Vous êtes sur la page 1sur 6

 

POLITIQUE CÔTE D’IVOIRE

En Côte d’Ivoire, la nouvelle vie de


« Soul to Soul »
Après plus de quatre ans de prison, l’ancien chef du protocole de
Guillaume Soro a été gracié par Alassane Ouattara, fin février. Depuis
sa remise en liberté, son activisme politique suscite bien des
questions.

Souleymane Kamagaté Koné, alias « Soul to soul », au Palais de justice d’Abidjan, le 19 mai 2021. ©
Luc Gnago/REUTERS
Alain Aka - à Abidjan

Publié le 2 avril 2024 Lecture : 4 minutes.

   

Depuis que « Soul to Soul » est sorti de la maison d’arrêt et de


correction d’Abengourou, le 23 février, un ballet incessant de visiteurs
se présente à son domicile d’Abidjan. Poignées de mains, photos
souvenirs… Soul to Soul reçoit avec le sourire, laissant planer le
mystère sur ses projets futurs. Qu’ils soient des acteurs politiques, des
militants, des artistes ou de simples citoyens, tous viennent témoigner
leur soutien à l’ancien chef du protocole de Guillaume Soro, condamné
à vingt ans de prison pour « complot contre l’autorité de l’État » en
2021.

A lire : Laurent Gbagbo a-t-il encore du poids sur la scène politique en Côte
d’Ivoire ?

Chaque jour draine son lot de nouvelles têtes. Le 13 mars, c’est une
délégation du Parti des peuples africains – Côte d’Ivoire (PPA-CI),
conduite par Justin Koné Katinan. La veille, c’était la jeunesse du Parti
démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI), avec à sa tête son président,
Innocent Yao, qui avait ouvert la voie. Des artistes ont aussi tenu à lui
témoigner leur soutien, tels Gadji Céli et Serges Kassy, réputés proches
de l’ex-président Laurent Gbagbo, reçus respectivement les 18 et 30
mars.
LA SUITE APRÈS CETTE PUBLICITÉ

À 49 ans, Souleymane Kamagaté Koné, de son vrai nom, n’a pas


d’avenir politique tout tracé. Son mentor Guillaume Soro en exil, son
parti Générations et peuples solidaires (GPS) dissous, celui que l’on
surnomme le « Maréchal des prisonniers » doit se réinventer. Restera-
t-il loyal à l’ancien Premier ministre ? Prendra-t-il ses distances ?
Beaucoup se demandent ce qu’il mijote.

Présenter un front uni face au camp d’Alassane


Ouattara en 2025

Une chose est sûre : Soul to Soul entend jouer un rôle dans la
réconciliation nationale. Dès sa sortie de prison, il a tenu un discours
rassembleur. « Au nom de tous nos amis, il faut qu’on pardonne.
Allons au pardon », avait-il lancé à des militants venus le saluer. 

Contenu sponsorisé

Proposé par VISA WEST AND CENTRAL AFRICA


Un lien fort entre l’innovation et la célébration

Selon certains observateurs, son objectif est de fédérer différentes


forces de l’opposition afin de présenter un front uni face au camp
d’Alassane Ouattara en 2025. Une tâche qui s’annonce pour le moins
délicate, entre les ambitions des uns et des autres. « Il ne faut pas
rêver, un scénario à la sénégalaise n’est pas possible en Côte d’Ivoire »,
estime Tehfour Koné, ancien député soroïste d’Abobo.

Contrairement à ce qui s’est passé au Sénégal entre Ousmane Sonko et


Bassirou Diomaye Faye, un scénario où Soul to Soul serait désigné
comme le dauphin de Guillaume Soro pour la présidentielle de 2025
semble difficilement applicable. Et pour cause : l’ex-président de
l’Assemblée nationale a été condamné en juin 2021 à la prison à
perpétuité pour « atteinte à la sûreté de l’État ». Soul to Soul, lui, a
bénéficié d’une grâce présidentielle le 22 février, mais pas d’une
amnistie qui aurait effacé sa condamnation. Dans ces conditions,
difficile d’imaginer que l’un des deux hommes puisse être candidat.

A lire :
Présidentielle en Côte d’Ivoire : et si Alassane Ouattara et

Tidjane Thiam s’entendaient ? Par Marwane Ben Yahmed


LA SUITE APRÈS CETTE PUBLICITÉ

Pour les opposants, se déplacer chez cet intime de Guillaume Soro est
aussi un moyen d’envoyer des signaux à son patron. « Nous ne sommes
pas dupes, s’amuse l’ancien député d’Abobo. En venant voir Soul to
Soul, ce n’est pas lui qu’on veut atteindre, mais bien Guillaume Soro. »

Le 26 mars, accompagné de sa mère et d’une forte délégation du GPS,


Soul to Soul rend la pareille au PPA-CI en venant rencontrer son
fondateur, Laurent Gbagbo. L’ancien chef de l’État en profite pour
lancer un message : « Si tu as des nouvelles de Guillaume [Soro], dis-
lui que je le salue. »

LA SUITE APRÈS CETTE PUBLICITÉ


Continuer à faire exister Générations et peuples


solidaires

Certains lui prêtent l’ambition de jouer les médiateurs entre Soro et


Ouattara. Mais pour plusieurs experts, cette hypothèse reste peu
probable. « Il ne prendra pas cette initiative de lui-même, estime
Arthur Banga, enseignant à l’université Félix Houphouët-Boigny. Son
destin est lié à celui de Guillaume Soro, dont il est le numéro deux
naturel au sein du GPS. » Même son de cloche chez le politologue
Geoffroy Julien Kouao, selon lequel Soul To Soul fait partie des
« hommes politiques de missions ». Pas question, donc, de le voir dans
un costume de médiateur auprès du pouvoir ivoirien, à moins que son
patron ne le lui demande.

Malgré sa dissolution officielle – ordonnée par la justice ivoirienne le


23 juin 2021 –, le mouvement GPS entend continuer à exister et à
mobiliser ses partisans. Cependant, ses dirigeants ont conscience que
toute reconstitution légale du parti l’exposerait à des poursuites
judiciaires. C’est pourquoi Guillaume Soro et ses proches ont élaboré
une stratégie subtile visant à faire perdurer le GPS sans structure
identifiable.

A lire :
 Guillaume Soro au pays des accueillants putschistes

Vous aimerez peut-être aussi