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Guillaume Apollinaire tomba amoureux de Louise de Coligny-Chtillon, quil surnomma Lou,

juste avant de sengager dans larme franaise. Les pomes quil lui crivit au front pendant
la Premire Guerre mondiale entre 1914 et 1915 ne furent publis intgralement quen 1955
dans le recueil Pomes Lou.

Mourmelon-le-Grand, 6 avril 1915.

Ma Lou je coucherai ce soir dans les tranches


Qui prs de nos canons ont t pioches
C'est douze kilomtres d'ici que sont
Ces trous o dans mon manteau couleur d'horizon
Je descendrai tandis qu'clatant les marmites1
Pour y vivre parmi nos soldats troglodytes2
Les trains s'arrteraient Mourmelon le Petit
Je suis arriv gai comme j'tais parti
Nous irons tout l'heure notre batterie
En ce moment je suis parmi l'infanterie
Il siffle des obus dans le ciel gris du nord
Personne cependant n'envisage la mort

Et nous vivrons ainsi sur les premires lignes


J'y chanterai tes bras comme les cols des cygnes
J'y chanterai tes seins d'une desse dignes
Le lilas va fleurir Je chanterai tes yeux
O danse tout un chur d'angelots gracieux
Le lilas va fleurir printemps srieux
Mon cur flambe pour toi comme une cathdrale
Et de l'immense amour sonne la gnrale3
Pauvre cur pauvre amour Daigne couter le rle
Qui monte de ma vie ta grande beaut
Je t'envoie un obus plein de fidlit
Et que t'atteigne Lou mon baiser clat

Guillaume Apollinaire, Pomes Lou (posth. 1955).

1
marmites : obus
2
troglodytes : qui vivent dans des grottes
3
gnrale : sonnerie destine rassembler les troupes

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