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Paris. Comme si la cité avait dû revêtir, dès cette époque, le
caractère cosmopolite qui la distingue aujourd'hui, on y voyait,
alignés le long de la chaussée ou espacés des deux côtés dans les
champs, des tombeaux qui emmenaient la pensée aux extrémités
les plus opposées du monde ancien. Les inscriptions y parlaient les
deux langues de la civilisation, et le voyageur s'acheminait à travers
des avenues funéraires qui faisaient passer tour à tour sous ses
yeux les monuments du paganisme romain, les édicules étranges de
Mithra, et les chastes et sobres emblèmes de la foi chrétienne. Là
dormait, au milieu de plusieurs de ses successeurs, l'évêque de
Paris, saint Prudence, et l'on veut que les chrétiens des premiers
âges y aient possédé une catacombe où ils célébraient les sacrés
mystères, et qui s'élevait sur les ruines d'un ancien sanctuaire de
Diane, la déesse des forêts[317].
[316] Voir tome I, p. 103.
[317] Lebeuf, Histoire de la ville et de tout le diocèse de Paris, nouvelle édition,
Paris, 1883, t. I, pp. 228 et suiv.; Saintyves, Vie de sainte Geneviève, pp. 101, 130,
295; Franklin, dans Paris à travers les âges, IX, p. 2
Plus d'une fois, le regard de Clovis et de Clotilde s'était arrêté sur ce
tranquille horizon, des hauteurs duquel semblait descendre jusqu'à
eux, à travers le murmure des verdoyants ombrages, la solennelle
invitation de la mort. L'idée leur sourit d'y répondre en préparant là-
haut la place de leur dernière demeure, à l'abri d'un sanctuaire qui
serait le monument durable de leur foi commune, et qui dresserait
au-dessus de toute la vallée le signe glorieux de la résurrection.
Toujours le souvenir de Clotilde a été associé à celui de Clovis dans
l'histoire de cet édifice sacré[318]; il n'est guère douteux qu'elle en ait
suggéré la première idée au roi. Un chroniqueur parisien du huitième
siècle, dont les souvenirs locaux ont souvent une grande valeur
historique, attribue formellement cette initiative à Clotilde. Il est vrai
que, d'après lui, c'était dans la pensée du couple royal une église
votive, qui devait être bâtie si le roi revenait victorieux de la guerre
d'Aquitaine[319]. Ce qui est certain, c'est que la construction n'en fut
commencée que dans les dernières années, puisqu'elle n'était pas
achevée lorsque Clovis mourut.
[318] Grégoire de Tours, ii, 43: Basilica sanctorum Apostolorum quam cum
Chrodechilde regina ipse construxerat.—Le même, iv, 1: Nam basilicam illam ipsa
construxerat.
[319] Liber historiæ, c. 17.
Bientôt l'église surgit du sol, appuyée sur une crypte qui devait
recevoir les sépultures royales, et offrant aux regards l'aspect des
primitives basiliques. Elle pouvait avoir, nous dit un historien, deux
cents pieds de long sur cinquante à soixante de large[321]. L'intérieur
en était non voûté, mais lambrissé à la manière antique; de riches
mosaïques ainsi que des peintures murales en animaient les parois.
On y avait accès, du côté occidental, par un triple portique orné,
comme l'intérieur, de mosaïques et de peintures représentant des
scènes de l'Ancien et du Nouveau Testament[322]. A côté de l'église
s'élevèrent de spacieux bâtiments conventuels pour la demeure des
chanoines réguliers qui devaient la desservir. Un vaste territoire,
longeant les jardins du palais et allant d'un côté jusqu'à la Seine et
de l'autre jusqu'à la Bièvre, forma la seconde enceinte de cette
fondation vraiment royale. La plus grande partie en était occupée par
des closeries et des vignobles à travers lesquels circulaient
d'ombreux sentiers de noyers et d'amandiers chantés au douzième
siècle, en vers agréables, par le poète Jean de Hautefeuille. Le
douaire assigné au monastère était considérable: il comprenait
Nanterre, Rosny, Vanves, Fossigny, Choisy, et la terre connue sous
le nom de fief de Sainte-Clotilde[323].
[321] Viallon, Vie de Clovis le Grand, pp. 448 et suiv.
[322] Vita sanctæ Genovefæ, xi, 53 (Kohler): Miracula sanctæ Genovefæ; cf. du
Molinet, Histoire de sainte Geneviève et de son église royale et apostolique à
Paris, manuscrit de la bibliothèque Sainte-Geneviève, livre III, chap. ii.
[323] Du Molinet, o. c., livre III, chap. iii, suivi par les autres historiens de sainte
Geneviève. Le livre de du Molinet, resté inédit, est un travail excellent, qu'il n'y
aurait plus intérêt à publier toutefois, parce que la meilleure partie en a passé
depuis dans les travaux consacrés au même sujet.
Clovis ne vécut pas assez longtemps pour voir l'achèvement de
cette fondation grandiose; c'est Clotilde qui la mit sous toit et qui en
termina les dépendances[324]. Il paraîtrait toutefois, si l'on en croit le
chroniqueur parisien auquel nous avons déjà fait des emprunts, que
le roi put encore assister à la consécration de l'église. Cet écrivain
ajoute que Clovis pria le pape de lui envoyer des reliques des saints
Pierre et Paul, parce qu'il voulait en faire les patrons du nouveau
sanctuaire, et qu'à cette occasion il fit tenir au souverain pontife de
riches cadeaux[325]. C'est probablement alors aussi qu'il lui envoya
une superbe couronne d'or, garnie de pierres précieuses, qu'on
appelait «le Règne»[326]. Plusieurs historiens du moyen âge ont
parlé de cette couronne qui mérite une mention ici, puisqu'elle fut le
premier hommage de la royauté très chrétienne à l'Église
universelle.
[324] Vita sancti Genovefæ, xi, 53 (Kohler).
[325] C'est ce que dit une note d'un des manuscrits du Liber historiæ, c. 17. Dans
tous les cas, elle se trompe tout au moins sur le nom du pape, qu'elle appelle
Hormisdas. Hormisdas ne monta sur le trône de saint Pierre qu'en 514, trois ans
après la mort de Clovis. Peut-être faut-il garder le nom d'Hormisdas, et remplacer
celui de Clovis par celui de Clotilde?
[326] Eodem tempore venit regnus cum gemmis preciosis a rege Francorum
Cloduveum christianum, donum beato Petro apostolo. Liber Pontificalis, éd.
Duchesne, t. I, p. 271. Ce passage, écrit au sixième siècle, a passé en substance
dans le Vita sancti Remigii de Hincmar, Acta Sanctorum, p. 156, F, et de là dans
Sigebert de Gembloux, Chronicon (dom Bouquet, III, p. 337). M. l'abbé Duchesne
écrit à ce sujet, o. c., p. 274: «Clovis mourut trois ans avant l'avènement du pape
Hormisdas. Il est possible que l'envoi du regnus ou couronne votive, dont il est ici
question, ait souffert quelque retard. Du reste, le nom de Clovis n'est attesté ici
que par les manuscrits de la seconde édition; l'abrégé Félicien coupe la phrase
après Francorum.» Cf. A. de Valois, I, pp. 270 et 299; dans ce dernier passage, il
fait dire à ses sources que Clovis envoya la couronne qu'il avait reçue d'Anastase.