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À ces interdits s’ajouta la bénédiction Pour sceller ce lien avec la royauté, Dieu

des aliments prononcée sur le pain et remettait au roi « très chrétien » le pouvoir
le vin. Pendant le bénédicité, la famille de guérir miraculeusement « les scrofuleux
demandait à Dieu de bénir les gens de la ou malades des escrouelles par le seul
maison et la nourriture sur la table mais touché de sa main » comme le dit Jean
aussi les plus pauvres. À la fin du repas, Tagault dans sa Chirurgie. Les écrouelles,
on remerciait Dieu par une action de ou « mal royal », étaient des affections de
grâce pour tous ses bienfaits. On ajoutait la peau d’origine tuberculeuse avec des
une demande de paix pour tous et la vie fistules purulentes au niveau des gan-
éternelle. Si aucun aliment n’était interdit glions lymphatiques du cou. C’était très
au croyant, il devait manger pour vivre et impressionnant. Aussitôt couronné, le roi
refuser de vivre pour manger ! devait prouver à ses sujets qu’il possédait
ce don de thaumaturge. Le lendemain du
sacre, à partir de Jean Le Bon, chaque roi
Sujets d’un (sauf Henri IV), se rendit en pèlerinage à
l’abbaye de Corbeny, sur le tombeau de
monarque divin saint Marcoult également guérisseur des
écrouelles. Là, le souverain priait, jeûnait
et faisait ses dévotions avant la cérémonie
Dans le royaume de France, le roi est du toucher des écrouelles : les malades, Une veillée funèbre en Bretagne, à la
roi par la grâce de Dieu et nul ne peut choisis en fonction de leurs symptômes, fin du 19e siècle. Naissance, mariage,
s’agenouillaient devant lui, il les signait décès, vie quotidienne, et jusque
remettre en cause cette sacralisation. sur le visage par « divine vertu » avec la dans la divinité du roi, la religion

D e Pépin le Bref (751-768) à Charles X formule « le roi te touche, Dieu te guérit ». était partout dans la vie de nos aïeux.
(1824-1830), les rois de France mon-
tèrent sur le trône suite à une cérémonie
religieuse soigneusement orchestrée. Le
prétendant issu de la lignée royale devait
être sacré et couronné lors d’une cérémo-
nie solennelle à Reims. Avant de recevoir
les insignes du pouvoir (sceptre, couronne,
épée…) et de prononcer plusieurs ser-
ments, le roi recevait une onction avec
l’huile miraculeuse de la Sainte Ampoule.
Selon la tradition, la divine ampoule avait
été remise à Clovis le jour de son baptême
en l’an 498 par une colombe, tel le Saint-
Esprit. Ce cadeau céleste prouvait le lien
privilégié entre Dieu et la royauté. Lors de
ce rituel, le roi quittait ses vêtements et
ne gardait que sa chemise. Il était alors
« oint en sept endroits différents du corps :
sur le haut de la tête, la poitrine, entre
les deux épaules, l’épaule droite, l’épaule
gauche, la jointure du bras droit puis du
bras gauche ; puis, après s’être revêtu, sur
les paumes des mains » au nom du Père,
du fils et du Saint-Esprit. Le roi prenait le
titre de « Roi, par la grâce de Dieu ». Dieu
l’avait choisi ! Dans sa Politique tirée de
l’Écriture sainte, Bossuet confirma que
© Archives Daniel Chatry

« Dieu établit les rois comme ses ministres


et règne par eux sur les peuples… le trône
royal n’est plus le trône d’un homme mais
le trône de Dieu lui-même… la personne
des rois est sacrée et attenter sur eux est
un sacrilège ». Il affirma que le peuple de-
vait lui être soumis et obéir au roi qu’il soit
bon ou injuste.

Nos ancêtres • Vie & métiers - N° 78 - mars-avril 2016


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