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Dans le récit qui suit, nous pouvons voir que Paul exploite le terrain qu’il a
en commun avec le roi, à savoir la tradition juive, pour le mener à
s’identifier à lui. Il commence par expliquer à Agrippa que, toute sa vie, il
s’était tenu parfaitement dans le moule de la religion juive et qu’il était
d’ailleurs connu pour cela, comme tous pourraient en témoigner. Il signifie
ainsi que dans ce monde duquel il vient, sa connaissance et sa rigidité
religieuse étaient reconnues et estimées par ses pairs et les autorités
religieuses, et qu’ils pourraient encore s’en porter cautions.
Dans cette première partie, Paul pose donc les bases de son récit. En
mettant en avant les qualités qui chez lui sont reconnues parmi les juifs,
mais, en réalité, condamnables aux yeux de Dieu, il cherche à tirer profit au
maximum du lien qu’il partage avec son interlocuteur pour qu’il puisse
s’identifier à lui.
– 2ème partie, versets 12 à 18 :
« C’est dans ce but que je me rendis à Damas, avec l’autorisation et la
permission des principaux sacrificateurs. Vers le milieu du jour, ô roi, je vis
en chemin resplendir autour de moi et de mes compagnons une lumière
venant du ciel, et dont l’éclat surpassait celui du soleil. Nous tombâmes
tous par terre, et j’entendis une voix qui me disait en langue hébraïque :
Saul, Saul, pourquoi me persécutes-tu ? Il te serait dur de regimber contre
les aiguillons. Je répondis : Qui es-tu, Seigneur ? Et le Seigneur dit : Je suis
Jésus que tu persécutes. Mais lève-toi, et tiens-toi sur tes pieds ; car je te
suis apparu pour t’établir ministre et témoin des choses que tu as vues et
de celles pour lesquelles je t’apparaîtrai. Je t’ai choisi du milieu de ce
peuple et du milieu des païens, vers qui je t’envoie, afin que tu leur ouvres
les yeux, pour qu’ils passent des ténèbres à la lumière et de la puissance
de Satan à Dieu, pour qu’ils reçoivent, par la foi en moi, le pardon des
péchés et l’héritage avec les sanctifiés. »
Cette deuxième partie pourrait répondre à la question : « Comment Paul a-
t-il rencontré Jésus ? ».
Nous pouvons remarqué que, tout en répondant à cette question, Paul en
profite pour présenter Jésus comme le Sauveur et le Seigneur, celui par qui
nous avons le pardon de péchés en nous repentant, et l’héritage de la vie
éternelle par la foi; le cœur du message de l’Évangile.
– 3ème partie, versets 19 à 23 :
« En conséquence, roi Agrippa, je n’ai point résisté à la vision céleste : à
ceux de Damas d’abord, puis à Jérusalem, dans toute la Judée, et chez les
païens, j’ai prêché la repentance et la conversion à Dieu, avec la pratique
d’œuvres dignes de la repentance. Voilà pourquoi les Juifs se sont saisis
de moi dans le temple, et ont tâché de me faire périr. Mais, grâce au
secours de Dieu, j’ai subsisté jusqu’à ce jour, rendant témoignage devant
les petits et les grands, sans m’écarter en rien de ce que les prophètes et
Moïse ont déclaré devoir arriver, savoir que le Christ souffrirait, et que,
ressuscité le premier d’entre les morts, il annoncerait la lumière au peuple
et aux nations. »
Cette dernière partie pourrait répondre à la question : « Quels changements
cette rencontre avec le Seigneur a-t-elle opérés chez Paul et dans sa vie
? ».
Alors que Paul exprime sa conversion à Christ, son changement radicale
d’attitude vis-à-vis des chrétiens, et le secours de Dieu dans sa vie, il fait
référence à Moïse et aux prophètes pour finir de convaincre le roi en ce qui
concerne Jésus. Car, en effet, il sait qu’au final ce n’est pas lui qui peut
convaincre son interlocuteur, mais uniquement la révélation de la sagesse
de Dieu par son Esprit.
• As-tu découvert, dans cet article, une stratégie qui pourrait t’aider à
évangéliser ?
• Laquelle te semble la plus difficile à mettre en œuvre ?
• Utilises-tu d’autres stratégies pour évangéliser ?
INTRODUCTION
Ces lignes ont été écrites et destinées primitivement à une seule personne. Si nous les avons
développées et publiées, ce n'est pas que nous ayons la prétention de venir en aide à Dieu, ni de
soumettre ses voies à une méthode ; nous savons qu'elles sont aussi variées dans l'ordre spirituel
que dans celui de la nature. Mais Dieu nous ayant fait la grâce d'être ses collaborateurs, nous entrons
nécessairement pour une part de responsabilité dans son oeuvre, et nous pouvons constater tous les
jours, combien notre service peut être fécond, salutaire et béni, quand il est fait avec intelligence et
fidélité, et combien aussi il peut être néfaste et même causer un préjudice irréparable, quand nous
faisons des fautes.
Nous voudrions donc, en toute humilité, faire part à nos frères de quelques leçons apprises au cours
de notre expérience. Elles sont le fruit de bien des angoisses, de bien des regrets, de bien des
observations et de bien des études dans le plus sacré des domaines.
Que Dieu, notre unique ressource, nous enseigne et nous rende capables de toute bonne oeuvre !
Comment s'occuper des âmes
Au sens général, l'expression « âme » signifie, dans les Écritures, la partie spirituelle de l'homme en
contraste avec le corps (1 Pierre 1, 9 ) ; dans un sens plus spécial, l'âme se distingue de l'esprit (1
Thess. 5, 23). Dans beaucoup de passages, l'âme est considérée comme l'élément responsable de
notre être, et de là le plus important. Si l'âme est perdue, tout est perdu. C'est pourquoi Jésus dit :
« Que profitera-t-il à un homme s'il gagne le monde entier, et qu'il fasse la perte de son âme ? »
(Matth. 16, 26.)
Deux grandes puissances se disputent la possession de ce bien. D'un côté, Satan, le grand séducteur,
et de l'autre, Jésus-Christ, le Sauveur des hommes. Pour l'une ou pour l'autre, il faut donc que les
âmes se décident. Le Prince de ce monde n'a qu'un leurre à offrir ; pourtant une fois, il a proposé
tous les royaumes de la terre et leur gloire. C'était le plus grand prix qu'il pût présenter. Jésus, lui,
a donné sa vie.
Le monde n'a pas le sens de la valeur d'une âme, c'est pourquoi, souvent, le prince des ténèbres les
obtient à bon marché. Esaü lui a vendu la sienne pour un plat de lentilles ; Judas, la sienne pour
trente pièces d'argent. Les maîtres de cette servante de Philippes, délivrée par Paul d'un esprit de
python, sont préoccupés de leurs revenus, et les Gadaréniens de leurs pourceaux. Quand Jésus eut
libéré, deux démoniaques, et qu'à cette occasion leurs pourceaux périrent dans la mer, ils le prièrent
tout simplement de s'en aller de leur territoire. Deux âmes délivrées d'une misère inexprimable :
cela ne leur disait rien ! Le matérialisme avait englouti le sens qu'ils pouvaient avoir pour le bien de
leurs propres âmes et de celles des autres.
Mort dans ses fautes et dans ses péchés (Eph. 2, 1) - telle est la condition de l'homme naturel, et
sans une intervention divine il ne peut pas se convertir. Cette intervention lui est assurée par la
parole du Seigneur : « Et moi, si je suis élevé de la terre, j'attirerai tous les hommes à moi-même »
(Jean 12, 32).
Le moment décisif dans l'histoire d'une âme est celui où la lumière divine brille sur son chemin.
Malgré son état de mort, elle peut ouvrir les yeux pour recevoir cette lumière, elle peut aussi les
fermer. Si, comme fit le gouverneur Félix, elle les ferme (Actes 24, 25), il en résultera
l'endurcissement ; si elle les ouvre, et se laisse conduire par cette lumière au jugement d'elle-même
et à la foi, elle subira une résurrection spirituelle : « .... étant ensevelis avec lui dans le baptême,
dans lequel aussi vous avez été ressuscités ensemble par la foi en l'opération de Dieu qui l'a
ressuscité d'entre les morts » (Col. 2, 12).
Notre tâche consiste donc à amener les âmes à Christ. Ce n'est ni une morale, ni une théorie, ni un
dogme seulement que nous leur apportons, si nécessaires qu'ils soient, mais une personne vivante.
« Nous ne conduisons pas les âmes à la croix », comme l'a si bien dit quelqu'un, « il n'y a personne
à la croix ; nous ne les conduisons pas au tombeau, le tombeau est vide ; mais nous les conduisons
au Christ crucifié et glorifié, assis à la droite de Dieu. »
Le premier but à poursuivre dans une âme, c'est son réveil. Le Saint-Esprit définit ainsi ce ministère
en s'adressant à Paul : « .... Je t'envoie pour ouvrir leurs yeux, pour qu'ils se tournent des ténèbres
à la lumière, et du pouvoir de Satan à Dieu » (Actes 26, 18). Nous devons donc leur ouvrir les yeux
sur leur état de corruption et sur le danger de la perdition éternelle auquel elles sont exposées ; et
ensuite les conduire à la source de la grâce et de la paix.
« Le sage gagne les âmes » (Prov. 11, 30). Non pas en les attirant à lui d'une manière charnelle ;
car la sagesse divine unit dans une sainte austérité la haine du péché et l'amour du pécheur : mais
en leur découvrant, sans ménagement, leur plaie afin de la guérir.
Nous aurons à nous adresser tour à tour à l'intelligence, à la conscience et au coeur ; chaque cas
particulier demande une direction particulière. Le Saint-Esprit qui sonde les coeurs nous la donnera.
Jésus, le parfait Serviteur est notre modèle. Combien différente était la manière dont Il s'occupait
des âmes !
Chez Nicodème (Jean III), Il s'adresse d'abord à la conscience. Dans un entretien sur la nécessité et
la nature de la nouvelle naissance, Il opère le travail de démolition indispensable à cette dernière.
Coup sur coup, l'orgueil du pharisien est atteint. v. 3 son orgueil naturel ; v. 10 : son orgueil
spirituel ; v. 11 son incrédulité ; et ainsi le terrain fut préparé au magnifique message qui commence
par le verset 15.
Avec la Samaritaine (Jean 4), Il procède autrement, Il commence par le coeur. Il excite sa curiosité
en lui faisant comprendre qu'il y a des biens qu'elle ignore, et cela dans un langage comme les
enfants le comprennent, comme cette simple femme y était habituée : « Si tu connaissais le don de
Dieu, et qui est celui qui te dit : donne-moi à boire, toi, tu lui eusses demandé, et il t'eût donné de
l'eau vive » (v. 10). Il vante l'eau vive, afin d'éveiller en elle des besoins spirituels et de provoquer
cette demande : « Donne-moi de cette eau » (v. 15). Ensuite Il s'adresse à sa conscience, et lui
dévoile, d'une manière infiniment délicate, même indirecte, son péché. Quel exemple dans la
souveraine Sagesse s'occupant de l'âme d'une femme pauvre et pécheresse, mais pourtant si
assoiffée, comme Elle l'épargne et la conduit avec tendresse à la source des eaux vives ! Qu'il fait
bon suivre cet entretien jusqu'au moment où il se révèle à son âme comme le Messie. Lui, le Seigneur
de gloire arrivé fatigué à la fontaine, est rassasié d'avoir trouvé un adorateur pour son Père, et elle,
la pauvre femme est si rafraîchie, qu'elle laisse sa cruche et court à la ville pour rendre témoignage
de lui.
Chez Nathanaël, Jésus s'adresse en premier lien à l'intelligence (Jean 1, 48. 49). Il suffisait d'une
révélation de sa Toute-Science pour écarter les derniers préjugés de cet Israélite intègre et bien
préparé et le convaincre que Jésus de Nazareth était le Christ.
Au fond, toute conversion est le fruit d'une révélation du Seigneur (Matth. 11, 25-27). Prêchons
Christ aux âmes de manière à ce qu'elles puissent le rencontrer dans notre prédication.
En général, nous devrons consacrer beaucoup de temps et de soins au côté négatif de l'oeuvre.
« Nous sommes collaborateurs de Dieu ; vous êtes le labourage de Dieu », écrit Paul aux Corinthiens
(1 Cor. 3, 9).
Rappelons-nous que sur quatre sortes de terrains, dans lesquels est tombée la semence de la Parole
divine (dans la parabole du semeur), il n'y en a qu'un de bon (Matth. 13, 1-9). C'est pourquoi la
parole sera toujours de saison : « Défrichez pour vous un terrain neuf et ne semez pas au milieu des
épines » (Jér. 4, 3). Dans Jérémie 1, 10, Jéhovah emploie quatre expressions pour décrire le côté
négatif dans le travail du prophète : « Arracher », « démolir », « détruire » et « renverser », et
seulement deux pour le côté positif : « bâtir » et « planter ».
Non seulement les âmes sont mortes dans leurs fautes et dans leurs péchés, mais souvent elles sont
ensevelies sous les décombres que la propre justice et une fausse religion ont accumulées sur elles
pendant des années, et il faut un travail énergique et considérable pour les amener au jour. Il ne
s'agit de rien moins que de la conquête d'une forteresse, et les remparts de l'ennemi ne tombent
que devant les attaques répétées de la foi. Nos armes sont divinement puissantes (2 Cor. 10, 4).
Heureux celui qui, dans ce travail, procède en connaissance de cause et conscient du but qu'il veut
atteindre.
Le « coeur honnête et bon » de la parabole (Luc 8, 15) dans lequel la semence de la parole divine
peut produire du fruit à maturité, c'est le « coeur brisé » (Ps. 51, 17). Dans ce coeur les épines et
les pierres n'entravent plus la croissance ; la parole ayant été reçue avec foi, une entière soumission
a triomphé des obstacles. Elle a créé un terrain aplani sur lequel on peut édifier un travail nouveau.
Mais que faire du coeur impénitent, enlacé dans les voies de sa volonté propre et de sa mondanité ?
Une connaissance profonde du coeur de l'homme et une perception divine seront d'un grand secours
à un serviteur de Dieu. Il y a des cas où la présentation trop exclusive de la grâce, constitue tout
simplement un danger. « Si l'on use de grâce envers le méchant, il n'apprend pas la justice ; dans
le pays de la droiture il fait le mal et il ne voit pas la majesté de l'Éternel » (Es. 26, 10).
Alors il faut employer le marteau de la loi pour briser le pécheur endurci et le rendre accessible à la
grâce : « Ma parole n'est-elle pas... comme un marteau qui brise le roc ? » (Jérém. 23, 29). Sans
connaissance du péché, point de conversion ; or, la connaissance du péché vient par la loi (Rom. 3,
20). Les hommes sont souvent si ignorants au point de vue spirituel qu'on est obligé de mettre le
doigt sur la plaie et de leur nommer leurs péchés par leurs noms.
Il est vrai que toute conversion est l'oeuvre de la grâce plus d'un coeur de pierre a été remué par
l'amour et la grâce de Dieu. Mais la question se pose toujours : où la loi et la grâce doivent être
appliquées ? Si nous nous tenons dans le conseil secret de l'Éternel (Jérém. 23, 18-22) il nous
donnera la direction de son Saint-Esprit ; car c'est Lui qui convaincra le monde de péché, de justice
et de jugement (Jean 16, 8). Que de fois le Serviteur parfait a placé des hommes sous la loi pour
mettre à nu l'état de leur coeur, les convaincre de péché et leur prouver l'absolue nécessité de la
grâce ! (Luc 10, 25-37 ; 18, 18-25.)
Nous pouvons avoir instruit une âme sur le chemin du salut aussi clairement que possible, avoir placé
devant elle la vie et la mort, avoir servi à la réveiller même, ce n'est pas encore tout, il faut qu'elle
soit appelée, c'est-à-dire amenée à une décision.
Cela est si vrai que Jésus dit : Je suis venu « appeler » des pécheurs à la repentance (Matth. 9, 13),
et que parmi les titres donnés aux saints, dans les Écritures, est celui d' « appelés » (Rom. 1, 6).
Comment auraient-ils pu répondre s'ils n'avaient été appelés ? L'âme peut voir le chemin du salut
ouvert devant elle ; mais paresseuse de nature, elle a besoin d'un puissant coup d'éperon pour y
entrer. N'oublions pas que mille liens l'attachent au monde et au péché, qu'elle redoute l'opinion des
hommes ; elle craint la souffrance. À ce moment suprême, le Dieu de ce siècle lui présente le
renoncement et la gloire dans de fausses proportions. Faisons tout ce qui est en notre pouvoir pour
l'amener à une décision. Les peines éternelles et la félicité éternelle ; l'horreur du péché et la beauté
de Christ ; Son oeuvre parfaite, ses souffrances et sa gloire ; la sévérité de Dieu, son amour et sa
grâce ; tout doit nous servir pour atteindre le but.
L'appel.
L'appel est lui-même quelque chose de sacré. Puissions-nous ne jamais l'adresser sans être l'organe
du Saint-Esprit ! La seule pensée qu'il pourrait provoquer un refus et devenir fatal à une âme, suffirait
pour nous empêcher de nous servir jamais de ce moyen. Et pourtant, nous ne devons pas nous
laisser arrêter, Dieu veut que tous les hommes parviennent à la connaissance de la vérité (1 Tim. 2,
3-7) ; ils ne peuvent être sauvés autrement et, malgré la responsabilité qu'elle entraîne, la vérité
doit être placée devant eux. Mais cette considération doit au moins nous porter à rechercher avant
tout la direction du Saint-Esprit et à nous occuper des âmes avec une extrême prudence et sagesse.
C'est une terrible déception pour une âme quand elle a fait un pas qui ne se légitime pas ; et cette
déception peut devenir pour elle une cause de doutes et de tentations. N'exerçons jamais de pression
charnelle sur elles, ne jouons pas avec leurs sentiments et leurs nerfs, mais ayons toujours en vue
la conscience et le coeur. Je ne veux pas dire que ce soient les seules, mais les meilleures conversions
proviennent d'une profonde conviction de péché. Ces réserves faites, un appel direct, adressé à une
âme en temps opportun peut lui être d'une grande utilité. Que d'âmes qui attendent, et ne savent
que faire, jusqu'à ce qu'un serviteur de Dieu décidé vienne et leur dise comme Ananias à Saul - « Et
maintenant, que tardes-tu ? » (Actes 22, 16.)
Comme nous l'avons déjà dit, la grâce de Dieu seule peut rendre l'homme capable de se convertir.
L'un vient comme l'enfant prodigue et, sans cette grâce n'aurait pas le courage de venir ; l'autre
vient comme Saul de Tarse, et la perspective de choses meilleures seule, lui donne la force de
renoncer à ses prérogatives (Phil. 3, 7-9).
L'homme légal qui ne voit en Dieu qu' « un homme dur moissonnant où il n'a pas semé et recueillant
où il n'a pas répandu » (Matth. 25, 24), n'éprouve aucun désir de le servir. Et dans ces conditions,
nous serions tous les mêmes. Mais quand l'amour et la grâce ont fait leur oeuvre, les âmes le servent
de franche volonté. La connaissance de Dieu est la source de toute transformation.
Pour être utile aux âmes, il est nécessaire d'entrer dans leurs difficultés particulières. Si nous avons
affaire à des âmes liées au ritualisme d'une Église romaine, grecque ou autre, éclairons-les sur le
sujet, mais ne leur ôtons pas ce qu'elles ont, sans le remplacer par quelque chose de meilleur. Si
elles nous font le reproche de ne pas avoir de prêtre, annonçons-leur notre grand et Souverain
Sacrificateur, Jésus-Christ, et le sacerdoce universel des croyants ; si elles cherchent en vain parmi
nous une onction, instruisons-les sur l'onction que nous avons reçue du Saint (1 Jean 2, 20) ; si c'est
l'encens qui leur fait défaut, faisons-leur comprendre que le seul encens agréable à Dieu est « la
bonne odeur de Christ » dans une vie d'obéissance et de prières (2 Cor. 2, 14-16). Des âmes droites
préféreront bienvite la réalité divine aux ombres instituées par les hommes. En tout cas il faut que
tous les faux appuis leur soient enlevés et qu'elles apprennent à se confier en Dieu seul.
La conversion.
La manière dont l'Évangile est annoncé peut beaucoup contribuer à ce qu'une conversion soit foncière
et que la vie chrétienne qui en résulte soit saine on non. Beaucoup d'âmes n'obtiennent jamais de
l'eau pure. L'Évangile qu'elles entendent est un mélange de loi et de grâce, si ce n'est trop souvent
le maigre repas de la morale humaine ou même les cendres de la philosophie. Puissions-nous être
pour les âmes un « messager, un interprète, un entre mille », comme dit Élihu (Job 33, 23), « pour
montrer à l'homme ce qui, pour lui, est la droiture », c'est-à-dire pour lui montrer le droit chemin.
Et que fait-il ? Il le mène à la repentance avec ce précieux encouragement : « J'ai trouvé une
propitiation » (v. 24).
Le droit chemin ? D'après l'Écriture sainte, toute la prédication évangélique ne se résume qu'en deux
mots : repentance et foi. Jean-Baptiste a prêché la repentance et a annoncé celui qui devait venir
(Matth. 3, 7-12) ; Jésus (Marc 1, 15) et ses apôtres (Actes 20, 21) ont prêché « la repentance envers
Dieu et la foi en notre Seigneur Jésus-Christ ». Il est de la plus haute importance que nous
communiquions aux âmes, sur ces deux points, des notions justes.
La repentance.
La repentance n'est pas, comme elle a souvent été comprise, une expiation du péché, ni seulement
une affaire de sentiments, bien qu'elle ait sa source dans une profonde douleur, mais elle est,
d'après 2 Cor. 7, 8-10, le fruit d'une tristesse opérée par le Saint-Esprit au sujet du péché ; elle
consiste à rompre avec le péché et à venir à Christ. Il est inutile qu'une âme repentante cherche des
mobiles nobles en elle-même ; elle ne peut rien produire, sinon juger son péché, s'humilier et venir
à Christ telle qu'elle est. L'enfant prodigue est venu poussé par la faim, mais l'important était qu'il
vînt. Un élément essentiel de la repentance, c'est la confession des péchés qui a de si grandes
promesses. « Je t'ai fait connaître mon péché, et je n'ai pas couvert mon iniquité ; et toi tu as
pardonné l'iniquité de mon péché » (Ps. 32, 5).
Exhortons les âmes à faire table rase de leurs péchés, à examiner leur vie à la lumière de Dieu et à
réparer les torts causés éventuellement aux hommes. Dieu est un Dieu saint et Il veut avoir des gens
propres. Une conversion qui ne règle pas à fond le passé ne peut subsister. C'est étonnant que les
hommes prient tellement pour le pardon de leurs péchés, alors que l'Écriture les y exhorte très peu,
et qu'ils cachent en même temps si soigneusement leurs péchés ; tandis que l'Écriture nous exhorte
partout à les confesser. C'est que la confession implique la nécessité de les abandonner (Prov. 28,
13).
Un des principaux indices d'une repentance foncière, c'est qu'elle conduit à la paix. Une préoccupation
maladive de soi-même, des plaintes incessantes sur ses péchés et sur sa corruption naturelle, surtout
le refus des consolations divines, proviennent d'un reste de propre justice et d'orgueil mal déguisé.
La repentance de plus d'une âme trouverait dans les paroles suivantes sa plus juste expression :
« Je déplore de ne pas avoir l'honneur d'être meilleur et d'avoir mieux vécu. » La vraie repentance
n'est pas de l'orgueil froissé, mais de l'humilité ; elle juge le « moi » et donne gloire à Dieu en
acceptant le conseil divin de sa grâce.
Si sincère que soit la repentance, elle ne peut, par elle-même, donner la paix à l'âme. La foi seule le
peut. Elle est la condition inévitable de la foi, le terrain dans lequel seul elle peut prendre racine et
se développer.
Dieu a parlé, et la foi le prend au mot. La foi s'appuie sur les oracles de Dieu et, par eux, nous met
en rapport avec Dieu.
Un trait caractéristique de la foi, c'est qu'elle a pour objet la Personne et l'oeuvre de notre adorable
Seigneur et Sauveur Jésus-Christ. La valeur que cette oeuvre a pour Dieu détermine la valeur qu'elle
a pour la foi. Et comme cette oeuvre est parfaite, la foi mène toujours au repos. La même
bienveillance qui repose sur le Fils bien-aimé de Dieu, repose aussi sur ceux qui, par la foi, ont été
rendus parfaits en Lui. Dieu a donné, et la foi prend ; c'est pourquoi la foi a souvent le sens de
propriété : « Celui qui croit au Fils, a la vie éternelle » (Jean 3, 36).
Dieu a frayé une voie, et la foi y entre et introduit le salut de Dieu dans l'expérience de notre vie. La
foi est donc la main vide qui s'empare du don de Dieu, la dernière ressource d'un homme indigne,
coupable et ruiné. C'est le dernier pas qu'un homme, dans sa misère, puisse encore faire et le premier
dans le chemin de la délivrance, parce que la foi ne cherche rien dans l'homme, mais tout dans la
grâce de Dieu.
À cet égard, la foi est facile, quand les difficultés de la propre justice et de l'orgueil sont vaincues ;
mais à un autre égard - combien elle peut paraître difficile à certaines âmes ! C'est bien comme
Sauveur que la foi accepte Jésus, en premier lieu, et n'y trouve que gain, mais elle voit aussi en lui
le Seigneur établi de Dieu. Or, il s'agit de renoncer à tous les droits sur sa propre personne et sa
propre vie et de faire acte de reddition devant Lui. Et l'homme se défend ; c'est pourquoi mainte
conversion est si hésitante. Le roi déchu éprouve comme une chose difficile de céder ses prétendus
droits en faveur d'un autre. Mais si cet autre est Celui qui « nous a aimés et s'est livré lui-même pour
nous » (Eph. 5, 2), "par la meurtrissure meurtrissure nous avons été guéris » (1 Pier. 2, 24), alors
ce n'est plus difficile : c'est un besoin du coeur, un acte de reconnaissance. La foi ne consiste donc
pas seulement à accepter Christ, elle consiste aussi à se donner à Lui.
On s'est demandé si l'appel divin : « Mon fils, donne-moi ton coeur » (Prov. 23, 26) se rapporte à la
conversion. Ce qui est certain, c'est que le don de nous-mêmes à Dieu en est une partie essentielle.
Les saints de la Macédoine « se sont premièrement donnés eux-mêmes au Seigneur, puis à nous,
par la volonté de Dieu », écrit l'apôtre Paul (2 Cor. 8, 5). Jésus-Christ « qui nous a été fait de la part
de Dieu justice », nous a aussi été fait « sainteté » (1 Cor. 1, 30). Le même précieux sang qui me
donne droit au pardon, constitue pour Dieu le droit de me posséder tout entier.
Ce sont des choses qu'il importe d'enseigner, car une conversion qui n'est pas en même temps un
acte de consécration est plus que douteuse, seulement la grâce doit être présentée en premier lieu,
car il faut une grande confiance pour se donner au Seigneur, et sa connaissance seule peut en rendre
l'âme capable.
Nous comprenons dès lors combien grande est la révolution que la foi provoque dans une âme, elle
met la grâce divine en rapport avec la culpabilité et la misère humaines et ramène l'homme à Dieu.
C'est ce qui explique aussi que la repentance et la foi sont inséparablement liées. La repentance est
le motif de la foi. La foi compte avec le grand fait de la croix où le péché est jugé et avec la
résurrection, source d'une vie nouvelle. La foi est la chose la plus grande que Dieu puisse réclamer
de l'homme, celle qui contient toutes les autres, et la seule que l'homme puisse lui donner.
Courte a été la période de l'indépendance relative dont l'homme jouissait dans le jardin d'Eden. Il
n'appartenait pas alors au royaume des ténèbres, ni à Dieu, de la même manière que maintenant.
Par sa chute, il a perdu cette indépendance, et il ne la retrouvera jamais. Il sera ou l'esclave de
Satan, ou l'esclave de Jésus-Christ. Et quoiqu'il ne puisse pas se dégager des griffes de l'ennemi, il
lui reste le privilège glorieux, digne d'un être créé libre, de pouvoir se décider pour l'un ou pour
l'autre. Oh ! puissent les âmes s'en montrer toujours dignes et en faire un bon usage ! Se décident-
elles pour Christ, alors Il rompt leurs liens, et elles deviennent participantes de la plus glorieuse des
libertés, celle de la Rédemption.
C'est là la conversion. Elle consiste dans un acte de volonté, que l'homme est appelé à faire, et par
lequel il se décide pour Dieu (comp. Jean 5, 40 et Apoc. 22, 17). Le mot lui-même fait supposer que
le coeur humain a toujours besoin d'un objet : les ténèbres ou la lumière, les idoles ou Dieu. Des
idoles, il doit se convertir au Dieu vivant et vrai (1 Thess. 1, 9).
La grandeur de la responsabilité qui incombe à l'homme rend nécessaire qu'il soit instruit exactement
sur le plan divin du salut. Comment fera-t-il un pas de cette importance s'il ne connaît pas le terrain
sur lequel il entre ? Aussi nous semble-t-il que c'est un tort de pousser un homme à une décision
sans lui avoir préalablement fait connaître les bases de la Rédemption. Mais ces bases une fois
posées, c'est-à-dire la propitiation par le sang de Christ, le jugement du vieil homme à la croix, la
justification dans la résurrection de Christ, alors nous n'avons pas seulement le devoir, mais le
droit de l'engager à prendre la position que Dieu lui a faite en Christ, en rompant avec le péché et
en croyant en Lui. Il a été mis dans le cas de le faire. Puissions-nous tellement lui révéler la beauté
de Christ que son coeur soit captivé et gagné par lui !
En quoi consiste, à proprement parler, « l'obéissance de la foi » (Rom. 1, 5 ; 16, 26) et, dans quel
rapport se trouve-t-elle avec notre impuissance ?
Cette question est capitale dans l'oeuvre de l'évangélisation ; car elle nous servira à placer sur son
vrai terrain la responsabilité de l'homme. Or, nous pouvons en quelque mesure, baser cette
responsabilité sur la nature, la conscience, la loi ; mais en dernier ressort, c'est la croix qui décide
dans cette question. L'homme qui aura entendu l'Évangile ne sera pas perdu parce qu'il est né
pécheur (il faut qu'il le sache), ni parce qu'il n'aura pas accompli la loi (il ne le peut pas), mais
uniquement parce qu'il aura rejeté Christ. C'est là le péché volontaire pour lequel il ne reste plus de
sacrifice (Hébr. 10, 26 ).
Dieu ne réclame pas que nous expiions nos péchés. Il y a pourvu par le sang de son propre Fils. Il
ne demande pas davantage que nous nous rendions meilleurs, c'est impossible, mais il veut qu'avec
nos péchés, nous venions à Christ pour être pardonnés ; - qu'avec notre vieil homme, nous venions
à Christ pour le dépouiller dans sa mort et que nous reconnaissions dans le Ressuscité notre vie.
C'est ce que nous pouvons. L'obéissance de la foi s'appui pour chaque pas sur le Seigneur.
Dieu n'attend plus rien de la chair, elle a été pleinement manifestée et jugée à la croix. Elle ne saurait
le contenter dans ses efforts, ni le surprendre dans ses chutes. Il en a fini avec elle. Nous aussi, nous
devons en avoir fini avec elle.