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Les autorités administratives indépendantes

16-11-2009
Matthieu
ORTALDA
2D

« Les autorités administratives sont-elles des autorités comme


les autres ? »

En France, la notion d’autorité administrative indépendante apparaît en


1978, avec la création de la Commission nationale de l’informatique et des
libertés (Cnil). Elle est ensuite confirmée en 1984 par le Conseil constitutionnel
qui s’en sert alors pour désigner la Haute Autorité de la communication
audiovisuelle (Haca).
Les autorités indépendantes ont été créées pour être mieux adaptées
que l’administration classique à certains domaines qui requièrent plus
d’indépendance. Elles ont été instituées dans plusieurs domaines :
l’information et la communication, l’économie et les finances, et les relations
entre administrations et administrés. Il en existe environ quarante, réparties en
deux catégories : les autorités administratives indépendantes et les autorités
publiques indépendantes. Leur différence majeure réside dans le fait que
seules les autorités publiques indépendantes possèdent la personnalité
juridique. D’après le Conseil d’État, les autorités administratives indépendantes
sont des « organismes administratifs qui agissent au nom de l'État et disposent
d’un réel pouvoir, sans pour autant relever de l’autorité du gouvernement ».
Pour jouer ce rôle d’autorité, ces administrations disposent de la personnalité
morale de droit public.
Mais les autorités administratives indépendantes sont-elles des autorités
comme les autres ?
Après avoir montré en quoi ces institutions sont semblables aux autres,
nous analyserons dans quelle mesure elles se démarquent de par leur
indépendance.

I- Des autorités semblables aux autres […]

Dans cette partie, nous nous attacherons à montrer que ces institutions
disposent d’une réelle autorité, et que leurs actions sont circonscrites à la
tâche administrative.

A/ Des institutions bénéficiant d’une véritable autorité

Les administrations indépendantes disposent d’un véritable pouvoir


d’influence, qui se concrétise par leur pouvoir de rendre des avis. Elles sont
très fréquemment consultées et rendent des avis de types différents (avis
simples, obligatoires ou conformes). Elles peuvent aussi exercer spontanément
leurs compétences en formulant des suggestions, des recommandations, ou
des propositions. Ainsi, à l’image du Défenseur des droits, le Conseil supérieur
de l’audiovisuel (CSA) dispose d’un pouvoir de recommandation : il peut en
adresser aux éditeurs et aux distributeurs de services audiovisuels et elles sont
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16-11-2009
publiées au Journal officiel. Souvent, les administrations indépendantes
exercent leur pouvoir d’influence en élaborant des rapports transmis au
pouvoir public (c’est le cas de la Cnil, ou encore de l’Autorité des marchés
financiers). De plus, elles ont la possibilité de prononcer des avertissements ou
des injonctions, voire des mises en demeure pour le CSA. La Cnil peut prendre
des décisions individuelles ou réglementaires en effectuant une nomination ou
en attribuant des autorisations.
Les autorités administratives disposent également, dans une moindre
mesure, d’un certain pouvoir réglementaire. Cela dit, le Conseil Constitutionnel
limite la possibilité au législateur d’accorder le pouvoir réglementaire aux
institutions (décision 2004-497DC). Cela signifie que le pouvoir réglementaire
dont les institutions indépendantes peuvent être investies doit être subordonné
à la Loi. De plus, leur pouvoir réglementaire est spécialisé : le Conseil
Constitutionnel exige en effet que les mesures soient limitées dans leur champ
et leur contenu. La Commission des Sondages est par exemple seulement
investie par la Loi à « définir les clauses qui doivent figurer obligatoirement
dans les contrats de vente de sondages ». Enfin, ce pouvoir réglementaire est
subordonné, car il ne peut s’exercer que sous réserve d’homologation
ministérielle.
Un pouvoir coercitif est également reconnu aux administrations
indépendantes. Elles peuvent en effet procéder à des investigations sur pièce
et sur place. Certaines autorités peuvent participer à la répression pénale : si
l’Autorité des marchés financiers a connaissance dans le cadre de ses
investigations de faits constitutifs d’une infraction pénale, elle a l’obligation
d’enclencher une procédure pénale. Cependant, ce pouvoir est encadré : le
Conseil Constitutionnel exige que ce pouvoir de sanction ne puisse jamais
consister en mesures privatives de liberté. Il exige également que les droits
constitutionnellement garantis soient conservés (89260 DC, principe du droit
de la défense).

B/ Des autorités dédiées à la tâche administrative

Elles sont chargées d’administrer, avec des missions de médiation, de


régulation voir même de protection. Toutes sont des missions d’intérêt général,
exercées par des personnes publiques nécessitant l’utilisation de prérogatives
de puissance publique. Par conséquent, ce sont des institutions soumises aux
règles du droit administratif. En cas de litige, ce sont des institutions soumises
en principe au juge administratif. Parfois, la jurisprudence qualifie l’institution
d’administrative, mais le plus souvent, c’est le législateur qui le précise.

II- […], mais qui se démarquent de par leur indépendance

Au travers de cette partie, nous montrerons que leur particularité est leur
indépendance : en effet, elles ne sont soumises ni au pouvoir hiérarchique ni
au contrôle de tutelle. Leur indépendance se concrétise également à l’égard du
pouvoir exécutif et politique.

A/ L’indépendance à l’égard de l’exécutif.


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Cette indépendance se concrétise d’abord par la collégialité, dans la
mesure où elles comptent en général de 10 à 20 membres. En effet, la
collégialité est de nature à favoriser la délibération objective. Cette
indépendance apparaît à l’examen de la nomination. La désignation est
souvent effectuée par des juridictions. Les membres doivent être choisis en
raison de leur appartenance à une catégorie socioprofessionnelle particulière,
et ils sont parfois cooptés par l’institution elle-même.
De plus, les membres des institutions indépendantes disposent de
particularités statutaires, comme le non-renouvellement de leurs mandats. Ils
sont également soumis à de très strictes incompatibilités, et leur mandat est
irrévocable et inamovible.
Comme ce sont des institutions de l’État, elles sont rattachées au budget
du premier ministre ou d’un ministère. En outre, l’État souvent représenté au
sein de l’administration indépendante par un commissaire du gouvernement
pour faire valoir le point de vue du gouvernement. Le commissaire du
gouvernement peut avoir la possibilité de provoquer une nouvelle délibération,
mais il ne dispose pas du droit de veto.

B/La soumission au contrôle du juge

Toutes les administrations indépendantes sont soumises au contrôle du


juge, et ce, par la volonté du législateur. Dans le silence des textes, la
jurisprudence estime que les administrations indépendantes ne sont pas par
principe soumises au contrôle du juge. Ainsi, dans la décision 86 217 DC, le
Conseil constitutionnel estime que la Commission nationale de la
communication et des libertés (CNCL) « dans l’exercice de ses compétences
est à l’instar de toute autre autorité administrative soumise à un contrôle de
légalité ». Ce contrôle peut être provoqué par le gouvernement ou par toute
personne y ayant intérêt. Cela montre que l’indépendance ne dispense pas du
respect de la légalité.
Le juge compétent pour connaître des litiges impliquant des autorités
administratives indépendantes est le juge administratif, sauf si le législateur en
dispose autrement. Le juge a cependant la possibilité, lorsqu’un contentieux
est réparti devant les deux ordres de juridiction, de confier l’ensemble du
contentieux à l’un des deux.

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