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Université François Rabelais

UFR de Médecine

Ecole Régionale de Sages-Femmes

TOURS

LES DOULAS

Mémoire présenté et soutenu par

Gaëlle PANIER

Sous la direction du Professeur LANSAC

Promotion 2002-2007
2

TABLE DES MATIERES

TABLE DES MATIERES 2


INTRODUCTION 4
PREMIERE PARTIE – DOULA : DE QUI ET DE QUOI PARLE-T-ON ? 6
1 – Qu’est-ce qu’une doula ? 6
1.1. Définition 6
1.2. Origines 8
2. L’apparition des doulas 10
2.1. Historique 10
2.2. Etudes sur les doulas 11
3. Situation des doulas dans le monde 13
3.1. Les doulas en Amérique du Nord 13
3.2. Les doulas en Amérique du Sud, Océanie, et Asie 14
3.3. Les doulas en Europe 15
4. Les doulas en France 18
4.1. Les associations de doulas 18
4.1.1. L’association des Accompagnantes à La NAissance 18
4.1.2. L’association Doulas de France 19
4.2. Leurs modes d’exercices 21
4.2.1. Leurs pratiques 21
4.2.2. Le coût 22
4.3. Les formations 23
4.3.1. Formation ALNA 23
4.3.2 Formation Paramanadoula 24
4.3.3 Ecole Mère et Monde 25
4.3.4. Formation AMA 25
4.3.5. Autres formations 27
4.3.6. Projet de cursus de base DDF 27
4.4. L’accueil des doulas par les professionnels de santé 28
4.4.1. Débat du CNOSF 28
4.4.2. Etats Généraux de la Naissance 2006 28
4.4.3. Entretiens de Bichat 2006 29
4.5. Structuration de l’activité des doulas 29
4.5.1. Responsabilité des doulas 29
4.5.2. Avis du Ministère de la Mission Interministérielle de Vigilance et de Lutte contre les Dérives
Sectaires (MIVILUDES) 31
DEUXIEME PARTIE - CHOISIR UN ACCOMPAGNEMENT NON MEDICAL A LA NAISSANCE :
L’AVIS DES PARENTS 33
1. Matériel et Méthode 33
2. Résultats 35
2.1 Profil des parents qui font appel à une doula 35
2.1.1 Situation 35
2.1.2. Lien social 35
2.1.3. Expérience et vécu de la maternité 37
2.1.4. Suivi médical 38
2.2 L’accompagnement de la doula 41
2.2.1 A quel moment, comment 41
2.2.2 Motivations des femmes 42
2.2.2.1. Continuité et disponibilité 43
2.2.2.2 Isolement et besoin d’une personne extérieure 44
2.2.2.3. Soutien émotionnel 46
2.2.2.4 Autres raisons 47
3

2.2.3 L’avis des pères 49


2.2.4. Conclusions 51
TROISIEME PARTIE - COMMENT SITUER CE CHOIX D’ACCOMPAGNEMENT NON MEDICAL
A LA NAISSANCE DANS LE CONTEXTE ACTUEL 52
1. Développement de nouveaux métiers 52
1.1. Les métiers d’aide à la personne 52
1.2. Les nouvelles pratiques de santé 52
2. L’évolution de la société 52
2.1. L’individu 52
2.2. La demande pour soi 52
3. L’offre de soin en périnatalité 52
3.1. Disparition des maternités de proximité 52
3.2. Continuité du personnel soignant 53
3.3. Possibilité de soutien continu durant le travail 53
4

INTRODUCTION
Pour ce travail de fin d’études, j’ai choisi de m’intéresser aux accompagnantes à
la naissance ou doulas. Il s’agit de femmes proposant aux futurs parents un
accompagnement non médical à la naissance. Elles proposent cet
accompagnement en complément du suivi médical classique de la grossesse.
Ces dernières années, leur pratique rencontre un relatif succès auprès des
couples français.

L’apparition de ce nouvel intervenant auprès des femmes enceintes m’a


interpellée. En tant que future professionnelle, il m’a semblé que le
développement d’une telle activité posait une question primordiale :
l’accompagnement ne fait-il pas partie intégrante de notre profession de
sage-femme ?

J’ai alors débuté un travail de recherche sur l’activité des doulas en France pour
savoir qui sont ces femmes et en quoi consiste leur accompagnement auprès
des couples.

J’ai rapidement pu mesurer auprès des doulas, comme auprès des


sages-femmes, que cet accompagnement non médical à la naissance était mal
accueilli dans la majorité des maternités françaises, tout particulièrement dans
les salles de naissances.

Ne voulant pas que mon mémoire soit le lieu de ce conflit naissant entre les
doulas et les sages-femmes, j’ai choisi d’aller demander l’avis des principaux
concernés par cet accompagnement : les parents.

La problématique de mon travail se définit donc ainsi : pourquoi les parents


font-ils appel à une doula pour les accompagner durant la grossesse,
l’accouchement et le post partum ?

Pour répondre à cette question, je suis d’abord allée à la rencontre de ces


femmes qui se disent doulas, afin de comprendre qui elles sont. Ceci a constitué
la première partie de mon travail.
5

Puis je suis allée à la rencontre des parents par l’intermédiaire d’entretiens


téléphoniques afin de savoir qui ils étaient, quels étaient leurs liens sociaux, de
quelle façon ils étaient arrivés à faire ce choix d’accompagnement, et pourquoi
ils l’avaient fait. L’analyse de ces entretiens fait l’objet de la deuxième partie de
mon travail.

Enfin, dans ma troisième partie je replace l’exercice des doulas ainsi que la
demande des parents, dans le contexte actuel de l’évolution de notre société et
des nouvelles attentes des parents qui peuvent en découler. Je replace
également cette problématique dans le contexte des soins actuellement
proposés en périnatalité.
6

PREMIERE PARTIE – DOULA : DE QUI ET DE QUOI


PARLE-T-ON ?
1 – Qu’est-ce qu’une doula ?

1.1. Définition

Une doula est avant tout une femme qui a déjà une expérience dans le domaine de la
périnatalité, que ce soit par ses propres accouchements, par les autres accompagnements
qu’elle a faits, ou par des formations autour de la naissance qu’elle aurait éventuellement
suivies.

Elle possède une connaissance essentiellement empirique qu’elle souhaite mettre à


disposition des futurs parents.

Par ce terme de doula, on désigne une femme expérimentée qui propose ses services
pour accompagner, dans la continuité, la femme ainsi que son conjoint durant la
grossesse, l’accouchement et le post partum.

Elle propose un accompagnement non médical à la naissance ; c’est à dire en


complément du suivi médical classique.

On peut distinguer cet accompagnement selon 4 axes :

● Elle offre un soutien affectif en apportant réconfort et bien-être à la femme.

Elle est disponible 24 heures sur 24 durant toute la grossesse pour répondre aux
angoisses maternelles.

Elle instaure une relation de confiance en permettant un temps de parole et d’écoute


de femme à femme et autour de la parentalité.

Elle apporte aussi son soutien au père en l’aidant à trouver sa place et à renforcer son
rôle auprès de sa femme.

● Elle est source d'informations.

Elle répond aux questions de la femme et l’oriente vers les bons interlocuteurs
lorsqu’elle ne peut répondre.

Elle peut lui donner des conseils si la femme en fait la demande.


7

● Elle apporte un soutien physique à la femme.

Par l’intermédiaire de massages, en l’aidant à se détendre par des exercices de


relaxation, de visualisation, de chant, l’application de chaud ou froid, l’adoption de
positions et respirations pouvant l’aider à réduire les perceptions douloureuses
pendant le travail.

Elle peut également être une aide à l’allaitement et une aide à la vie quotidienne
durant le post partum par exemple.

● Elle propose un soutien actif.

Elle peut si besoin aider à la communication avec le corps médical, permettre de


faire le lien avec les professionnels, ou même exprimer les désirs des parents s’ils
sont dans l’incapacité de le faire, voire permettre une négociation des souhaits des
femmes.

Les priorités de la doula dans l’accompagnement ainsi proposé sont donc axées autour
des besoins psychosociaux de la mère et de son conjoint durant la grossesse,
l’accouchement et le post partum.

Pour ce faire, elle rencontre les parents plusieurs fois pendant la grossesse, au cours de
visites à domicile ou pour certaines en cabinet ; elle est joignable à n’importe quelle
heure du jour et de la nuit durant toute la durée de l’accompagnement ; elle est
disponible pour les parents durant toute la durée du travail et de l’accouchement s’ils le
désirent et leur rend plusieurs visites en post partum.

1.2. Origines

En grec ancien, le mot «doula» (η δούλα) est le féminin de «doulos» (o δούλος), l’esclave.
Ce mot désigne une servante, le plus souvent une femme, au service d’une autre femme.
Il a aujourd’hui, en grec moderne, la même signification, mais garde une connotation
soit désuète soit négative.

Dans de nombreuses cultures à travers l’Histoire, les femmes ont été entourées et
soignées par d’autres femmes, pendant l’accouchement notamment.
8

La femme en travail n’est jamais laissée seule, dans la Rome antique, par exemple,
quatre femmes au moins l’assistent : trois la soutiennent -derrière et de chaque côté- et la
quatrième, la sage-femme, s’accroupit par terre, en face (1).

De la même façon, les représentations artistiques de la naissance à travers le monde


incluent habituellement au moins deux autres femmes, entourant et soutenant la
parturiente.

L’une d’entre elles est responsable de la sécurité de la mère et de l’enfant : c’est la figure
de la sage-femme ; l’autre ou les autres, apportent soutien et réconfort à la femme en
travail (2).

A l’heure actuelle encore, on retrouve ces figures féminines aux côtés de la femme qui
accouche.

Des femmes aidant d’autres femmes à donner la vie est une ancienne pratique
qui est toujours largement répandue aujourd’hui. Par exemple selon des données
anthropologiques que nous avons reprises, sur 128 sociétés non industrialisées
9

vivant de l’agriculture, de la cueillette et de la chasse, toutes sauf une, offrent


aux mères le soutien continu d’autres femmes durant le travail et
l’accouchement1.

Dans bon nombre de cultures, le travail de l’accouchement sans accompagnement ne se


retrouve que dans la pratique biomédicale (3).

Les doulas modernes se disent être l’image de cette femme aux côtés de la mère et de la
sage-femme.

2. L’apparition des doulas

2.1. Historique

Dans les années 70, un pédiatre, le Docteur Marshall KLAUS, alors chef de l’unité
néonatale de soins intensifs de l’Université de STANFORD (USA), s’intéressa aux
problèmes rencontrés par les parents des nouveaux nés de son service.

Il ne tarda pas à s’associer à son collègue pédiatre de la Case Western Reserve


University, le Docteur John KENNELL, pour étudier le développement précoce du lien
affectif mère-enfant.

Leurs travaux contribuèrent notamment à comprendre l’importance des liens précoces


parents-enfants, que ces derniers soient prématurés, malades ou bien portants, et tout
particulièrement l’importance des premiers instants qui suivent la naissance.

Leur cheminement les amena, un peu par accident, à découvrir l’importance d’un
soutien physique et émotionnel continu d’une femme à une autre durant le travail de
l’accouchement, que ce soit pour la femme ou pour son enfant (4).

Les premiers essais contrôlés randomisés tentant de vérifier l’hypothèse du bénéfice


d’un tel soutien social durant l’accouchement, ont été menés en Amérique du Sud par
SOSA en 1980 (5), puis KLAUS en 1986 (6).

1
1KLAUS M.H, KENNELL J., KLAUS P., The Doula Book, 2e édition, USA, Da Capo Press, 2002, 243,
3. Selon ma traduction.
10

Ils se sont fondés sur la tradition indigène du soutien durant l’accouchement et sur
l’accompagnement par des femmes locales expérimentées qu’ils ont désignées sous le
terme de «doula».

L’étude a été menée dans un hôpital guatémaltèque ayant une forte activité et les femmes
en bonne santé admises en travail et non accompagnées ont été réparties selon deux
groupes de façon aléatoire.

Dans le groupe étudié qui recevait le soutien d’une doula, on notait une diminution
significative de la durée du travail, de l’administration d’ocytociques, du taux de
césariennes, des admissions en unité néonatale ainsi que des complications périnatales.

L’étude fut reproduite aux Etats Unis (7) dans une unité d’obstétrique à forte activité,
accueillant une forte proportion de femmes non anglophones et originaires de milieux
défavorisés. Les accompagnatrices étaient des femmes locales et bilingues, sans autre
expérience que leur propre accouchement et qui reçurent une formation de 3 semaines.
Les résultats furent similaires.

KLAUS et KENNELL, alors rejoints par Phyllis KLAUS, Penny SIMKIN et Annie
KENNEDY (toutes trois spécialistes de la naissance et des nouveaux nés) décidèrent
d’utiliser le mot «doula» pour décrire une personne apportant un soutien continu, aussi
bien du point de vue émotionnel que du point de vue physique à une femme en travail et
dans le post partum immédiat.

Ils ont choisi ce mot «doula» pour lui éviter toute connotation médicale, reprenant
ainsi le terme initialement utilisé par l’anthropologue Dana RAPHAEL pour
désigner les femmes déjà mères qui apportent leur aide aux nouvelles
accouchées rencontrées aux Philippines.

C’est en 1992 qu’ils fondent l’association Doulas Of North America, «DONA» pour
promouvoir les doulas, et les former ; pour que chaque femme qui le désire puisse être
accompagnée par une doula. A partir de là, de nombreuses associations relayant les
principes de DONA se sont crées aux Etats-Unis, au Canada et dans d'autres pays à
travers le monde.
11

2.2. Etudes sur les doulas

Des études ont été menées à bien, dans des contextes différents, afin de vérifier
l’hypothèse selon laquelle le soutien durant le travail est bénéfique aux femmes. Ces
études consistaient à observer l’impact d’un soutien continu dispensé par des personnes
formées ou non formées.

Il peut s’agir de professionnels de santé (sages-femmes, infirmières) ou de toute autre


personne proche de la femme, familière ou non, avec ou sans expérience de la grossesse
et/ou de l’accouchement, parmi lesquelles on compte les doulas. Ces études ont été
menées parmi un large échantillon de cultures et de structures médicales. Certaines
excluaient les compagnons ou les parents.

En 2000, une synthèse a été proposée par HODNETT à partir de 15 études (soit plus de
5000 femmes) comparant l’impact d’un accompagnement continu durant le travail et les
soins habituels dispensés pendant le travail. (8)

Cette synthèse indiquait que le soutien continu pendant le travail (par des
accompagnants professionnels ou non professionnels) conduisait à une diminution des
certains évènements2 :

- durée du travail (25%)

- probabilité d’un recours à une médication anti-douleur (31%)

- incidence des extractions instrumentales par voie basse

- probabilité d’accouchement par césarienne (45%)

- taux de scores d’Apgar < 7 à 5 minutes de vie

A l’échelle individuelle, ces études ont permis de mettre en évidence une meilleure
satisfaction vis-à-vis de l’accouchement ainsi qu’une meilleure image de soi.

Certaines études ont aussi révélé un prolongement de la durée d’allaitement, une


diminution de l’utilisation d’ocytociques (50%), du taux d’hospitalisation néo-natale, du
taux de traumatismes périnéaux, ainsi qu’une réduction des dépressions du post-partum
et des difficultés de maternage. (Annexe 1)

2
Chiffres tirés de The Doula Book, KLAUS M.H, KENNELL J., KLAUS P., 2e édition, USA, Da Capo
Press, 2002, 98
12

Ces résultats amènent l’auteur à conclure que compte tenu des bienfaits démontrés et de
l’absence de risques connus en cas de soutien pendant le travail, toutes les femmes
devraient bénéficier de ce type de soutien. Il est intéressant de noter que les bénéfices de
ce soutien continu sont effectifs qu’il s’agisse d’un accompagnant professionnel de santé
ou non.

3. Situation des doulas dans le monde

Bien que leur nombre reste encore limité dans la plupart des pays, on les retrouve un peu
partout dans le monde.

3.1. Les doulas en Amérique du Nord

C'est aux Etats-Unis que l'activité des doulas est la plus développée.

L'organisation Doulas Of North America y fait référence. La progression du nombre de


membres ainsi que leurs provenances géographiques diverses, ont d'ailleurs poussées les
dirigeants de DONA à rebaptiser l'organisation "DONA International" en 2004. En
2005, DONA International comptait un peu plus de 5800 membres dont 2400 doulas
certifiées.

Le mode d'exercice de ces doulas est un peu différent de celui retrouvé en France. Leurs
prérogatives sont les mêmes mais on distingue les "Birth doulas" qui accompagnent le
couple avant et pendant la naissance et les "Post Partum doulas"qui apportent leur aide
après l'accouchement et dans le post partum.

Aux Etats-Unis, on trouve d'autres associations qui soutiennent les doulas et leur
proposent des formations similaires à celles de DONA International telles la Childbirth
and Post Partum Professionnal Association (CAPPA) (9), PALS(10)...etc. Ces
formations sont d'ailleurs validées par DONA International pour pouvoir être reconnues.

En 2002 a été réalisée une étude portant sur 1000 doulas à travers les Etats-Unis. (11)
On y apprend que les doulas accompagnent en moyenne 9 naissances par an et
travaillent en grande majorité seules. Certaines font partie des équipes de soins et sont
employées par les structures hospitalières. Les frais de l'accompagnement, selon les
assurances, peuvent même être remboursés. Le coût d'un accompagnement varie de 250
à 800 dollars, selon une échelle mobile. L’accompagnement peut même être bénévole si
13

l'on en croit le principe de DONA International "une doula pour chaque femme qui le
demande". Le revenu annuel brut moyen d'une doula certifiée en 2002 était de 3 645
dollars. Le travail de doula est décrit comme une "para-profession" : trois quarts des
doulas ont une activité rémunératrice autre que leur pratique de doula.

Selon une autre étude, environ 5% des femmes ayant accouchées aux Etats-Unis en 2002
auraient eu recours aux services d'une doula. (12)

Il est intéressant de constater que le concept de doula a d'abord été développé dans un
pays où l'organisation des soins périnataux est différente de la nôtre. La profession de
sage-femme n'existe pas aux Etats-Unis et ce sont les médecins qui suivent les
grossesses et pratiquent les accouchements.

Au Canada, on retrouve également des doulas assez bien organisées. Plus de 500
membres de DONA International résident au Canada.

Là aussi, l'organisation des soins en maternité est différemment pensée. La situation de


la profession de sage-femme est radicalement différente selon le lieu de résidence au
Canada et les nombreux obstacles à l'accessibilité des soins. En Ontario par exemple (la
province canadienne qui compte le plus de sages femmes) ces sages-femmes
n’effectueraient que 4,5% des accouchements. Et peu d'hôpitaux canadiens permettent le
suivi du travail par une sage-femme : le travail est suivi par un médecin (qui peut être le
médecin de famille), aidé d'une infirmière. Pour être suivi par une sage-femme, les
femmes accouchent en maison de naissance ou à domicile, ce qui représente une faible
proportion de la population. (14)

3.2. Les doulas en Amérique du Sud, Océanie, et Asie

On retrouve des doulas principalement au Brésil et en Argentine.

L'association "Doulas de Brasil" référence quelques 70 doulas. (15)

En Argentine plusieurs associations proposent les services de doulas comme la


"Fondation Crea Vide" (16) ou "Criaza" (17).

Ensuite on retrouve des doulas de façon sporadique et sans réelle structuration au Chili,
aux Bermudes, à Puerto Rico, sur les Iles Caïman, les Iles Vierges, en Australie, en
14

Nouvelle-Zélande, au Japon, en Mongolie, à Taiwan, en Inde et à Singapour. Ces doulas


éparses relayent le plus souvent les principes de DONA International.

3.3. Les doulas en Europe

On retrouve des associations de doulas plus ou moins structurées dans la quasi totalité
des pays d'Europe mais c'est en Grande-Bretagne que leur activité est la plus développée
et où elles sont les plus reconnues.

En Grande-Bretagne, il existe plusieurs associations et organismes assurant la promotion


et la formation des doulas. L'apparition de ces associations est plus ancienne en
Angleterre qu'en France. En 2001, l'organisation "Doula UK" a été créée pour
rassembler les doulas britanniques. Elle référence quelques 250 doulas sur leur site en
2005 (18), en sachant qu'il existe d'autres annuaires proposant leurs services.

Le paysage obstétrical anglais peut être comparé au paysage obstétrical français en


terme d'organisation. L'accompagnement des naissances par les professionnels de santé
et la répartition des tâches y sont comparables. Cependant, les usagers jouent un rôle
plus important dans leur système de santé, notamment en ce qui concerne la maternité.
Ils sont représentés par de nombreuses associations d’usagers et c’est un peu à travers
ces associations que s'est créée la pratique des doulas en Grande-Bretagne.

L'une des associations les plus importantes a été créée dans les années 70 par des
femmes, en réponse à l'hypermédicalisation des naissances. (19) Il s'agit du "National
Childbirth Trust" ou NCT, qui fonctionne comme une association de charité : des parents
donnent de leur temps pour organiser des groupes parents-bébés, des réunions autours de
l'allaitement, de discussions autours de la parentalité, allant jusqu'à organiser des cours
de préparation à la naissance. Dans les années 80 par exemple, aucune sage-femme
anglaise ne proposait de préparation dite "naturelle" à l'accouchement comme le
proposait le NCT ; les membres de cette association ont même formé les sages-femmes à
ce type de préparation. Via de telles, les usagers et surtout usagères, ont commencé à
prendre une place dans les services de soins, à l'hôpital (non sans quelques ″frictions″
avec le monde hospitalier). Les plus actives pouvaient suivre des formations pour
développer certaines de leurs compétences mises au service de l'association ; que ce soit
pour développer leurs connaissances sur l'allaitement ou sur la préparation à la naissance
15

par exemple. Une des formations possibles retrouvée est celle de "Childbirth Educator"
qui se déroule sur plusieurs années un peu comme une formation continue. Ces
"Childbirth Educator" sont les ancêtres des doulas.

Le fait que des doulas fassent déjà partie intégrante des services de maternité et qu'elles
y soient respectées expliquent probablement leur meilleure acceptation dans les salles de
naissances par les sages-femmes anglaises. Le NCT est aujourd'hui une association
reconnue d'utilité publique en Angleterre, qui a un avis consultatif sur la politique de
santé menée par les ministères.

Le Midwives Information and Resource Service, MIDIRS, centre de ressources des


sages-femmes britanniques, publie un dépliant parlant de cet accompagnement non
médical à la naissance qui est distribué parmi d'autres (les positions d'accouchement, le
projet de naissance...) aux femmes enceintes lorsqu'elles viennent s'inscrire à la
maternité.

Depuis 2004, l'organisation Doula UK tente de créer un programme de reconnaissance


uniformisée des formations de doulas. Actuellement, Doula UK travaille à établir un
code de conduite des doulas grâce à un "conseil", composé de doulas et de
sages-femmes. Le problème de la place des doulas en Grande-Bretagne pose également
des questions mais il semblerait que sages-femmes et doulas trouvent leurs places
respectives auprès des femmes.

L’association Doulas de France dans sa première publication, « Les Cahiers de Doulas


de France » tente de dresser l’état des lieux des doulas en Europe. Le tableau ci-dessous
reprend les principaux éléments chiffrés collectés par l’association DDF. Ces chiffres
approximatifs ont été recueillis auprès des associations nationales.

Pays Nombre de Nombre de Nombre de doulas Nombre Coût de


naissances d’apprenties l’accompagnement
sages-femmes en exercice
par an doulas par une doula

Allemagne 686.000 18.000 38 8 400 à 450 €

Autriche 76.925 NR 53 50 10 à 15 € / h
16

Belgique 118.000 4.500 11 20 150 €

Chypre 1.000 NR 2 NR 120 €

Espagne NR NR 81 3 AAD = 150 €

PP = 250 €

20 à 40 € /
visite

France 830.900 16.000 42 150 400 à 600€

Hongrie 957.000 2.300 205 NR 80 €

Irlande NR NR 34 21 700 à 1.200 €

Pays Bas 200.000 800 75 45 350 €

Portugal 110.260 10 51 73 80 à 250 €

Suisse 73.080 4.000 67 12 500 €

République 96.100 5.000 56 68 100 €


Tchèque
+10 € / visite

Royaume Uni 720.000 28.000 409 150 350 à 1.200 €

15 à 30 € /visite
post partum

Tableau I : Les doulas en Europe

On recense également des associations de doulas en Finlande, Italie, Lettonie et


Luxembourg sans plus de précision. Il y aurait 5 doulas en exercice au Danemark et 61
en Suède.

A ce jour en Europe, on comptabilise environ 1.060 doulas en exercice, et 900


apprenties.
17

Un peu partout en Europe, l'activité des doulas commence à se mettre en place. Les
différentes associations de doulas d'Europe sont en passe de créer une association
européenne de doulas : "Doulas d'Europe". Mais même en Angleterre où l'intégration
des doulas au paysage obstétrical semble s'amorcer, l'activité des doulas y reste encore
très limitée, comme partout en Europe, et comme en France.

4. Les doulas en France

4.1. Les associations de doulas

En France, on trouve deux principales associations regroupant les doulas : l’association


des Accompagnantes à La Naissance (ALNA), et Doulas de France (DdF).

D’après le recensement fait par DdF en France, il y avait 42 doulas en exercice et 150
apprenties doulas en 2007.

4.1.1. L’association des Accompagnantes à La NAissance

L’association des Accompagnantes à la NAissance a été créée en 2003 à l’initiative de 2


femmes : l’une mère, l’autre sage-femme, elle a pour but de former au métier
d’accompagnante à la naissance et de promouvoir ce métier. Les fondatrices avaient
connaissance du métier de doula à l’étranger, et ont voulu adapter la formation à cette
pratique en France : les femmes ayant suivies cette formation peuvent prétendre au titre
d’accompagnante à la naissance. Au début de l’année 2007, 18 accompagnantes à la
naissance ont achevé cette formation et environ 50 sont en cours de formation ALNA.

La particularité d’ALNA est de faire une distinction entre une accompagnante à la


naissance et une doula.

Pour ALNA, une accompagnante à la naissance doit impérativement être une femme
ayant accouché et allaité son enfant.

En avril 2004, l’ALNA a rédigé un «code de déontologie» des accompagnantes à la


naissance, auquel chacune doit adhérer pour exercer et être inscrite sur l’annuaire
ALNA. Ce texte cadre l’exercice des accompagnantes à la naissance. Il met en lumière
les points généraux, c’est-à-dire que la grossesse et l’accouchement sont des processus
naturels qui appartiennent à la femme et sa famille.
18

Il redonne la définition des accompagnantes à la naissance en insistant sur les notions de


disponibilité et de continuité de leur accompagnement. Il réaffirme que l’accompagnante
n’est ni une sage-femme, ni une travailleuse familiale ou une auxiliaire de puériculture.

Ce texte définit également les relations accompagnante/accompagnés qui sont basées sur
le respect, la discrétion, l’humilité et la liberté. Il définit également les relations
accompagnante/équipe médicale en réaffirmant qu’elle ne peut pratiquer aucun acte
médical, qu’elle ne peut s’opposer à aucune décision médicale et que son entrée en salle
de naissance ne peut se faire qu’en accord avec la sage-femme. Ce code définit enfin les
relations entre accompagnantes et leur obligation de secret professionnel.

L’ALNA tient beaucoup au titre d’accompagnante à la naissance car il correspond à une


formation de base définie par l’ALNA depuis maintenant 4 ans. C’est ce qui distingue
une accompagnante à la naissance d’une doula. L’appellation de doula est beaucoup plus
générale, et définit une femme qui en accompagne une autre durant la grossesse,
l’accouchement et le post-partum, sans notion de formation préalable.

4.1.2. L’association Doulas de France

L’association «Doulas de France» a été créée en février 2006, initialement sous le nom
«Doula, Accompagner la naissance», afin de réunir les femmes souhaitant proposer aux
couples un accompagnement non médical à la naissance. En octobre 2006, cette
association comptait 136 membres.

Sur le site de cette association, un annuaire des doulas a été mis en ligne. A l’heure
actuelle, c’est le principal annuaire de doulas françaises disponible. Début 2007,
l’association comptait en son sein 21 doulas en service et 66 doulas en apprentissage.

Une charte a été écrite par des femmes impliquées dans l’accompagnement non médical
à la naissance afin d’énoncer les principes de base de cet accompagnement tel qu’il est
conçu par l’association Doulas de France.

Les doulas recensées dans l’annuaire de l’association adhèrent à cette charte et


s’engagent à en respecter les principes. Toutefois, ce texte précise que l’association ne
saurait être tenue responsable en cas de dérive de l’une de ses signataires.
19

Par cette charte, les doulas s’engagent à être aux côtés des parents qui en ont fait le
choix, et ce dans la continuité. Elle insiste sur cette continuité de l’accompagnement en
post partum, parfois même jusqu’à plusieurs mois après l’accouchement. Elle affirme
que chaque doula exerce selon sa sensibilité, ses limites autour de l’idée que la
grossesse, la naissance, les suites de l’accouchement sont des moments forts dans la vie
d’une famille et qui leurs appartient. Les doulas s’engagent au secret professionnel et ne
proposent pas d’accompagnement religieux à la naissance.

Elles ne sont pas thérapeutes et ne pratiquent aucun acte médical. Leur accompagnement
ne peut se faire qu’en complément d’un suivi médical. Elles ne peuvent assister à un
accouchement sans la présence d’un médecin ou d’une sage-femme. Elles soutiennent le
travail des sages-femmes et travaillent à créer du lien.

Elles appellent à une solidarité entre les doulas et insistent sur la nécessité de formation
continue. Cette charte affirme la neutralité de la doula : elle n’influence pas le choix des
parents selon ses convictions personnelles. En ce sens, la doula ne doit pas précéder la
demande des parents, ni orienter les décisions ou projets des parents dans quelque sens
que ce soit.

Il s’agit là des principes de base énoncés dans la Charte de l’association Doulas de


France du 8 mars 2006, date de sa dernière modification.

4.2. Leurs modes d’exercices

Bien qu’il existe une différence de formation entre les accompagnantes à la naissance et
les doulas, leurs modes d’exercices sont similaires.

Pour plus de simplicité, dans le reste de mon travail, j’utiliserai donc le terme plus
général de «doula» qui inclut également les accompagnantes à la naissance.

4.2.1. Leurs pratiques

Après avoir contacté une doula, les parents et la doula organisent un premier
rendez-vous afin de se rencontrer. La majorité des doulas ne font pas payer ce premier
entretien à la suite duquel les parents choisissent de continuer ou non avec cette doula.
Une fois qu’ils se sont choisis, parents et doula se rencontrent au rythme souhaité par les
parents, généralement une fois par mois.
20

Ces rencontres peuvent se faire au domicile des parents ou dans un autre lieu proposé
par la doula et peuvent durer une à trois heures, voire plus. Elles permettent aux parents
d’exprimer leurs attentes, leurs peurs, leurs interrogations concernant cet enfant à naître.
Ces visites à domicile sont souvent l’occasion pour la doula de rencontrer les autres
membres de la famille, et tout particulièrement les aînés. Ces rencontres permettent aux
parents et à la doula d’apprendre à se connaître.

Tout au long de l’accompagnement et en fonction de ce qu’il a été convenu avec les


parents, la doula est joignable à tout moment, et se rend disponible selon leurs besoins
24 heures sur 24.

La doula est présente à l’accouchement (si c’est le souhait des parents et avec l’accord
du personnel médical le plus souvent). Elle apporte un soutien à la mère par ses paroles,
ses massages, sa présence. Elle peut l’aider par des exercices de relaxation ou au moyen
de positions.

Elle peut également aider le père à trouver et prendre sa place. Elle réconforte, informe
le couple, soutient les parents dans leurs choix. Elle reste le temps nécessaire.

Durant le post partum, la doula est là pour écouter et répondre aux besoins de la mère et
cela parfois plusieurs mois après la naissance. Elle vient lui rendre visite à domicile,
selon ses besoins, après sa sortie de la maternité.

Au total, la doula se rend disponible 24 heures sur 24 durant toute la durée de


l’accompagnement, est présente à l’accouchement, et effectue en moyenne 10 visites par
accompagnement.

Selon l’Association Doulas de France, 138 naissances ont été accompagnées par une
doula en France (recensement fait en 2006), parmi lesquelles 34% ont eu lieu à domicile,
66% à l’hôpital.

L’association recense un taux de césarienne de près de 4%, un taux d’allaitement de 99%


à la naissance, 90% à trois mois et 76% à six mois. Elle dénombre également un taux de
1,5% de dépression post partum (cf cahier des Doulas de France n°1)

Cf site alna.fr (janvier 2OO7)


21

4.2.2. Le coût

Les doulas sont payées par les parents, directement ou via leur association. Elles
exercent soit en profession libérale et à ce titre sont inscrites à l’URSSAF, soit en qualité
de salariée et peuvent être rémunérée via le chèque emploi service universel (CESU) au
titre d’emploi familial.

A l’heure actuelle, aucune reconnaissance de leur activité comme profession n’a eu lieu.

Elles proposent un forfait de 400 à 600 euros en moyenne comprenant les visites
prénatales, leur présence à l’accouchement, les visites postnatales ainsi que leur
disponibilité téléphonique 24 heures sur 24. Beaucoup d’entre elles déclarent prendre en
compte les revenus des parents. (réf. Cahier des doulas)

L’association ALNA propose, en suite du premier entretien gratuit, un forfait de 300


euros pour l’accouchement auquel s’ajoutent au moins trois entretiens prénataux et une
visite postnatale, facturés 40 euros par entretien, soit un minimum de 420 euros par
accompagnement.

Pour espérer un revenu proche du SMIC, elles doivent accompagner 2 à 3


accouchements par mois et réaliser plusieurs visites.

(ref. TPE – PME .com 01/06/2005)

Elles ne peuvent en général pas accompagner plus de femmes, de façon à rester


disponibles auprès des parents.

Dans l’ensemble, les doulas qui débutent proposent généralement leurs premiers
accompagnements gratuitement. C’est en tout cas la position de l’association des Doulas
de France et celle de l’association ALNA pour laquelle durant sa formation,
l’accompagnante à la naissance doit accompagner 3 naissances gratuitement.

4.3. Les formations

4.3.1. Formation ALNA

Il s’agit de la seule formation qui donne le droit de porter le titre d’accompagnante à la


naissance, nom déposé à l’INPI (Institut National de la Propriété Intellectuelle). La
formation se divise en deux parties théorique et pratique.
22

La formation théorique dure environ un an. Elle est répartie en 6 modules de trois jours
(soit 18 jours au total), complétée par un travail personnel (rédaction d’un mémoire) et
sanctionnée par une certification nécessairement validée avant toute formation pratique.
La théorie comprend des notions sur l’anatomie, la physiologie de la grossesse et de
l’accouchement, l’allaitement, l’alimentation de la femme enceinte, la diversification
alimentaire du nourrisson, le deuil et le handicap, la place du père et les relations
humaines (notamment l’écoute active). Ces enseignements sont dispensés par divers
intervenants, dont des professionnels de santé.

La formation pratique, d’une durée variable, comporte idéalement un stage auprès d’une
sage-femme libérale pratiquant l’accompagnement global et 3 accompagnements en solo
sans perception d’honoraires. L’accompagnante doit avoir pu observer au moins deux
accouchements et chaque accompagnement fait l’objet d’une évaluation par les parents
mais aussi par les professionnels en charge de l’accouchement.

Si elle satisfait à ces évaluations, elle peut obtenir un certificat d’accompagnante à la


naissance. Elle s’engage également à revalider son certificat tous les 3 ans.

4.3.2 Formation Paramanadoula

Il s’agit d’une formation proposée par le Docteur Michel ODENT (obstétricien connu
pour son travail à la maternité de PITHIVIERS selon les préceptes de Frédéric
LEBOYER et tout particulièrement sa pratique des accouchements dans l’eau) et
Lilliana LAMMERS qui travaille à LONDRES en tant que doula.

Cette formation s’intitule «Paramadoula» en raison de la connotation péjorative du mot


«doula» auprès de la communauté grecque. Ce mot signifiant esclave, les grecs lui
préfèrent le terme «paramana» qui signifie «avec la femme». Michel ODENT et Lilliana
LAMMERS ont donc choisi ce nom paramana, auquel ils ont accolé celui de doula,
puisqu’il s’agit du terme le plus fréquemment connu et reconnu à travers le monde.

Cette formation s’adresse aux «Mamans et Femmes qui désirent aider d’autres femmes à
vivre la plénitude de la maternité».

Selon eux, une doula n’a pas besoin de formation spécifique, le fait d’être mère et
d’avoir accouché naturellement suffit, c’est cette expérience qui permet d’accompagner.
23

Elle doit juste pouvoir discuter de certains points avec les parents, afin de les sécuriser
au maximum.

Cette formation Paramanadoula se déroule sur 3 jours et doit permettre à ces femmes de
pouvoir communiquer les informations de base sur la grossesse, l’accouchement et
l’allaitement, leur permettre d’être formées aux premiers secours en obstétrique et de
réfléchir sur leur vécu de la maternité (détail de la formation en Annexe I)

Pour Michel ODENT, la doula est la résurgence de la figure de la «sage-femme


traditionnelle», une figure maternelle, et les femmes ne demandent plus à leur
mère de jouer ce rôle. Il fait remarquer que l’activité de «doula» a initialement
débutée aux USA, là où les sages-femmes n’existent quasiment pas, et que
désormais, les doulas arrivent dans d’autres pays où les sages-femmes sont
présentes mais où ce qu’il nomme «l’industrialisation de la naissance» a
considérablement réduit leur rôle d’accompagnement.

(ref. Le fermier et l’accoucheur – Césarienne : enjeux, effets, perspectives »

4.3.3 Ecole Mère et Monde

Fondée en 2003, l’Ecole Mère et Monde propose une formation de base en


accompagnement à la naissance au QUEBEC (Montréal), et plus récemment en
FRANCE (Paris). Elle est intégrée au Centre de Maternité Mère et Monde fondé en 1997
au QUEBEC.

Cette formation de base d’accompagnante à la naissance comprend des cours magistraux


d’une durée de 55 heures répartis sur 7 jours auxquels s’ajoute un stage pratique de 45
heures.

La formation s’adresse à toutes les femmes, qu’elles soient mères ou non, qui ont le
désir d’aider d’autres femmes. Il suffit d’être âgée d’au moins 18 ans et d’avoir obtenu
l’équivalent du brevet des collèges. La partie théorique aborde différents sujets très
divers, depuis la philosophie et la relation d’aide jusqu’à la physiologie obstétricale
(Annexe II).

Ces cours sont dispensés par des accompagnantes expérimentées et incluent des ateliers
pratiques, des discussions et des mises en situations. Au terme de la formation pratique,
24

les « étudiantes » de l’école ont le choix d’accompagner un couple sous la supervision


d’une accompagnante senior ou d’être observatrice d’une accompagnante senior de
l’école.

4.3.4. Formation AMA

Cette formation ouverte aux doulas est dispensée par l’Institut en Altérité Maternelle
Appliquée (AMA). Créé en 2004, cet institut dispense 3 cycles de formation :

● une formation en Santé Humaniste destinée aux professionnels de santé (médecin,


homéopathes, kinésithérapeutes, et ostéopathes, naturopathes et nutritionnistes…)

● une formation en Altérité Maternelle destinée aux professionnels de la naissance et


de la périnatalité (sages femmes, puéricultrices, obstétriciens, gynécologues…)

● une formation en Altérité Maternelle appliquée AMA destinée à toutes les


personnes concernées par l’accompagnement des couples (mères ou mères en
devenir, doulas, somato-thérapeutes, professeurs de chant prénatal, yoga…).

La méthode enseignée a été élaborée par un médecin homéopathe de TOULOUSE, le


docteur Martine SAVARES, fondatrice de l’institut.

L’enseignement AMA s’organise en 11 modules de 2 jours chacun (soit 132 heures) :

- 7 modules en Santé Humaniste

Etude de la structure énergétique de l’organisme selon la médecine chinoise et


l’Ayurvéda, bases de l’acupressure/digitoponcture, prise du pouls de Nogier,
initiation à la micro nutrition…

- 2 modules spécifiques aux applications de la Santé Humaniste au domaine de la


périnatalité (grossesse, accouchement, post partum et allaitement)

- 2 modules concernant l’anatomie et la physiologie de la grossesse,


l’accouchement et l’allaitement.

L’équipe de formation réunie autour du docteur Martine SAVARES comprend des sages
femmes et des thérapeutes AMA expérimentés.

Pour obtenir leur certification AMA, les stagiaires doivent réussir un examen (théorique
et pratique), suivre une des formatrices lors d’un accompagnement de grossesse et d’une
25

préparation à l’accouchement, accompagner deux accouchements sous la supervision


d’une formatrice et s’engager à suivre un code éthique.

Les stagiaires ainsi formés sont appelées « AMA », qui signifie « mère » en langue
basque et n’ont aucune fonction médicale, au même titre que les doulas.

Le coût de la formation est de 2.530 euros pour les particuliers, et certains organismes de
formation professionnelle continue peuvent prendre en charge ces frais.

4.3.5. Autres formations

D’autres formations existent, en France, en Suisse, en Angleterre, aux Etats-Unis…


(Annexe III)

Peuvent également s’ajouter à ces formations, d’autres « outils » autour du yoga, chant
prénatal, portage, haptonomie, psychologie, hypnonatal, secourisme, massage… ainsi
que d’autres formations dispensées par diverses associations.

4.3.6. Projet de cursus de base DDF

L’association DDF propose l’étude d’une formation de base commune à toutes les
doulas à travers la France. Elle souhaite offrir aux parents une garantie de sérieux et de
qualité, mais également uniformiser les connaissances des doulas françaises et donner un
cadre à cette activité.

Les cours seraient assurés par des doulas expérimentées. Cette formation de base
compterait 144 heures de programme théorique au total (Annexe IV)

Cette formation, encore en cours de définition, se construit en lien avec d’autres


organismes formateurs ainsi qu’en lien avec l’association britannique de doulas, Doula
UK, pour établir ce cursus de base de formation des doulas.

L’association DDF souhaite obtenir grâce à cette formation, la reconnaissance de cette


«profession émergente».

4.4. L’accueil des doulas par les professionnels de santé

L’apparition des doulas en France est venue ébranler une partie des professionnels de la
naissance, tout particulièrement les sages-femmes.
26

4.4.1. Débat du CNOSF

Le CNOSF dans le contact SF n°10 de novembre 2005, dénonce la pratique des doulas,
estimant qu’elles «revendiquent en partie notre métier de sage-femme». Il dénonce le
risque que les parturientes accordent une confiance excessive aux doulas, sans apprécier
les limites de leurs compétences ; sachant qu’elles n’ont aucune formation reconnue et
validée en médecine ou en obstétrique.

Il rappelle que la préparation à la naissance, le suivi d’un accouchement et du post


partum, font partie intégrante de la profession de sage-femme.

Il en appelle donc à la vigilance et n’accorde aucune caution à la pratique des doulas,


faisant même référence à l’article R4127-320 du Code de Santé Publique ainsi formulé :
«Est interdite à la sage femme toute facilité accordée à quiconque se livre à l’exercice
illégal de la médecine ou de la profession de sage-femme».

Les sages-femmes qui cautionneraient l’exercice des doulas s’exposent à des sanctions.

(ref contact SF n°10, nov 2005, p 11, n°12, nov 2006, p 8, n°13 ?)

4.4.2. Etats Généraux de la Naissance 2006

Lors des Etats Généraux de la Naissance 2006 à CHATEAUROUX, un débat avait eu


lieu entre des représentantes des doulas, des sages-femmes présentes, notamment
Chantal BIRMAN, et les représentants des usagers. Ce débat avait généré de vives
émotions et il semblerait même qu’un certain nombre de professionnels (surtout des
sages-femmes) aient refusé de participer aux Etats Généraux de la Naissance en raison
de la présence de cette thématique.

La position de Chantal BIRMAN est la suivante : «les doulas sont une mauvaise réponse
à un vrai problème de santé», et «la profession de doula est dangereuse aussi bien pour
les femmes, les sages-femmes que pour les doulas elles-mêmes».

Le débat s’était orienté sur les formations des doulas, les raisons de leur apparition, les
écueils juridiques de leur pratique et la possibilité pour chaque femme d’avoir une
sage-femme à ses côtés tout au long de l’accouchement.

Cette confrontation n’avait pas donné lieu à d’autres échanges entre doulas et
sages-femmes.
27

4.4.3. Entretiens de Bichat 2006

Lors des Entretiens de Sages-femmes à BICHAT en septembre 2006, un des sujets de


ces journées de formation continue faisait intervenir des doulas.

Le CNOSF avait d’ailleurs émis de «vives réserves quant à la participation de doulas».


La rencontre a bien eu lieu et les doulas sont venues présenter leurs pratiques. Il ne
semble pas que ces rencontres aient donné lieu à de plus amples échanges.

4.5. Structuration de l’activité des doulas

4.5.1. Responsabilité des doulas

La pratique des doulas, à l’heure actuelle, n’a aucun statut juridique en France. Hormis
la charte de l’association des Doulas de France et le « code de déontologie » de
l’association ALNA qui exposent les principes fondateurs de cette nouvelle activité,
aucun écrit ne pose le cadre de cette pratique.

Selon la loi, les doulas peuvent s’exposer à l’accusation d’exercice illégal de la


médecine. C’est ce que montre Sophie GAMELIN-LAVOIS, auteur et consultante en
périnatalité, dans un article de juin 2006. (réf.)

Selon l’article L4151-1 du Code de Santé Publique, l’exercice de la profession de


sage-femme inclut, «la pratique des actes nécessaires au diagnostic, à la surveillance de
la grossesse et à la préparation psychoprophylactique à l’accouchement, ainsi qu’à la
surveillance et à la pratique des soins postnataux en ce qui concerne la mère et
l’enfant…».

Peut être accusée d’exercice illégal de la profession de sage-femme, «toute personne qui
pratique habituellement les actes mentionnés à l’article L.4151-1 sans remplir les
conditions exigées…»

Une doula ne peut donc pas, au cours de son accompagnement, proposer de préparation
à la naissance.

La pratique des sages-femmes comprend «la surveillance et la pratique de


l’accouchement». Les doulas sont d’ailleurs claires sur ce point, la Charte de
l’association des Doulas de France précise bien : «Nous ne pouvons pas être présentes à
un accouchement sans qu’une sage-femme ou un médecin soit présent.»
28

Cependant, la doula qui, répondant à la demande des parents, se rendrait à leur domicile
en début de travail sans qu’un professionnel ne soit présent, se place en situation
d’illégalité.

Elle n’est pas en mesure d’évaluer le moment de partir, ni le moment pour appeler un
professionnel (puisque ne disposant d’aucun moyen de diagnostic), et les parents
risquent de s’en référer à la doula. Celle-ci se place alors en situation de surveillance du
travail, rôle dévolu aux sages-femmes.

De la même façon, elle ne devra pas donner de conseil au téléphone ou via Internet avant
le départ des parents pour la maternité.

La doula ne peut donc être présente à un accouchement sans l’accord de celui qui en a
médicalement et juridiquement la responsabilité.

4.5.2. Avis du Ministère de la Mission Interministérielle de Vigilance et de


Lutte contre les Dérives Sectaires (MIVILUDES)

Ce rapport du MIVILUDES de 2006, paru en mars 2007, aborde le thème des doulas
dans sa première partie, concernant l’évaluation des risques et des dérives au sujet des
formations professionnelles et des risques sectaires (réf.).

Ce rapport fait état d’une « augmentation croissante des prestations visant au


développement de la personne, de ses capacités comportementales, relationnelles, de
son bien être, de son épanouissement et même de son intelligence émotionnelle, dans
une quête de sens à la vie et d’adaptation à une société en mutation. » (réf. Cf page 60)

Les professionnels de la santé en seraient d’ailleurs les cibles privilégiées.

Ce rapport accueille les doulas avec méfiance en écrivant qu’ «en l’absence de tout
encadrement, ce nouveau métier d’accompagnement à la naissance sur le registre de
l’aide à la relation, pose un certain nombre de questions. …Il peut concerner des
publics vulnérables, qu’il s’agisse des doulas (…) ou des futurs parents (…)».

Ce rapport insiste sur les formations coûteuses et décrit tout particulièrement une
formation assurée par une praticienne en «rebirth».

Le rapport conclut «leur fonction peut les conduire à empiéter sur des compétences de
professions de santé, en particulier sur celles des sages-femmes, et les exposer à des
29

poursuites pour exercice illégal de la médecine. Leurs interventions peuvent se révéler


dangereuses pour la mère et l’enfant à divers égards». (ref. cf p.69)

Qu’est ce qui pourrait inscrire cette pratique comme profession ? (cf « statut juridique
des AN » / Vanina EGN 2006)

La création d’un statut spécifique, d’aide à la personne, hors cadre médical ou para
médical, hors bénévolat, avec une formation et une pratique référencées par le ministère
du Travail.

C’est en tout cas le souhait des doulas à l’heure actuelle, qui ont entrepris des démarches
en ce sens auprès des ministères concernés, en tentant d’établir un cursus de formation
de base.
30

DEUXIEME PARTIE - CHOISIR UN ACCOMPAGNEMENT NON


MEDICAL A LA NAISSANCE : L’AVIS DES PARENTS

Maintenant que nous cernons ce qu’est une doula et en quoi consiste son activité auprès
des couples, nous allons dans cette deuxième partie répondre à la problématique de ce
mémoire qui se définit comme telle : pourquoi les parents font-ils appel à une doula pour
les accompagner durant la grossesse, l’accouchement et le post-partum ? Mes
hypothèses de départ sont, premièrement que ces couples sont socialement isolés, et
deuxièmement, qu’ils recherchent principalement une continuité dans leur
accompagnement.

1. Matériel et Méthode

Pour répondre à cette problématique et vérifier mes hypothèses de départ, j’ai choisi
d’interroger les couples ayant fait ce choix d’accompagnement au travers d’entretiens
semi-dirigés.

Il me fallait entrer en contact avec ces couples susceptibles de répondre à mes questions.
C’est lors des 4èmes journées des Doulas à Paris (*) ainsi qu’aux Etats Généraux de la
naissance à Châteauroux (*) que j’ai pu rencontrer des doulas et des parents ayant eu
recours aux services d’une doula.

Trois doulas ont accepté de me communiquer les coordonnées de parents qu’elles


avaient accompagnés : une doula membre de l’association Doulas de France (DDF) et
deux accompagnantes à la naissance certifiés ALNA, dont une encore élève ALNA
lorsqu’elle a accompagné les parents dont elle m’a communiqué les coordonnées. J’ai pu
m’entretenir avec quinze des dix huit couples dont ces doulas m’avaient fourni les
coordonnées. S’ajoutent deux couples pour lesquels je ne suis pas passée par
l’intermédiaire des doulas.
31

J’ai donc réalisé dix sept entretiens sur la période de janvier à juillet 2007. Trois de ces
couples avaient fait appel aux services d’une doula pour deux grossesses. J’ai donc
interrogé ces couples sur un total de vingt accompagnements.

Sachant que selon le recensement de l’association DDF de 2006, cent trente huit
naissances ont été accompagnées par une doula. J’ai donc recueilli les témoignages de
14,5 % des accompagnements réalisés en France. Ces entretiens ont duré de trente
minutes à plus de deux heures, soit une durée moyenne d’entretien d’une heure. Pour
l’un de ces entretiens, j’ai rencontré la femme du couple. Les autres entretiens ont eu
lieu par téléphone, la répartition géographie de ces couples en régions Lyonnaise et
Parisienne ne me permettant pas de les rencontrer directement.

Ce sont les femmes qui ont répondu à mes questions, également celles concernant l’avis
de leur conjoint quant à cet accompagnement, sauf pour trois couples où j’ai pu
m’entretenir avec le conjoint. Chaque entretien s’est déroulé selon le même schéma :
après avoir indiqué qui j’étais, la raison de mon appel ainsi que l’objet de mon travail,
j’ai recueilli le consentement des femmes (et des hommes quand il y a eu lieu) pour ces
entretiens.

Après m’être assurée de leur disponibilité, j’ai expliqué que l’entretien avait deux grands
objectifs : premièrement savoir qui sont les parents qui font appel aux doulas, et
deuxièmement savoir pourquoi ils avaient fait ce choix.

En suivant la même trame pour chaque entretien, j’ai posé des questions, pour la plupart
ouvertes (amenant plusieurs réponses) sur les points suivants (Annexe V) :
● la situation du couple (âge, profession),
● le lien social (lieu de vie et entourage, relations familiales, isolement),
● l’expérience de la maternité (vécu) et le suivi médical,
● L’accompagnement de la doula vu par la femme (quand, comment, pourquoi) et
l’avis du conjoint.
32

2. Résultats

2.1 Profil des parents qui font appel à une doula

2.1.1 Situation
Les femmes interrogées avaient de 20 à 41 ans au moment où elles ont fait appel aux
services d’une doula. Leur moyenne d’âge sur ces 20 accompagnements est de 33 ans.
Toutes ces femmes vivaient alors en couple avec le père de leur(s) enfant(s).

16 femmes sur 17 ont suivi des études supérieures et elles travaillaient toutes au moment
de la grossesse.
Selon la classification des catégories socioprofessionnelles de l’INSEE (Ref), 11 d’entre
elles exercent une activité de cadre ou profession intellectuelle supérieure, 5 exercent
une profession intermédiaire et 1 est employée. Il en est de même pour leurs conjoints,
ils travaillent tous, et toujours selon l’INSEE, ils rentrent dans la même catégorie que
leurs compagnes respectives sauf le conjoint de la femme employée qui lui est cadre
donc dans la catégorie « profession intellectuelle supérieure ».
On peut noter que 3 de ces femmes travaillent dans l’enseignement et 3 dans le domaine
de la santé.

Tous ces couples appartiennent donc à la classe moyenne ou supérieure de la société


française.

2.1.2. Lien social


Dans cette partie de mes entretiens, j’ai cherché à analyser brièvement le réseau social
de chaque couple (leurs relations sociales) et le soutien social (soutien affectif,
informatif et pratique) que ces couples sont susceptibles de recevoir.

En ce qui concerne le lieu d’habitation des couples interrogés, une majorité vit en ville
(le plus souvent en appartement), et n’entretiennent que très peu voir aucun rapport avec
leurs voisins ou les commerçants alentours. Ils sont 10 sur 17 dans ce cas. Les 7 autres
couples habitent en campagne ou dans un village. Pour ce qui est de leur intégration à
33

leur lieu de vie, 6 couples sur 17 ont emménagé depuis moins de 3 ans dans leur
habitation et s’y sentent plus ou moins bien implantés. 4 couples ont emménagés depuis
plus de 10 ans là où il vivent et se sentent « chez eux ».

Lorsqu’on les interroge sur leur famille, 10 couples sur 17 déclarent résider loin des
différents membres de la famille ou alors que ceux-ci n’étaient pas disponibles durant la
grossesse. Ils n’ont donc pas été proches de leur famille au moment de la grossesse.

Les 7 autres couples déclarent habiter près de leur famille et entretiennent de bons
rapports avec elle. Cependant, pour ceux qui se sentent proches de leur famille, la
plupart déclarent spontanément que malgré d’excellentes relations, ils ne veulent pas
parler de tout avec leur entourage car ils sont « trop impliqués affectivement », qu’il
« n’y a pas assez de distance » et qu’ils sont « trop dans le jugement ».

9 couples sur 17 déclarent s’être sentis isolés durant la grossesse (géographiquement,


moralement, socialement).
34

D’après les témoignages, c’est donc un peu plus de la moitié des couples interrogés qui
se sont sentis isolés de leur entourage amical et familial durant la grossesse. Ces données
viennent donc confirmer ma première hypothèse de départ qui était que les parents font
appel aux doulas car ils reçoivent peu de soutien social. Cependant, pour un peu moins
de la moitié de ces couples d’autres facteurs doivent rentrer en jeu dans leur choix
d’accompagnement.

2.1.3. Expérience et vécu de la maternité


Les femmes interrogées ont toutes des expériences variées de la maternité. Lorsqu’elles
ont fait appel à une doula pour la première fois, 11 étaient des primipares, 1 deuxième
pare, 4 troisièmes pares et 1 quatrième pare. Trois des primipares ont également refait
appel à une doula pour leur seconde grossesse, ce qui ajoute 3 accompagnements de
deuxième pare à mes 17 autres accompagnements.

Les autres femmes interrogées n’ont pas mené de grossesse à terme depuis leur
accompagnement sauf une qui n’a pas choisi de refaire appel aux services d’une doula.
35

Au moment de mes entretiens, une de ces femmes était à 35 semaines d’aménorrhée et


les autres avaient accouché en moyenne depuis 2 ans et 1 mois. Les enfants issus de ces
grossesses avaient de 6 mois à 5 ans.

Parmi les 6 multipares ayant fait appel à une doula, 4 ont un vécu difficile de leurs
grossesses, accouchement ou suites de couches précédents qui n’ont pas été
accompagnés par une doula. Elles ont de lourds antécédents pathologiques
obstétrico-pédiatriques tels que mort fœtale in utero à terme, IMG tardive, malformation
à la naissance ou hospitalisation de leur enfant en réanimation néonatale suite à un
accouchement difficile.

Ces antécédents ont entraîné des angoisses pendant la grossesse et l’accouchement qui
ont suivi, et pour lesquels elles ont fait appel à une doula. Pour ces 4 femmes c’est
d’ailleurs l’une des raisons principales qui les ont faites choisir l’accompagnement de la
doula.

Le manque d’expérience de la maternité semble intervenir dans le choix de la doula


puisque ici, la majorité des accompagnements a concerné des primipares. Les
antécédents difficiles, douloureux semblent intervenir également dans ce choix.

2.1.4. Suivi médical


En ce qui concerne le suivi de ces 20 grossesses accompagnées par une doula, le premier
constat est qu’elles ont toutes été suivies par un professionnel de santé, sage-femme ou
médecin.

9 grossesses ont été suivies par un gynécologue-obstétricien et 11 par une sage-femme.


Parmi les suivis sage-femme, on trouve 1 sage-femme hospitalière et 10 sages-femmes
libérales dont 8 pratiquant l’accompagnement global (réf.) et les accouchements à
domicile.
36

On peut noter que 2 femmes étaient initialement suivies par un gynécologue et suite à
leur rencontre avec la doula, ont fait suivre leur grossesse par une sage-femme car cela
correspondait plus à leurs attentes quant à la conception de la grossesse comme
« quelque chose de naturel et pas comme une maladie » et aussi pour le « meilleur
relationnel » avec la sage-femme.

A l’issue de ces 20 grossesses, 6 accouchements ont eu lieu à domicile, dont 1


sans la présence de la doula, et 14 à l’hôpital ou en clinique dont 2 sans la
présence de la doula. Parmi ces 14 accouchements en structure, on compte 1
césarienne et 5 accouchements sous anesthésie péridurale.
37

En ce qui concerne la préparation à la naissance, l’ensemble de ces femmes en ont suivi


une avec une sage-femme (libérale ou hospitalière) durant leur(s) grossesse(s) sauf une
qui n’a pu le faire pour des raisons d’organisation.
Certaines de ces femmes ont également suivi des cours de yoga, d’aquagym ou de
sophrologie durant la grossesse, en plus de cours de préparation à la naissance.

La majorité de ces femmes avaient rédigé un projet de naissance afin de préciser leurs
souhaits pour la naissance de leur enfant. 14 grossesses ont fait l’objet d’un projet de
naissance dont 2 suite à la rencontre avec la doula.

On s’aperçoit donc que ces femmes ont toutes fait suivre leur grossesse par un
professionnel de santé et ont bien compris que la doula n’avait aucune compétence pour
suivre une grossesse.
On constate également que même si elles discutent de la grossesse, l’accouchement et
l’après bébé avec la doula, cela ne remplace pas les séances de préparation à la naissance
d’une sage femme. Pour la majorité de ces femmes, la grossesse et l’accouchement
avaient été pensés avant qu’elles ne fassent appel à une doula, et elles avaient en
majorité rédigé un projet de naissance mais pas forcément sous l’impulsion de la doula.
38

2.2 L’accompagnement de la doula

Après avoir recueilli les informations sur ces couples synthétisées plus haut, je leur ai
demandé à quel moment de leur grossesse et pour quelle(s) raison(s) ils avaient fait
appel à une doula.

2.2.1 A quel moment, comment


J’ai pu établir que pour ces 20 grossesses, l’âge moyen de la première rencontre avec la
doula a été de 4 mois et demi de grossesse. Les premiers contacts avaient eu lieu entre 3
et 7 mois et demi de grossesse.

Pour 8 femmes, la doula leur a été recommandée par une amie ou via une association
(association soutenant l’allaitement maternel ou association autour de la parentalité).

6 femmes ont contacté une doula sur les conseils d’une sage-femme ou d’un médecin et
4 ont trouvé une doula via Internet, grâce à un article de magazine ou un prospectus. Les
2 restantes ont recontacté la doula qui les avait accompagnées pour une première
grossesse.
39

Toutes sauf 4 avaient déjà entendu parler des doulas avant d’en contacter une. Parmi les
4 qui n’en avaient jamais entendu parler, 3 avaient demandé les services d’une doula sur
la demande de la sage-femme.

On peut donc voir que les femmes ont contacté la doula assez tôt dans la grossesse, que
la plupart en avaient déjà entendu parler avant et y étaient favorables.

2.2.2 Motivations des femmes


En ce qui concerne les motivations de leur choix, les femmes m’ont spontanément donné
de 1 à 4 réponses. On peut regrouper ces réponses en 3 grands groupes, repris dans ce
diagramme.
40

2.2.2.1. Continuité et disponibilité


La première raison évoquée par les femmes pour expliquer leur choix a été la recherche
d’un accompagnement dans la continuité, par quelqu’un de disponible. Pour certaines,
l’idée qu’elles ne connaîtraient pas la personne qui sera présente à l’accouchement les
angoissait beaucoup. Elles souhaitaient être accompagnées par « quelqu’un qui les
connaît et qu’elles connaissent », un accompagnement dans « la globalité de leur
personne ».

5 de ces femmes déclarent avoir fait appel à une doula car elles n’avaient pas
trouvé de sage-femme pratiquant l’accompagnement global (ref) pour suivre leur
grossesse, 3 autres car elles ont été déçues par leur première rencontre avec le
praticien qui suivait leur grossesse, qu’elles ont eu « une première rencontre
déconcertante » : elles cherchaient quelqu’un de « plus disponible », plus « à
l’écoute ». Elles avaient besoin de sentir qu’une personne était disponible pour
elles, une « présence » pendant la grossesse et surtout l’accouchement. Elles
voulaient être sûres que quelqu’un pourrait rester avec elle pendant toute la
durée du travail, sans interruption, notamment pour « les aider à face à la
douleur ».
41

2.2.2.2 Isolement et besoin d’une personne extérieure


La deuxième raison la plus citée par ces femmes a été l’isolement. Elles ont fait appel à
une doula car elles se sentaient « assez seules », isolées. Certaines n’avaient pas leur
famille auprès d’elles (éloignement géographique) ou n’avaient pas de famille dont elles
se sentaient assez proches pour partager l’intimité de leur grossesse. L’éloignement
géographique ou affectif voire l’absence de leur propre mère était souvent citée.
D’autres encore recherchaient la présence d’une « amie », d’une « sœur », qu’elles ne
trouvaient pas ailleurs.

2 de ces femmes sont d’origine étrangère et arrivées depuis peu en France au moment de
leur grossesse : elles ne maîtrisaient pas bien le français et étaient par conséquent assez
isolées.

Une autre de ces femmes est arrivée dans une région où elle ne connaissait personne à 4
mois de grossesse. Une autre a du rester alitée dès le début de sa grossesse et ne trouvant
ni sage-femme libérale ni sage-femme de PMI pour rompre son isolement, s’est
finalement tournée vers les services d’une doula.

D’autres femmes, malgré leur entourage, avaient besoin d’être accompagnées par
« quelqu’un d’extérieur », qui ne pouvait être ni leur mari, ni une personne de leur
famille. La trop grande implication émotionnelle, affective de leurs proches rendaient
leur soutien contre-productif. Cette proximité avec leur entourage créait des « tensions »
notamment pour celles qui avaient vécu la perte d’un enfant (mort fœtale, IMG…). Leur
entourage se trouvait alors dans l’incapacité de les soutenir.

J’ai donc demandé à chacune de ces femmes si une autre personne de leur entourage
aurait pu jouer le rôle de la doula.

Elles sont 15 à me répondre que non, la doula ne pouvait être que quelqu’un d’extérieur
car « la doula n’absorbe pas les souffrances comme quelqu’un de la famille », elle doit
être « déconnectée émotionnellement ». Les proches (familles et amis) ont des liens
42

affectifs avec le couple et « projettent leur histoire sur la leur ». « La doula n’est pas
investie dans le couple ou la famille ».

Pour elles, la doula est forcément extérieure à la famille, au réseau d’amis, care elle doit
être « neutre », « sans jugement ». De plus, « on ne dit pas les mêmes chose à sa famille
qu’à la doula », « on ne lui pose pas les mêmes questions ».

Ces femmes soulignaient aussi le fait que personne dans leur entourage n’avait autant
d’expérience ou de formation que la doula. « Pour être doula, il faut avoir des
connaissances, de l’expérience » que n’a pas l’entourage.

Elles insistent sur l’importance de la formation et de l’information de la doula sur tout ce


qui a trait à la périnatalité que n’ont pas leurs propres mères ou femmes de leur
entourage.

Les deux autres femmes qui considèrent qu’un autre membre de leur entourage aurait pu
jouer le rôle de la doula m’ont précisé qu’au moment où elles avaient fait appel à la
43

doula, cette autre personne était dans l’incapacité de les accompagner : « c’est le rôle de
l’entourage mais là, ce n’était pas possible ».

2.2.2.3. Soutien émotionnel


La troisième raison la plus souvent évoquée a été la nécessité d’un soutien émotionnel
durant la grossesse, d’un soutien « moral », d’une « aide psychologique ».

Elles évoquaient le « besoin de parler », « besoin de se confier sur leurs doutes » ou


« d’être rassurées ». Pour les primipares surtout, la grossesse avait généré de « fortes
angoisses », notamment sur leur « incapacité à être mère » ou « la normalité des
changements qui s’opéraient en elle ». Elles cherchaient « quelqu’un à qui se confier ».
L’une de ces femmes m’a dit qu’elle « ne voulait pas une sage-femme mais quelqu’un
pour parler ». D’autres voyaient la doula « un peu comme un coach » qui pourrait les
soutenir durant toute leur maternité à travers un « accompagnement personnalisé ».

Pour répondre à ce besoin de soutien émotionnel, beaucoup m’ont souligné l’importance


que la doula soit elle même une femme et une mère. Elles m’ont expliqué l’importance
de l’expérience de cette femme déjà mère pour les accompagner. Elles souhaitaient être
accompagnées par une autre femme « qui est déjà passée par là », un accompagnement
qui se situe dans la « transmission de femme à femme ».

« Etre accompagnée par une doula, c’est rentrer dans un réseau, savoir comment les
autres femmes ont fait ».

La doula représente une sorte de « substitut maternel » ; ce rôle ne pouvant être joué par
la propre mère de la femme en raison du « décalage générationnel ».

Pour les 4 femmes ayant des antécédents difficiles d’accouchement, ce soutien


émotionnel apporté par la doula a été un des éléments déterminant leur choix. Elles
avaient besoin d’être rassurées, et leur entourage, trop affecté par les grossesses
douloureuses précédentes, ne pouvait les rassurer.
44

Pour ces 4 femmes d’ailleurs, les 3 raisons principales qui ont fait choisir une doula aux
autres femmes rentrent en compte :

Elles recherchent une continuité par rapport à leur histoire, un soutien émotionnel et
elles cherchent à rompre un certain isolement aussi car, malgré la présence de leur
entourage, les moments douloureux qu’elles ont vécu pour leurs grossesses et
accouchements précédents ont également affectés cet entourage. Leurs conjoints ou leurs
propres mères, évitant de transmettre à la future maman leurs angoisses et leur chagrin,
s’en éloignent un peu, « chacun est isolé dans sa peine ».

Dans ces cas particuliers, la continuité de l’accompagnement était une nécessité pour ces
femmes. Il fallait que quelqu’un connaisse leur histoire le jour de l’accouchement car
« elles ne se voyaient pas expliquer qu’elles avaient perdu un enfant lors de
l’accouchement, et qu’elles redoutaient particulièrement les moment qui allaient suivre,
entre deux contractions en arrivant à la maternité ». De plus leurs antécédents les
avaient fait choisir une maternité de niveau III pour accoucher, car elles ne voulaient pas
« être séparées de leur enfant si jamais il devait avoir besoin de soins spécifiques ». Par
conséquent, la taille de l’équipe et l’organisation ne permettait pas l’accès au plateau
technique à une sage-femme libérale pratiquant l’accompagnement global. Elles avaient
donc choisi d’être accompagnées par une doula.

2.2.2.4 Autres raisons


On peut également noter que 3 femmes ont fait appel à une doula « pour avoir plus de
liberté et d’autonomie pour leur accouchement ». Elles cherchaient à travers la doula
une sorte de « médiateur » entre le personnel soignant et elles, tout particulièrement à
l’accouchement.

L’une souhaitait éviter une anesthésie péridurale par la présence continue qu’offrirait la
doula. Une autre ne souhaitait pas « être écrasée par le médical » pour la grossesse et
l’accouchement de ses jumeaux, et pensait que la présence d’une doula lui permettrait
d’être soutenue dans ses choix. Pour elle, le simple fait d’avoir choisi une doula pour
être accompagnée durant l’accouchement, signifiait à l’équipe médical qu’elle ne
45

souhaitait pas « subir son accouchement » et que la sage-femme la « laisserait


tranquille » et « s’investirait différemment ». La troisième avait au vu de ses
antécédents, une « grossesse à risque » et n’avait pas « envie qu’on en rajoute ». Elle
comptait sur la doula pour la soutenir face à cette « médicalisation forcée » suite à la
perte de son enfant, mort in utero.

La doula pourrait « faire le lien », « transmettre l’histoire de la femme » au personnel la


prenant en charge ainsi que ses souhaits et attentes pour la naissance de son enfant. La
doula pourrait « traduire le langage médical ».

Une autre femme a même indiqué qu’elle souhaitait la présence d’une doula lors de
l’accouchement pour des raisons de « sécurité ». La doula pourrait jouer un rôle de
« veille et d’alerte auprès de la sage-femme » durant l’accouchement, expliquant que
pour la naissance de son 1er enfant, les sages-femmes étaient « débordées » et qu’elles
n’avaient « aucun temps à lui consacrer » car il y avait trop de naissances simultanées.

2 femmes cherchaient également une source d’informations en faisant appel à la doula et


2 autres déclarent avoir eu recours à ses services en raison de leur âge (l’une très jeune
20 ans, l’autre plus âgée : 38 ans).

A noter que 4 des femmes que j’ai interrogé ont eu recours aux services d’une doula à la
demande de la sage-femme, et qu’elles n’en ressentaient pas le besoin à ce moment là.

Il s’agissait de femmes primipares ayant fait le choix d’un accompagnement


global et d’un accouchement à domicile avec une sage-femme libérale. Ces
sages-femmes en question demandaient alors la présence de la doula à toute
primipare souhaitant accoucher à domicile. Elles fonctionnaient en binôme avec
la doula et leurs rôles étaient donc répartis entre elles comme convenu au
préalable.
46

2.2.3 L’avis des pères

Après avoir recueilli les motivations des femmes, je leurs demandais quel avait été l’avis
de leurs conjoints sur les services de la doula et comment ils avaient vécu cet
accompagnement. Pour 3 de ces hommes, j’ai pu leurs poser ces questions directement.

Pour ces 20 grossesses, c’est toujours sur l’initiative de la femme que ces couples ont
faite appel à une doula, sauf pour un couple où c’est l’homme qui sur les conseils d’un
médecin, l’a proposé à sa compagne. Les hommes ont dans l’ensemble accueilli cette
proposition assez favorablement, sans pour autant en ressentir personnellement le
besoin.
3 ont d’abord été « septiques » vis-à-vis de la doula, ne comprenant pas bien son rôle. Ils
trouvaient « l’idée farfelue ». Ils avaient « l’impression que la doula faisait le travail de
la sage-femme » et trouvaient ses services trop chers. Cette impression est partagée par
les couples qui ont fait appel à une doula sur la demande de la sage-femme, lors d’une
démarche d’accouchement à domicile et de suivi global. Comme leurs compagnes, ce
n’est que dans un deuxième temps, une fois qu’ils ont pu rencontrer la doula, qu’ils ont
apprécié ses services. Parmi ces hommes septiques, il y en a même un qui a témoigné
pour soutenir l’activité des doulas.

Pour la quasi-totalité de ces hommes (15 sur 17), la présence de la doula les a rassurés.
Certains étaient « perdus » face à la grossesse, l’accouchement surtout. La présence
d’une doula a été « réconfortante », « déculpabilisante ». Par sa disponibilité et la
relation de confiance qu’elle avait établie avec le couple, elle permettait à l’homme de
« parler et de se confier librement ». La plupart des couples ont rencontré la doula à 3
-la femme, le père et la doula- plusieurs fois durant la grossesse. Quelques-uns ont
même rencontrés la doula seuls. Pendant la grossesse, elle a permis à ces hommes de
« se décharger de leurs angoisses et de certains souvenirs », notamment pour ceux qui
avaient vécu des situations difficiles (IMG, MFIU,…). Certains ne voulant pas
« rajouter leurs angoisses à celles de leurs femmes », étaient restés « un peu en retrait »
jusqu’à l’intervention de la doula.
47

Pour un des couples, l’accompagnement de la doula a même été motivé par la situation
du papa, même si c’était aussi sur l’initiative de la femme qu’ils avaient fait appel à la
doula. Pour le père, il s’agissait d’un premier enfant alors que c’était le troisième pour sa
compagne. Selon elle, « il a pu poser toutes les questions qu’il a voulu à propos de la
grossesse, de l’accouchement ». Il a également pu « reparler de l’accouchement et de
l’arrivée du bébé après ».

Pour bon nombre d’entre eux, la doula a été une aide lors de l’accouchement. Ils disent
avoir été plus « sereins », plus « à l’aise », « plus cool car ils n’avaient aucune
obligation ».

5 de ces hommes estiment que l’accompagnement de la doula était nécessaire car leur
compagne avait besoin d’une femme à ses côtés pendant la grossesse et à
l’accouchement ; que c’était un « boulot de femme », qu’elles se racontaient des
« histoires de femmes ». Sans se sentir exclu, ils estimaient qu’ils n’apportaient pas les
mêmes choses à leurs compagnes.
Ces hommes étaient impliqués dans la grossesse et présents à l’accouchement. Seul un
des pères n’a pas souhaité assister à l’accouchement, sur décision conjointe du couple.
Certains hommes déclaraient que la doula les avait aidés à « comprendre leurs femmes
au moment de l’accouchement », que leurs compagnes étaient « dans un autre monde ».
2 d’entre eux m’ont déclarée qu’ils « auraient presque pu ne pas être là à
l’accouchement ». Ils n’ont pas eu le sentiment de pouvoir entièrement les soutenir.
Leurs compagnes étaient « déconnectées » à ce moment là, et seule la présence d’une
autre femme leurs est apparue comme nécessaire.
Un des pères a eu « l’impression qu’on lui prenait sa place » selon sa femme. Pour elle,
elle avait tout aussi besoin de son soutien au moment de la naissance de leur enfant que
du soutien de la doula.

Hormis les sentiments mitigés de ces 3 pères, l’accompagnement de la doula a été vécu
très positivement. Elle leurs a apporté le soutien nécessaire pour « jouer leur vrai rôle de
père » et en leur permettant de soutenir leurs compagnes. Pour les couples que j’ai
48

interrogé, la doula a accompagné la future mère mais aussi le futur père. C’est un réel
accompagnement du couple.

2.2.4. Conclusion
Après analyse de ces entretiens et étant donné le faible échantillon de couples interrogés,
je ne peux extrapoler ces résultats à l’ensemble des parents faisant appel à une doula.
Cependant, j’ai pu établir quelques points communs à tous ces couples. En effet, tous
appartenaient à la classe moyenne ou supérieure de la société et travaillaient tous. La
majorité de ces couples s’est sentie isolée durant la grossesse et les autres, malgré un
entourage présent, ne pouvaient être soutenus par leurs proches.

Les femmes interrogées pouvaient se caractériser soit par une faible expérience pour les
primipares, soit par un mauvais vécu de leurs grossesses et accouchements précédents
pour les multipares. Il s’agissait bien souvent de ces femmes étant assez informées dans
le domaine de la périnatalité ou membres de réseau d’usagers ; la plupart connaissaient
l’existence des doulas avant leur grossesse.

Un tiers de ces femmes ont accouché à domicile ; c’est une forte proportion en
comparaison avec la population générale (environ 1‰ d’accouchements à domicile).
Pour autant, toutes les femmes qui ont fait appel à une doula n’étaient pas à la recherche
d’un accouchement dit « naturel ».

Les raisons évoquées pour avoir fait appel à une doula étaient de 3 ordres : la continuité
des soins (globalité de l’accompagnement), l’isolement et le soutien émotionnel. Bien
souvent, la doula a joué un rôle que personne d’autre dans leur entourage n’aurait pu
jouer et elle a également fait office de figure maternelle. Quelques parents ont également
fait appel à la doula comme source d’informations ou comme médiateur avec le monde
médical. La doula a aussi été d’un grand soutien pour la majorité des pères.
49

Mes hypothèses de départ, à savoir que les couples faisaient appel aux doulas car
premièrement, ils étaient socialement isolés et deuxièmement ils recherchaient une
continuité dans l’accompagnement, ont donc été confirmées. Cependant, les raisons qui
ont amené ces couples à s’offrir les services d’une doula sont plus variées. Pourtant, les
doulas interviennent dans l’histoire de chaque couple, le plus souvent pour répondre à un
besoin.

Nous allons maintenant dans une troisième partie confronter ces résultats au contexte
actuel de notre société et tenter de situer l’apparition des doulas auprès des couples.
50

TROISIEME PARTIE - COMMENT SITUER CE CHOIX


D’ACCOMPAGNEMENT NON MEDICAL A LA NAISSANCE DANS LE
CONTEXTE ACTUEL

1. Développement de nouveaux métiers

1.1. Les métiers d’aide à la personne

1.2. Les nouvelles pratiques de santé

2. L’évolution de la société

2.1. L’individu

2.2. La demande pour soi

3. L’offre de soin en périnatalité

3.1. Disparition des maternités de proximité

3.2. Continuité du personnel soignant

3.3. Possibilité de soutien continu durant le travail


51

Annexe I : Programme des 3 journées de formation Paramanadoula

- physiologie de la naissance

- premiers éléments de base obstétriques

- l’utilisation de l’eau durant l’accouchement

- les échographies

- les accouchements provoqués

- la présence du père à l’accouchement

- la vie fœtale

- la nutrition durant la grossesse

- les conséquences à long terme de notre façon de naître

- les différents tests proposés à la femme enceinte

- l’allaitement

- la doula en Angleterre…
52

Annexe II : Formation Mère et Monde

- le rôle et la philosophie de l’accompagnante

- le contexte de cette profession

- comment se faire accepter par le milieu hospitalier

- la relation d’aide

- le premier contact téléphonique

- l’état de santé général de la femme enceinte

- histoire familiale de la femme enceinte, date prévue de l’accouchement et


accouchements précédents

- l’A.V.A.C. (Accouchement Vaginal Après Césarienne)

- le bébé en siège

- hygiène de vie et alimentation durant la grossesse

- sexualité durant la grossesse et contraception

- interventions faites au nouveau né

- les protocoles hospitaliers

- les interventions médicales et leurs alternatives

- le rôle de l’accompagnante

- projet de naissance

- importance de la préparation à la naissance

- les peurs, la douleur

- douleur : perception du père, de la mère

- déroulement d’un accouchement, phase du travail

- rôle de la mère, du père, de l’accompagnante pendant l’accouchement

- premier contact avec le bébé

- massage périnéal
53

- notion d’adaptation néonatale

- les soins du nouveau né

- allaitement maternel, allaitement artificiel

- rythmes du nouveau né, pleurs

- dépression post partum

- cas spéciaux

- visite maternité (Montréal)

- la manière de rejoindre la clientèle

- le contrat parent /accompagnante

- les dossiers de la clientèle


54

Annexe III : Détail d’autres formations

En France

- Les « Rencontres de Châteauroux », du docteur Max PLOQUIN qui fut


obstétricien à la clinique Montaigne de CHATEAUROUX

Il s’agit d’une formation sur la préparation à la naissance, telle qu’elle a pu être


proposée à la clinique Montaigne. Elle se déroule sur 2 jours et s’adresse aux
sages-femmes, élèves sages-femmes, accompagnatrices à la naissance, doulas et
futurs parents.

- Formation d’Education Prénatale

Il s’agit d’une formation destinée aux doulas avec des informations sur la
pré-conception et la conception, la grossesse, l’accouchement, l’après naissance
et l’activité de la doula.

Parmi les formateurs, on trouve : un gynécologue accoucheur, le docteur Max


PLOQUIN, un praticien de santé "formé en doula", Philippe DARGERE, une
hygiéniste naturopathe également "formée en doula", Eugénie EMORINE.

La formation complète s’étend sur 12 jours et coûte 1.000 euros.

(ref. dépliant & sites)

- Organisation de Séminaires d’Evolution (OSE)

Il s’agit d’une formation professionnelle de «praticien en respiration consciente


et décodage émotionnel», accessible aux doulas pour devenir praticiennes en
«rebirth» (littéralement «renaissance»).

Cette formation est organisée sur la base d’une prise de contact suivie de neuf
séances correspondant symboliquement aux neuf mois de gestation. Le concept
de «rebirth» développe l’idée que nos limitations et nos peurs sont liées aux
circonstances de notre gestation et notre naissance.

Il convient de préciser que cette formation est pointée par la Mission


Interministérielle de Vigilance et de Lutte Contre les Dérives Sectaires
(MIVILUDES)
55

(ref MIVILUDES site www.ose-rebirth.com consultation mai 2007)

A l’Etranger

- Formation en SUISSE pour doulas, comprenant 120 heures de cours autour de


l’accompagnement émotionnel du couple, la physiologie de la grossesse,
l’accouchement et l’allaitement, proposée par les doulas suisses (en français pour
la région suisse romande et ses environs). Le coût de cette formation est de 2.000
euros.

(ref http : //www.doula.ch/ et cahier DDF

- Nurturing Birth, formation pour doula proposée par l’association Doula UK en


Grande Bretagne. Elle offre 2 formations : celle de « birth doula » (doula pour la
grossesse et la naissance) et celle de « postnatal doula » (doula pour le post
partum et l’allaitement). Ces formations durent 2 ou 3 jours, sont ouvertes à
toutes les femmes, et coûtent 100£ par jour (environ 150 euros par jour).

(ref doula.uk et dépliant Nurturing birth)

- DONA International

Il s’agit de la formation proposée par la première organisation mondiale de


doulas qui est établie aux USA. Comme en ANGLETERRE, deux formations
sont proposées pour les « birth doulas » et les « postnatal doulas ».

L'organisation DONA International propose donc 2 certificats pour ces 2 types de


doulas. Les formations sont assurées par des doulas expérimentées, pour un
volume horaire d'un peu plus de 25 heures de théorie, assorties de travaux
pratiques et de stages auprès de doulas expérimentées(8). Le contenu de ces
formations a été établi par les fondateurs de DONA, dont des médecins, selon les
résultats des études menées sur les bienfaits de l'accompagnement durant la
naissance afin que les femmes ainsi formées puissent apporter un soutien
physique et émotionnel aux parturientes.

(ref DONA.International www.DONA.org mai 2007


56

Annexe IV : Détail de la formation théorique Doulas de France

- Positionnement, Ethique et Philosophie de la doula -16 heures-

Contexte juridique

Ethique, valeurs et qualités d’une doula

Limites personnelles et professionnelles, cadre de l’exercice

Les bienfaits de l’accompagnement à la naissance

La création d’un réseau de soutien autour des parents

Le travail en collaboration avec les professionnels de santé

- Les neuf mois de la grossesse, la naissance, notions de base en anatomie, le


déroulement de l’accouchement – 16 heures

Le comportement de la femme qui accouche

Le contexte émotionnel

Les présentations optimales du bébé

Notions d’urgences obstétricales

Positions pendant le travail et l’expulsion, mesures de confort pour le travail et


l’accouchement

Comment créer un environnement rassurant, sécurisant

- Le Projet de naissance -8 heures-

Coopération et partage avec l’équipe médicale, la sage femme ou le médecin

Les limites dans l’exercice de la doula

L’élaboration et la présentation du projet de naissance

Notions sur les gestes obstétricaux couramment pratiqués en France

- Relation d’aide -32 heures-

Ecoute active, concept de l’aide centrée sur la personne

Notions des différentes techniques de communication basées sur l’écoute et l’empathie


57

Travailler dans le cadre de la transmission de « femme à femme », de « parent à


parent »

Questionnement sur sa pratique, travail sur ses propres accouchements et son vécu de
mère (recul sur sa propre expérience)

La place de la doula pour accompagner la famille

- Besoins innés du bébé et de la mère pendant les 6 premières semaines et le processus


de l’attachement -16 heures-

Comprendre les besoins spécifiques et les compétences du nouveau-né

Redonner la confiance en soi et en ses capacités innées au couple

Place de la doula dans la relation triangulaire maman-papa-bébé

L’organisation matérielle des premières semaines

La prématurité, le deuil

Le processus d’attachement et le concept de continuité dans la relation parents-bébé,

Notion du concept de « l’attachement dit sécure » (toucher et porter, maternage


proximal ou distal)

Les premiers jours à la maison

- Allaitement –16 heures-

La physiologie de la lactation

L’importance de l’environnement et du soutien (famille, professionnels, associations)

Les mythes et réalités autour de l’allaitement

Douleurs et difficultés (positions pour allaiter, les crevasses, faire face aux baisses de
lait…)

L’état émotionnel de la femme allaitante

Comment aider au moment de la reprise du travail

L’alimentation au biberon

- Installation et modalités dans l’exercice –8 heures-


58

Exemple du « contrat », de l’engagement entre la doula et les parents

Limites juridiques

Comment s’organiser et prévoir sa disponibilité, impact sur la vie de famille, sur sa vie
de Femme

Où trouver du soutien pour la doula (réseau, binôme, associations, débriefing de son


exercice)

Connaissance des publications utiles (Sites Web / listes de lectures recommandées /


attitude de partage avec d’autres doulas)

- Les difficultés maternelles –16 heures-

La dépression du post-partum

Le syndrome du choc post-traumatique

Comment proposer un débriefing de l’accouchement aux parents

Comment créer et collaborer en réseau

- Le couple, la sexualité, la place du père –16 heures-

Transformation du couple en couple parental

Le rôle de chacun au sein de la famille

La relation du couple, les abus, les différentes composantes de la sexualité

Notions des différentes méthodes de contraception

La place des autres médias


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Annexe V : Trame de l’entretien téléphonique

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