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Français Lycée 2e-3e

La Folie Janvier 2023

Dossier thématique – La Folie dans la littérature

Problématique

Au même titre que l’amour, la folie aura été l’un des vecteurs privilégiés de la création
littéraire au fil des siècles. Cela probablement car ces deux thématiques sont universelles, et
ne se cantonnent pas dans des périodes spécifiques de l’histoire. C’est donc à cette
thématique que nous nous intéresserons au sein de ce corpus. Elle y sera approchée comme
un fait de société, comme un objet de la contemporanéité inséré dans des débats d’époque.
Car si la folie est omniprésente au sein des créations des auteurs, c’est parce qu’ils l’auront
considérée comme l’une des poétiques les plus efficaces afin de dénoncer ceux qui leur
semblaient être les excès de l’homme à des époques données. La folie y est donc considérée
comme un produit de l’histoire, comme la réponse paradoxalement la plus saine face à des
événements contemporains. Nos auteurs choisis, au sein de ce corpus, auront donc joué le
rôle de garants du droit, du juste, du sain et de la raison, face à une société qu’ils auront jugée,
en leur temps, comme étant à la dérive.
Cela revient à dire que l’homme, du XIXe au XXe siècle, – car ce sont là les deux siècles
qui nous intéresseront , – passe d’une forme de folie à une autre, les enchaine, au même titre
que se succèdent les ruptures, les contradictions, les injustices, – qu’elles soient politiques,
scientifiques, sociales. Nos questions seront donc les suivantes : Comment la poétique de la
folie est-elle mise en scène, au niveau littéraire, entre les XIXe et XXe siècles ? À quel(s)
bouleversement(s) profond(s) apporte-t-elle une réponse ? Et surtout, sur quoi débouche-t-
elle ?

Bibliographie

Ouvrages primaires

Dans l’ordre de présentation

- Hector Malot, Un Beau-frère, Paris, Hetzel, 1869.


- Guy de Maupassant, « Sur l’eau », in Le Horla et autres contes d’angoisse, Paris,
Flammarion, 2006, [1984].
- Louis-Ferdinand Céline, Mort à crédit, Paris, Gallimard, 1952.

Ouvrages secondaires

- Pierre-Georges Castex, Le Conte fantastique en France de Nodier à Maupassant, Paris,


José Corti, 1951.
- Albert Londres, Chez les fous, Paris, Albin Michel, 1925.
- Antonia Fonyi, « Introduction. Contes d’angoisse », in Maupassant, Le Horla et autres
contes d’angoisse, Paris, Flammarion, 2006, [1984].
- Mikhaïl Bakhtine, Esthétique et théorie du roman, Paris, Gallimard, 1987.
- Henri Godard, Poétique de Céline, Paris, Gallimard, 1984.
- Gilles Philippe, Julien Piat (dir.), La langue littéraire. Une histoire de la prose en France de
Gustave Flaubert à Claude Simon, Fayard, Paris, 2009.

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Extrait n°1
Hector Malot, Un Beau-frère, Paris, Hetzel, 1869, p.254-261.

Mercredi

Si les larmes n’aveuglaient pas tes yeux, tu m’as vu partir. Je n’ai pas eu à me plaindre
des gendarmes pendant tout le voyage. Mais les menottes trop serrées m’ont écorché les
bras, et chaque cahot de la voiture me causait de cruelles douleurs. Ma préoccupation, plus
5 cruelle encore, m’empêchait heureusement de les sentir dans toute leur intensité. Est-ce
heureusement qu’il faut dire ? Et les tortures morales que j’ai eues à endurer pendant ce
voyage, enchaîné entre des gendarmes, sachant qu’on allait m’enfermer avec les fous, n’ont-
elles pas été plus horribles que les tortures physiques ?
Arrivé au Luat, on m’a mené devant l’abbé Battandier, le directeur. J’espérais qu’après
10 quelques mots d’entretien, il allait reconnaître l’erreur dont j’étais victime, et me rendre à la
liberté. Mais pour un aliéniste, le genre humain entier doit être fou, puisqu’il a donné l’ordre
de me conduire au quartier des agités. D’ailleurs, eût-il voulu me relâcher, il n’en avait pas le
droit, je suis prisonnier du préfet et je dois rester à sa disposition. C’est au moins ce que j’ai
compris.
15 Malgré les promesses que je m’étais faites de garder un calme imperturbable, quoi
qu’il pût m’arriver, j’ai eu alors un moment de faiblesse qui très probablement me coûtera
cher. J’ai cru que je pouvais m’échapper, gagner les bois, te rejoindre, ma chère Cyprienne,
fuir avec toi à l’étranger, où nous aurions attendu la fin de mon procès. Mais j’ai été repris par
les gardiens, et, comme punition, plongé de force dans une baignoire où l’on m’a pris le cou
20 dans un couvercle en fer.
Je ne sais si ces bains peuvent faire du bien à un malheureux fou ; pour un être
raisonnable, c’est quelque chose d’horrible : l’éponge imbibée d’eau froide sur la tête, et
autour du cou le couvercle de fer qui vous emboîte, il y a de quoi exaspérer un saint.
Je suis cependant sorti de là décidé à la résignation quand même, et j’ai eu la force de
25 n’y pas manquer quand on m’a passé la camisole de force. Tu sais ce qu’est cette veste de
grosse toile qui se ferme derrière le dos, et dont les manches, prolongées au-delà des mains,
sont réunies et sans ouverture. L’immobilité dans laquelle elle vous maintient est énervante ;
je crois que j’aime encore mieux les menottes, au moins elles vous avertissent par la douleur.
Quand je fus ainsi habillé, on me lâcha dans la cour, et à mon premier pas je faillis
30 tomber, car, lorsqu’on a les bras collés contre le corps, on est mal en équilibre.
Il faut dire aussi que mes yeux voyaient trouble ; le sang de la honte qui m’avait monté
à la tête m’aveuglait. Cela heureusement passa vite : pourquoi avoir honte ? de quoi rougir ?
les misérables qui m’entouraient n’étaient-il pas des fous ?
[…]
35 La nuit arriva sans autre incident, et l’on nous fit rentrer dans nos cellules pour le
coucher. Ces cellules sont de forme allongée, quatre mètres de long à peu près sur deux
mètres de large ; une petite fenêtre grillée donne sur le préau, deux portes ouvrent l’une sur
le préau à côté de la fenêtre, l’autre sur un vestibule de service. De telle sorte que si un malade
voulait se barricader dans sa cabine, on pourrait, pendant qu’il serait occupé à défendre une
40 porte, entrer par l’autre et le prendre par le dos. Mais cette barricade serait difficile à
construire, car le seul mobilier de la cellule se compose d’un lit en fer fixé au parquet par de
grosses vis qui paraissent pénétrer profondément dans le chêne ; pas d’autres meubles : pas

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de chaises, pas de portemanteau ; on dépose le soir les vêtements dans le vestibule et on vous
les donne le matin en ouvrant la porte.
45 On voulut bien me défaire ma camisole, mais avec des précautions et en présence de
trois gardiens prêts à sauter sur moi. Naturellement je ne bougeai pas ; le temps de la colère
et de l’emportement était passé. Lorsqu’on m’eût déshabillé on m’enferma dans ma cellule.

• La Loi Esquirol sur les aliénés du 30 juin 18381

Jean-Étienne Esquirol fut à l’origine de cette loi, rendant de responsabilité publique et


départementale la création et la supervision des hôpitaux psychiatriques français.

Art. 8 : « Les chefs ou préposés responsables des établissements publics et les directeurs des
établissements privés et consacrés aux aliénés ne pourront recevoir une personne atteinte
d’aliénation mentale, s’il ne leur est remis :

1° Une demande d’admission contenant les noms, profession, âge et domicile, tant de la
personne qui la formera que de celle dont le placement sera réclamé, et l’indication du degré
de parenté ou, à défaut, de la nature des relations qui existent entre elles ».

Art. 13 : « – Toute personne placée dans un établissement d’aliénés cessera d’y être retenue
aussitôt que les médecins de l’établissement auront déclaré, sur le registre énoncé en l’article
précédent, que la guérison est obtenue ».

Art. 21 : « – À l’égard des personnes dont le placement aura été volontaire, et dans le cas où
leur état mental pourrait compromettre l’ordre public ou la sûreté des personnes, le préfet
pourra, dans les formes tracées par le deuxième paragraphe de l’article 18, décerner un ordre
spécial, à l’effet d’empêcher qu’elles ne sortent de l’établissement sans son autorisation, si ce
n’est pour être placées dans un autre établissement ».

• Citations d’Albert Londres, Chez les fous, Paris, Albin Michel, 1925, pp.239-246.

(P.239) : « La Loi de 1838 n’a pas pour base l’idée de soigner et de guérir des hommes atteints
d’une maladie mentale, mais la crainte que ces hommes inspirent à la société. C’est une loi de
débarras ».

(P.239-240) : « Ce monsieur est-il encore digne de demeurer parmi les vivants ou doit-il être
rejeté chez les morts ? ».

[…]

(P.243) : « Lorsque la guérison s’affirme, on laisse le convalescent avec les fous. C’est à peu
près sauver un noyé de l’asphyxie, mais le maintenir le corps dans l’eau jusqu’à ce qu’il soit
complètement sec ».

1
Texte de loi disponible à l’adresse suivante : https://psychiatrie.crpa.asso.fr/1838-06-30-Loi-Esquirol-sur-les-
alienes-du-30-juin-1838.

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[…]

(P.245) : « La Loi de 1838, en déclarant le psychiatre infaillible et tout-puissant, permet les


internements arbitraires et en facilite les tentatives ».

[…]

(P.246) : « Sous la Loi de 1838, les deux tiers des internés ne sont pas de véritables aliénés.
D’êtres inoffensifs, on fait des prisonniers à la peine illimitée ».

• Citation du roman, (P.220-221) :

« Vous oubliez que vous m’êtes confié par M. le préfet.

- Et si je ne suis pas fou ?


- Nous en avertirons M. le préfet, qui avisera.
- Comment ! vous me garderez, et c’est le préfet qui, sans m’avoir jamais vu, m’a fait
enfermer comme fou, qui, sans me voir davantage, me relâchera ou me gardera, selon
son bon plaisir ? ».

Gustave Courbet, Le désespéré, Collection particulière, 1843-1845.

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Extrait n°2
Guy de Maupassant, « Sur l’eau », in Le Horla et autres contes d’angoisse, Paris, Flammarion,
2006, [1984], p.141-147.

« C’était un vieux canotier enragé, toujours près de l’eau, toujours sur l’eau, toujours dans
l’eau. Il devait être né dans un canot, et il mourra bien certainement dans le canotage final ».
[…]
5 Le canot, qui redescendait avec le courant, fila sa chaîne jusqu’au bout, puis s’arrêta ; et
je m’assis à l’arrière sur ma peau de mouton, aussi commodément qu’il me fut possible. On
n’entendait rien, rien : parfois seulement, je croyais saisir un petit clapotement presque
insensible de l’eau contre la rive, et j’apercevais des groupes de roseaux plus élevés qui
prenaient des figures surprenantes et semblaient par moments s’agiter.
10 Le fleuve était parfaitement tranquille, mais je me sentis ému par le silence
extraordinaire qui m’entourait. Toutes les bêtes, grenouilles et crapauds, ces chanteurs
nocturnes des marécages, se taisaient. Soudain, à ma droite, contre moi, une grenouille
coassa. Je tressaillis : elle se tut ; je n’entendis plus rien, et je résolus de fumer un peu pour
me distraire. Cependant, quoique je fusse un culotteur de pipes renommé, je ne pus pas ; dès
15 la seconde bouffée, le cœur me tourna et je cessai. Je me mis à chantonner ; le son de
ma voix m’était pénible ; alors, je m’étendis au fond du bateau et je regardai le ciel. Pendant
quelque temps, je demeurai tranquille, mais bientôt les légers mouvements de la barque
m’inquiétèrent. Il me sembla qu’elle faisait des embardées gigantesques, touchant tour à tour
les deux berges du fleuve ; puis je crus qu’un être ou qu’une force invisible l’attirait doucement
20 au fond de l’eau et la soulevait ensuite pour la laisser retomber. J’étais ballotté comme au
milieu d’une tempête ; j’entendis des bruits autour de moi ; je me dressai d’un bond : l’eau
brillait, tout était calme.
Je compris que j’avais les nerfs un peu ébranlés et je résolus de m’en aller. Je tirai sur ma
chaîne ; le canot se mit en mouvement, puis je sentis une résistance, je tirai plus fort, l’ancre
25 ne vint pas ; elle avait accroché quelque chose au fond de l’eau et je ne pouvais la soulever ;
je recommençai à tirer, mais inutilement. Alors, avec mes avirons, je fis tourner mon bateau
et je le portai en amont pour changer la position de l’ancre. Ce fut en vain, elle tenait toujours ;
je fus pris de colère et je secouai la chaîne rageusement. Rien ne remua. Je m’assis découragé
et je me mis à réfléchir sur ma position. Je ne pouvais songer à casser cette chaîne ni à la
30 séparer de l’embarcation, car elle était énorme et rivée à l’avant dans un morceau de bois
plus gros que mon bras ; mais comme le temps demeurait fort beau, je pensai que je ne
tarderais point, sans doute, à rencontrer quelque pêcheur qui viendrait à mon secours. Ma
mésaventure m’avait calmé ; je m’assis et je pus enfin fumer ma pipe. Je possédais une
bouteille de rhum, j’en bus deux ou trois verres, et ma situation me fit rire. Il faisait très chaud,
35 de sorte qu’à la rigueur je pouvais, sans grand mal, passer la nuit à la belle étoile.
Soudain, un petit coup sonna contre mon bordage. Je fis un soubresaut, et une sueur
froide me glaça des pieds à la tête. Ce bruit venait sans doute de quelque bout de bois entraîné
par le courant, mais cela avait suffi et je me sentis envahi de nouveau par une étrange
agitation nerveuse. Je saisis ma chaîne et je me raidis dans un effort désespéré. L’ancre tint
40 bon. Je me rassis épuisé.

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Cependant, la rivière s’était peu à peu couverte d’un brouillard blanc très épais qui
rampait sur l’eau fort bas, de sorte que, en me dressant debout, je ne voyais plus le fleuve, ni
mes pieds, ni mon bateau, mais j’apercevais seulement les pointes des roseaux, puis, plus loin,
la plaine toute pâle de la lumière de la lune, avec de grandes taches noires qui montaient dans
45 le ciel, formées par des groupes de peupliers d’Italie. J’étais comme enseveli jusqu’à la
ceinture dans une nappe de coton d’une blancheur singulière, et il me venait des imaginations
fantastiques. Je me figurais qu’on essayait de monter dans ma barque que je ne pouvais plus
distinguer, et que la rivière, cachée par ce brouillard opaque, devait être pleine d’êtres
étranges qui nageaient autour de moi. J’éprouvais un malaise horrible, j’avais les tempes
50 serrées, mon cœur battait à m’étouffer ; et, perdant la tête, je pensai à me sauver à la nage ;
puis aussitôt cette idée me fit frissonner d’épouvante. Je me vis, perdu, allant à l’aventure
dans cette brume épaisse, me débattant au milieu des herbes et des roseaux que je ne
pourrais éviter, râlant de peur, ne voyant pas la berge, ne retrouvant plus mon bateau, et il
me semblait que je me sentirais tiré par les pieds tout au fond de cette eau noire.
55 […]
« C’était le cadavre d’une vielle femme qui avait une grosse pierre au cou ».

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Extrait n°3
Louis-Ferdinand Céline, Mort à crédit, Paris, Gallimard, 1952, p.39-40.

Fièvre ou pas, je bourdonne toujours et tellement des deux oreilles que ça peut plus
m’apprendre grand-chose. Depuis la guerre ça m’a sonné. Elle a couru derrière moi, la folie...
tant et plus pendant vingt-deux ans. C’est coquet. Elle a essayé quinze cents bruits, un
5 vacarme immense, mais j’ai déliré plus vite qu’elle, je l’ai baisée, je l’ai possédée au « finish ».
Voilà ! Je déconne, je la charme, je la force à m’oublier. Ma grande rivale c’est la
musique, elle est coincée, elle se détériore dans le fond de mon esgourde... Elle en finit pas
d’agonir... Elle m’ahurit à coups de trombone, elle se défend jour et nuit. J’ai tous les bruits
de la nature, de la flûte au Niagara... Je promène le tambour et une avalanche de trombones...
10 Je joue du triangle des semaines entières... Je ne crains personne au clairon. Je possède encore
moi tout seul une volière complète de trois mille cinq cent vingt-sept petits oiseaux qui ne se
calmeront jamais... C’est moi les orgues de l’Univers... J’ai tout fourni, la bidoche, l’esprit et le
souffle... Souvent j’ai l’air épuisé. Les idées trébuchent et se vautrent. Je suis pas commode
avec elles. Je fabrique l’Opéra du déluge. Au moment où le rideau tombe c’est le train de
15 minuit qui entre en gare... La verrière d’en haut fracasse et s’écroule... La vapeur s’échappe
par vingt-quatre soupapes... les chaînes bondissent jusqu’au troisième... Dans les wagons
grands ouverts trois cents musiciens bien vinasseux déchirent l’atmosphère à quarante-cinq
portées d’un coup...

Depuis vingt-deux ans, chaque soir il veut m’emporter... à minuit exactement... Mais
20 moi aussi je sais me défendre... avec douze pures symphonies de cymbales, deux cataractes
de rossignols... un troupeau complet de phoques qu’on brûle à feux doux... Voilà du
travail pour célibataire... Rien à redire. C’est ma vie seconde. Elle me regarde.

Ce que j’en dis c’est pour expliquer qu’au Bois de Boulogne il m’est venu un petit accès.
Je fais souvent beaucoup de bruit quand je cause. Je parle fort. On me fait signe de parler
25 moins haut. Je bavouche un peu c’est forcé... Il me faut faire des drôles d’efforts pour
m’intéresser aux copains. Facilement je les perdrais de vue. Je suis préoccupé. Je vomis
quelquefois dans la rue. Alors tout s’arrête. C’est presque le calme. Mais les murs se remettent
en branle et les voitures à reculons. Je tremble avec toute la terre. Je ne dis rien... La vie
recommence. Quand je trouverai le Bon Dieu chez lui je lui crèverai, moi, le fond de l’oreille,
30 l’interne, j’ai appris. Je voudrais voir comment ça l’amuse ? Je suis chef de la gare diabolique.
Le jour où moi je n’y serai plus, on verra si le train déraille. M. Bizonde, le bandagiste,
pour qui je fais des petits « articles », il me trouvera encore plus pâle. Il se fera une raison.

Je pensais à tout ça dans ma crèche, pendant que ma mère et Vitruve déambulaient à


côté.

35 La porte de l’enfer dans l’oreille c’est un petit atome de rien. Si on le déplace d’un quart
de poil... qu’on le bouge seulement d’un micron, qu’on regarde à travers, alors c’est fini ! c’est
marre ! on reste damné pour toujours ! T’es prêt ? Tu l’es pas ? Êtes-vous en mesure ? C’est
pas gratuit de crever ! C’est un beau suaire brodé d’histoires qu’il faut présenter à la Dame.
C’est exigeant le dernier soupir. Le « Der des Der » Cinéma ! C’est pas tout le monde qu’est
40 averti ! Faut se dépenser coûte que coûte ! Moi je serai bientôt en état... J’entendrai la

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dernière fois mon toquant faire son pfoutt ! baveux... puis flac ! encore... Il branlera après son
aorte... comme dans un vieux manche... Ça sera terminé. Ils l’ouvriront pour se rendre compte.
Sur la table en pente... Ils la verront pas ma jolie légende, mon sifflet non plus... La Blême aura
déjà̀ tout pris... Voilà Madame, je lui dirai, vous êtes la première connaisseuse !...

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