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Qu'est ce que Bâle 3 ?
Contexte de Bâle III
Modèle de Bâle III
Les grandes mesures de Bâle III
o 1- Des fonds propres d'une meilleure qualité
o 2- Des fonds propres à un niveau plus élevé
o 3- Diminuer l'effet de levier sous Bâle III
o 4- Une meilleure gestion de la liquidité
Liquidité à long terme
Liquidité à court terme
o 5- Couverture contre le risque systémique dans Bâle III
Les accords de Bâle III sont des suggestions de nouvelles réglementations destinées au secteur
bancaire. Suite à la crise des subprimes en 2007, le FSB (Conseil de stabilité financière) et le G20 de
2010 à Séoul ont contribué à la mise au point de nouvelles mesures de stabilité pour le système
bancaire mondial.
L'analyse des effets de la crise a abouti sur le fait que son impact sur les banques vient de la croissance trop
rapide des Bilans et hors Bilans des banques associée à une faible qualité des fonds propres. Les fonds propres
sont censés couvrir les risques, ce qui explique une nécessité d'augmenter leur qualité étant donné le niveau de
risque pris par les banques et leurs interdépendances.
Capital et Bâle III Liquidité et Bâle III Risque systémique et Bâle III
Création de matelas de
sécurité (Protection
contracyclique)
Augmenter la part du Common equity dans le Tier 1, ce qui équivaut aux actions ordinaires, et aux
réserves (ce qui revient à augmenter les reports à nouveau).
Les Banques doivent déduire du Tier 1 les intérêts minoritaires, les participations dans les autres
banques et les actifs d'impôts différés.
Unifier le Tier 2 au bilan.
Réduction puis exclusion des produits financiers
hybrides couverts par le common equity
Ces mesures vont alors entraîner une hausse du capital et une restriction de la distribution des dividendes pour
les banques, notamment à cause de l'augmentation du report à nouveau. Les banques sont incitées à émettre
des produits convertibles en actions afin que les fonds propres puissent augmenter dès que leurs niveaux sont
trop bas.
Ratio l'effet de levier fixé à 3% du Tier 1: Les expositions ne pourront alors pas être 33 fois supérieures
au Tier 1.
Notation des différents profils d'actifs puis association avec leurs niveaux de ressources stables
recommandés (en fonction de leurs risques)
Nouvelle pondération des actifs nécessitant un certain niveau de financement (en fonction de leurs
risques associés):
Nouvelle pondération dans la qualité des financements (en fonction de leur stabilité) :
Se protéger contre les situations de stress ponctuelles en possédant des actifs liquides et de bonnes
qualités, permettant de résister à des sorties de trésorerie pour au moins 30 jours.
Pondérer les actifs en fonction de leur qualité et liquidité
Les banques vont être poussées à investir dans des actifs de haute qualité mais avec une plus faible rentabilité
afin de répondre à l'exigence de la solvabilité à 30 jours.
Les banques devraient être poussées à limiter les volumes de transactions avec d'autres banques et autres
institutions financières. De plus, le risque de contrepartie lié aux produits dérivés devraient être mieux contrôlé. Il
devrait donc y avoir une modification globale du portefeuille de négociation des banques.
QUEL EST L’IMPACT DE BÂLE 3 SUR
L’ACTIVITÉ BANCAIRE ET LA
CROISSANCE ÉCONOMIQUE ?
Le Comité de Bâle sur le contrôle prudentiel bancaire est une institution créée en 1974 par les
gouverneurs des banques centrales des pays du "groupe des Dix" (G10). Suite aux dérives
constatées pendant la crise financière, un lot de mesures, Bâle 3, destiné à prévenir le secteur de
toute crise a été proposé.
Le Comité de Bâle s’attache à rédiger de nouvelles règles bancaires censées prévenir le secteur de
toute crise telle que l’on a connue. Venant renforcer les bilans des banques, « Bâle 3 » se heurte
pourtant au refus catégorique des établissements bancaires. L'idée du comité est relativement
simple: pouvoir comparer la solidité des banques les unes avec les autres et s'assurer qu'elles
pourront absorber des montants de pertes importants afin d'éviter de nouvelles faillites.
Faisant logiquement suite à Bâle 2, voyons ce que Bâle 3 nous rapporte comme objectifs avant de
s’intéresser à son impact sur l’activité bancaire ainsi que la croissance économique.
OBJECTIFS DE BALE 3
Le but étant d’améliorer la qualité du « noyau dur » des capitaux des banques et le « Core tier 1
». Ainsi, les activités les plus risquées pourraient voir leurs fonds propres se renforcer. La
solvabilité de la banque serait alors accrue.
Le « liquidity coverage ratio », ratio court terme, et le « net stable funding ratio », ratio long
terme. De ce fait, les établissements de crédit ne pourraient investir dans des actifs à long terme
(immobilier entre autres) qu’avec des ressources à long terme. Idem quant aux actifs à court
terme.
Constitués de résultats mis en réserve en haut de cycle, ils seraient utilisés en cas de crise et
aussitôt reconstitués en cas de période faste.
Le ratio d'effet de levier qui permet d'évaluer la taille des engagements des banques par rapport à
la taille de leur bilan existe déjà. En Europe, ce ratio n'est qu'un indicateur secondaire qui n'est
pas véritablement déterminant.
Le tableau suivant, basé sur les textes et les propositions Européennes, illustre les impacts de
certaines réformes du Bâle 3 sur plusieurs activités :
Bâle 3 a le mérite de répondre de façon structurée aux problèmes qui ont engendré la crise
financière.
Les réponses sont lourdes de conséquences pour le secteur bancaire, en particulier pour les
exigences de capital. Mais les conséquences ne sont pas limitées au seul secteur bancaire.
Dans la mesure où les banques jouent ce rôle moteur d’intermédiation et de transfert de risque,
des changements dans le calcul de leur solvabilité et de leur liquidité a des conséquences non
seulement sur leur mode de fonctionnement mais aussi sur leur capacité et leur façon de prêter.
A cet égard, toute l’économie est affectée.
Bâle III va-t-il transformer
en profondeur le secteur
bancaire ?
Obliger les banques à mobiliser davantage de fonds propres face
à leurs engagements aura un impact sur les besoins en fonds
propres et sur la gestion des liquidités mais aussi sur les activités
et la stratégie des banques.
La révolution Bâle III est en marche. Obliger les banques à mobiliser davantage de fonds
propres face à leurs engagements aura un impact sur les besoins en fonds propres et
sur la gestion des liquidités mais aussi sur les activités et la stratégie des banques.
Seront par ailleurs introduits des ratios de liquidité, pour tirer les leçons de la crise des
« subprimes », ces crédits immobiliers à risque qui se sont développés aux Etats-Unis et
se sont disséminés dans les portefeuilles de la plupart des acteurs financiers dans le
monde via la titrisation. Du fait de cette dissémination, la crise de ces crédits a ainsi
entraîné une perte de confiance généralisée dans les acteurs bancaires et entraîné une
paralysie du marché interbancaire.
Dès 1975 est signé le concordat de Bâle modifié en 1983 pour introduire le principe de consolidation
du contrôle prudentiel du secteur bancaire. Surtout, en 1988, le Comité publie l'accord de Bâle sur les
fonds propres -qui impose le ratio Cooke. Cet accord, dit « Bâle I ", fixe les exigences minimales de
fonds propres pour les banques actives à l'échelle internationale. Révisées en 2004 pour ce qui
constitue l'accord de « Bâle II » (avec le ratio McDonough), ces règles sont de nouveau en voie d'être
renforcées. C'est le processus de Bâle III.
Endossées par les ministres des Finances des membres du G20, les règles ont
néanmoins rapidement donné lieu à débat... et laissé en suspens la question des
établissements systémiques.
Dans un entretien aux « Echos ", le secrétaire général du comité de Bâle a répondu point
par point aux inquiétudes et aux remises en cause formulées par le secteur bancaire.
Qu'il s'agisse du risque d'un tarissement du crédit et du financement de l'économie, des
contraintes spécifiques que devront supporter les grands groupes porteurs de risque
systémique, de la course aux fonds propres exigée des 600 nouveaux milliards que le
secteur doit lever pour passer de 2 % à 7 % de capitaux durs. Ou encore des plus de
2.800 milliards qu'il doit dégager pour se conformer aux nouvelles exigences de liquidité,
selon les études d'impact de décembre 2010.
En juin, les nouvelles règles qui s'imposeront aux établissements systémiques ont été
précisées par le Conseil des gouverneurs des banques centrales. Il est proposé de
relever jusqu'à 2,5 % leur ratio de fonds propres de base, au-delà des 7 % exigés par les
futures normes Bâle III.
Document : la lettre des 7 ministres des Finances dans laquelle ils critiquent le laxisme
qui caractérise selon eux le projet de transposition des accords de Bâle III par l'Union
européenne.
Deuxième débat : les ratios de liquidité. Nouvellement élaborés par le régulateur, ils
sont très discutés. Au point que Bruxelles a renoncé à les imposer dès maintenant et
réclame leur révision.
Un impact à la fois financier et stratégique
La nouvelle réglementation prudentielle contraint les banques à consacrer une bonne
partie de leurs ressources au renforcement de leur capital. Au-delà de la mise en réserve
d'une proportion croissante du résultat, certains établissements seront contraints de faire
appel au marché.
Mais l'impact est aussi stratégique : le renforcement des exigences de fonds propres
contraint les banques à revoir leurs priorités en fonction de leur coût en capital ou de leur
apport en liquidités. C'est ainsi que se dessine en France une course aux dépôts.
Le cas suisse
En avril 2011, le gouvernement suisse a donné son feu vert à des normes financières
plus strictes que celles de Bâle III pour ses banques d'importance systémique, UBS et
Credit Suisse. Ces règles ont été élaborées à partir d'un rapport d'experts remis en
octobre 2010.
Le texte adopté par le gouvernement fédéral a été transmis au Parlement, qui pourrait
adopter une loi entrant en vigueur « au plus tôt début 2012 », précisent les autorités
helvétiques. Le 16 juin, la Chambre Haute de la Confédération Helvétique a avalisé cette
législation. Le processus d'adoption suit son cours.
Synthèse du rapport de la commission d'experts suisse sur le « too big to fail » (octobre
2010) -Olivier Hari, Centre de droit bancaire et financier -Université de Genève
Bâle 3 : réforme validée, banques
soulagées
Publié le 14 septembre 2010 par Nicolas BOISVILLIERS
Les décisions du Comité de Bâle sur la régulation bancaire dite "Bâle 3" ont été
bien accueillies par les marchés. L’accord international voté dimanche dernier
s’est révélé moins stricte que prévu, les sages de Bâle choisissant de durcir les
exigences de fonds propres mais accordant plus de temps en contrepartie aux
établissements bancaires pour s'y conformer.
Concrètement, le texte de la réforme opte pour une multiplication par plus de trois les
exigences de fonds propres imposées aux banques (à hauteur de 7% du total de leurs
engagements) sur une période de 8 ans. Largement anticipé, ce renforcement semble ne plus
faire autant peur, les banques ayant désormais largement le temps de s'y conformer. La
plupart d'entre elles pourra donc autofinancer ses besoins de fonds propres supplémentaires
et donc se dispenser de coûteuses augmentations de capital. Le soulagement était sensible :
l'indice de risque associé aux banques (sur la base des CDS, les fameux "credit default
swaps") se détendait.
Conséquences :
- les valeurs bancaires s’affichent à la hausse : +6,16% pour Dexia, +5,75% pour le Crédit
Agricole, + 4,3% pour la Société Générale,ou encore + 2,08% pour BNP Paribas,
De bien bonnes nouvelles alors que bon nombre d’analystes et d’investisseurs étaient
jusqu’alors pessimistes quant aux modalités de la réforme. L’étendue de la période de
transition (entre 2013 et 2018) en a étonné plus d’un. "La réelle surprise dans la publication
de Bâle 3 est l'exceptionnelle générosité de la période de transition", estimait hier une étude
de Credit Suisse.
Impacts réels
Les banques auront donc jusqu'en 2015 pour porter le ratio de leurs fonds propres de
meilleure qualité, le "Core" Tier-1, à 4,5% de leur total de bilan, et jusqu'à 2019 pour
constituer un "matelas de précaution" de 2,5%. Reste que les banques devraient honorer
leurs futures obligations prudentielles en distribuant moins de dividendes. Tout du moins, si
celles-ci veulent éviter de passer par la case levée de fonds. Une mauvaise nouvelle pour les
investisseurs.
Malgré les menaces des banques, il est difficile d'estimer aujourd'hui l'impact
macroéconomique de cette réforme. Pour le Comité de Bâle, celle-ci devrait être "modeste" à
moyen terme et bénéfique à long terme, puisque de nature à éviter une nouvelle crise. Une
chose est sûre néanmoins : quatre questions majeures demeurent en suspend.
1- La liquidité : le Comité de Bâle devrait publier ses nouvelles recommandations, d'ici à la fin
de l'année, pour l'application d'un ratio court terme d'ici à 2015 et d'un ratio à un an d'ici à
2018.
2- Les établissements dits "systémiques" : les plus grandes banques devront être capables
d'avoir des capacités d'absorption de pertes supérieures aux autres. Les grandes banques
internationales jugées d’importance systémique (c'est-à-dire dont la faillite menacerait le bon
fonctionnement du système financier dans son ensemble) pourraient se voir imposer une
"surcharge" de fonds propres en plus des règles de Bâle 3, en cas de sauvetage éventuel. A
coup sûr une nouvelle bataille en perspective pour les banques.
Reste le problème de l'aléa moral qui n’est pas résolu. Ce concept met en exergue le fait qu’un
acteur du système financier est d'autant plus enclin à prendre des risques inconsidérés qu'il a
la certitude d'être secouru par les pouvoirs publics en cas de difficulté. Même si la faillite de
Lehman Brothers a quelque peu mis à mal cette théorie, l’interdépendance et/ou taille de ces
banques plaident pour une faillite (quasi) impossible de ces établissements. Le Comité de
stabilité financière (FSB - Financial Stability Board), organisme indépendant du Comité de
Bâle, doit présenter ses propositions en la matière lors du sommet du G20 en novembre
prochain.
Cette réforme suffira-t-elle à limiter voire prévenir la prochaine crise ? Sans doute est-il trop
tôt pour y répondre. Une seule certitude : cette réforme constitue un des rouages essentiels
de la nouvelle régulation financière mondiale. Le nouveau cadre réglementaire dans son
ensemble s'annonce beaucoup plus strict et plus cohérent au niveau mondial. C'est
évidemment une bonne chose… à condition de garder la même volonté tout au long de ces
réformes.
Bâle 3 et le risque de marché : vers
une destruction de valeur ?
L'évaluation du risque de marché est une des pierres angulaires de la réforme. L'approche
existante qui reposait sur la Value at Risk « générale » et la Value at Risk « spécifique » a
été complétée par trois autres composantes qui permettent une prise en compte des
événements extrêmes : la Value at Risk « stressée », l'« Incremental Risk Charge » (IRC) et
la « Comprehensive Risk Measure » (CRM).
Dans le cadre de son étude évaluant les nouvelles exigences en capital liées au risque de
marché des banques de financement et d'investissement, Sia Conseil a évalué
l'augmentation de l'évaluation du risque de marché à 300% en moyenne, avec des
observations comprises entre 150% et 600% sur le périmètre de l'étude. Ces augmentations
conséquentes sont principalement dues à l'introduction de la composante Value at Risk
stressée qui peut atteindre à elle seule jusqu'à 70% de la valeur totale du risque de marché,
et cela concerne tous types de produits. Seules les indices boursiers et les opérations de
taux sont mois impactées par la hausse de la mesure des actifs pondérés en raison
respectivement de l'effet de diversification naturelle des indices et de la moindre volatilité du
marché de taux.
La réforme règlementaire Bâle 3 induit donc un triple effet pénalisant pour les banques de
financement et d'investissement : une évaluation plus exigeante et contraignante des risques
(effet dénominateur), une restriction des capitaux éligibles (effet numérateur) et des ratios
exigés plus importants qui impliqueraient, à périmètre d'activité constant, une multiplication
par 4 des fonds propres.
Malgré les messages rassurants des banques sur la crise actuelle et leur capacité à y faire
face, la méfiance reste de mise parmi les investisseurs. Ils veulent être rassurés et
souhaitent que les banques procèdent à une mise en conformité très rapide vis-à-vis de la
nouvelle règlementation
Le premier chantier dans les banques d'investissement porte sur l'évolution et l'adaptation
des portefeuilles avec la diminution voire l'arrêt de certaines activités. Ainsi, certaines BFI
mettent un terme aux stratégies trop consommatrices en fonds propres (stratégies
directionnelles par exemple). D'autres arrêtent leurs activités en développement (que ce soit
sur l'axe produit ou sur l'axe géographique), par définition peu rentables à court terme et
coûteuses en investissements, pour se recentrer sur leurs activités et leurs lignes métiers
phares. Certaines de ces décisions stratégiques ont déjà été dévoilées lors de la
communication des plans de sauvegarde de l'emploi et d'autres évolutions sont à prévoir
dans les mois qui viennent.
Par ailleurs, pour diminuer leurs expositions au risque de marché, les banque
d'investissement devront prendre en compte la dimension règlementaire dans leurs prises de
décision. En effet, la seule dimension économique des deals ne sera plus suffisante pour les
opérateurs de marché, qui devront également évaluer l'impact règlementaire de leurs
opérations. La mise en œuvre opérationnelle de cette gestion variera selon les
établissements financiers. Certains établissements pourraient limiter le risque en revoyant à
la baisse les limites imposées aux opérateurs de marchés. D'autres établissements
pourraient s'orienter vers un pilotage plus précis et plus stricte du risque en transposant aux
activités de marché des indicateurs du type de ceux qui existent sur les activités de
Financement (ex. : Raroc - Risk Adjusted Return On Capital). Enfin, la mitigation
systématique du risque de marché via des mécanismes de couvertures sera un moyen
efficace mais couteux de limiter la consommation en fonds propres.
Ces évolutions entraîneront une évolution des profils de profits réalisés par les banques
d'investissement. Ceux-ci seront moins réalisés par la spéculation et la prise de risque et
davantage grâce aux marges réalisées avec les clients finaux. Ainsi, la règlementation Bâle
III s'annonce douloureuse également pour les entreprises dont les produits et services
bancaires seront plus chers.
Afin de préserver leurs parts de marché dans un secteur où la pression concurrentielle est
rude, et pour justifier la hausse des coûts facturés aux clients, les banques de financement
et d'investissement devront fournir une plus grande qualité de service, continuer à innover et
se différencier. Certains acteurs pourraient également se lancer dans une course aux
volumes grâce à des offres de produits standards à faible coût (financements vanilles,
brokerage, offre standard « flow products » pour le taux et le change, etc.). Cela supposera
une industrialisation du trading et une automatisation des chaînes de traitement.
Quelles conséquences ?
Alors que les réformes précédentes du comité de Bâle ont impacté essentiellement le métier
des financements, ce sont aujourd'hui les activités de marchés qui sont en première ligne de
la règlementation Bâle 3. Toute la chaîne de valeur est impactée, du Front-Office, qui doit
limiter et modifier son métier, aux fonctions supports, pour qui le mot d'ordre est la réduction
des coûts.
Alors que la classe politique souhaitait relancer l'économie en sécurisant le secteur bancaire,
le contexte actuel rend la réforme contreproductive à court terme : au lieu de créer des
emplois dans l'économie réelle, des emplois sont supprimés sont le secteur bancaire.
Il ne reste plus qu'à espérer que ce cadre règlementaire ait l'effet favorable escompté à long
terme, à savoir prévenir toute nouvelle crise du secteur financier.
Bâle 3 : enjeux et modalités de la
réforme bancaire
Un an et demi plus tôt, la faillite de Lehman Brothers avait fait l’effet d’une bombe sur la
place financière. Faisant fi du célèbre adage « too big to fail » (1), la chute de la plus
prestigieuse des banques d’investissement internationales a permis de révéler au grand jour
l’état des bilans de ces établissements prêts à tout pour accroitre leur rentabilité. Usant et
abusant de techniques comptables, Lehman avait réussi à dissimuler pendant plus d’un an un
niveau d’endettement record. De manière générale, la question soulevée était donc celle du
rapport entre le niveau de capital des établissements bancaires (ou fonds propres) et les
activités à risques (subprimes par exemple).
Concrètement, des actifs (plus ou moins risqués) financés par très peu (ou pas) de fonds
propres. Ce qu’on appelle « l’effet de levier » permettait alors d’obtenir une rentabilité
exorbitante, dépassant allégrement les 100% dans certains métiers. Au risque de ne pas
pouvoir faire face à ses engagements en cas de défauts/crise. Qu’à cela ne tienne, le Comité de
Bâle (2) se charge de régler le problème.
Les objectifs de Bâle 3
L'idée du comité est relativement simple : pouvoir comparer la solidité des banques les unes
avec les autres et s'assurer qu'elles pourront absorber des montants de pertes importants afin
d'éviter de nouvelles faillites. Pour ce faire, il compte s’appuyer sur toute une série de
mesures baptisées « Bâle 3 ». Faisant logiquement suite à Bâle 2, quatre mesures principales
sont mises en avant :
Selon le Comité, il existe des fonds propres de meilleure qualité que d'autres dans leur
capacité d'absorption des pertes (3). Il s’agit donc d’améliorer la qualité du « noyau dur » des
capitaux des banques, le « Core tier 1 ». Les activités les plus risquées verraient ainsi leurs
fonds propres alloués sensiblement renforcés. La solvabilité des banques serait ainsi accrue.
- le « liquidity coverage ratio », ratio court terme, qui exigerait des banques internationales
de détenir un stock d'actifs sans risque facilement négociables, afin de résister pendant 30
jours à une crise,
- le « net stable funding ratio », ration long terme, qui lui vise le même objectif mais sur un
an.
En clair, les établissements de crédit ne pourraient investir dans des actifs à long terme
(immobilier entre autres) qu’avec des ressources à long terme. Idem quant aux actifs à court
terme.
Constitués de résultats mis en réserve en haut de cycle, ils seraient utilisés en cas de crise et
aussitôt reconstitués en cas de période faste.
Le ratio d'effet de levier qui permet d'évaluer la taille des engagements des banques par
rapport à la taille de leur bilan existe déjà. En Europe, ce ratio n'est qu'un indicateur
secondaire qui n'est pas véritablement déterminant. Néanmoins, sous la pression des Etats-
Unis, le comité envisage d'en faire une mesure intégrée directement au pilier 1 de Bâle 2,
celui qui permet de calculer les exigences en fonds propres, alors qu’il fait partie aujourd’hui
du pilier 2, simple indicateur des mesures de contrôle. Le tout afin d'éviter un trop fort
endettement des banques.
Levée de boucliers de la part des banques
Le moins que l’on puisse dire, c’est que Bâle 3 ne plait guère aux banques (4). Le projet
menace le financement de l'économie dans son ensemble selon elles ! Rien de moins. "On va
droit dans le mur" ou "On est en train de tuer le modèle européen, alors qu'il s'en est bien
sorti" peut-on entendre ci et là de la part de la profession. Elles dénoncent les trop fortes
exigences en matière de fonds propres qui pourraient les obliger à lever jusqu’à 450 milliards
d’euros de capital d’ici 2012. Du point de vue du ratio de liquidité à long terme (1 an), ce ne
sont pas loin de 1 500 milliards d’euros de dette supplémentaire qui seraient exigés. Enfin, la
définition des actifs liquides retenus dans ces ratios est jugée trop restreinte puisqu’elle se
limite aux obligations d’états. Tout bonnement impensable selon les banquiers.
Jean-Laurent Bonnafé, directeur général de BNP-Paribas, affirme que les mesures envisagées
par Bâle 3 sont trop coûteuses pour les banques, à tel point que celles-ci seraient obligées
d’augmenter les taux d’intérêts sur les crédits aux particuliers et entreprises. Il termine en
affirmant que ces nouvelles règles coûteraient 6 points de croissance à l’Europe.
De facto, Bâle 3 s’attache donc à encadrer les activités de marché, réputées pour être sous-
pondérés en fonds propres. Le capital devrait nécessairement doubler, voire tripler mais on
part de si bas que les banques osent à peine en parler. Du coup, elles concentrent l'essentiel
de leurs critiques sur l'autre volet des normes, qui vise, lui, à sécuriser le refinancement. Elles
osent ainsi affirmer que si on restreint leur capacité à financer le crédit par des ressources
empruntées, le financement de l'économie en fera les frais. Mais ne serait-ce pas les dépôts
des clients qui financent les crédits ? Le recours aux marchés restant marginal.
Une vision que partage Danièle Nouy, la secrétaire générale de l’Autorité de Contrôle
Prudentiel lorsqu’elle parle de "distinguer deux types de mesures au sein de Bâle 3, celles
d’une absolue nécessité comme la pondération en fonds propres des activités de marché, de
la titrisation ou du risque de contrepartie ; et celles dont il faut mesurer finement l’impact
sur l’économie réelle : l’amélioration de la qualité des fonds propres, et les ratios de liquidité
et de levier."
Le fait est que pour les banques, l'enjeu réel est bel et bien celui de la rentabilité et non celui
du financement de l'économie. Le premier effet des nouvelles normes, c'est de réduire
mécaniquement le rendement des fonds propres des banques, le fameux « RoE » (5). Mais là
encore, c'est une des leçons de la crise : on ne peut pas durablement afficher une rentabilité
de 15 % quand la croissance mondiale est de 3 %. La rentabilité des banques doit baisser… et
leur avidité aussi.
(1) L’expression « Too big to fail » ou « Trop gros pour tomber » signifiait qu’une entreprise
(en particulier dans le milieu bancaire) était devenue trop importante pour que l’Etat
n’intervienne pas en cas de difficultés importantes.
(2) Le Comité de Bâle (Basel Committee) est un forum constitué de représentants de banques
centrales et autorités prudentielles de différents pays (France, Allemagne, Etats-Unis, Japon,
Pays-Bas, Chine, Russie, Argentine ou encore Turquie) chargé de traité régulièrement les
sujets relatifs à la supervision bancaire.
(3) Par exemple, il est plus facile de se refinancer via des actions ordinaires qu’avec des actifs
hybrides et complexes.
(5) « RoE » ou « Return on Equity » que l’on peut traduire par « rentabilité sur capitaux
propres ». Il permet de mesurer, en pourcentage, le rapport entre le résultat net et les
capitaux propres investis. C’est la capacité d’une entreprise à générer des profits à partir de
ses capitaux propres nets (capitaux moins les dettes).
L’impact de Bâle III sur le
secteur bancaire et sur le
financement de l’économie