Sidi
InfoSidi
N°17 - Sept. 2007 - Solidarité Internationale pour le Développement et l’Investissement
Témoignages de Voyageurs Actionnaires
& Souscripteurs au PEROU
N
otre voyage au Pérou de
l’automne 2006 fut organisé par
l’agence de tourisme solidaire
« Voyager Autrement » (01 56 54 20 05) et
la SIDI (organisme créé en 1983 par le
CCFD pour appuyer financièrement et
techniquement des Structures de
Financement de Proximité spécialisées en
microfinance). Nous sommes partis à deux
fois vingt actionnaires de la SIDI ou
souscripteurs du fonds de partage Faim et
Développement du CCFD, pour voir sur
place l’utilisation de notre épargne,
rencontrer des acteurs de développement,
et bien sûr visiter des sites prestigieux
comme le Machu Picchu.
Comme le CCFD, la SIDI intervient par
l’intermédiaire de partenaires, des
structures locales de microfinance. Nous
avons rencontré trois de ces partenaires (et
chaque fois des bénéficiaires finaux), que
la SIDI soutient financièrement et
techniquement :
• EDAPROSPO, à Lima, une association
financière née en 1978 suite à des
fermetures d’usines, a démarré des
petits projets avec le CCFD, puis a
développé avec la SIDI un programme
de microcrédit appelé
« Prosperidad » permettant à des
habitants des quartiers populaires de
Lima de démarrer une activité
économique.
• CONFIANZA, organisme de
microfinance dont le siège est à
Huancayo, dans la région centrale du
Pérou, propose des services financiers
Le 2ème groupe SIDI devant le « mur des labels de qualité »,
avec des membres et des salariés de La Florida
aux petits producteurs ruraux, auxquels
peu d’institutions accordent de l’intérêt.
• La CAC FLORIDA, dans la forêt
amazonienne, est une coopérative qui
rassemble plus de 1500 petits
producteurs de café, regroupés pour
assurer le traitement et la
commercialisation de leur café. La
Coopérative a créé Crediflorida, une
structure d’épargne et de crédit pour
aider ses membres, notamment à la
diversification des activités.
L’objectif de la SIDI est de permettre à des
personnes d’accéder à un petit crédit pour
développer une activité productive et vivre
chez eux de leur travail. En plus du soutien
financier, la SIDI accompagne ses
partenaires (conseil, appui technique…), ce
qui constitue une garantie pour d’autres
investisseurs internationaux et péruviens.
A Lima nous avons aussi visité Villa El
Salvador, un ancien bidonville autogéré qui
a prospéré et fait école partout dans le
monde, à Cusco nous avons été logés au
Centre Bartolomeo de las Casas, partenaire
du CCFD, spécialisé dans l’aide aux
paysans indiens de l’Altiplano (voir FDM
de novembre 2006).
Et dans un journal de Lima, le jour de la
nomination de Muhammad Yunus au Prix
Nobel de la Paix, nous avons vu un grand
titre encourageant : « Le microcrédit,
nouveau nom de la paix »…
Odile et Paul MATHIS
Le mot du Président
Christian Schmitz, président du directoire
Chers épargnants et actionnaires
solidaires, chers amis de la SIDI,
Les citoyens solidaires poursuivent leurs
voyages…Après le Vietnam, l’Ouganda,
le Laos, Madagascar, le Sénégal…plus de
quarante actionnaires et épargnants au
fonds commun de placement « Faim &
Développement » sont partis au Pérou,
pour rencontrer des acteurs de terrain
partenaires de la SIDI et du CCFD, qui
agissent chaque jour pour trouver des
solutions durables aux problèmes de la
pauvreté. Nous avons ici rassemblé leurs
témoignages pour vous faire partager
leurs émotions et leurs constats.
Au cours de leurs rencontres avec les par-
tenaires, les voyageurs ont pu notamment
mesurer l’importance de la définition des
objectifs sociaux, et du besoin de cohé-
rence entre vision, mission et méthodes de
«gouvernance». Ce numéro d’InfoSidi
cherche ainsi à vous rendre compte au
mieux de la pertinence de l’action menée
par la SIDI et les structures partenaires
dans ce grand pays andin : ensemble nous
cherchons sans cesse à faire en sorte que
l’accès aux services financiers, s’il doit
permettre un mieux-être économique,
puisse aussi induire des changements so-
ciaux viables, facteurs d’un vrai dévelop-
pement à long terme. A ce titre, ce numé-
ro peut donc vous donner un nouvel éclai-
rage (après celui, plus extensif, du n°16)
sur la manière dont la SIDI et ses parte-
naires gèrent la tension entre objectifs
financiers et objectifs sociaux, à la recher-
che d’une plus grande « viabilité sociale ».
Car c’est bien l’originalité de la SIDI, en
tant qu’investisseur solidaire, que de
chercher à améliorer la qualité des servi-
ces offerts, à distribuer ces services au
plus grand nombre à des tarifs
« équitables », à contribuer au développe-
ment de liens sociaux au sein des commu-
nautés, tout en évitant les effets pervers
de la microfinance (comme le surendette-
ment).
Cette mission, nous la menons avec nos
partenaires grâce à vous tous, et c’est
pourquoi nous vous remercions d’avoir
rejoint cette « Chaîne de Solidarité pour
le Financement ». Puissent ces témoigna-
ges vous faire vivre un morceau du quoti-
dien de la SIDI et de ses partenaires : un
quotidien fait de difficultés et de remises
en question, mais fait surtout d’actions,
de résultats, de volonté, et d’espérance.

Edaprospo
EDAPROSPO est une ONG péruvienne,
partenaire de la SIDI et du CCFD, qui offre
des services en matière de santé, et
développe la microfinance par la promotion
d’une coopérative d’épargne-crédit et la
formation de micro-entrepreneurs. Ses
activités sont concentrées dans les zones
Nord et Est de Lima, quartiers populaires
très peuplés.
Nous visitons deux bureaux
d’EDAPROSPO et des petits artisans ou
commerçants qui bénéficient de
microcrédits, dans le cadre du programme
Prosperidad pour lequel la SIDI apporte
15% des fonds.
Le responsable du bureau d’Ate, en
banlieue de Lima, nous explique (avant
l’ouverture) les trois crédits proposés :
• Les Alcancias Comunales (tirelires
communautaires, voir encadré p.3)
visent à assurer une capitalisation pour
les membres, qui reçoivent un crédit en
commun.
• Les « Credin », crédits
individuels de 115 à 2.300€.
• Les groupes de caution
solidaire, dont les membres
se portent mutuellement
c a u t io n . Le s c r éd i t s
solidaires sont d’un montant
de 70 à 1.150€ par
personne.
Les crédits sont de 4 mois, avec
un taux de 2,7 % par mois
(contre 10 % dans les banques
classiques).
Le bureau du quartier de
Huaycan compte 1.800 clients
(contre 8.000 pour l’ensemble
des 5 bureaux d’EDAPROSPO). En voici
quelques-uns :
Marita emprunte (au sein d’un groupe
solidaire de 15 personnes) pour faire de la
pâtisserie vendue à l’hôpital. Son crédit est
de 140 € pour 4 mois à 2 personnes.
Alexandrina faisait de la vente ambulante
de vêtements. En 1999, elle crée un petit
commerce de vêtements. Elle emprunte
350€ tous les 4 mois. Le groupe solidaire de
15 personnes au départ compte aujourd’hui
22 personnes. La boutique est louée 230€
par mois. Son chiffre d’affaires s’élève à
3700€ par mois. La boutique est ouverte de
9h à 22h. Une partie des vêtements est
Voyage SIDI au Pérou
fabriquée par la famille.
Carmen vend des produits lactés dans une
échoppe du marché de quartier qu’elle a
achetée 580€. Son groupe solidaire
comprend 12 membres. Elle emprunte 140€
tous les 4 mois. Son bénéfice est d’environ
20€ par jour pour une ouverture de 7h à
22h.
Gloria fait partie d’une communauté de 22
personnes. Elle et son mari ont utilisé un
terrain familial de 2.500 m2 pour produire
des plants de plantes ornementales qu’ils
revendent aux grossistes ou au marché. Elle
emprunte 230€ tous les 4 mois (au départ,
c’était 70€). Elle réalise un chiffre
d’affaires de 350€ par semaine. Elle a pu
installer l’eau (5€ par mois) alors qu’avant
elle devait faire venir des citernes (140€ par
mois).
Rums et Rulia ont ouvert il y a 25 ans un
atelier de poterie avec l’aide d’amis. Depuis
2 ans, EDAPROSPO les aide pour
développer leur production grâce à l’achat
d’argile et de peinture : prêt de 350€, au
sein d’un groupe solidaire de 22 personnes.
Actuellement, ils fabriquent 1.500 petites
mangeoires par semaine (pour les oiseaux,
Rums dans son atelier de poterie
les cochons d’Inde, les poulets, les lapins), téléphoniques... Cette jeune femme
qu’ils revendent à des grossistes. Une
mangeoire rapporte 0,06€. Les personnes
qui aident à leur fabrication sont payées
0,05€ la pièce.
A terme, ils voudraient exporter aux Etats-
Unis des produits en porcelaine mais il
faudrait emprunter 11.000€ pour se lancer.
Ces personnes ont pour la plupart rejoint
Lima avec leurs familles pour fuir le
terrorisme du Sentier Lumineux, la
pauvreté, la sécheresse…Ils paraissent très
heureux de nous recevoir et très satisfaits
des services du microcrédit. Seul le potier
Infosidi n°17—septembre 2007 / Page 2
avait l’air de trouver notre visite peu
compatible avec ses nécessités de
production.
Toute cette économie est informelle, et ne
paie pas d’impôts. Le Gouvernement ferme
les yeux car cette activité contribue à
développer l’économie du pays et un jour
elle rejoindra sans doute l’économie
formelle.
Daniel CROQUETTE
Le marché de Santa Rosa
L'asphalte a fait place à la terre. De
nombreux mototaxis se faufilent en se
frayant leur chemin à coups de klaxon.
Nous arrivons au marché Santa Rosa dans
le district d’Ate (banlieue de Lima). C'est
dans ce quartier qu'en 1978 est née
EDAPROSPO, à partir d’un mouvement
social national et de la volonté des
syndicats de devenir plus autonomes dans
leurs activités économiques. Cette ONG,
partenaire du CCFD, a une
longue expérience dans la
formation de petits
entrepreneurs, et l’éducation
(santé, citoyenneté
participative). En 1992, elle a
débuté ses activités de
microfinance en lançant le
programme "Prosperidad". La
SIDI est partenaire de cette
organisation depuis 2001.
Sur ce marché, nous avons
rendez-vous avec des petits
commerçants bénéficiaires de
micros crédits
d'EDAPROSPO.
Nous nous arrêtons devant le
stand de Mme Olina, qui vend
des CD, DVD, livres, cartes
souriante nous explique qu'elle fait partie
d'un groupe de 16 petits commerçants qui
ont constitué une "alcancia comunal" (voir
l'encadré). L’emprunt de 150€ lui a permis
de se constituer un stock plus important et
plus varié. Depuis un an et demi elle fait
partie de la direction de cette alcancia et se
sent beaucoup plus entourée et soutenue
qu’avant. Elle fait partie d'un groupe,
réalise un travail d'équipe, peut partager ses
problèmes et trouver des solutions.
Plus loin Marie-Luz tient un bazar. Elle fait
partie de la même alcancia que Mme Olina.
 Voyage SIDI au Pérou
Quand on voit le planning de la
préparation du budget participatif
Alcancias comunales : seulement du microcrédit ? 2007, avec nombre de réunions,
formations et navettes entre les
Dans le cas des « Alcancias Comunales », tirelires communautaires où un groupe de person- représentants des habitants et la
nes emprunte en commun (pour entre 45 et 500€ par personne ) à Edaprospo, la démarche mairie, on comprend pourquoi Villa
dépasse le seul microcrédit. En effet, les remboursements sont assortis d’une épargne obliga- el Salvador a été récompensé par
toire, apportée à la « tirelire ». Sur décision collective des membres, cette épargne peut être l’UNESCO comme « une des plus
récupérée par chacun en fin de cycle, ou bien être capitalisée pour remplacer l’apport initial audacieuses expériences populaires
d’Edaprospo. pour la nature participative de ses
organisations communales ». L’action
• Dans le premier cas, les participants peuvent apprécier la force de l’épargne. Il faut avoir menée par les habitants pour vaincre
entendu les participants proclamer avec fierté ce qu’ils ont « gagné » grâce à leur Alcancia la pauvreté sans aide gouvernementale
Comunal ! Pourquoi « gagné », alors qu’il ne s’agit que de leur propre épargne ? Parce a fait naître un sentiment
qu’ils ont gagné la conviction que leurs efforts étaient porteurs d’un résultat tangible à long d’appartenance à une collectivité.
terme. Ils ont amélioré leur sécurité dans un contexte de vie pourtant précaire. Cette force leur a permis de repousser
• Dans le deuxième cas, ils sont devenus autonomes, capables de se prendre en charge sans le terrorisme (le Sentier lumineux n’a
solliciter l’extérieur. Et n’est ce pas exactement ce que l’on peut leur souhaiter ? pas pu s’infiltrer) et de lutter contre la
délinquance dont le taux reste faible.
Guy DEQUEKER
L’éducation demeure un facteur
essentiel de progrès social ; il y a 15
Son prêt lui a permis d'étendre la gamme de de terre. Puis ont été mises en place les bibliothèques, plusieurs radios locales …..
ses produits et d'avoir plus de clients. Tous voies de communication, l’alimentation en
les mois, elle rembourse une partie du eau et l’assainissement. Depuis 1973, Villa Ce que l’on peut retenir de cette visite c’est
capital et les intérêts. Et même, nous dit- El Salvador est officiellement reconnue le dynamisme du mouvement populaire qui,
elle fièrement, elle se constitue une épargne comme municipalité. La gestion aujourd’hui encore, privilégie la solidarité
personnelle. participative commence au niveau des entre les personnes.
« blocs » (regroupant 24 familles), dont les
A peine sortis de la boutique de Marie-Luz, habitants participent aux décisions les Henri et Elisabeth Lesage
nous sommes rejoints par le président du concernant.
marché, créé il y a une vingtaine d'années
par une association de 312 commerçants. Il Chaque groupe résidentiel entoure un
a été électrifié récemment, ce qui permet à espace vert. Nous rencontrons Roberto, Le Centre paroissial Oscar
Mme Olina d'avoir une télévision, et à ses secrétaire d’un groupe : il nous explique
clients de visualiser les DVD avant l'achat.
Aujourd'hui l'association recherche un
comment fonctionne la communauté dans
l’intérêt de tous, et donne en exemple la
Romero, foyer 3 âge de ème

financement pour amener l'eau. Ne doutons réalisation d’un équipement pour les
pas qu’ils vont réussir ! enfants.
Monique ROGER Aujourd’hui, Villa El Salvador compte plus
de 350 000 habitants, une zone industrielle
de 2000 entreprises, une zone universitaire,
« Villa El Salvador » Un et une zone agricole aménagée en plein
désert grâce à la transformation des eaux
Oasis d’Espoir usées.
Villa El Salvador
Cette rencontre m’a enthousiasmé tant par
l’objectif poursuivi, soutenir des « seniors »
très pauvres, par le dynamisme du
responsable, Tonny Palomino, que par la
joie des personnes âgées rencontrées.

Cette initiative paroissiale a été le fait de

Accueillis par Pedro Carmona, employé
municipal de Villa El Salvador, nous
écoutons le récit de la création et du
développement de la ville : suite à un
tremblement de terre en 1971, de nombreux
paysans des hauts plateaux sont venus à
Lima, et furent refoulés sur une terre
désertique. Contre toute attente, et grâce à
l’enthousiasme des fondateurs, le bidonville
a pu devenir une grande ville organisée.
Dès le début, les habitants, en s’appuyant
sur la participation active de chacun, ont pu
mettre en pratique de nouvelles méthodes
d’organisation de la ville. Après des
tentatives de répression policière, le
gouvernement a proposé à chaque famille
de devenir propriétaire d’une petite parcelle
Tonny et de trois autres personnes il y a 18
ans, pour venir en aide aux personnes âgées
isolées et très pauvres de Villa El Salvador
(alors qu’au Pérou les personnes âgées sont
censées rester dans leur famille).
Aujourd’hui, 135 viennent au Centre
Paroissial trois fois par semaine. Il leur est
proposé le petit déjeuner et le repas de midi,
des soins si nécessaire, des activités :
jardinage, alphabétisation, artisanat, et
animations.
Ce sont des personnes de plus de 65 ans,
totalement isolées, à haut risque (famille,
pauvreté, santé). 70 % sont analphabètes,
et 30 % parlent seulement le quechua.
Les habitants de Llachon nous accueillent
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Seules 6 sur 135 bénéficient de la Sécurité
Sociale.
Les locaux sont financés par des amis de la
paroisse (dons, vêtements, médicaments…).
Tout le personnel est bénévole. Ainsi,
Sonia, médecin, vient une fois par mois, de
même que des infirmières assurent les
soins.
Un travail important se fait avec les jeunes
de plusieurs écoles de familles aisées. Ils
viennent avec leurs professeurs et
participent à l’animation des activités. En
échange, des « seniors » du foyer
interviennent dans les classes pour raconter
leur jeunesse. L’objectif est de favoriser
chez les jeunes la connaissance de cette
réalité sociale.
Tonny met tant de conviction à nous faire
partager cette expérience que je comprenais
presque sans traduction alors que je ne
connais pas un mot d’espagnol. Lui-même
est responsable de la paroisse catholique. Il
vient d’un village très pauvre. Auparavant il
a travaillé dans un orphelinat et comme il
dit avec un grand sourire, il faut beaucoup
de patience !
La réussite est patente car la joie des
personnes âgées a éclaté à notre arrivée. Il a
fallu les embrasser, les prendre en photo…y
compris une personne de plus de 100 ans.
Daniel CROQUETTE
Le Centre Bartolomeo de
las Casas
Le Centre Bartolomeo de las
Casas a été fondé en 1974 par
des Dominicains de Toulouse,
avec pour objectif la
production de savoirs pour les
habitants des Andes du Sud.
Implanté à Cusco et fort
d’environ 90 personnes et d’un
patrimoine immobilier
constitué par les Dominicains,
le Centre comporte trois
programmes : le Collège andin,
pôle académique de formation ;
la Casa Campesina, orientée
vers les communautés
paysannes (accueil à Cusco de
paysans qui viennent pour des
problèmes juridiques, conseil
juridique aux municipalités
rurales, réflexion sur l’impact
de nouvelles activités (tourisme, tissage) en
Voyage SIDI au Pérou
milieu rural), et une maison
d’édition, avec une
imprimerie et une librairie. Mesdames du Pérou,
Initialement, le Centre a Avant de vous quitter, Mesdames du Pérou,
vécu de soutiens (dont celui Je voudrais saluer votre grande noblesse ;
du CCFD), mais la En montagne ou en ville, j’ai découvert en vous
diminution des aides Un aussi grand courage éclairé de sagesse.
européennes, et plus
généralement le caractère Vos tissus colorés soutiennent les petits,
Doucement endormis sur le dos qui les berce ;
aléatoire des aides, l’a
Dès la pointe du jour, proposant vos tapis,
amené à développer des
Vous êtes, je l’avoue, les reines du commerce !
activités d’autofinancement
(imprimerie, hôtel-centre de
J’ai aussi admiré vos noires chevelures,
conférences, auberge de Sagement resserrées en deux très longues tresses ;
jeunesse) qui permettent de Rehaussées d’un chapeau, vous aviez fière allure,
soutenir les activités non Vos jupons sautillant qu’un coup de vent caresse.
commerciales.
J’aurais parfois voulu échanger quelques mots,
Le Centre nous a été Mais nos yeux bien souvent ont compris le message ;
présenté par son directeur- J’emporte au fond de moi comme un si beau cadeau,
adjoint, Xavier Ricard, un Le son de votre voix et votre douce image.
jeune universitaire français
qui termine une thèse. Ce Elza BONNIN
dernier, se basant sur les
recherches effectuées par le
Centre, nous a bien éclairés sur certains • Orientations politiques au Pérou. La
aspects de la situation socio-économique du société péruvienne est très peu
Pérou : structurée et sa classe politique ne
propose pas de projet politique pour le
• Communautés rurales, agriculture pays, à l’exception de la priorité à
pauvre. A l’exception de quelques l’industrie minière (source de pollutions
secteurs de la côte ouest, les ruraux extrêmement fortes que nous avons pu
péruviens sont caractérisés par une constater de visu lors de notre voyage, et
grande pauvreté et par qui emploie très peu de main-d’œuvre)
l’autosubsistance : forte fragmentation et du Traité de libre-échange avec les
des parcelles, crise du syndicalisme Etats-Unis (qui concurrencera durement
agraire, pas de projet de développement les productions locales, à l’exception
national intégrant l’agriculture des d’une partie de l’agriculture côtière). Le
zones pauvres, productions inadaptées à pays est désindustrialisé depuis les
années 80, et le salariat représente
une éventuelle commercialisation.
Produire pour le marché serait une
révolution pour le milieu agricole andin.
moins de 10% de la population active.
Pour les gouvernements, les ONG sont
des dangers qu’il faut
contrôler, tandis que tout est
fait pour attirer les capitaux
étrangers, au prix de
sacrifices sociaux et
environnementaux.
Ces analyses confortent
l’intérêt des actions du
Centre, comme celui des
structures soutenues par la
SIDI : reconstruire un
artisanat traditionnel dans les
milieux pauvres et lui assurer
des débouchés ; aider à
l’organisation des
agriculteurs, de la production
à la commercialisation. Il
reste beaucoup à faire,
surtout sur l’Altiplano.
Odile et Paul Mathis
Le Machu Picchu, la cité mythique Inca
Infosidi n°17—septembre 2007 / Page 4

Les productrices de
pommes de terre de
Pazos
Confianza est une EDPYME
(structure de microfinance
reconnue par la banque centrale
péruvienne) partenaire de la SIDI
(qui détient 4.5% de son capital).
Avec Elisabeth, sa présidente,
nous sommes allés à Pazos : 10
000 habitants, dans la région la
plus pauvre du Pérou (74% de la
population y vit en dessous du
Le 1er groupe, accompagné de salariés de Confianza, pose avec le groupe
seuil de pauvreté), où nous avons
rencontré un de leurs clients : un
groupement de productrices de
pommes de terre.
Des femmes nous attendent, devant le local
de leur association, dans leurs habits
traditionnels très colorés et leur chapeau
caractéristique, quelques unes avec leur
jeune enfant dans le dos ; après les
salutations, elles nous invitent à entrer dans
leur local : sol en terre battue, quelques
bancs et deux tables sur lesquelles sont
disposées des corbeilles contenant plus de
20 variétés de pommes de terre, natives
(existant avant l’arrivée des Espagnols) et
améliorées. Au Pérou, plus de 300 variétés
de pommes de terre sont cultivées.
Irénéa, présidente de l’association, nous
explique que toutes les variétés de pommes
de terre cultivées ici sont destinées à la
commercialisation , sauf une variété native
réservée à la consommation de la
communauté (tant par goût traditionnel que
pour conjurer le mauvais sort —elle ne doit
pas être pelée).
Irénéa nous explique que les pommes de
terre sont une des bases de leur
alimentation, à tous les repas. Elles se
conservent suffisamment pour être stockées
le temps que le marché offre des conditions
d’écoulement favorables.
Les pommes de terre déshydratées se
conservent 4 à 5 ans : c’est le « chuño ».
Pour cela, les femmes appliquent la
méthode traditionnelle : exposition au gel
nocturne, puis au soleil, et pressage avec les
pieds. Ce qui réduit le poids des pommes de
terres de 80%.
Les femmes produisent elles-mêmes leurs
semences et les améliorent par sélection.
Voyage SIDI au Pérou
acquérir une petite
maison ; maintenant
nous avons un terrain ;
nous avons eu 4
enfants ; aujourd’hui
chacun a sa maison ; un
de mes fils a acheté un
tracteur pour ses
besoins et le loue aux
autres, ce qui arrange
tout le monde ; un autre
fils a installé une serre
et suit une formation ;
ça a servi d’exemple
pour les autres ».
Tout en discutant, nous
dégustons des pommes
de terre locales,
accompagnées de
fromage de vache frais,
des femmes de Pazos
délicieux.
Elles alternent les cultures tous les 3 ans Enfin, nous nous quittons avec émotion et
pour permettre à la terre de se reposer. les voyons retourner à pied dans leurs
villages, portant dans leurs « mantas », qui
Plusieurs femmes de l’association ont son bébé, qui des provisions.
emprunté à Confianza :
Nous avons ainsi constaté tout le parti
• Une jeune femme de 30 ans mariée, 3 qu’elles ont su tirer des crédits et de la
enfants, a fait un emprunt pour acheter formation apportés par Confianza.
des semences et des engrais ;
• Lucie, mariée, 8 enfants, a emprunté Suzon et Maurice GROUÈS
700€, qu’elle rembourse et renouvelle
tous les 10 mois, et qui lui permet
d’acheter animaux d’élevage, semences,
engrais et produits contre les
parasites ; son premier emprunt
remonte à 11 ans. Aujourd’hui elle
vend ses pommes de terre 0,18€ le kg,
ce qu’elle estime être un prix correct.
Il y a encore quelque temps, les hommes
étaient les seuls à pouvoir emprunter, et
les femmes n’avaient aucun contrôle de
l’usage qui était fait de l’argent (parfois
ils le buvaient …) ; aujourd’hui, les
femmes ont accès au crédit et gèrent
elles-mêmes leur budget ; elles se
regroupent pour mieux négocier et
obtenir ainsi un meilleur revenu de leur
production.
Confianza leur a apporté du crédit, mais
aussi des conseils techniques sur la
fertilisation, la protection contre les
parasites, la commercialisation.
Irénéa nous explique ensuite en quoi
l’accès au crédit à amélioré sa condition :
« quand je me suis mariée, nous étions
très pauvres ; progressivement, nous
avons augmenté notre production, fait des
progrès en nutrition, à l’aide des médecines Mme Irénéa nous présente les nombreuses
naturelles ; plus tard, nous avons pu variétés de « papas » locales.
Infosidi n°17—septembre 2007 / Page 5
 Voyage SIDI au Pérou
Maria Luisa Rio
Le marché artisanal de Carmen : célibataire.
Elle fabrique des sacs,
Confianza des ceintures, des porte-
monnaie, et des
chapeaux en cuir. Elle
travaille depuis 11 ans.
Ce marché se situe sous le bureau principal Elle est très satisfaite de
de Confianza, à Huancayo. C’est un marché sa présence ici.
permanent ouvert tous les jours, et occupé Elle a un crédit de
par des artisans locaux qui sont en société Confianza pour la
collective sous l’égide de Confianza. Nous location-vente de son
interrogeons plusieurs de ces artisans, un local, pour lequel elle
peu surpris de nos questions, avant que rembourse 80€ par mois
nous ne soyons présentés comme sur 7 ans. Elle emprunte
« actionnaires solidaires de Confianza »… aussi ailleurs.
Sa famille (3 à 6
Americano : marié, 2 enfants, sculpte de personnes selon la
magnifiques calebasses. Artisan depuis 20 saison) fabrique les
ans, il est dans le réseau Confianza depuis Americano sculpte lui-même les calebasses qu’il vend
objets . Elle gagne en
deux ans, ce qui lui a permis de passer moyenne 280€ par mois,
d’une vente hebdomadaire à une vente tous frais payés. Elle fait partie, ce qui est achète elle aussi progressivement.
quotidienne. Il est très content, car sa rare au Pérou, de l’économie formelle et Une pièce de tissu qui demande un quart de
présence dans ce quartier proche de la journée de travail se vend 1,8€. Elle gagne
paie forfaitairement 5€ d’impôt par mois.
cathédrale lui donne une expansion 92€ par mois en moyenne.
inconnue jusqu’alors. Toute la famille Ilda Labado : mariée, 4 enfants. Elle vend
participe à la production. des tissus de laine très colorés, à la mode Tous ces artisans ont vivement apprécié nos
Il paie 100€ par mois pour la location-vente péruvienne. Ils sont fabriqués à la maison, achats de cadeaux et souvenirs !
de son local pendant cinq ans. Le prix des sur un métier à tisser, et toute la famille y
calebasses va de 3,5€ (une journée de travaille. C’est très beau. Les tissus Daniel CROQUETTE
travail) à 28€ (une semaine de travail). Il représentent la vie des Péruviens. (Danses,
gagne net entre 70 et 185€ par mois, selon travail des champs, animaux,…).
la saison. Par Confianza, elle dispose du local qu’elle
Sa production est vraiment magnifique.

Le tourisme tel que nous l’avons vécu sur le lac Titicaca

Presqu’île de Llachon
La communauté de la presqu’île s’organise pour que les habitants accueillent eux-mêmes des touristes et leur fassent découvrir
et partager leur vie. Nous arrivons en bateau à l’embarcadère, où cinq familles nous attendent pour nous recevoir chez elles :
l’accueil est chaleureux et malgré les problèmes de langue la relation se crée. Nous découvrons leur vie : ils cultivent quelques
lopins de terre (pommes de terre, fèves, maïs, oignons…), élèvent quelques animaux : vaches, cochons d’inde, moutons. Nicolasa,
chez qui nous logeons, tient en plus une petite boutique de produits de base (alimentation, produits d’hygiène…).
Le repas du soir et le petit déjeuner, pris en commun, sont préparés par les 5 familles. Pour le repas, surprise !... nous serons habil-
lés avec les vêtements locaux : jupe colorée, petit gilet décoré, châle et chapeau pour les femmes ; poncho pour les hommes.
Dans chaque famille une ou deux chambres arrangées simplement mais avec goût permettent d’héberger une ou plusieurs per-
sonnes.
Durant la saison haute, les familles accueillent des touristes plusieurs fois dans la semaine. Elles reçoivent environ 20 soles (5€) par
chambre et par nuit et 10 soles (2,5€) par personne pour le repas et le petit déjeuner.

Ile de Taquile
Nous avons découvert une communauté qui s’organise pour accueillir les touristes et pour répartir équitablement les gains.
24 restaurants sont ouverts durant la haute saison, mais ce sont les responsables de la communauté qui nous indiquent le restau-
rant, dans lequel nous dégusterons une truite excellente accompagnée de pommes de terre et autres légumes (menus et prix
sont identiques dans les 24 restaurants). En basse saison, les restaurants ferment à tour de rôle.
Les artisans et fabricants de vêtements sont également organisés pour vendre ensemble leur production : les prix sont fixés collec-
tivement et chaque produit porte le nom de la famille qui l’a fabriqué.

Voici des réponses apportées par ces communautés aux défis du tourisme de masse. Pour nous, rien à voir avec l’hôtel et le res-
taurant classiques. Nous avons eu l’impression d’être attendus, nous avons été accueillis chaleureusement par des péruviens heu-
reux de nous rencontrer, et de nous faire entrevoir tout simplement leur façon de vivre.

Michel BLANC et Martine PREVÔT

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Rencontre avec la
Florida, coopérative de
caféiculteurs
La Plantation
Nous descendons la vallée du Rio Perene en
longeant des plantations d’orangers, de
bananiers, d’avocatiers, de papayers …
Tous les arbres poussent ici, même les
piquets de clôture ! A Yurinaki, nous
quittons la route goudronnée pour prendre
une piste qui grimpe dans la montagne, car
les caféiers poussent de 850m à 1600m.
C’est le début de la saison des pluies,
toujours très attendue par les agriculteurs.
Nous allons rejoindre la famille Quispé
sous un déluge. Le chemin serpente
entre les caféiers et les pacays (plante
donnant de gros haricots
comestibles). Quelques dizaines de
mètres plus bas, nous atteignons les
bâtiments de l’exploitation et un abri
bienvenu. Là, trois générations nous
attendent: la mère, le fils Maximo, la
fille, son mari et ses enfants. Ils
cultivent le café depuis neuf ans sur
11 ha, et font aussi un peu d’élevage :
poulets, cochons d’inde et quatre
vaches.
Les plants de caféiers sont bouturés
sur place (nous verrons 60 000 plants
à l’usine de traitement!) Le caféier
atteint 30cm en 5 mois. La première
récolte aura lieu 3 ans plus tard. Le
plant produira environ 7 ans. Les
caféiers sont toujours plantés avec des
pacays qui apportent de l’azote et
évitent la prolifération des mauvaises
Maximo Quispe et sa mère devant leur plantation
herbes. La récolte s’effectue à la main, de
février à septembre. Sur chaque pied,
l’ouvrier choisit les grains mûrs, bien
rouges, ce qui nécessite une grande
dextérité pour récolter une centaine de kilo
par jour pour un salaire de 4,6€. En période
de campagne, une quinzaine d’ouvriers
agricoles viennent de la montagne épauler
la famille Quispé pendant cinq à six mois
puis repartent.
L’usine de traitement
La pulpe est éliminée par centrifugation, et
transformée avec les coques en compost.
Les grains sont transférés à l’usine de la
Merced, où ils sont séchés dans des
brûloirs, l’énergie nécessaire étant fournie
par brûlage de la deuxième peau entourant
les grains.
Voyage SIDI au Pérou
Le café de première qualité est destiné à
l’exportation, celui de deuxième qualité est
torréfié sur place pour la consommation
locale. La certification qualité est délivrée à
la source, au niveau de l’exploitation : des
normes précises sont imposées à
l’exploitant. Ce dernier bénéficie de
l’assistance technique de la coopérative, qui
propose aussi des formations de haut niveau
( en général une semaine par mois pendant
six à huit ans).
La CAC La Florida, créée il y a quarante
ans, regroupe 1.500 exploitants. Au
moment de la récolte, la coopérative achète
le café au producteur 1,4€ le kg puis
ajoutera un bonus (environ 0,3€ par kilo) si
la vente se fait dans de bonnes conditions.
La coopérative participe à la vie sociale de
la région en créant des infrastructures pour
les transports (280 km de routes), en
construisant des centres de santé et des
écoles.
La Coopérative d’Epargne et de crédit
Crediflorida a été créée le 16 mars 2003,
conformément à la législation péruvienne,
comme caisse d’épargne et de crédit et a
collecté 300.000€.
Crediflorida, qui compte aujourd’hui plus
de 600 membres (dont des institutionnels,
comme d’autres coopératives) assure des
financements qui vont d’abord vers la
production de café, mais aussi vers la
diversification : petits commerces, cultures
d’ananas, de bananes…
Pour le seul secteur du café, 907 crédits ont
été accordés en 2005 pour un montant total
de plus de 500.000€, pour une surface
cultivée de 1222 ha et une production de
Infosidi n°17—septembre 2007 / Page 7
18.000 quintaux. Le taux d’intérêt reste
faible : 1,36% par mois, soit environ 18%
par an, grâce au soutien d’organisations du
Nord comme la SIDI.
A travers cette rencontre, notre groupe a pu
reconnaître les grandes orientations de la
SIDI :
• permettre à des familles pauvres qui
n’ont pas accès aux crédits classiques de
financer le développement d’une
activité qui leur permette de vivre, chez
eux, de leur travail
• soutenir prioritairement l’agriculture
familiale rurale
• établir une relation de partenariat en
participant à l’analyse financière et à la
planification des activités, pour inscrire
la structure dans la pérennité
• et enfin, réfléchir avec ses partenaires à
la viabilité sociale de leurs activités,
pour leurs membres et les collectivités
auxquelles ils appartiennent.
Alain et Anne-Marie BRETHON
Viabilité Sociale
Une expression importante dans la
perspective d’un véritable
développement.
Les partenaires de la SIDI que nous
avons rencontrés dans les différentes
régions l’intègrent dans leurs actions.
Les prêts sont certes consentis (avec
un appui en accompagnement) pour
créer et développer une activité
économique, mais aussi avec la
volonté de faire évoluer le client et sa
famille, au sein de la communauté,
pour pouvoir par exemple scolariser les
enfants, permettre l’accès à des
programmes de santé, etc.
A Pazos, par exemple, les femmes de
l’association de productrices de pommes de
terre nous ont confié que grâce à
« Confianza », elles ont pu multiplier leur
production, mais aussi améliorer leurs
demeures et permettre à plusieurs enfants
de suivre un cycle secondaire. De plus, la
prévention est aussi au cœur de leurs
préoccupations, plusieurs d’entre elles
ayant pu recevoir des soins dentaires.
Lors de notre visite à la ferme de Cypriana
et de son fils Maximo (planteurs de café),
nous avons aussi constaté ce souci de
viabilité : Cypriana, avec beaucoup de
courage et grâce à la Coopérative, est

devenue propriétaire de ses terres, et elle a
pu envoyer son autre fils suivre des études
secondaires.
A la Coopérative elle-même, le fait est
encore plus visible : par exemple avec la
création d’un centre de formation régional
de niveau universitaire pour ses adhérents,
la contribution à l’aménagement des routes
et chemins, à l’accès à l’eau… Une
réflexion est aussi menée sur l’éventualité
de créer une caisse de retraite, malgré les
difficultés du pays.
La Viabilité Sociale, c’est bien une
démarche à long terme, centrée sur les
bénéficiaires. Elle est au cœur des
préoccupations et de l’action de la SIDI
avec ses partenaires.
Mireille HERAUDEAU et Elza BONNIN
Réflexions finales sur le
voyage SIDI
Ce voyage au Pérou, avec la SIDI, m’a
bouleversé, provoqué, et beaucoup
interrogé. Voici trois idées que je voudrais
partager au terme actuel de ma réflexion :
Premièrement, il est important de faire une
découverte touristique du pays. Savoir dans
quel contexte historique, géographique se
situent ces personnes avec qui nous avons
noué des relations de partenaires. Avec
José, qui a été un guide exceptionnel, j’ai
bien compris qu’il y a 3 Pérou (côtier, andin
et amazonien) et qu’il faudrait presque 3
présidents de la république… Plus de 80
climats nous a-t-il dit, un pays « où tout
pousse » ! On sentait cette fierté de nous
dire toute la richesse de son pays.
Voyage SIDI au Pérou
Les Terrasses
Dans la vallée de la Colca, la Cordillère
des Andes s’écarte en un profond cañon.
Les pentes moins raides dégagent un
grand espace où les hommes ont cons-
truit la ville de Chivay. La montagne
ressemble à un diamant taillé en creux.
Elle s’est laissé façonner par la volonté et
la patience millénaire des hommes. La
terre est retenue par des murets de pier-
res qui festonnent les pentes et créent
des espaces plats jusqu’aux sommets. Ils
captent les rayons du soleil et gardent sa
chaleur. L’eau est obligée de circuler
dans d’étroits canaux, qui courent
comme des veines à la surface du sol.
Après l’avoir rassemblée dans les terras-
ses, l’homme va venir « gratter » la
terre, la blesser un peu pour qu’elle ac-
cueille les graines et les plants. L’homme
va « l’anesthésier » par des chants et des
danses. Avant de semer, il exécutera des
rituels avec des foetus de lamas et de la
graisse et nettoiera précautionneuse-
ment les canaux. Ainsi soignée la Terre-
Mère Pacha Mama pourra accoucher
de la nourriture pour les hommes. Ils
choisiront minutieusement leurs semen-
ces. L’homme saura laisser la terre se
reposer. Il proposera souvent des com-
pagnonnages aux plantes. Il les sèmera
l’une à côté de l’autre comme le quinoa
et la fève. D’autres fois, il les mariera
comme le maïs et le petit pois, disposés
dans le même trou. La luzerne habite
de nombreuses terrasses ; les vaches y
circulent pour brouter.
Jusqu’à son dernier souffle, l’homme ira
travailler la terre. Lorsqu’il aura fermé
définitivement les yeux, Pacha Mama
l’accueillera pour l’éternité.
Anne-Marie BRETHON
A Huancayo, avec Confianza, j’ai été saisi
par la démarche de la SIDI : participer
activement aux conseils d’administration et
aux orientations, favoriser ce
développement ailleurs qu’à Lima,
privilégier le milieu rural avec ses
possibilités. Une fois de plus nous avons eu
la confirmation des remboursements de
prêts à plus de 95%... surtout les femmes.
A La Merced, la Florida m’a impressionné.
Quel travail jusqu’à la tasse de café
dégustée en France ! « Payons-nous notre
café au juste prix ? » a dit l’un d’entre
nous... Extraordinaire expérience de cette
coopérative de caféiculteurs, avec son
président qui est aussi un simple exploitant.
J’ai été marqué là encore par leur souci de
favoriser un maximum le développement de
la zone pour créer des emplois locaux, et
éviter le départ des jeunes.
In fine, je me souviens, nous avions avec un
peu d’humour posé à notre guide José la
question : « Dans ton pays où il y a tout,
qu’est ce qui manque ? ». Sans hésiter, il
nous a répondu : « Ce qui manque avant
tout, c’est de l’éducation pour l’ensemble
de la population »…
André et Mireille HERAUDEAU
Dernière minute : la SIDI, avec Voyager
Autrement, organise un nouveau voyage de
découverte au printemps 2008 au Maroc.
Vous serez tenus informés de tous les détails
dès que possible.

J’ai été marqué par la présentation mesurée

de l’épopée des conquistadors… Cela m’a
interrogé quant aux « chemins de
l’évangélisation ». José n’a pas eu de
jugement tranché comme nous serions peut
être tentés de l’avoir…
Deuxièmement, c’est le constat que plus de
la moitié de la population est en situation de
pauvreté, alors que…la nature n’est pas
avare de possibilités, « tout peut
pousser » nous a répété José ! Il y a aussi
une grande richesse minière, des universités
en nombre (plus de 27 !) avec des
chercheurs, entre autres dans le monde
agricole, comme Ulysse et Carmen que
nous avons rencontrés dans leur ferme
modèle. En somme, le Pérou a beaucoup
de potentialités, et pourtant…
Troisièmement, aider au développement
dans un tel contexte n’est pas facile, et les
pièges nombreux. Trois rencontres m’ont
marqué et aidé dans mon discernement :
A Villa El Salvador, j’ai vu et je crois avoir
compris que l’essentiel des interventions
extérieures (ONG et diverses structures
internationales) consistait à soutenir
activement les initiatives de la population
locale.
A Taquile, ce sont les hommes qui tricotent !
InfoSidi - Solidarité Internationale pour le Développement et l’Investissement
Directeur de la publication : Christian Schmitz ■ Réalisation : Laurent Chéreau
Photos : SIDI ■ Imprimeur : Impression Directe
SIDI - 12 rue Guy de la Brosse - 75005 Paris - 01 40 46 70 00 - Fax : 01 46 34 81 18 - www.sidi.fr
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