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Mor TALLA DIALLO

La didactique
du conte
Contribution pédagogique à l’étude
du conte dans l’espace sénégalais

Préface
Préface du
du professeur
professeur Didier
Didier Jourdan
Jourdan
Postface
Postface du
du professeur
professeur Bassirou
Bassirou Dieng
Dieng

PALABRES AFRICAINES
LA DIDACTIQUE DU CONTE

Contribution pédagogique à l’étude du conte


dans l’espace sénégalais

Collection Palabres Africaines


Collection
Palabres africaines
Diversités anthropo-logiques
dirigée par Lamine Ndiaye, Département de Sociologie (UCAD)

L’objectif de Palabres africaines est de promouvoir, en terre africaine,


la recherche. Ainsi, permet-elle aux universitaires et aux chercheurs,
de tout bord, notamment africanistes, spécialisés dans les Sciences
humaines et sociales, de disposer d’un espace intellectuel au travers
duquel il leur sera possible de proposer, en toute liberté, des réflexions
pourvu que ces dernières soient scientifiquement fondées.
Cette collection, qui veut encourager la transversalité, s’intéresse
aux thèmes relatifs à la criminalité, à la violence, à la déviance, à la
marginalité, à la santé, à la maladie, à la mort, à la corporéité, à
l’ethnomédecine, à l’éducation, à la religion, à l’anthropologie du droit
et aux imaginaires négro-africains.
MOR TALLA DIALLO

LA DIDACTIQUE DU CONTE

Contribution pédagogique à l’étude du conte


dans l’espace sénégalais

Collection Palabres Africaines


© L'HARMATTAN, 2015
5-7, rue de l'École-Polytechnique ; 75005 Paris

http://www.librairieharmattan.com
diffusion.harmattan@wanadoo.fr
harmattan1@wanadoo.fr

ISBN : 978-2-343-05872-6
EAN : 9782343058726
REMERCIEMENTS

À ma famille et à mes enfants qui me sont chers


En témoignage de toute mon affection
Cette recherche n’aurait jamais pu être réalisée sans la
bienveillance et l’aide des collègues enseignants qui nous ont
accueilli dans leurs écoles. Ils ont fait plus que nous donner
les autorisations nécessaires, ils ont participé à notre travail et
supporté patiemment les perturbations que nous apportions
dans leurs activités quotidiennes.
Qu’ils trouvent, par ce travail, l’expression de notre
profonde gratitude.
Enfin, tous nos remerciements à tous ceux qui, de près ou
de loin, d’une manière ou d’une autre, ont apporté une
contribution à ce travail.

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PRÉFACE

Il ne fait guère de doute que l’ouvrage de l’éminent professeur Diallo


constituera une référence en matière de didactique du conte. Il offre une
approche originale susceptible de nourrir la réflexion pédagogique de tous
les enseignants, celle-ci s’appuie sur la riche expérience de son auteur. Ce
dernier s’exprime ici en tant que chercheur, pédagogue, cadre de haut
niveau de l’enseignement supérieur, mais aussi citoyen sénégalais épris de
culture, homme engagé au service de l’éducation de tous. Comment ne pas
penser à Léopold Sédar Senghor auquel l’auteur consacre le dernier
chapitre de son ouvrage.
Le lecteur pourra apprécier la richesse de sa réflexion qui s’appuie sur
une mise en synergie d’approches complémentaires. Plus qu’un aller et
retour entre différents instruments, entre différents niveaux d’analyse, il
s’agit d’éclairages variés et complémentaires qui sont mobilisés de façon
harmonieuse. L’auteur parvient à offrir une lecture solidement étayée de la
nature du conte comme objet culturel, une mise à distance critique de son
utilisation pédagogique et des propositions concrètes directement
investissables en classe par les enseignants.
Le conte n’est en rien une belle histoire qui commence par « il était une
fois… » et qui finit bien. Ce sont des histoires qui abordent des problèmes
humains universels, des médiateurs de choix dans la construction de
l’identité. Comme le rappelle le professeur Diallo, « Les histoires
sécurisantes d’aujourd’hui ne parlent ni de la mort, ni du
vieillissement, ni de l’espoir d’une vie éternelle. Le conte, au
contraire, met carrément l’enfant en présence de toutes les
difficultés fondamentales de l’homme. » Si l’auteur centre son
propos sur le contexte sénégalais, celui-ci a une valeur universelle dans
bien des cas. Il aborde du reste la question de l’interculturel.
Le professeur Diallo fait preuve de beaucoup d’humilité, trop sans
doute, lorsqu’il indique dès l’introduction vouloir se limiter à des

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« indications utiles sur le conte et sa dynamique textuelle ».
C’est bien un sillon qui est ici tracé, une approche de pédagogue au sens le
plus noble du terme tel que Philippe Meirieu le définit. Le pédagogue est
celui qui « se donne pour fin l’émancipation des personnes qui
lui sont confiées, la formation progressive de leur capacité à
décider d’elles-mêmes de leur propre histoire, et qui prétend
y parvenir par la médiation d’apprentissages déterminés ».
Oui, et le professeur Diallo le met remarquablement en évidence, le conte
est un moyen au service de l’émancipation des personnes, un support
éducatif de choix.
Enfin, il me semble nécessaire de mettre en avant un autre aspect
particulièrement intéressant du travail de l’auteur : sa réflexion sur la
langue dans sa dimension orale comme écrite. Comme il le souligne, « le
conte est un outil idéal pour l’apprentissage de la langue dans
ses multiples dimensions… », « l’intégration du conte oral
dans le contexte d’apprentissage de la langue écrite du
français. » est au cœur de sa problématique.
Cet ouvrage qui se caractérise à la fois par la profondeur de ses
analyses et le caractère opérationnel de ses propositions est appelé à
enrichir durablement les pratiques des enseignants au plus grand bénéfice
des enfants.

Didier Jourdan
Professeur des Universités,
Directeur de l’École Supérieur du Professorat
et de l’Éducation Clermont-Auvergne,
Chercheur au laboratoire ACTé EA 4281,
Université Blaise Pascal Clermont-Ferrand II,
Membre du Haut Conseil de la Santé Publique,
Président de la Commission Prévention,
éducation et promotion de la santé

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AVANT-PROPOS

Nombre de travaux sur un ou plusieurs aspects du système


éducatif tel qu’il fonctionne au Sénégal converge, malgré des
approches différentes, pour dénoncer l’état de crise de ce
système.
Il est vrai que l’optimisme, qui prévalait au moment de
l’indépendance en ce qui concerne le rôle moteur de l’école
dans les transformations sociales, laisse place actuellement à
un pessimisme plus ou moins prononcé.
Pour les uns, au-delà du caractère relativement ouvert de
son recrutement, l’école ne fait, somme toute, que reproduire
les inégalités sociales marquées par une structuration en
classes sociales moins prégnantes que dans les pays dits
développés.
Pour d’autres, la crise proviendrait de l’extraversion du
système éducatif et du caractère marginal de l’éducation
traditionnelle, expression d’une identité culturelle à
sauvegarder.
Toujours est-il que ces discours sont également tenus par
les autorités politiques qui, sur plusieurs registres, ont pris des
décisions aussi bien dans le fonctionnement général que sur
le plan pédagogique, notamment avec l’introduction du
conte dans l’enseignement.
Le conte aurait comme fonction d’augmenter la capacité
de compréhension du monde et de préparer l’enfant à
accomplir, d’une manière satisfaisante, sur le plan affectif (des
motivations) et cognitif (de la connaissance technique), ses
divers rôles d’adulte. Il reste que cette espérance telle qu’elle
est énoncée dans ce travail demeure un objectif bien vague.

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D’où la nécessité, sous l’angle expérimental, de nous diriger à
la fois vers les enfants eux-mêmes qui reçoivent et étudient les
contes, mais aussi vers les enseignants qui les utilisent comme
instruments de procédés de socialisation et d’intégration.

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INTRODUCTION

La présente étude touche un point qui, à notre avis, est


essentiel : il s’agit de la réhabilitation du conte oral à l’école
comme genre littéraire.
Cette réhabilitation pose des questions que, chercheur,
nous nous sommes posé dans notre pratique quotidienne,
avec deux préoccupations : l’identité culturelle et l’efficacité.
Notre idée, en tant qu’enseignant, guidée sur le plan
culturel par le sentiment d’appartenance à un univers
traditionnel, est le rêve d’une école réconciliée avec la
tradition : d’où l’étude des aspects pédagogiques du conte
oral « traditionnel » à l’école.
L’étude des contes eux-mêmes n’est pas l’objectif de notre
travail.
On peut certes :
 faire leur classification et parler de leur description
(Morphologie du conte de V. PROPP, Paris, Seuil, 1965 et 1970) ;
 valoriser le conte africain en étudiant tous les différents
types de contes convenant à de jeunes enfants (voir
P. LEQUEUX, L’enfant et le conte, Paris, Pédagogie concrète,
1976) ;
 montrer comment les contes aident les enfants à
surmonter les problèmes psychologiques de la croissance et à
intégrer leur personnalité (voir B. BETTELHEIM,
Psychanalyse des contes de fées, Paris, Laffont, 1976).
Nous nous efforçons simplement, dans ce contexte, non
pas d’évoquer toutes les démarches pédagogiques intéres-
santes, qui ont vu le jour en matière d’analyse du récit, ni une

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théorisation des méthodes, même si, parfois, nous rappelons
certaines définitions nécessaires à la compréhension, mais
plutôt les indications utiles sur le conte et sa dynamique
textuelle. Ainsi, plutôt que d’enfermer les enseignants dans
une théorisation, nous leur proposons d’adopter une
démarche par laquelle les élèves dégagent eux-mêmes les
caractéristiques qui permettent de mieux analyser et de
comprendre le conte et de le distinguer par rapport aux récits
narratifs. En perspective, nous nous investissons sur l’oral
pour réaliser une œuvre didactique. Nous essayons de
montrer que le conte est un outil idéal pour l’apprentissage
de la langue dans ses multiples dimensions.
Un premier objectif de ce travail a été de saisir les images
et les représentations qui tournent autour des contes, au sein
de deux pôles d’acteurs (enseignants – enseignés).
Un deuxième objectif a été d’apprécier, en contact du
terrain, les efforts louables faits à partir du conte (sénégalais)
pour valoriser dans les écoles maternelle, primaire et
secondaire, l’éducation traditionnelle et de contribuer à
préserver et à développer « l’identité culturelle » dans le
cadre spécifique du Sénégal actuel.
Sur le plan méthodologique, nos recherches se sont
caractérisées par la plus grande diversité. Il y a eu, en
permanence, un aller et retour entre différents instruments,
entre différents niveaux d’analyse, ce qui est un impératif en
matière de recherche.
En effet, dans les chapitres proposés dans ce livre, nous
avons usé de différentes méthodes d’approche (analyse de
contenu, analyse qualitative et/ou quantitative) qui ne sont
pas contradictoires, mais complémentaires.

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CHAPITRE I

PEUT-ON S’ENTENDRE
SUR UNE DÉFINITION DU CONTE WOLOF ?1

Les critères d’identification du conte et du mythe les plus


permanents du point de vue du sens découlent de la dualité
des notions : le sacré et le profane. Il faudrait dès lors
remarquer que la notion du sacré dépend des croyances des
peuples, autrement dit de l’univers mythique dans lequel
baigne une culture donnée. Par conséquent, des caractéris-
tiques particulières aux cultures modifient la perception de
ces notions. Ce qui est sacré dans une culture ne l’est pas
forcément dans l’autre. Ce qui est conte ici ou là est considéré
comme mythe ailleurs.
En tenant compte donc de la mouvance et de la variabilité
des contes, comment élaborer une définition satisfaisante du
conte ?
Peut-on enfermer les contes dans une définition ? Définir
est un exercice délicat lorsqu’il s’agit du conte. Le conte
africain peut-il être défini exactement comme le conte
européen ?
Au Sénégal, par exemple, le mot « conte » ne recouvre
pas partout les mêmes réalités ; et les différents concepts
traduits en français par « conte » ne sont pas nécessairement
des contes au sens français du terme. C’est pourquoi il s’agit
d’un genre spécifique dont les contours sont difficiles à
cerner.

1 Les Wolofs constituent la première ethnie du Sénégal (50 % environ et leur


langue est parlée par plus de 90 % des Sénégalais).

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En effet, la classification académique ne correspond pas
toujours avec la classification autochtone du conte. Le Wolof1
l’appelle le leeb2. Cependant, le maye3 et le laawaan4 existent à
côté du conte en présentant plusieurs traits de caractères
similaires à ceux du conte. Le maye, par exemple, est un récit
anecdotique à caractère mensonger, mais qui peut se dire à
n’importe quel moment de la journée. Il n’a ni visée morale
ni éducative, sa fonction est exclusivement ludique.
Aussi certaines histoires tirées du patrimoine traditionnel
de la littérature orale sont-elles parfois assimilables à des
contes alors qu’il s’agit de mythe, car elles sont considérées
comme « histoires vraies » chez les Wolof.
C’est pourquoi nous estimons qu’il est important que le
jeune élève wolof distingue, à partir du concept notionnel,
conte français, le genre narratif qu’est le leeb, conte dans ses
aspects structurel, éducatif et ludique.
Cette étude sur la définition du conte avait fait l’objet
d’une enquête5 auprès d’élèves, d’enseignants et de conteurs,
pour savoir quel contenu notionnel ils mettent dans le
concept français conte.
Suite à l’enquête, la synthèse est la suivante :
En milieu wolof, le conte, d’une manière générale, est
appelé leeb. Cependant, certains le considèrent comme
waxtaan6 – cosaan7. Il s’agit d’un genre oral très apprécié des
élèves et des enseignants. Si, dans son mode de
communication, le genre oral est préféré au genre écrit, le

2 Leeb signifie conte en wolof.


3 Maye : récit anecdotique à caractère mensonger. Il a une fonction
essentiellement ludique.
4 Laawaan : chants ou louanges accompagnés de danse pour célébrer un

quelconque exploit.
5 La méthodologie liée à cette étude est publiée dans les Annales de la Faculté des

Lettres et Sciences Humaines, n° 257, année 1997, par M. T. DIALLO.


6 Causeries.
7 Paroles anciennes.

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