve facilement les mots qui décrivent
mes sentiments. Score : ______
3. Quand je fais des choses, j’ai souvent la tête
ailleurs et je suis facilement distrait(e). Score : ______
4. Je me critique d’avoir des émotions
irrationnelles ou inappropriées. Score : _____
5. Je prête attention pour voir si mes muscles
sont tendus ou relâchés. Score : _____
6. Je peux facilement mettre en mots mes
croyances, options et attentes. Score : _____
7. Quand je fais quelque chose, je suis
seulement centré(e) sur ce que je fais et rien
d’autre. Score : _____
8. J’ai pour habitude d’évaluer si mes
perceptions sont justes ou fausses. Score : _____
9. Quand je marche, je note intentionnellement
les sensations de mon corps en train de
bouger. Score : _____
10. Je trouve facilement les mots pour exprimer
mes perceptions gustatives, olfactives et
auditives. Score : _____
11. Je conduis en « pilote automatique » sans
prêter attention à ce que je fais. Score : _____
12. Je me dis que je ne devrais pas me sentir
comme je me sens. Score : _____
13. Quand je prends une douche ou un bain je
reste vigilant(e) aux sensations de l’eau sur
mon corps. Score : _____
14. C’est difficile pour moi de trouver les mots
pour décrire ce que je pense. Score : _____
15. Quand je lis, je centre toute mon attention sur
ce que je suis en train de lire. Score : _____
16. Je crois que certaines de mes pensées ne sont
pas normales ou mauvaises, et que je ne
devrais pas penser de cette façon. Score : _____
17. Je remarque comme les aliments et les
boissons affectent mes pensées, mes
sensations corporelles et mes émotions. Score : _____
18. J’ai du mal à trouver les bons mots pour
exprimer comment je me sens par rapport aux
choses. Score : _____
19. Quand je fais des choses, je me sens
complètement absorbé(e) et je ne pense à rien
d’autre. Score : _____
20. Je porte des jugements à propos de mes
bonnes ou mauvaises pensées. Score : _____
21. Je prête attention aux sensations comme le
vent dans mes cheveux ou le soleil sur mon
visage. Score : _____
22. Quand j’ai une sensation dans mon corps, il
est difficile pour moi de la décrire parce que
je ne trouve pas les bons mots. Score : _____
23. Je ne prête pas attention à ce que je fais parce
que je suis dans la lune, je m’inquiète ou suis
distrait(e) par d’autres choses. Score : _____
24. J’ai tendance à porter des jugements et à
qualifier mes expériences d’intéressantes ou
d’inintéressantes. Score : _____
25. Je prête attention aux sons comme le tic-tac
des horloges, les piaillements d’oiseaux ou
des voitures qui passent. Score : _____
26. Même quand je me sens vraiment énervé(e) je
trouve un moyen de le dire. Score : _____
27. Quand je fais des tâches ménagères telles que
laver le linge ou nettoyer, j’ai tendance à être
dans les nuages ou à penser à d’autres choses. Score : _____
28. Je me dis que je ne devrais pas penser de la Score : _____
façon dont je pense.
29. Je remarque les odeurs et les arômes des
choses. Score : _____
30. Je prête intentionnellement attention à mes
sentiments. Score : _____
31. J’ai tendance à faire plusieurs choses en
même temps plutôt que de me concentrer sur
une seule chose à la fois. Score : _____
32. Je pense que certaines de mes émotions sont
mauvaises ou inappropriées et que je ne
devrais pas les ressentir. Score : _____
33. Je remarque des éléments visuels artistiques
ou de la nature comme les couleurs, les
formes, les textures ou les reflets de la
lumière ou l’ombre. Score : _____
34. J’ai une tendance naturelle à verbaliser mes
expériences. Score : _____
35. Quand je travaille sur quelque chose, une
partie de mon esprit est occupée avec d’autres
sujets tels que ce que je ferai plus tard ou les
choses que j’aimerais mieux faire. Score : _____
36. Je me blâme d’avoir des idées irrationnelles. Score : _____
37. Je suis attentif(ve) à la façon dont mes
émotions affectent mes pensées et mon
comportement. Score : _____
38. Je suis complètement absorbé(e) quand je fais
quelque chose et toute mon attention est
centrée dessus. Score : _____
39. Je remarque quand mon humeur commence à
changer. Score : _____

Dépouillement des réponses


Pour chaque aptitude du tableau ci-après (Observer, Décrire, Agir en
conscience, Accepter sans jugement) reportez les scores que vous avez
attribués aux affirmations correspondantes.
Si le numéro de l’affirmation est suivi d’un R pour l’affirmation
concernée inversez le scoring. Changez le 1 en 5, le 2 en 4 et le 5 en 1.
Par exemple, dans l’aptitude « Décrire », est noté 14R : vous devez
repérer le score que vous avez attribué à la question 14 et l’inverser. Si
vous aviez mis 5, le score à reporter est 1.
Sommez ensuite les résultats obtenus pour l’aptitude considérée.

OBSERVER :

Affirmation 1 5 9 13 17 21 25 29 30 33 37 39

Votre score

Votre score ___ sur 60

DÉCRIRE :
Affirmation 2 6 10 14R 18R 22R 26 34

Votre score

Votre score ___ sur 40

AGIR EN CONSCIENCE :

Affirmation 3R 7 11R 15 19 23R 27R 31R 35R 38

Votre score

Votre score ___ sur 50

ACCEPTER SANS JUGEMENT :

Affirmation 4R 8R 12R 16R 20R 28R 32R 36R

Votre score

Votre score ___ sur 40


Votre score total ______ sur 190
Pour plus d’information : Baer, R. A., Smith G. T., & Allen, K. B. (2004).
Assessment of Mindfulness by Self-Report : The Kentucky Inventory of Mindfulness
Skills. Assessment, 11, 191-206.

Comprendre n’est pas savoir : pratiquez !


« Tout ce que tu ne découvres pas par toi-même,
ne l’admets pas. »

KRISHNAMURTI

J’espère vous avoir montré comment la méditation peut vous aider à vous
observer dans vos accompagnements et à cultiver une posture plus juste.
Mais vous en tenir à lire ce livre serait comme lire un livre de cuisine : on
connaît les ingrédients de la recette, on sait comment la réaliser, et l’on peut
se représenter le résultat final, mais ce n’est ni savoir faire la cuisine ni
goûter le plat ! Ce que je vous ai décrit dans ce livre a la même vocation
qu’un livre de cuisine : vous donner envie de faire la recette en vous
donnant une image de ce à quoi cela mène (le résultat qu’elle permet
d’atteindre), vous donner les étapes (comment elle nous permet de
l’atteindre), vous donner les ingrédients (les pratiques). Mais si vous ne
pratiquez pas, vous ne goûterez jamais les bénéfices de la méditation. Seule
la pratique vous permettra de transformer votre savoir en une connaissance
qui va au-delà de la compréhension conceptuelle car l’ultime savoir est un
savoir vécu.
Des études montrent que méditer vingt minutes par jour pendant huit
semaines suffit à commencer à changer la structure du cerveau et à ressentir
les bénéfices, alors, essayez !
À des villageois qui demandaient à Bouddha comment savoir que et qui
croire parmi toutes les doctrines proposées par les différents gourous,
savants, etc., celui-ci répondit :
« Ne croyez à rien simplement parce que vous l’avez entendu dire.
Ne croyez à rien simplement parce que beaucoup le disent et en parlent.
Ne croyez à rien simplement parce que c’est écrit dans vos livres religieux.
Ne croyez à rien sur la seule foi de vos maîtres et de vos anciens.
Ne croyez pas aux traditions parce qu’elles sont transmises depuis des
générations.
Mais après avoir observé et analysé, quand vous constatez que quelque
chose est conforme à la raison, bon et profitable pour tous, alors acceptez-
le et mettez-le en pratique2. »

Un dernier élément pour vous encourager ?


Des recherches ont été menées sur l’impact de la méditation en
psychothérapie. L’une d’entre elles3 a étudié la prise en charge
thérapeutique de malades hospitalisés par des psychothérapeutes dont la
moitié pratiquait la méditation. Les résultats de la thérapie étaient
sensiblement meilleurs pour les patients dont les thérapeutes pratiquaient la
pleine conscience. L’étude concluait que la pratique de la méditation par les
praticiens pouvait avoir une influence positive sur le résultat de la thérapie.
On est en droit de penser qu’une étude portant sur les liens entre méditation
et coaching mènerait au même genre de conclusion.

Ce que l’on peut retenir


La pratique de la méditation dans la durée permet à
l’accompagnant de se transformer, de révéler toutes ses
qualités humaines et de s’installer avant et pendant la séance
dans une qualité d’être favorable à la transformation de la
personne accompagnée.

Même si j’ai tenté de vous fournir des preuves scientifiques de la méditation


dans cet ouvrage, il reste très difficile pour les chercheurs de mener des
recherches qui isolent scrupuleusement l’effet de la méditation, d’autres
facteurs entrant toujours en jeu. Seule votre propre expérience pourra
constituer une véritable preuve pour vous.
Des idéaux à atteindre, un travail de longue
haleine
Qu’il s’agisse de présence, d’acceptation inconditionnelle, de détachement
de soi, d’ouverture et d’intelligence émotionnelle, toutes ces qualités sont
des idéaux vers lesquels tendre.

POINT CLÉ
Imaginer vivre à 100 % en pleine conscience est rêver l’impossible, ne
serait-ce que parce que nous prenons 3 à 4 décisions par seconde et qu’un
contrôle volontaire et conscient sur chacune d’entre elles nous
empêcherait de faire quoi que ce soit d’autre. N’ayez donc pas d’attente
illusoire sur les effets de la pratique.

Cultiver ces cinq piliers de la posture juste demande du temps et exige de la


patience, des efforts, un engagement et de l’entraînement. Ne soyez donc
pas trop dur avec vous-même ou déçu si les résultats ne sont pas immédiats.
C’est en cela que la méditation fondée sur la pleine conscience est un
chemin et non un outil. Les progrès que vous ferez ne seront pas non plus
forcément linéaires, alors persévérez, même dans les moments où vous avez
l’impression de stagner. À mesure que votre conscience se développera dans
vos méditations et dans votre vie, vous pourrez mieux percevoir les écueils
dans lesquels vous tombez et voir le chemin restant à parcourir pour aller
encore plus loin. Vous vous connaîtrez de mieux en mieux, et éviterez petit
à petit au pilote automatique de l’ego de prendre les commandes à chaque
fois. La bonne nouvelle est que les qualités que l’on développe par la pleine
conscience sont impliquées dans une coévolution synergétique : cultiver
l’une des qualités permet de développer les autres plus facilement.
De la même façon que pour développer un muscle jusqu’à un certain stade,
il faut faire beaucoup d’exercices, pour développer ces qualités il vous
faudra beaucoup pratiquer. Lorsque vous avez atteint un certain degré de
musculature, il faut continuer à vous entraîner pour maintenir le résultat. Il
en est de même avec les bienfaits de la méditation. La continuité de la
pratique vous assurera le maintien de ce que vous aurez développé. Sans
cela, les automatismes de l’ego ou du mental reviendront. Il paraît d’ailleurs
que c’est la raison pour laquelle les moines tibétains se rasent les cheveux :
pour se rappeler que sans pratique, les « mauvaises habitudes » repoussent.
La pleine conscience est donc un art de vivre.
Agit sur
Présence Accueil Détachement Intelligence
Ouverture
attentive inconditionnel de soi émotionnelle
Cultiver sa

Présence Permet de voir Permet de Permet de Permet de


attentive ses jugements. voir ses voir ses percevoir ses
propres rigidités. émotions.
croyances,
« je veux »,
etc.

Accueil Limite le Limite le Limite le Limite le


inconditionnel jugement jugement, jugement, jugement et
qui rejette et assouplit limite le rejet permet de
distrait. notre ego et et permet confronter
donne moins une plus aussi le
envie de grande désagréable
rendre ouverture à et se
« conforme » ce qui est là familiariser
à ce que je et limite les avec ses
crois bon. filtres. émotions au
lieu de les
rejeter.

Détachement Limite la Limite Limite le Limite le


de soi pensée « ça l’attachement à centrage sur centrage sur
devrait être ce que l’on soi (mon soi et permet
comme veut et permet savoir, mes de s’ouvrir
ça ». Rend plus expériences, aux émotions
plus d’acceptation. mes des autres
disponible croyances,
pour tout ce mes désirs)
qui est là. et permet
une plus
grande
ouverture à
tout le reste.

Ouverture Rend Rend curieux Rend curieux Rend curieux


curieux des de tout, même des options de toutes les
signaux de ce que l’on qui ne sont informations,
auxquels on n’aime a priori pas les en particulier
ne donne pas. nôtres. celles du
pas de Permet donc corps et des
sens. Être de se émotions.
attentif à détacher de
tout. soi
Agit sur
Présence Accueil Détachement Intelligence
Ouverture
attentive inconditionnel de soi émotionnelle
Cultiver sa

Intelligence Cultive une Cultive la Limite la Cultive


émotionnelle présence compréhension réactivité, l’ouverture
attentive en soi du l’action pour du cœur.
pas fonctionnement soi.
seulement des émotions
intellectuelle et permet
mais aussi d’accueillir
empathique. l’autre dans
une situation
similaire.

Trouver du temps
L’objection la plus fréquente pour s’y mettre, même en étant conscient des
bénéfices que pourrait apporter la pratique est que l’on manque de temps.
Compte tenu de la complexité et de la rapidité de notre monde, si nous
attendons d’avoir tout terminé pour pouvoir méditer, nous ne trouverons
jamais le temps. Pourtant de grands patrons y parviennent au long cours. Il
s’agit donc de choisir de répartir son temps différemment.
Pendant une semaine, téléchargez une application qui vous permet de
calculer votre temps passé sur votre téléphone et votre tablette (Moment©
par exemple), et notez chaque jour également le temps passé devant la
télévision.
J1 Temps d’écran

J2 Temps d’écran

J3 Temps d’écran

J4 Temps d’écran

J5 Temps d’écran

J6 Temps d’écran

J7 Temps d’écran

TOTAL TEMPS

Pensez-vous toujours manquer de temps pour méditer ?

Ancrer sa pratique
Prendre un engagement avec soi-même

« Un chemin de mille lieues


commence toujours par un premier pas. »

LAO TSEU

Quel thème souhaitez-vous travailler cette semaine ?

Quand comptez-vous pratiquer formellement ?


Combien de temps ? Où ?
« Méditer et ne pas transposer cela dans sa vie
c’est comme se préparer un bon plat et ne pas le déguster. »

ARNAUD DESJARDINS

Ce que l’on apprend en méditation n’a d’intérêt que si nous le mettons en


pratique dans « la vraie vie », je vous invite donc à prendre des « pauses
conscience » plusieurs fois par jour.

Quel type de « pauses conscience » allez-vous prendre ?

À quel moment ? Combien de temps ?

Je vous recommande également de choisir des exercices informels pour


compléter vos pratiques.

Quelle pratique informelle voulez-vous essayer ?

À quel moment ?

Créer les conditions


Choisissez un moment de la journée commode pour vous, où vous savez
que vous serez disponible pour méditer chaque jour. Pour la plupart des
gens c’est tôt le matin ou avant d’aller se coucher.
Trouvez un endroit calme chez vous où vous vous sentirez à l’aise pour
votre pratique au quotidien.
Assurez-vous d’avoir une chaise ou un coussin pour vous asseoir de
façon confortable et dans une position droite et détendue.
Mettez tous vos appareils et notifications sur silencieux et assurez-vous
de ne pas être dérangé pendant le temps que vous avez décidé de dédier
à votre méditation.
Posez votre intention avant de commencer.

Régularité de la pratique
Essayez de pratiquer chaque jour. Quelques minutes au début valent mieux
qu’une heure pour maintenir une pratique régulière. En effet, il est
préférable de choisir une durée que vous pouvez facilement extraire de
votre agenda pour méditer et lorsque les premiers bienfaits s’installeront,
vous aurez envie d’y passer plus de temps. Cette motivation vous aidera à
trouver le temps supplémentaire. Mais la régularité est la condition de
l’efficacité. Comme le disait un de mes enseignants : « C’est comme pour
l’hygiène, mieux vaut une douche rapide chaque jour qu’un grand bain
seulement le dimanche. »
Trouver du temps chaque jour pour méditer n’est pas aisé dans nos vies
surchargées. Certains jours, il vous faudra arriver à vous convaincre de vous
asseoir parce qu’il vous semblera ne pas avoir le temps ou parce que vous
n’en aurez tout simplement pas envie.
Essayez de maintenir une pratique quotidienne coûte que coûte. Même une
seule minute. Essayez de créer une routine, de l’accoler à quelque chose que
vous faites tous les jours. Pour ma part, c’est la première chose que je fais
en me levant.

RETOUR D’EXPÉRIENCE
C’est la routine que vous instituerez qui vous aidera à maintenir
cette pratique régulière.
Quand elle sera vraiment ancrée, vous pourrez allonger le temps alloué à la
pratique.
Si vous manquez un ou deux jours, ce n’est pas grave mais ne laissez pas
trop de délai s’installer avant votre prochaine pratique, sinon vous risquez
de ne plus trouver l’énergie de vous y remettre. Créez-vous un rappel pour
être certain de ne pas oublier. Ce peut être une alarme sur votre portable, un
Post-it sur votre miroir de salle de bains ou votre frigo.
Pour vous encourager, ne négligez pas l’intérêt de vous attribuer une
récompense, comme un carré de chocolat, un compliment devant la glace ou
quoi que ce soit d’autre qui ait du sens pour vous. Il existe également des
applications de méditation qui comptabilisent et proposent des statistiques
de vos temps de pratique et vous félicitent lorsque vous atteignez des paliers
(Headspace© par exemple). Certes les bienfaits que vous en tirez pourront
être suffisants, mais pour les jours où il est plus difficile de s’y mettre et
pour ancrer la régularité, ce peut être de bons moyens.
Comme pour ancrer toute habitude, un autre moyen pour s’astreindre à
respecter son engagement est de le partager avec son entourage.

Tenir un journal
Je vous recommande de prendre quelques instants après chaque méditation
(au moins le premier mois) pour inscrire votre expérience dans votre
journal. Une fois cette habitude prise, vous pourrez le faire mentalement. Il
s’agit de faire le point sur ce que vous avez vécu et tirez de la pratique.
Cette démarche est vraiment essentielle pour tirer le meilleur de la pratique.
Quand on pratique en groupe, c’est l’instructeur qui vous invite à verbaliser
votre expérience. Cela vous permet de tirer des enseignements et également
d’apprécier le chemin que vous parcourrez avec la méditation. Quelques
questions pour guider cet exercice :
Quelque chose vous a-t-il distrait pendant la méditation ? Quoi ?
Quelles pensées vous ont surtout habité ?
Dans quel état émotionnel étiez-vous ? Comment s’est-il manifesté ?
Quelles sensations corporelles avez-vous ressenti plus
particulièrement ?
De quoi avez-vous fait l’expérience ?
Que retenez-vous ?
Vous pouvez tout simplement noter le jour, la durée et l’enseignement que
vous tirez de la méditation que vous venez de vivre.
Voici un exemple de journal :

Ce que
cela me
Mes
donne
observations :
Thème Heure envie
Quelle pratique Heure ce dont j’ai
de Date de de faire
(formelle/informelle) ? de fin pris
travail début pour
conscience/ce
aller
qui a changé
plus
loin

J1

J2

J3

J4

J5

J6

J7
Bilan de
ma
semaine

Soutien à la pratique
Si vous préférez débuter votre pratique en étant accompagné et soutenu
dans vos premiers pas et bénéficier de toute la puissance de la démarche
développée sous forme d’un parcours, de la richesse d’explorer sa propre
expérience vécue en étant guidé par un enseignant, en individuel ou en
groupe, n’hésitez pas à entrer en contact avec moi.
Votre pratique installée peut également être soutenue par des méditations en
groupe.
Il est également intéressant d’entendre et de pouvoir partager avec d’autres
le fruit de vos découvertes, vos progrès, les effets sur vos
accompagnements, vos difficultés dans la pratique ou dans la mise en œuvre
dans vos coachings… pour ancrer vos apprentissages et trouver du soutien
face aux difficultés que vous rencontrerez. Si vous souhaitez rejoindre une
communauté de pratique avec d’autres accompagnants, contactez-moi
directement : accompagnerenpleineconscience@gmail.com

Puissiez-vous par la pratique découvrir tous les bienfaits de la


méditation que j’ai pu expérimenter et même aller au-delà.
Puisse-t-elle transformer positivement la personne que vous êtes,
vos coachings et votre vie.

1. Ruth A. Baer, Ph.D., University of Kentucky, 2004.


2. Kalamasutra.
3. « Promoting Mindfulness in Psychotherapists in Training Influences the Treatment Results of
Their Patients: a Randomized, Double-Blind, Controlled Study », Grepmair L., Mitterlehner F.,
Loew T., Bachler E., Rother W., Nickel M., Psychother Psychosom., 2007. L’étude montre
qu’insister sur la pleine conscience dans le programme de formation des psychothérapeutes
influence positivement le déroulement de la thérapie et le résultat des traitements chez les
patients.
Mais aussi :
« Teaching Counselors Self-Care Through Mindfulness Practices », Newsome S., Christopher J.,
Dahlen, P., Christopher S., Teachers College Record, 2006. Un programme de quinze semaines
incluant des actions pour prendre soin de soi et un programme MBSR (Mindfulness Based Stress
Reduction) à destination d’accompagnants ont montré notamment une amélioration de leur
pratique professionnelle et de leur relation thérapeutique.
Une thèse, « The Impact of Meditation on the Therapist and Therapy », Daniel R. Zamir, 2009.
L’auteur a interviewé 6 thérapeutes sur leur perception de l’influence de la méditation sur eux et
leur pratique professionnelle. Les participants indiquent qu’elle leur permet d’être de meilleurs
thérapeutes et d’établir des alliances thérapeutiques plus fortes avec leurs clients en développant
leurs qualités telles que l’empathie, le regard positif inconditionnel et le non-jugement.
Bibliographie

En anglais
R. Baer, The Practicing Happiness, New Harbinger Publications,
Workbook Édition, 2014.
D. Goleman, R. J. Davidson, Altered Traits: Science Reveals How
Meditation Changes Your Mind, Brain, and Body, Avery, 2017.
T. Reik, Listening with the Third Ear: the Inner Experience of a
Psychoanalyst, Farrar, Straus and Giroux, 1983.

En français
C André, Méditer jour après jour. 25 leçons pour vivre en pleine
conscience, L’Iconoclaste, 2011.
P. Chödrön, La Voie commence là où vous êtes. Guide pour pratiquer la
compassion au quotidien, Pocket, 2004.
A. R. Damasio, Le sentiment même de soi, Odile Jacob, 2002.
K. G. Dürckheim, Le centre de l’être, Albin Michel, 1992.
T. N. Hanh, Le miracle de la pleine conscience, J’ai Lu, 2008.
J. Kabat Zinn, Reconquérir le moment présent… et votre vie. La méditation
de pleine conscience pour les débutants, Les Arènes, 2014.
J. Kabat-Zinn, Au cœur de la tourmente, la pleine conscience. Le manuel
complet de MBSR, ou réduction du stress basée sur la mindfulness, J’ai Lu,
2012.
J. Kabat-Zinn, L’éveil des sens. Vivre l’instant présent grâce à la pleine
conscience, Les Arènes, 2009.
J. Kabat-Zinn, Où tu vas, tu es. Apprendre à méditer en tous lieux et en
toutes circonstances, JC Lattès, 1995.
J. P. Lachaux, Le cerveau attentif. Contrôle, maîtrise et lâcher-prise, Odile
Jacob, 2013.
J. Y. Leloup, Prendre soin de l’être. Philon et les thérapeutes d’Alexandrie,
Albin Michel, 2017.
Y. Liénard, À la recherche de son vrai soi, Odile Jacob, 2015.
C. Massin, Souffrir ou aimer, Odile Jacob, 2017.
J. Monbourquette, Le guérisseur blessé, Novalis Canada, 2013.
E. Tolle, Le pouvoir du moment présent, J’ai Lu, 2010.
C. Trungpa, Méditation et action, Seuil, 1981.
Index

A
Accompagnement 17, 27, 31, 33, 41, 46, 56, 66, 67, 106, 161, 177, 203, 213
Accueil inconditionnel 35, 71, 113, 228
Attention 106, 153, 175

B
Bien-être 84, 129
Bienveillance 35, 40, 113, 124, 127, 128, 130, 195, 196

C
Cadre de travail 30, 38, 47, 54, 61
Cerveau 93, 160, 240
Coaching 17, 70, 85, 209, 210
Cœur 48, 55, 171, 214
Compassion 41, 115, 129, 132, 134, 186, 215, 239
Comprendre 213, 223
Confiance 31, 33, 39, 45, 57, 137, 199, 204
Conscience 159, 165, 198, 214
Contrôle 136, 146, 240
Corps 55, 171, 198, 215
Curiosité 107, 170, 174, 198

D
Détachement de soi 43, 72, 135, 228
Distractions 92, 107

E
Écoute empathique 32, 40, 48, 55, 63
Ego 43, 135, 205, 227
Émotions 105, 171, 185, 189, 194, 195, 196, 197, 198, 199, 200, 201, 202,
203
Entraînement 87, 106, 132, 193, 200, 209, 226
Environnement 57, 93, 125, 175, 202, 209
États émotionnels 62, 94, 199, 202, 203
États internes 37, 66, 171, 198, 203, 206
Être 29, 46, 84, 91, 106, 239, 240

F
Faire 84, 91, 102, 131, 137, 145, 150

H
Habitudes 58, 68, 81, 94, 130, 161, 227

I
Identité 137, 150
Instant présent 53, 102, 106, 178, 240
Intellect 162
Intelligence émotionnelle 59, 74, 183, 228

J
Jugement 113, 125, 126, 129, 130, 131

M
Méditation de pleine conscience 79
Mental 102, 103, 104
Méthode C.O.A.C.H. 211
Mindfulness 19, 79, 80, 87, 102, 109, 124, 145, 169, 193, 205, 216, 222,
224, 240
Moi 148, 150, 213

N
Non-jugement 35, 40, 113, 117, 128, 130, 169

O
Objectivité 135
Observation 86, 107, 146, 148, 150, 176
Ouverture 51, 73, 159, 228

P
Pensées 149, 173
Perceptions 159, 177
Perceptions sensorielles 52, 81, 181
Performance 136
Pleine conscience 79, 209, 240
Pleine conscience (test de) 216
Posture juste 25, 77, 211, 213
Pratique 96, 102, 106, 111, 118, 125, 128, 133, 140, 145, 150, 156, 164,
170, 174, 180, 188, 194, 198, 207, 223, 231, 233, 238
Présence attentive 27, 70, 91, 108, 228

R
Réagir 42, 45, 49, 64, 80, 147, 149, 152, 185, 199, 213
Récompense 138
Regard 68, 174
Relaxation 84
Résonance 50, 55, 60, 202
Ressentir 211

S
Sécurité 136
Sensations 105, 171, 178
Silence 45, 50, 154, 176
Souffrance 191

T
Temps 125, 186, 230
Tête 84, 214

V
Vision 152
Vulnérabilités 37, 39, 40, 44, 114, 129, 136, 196
Merci d’avoir choisi ce livre Eyrolles. Nous espérons que votre
lecture vous a plu et éclairé(e).

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