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Théorème d’approximation de Weierstrass par la convolution

Z
|f ∗ χn (x) − f (x)| ≤ |f (x − t) − f (x)| χn (t) dt
R
Guide de lecture : Le marquage Dev. indique le développement à proprement dit. Z Z
Les éléments autour sont des rappels, compléments, remarques ou applications. ≤ |f (x − t) − f (x)| χn (t) dt + |f (x − t) − f (x)| χn (t) dt
|t|<δ | {z } |t|≥δ | {z }
<ε ≤2kf k∞

finalement, sachant que |t|<δ χn (t) dt ≤ 1 par le point 2. de la définition 1 on contrôle


R
1 Introduction
le premier
R terme. D’autre part, si on prend N ∈ N fournit par le point 3. tel que pour
On note Cc (R, C) les fonctions continues de R dans C nulles en dehors d’un compact. n ≥ N , |t|≥δ χn (t) dt < ε afin de contrôler le deuxième terme, on obtient que pour
tout x ∈ R et n ≥ N
On munit Cc (R, C) d’une loi ∗ appelée produit de convolution définie par |f ∗ χn (x) − f (x)| < (1 + 2kf k∞ )ε
Z autrement dit (f ∗ χn ) converge uniformément vers f sur R.
f ∗ g : x 7→ f (x − t)g(t) dt
R
Théorème 3 : Toute fonction continue sur un segment à valeurs dans C est limite

Dev.
On vérifie facilement (par un changement de variable) que cette loi est commutative. uniforme d’une suite de fonctions polynomiales sur ce segment.
Pour plus de détails on peut se tourner vers [BMP05] qui offre un très bon panorama
sur la convolution.

Définition 1 : On appelle approximation de l’unité toute suite de fonctions (χn )n∈N


de R dans C vérifiant :
1. χn (t) ≥ 0 pour tout n ∈ N et p.p. t ∈ R
2. R χn (t) dt = 1 pour tout n ∈ N
R

3. |t|≥δ χn (t) dt −−−−−→ 0 pour tout δ > 0


R
n→+∞

2 Le développement
Figure 1 – Représentation d’une suite de polynômes convergeant vers la valeur absolue
Le développement peut être retrouvé dans [Gou08] p.285 (p.304 pour l’édition 3)
mais également dans [FGN23] p.177. Démonstration. La démonstration se découpe en trois étapes.

Lemme 2 : Soit f ∈ Cc (R, C) ainsi que (χn ) un approximation de l’unité. La suite


Dev.

(f ∗ χn ) converge uniformément vers f sur R. Étape 1 : On introduit une suite de fonction et on montre que c’est une approximation
de l’unité. On pose pour n ∈ N,
Z 1
(1 − t2 )n /an si|t| ≤ 1

Démonstration. Soit ε > 0. Puisque f est continue sur un compact et nulle en dehors, an = (1 − t ) dt et pn : R 3 t 7−→
2 n
par le théorème de Heine, on dispose de δ > 0 tel que pour tout x, y ∈ R on ait −1 0 sinon
Les points 1 et 2 de la définition 1 sont immédiats. Pour le troisième point on remarque
|x − y| < δ =⇒ |f (x) − f (y)| < ε que par parité, on a pour n ∈ N,
1
Puisque R χn (t) dt = 1 on peut écrire, pour tout x ∈ R, f (x) = R f (x)χn (t) dt. On (1 − t2 )n+1 1
R R Z 1 Z 1 
on écrit alors pour tout x ∈ R, an = 2 (1 − t ) dt ≥ 2
2 n
t(1 − t ) dt = −
2 n
=
0 0 n + 1 0 n + 1

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Ainsi, pour δ ≥ 1, pn (t) dt = 0 et pour δ ∈ ]0, 1[, On peut alors considérer un changement variable affine
R
|t|>δ
1
Z
2
Z 1
2 ϕ : x 7−→ (d − c)(x + ) + c
δpn (t) dt = (1 − t2 )n dt ≤ (1 − δ 2 )n ≤ 2(n + 1)(1 − δ 2 )n −−−−−→ 0 2
|t|>δ an δ an n→+∞ qui envoie [−1/2, 1/2] sur [c, d]. Par l’étape 2 on sait qu’il existe une suite de poly-
nômes (Qn ) qui converge uniformément vers f ◦ϕ sur [−1/2, 1/2]. La suite de polynôme
On conclut que (pn ) est une approximation de l’unité. Pn := Qn ◦ ϕ−1 converge alors uniformément vers f sur [c, d], donc à fortiori sur [a, b].
Ce qui démontre le résultat.
Étape 2 : On montre le résultat pour les fonctions continue sur R à support inclus
dans [−1/2, 1/2].
On considère une telle fonction et on montre que f ∗ pn est un polynôme pour tout 3 Compléments
n ∈ N. Soit n ∈ N et x ∈ [−1/2, 1/2],
On donne deux exercices très classiques.
Z 1/2
f ∗ pn (x) = pn ∗ f (x) = pn (x − t)f (t) dt (∗) Exerice 1 : (Théorème des moments) Soit f : [a, b] → C une fonction continue. On
−1/2 Rb
suppose que, pour tout n ∈ N, a f (t)tn dt = 0. Alors f est la fonction nulle.
Pour x, t ∈ [−1/2, 1/2], |x − t| ≤ 1 et donc on remarque que pn (x − t) est un polynôme
Démonstration. Par linéarité on remarque que pour tout polynôme P ∈ C[X],
en les variable x et t et en développant par le binôme de Newton Rb
a
f (t)P (t) dt = 0. Par le théorème 3 on dispose d’une suite (Pn ) de polynômes qui
1 converge uniformément vers f sur [a, b]. Puisque f est continue sur le compact ab,
R
pn (x − t) = (1 − (x − t)2 )n
an elle y est bornée par une constante M > 0. On voit alors que le produit (f Pn ) converge
2n
X uniformément vers f f = |f |2 . en effet il suffit d’écrire que pour x ∈ [a, b] on a
= bk (t)xk
|f (x)f (x) − f (x)Pn (x)| ≤ M kf − Pn k∞ −−−−−→ 0
k=0 n→+∞

Par convergence uniforme on peut donc opérer une interversion lim / :


R
où les bk (t) sont des polynômes en t.R Ainsi,
P en injectant cette dernière expression n→∞
dans (∗) et en réalisant interversion / (somme finie) on obtient que pour tout Z b Z b
x ∈ [−1/2, 1/2], |f (t)|2 dt = lim f (t)Pn (t) dt = 0
a n→∞ a
La fonction |f |2 étant continue et positive on conclut qu’elle est nulle, puis que f aussi.
2n
!
X Z 1/2
f ∗ pn (x) = ck (t)f (t) dt x k

k=0 −1/2
| {z }
:=ck ∈C
Exercice 2 : (Détermination des fonctions étant limite uniforme de polynômes)
La conclusion vient alors du lemme 2.
1. Les fonctions de R dans R qui sont limites uniformes sur R d’une suite de
Étape 3 : le cas général. On se donne f : [a, b] → C continue. On peut la prolonger par polynômes réels sont les fonctions polynomiales.
des segments en une fonction continue sur R nulle en dehors d’un intervalle [c, d]. 2. Les fonctions de R dans R pour lesquelles il existe une suite de polynômes (Pn )
qui converge uniformément vers f sur tout segment de R sont les fonctions
• continues.

Démonstration. Pour le premier point, on considère une telle fonction f et on sait que
l’on dispose d’une suite (Pn ) de polynômes convergeant uniformément f . Par conver-
gence uniforme il existe un entier N tel que pour tout n ≥ N , on a kf − Pn k < 1/2.
On en déduit que pour tout n ≥ N , on a
• •
c a b d kPn − PN k ≤ kPn − f k∞ + kf − PN k∞ < 1

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Le polynôme Pn − PN est alors borné sur R, il s’agit donc d’un polynôme constant. Théorème 6 : Toute fonction continue 2π−périodique dans R dans C est limite
On peut donc écrire, pour tout n ≥ N , Pn = PN + Cn . On a donc, par exemple pour uniforme sur R d’une suite de polynômes trigonométriques.
x = 0,
Cn = Pn (0) − PN (0) −−−−−→ f (0) − PN (0) Remarque 7 : Ce résultat est un premier pas vers les séries de Fourier. On peut
n→+∞ le voir que un corollaire du théorème de Féjer qui nous dit que si f est continue et
Ainsi,(Pn ) converge simplement (et en fait aussi uniformément) vers le polynôme 2π−périodique alors les moyennes de Cesàro successives des termes de la série de Fou-
PN + f (0) − PN (0). Par unicité de la limite simple, f = PN + f (0) − PN (0) est une rier converge uniformément vers f . En particulier les moyennes de Cesàro successives
fonction polynomiale. étant des polynôme trigonométrique on a le théorème 6. [Gou08]
Remarque 8 : Si on suppose de plus que f est C 1 par morceaux, la série de Fou-
Pour le deuxième point on remarque qu’une fonction f : R → R qui est limite uni- rier de f est une suite de polynômes trigonométriques convergeant uniformément vers
forme de fonctions polynomiales sur tout segment est en particulier continue (limite f . Notons qu’il existe des fonctions continues 2π−périodique dont la série de Fourier
uniforme de fonctions continues) sur tout segment de R et donc sur R. Réciproque- diverge (voir développement Théorème de Banach-Steinhaus et série de Fourier diver-
ment, si f : R → R est continue sur R, par le théorème 3, pour tout entier n ∈ N, il gente). Une telle fonction n’est donc pas limite uniforme de sa série de Fourier (elle est
existe un polynôme Pn ∈ R[x] tel que néanmoins limite uniforme d’une certaine suite de polynômes trigonométriques par la
1 remarque précédente).
kf − Pn k∞,[−n,n] <
2n
Ainsi si on se donne un segment [a, b] et N suffisamment grand pour que [a, b] ⊂
[−N, N ], alors pour tout n ≥ N ,
1
kf − Pn k∞,[a,b] < −−−−−→ 0
2n n→+∞
si bien que la suite (Pn ) convergente uniformément vers f sur [a, b].
Figure 2 – Fonction approchée par sa série de Fourier
On énonce finalement le théorème d’approximation de Weierstrass trigonométrique
ainsi que le théorème de Stone-Weierstrass. Théorème 9 : Soit X un espace compact et A une sous-algèbre de l’algèbre C (X, R)
des fonctions continues à valeurs réelles, munie de la norme infinie. On suppose que :
Définition 4 : On appelle polynôme trigonométrique de degré inférieur ou égal à 1. A sépare les points de X, c’est-à-dire :
N ∈ N de la variable réelle x toute fonction de la forme
∀(x, y) ∈ X 2 , x 6= y, ∃g ∈ A, g(x) 6= g(y)
N
X
x 7−→ ck eikx , ck ∈ C
2. Pour tout x ∈ X, il existe g ∈ A, tel que g(x) 6= 0
k=−N
Alors A est dense dans C (X, R), autrement dit, toute application f ∈ C (X, R) est
Remarque 5 : Compte tenu de la relation e = cos(kx) + i sin(kx), il revient au
ikx limite uniforme d’éléments de A.
même de dire qu’un polynôme trigonométrique est une fonction de la forme
Remarque 10 : Ce théorème est très puissant et englobe les théorèmes 3 et 6. Voir
n [Li13] par exemple pour plus de détails
a0 X
x 7−→ + ak cos(kx) + bk sin(kx)
2 Remarque 11 : On peut aussi remarquer que les deux conditions du théorème sont
k=−n
aussi nécessaires, et donc que le théorème de Stone-Weierstrass donne une condition
où les ak , bk sont des nombres complexes reliés aux coefficients ck par la relation nécessaire et suffisante pour la densité d’une sous-algèbre de C (X, R). Dans le cas des
fonctions continues à valeurs complexes, on doit rajouter l’hypothèse que A est stable
ak = ck + c−k et bk = i(ck − c−k ) par conjugaison.

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Références
[BMP05] Vincent Beck, Jérôme Malick et Gabriel Peyré. Objectif agrégation:
mathématiques. 2e éd. Paris : H & K, 2005.
[FGN23] Serge Francinou, Hervé. Gianella et Serge Nicolas. Oraux de l’École
polytechnique et des Écoles normales supérieures: mathématiques. Volume
5. Paris : Cassini, 2023.
[Gou08] Xavier Gourdon. Analyse. 2e éd. Les maths en tête. Paris : Ellipses, 2008.
[Li13] Daniel Li. Cours d’analyse fonctionnelle avec 200 exercices corrigés. El-
lipses, 2013.

Vincent LE GRUIEC page 4 14 juillet 2023

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