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Conservation et utilisation durable des ressources génétiques


des espèces ligneuses alimentaires prioritaires de l’Afrique subsaharienne

Sclerocarya birrea
Prunier d’Afrique

Prunier d’Afrique dans un parc agroforestier. © B. MUOK

Nom commun Nom scientifique Synonymes Famille


Prunier d’Afrique (français). Sclerocarya birrea Commiphora subglauca Engl.; Anacardiaceae
(A. Rich.) Hochst. Poupartia caffra (Sond.) H. Perrier;
Marula, maroola plum, jelly plum,
Sclerocarya caffra Sond.; Sclerocarya
maroola nut, cat thorn, morula, cider
caffra Sond. var. dentata Engl.;
tree, and elephant tree (anglais).
Sclerocarya caffra Sond. var.
blongifoliata Engl.; Sclerocarya
■ Benard O MUOK schweinfurthiana Schinz.
African Centre for Technology Studies (ACTS), PO
Box 45917-00100 GPO, Nairobi, Kenya.
■ Sibonginkosi G KHUMALO
Bioversity International, PO Box 30677- 00100
Nairobi, Kenya. Ce dépliantmeten évidence le potentielnutritionneletsocio-économique du prunier d’A-
■ Wubalem TADESSE frique etfournitdesinformationsvisantà aider lesacteursimpliquésdanssa gestion. Ilmet
Ethiopian Institute of Agricultural Research, PO l’accentsur la conservation de la diversité génétique etsur la promotion de l’utilisation du-
Box 2003, Addis Abeba, Éthiopie. rable du prunier d’Afrique. Ilprésente une synthèse desconnaissancesactuellesrelatives
■ Shiferaw ALEM à cette espèce. Les recommandations faites doivent être considérées comme un point de
Ethiopian Institute of Agricultural Research, départ: ellesserontaffinéespar la suite en fonction desconditionslocalesou régionales.
Forestry Research Center, PO Box 30708, Addis
Abeba, Éthiopie Les directives seront actualisées au gré des nouvelles informations obtenues.
Sclerocarya birrea Prunier d’Afrique Sclerocarya birrea Prunier d

Groupe Nom
socioculturel Pays vernaculaire
Zoulou/ndebele Afrique du Sud Umganu
Tswana Botswana Morula
Sénoufo/tusia Burkina Faso Kegue
Burkina Faso, Nobéga,
Mooré Ghana nobiga
Peul Cameroun Edi, dougouas
Kampé, diko,
Koma Cameroun zagbé, yakgo
Mofou Cameroun Lalaway
Toupouri Cameroun Teengui
Cameroun,
Arabe Mauritanie, Homeid
Nigeria
Cameroun, Danya, danyaá, dama
Haoussa Niger, Nigeria (tree), ludu, lule, nunu (fruit)
Amhara Éthiopie Gomales, kummal
Mursi Éthiopie Cobwe
Oromo Éthiopie Didigssa,didisa/didissa
Aire de répartition du
Tingrinya Éthiopie Abengl, abengul, gwmel
prunier d’Afrique
Konnan, kunan, kuntan,
Gambie, Guinée, S. birrea ssp. birrea en vert
Mandingue kuntango, Kuntan-jawo
Mali, Sénégal kuta, mguna S. birrea ssp. caffra en rouge
S. birrea ssp. multifoliata en bleu
Gambie,
S. giletti en rose
Peul Guinée-Bissau, Béri, eedere, eede, eri,
Niger, Nigeria, hédéhi, hédi, kédé
Sénégal
Diola Gambie,Sénégal Findibasu Répartition géographique
Wolof Gambie,Sénégal Bér, bièt, bir, bör
Dagbani Ghana Mu-mugga Le prunier d’Afrique est largement présent sur la
Nankanni Ghana Nanogba
Sisaala Ghana Burunogo majeure partie du continent africain. On le trou-
Boran Kenya Didissa ve dans 29 pays, de l’Éthiopie au Sénégal et du
Digo Kenya Mngongo Niger à l’Afrique du Sud.
Kamba Kenya Muua
Luo Kenya Ngongo
Maasaï
Meru
Kenya
Kenya
Ol-mangwai
Mura
Importance et usages
Tugen Kenya Tololokwo
Kiswahili Kenya,Tanzanie Mngongo Le prunier d’Afrique est très utilisé par les popula-
Malgache Madagascar Sakoa tionsruralesde la plupartdespaysdanslesquelsil
Dogon Mali Bíí,
Tamachek Mali Tuila
est présent.
Dineygna, díinéy, Sesfruitsontune teneur élevée en vitamine Cet
Songhaï Mali, Niger dinégna, lúuley peuvent être consommés frais, sous forme de jus
Shangaan Mozambique Nkanyi, inkanyi
Gourma Niger Bunamabu ou fermentés pour fabriquer des boissons alcooli-
Kanuri Niger, Nigeria Ke_máà sées. Ilspeuventaussi être transformésen confitu-
Sossé Sénégal Kutan dao, kuten dao re et en gelée, ce qui prolonge la durée de conser-
Bassari Sénégal A-ngú_y, a-nguit, a-nguk
Bedik Sénégal Gi-kú_y vation, la disponibilité etla consommation au-delà
Konyagi Sénégal A-tema des deuxà trois mois que dure la saison de fructifi-
Non Sénégal Arid, arik, indarid
Sérère Sénégal Ari, aritj
cation. Les amandes du prunier d’Afrique sont ri-
Sérère/non Sénégal Sugu, sungul ches en protéines (28-31 %), en huile (56-61 %), en
Soninké/sarakolé Sénégal Nôné magnésium, en phosphore eten potassium. Parmi
Shona Zimbabwe Mufura, mafuna, marula les autres composants importants figurent des
oligo-éléments et des vitamines comme le fer, le
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d’Afrique Sclerocarya birrea Prunier d’Afrique Sclerocarya birrea

Usages Parties de la plante


Alimentation Fruits, pulpe, amandes
Fourrage Fruits, feuilles
Combustible ou construction Tiges, branches, coques
Pharmacopée Racines, feuilles, écorce
Loisirs Arbre entier
Protection du sol Feuilles et racines
Sculpture Tiges, branches
Utilisations culturelles Arbre, écorce
Teinture Cendres
Encre Résine

calcium, le cuivre, le zinc, la thiamine et l’acide ni-


cotinique. Les amandes peuvent être mangées ou
pressées pour en extraire de l’huile destinée à la
cuisine ou à l’industrie cosmétique. Lesfruitsetles
feuillessontbroutéspar le bétailetontune grande
variété d’utilisations médicinales, tout comme l’é-

© B. MUOK
corce et les racines.

Valeur socio-économique Gelée et huile issues du prunier d’Afrique.

Le prunier d’Afrique est un arbre fruitier de gran- pour en extraire la graine. Celle-ci est ensuite
de valeur et toutes les parties du fruit sont co- pressée pour obtenir de l’huile, qui peut être uti-
mestibles, crues ou cuites. Les fruits sont mûrs lisée pour la consommation ou dans l’industrie
une fois devenus jaunes. À ce stade, ils ont déjà cosmétique. L’endocarpe huileux et comestible
subi une abscission et sont donc généralement est occasionnellement vendu sur les marchés
ramassés par terre. Les fruits et les amandes locaux et contient jusqu’à 6 % d’huile.
sont une composante importante du régime des Le prunier d’Afrique est l’espèce fruitière sau-
populations rurales. Les fruits frais sont large- vage la plus communément utilisée en Afrique
ment consommés, en particulier par les enfants, du Sud, où 59 à 77 % des familles ont déclaré
et constituent une riche source de vitamine C. consommer ses fruits entre quatre et cinq fois
Ils sont également cueillis et transformés pour par semaine pendant la saison de fructification.
fabriquer du jus, des boissons alcoolisées (vin et Ce chiffre ne reflète pas la consommation op-
bière) et de la confiture. L’amande est écrasée portuniste des enfants hors de la maison, lors-
qu’ils gardent le bétail ou se rendent à l’école.
C’est pourquoi les taux de consommation réels
sont probablement beaucoup plus élevés. Envi-
ron 2% des familles vendent des produits issus
du prunier d’Afrique, principalement de la bière
et des amandes.
En Afrique de l’Ouest, le prunier d’Afrique est
l’une des 10 espèces les plus utilisées et les plus
génératrices de revenus. Il sert à la fois à l’alimen-
© B. MUOK

tation et à la pharmacopée.
Lesfruitsetproduitsdu prunier d’Afrique, ycom-
Transformation de fruits de prunier d’Afrique après cueillette. pris les boissons alcoolisées, confitures et jus de
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Sclerocarya birrea Prunier d’Afrique Sclerocarya birrea Prunier d

fruit, sont vendus sur les marchés locaux, régio- L’importance du prunier d’Afrique pour la popu-
nauxetinternationauxdepuislesannées1990. Par lation rurale locale est bien documentée. Il peut
conséquent, plusieursinitiativesde domestication avoir un impact écologique considérable sur d’au-
ont vu le jour, comme celles de l’université de Pre- tres plantes et des animaux. Dans les forêts clai-
toria qui vise à développer des cultivars issus d’ar- resoù on le trouve, c’estsouventune espèce domi-
bres supérieurs – appelés « arbres plus » – en uti- nante qui représente plus de 20 % de la biomasse
lisant des techniques de greffage. ligneuse totale. En raison de sa grande taille, l’arb-
re produit un vaste environnement frais sous-ca-
Écologie et biologie nopée. Dans les zones arides et semi-arides, les
espaces sous-canopée constituent des endroits
Le prunier d’Afrique est communément présent très importants, caractérisées par des taux d’hu-
dans les régions arides et semi-arides. Il est cou- midité et de nutriments plus élevés que ceux des
rant dans les zones côtières et adjacentes mais on espaces ouverts. Ces conditions sont propices à
le trouve à des altitudes allant du niveau de la mer différentes associations sous-canopée de plantes
à 1 600 m dans des prairies arborées, des forêts ligneuses, et herbacées graminéennes et non gra-
claires riveraines et des savanes arbustives ouver- minéennes. La disparition d’une espèce dominan-
tes, en particulier sur des sols sablo-limoneux et te peut entraîner la perte de l’ensemble de ces
sur des versants rocailleux. espèces de sous-canopée.
Le prunier d’Afrique compte trois sous-espèces
reconnues : Biologie de la reproduction
● S. birrea subsp. caffra (Sond.), la plus ré- Le prunier d’Afrique est généralement dioïque :
pandue, est présente en Afrique de l’Est les fleurs mâles et femelles sont situées sur des
tropicale (Kenya et Tanzanie), en Afrique arbres distincts. Bien que les fleurs soient gé-
australe tropicale (Angola, Malawi, Mozam- néralement d’un sexe ou de l’autre, il arrive que
bique, Zambie et Zimbabwe) et en Afrique certaines soient à la fois mâles et femelles. Les
australe (Afrique du Sud, Botswana, Nami- fleurs du prunier d’Afrique, bien que dépour-
bie et Swaziland). Sa présence est égale- vues de parfum, sont très attrayantes pour les
ment signalée à Madagascar. Elle est com- abeilles et d’autres insectes, notamment les
mune dans les zones de savane d’Afrique mouches, les syrphes et, plus rarement, les guê-
du Sud et du Zimbabwe. En Éthiopie, on la pes. Il semble que ces insectes en soient les
trouve dans le nord et le sud à des altitudes principaux pollinisateurs.
allant de 500 à 1 600 m.
● S. birreasubsp.multifoliolata(Engl.) se trouve
dans les forêts claires mixtes à feuillage ca-
duquesainsi que lesprairiesarboréesen Tan-
zanie, et peut-être dans le sud du Kenya.
● S. birrea subsp. birrea est présente dans les
zones tropicales d’Afrique de l’Ouest, du
Nord-Estetde l’Est. On la trouve dansde nom-
breuxtypesde végétation, principalementles
forêtsclairesmixtesà feuillage caduques, les
prairiesarborées, lesforêtsriveraines, lessa-
© D. AGUNDIEZ

vanes arbustives et les savanes ouvertes sè-


chesde l’Afrique du Nord tropicale etde la ré-
gion sahélienne. Floraison de Sclerocarya birrea.
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d’Afrique Sclerocarya birrea Prunier d’Afrique Sclerocarya birrea

Phénologie
Dans le Sahel, les pruniers d’Afrique fleurissent
de janvier à mars. La floraison est déclenchée par
l’augmentation de l’humidité de l’air à la fin de la

© B. MUOK
saison sèche. La fructification se déroule en mars
et avril. La feuillaison a également lieu après la
saison sèche, lorsque les pluies nouvelles provo- Différences de couleur des fruits.
quent la première véritable croissance. Au Sou-
dan, la floraison se produit de janvier à avril et la Une forte variation d’un arbre à l’autre a été obs-
fructification d’avril à juin. En Afrique du Sud, la ervée en termes de caractères des fruits et de te-
floraison a lieu de septembre à novembre et la neur en huile desamandes. Par exemple, la masse
fructification de février à juin. Lesfruitsvertsetfer- moyenne des amandes était deux fois plus élevée
mes tombent de l’arbre avant d’être mûrs et pour- chez un arbre sélectionné pour ses qualités supé-
suiventleur maturation à terre : ilsjaunissentetse rieuresque chezlesautresarbres, ce qui montre le
ramollissent. Les arbres peuvent commencer à potentiel de certains arbres à être sélectionnés
produire des graines dès l’âge de cinq ans. Le ren- pour le développement de cultivars.
dement fruitier est extrêmement variable d’une
année à l’autre. Connaissances génétiques
Espèces du même genre Le niveau de diversité génétique des marqueurs
ADN s’est avéré être étroitement lié à la distance
Sclerocarya gillettii est la seule autre espèce du géographique pour 12 populations de prunier
genre Sclerocarya. Elle est endémique au centre- d’Afrique de la sous-espèce caffra échantillon-
est du Kenya. nées, et provenant de sept pays (Botswana,
Kenya, Malawi, Namibie,Swaziland, Tanzanie et
Caractéristiques Zambie). Néanmoins, des populations géogra-
phiquement proches étaient parfois génétique-
morphologiques et variation ment distinctes. La relation entre diversité géné-
Le prunier d’Afrique a une longue racine pivotante tique et distance signifie que, dans la plupart des
qui lui permetde survivre dansdesenvironnements cas, le mouvement du matériel génétique (grai-
semi-arides. Lesfeuillessontcomposéesde troisà nes et pollen) dans toute l’aire de répartition de
sept paires de folioles opposées à subopposées. l’espèce est géographiquement limité aux popu-
Elles sont disposées en spirale et regroupées près lations qui sont proches l’une de l’autre. L’analy-
desextrémitésdesbranches. La peau du fruitdéga- se génétique de l’ADN nucléaire présent dans les
ge une odeur âcre, proche de celle de la pomme, et graines et le pollen ainsi que de l’ADN chloro-
le goût de la pulpe peut-être décrit comme un mé- plastique (transmis par les graines) suggère que
lange de litchi, de pomme, de goyave et d’ananas. le pollen contribue davantage que les graines
Une forte variation morphologique a été obser- au flux de gènes entre populations.
vée entre les populations de prunier d’Afrique du Les différences génétiques entre les popula-
Kenya eten leur sein, maisilestmaintenantrecon- tions de prunier d’Afrique sont plus marquées en
nu que cette variation se presentait au niveau des Tanzanie et au Kenya qu’ailleurs, et ces deux pays
sous-espèces. Cette variation concerne notamment peuventêtre considéréscomme descentresde di-
la taille et la forme de la feuille, la taille du fruit, le versité génétique de l’espèce. Au Kenya, deux po-
poids de l’amande et de la coque, ainsi que leurs pulationsprésentaientla plusgrande diversité gé-
couleur, goût et forme générale. nétique entre lesarbresau sein despopulations. La
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Sclerocarya birrea Prunier d’Afrique Sclerocarya birrea Prunier d

variation observée suggère que ce pays pourrait avantagé dansson habitatnaturelcar ilestdioïque
abriter les trois sous-espèces. (les fleurs mâles et femelles poussent sur des ar-
Aucune information n’est disponible quant à la bres distincts). Des études menées dans des
base génétique de la variation de certains caractè- champs du nord de la Namibie ont montré que la
rescomme la tolérance au stressenvironnemental, proportion relative des sexes des arbres les plus
la taille des fruits et le rendement. grandspenchaitsignificativementen faveur desfe-
melles. Lorsque la régénération a lieu sous des ar-
Pratiques locales bres poussant sur des exploitations agricoles, les
jeunesplantsne sontgénéralementpasmaintenus
En Afrique australe, la variation entre lesarbresest à cause des animaux d’élevage ou des cultures.
bien connue par les agriculteurs locaux. Dans la
province du Limpopo (Afrique du Sud), par exem- Cueillette des fruits
ple, les Pédis reconnaissent trois variétés de pru- et récolte d’autres produits
niers d’Afrique en fonction du parfum et de la sa- On considère qu’ilestpeu probable que la cueillet-
te des fruits du prunier d’Afrique constitue un
risque direct pour l’espèce, compte tenu du grand
nombre de fruits produits par chaque arbre. On
estime que 92 % des fruits peuvent être récoltés
sansréduire la régénération. Lesimpactsde la col-
lecte de l’écorce pour fabriquer des médicaments
et du bois pour la sculpture et le combustible va-
rient en fonction de la fréquence, de l’intensité et
de l’ampleur de la récolte, aussi bien au niveau de
chaque arbre que de la population dans son en-
© B. MUOK

semble. Ces formes d’utilisation des ressources


du prunier d’Afrique doivent être contrôlées pour
Arbre d’un an maintenu sur des terres cultivées. en limiter les impacts négatifs.

veur du fruit: morula o mobose, qui porte desfruits


sucrésetsavoureux; morula wa gobaba, qui a des
fruitsaigresetimpopulairesetmorula wa go nkga,
qui porte desfruitsqui ne sontpasprisésen raison
de leur odeur insupportable.

Menaces
Expansion agricole et pâturages
En raison de la croissance rapide de la population
en Afrique sub-saharienne, les activités agricoles
s’étendentde plusen plusversleszonesmargina-
lesdesrégionsaridesetsemi-arides. Cela conduit
souvent à la destruction des forêts claires naturel-
© B. MUOK

les, à l’érosion des sols et des ressources géné-


tiques, ainsi qu’à la dégradation des terres. Branches de prunier d’Afrique coupées pour obtenir
Le prunier d’Afrique est particulièrement dés- du fourrage dans le district de Baringo (Kenya).
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d’Afrique Sclerocarya birrea Prunier d’Afrique Sclerocarya birrea

tions. Lesarbresmâlesne produisentpasde fruits.


Statut de conservation Par conséquent, la sélection ne concerne que la
Les peuplements naturels de pruniers d’Afrique moitié de la population d’un point de vue géné-
sontmenacéspar l’expansion agricole, le surpâtu- tique. Cependant, aucun testgénétique n’ayantété
rage et leur exploitation à d’autres fins, ce qui né- réalisé, on ignore dansquelle mesure cesdifféren-
cessite de conserver et gérer de toute urgence les ces sont dues à la culture plutôt qu’à l’améliora-
populations restantes. tion génétique.
Les graines du prunier d’Afrique sont considé- Le prunier d’Afrique a un fort potentiel de do-
rées comme orthodoxes, elles peuvent donc être mestication. Le Centre Mondiald’Agroforesterie di-
conservées dans des banques de semences. Des rige un programme de domestication participati-
collections de matériel génétique ont été mises en ve depuis1995 en faveur despersonnespratiquant
place dans toute l’aire de répartition de l’espèce : une agriculture de subsistance dans les systèmes
c’est la première étape d’une stratégie de domes- agroforestierssur desterresarides. L’université de
tication mais ce matériel est également important Pretoria (Afrique du Sud) a développé descultivars
en matière de conservation. Le Burkina Faso, le issusd’arbressupérieursen utilisantle greffage, et
Kenya, la Tanzanie et le Togo ont collecté des grai- destravauxsonten coursau Botswana. L’espèce a
nes de prunier d’Afrique dans leurs centres de se- été introduite pour être cultivée dansdespaysnon
mences forestières. africains, notamment en Israël, à Oman et aux
On ignore si l’on trouve des pruniers d’Afrique États-Unis. Des études menées en Afrique du Sud
dansdeszonesprotégéestelsque lesparcsnatio- et en Namibie mettent en évidence la possibilité
naux. de sélectionner des arbres pour la pulpe ou la pro-
duction d’amandes. Desprogrammesde sélection
Gestion et amélioration visent à accroître l’uniformité des produits, amé-
liorer la productivité etfavoriser la conservation par
Sélection et domestication le biais de son utilisation en proposant des mesu-
De grandesdifférencesrelativesà la taille desfruits resd’incitation auxagriculteursafin qu’ilsplantent
etau rendementontété observéesentre lesarbres cette espèce.
des champs et ceux situés dans des zones com-
munales et des forêts claires naturelles, les pre- Multiplication à partir des graines
miers produisant jusqu’à cinq fois plus que les se- Les populations de prunier d’Afrique compren-
conds. Cela suggère que lesagriculteursontsélec- nent principalement des arbres qui sont mainte-
tionné des arbres pour leurs gros fruits et leur ren- nus dans les champs. Les rares tentatives visant
dement élevé pendant de nombreuses généra- à produire de jeunes plants de prunier d’Afrique
en pépinière se sont heurtées à certains problè-
mes, notamment aux faibles taux de germina-
tion. La multiplication à partir des graines né-
cessite plusieurs étapes permettant d’interrom-
pre la dormance et de garantir un bon taux de
germination (voir ci-après). Stocker les graines
pendant une ou plusieurs années peut égale-
ment accroître le taux de germination. La germi-
nation prend deux à quatre semaines et, dans
© B. MUOK

de bonnes conditions, des taux de 100 % peu-


vent être obtenus. Les tiges doivent atteindre la
Émergence des plantules. hauteur du genou avant que les jeunes plants
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Sclerocarya birrea Prunier d’Afrique Sclerocarya birrea Prunier d

© D. AGÚNDEZ
Parc à prunier d’Afrique à Tindangou (Burkina Faso).

ne soient transplantés en plein champ. Cela qu’un champignon mycorrhizien associé aux
prend trois à six mois, en fonction du climat, du racines du prunier d’Afrique améliorait la tolé-
substrat et du régime d’arrosage. Une fois que la rance de l’espèce aux stress environnemen-
racine pivotante est bien ancrée, laisser les jeu- taux comme le stress hydrique, le stress causé
nes plants dans de petits pots peut être néfaste par le sel et les inondations. Il a également été
pour le développement des arbres sains car cela prouvé que l’association du prunier d’Afrique
provoque un enracinement en vrille et endom- avec le millet ou le maïs favorisait l’installa-
mage les racines. tion de cette association mycorrhizienne.
Les jeunes plants doivent être plantés au La dormance de la graine du prunier d’Afrique
début de la saison des pluies, en plein soleil estprofonde etdoitêtre interrompue pour obtenir
dans un sol profond et bien drainé. Ils doivent de bons niveaux de germination:
être à l’abri des vents forts et du gel, en parti- ● Enlever délicatement la peau et la pulpe de la
culier au cours des premières années qui sui- graine
vent la plantation. Les jeunes arbres peuvent ● Faire sécher lesgrainesau soleilpendantsept
résister à la sécheresse. Les rendements frui- jours
tiers les plus élevés sont obtenus sur les sols ● Stocker les graines sèches dans un endroit
secs et sableux. Il est nécessaire d’appliquer bien aéré et ombragé, et les exposer à des
du compost ou du fumier pendant la première températures froides en hiver (< 10 °C).
année suivant la plantation. Les jeunes arbres Veiller à ce que les graines soient mainte-
doivent être protégés du bétail. Il a été montré nues au sec
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d’Afrique Sclerocarya birrea Prunier d’Afrique Sclerocarya birrea

© D. AGÚNDEZ
Prunier d’Afrique à Porga (Bénin).

● Avantde semer la graine, enlever la coque au Multiplication végétative


moyen d’un couteau ou d’un petit burin, et La multiplication végétative est une solution
immerger la graine dans l’eau avant de la attrayante quant à la culture du prunier d’A-
planter. frique pour au moins deux raisons. Première-
Conditions recommandées pour la germi- ment, les agriculteurs sont plus intéressés
nation: par les arbres femelles que par les mâles et
● Semer les graines au début de la saison les arbres doivent être adultes avant que l’on
des pluies (octobre, novembre ou décem- puisse déterminer leur sexe. Deuxièmement,
bre en Afrique australe, octobre ou mars en la multiplication végétative permet aux agri-
Afrique de l’Est) culteurs de tirer parti de la variabilité géné-
● Utiliser un mélange sableux aéré (comme tique de l’espèce en sélectionnant les arbres
un sol riche mélangé à du sable ou de la présentant des qualités supérieures. Le gref-
vermiculite) comme substrat et veiller à fage semble être la méthode de multiplica-
ce qu’il reste humide mais pas détrem- tion végétative la plus prometteuse pour le
pé prunier d’Afrique. Cependant, la multiplica-
● Semer les graines dans de grands sacs en tion végétative réduit la diversité génétique
plastique ou pots (4 litres) des populations de cette espèce dans les
● Ou semer les jeunes plants sur des cou- champs en multipliant uniquement les arbres
ches profondes (> 50 cm) pour la germina- femelles et en réduisant le nombre d’arbres
tion et la transplantation ultérieure. génétiquement distincts.
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Sclerocarya birrea Prunier d’Afrique Sclerocarya birrea Prunier d

Directives pour la
conservation et l’utilisation
Le Kenya etla Tanzanie sontconsidéréscomme les
centresde diversité génétique du prunier d’Afrique.
Par conséquent, cespaysdoiventêtre le pointfocal
desprogrammesde conservation. Néanmoins, les
banques de gènes doivent avoir pour objectif d’é-
tablir des collections couvrant l’ensemble de l’aire
de répartition de l’espèce afin de capturer la varia-

© B. MUOK
bilité génétique dans son intégralité.
La régénération naturelle doit être encouragée
dans les champs où des arbres isolés demeurent. Boutures de prunier d’Afrique.
La survie et la croissance des jeunes plants peu-
vent être améliorées en les transplantant sous la plantés. Dansleszonesisoléesabritantune popu-
canopée de l’arbre mère afin de leur fournir plusde lation humaine clairsemée, lespopulationsnaturel-
lumière et d’espace. Des structures de collecte de les de prunier d’Afrique devraient rester des res-
l’eau doivent être construites autour de chaque sources importantes sur le long terme. Des straté-
jeune plant, et ceux-ci doivent être protégés des giesde gestion doiventêtre misesen place de toute
animaux. Les plantes nuisibles doivent être arra- urgence afin de veiller à l’utilisation durable des
chées pour limiter la concurrence. populations naturelles de prunier d’Afrique.
Planter despruniersd’Afrique aideraità restau- La répartition clairsemée du prunier d’Afrique
rer cet arbre important et pourrait également four- dans les terres agricoles boisées a conduit à la
nir de nouvellesnichesécologiquespour une gran-
de diversité d’animauxetde plantes, tanten surfa-
ce que en profondeur.
Dans un avenir immédiat, la dépendance vis-à-
visdesarbressauvagesou ayantpoussé spontané-
mentse poursuivra danstoute l’aire de répartition,
malgré le potentiel commercial évident des arbres
© L. RAMAMONJISOA

© B. MUOK

Jeunes plantes de prunier d’Afrique. Greffe de jeune prunier d’Afrique.

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d’Afrique Sclerocarya birrea Prunier d’Afrique Sclerocarya birrea

© B. MUOK
Regeneration naturelle du prunier d’Afrique à Migori (Sud du Kenya).

négligence de l’espèce. Cela affecte le flux pol- — Déterminer la variation génétique en matière
linique en direction des arbres femelles, en par- de production et de caractères adaptatifs
ticulier dans les zones où les arbres mâles ont — Déterminer les tailles réelles des populations
été abattus. Il est très important de conserver en milieu rural semi-naturel et la taille minima-
des arbres mâles dans la population. Il y a moins le viable des populations nécessaire pour la
d’arbres mâles à proximité des habitations sur conservation et l’utilisation durable sur le long
des terrains privés que sur les terres communa- terme
les et dans les forêts claires naturelles. Le réta- — Identifier les espèces pollinisatrices, analyser
blissement des arbres mâles dans ces zones les flux polliniques efficaces et déterminer les
pourrait être le principal défi en matière de menaces pesant sur ces espèces
conservation. — Analyser l’efficacité de la dispersion des grai-
nes et le degré de dépendance à l’égard d’ani-
maux rares ou menacés
Besoins en — Mettre au point des procédures de manuten-
matière de recherche tion des graines pour le stockage à long terme
et la gestion améliorée
— Déterminer le nombre de populations viables — Développer les meilleures pratiques pour la
dans les zones naturelles protégées comme multiplication en pépinière
les parcs nationaux — Étudier la phénologie de la reproduction. ■
11
FR

Sclerocarya birrea Prunier d’Afrique

Bibliographie
Ce dépliant a été réalisé par les membres Emmanuel PL, Shackleton CM and Baxter JS. 2005. Modelling the sustainable harvest
du Groupe de travail de SAFORGEN of Sclerocarya birrea subsp. caffra fruits in the South African lowveld. Forest Eco-
sur les espèces ligneuses alimentaires, logy and Management 214: 91–103.
dont l’objectif est d’encourager la
HallJB, 2002. Sclerocarya birrea (A.Rich.) Hochst. [online]. Record from Protabase. Oyen
collaboration entre experts et chercheurs
afin de promouvoir l’utilisation durable et LPA and Lemmens RHMJ, editors. PROTA (Plant Resources of Tropical Africa /
la conservation des espèces ligneuses Ressources végétales de l’Afrique tropicale), Wageningen, Netherlands. Available
alimentaires de valeur de l’Afrique at: http://database.prota.org/search.htm. Accessed 20 December 2009.
subsaharienne. ICRAF. n.d. Agroforestree database [online]. Available at: http://www.worldagrofores
trycentre.org/sites/treedbs/aft.asp. Accessed 17 December 2009.
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