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1J1U . V VMi-íâ '
PICTAVS.J.
TR £8

*
TR AICTE'

DES ANGES
ET DEMONS, V\
R. P. MALDONAT
I E S V I S T E. i~ /^£Ç y
plis eu François, pár maistre François
DE X A B o R I E , grand Archidiacre
ç- Chjmtm iVtrigmnc.

5f KOVEX,
CÎiC2 I * C Qj E S B E SON GNS^ ÏÚ|
aux luiss, deuant la Gallere.

I 5 I 5.
A M O N S I E V R,
. - MONJIEVR. DE LA
JBORIE GRAND A R C H I-
. diacre , &c Chanoine a
igueux. .

ONSI£FZ,

Çejìeverftmdu Trá\
*^&t des bons f@ mou-
nais <tAnges a ejìé iugeeJi nette
& ftnaïfue, qu'on ïa ejiimee de-
reux'& obscur
m" i «'
entreplusieurs
autres monumens de vofìre bel
1 P I S T R É.
stffrit,comme morte $0 enfeuelie,
four iouyr de la belle lumiere du
Soleilyj&. viure, & cmuerfer en
tre les hommes- iefçaybien que
vojìre /madejiie affez^ cogneue â
tous ne voudroit pas que ce di
scours portajî vofìre nomfur son
front,pourm commencer mainte
nant d'ejlrecogneu m monde far
íun effortJì kger, ayant me/prisé
infìnies.occafìonsd'efìr.e celebre'par
la bouche des hommes Jçauans,
fjr plufeurs hardies (0 hautdi-
mfi-erffîeprjf&:ffîais nousfçauez.
que la gloire & Ihormeurfcnt U
coiir ^recherchent autant imper-
tunémmt^opiniafirementceux:
qui les meffnfmt)còm& ellesfuyei
i/i r et ceux quilespQur~
E P r S T'R' E?
ehajfent. Vous auesi, Monsieur,
tellement vefcu , donné deJhgran-
ixs ejfireuues de pieté'úr probité,
& acquisJigrande reputatio pour-
mnr bienfait,quil ne vous chaut
faíd'ejìre honoré,pour auoir bim
ètyWefcrit: au contraire de ceux
qmpreferentlalouangecheloquen^
ct,w plufìojì dtlahgage $0 babils
iudejtr d'auoir saintlement vef*
m, &fait plujieurs bonnes œw>
wts*vou$pouuezjvous rendre re-
(ommandable par ïvn & par
tautre,riefìant pas moins doBe^
f*e Religieux. : mah vous auez.
(juitté la partie,quipouuoit rendn
agreable & immortel voflre nom
entre Us hommes, pour embras
ser celle -qui vousrendraheureux
E P I S T R I.
eterneUment U haut parmy les
^Anges. Que^fiencoresvous me
ektes,quauois-ie djfí^se de trom
peter voflrenom»ne meditant au
tre chose maintenant que le mes-
pris de toutes choses humaines±&
le moyen de hun mourirx pour id.
ure éternellement aùec Dieu ? It
rejponds que ça ejìé premieremet
l'affection &singuliere obligation
que.ievous dois r secondement
afin de vous rendre comme loyal
depositaire &. fequejìrefidetle de
eethrefor qu'il vous pleut me dorh
fier w garde. Tiercernent peur
vous conuier à nenuier point au
public tant de beaux & riches
traitiez- tant de vefire inuention
que traduction qui moisissent
EPISTR E.'
dans voflre ça
Jbtonjìeur , en bonne part que ne
vous offre de vos biens, accuiiltèz.
cf bd mfxriá éjfo pîefa aue\.dh-
ceu (0 enfanté , (0 qui apres
flre promene' par: toute la France
fe varenclnentrsvoshrœs. Jouis-
ÇezjàujrmtdeVosTJálles, $0 ton~t
ànuez^sil vous ptaifìvoflre arì-
tienne amitié'Xceluyqm voushau
je les mains's f§ m vous defraHf
tout bien &> contentement spiri
tuel comme à toute vofìre noble
&. religieusefmilieidemeurera â
iamaisy^àiX Lr:cr2 uvJ"
ii o. fàS l: É. J&V' - ". A' ;.&
; f - f .-, - r
. . jyostt* nis-Tiumble seruiteur, Sr tres-
. . afiçjcti-pfine-OfateurJF.I. Bl ancokì.
"^-Slig'ÇUJf àaûMn^ Cqnuent 4e
';..zV rpbsebancc^e Tholose.
.a R ï I 1 s

Stant à Periguea*
tes années paflèes^
voyant te heaujtft
digneTraiàç des. Anges.te
Deirtofis a^ cabinet detcc
grand Afcc&diaçrc #.\îc fu| ~ ;
curieux del'importuner afin
que la France voyant ce; ri*
che -} thresorï.- *É Iwi^riueè
dVn íl grand labeur ; qu'il
auoit fait,tant à 1Vfcrire fous
le R. P, M A L D O N AT
Ielûiste, que de le traduire
cn íraiiçois.' Ie le Tçeus íi
AV L E C TE V R.
bien persuader qu'il en- fiat
content , & âpres estre en-
uoyc de mes Superieurs à
Paris pour :autres afraires,
ïay fait en forte de le met
tre fous- la preste y tant pour
faire voir lexeellenee du
propre Autheur que l'elo-
quence , & grand trauail du
Traducteur. L,e voila donc-
ques au iour , ayez en l'o-
Dligation à qui ie îe dedie,-
ayant voulu donner à vn
chacun., ce qui luy- appar
tient àgrçs -en. auoir payé;
l'vsure sp&iellc que de le
rendre en son dernier lustre
pour estre imprimé , afin
cjuvn chacun s'en ferue , 8c
A V tECTÌfR,'
loue Dieu en íés ïugemen*
imperscrutabks , bon à re
munerer ìèbiea y & iusteà
punir le mai»;, œmrrte^^rii
pourras voir en ce TráiÇfcé
des Anges & Demons > 8é
íouiûenstoy de rtìoy^ ert tes-
íaihctes prieres,aufqueiles i£
«ne recommande. A Dieu^'

- c
T A B L B" ; - -î % '
DES CHAPITRES
CONTENVS ÀV
Traicté des Anges;

'"Esmmsdes^Anges. fol\.b
-S'ils odes i^inges. êut
r%£~De Ïorigine des Anges, 8 .é
In quellieu furentfattsies Anges. ié&
Sitos les Anges ont ejìéfaits enfèmblé-
mnt. . ; ' ' ' iZut-
B? la nature des Kjtnges. 19 .a
&îest^i.ngesjòmcomfop^ de matiere
& desorme. ; 29 b
tmx Angesy a quelque córhpofìtion,

Si les K^Angesfont immorteh: 32^


Vela dtjference des Anges. 35.6
Cmment ilsJònt diflerens cnefçece. 4 2
Ta ili,
Desfacuhezdes cAriges. ' ' ifi\a
"Des aBìons des Anges. 50.4
De la miniere en laquelle les ^yînges
cognèrent. • 74.4
Siles Anges vjènt de discours. 79h
"Du lie» des Anges.; , \ - 8 2 .4
T>u mouucmm.des Anges. 94.a
Vis Anges particulierement > bons dr
mauuais. 99 .4
St les Anges ont esté faits enlace,
IO 4A
Siles Angesfurentfaits bte#-heure»x%

Siles bienheureux Anges feuknt jtè-


(her: . 1094
Si les bien-heureux (singes meritent
plusgrandefelicité. lui
De la diftinBúm des bons nyíngès.
liai
DeUpremiere Hierarchie. 114.4
De Useconde Hierarchie. 117.4
De latrotfejme Hiérarchie. i18 ut
Des Offices des Anges: .- ;. 1 1 8i
$iles Eglises ont aussi leurs Anges gar?
diens. llpâ
des démons. i34.^
Si quelquvn esiceuxpechapremierque
ks autres. 13 8w*
Si ccluy qui pecha lepremierjutmheur
depeche aux autres. i$9&
lequelOrdre ejloknt les autres Anges
quipecherent. i4i.*
úm/ienfut grand k nombre de ceux
jwsécherent. i42.4
Ja .« f/î<f tó{ft? demons quelque
temps depenitence. i42.4
despeines des demons, '-' , i4^

TABLE DE CE qyi
ÍST C O N T a N V A ^\
; Tuaicté de s démons. \

DB k distinction des demoni.


:- .- v.;-\v:..t:;
X* leur d/fivtfion p. ar U nature, .1
T, A B L E,
De leur difiincTwnpar les vices. \6%Jb
De lapuijfance desdemons.- 16 p Jb
Combiengrande est lapuissancedes dia-
nUes. 16p.b
Jusques ou sestend la puijfance du dia
ble. - iji.b
En combien de manieres vfe k diable
de cestepuiflance. . ijq-b
Ùledtable peut eflre arrestépar aucun
art.: .v , i7 S Jb
En quelles chofès le Sable peut exercer
- Japuiffance. \.-' i92.0.
Combien c'est que Us demons exercent
leurpuissancefur là volonté de 1'hom
me. "~- 205:<r
De Upuijfance des démonsfurles corps
humains. . v « <1 ' 207.6
Si par £ayde! M ifcmM leffòciersfè
peuuent rendre inuìfibks. 213.*
$t lés corpspeuuentestre changez -en dî
ner'fisformes par les démons. ii44jî
Si les denionspeuuent tuer h hommes.
2i6.a :
T A B L
lapaillardise. 2i8.4
Si ks démons & enchanteurs peuuent
émpefíher soopupUmenf charnel.
223.* •VW;V*j ui-;
DfZí puissance du demonÇur Us choses
^exterieures. - 228.^
-.Hie demonfeup-faire miracU. 22 £ .6
íi#(ftlotfiblede demander remede aux
émons contre Us dénions thejnks.
131.* '. ' ' .'/'r'. %[ .t '
Zty remdesjBccleJtaJtiques, % ll,h
des DoBeurs. >

NOus foubs-signez Docteurs ei


Théologie de la Faculte' dePa
ris , & deputez .par ladite Faculte'
voir les Liures , certifions auoir le
ce present, IvaìBí des Jtnges <jr De
mons, du P. TAddittdt lesuistc : Auquc
nous n'auons rien trouue' de con
traire à la Religion Catholique
Apostolique & Romainc.Faict ce *
Fcurier,M.DCV.

F. P.KÌÁTTHIE?
Carme.
r

if
i
TRAI-CTE' TRES-
DGCTE, DES ANGES,
I estrit sous le V. Tûaldonat , DoBeur
| lheologien,de la Compagnie de I E S Ks,
i.en l'art i570. "Por W. F. delaBwief
-MÁtehidiatre , Cr Chanoine k Téti~
gueux , traduit en François par k
| ; mefwe. V 4

A dispute des Anq;sa


deux parties. Lvne
generdle en laquelle
on dispute generalk-
rneflt des Anges , bons
& mamiáis: L'autre, speciale, en la-
cpiclle on traicte fout à-part, des bons
 des mauuais. La premiere partie,
est comprise en six questions. La pre
miere , da nom des Anges,- la secon
de , de leur estre , comme l'on dit,
c'est à dire , s'il y a des Anges: ía
ttoiftessmí, de leur origine : la qua
JRAICTE DES "ANGES,
4rìeme,de leur nature:la ciaoiiie/me,
de leurs puissances : iVftxicune , des
actions ,& fonctions .de leurs puiíl
sauces & facultez. - V--_

DES NOMS DES- I .


ANGE S.

IL nc se trouue aux sainctes Ietttes


aucun nom qui soit propre aux
Anges: mais il s'en trouue plusieurs
communs. Et premierement le nom
d'Esprit,lequel signifie la nature des
Anges estrc commune; aucc la natu
re de Dieu , & auec la nature de no-^
lire Ame. Cela signifie les paroles ;
de Iesus Christ,en íainct Luc , chapi
tre 2^ . Maniez & voyez, car l'Esprit
n'a point de chair , ny d'os. C'est vn
argument pris de la nature de la cho-
se. Or le nom d'Esprit se prend en
plusieurs autres manieres auxEícri-
tures sainctes, cómeesscrit Didimus
vfttge. au liure du S.Esprit. Le second nom
est Ange : lequel en partie est plus
propre que le nom d'Esprit , & en

/
pv P. Maldonat. 2
partie moins propre,d'autant qu'Es
prit est vn nom plus special & pecu-
lier.que le nó d'Angexar le nó d'Es
prit s'estend plus loin que le nom
d'Ange. Mais il est moins pro
pre : d'autant que le nom d'Esprit est
nom de nature, & le nom d'Ange,
est nom d'office. Et ceste difference
estquelquessois remarquee aux let
tres sacre'es:commeau Pscaume i03.
qui fais tes Anges les Esprits, c'est à
dire, qui fais que les natures spiri
tuelles facent l'offìce d'Ambafla-
deurs. Etsainct Paul aux Hcbricux,
cap. i0. Car auquel des Anges a-il
iamais dit tu es mon fils î Sont- ils
point tous Esprits administrateurs?
Ausquels deux mots S. Paul a donné
l'entiere définition d'Ange.Car An
ge n'est autre chose qu'vn Esprit ser- .
uant:commesi quelqu'vndêfiniíïbit
vn Legat estre vn homme enuoyé
par vn Empereur. Or le nom d'An
ge sc prend en plusieurs mafrieresc n
I Escriture. Comme a note' le Rabin
Mose , a* liure More, chap. 7. Pre
mierement ^.jour voc nature sepaje'e
Traictk' iìks Anges,
itìc corps,que nonsnommons Anges.
Secondement , pour vr* Pfophetet
d'autant qu'ils iont messagers de
Dieu ícomme il est eíjerie tn Mala-ì
«hic cliái ift Que tes letíte's-du Prestre
gardent la science : d'autant qu'il est
Ange du Seigneur. Troisiémement,
-pour tout messager des homrnesautf
homes, cême enEsaye cha.fí$. AHeg
Anges legers , à la terre, blessez 8C
arrachez. Anges, t"est à dirie-Viegats.
Qutìtriesroement , seprend pour le»
.gens debìen, eomme au premier des
R-oys,cha.. i ^.Tu es bon poiir-nro
gard,cómevn Ange de Dietii FkTfcfc-
blemét,non seulemët le Rabin Moíev"
ainS Iustin au Dia-kjgife íetou Jáuetí
Triphon, eícrit que quelqnesfôîs eA-
'i*4serfru-rte,Aftge se norn*', tetìíe
rt^ôtflïatWelte' s--çu fortfettfreíte , :d*e:
láqtitíBe'Diiíil Vse poúr'fá-ire quelque;
chose. Ainsi interprete Raby Mofe
ceci du Pseanme i05. Qni íaict î«
Esprits, fts Anges^t.e st à dire , qui-
fáit te» ìent$' ses messagersi Et ce
-qu'est en- Daniel chap. 6. QbeDieu
£rmoya: TAnge , peur boucher les
d v P. Mal don a t. f.
gueules des Lyons.CaríIs ne pensent
pas que soit este' vn Ange , ains vnc
venu diuine,par laquelle Dieu pro
hiba que Daniel ne fut offencé par
les Lyons. Et ce qu'estauxNombreS'
csl.2s.quel\Anges'apçdémàBalaarn
Je Propk. 8e que l'AsncíTe parla , Car -
il dit, que ce ne fut pas vnvray An
gevins vne vertu diuine par laquel
le Dieu resista àu Prophete. Au siir-.-
plus ceste opinion est fort absurde:
Combien que les Caluinistes l'ayen£;
embraflee, comme studieux de nou-
neaute'. Et ils interpretent ce paslàge -
dnPseaume, contrel'opinioa de S.
Paul, lequel allegue ce Heu aux Kc-
brieux. premier chapitre,& l'expose
des vrais Anges , St il a dit aux An
ges , qui fait les Esprits , tes Anges? -
&c. Mais il a dit au Fils, Ton throf-
ne ( ô Dieu ) au siecle du siécle. Car'
S. Paul ne compare pas lcsus Christ,
auec les vents,ainsauec les Anges. It
est absurde aussi d'exposer ainsi ce
lieu de Daniel. Car en mesme ma->
nicre au chap. 5. Quand Nabucho-
doaoíbr eut ietté Daniel dans la
A 3
Traicte' dbs Anges,
fou niaise de seu, & qu'il ne fut point
brufle , il veid quatre enfans en U
fournaise , combien qu'il n'y en eust
este' iette' que trots. Donques ce't
Ange ne fut pas la vertu par laquelle
Dieu empefitfeaí ains fut vn vray An
ge que veidNabuchodonosor.Et en
core aux Nomb. za. autre choseest
nommee l'Ange, autre la vertu par
laquelle l'Afnesse parla. Car si Ange
fignifioit vne vertu naturelle.ou sur
naturelles parler de FAngesenom-
meroit Ange , ce qu'il ne fait pasu
Donques, attendu qu'il apparut , cc
ne fut pas feulement vne vertu natu
relle ou diuine , ains vn vray Ange.
Ceste ambiguïté de nom a rendu
plusieurs lieux obscurs en l'Escritu-
re. Et premieremét,celHyquiesten
S.Paul,à la i. aux Corinthiens It. que
la semme doit prier ayant la teste
couuerte,àcause des Anges. Car les
jgutheurs forts anciens , comme Ter-
tullien.au liure de voiler lesVierges,
ont entendu pour Anges les diables
qu'ils dict estre constumiers d'aque-
ûer la pudicitc des semmes : & que
d v V. Ma lî> o n a r. 4
pourceste occasion les semmes doi-
uent estre voilees. Autres ont enten
du que tes Prestres font nommez en
ce Heu Anges, lesquels en l'Egíise re
presentée h personne delesusChristr
& qu'en leur~ presence les semmes
doiuent estre honnestement accou-
stre'es , comme deuant Iesus Christ
me Cm es. De ce'c aduis font faincts
rsicrosine & S. Ambroise aux Com
mentaires. Les autres l'ont entendu
des gens debien,que les semmes doi-
uent respecter. Ainsi Fa dit sainót
Clement , en ses Meflanges , com
me recite TheophÏÏacte aux Com- Mald,
mentaires fur ce lieu. II me fém- ».*'.
ble,àmoy,que le vray sens est ce-
luy qn'esscrit saint Chrysostome,ho-
meí. 16: sor la premiere-aux Corin
thiens, & en l'Homelie del'Ascen-
fion, tome troisième. Et Theodore*,
& Theophylacte aux Commentai
res , c'est qu'on l'entende des vray*
Angesbons.Car il semble que fainct
Pau? parle selonrîa vulgaire Opinion
desIttifs,quicroyoient quetous les
fifrmrrtes estoient conduicts fous hr
Traícte des Anges,
tuteledes Anges: Et admoneste les
semmes que si. elles ne reuerent les;
sommes qui assistent,qu'elles respe
ctent les Anges, lesquels ont accou-
stumé de rapporter à Dieu-tojis^
qu'ils npu s entendent faire 3t difer-
Çár l'estriturea de coustume d'ajjw,
peller les Anges; poux tesmçunsjd^uft
tant qu'ils siint fl|ít^voyçps?;§t-ryç-
peuuét aisc'rçent fnrjyr. <^a^qu^Ì'
íçsus Christ ^ict en sa^nct t^fihii
pitre 3. Tout homme qui me sonses-
sefa deuant les hommes, íe le confesr.
íbrày deuant rnó Perç, & lesAttg3Sy
-StJaj »9l Paul , çfl la prémUj* $ tk
motfiee, cha. 5. i'atteste- devant DLèii
& lesus Christ, & les Anges esleus,
qu'il garde ces chpseffan$ prejudice.
Le second lien , en ta roçfsijt Egtstre
çha. 4. Dieu a monstre' Jes AppÁrc
comme destinez à la mort, que nou
sommes rendus spectacle au mon
4e, & aux Anges, & aux hon^mçs : 1
où par les Anges, aucuns ont entei
du les malins Esprits, comme Xain
Ambroi se. D'autres ont ente ri p
les Anges, les gens de bien: & par 1
dv P. Max d on a t. y-
hommes, les mauuais, comme Sedu-
liusaux Commentaires. D'autres par
les Anges, les Chrestienscpar les ho
mes, les Gents , ou les Gentils : com
me Primasius fur ce lieu. Mais sainct
Chrysostome l'interprete mieux.ho-
mel.6". EtTheodoret, &Theôphy-
lacte, que celá soit dit aussi des bons
Anges. Car S. Paul a voulu signi
fier qu'il estoit comme vn homme'
condamne' à la mort, & propose à
mocquerie à toutes les creatures,
d'autant qu'il vse de distribution,-
lórs qu'il dit , qu-'il est pfopose'au*
choses inanimées , lesquelles il entécfc
par le nom du monde :Sí aux AngCs*
&aux hommes \ creatures raisonna
bles. De mcsme maniere ìesinnc:
qu-'il faut entendre le passage de l'Ec^ .
desiast ique, chap. 5. Ne dites pas de-
oant l'Aflge.il n'yapaSde prouiden-
ce: car il n'entend pas vn'Nonce,'
ains l'Ahge gardìen,qui est tousiourí -
present , & entend ce qu'on parle bië :
ou mal de Dieui Le Rabin Mosead--
iouste , qu'ils font aussi nommez aux
ïserkures Helèhim , c'est à dire»
TRAIíCTE des Ange-Sì-
Dieux. Dieux. Et qu'ainsi se doiuent entend
dre tous les lieux ausquels il est dit:
le Dieu des Dieux. Comme il dit;-
aussi, que partout là où Dieu est no
me Seigneur des Seigneurs, il dit
que" les Seigneurs sont nommez les.
Cieux, qu'il pense estre animez , Sc.
participons de raison.Car la loiiange:
de Dieu seroit nulle s'il se nommoit
Seigneur des Seigneurs , .c'est à dire»-
des hommes : 8l Dieu des Dieux,-
sçauoir est des luiss. Mais encore ce-
ste interpretatió est abfurde.Gar lors
qu'il est dit Dieu des Dieux , ce n est:
pas le sens , qu'il soit Dieudes Ido-,
les: &quandil est noinmé Seigneur
des Seigneurs-, íh n'est- pas signifié-
qu'il soit seutemét Seigneur des hò->.
mes:mais le sens est qu'il est seul vray^
Dieu &.vray-Sèîgneur. Voire & ce.
sens a este' exprimé pat; sâinct Raul en.
deux endroits, au 8. de la premiere-
aux Corinthiens: Et combien qu'il-
y en ait qui sont nommez Dieux(car-
il y a plusieurs Dieux ,& plusieurs-
hommes ) à nous toutesfois , il n'est;
, qtúrn Dieu , c'est. à. dire* àxeux. qui
cv P. Maldona t. c
ont bon iugement , vn est le vray
Dieu. Et en la premiere à Timothee,
ch. 6. Le Roy des Roys : le Seigneur
des Seigneurs , qui seul a l'immorta-
lite. Car tout ainsi que quand il dis,
que le seul Dieu a immortalite', il a
iuge'que le seul Dieuest vrayement'
te propremét immortel. Ainsi quand
ilestappellé Roy des Roys, & Sei
gneur des Seigneurs, il a ìugé qu'il'
est seul Roy & Seigneur, qui est la
suprême lqiiange;.

QUESTION DEVXIET
MB , S'ÍL; Y A DES AnGESì

LEs Doziteans anciens Heretì- uni


ques ('comme escrit Pilastius ttmu.
au Catalogue ) ont nié qu'il y eust
des Ainges. Et en ceste Heresie furent'
aussi les Sadduccens : comme est es- S*4im
crit aux Actes vingt-troisiesmecha-
pitre. Et sainct Augustin au liure des
Consessions, chapitre sixiesme; de--
dare qu'il auoit esté quelquesois en"
ce't erreur; Et toutesfois c'est mer.:
ueille que soit este' l'opiniondes Sad*-
rKAICTE DSS ANÇES,
ducéens attendu qu'ils receuoiet
k Pentateuche de Moy se. Auquel 1
mention est fort frequente des An
ges mais fur tous ces passages du Fer.
tateuche, auquel il est parle' des An
ges. Ils s'en iolient, comme fait R;
ni Mose de plusieurs autres lieux d
l'Escriture ks interpretât d'vne vei
tu naturelle, ou supernaturelle. Ma
ce qu'on Uct au Genese chapitre se
jJesmç, que l'Angedu-Seigneurfi
enuoyé à Agar , & parla à elle. Et c
qu'est escrit , chap. dix-neufiesir
des deux Anges en uoyez à Loth. I
au vingt-vniesme chapitre, d'vn ai
tre Ange enuoyé à Agar : Et au vinj
deuxiessme chapitre , de l'Ange q i
appella Abraham , de peur qu'il r
secrifiast son fils. Et çe que lacob î

montans & descendans par l'essche


le. Etceque luy-mesroeau chapit
quarante-huictiesme , dit l'Ange t
j)ieuqui m'a deliure' de tous mau
bénisse lès enfans , ne se peut a u c i
nement entendre d'vne vertu nati
relk , ou supernaturelle, ains à'-yi
£i V IV M AIDON At.
naturelle, subsistant d elle-messme&-
estant participante de raison. Car là
où il n'y a aucune matiere naturelle,
il n'y peut auoir aucune operation.
Mais au nouueau Testament les tes-
ratugnages font tres-clairs. Car ce
qa est escrit, que les Anges s'appro
cherent & seruirent à lesus Christ;
Et en fainct Matthieu- treziestae cha-

ïèront comme moissonneurs. Et au


chapitre seiziesme , quelesus Christ
viendra aucc les Anges de Dieu , &
au chapitre dix-huictiessme , les An
ges voye'nt totìíiours la face de mon
Pere. Et au chapitre vingt-deuxies-
me, en la resurrection ils n'espouse*
pont , 3c ne seront espousw , ains se-
roifcrcomme-Anges.de Dieu.Etcha-
pitre yingtquatrktmei irçwis--de ce
iour & heure , personne n'en- sçara
rien-, ne les Anges des Cieux. Et cha
pitre vingt-cinquiesme, Allez au seu
aernel , qui est appareillé au diable
& à ses anges. Et cb'ap'itre vingt-
iìxiesme, là où Iesus-Christ dit » qu'il
prut demander à Dieu douze legios
TRAICTH' DES A-NGESy-
d' Anges. Or ces lieux & autres inm
incrables ne sepeuuent entendre d'\
ne vertu diuine & naturelle ains de
natures subsistas d'elles mesmes , qu
nous appelions Anges. QuehjuVr
demandera, s'il se peut monstrer pai
raisons naturelles,qu'il y ait des An-
ges?les respons,qu'ouy probablemét
niais non par demonstration neces
saire. Car s'il se pouuoit verifier , ou
ce seroit par les argumens d'Ari stote
prins du mouvement , ce que ne se
peut faire : d'autant que par mesmes'
argumens il se prouueroit qu'il n'y a
pas plus d'Anges qu'il y a de ronds
celestes : qu'est contre la saincte Es-
criture laquelle enseigne que les An
ges font innumerables. Ou cela se-
demonstroit par les raisons des-
Seholastiques : Comme de S.Tho
mas , liure deuxiesme , Contra Gentes,
chap. ç6. Mais par ces raisons il ne se
peut monstres: d'autant quetous se
rapportent à trois principes;lesqnels
ent vne probabilité foible. Gxf&aty
le premier , II faut que l'efset soif
sexnbl able à . h cause ; Ceque n'ayant:
DV V. M A L D O N Á t. S
Heu sinon es choses Synonimes , fil
Dieu n'estant point cause Synoni-
me des choses qui font effectuees, il
semble que de Dieu il ne se peut rien
conclure. Pour le second , ses causes
quiagiísent par art doiuent auoir ef-
set semblable à l'art, par lequel elles
s'agissent : comme la maison sembla
ble à- l'art de l'Architecte , d'autant
que ce principe ne prouue pas ce
qu'il falloit prouuer. Car ce qu'on
dit, que l'effet doit estre semblable

tendre selon la nature, ainssclonla


vertu de signifier. Parce que la mai
son n'est pas de mesine art, duquel
est l'art qui est en l'entendement de
l'artisan : ainsest telle. qu'elle a esté
designée par l'csprit .ou par l'artde
l'artisan. Et parce, ce't argument con-
clud seulement que le monde doit
estre tel que Dieu le conçcut : mais
ne verifie pas qu'il soit necessaire
qu'il y. ait quelques creatures spiri
tuelles. Pour le troisie'me,qu'au mon
de y a quelques choses qui ont seule
ment vn corps lan*esprit,çommc.les
JLRAICTE UBt. ct»OÏS,
pantes:Ies autres qui ont corps, &
esprit comme l'homme a : Et parce,
Jbrdre mesme du monde requiere/
qu'il y ait quelque tierce espece des
choses qui ait esprit fans- corps. Mais
quelqu'vn dira , cela n'est pas neces
saire. Qupy donc , se peut-il point
verifier par quelque argument cer-
tain,osté les Escritures , qu'il y a des
Anges ì le refponds,que par raisons
il ne se peut prouuer : mais par expe
rience (qui surmonte toutes raisons)
il se peut prouuer. Par l'cxperience,
tant des Demoniaques, que des En-:
chanteùrs,& autres choses, qui ne fc .
peuuent faire que par esprits*! -. :i ' ^

QUESTION T RO I S I E S ME,.
- DE l/ORIGIfcB DES ANGES.

QV e les Ànges ayent'«n leur


origine de Dieu , il se peut aisé
ment prou u er j»ar tous les passages-
4 ausquels il est dit , quetoutes choses*
ont este' faites; de Die'u :' cïaotant;
qu'en ce nombrívniuersel j il est ne
cessaire que les Anges foienteom»
D y P. M AI dona xi 9
jrins. A dioustons,que sainct Paul en ' x
l'Epistreaux Colocenses,chapitre i.
escrit nommément , que les Ange*
ont este faits de Dieu: par lequel ont
esti cre'ez toutes choses au Cid ,M
en la terre , visibles & inuisibles*
lesThrosnes, les Dominations, le*
Puissances. La question est bien
plus grande, quand c'est que les An. Quanâ
ges furent fajcts. Dequoy il y aust
trois opinions des Théologiens. La-/*"5
premiere est tres-ancienne , de ceux
qui penserent lés Anges auoir esté
faicts de .lpng temps auant cemon-
de. Et de ceste opinion fut Clement,
liure hui ctiesme , des Constitutions,
chapitre seiziesme. Et Origene, Ho-
melie quatriessme, fur Efaye.Et Dio-
donus Transenfis en Lypominu*,
sor la catene, Et S. Basile homel. i.éc
î.sur l'Exameron.Et S. Hilaire,H. is.
de la Trinité, & au liure contre Ma-
' sestius. Et S.Arabroise,liu. i. del'E-
M meron ,chap . 5 . Et Nazia nzene, èà
l'oraison de Noël. Et S. Hierosme,
sur le premier chapitre,de l'Epistre à
Titus. Et S.Augustin^au ia.des Có-
TRAICTE ' DES ' Aífces,
seíTchap. i5. EtDamascenc,liu.
la Fo1y.çh.2.Ec Cassianas.en la (
ktion 8.ch.7.lequeladiouste,qu
futl'opinió de tous les Catholic
de son temps. Voicy les argutr
de ceste opinion. Lc premier, qui
Anges sot ministres de Dieu,& c
n'est pas croyable que Dieu ait
.t.- 7 si longuement fans ministres.
deuxieme , qu'en lob, chap. 3 8.1
-"- dit, que les enfans de Dieu»c'<
dire, les Anges loiioient Dieu
qu'il foisoit le monde. Le troisie
«st de S. Augustin , prins de l'Ec
siaste.ehap.i. la Sapience a este c
premier que toutes choses. Pou
quatriéme , on peut àdiouster , c
n'est pas v r ay semblable que Mc
. eust obmisl'origine des Anges ,
n'eussent este' faicts aitant le moi
°('- La seconde Opinion , fut d'ífidi
* Jiu?e premiervdes offices ; chap.
J^t de£. Greg. liu. a 8. des Mora
fibîfHhifrUitítfyB.di.ipJBt defie
.quçstvfbsur te 4JiÚjkïRxiys,e'R ;
|es:Angt^ furent faicts bien peira
le monde visible , & ont deux ar
BT P. MALDONA T. IO
mens : L'vn qu'en lob, 40. ch. il est
dit : II est commencement des voyes
du Seigneur, c'est à dire , Bchemot
là où il semble qu'il est parlé du dia-
b\e-.L'autre est, qu'en S. Iean 8. Iesus
Christ dit du diable aussi : II estoit j. os»
homicide dés le commencement du """;•
monde. La troisiesme opinion , fut
des Hebrieux, comme eferit Rabbin
Ioanná,au Bereschit Rabba.Et Rab-
bi Isaac , sur 1c premier chapitre du
Genese. Et Paulus Burgensis , aux
Commétaires.sur le premier du Ge
nese: C'est que les Anges furent faits
le second iour, lors que le firmament
fut fait. Leur argument est , qu'ils
pensent que par les eaux, font enten
dus les Anges : & que les eaux qui
sent fur les Cieux, semblétauoiresté
faites le second iour. Car ainsi inter-
pretent-ils cecy,du Pseaume. Estetr-
dant le Ciel comme vne peau , com
me s'il disoit,faisantleCiel,& le rem
plissant d'Anges , pour l'habiter. Ils
rendent la raison de cecy:de peur que
s'ils eussent este' faits auant les hom -
me9,l?on eust pense qu'ils eussent esté

S
g r I RA ICTE : DE $ A AïfG f.?,
Ojh- createurs du mendie. La quátrie/
©piíjion,siit d'E piphanius <> ^.herej
Et de S.August-in,uu.! i.de la Cite
Dieu,ch-ç. EcdAíthanasse, enLyp
toaaiis, In.Çatea*. apres Isido
Jiu. i. des offices Ecclesiastiques ch
Z2.Et deTheodoret, quest. 3, fur
Genese , lesquels disent les: Aoges :
«oir este' faits ensemblement , auc
le Ciel 86 la terre. Laquelle opinioi
tous les Scholastiqnes ont .suyuie
do- ^gant *moy,i estime prenrieretneni
que les Anges ne furent pas feiu
auant ce monde, & que cela est non
seulemét probable, ains qu'il appro
che fort de la foy Catholique. D'au
tant que ie ne t rouue pas de meilleu
re interpretation de ces paroles de
Moyse : Au commencement Dieu
crea,&c. qucdedirejauant^ueDieu
fist aucune chose , comme l'a explì.
que' Salomon-anx Prouerbes 8. auant
qu'il fist aucune chose, deslecom-
mencemét. Laquelle interpretation
estant vraye,il s'enfuit neeessairemét
que îes Anges me furent par faits
auant ce commencement , auquel Je
DV T*. Malíjonat. II
ciel& la terre forent faicts. En secód
lieu , d'autarrt qu'auant que S. Paul
dist nommément aux Colocenses i.
que les Anges" siissení faits de Dieu,
i\n'ya point de doute que cela me£
BienesepeutYÁíifierpar le vieilTe-
ihment,-voire , & par les premiers
mots do Genese. Maispar ces mots-,
où il ne se peut' verifier Jes Anges a-
ooireste' raicts: de Dieu , ou parles
mesmes motsîl se verifiera- qu'ils nd
forent pas fàicts auant ce monde-
îour le rroifiesrrfe', d'autant qu'il me
fetiiWe impossible que Moyse ( qui
auoit propose' de nous exposer la
<reation de toutes dioses ) n'ait fait
auronc mention de ia creation des
Angesi Et s'il Va fait, il est nécessaire
yi'H l'air comprinse dedans ces" siï
foors-fè. ílsa'estbieiit done;pásfeits
aopwauant. QoaifitelbemeTtrt; (faU*-
font qjuí comme ci dessus a esté ve-
nïre.TETcriture monstre queles An
ges ont esté faits: pour l'homme : il*
o"brtt donc pa-s -esté faits auant que
Ittaontie' fut fá-i'íyleîquel est comme
-ItdoitiìtHe de l'JîOítìmé- Çinquief
memét,d!antát qu'en tous endroicts
ausquels la saincte Escriturc parle de
la creation des Anges, elle l'a con-
ioinct aucc la creation du Ciel & de
la terre,comme au Pseaume i^g.aux
Actes i4. Apoc. i4. Qui a fait le Ciel
& la terre,la mer,& toutes lesclioses
qui y font.Et sainct Paul áux C0I0.i.
Auquel ont este' cre'es toutes choses
au Ciel & en la terre,visibles & inui-
sibles: soit les Throfnes , soit les Do
minations. Sixiemement , d'autant
que ( comme il sera verifie' cy apres)
il se collige de l'Escriturc,que les
Anges furent faicts au CielJls n'ont
donc pas este' faicts auant que le Ciel-
fuit faict. Finablement, il semble le
Concile de Lateran l'auoir de'finy,
incontinent des le commencement.
Nous croyons (dit-il) que Dieu tout
Xsfponce puissant par fa vertu , ensemblement
auxsir. jç'sje commencement du temps,. fit
Auop!. de^sen l'vne, & l'autre creature, &
nions spirituelle, &c. Ie respons donc au
Mûtes- premier arguméti de fa premiere o-
pinion, qu'il ne prouue rien. Car s'il
verifioit quelque ciiose, il prouue-
Ti.V £,.M A IDON A Î. i2
toit aussi,q$ic les Anges doiuéî estre
de toute eternité, de peur que Dieu
£ut fans ministres. Mais cela est con
tre la Religion:Car il n'y a fié d'eter
nel que Dieu. Au dcuxie'me argu
mentée r cfpon s : que seîsens des pa-
roJesde lob est, que les Astres du
matin, & les Anges loiierent Dieu
leur Autheur.incontinét qu'ils furet
faicts. D'autant que Dieu vouloir-
prouuer que personne n'auoit saict
le Ciel -& la terre sinóluy. Et allegue
le tessmoignage du messme Ciel , &
des Anges:lesquels ayans este' faicts
deDieu , çornmencerent de le loiier
& conseflèr hautemét qu'ils estoient
ses factures. Au troisiefrne, ie resspós,
comme cy dessus , de 1 origine du
monde.Au quatriesrne,c]ue plusieurs
Autheurs disét,qu'il y a deux causes,
pour lesquelles Moyse ne fit aucune
mention de l'origine des Anges.
LVnc , de peur qu'aux luiss , de leur
naturel enclinsà l'Idolatrie,il nedó-
nast occasió d'idolatrer. Chrysosto-
meen a rendu ceste raison en l'Ho-
mi. a . sur îe Genese.Et Theodorer,
en laquest.2.sur se Genèse. Mais te
ne í*«ôaae pM"fc*Ç%aBfl*.5 'Gàr ff
pouf ceste occasion Moyse n'a pas
fait mention de la création des Àn-
gespdu*qu<>y a-il fak -dëptfi£fî saa-
nent^ntion^íl'ice'iíAíEft TctÔíHeu:
s'il en eust fait mention , & e'trst eír-'
seigne' comme ils eíloiéí les críatu-'
jfcsdej&ieujilëást plustostostépar là
toute occasion d'idolatrïe.Car celuy
qìli' bfrseignè fes' Angéi; áiitìr' effê
fak* st monstre <\vsih né fènt pas;
Uieux. Cyrillas etì rend vne autre
íáison dtifroisiesmeliurei contre lu- '
iianus : Que Moyse ne voulut bas
patler étf Aríges, d'autaní que ceste
matiere estoit írdp disficile pour
pouuoir estre entendue par les audi
teurs grossiers. Mâìs cefte raison ne
semble pâí encore afle'z suffisante.
G'AVaíiïre ch&fe ést déclarer la nattore
des AngeSfquèijaráuîínttire perfon-
jî£B«ust erítenduë) autre tTiose, dire
en vn mot , que les Anges ont este
faicts par E^etijque t'opt CÎKlcun eust
Malda- entendu. Et parce ie pense que Mdiy-
«at. se, par le nom dd ciel ait vonln <n-
" - ícndre
d v P. Maldonat. i3
i tendre lçs Anges, comme habitans
du Ciel. Ce que l'Escriturc ap-
prouue, joignant par tout la crea
tion des Anges auec la creation du
Ciel. Au premier argument de la
seconde opinion , les autheufs rcs-
pondent - diuersement. Car quant
aux Hebreux ils content des fables,
que par Behemoth & Leuiathan , il
faut entendre deux tres-gráds pois-
sons,qu'il est escrit Dieu auoir cree's
au premier chap. du Genese : lek
quels ils disent que Dieu tua de peur intpUs.
qu'ils occupassent toute la terre. Et
u'il les accómoda auec du sel , afin
que c leurs chairs il fist vn banquet
aux Iist.au iour de la Resurrection.
Ainsi l'eict Rabby Salomon aux
Commentaire sur le premier cha
pitre du Genese , cliquant ces
mots : Et Dieu crea deux giai/ç
Baleines , SclesTalmudistesau li
ure intitule' Babathia, chapitre,Ven-
dant. Mais les moins fçauans des
luiss disent que Behemoth est vn
bœuf d'vne incroyable grandeur,
& Leuiathan vn poisson. Desquels
B
Traicte' des Anges,
ác du vin que'-Dieu a. cucillydelà
-vigne de Paradis;ils disentque'Dieu
seravn sestirraqx IuiÉs. À laquelle
opinion il sembie qu'a fait allusion
l'autheur du 4;. liure d'Efdras , chi-
L* val- pitre 6. eh ces mots : Et tu as con-
dhion' ue ^eux bauqueteurs^ nbmraánt
fare" se nom de l'vti! Enoch , &i le secohd
dtux tu l'as homme Leuiathah':i& les as
«met. separez l'vn de l'autre. D'autant que
la septiesme partie , en laquelle l'cau
auoit este' assemblee ne les pouuoic
comprendre. Et nos Docteurs par
Behemoth & Leuiathan, ont accor
fiume' d'entendre deux Princes
diables qui nous tourment^ Quát
àmoy , i'estime que Behnoth &
Leuiathan signifient aelques deux
grandes bustes : Ms que par Alle
gorie î ef'ture y se de ces deux nós
^our Itgnifier les Princes 'des dia
bles. Et par ainsi en tout ce 40. cha
pitre de lob, U ne pretéd autre cho
se dire sinon que nous auons des
- aduersaires & si forts que par aucu
nes forces nous ne les pouuonk sur
monter : & si rusez que par aucun
dv P. Maldonat. i4
- art nous n'en pouuons yenir à bout.
Et par ce lob desscrit la force de Be-
hemoth', quand il dit : sa force est
en ses reins : Et fa ruse, lors qu'il dit,
pourrez-vous tirer Leuiathan auec
vn hameçon ? ou si auec vne corde
vous lierez fa langueîcomme s'il di-
soit , par aucun art vous ne le pour
rez attraper. Car pour cela Efaye
au chap. z j.nomme Leuiathan , ser
pent fuyart & glissant : & serpent
tors , c'est à dire cault. Et parce
ncus sommes aduertis de ne nous
confier pas en nos forces & indu
stries, ains en la grace de Dieu. Ce
que signifie lob quand il dit : Luy
(c'est à dire Dieu ) accommodera
son glaiue : c'est à dire le seul Dieu
peut vaincre ces: bestes , car il les a
faictes. Cesens exprime Efaye cha
pitre z y.Iors qu'il dit : Alors le Sei
gneur visitera en só glaiue de bonnô
trempe, dur, grand & fort, fur Le
uiathan. Et fainct-Paul aux£phess.ts.
Au demeurant mes- freces,co»for-
tcz-vousau Seigneur, & en ía puis
sance de fa. vertu , & vestez ses .21-
E z
Traicte' des Anges,
mes de Dieu, afin que vous puissiez
xesisterau diable. Et il descrit, com
me lob, sa force:d'autànt que nous
n'auonspaslecóbat contre la chair
Jéí lesang. Et sainct Pierre en sa pre
miere Epiílre, chapitre 5. nomme
parvne semblable figure Lyon , ce-
luy que lob nomme Behemoth &
Leuiathan, comme vn Lyon rugis
sant , il rode cherchant quelqu'vn
pour le deuorer. Mais quant à l'ar
guaient tiré de ce mot:Ilest le com
mencement des voyes du Seigneur.
Ie ne pense pas qu'il signifie le com
mencement du temps, ains selon la
vertu du mot Hebrieu , Rechir , il si
gnifie ce qu'est le premier & le plus
excellent en chacun espece , & que
Ce soit icy le sens. Celuy que vous
aurez à combattre est le commen
cement des voyes du Seigneur, c'est
à dire , la plus excellente des creatu
res de Dieu. U se peut colliger que
c'est cc sens, d'autant qu'il n'estoit
aucunement à propos de dire que
le diable auoit este' fait auant l;hó-^
mC. Mais fcde dire qu'il estoit vnc
D V P. M A L D O N A T. i5
tres-excellente creature , cela im-
portoit fort pour nous faire peur.
Au 2. argument de la secondeopi-
nion.ie ressponds qu'il se pouuoit
mieux traduire en cét endroict : il
fur homicide dés le cómencement.
Et que ce mot de commencement
ne signifie pas vn poinct de temps,
-ains tout le commencemét du mon
de compose de six ioufs. Quelque
Yn demandera s'il faut tenir cecy
pour foy Catholique, que les Anges
n ayent pas esté faicts auant le m6*
de, d'autant qu'il semble que le Có-
cile de Latcran l'ait determine'. Ic
responds que cela n'est pas foy,ains
vae opinion proche de la foy. En
premier lieu, d'autant que celan'e-
stoit pas proposé au Concile pour
ìe resouldre : Comme dit sainct
Thomas aux Commentaires fur la
decretale de la grande Trinité &
foy Catholique : ains son intention
estoit seulement de condáner l'er
reur de ceux qui pensoient qu'ils
eust quelque creature qui fust de
route eternité. Et puis il ne faut pas
B 3
T R A I C T E' DES ANGES,
tenir pour article de foy tout cc
qu'en passant ce dit aux Conciles,
ains ce qu'estant propose' est resoîu.
En second lieu , d'autant qu'il n'ap
pert pas de quel temps le Concile
parle:fi c'est du temps naturel,ou du
temps des Anges , lors qu'il dit , en-
semblément de's le commencement
du temps.Pour le 5.1 estime plustoít
que le Concile n'a pas parlé fcolasti-
quement , ains à la maniere desau-
theurs anciens, qui ont accoustumé
de nommer temps, toute espace qui
n'est pas eternité. Autant signifie
dés le commencement du temps,
que qui diroit,non pas de toute eter
nité. Et c'est enscmblément , assem
bler l'vne & l'autre creature spiri
tuelle & corporelle: Et le sens est,
que l'vne & l'autre creature a esté
faictepar Dieu, dés quelque com
mencement , ensemblément , c'est à
dire sans en excepter aucune. Ceste
sentence est confirmee par les mots
du Concile. D'autant que si à cause
de ce decret il fallait tenir pour foy
Catholique que les Anges ne furent
DV P. Maldonat. ' 16
pas faicts auant ce monde : pour le
mesme decret il faudroit tenir pour
f'oy que toutes les 'choses qui font
escrites auoir este' faictes en lix iours
auGenese, auroient esté faictes en
mesme moment de temps. Mais par
I'adueude tous, cela ne se doit pas
tenir pour foy : doneques , ne cecy
aussi. Et parce l'opinion des luiss
me semble fort probable. Que les.
Anges furent faicts le second iour,
d'autant que l'Escritureconioinctla
creation des six iours auec la crea
tion du Ciel. Orle Ciel & le firma
ment íbntvne mesme chose, com
me il a esté prouue' cy dessus : Et le
firmament fut fait le second iour,
au premier chapitre du Genese.
Doncques,& les Anges aussi. ..

B4
Traicte' des Anges^

EN Q.VEL LIEV FV-


RE NT F AICTS LES V Í
. . Anges. ii... -y -r à.-y
i.-. -- . - '}. »-. - ' ' * s.
ACeste question est joincte vne
autre , du lieu auquel les An-'
ges furent faicts. Dequoy il y a eu
quatre opinions des Theologiens:;
La premiere est*le Rupert liu. pre
mier des ceuures de lá Trinite', cha
pitre i0. Lequel pensa que les An-
gos ne furent pas faicts au Ciel, ains
hors d'iceluy : & aptes furent me
nez dans le Ciel. Tout ainsi que
l'homme fut fait hors du Paradis,
& apres introduit au Paradis. La
deuxiesine fut , des autres qui onc
bien pense' que les Anges n'auoient
pas este faicts au Ciel, ains hors du
Ciel : à cause des paroles ( comme
ie pense ) d'Esaye au i4. chapitre.
Ie monteray au Ciel , & leray sem
blable auTres-haut : Sainct Augu
stin fait mention de cestc opinion,
& laiugeestre probable au 3. liure
du Genese selon la lettre, chapitre
D Y P. M A L D CTN A'T." . I J.
To. La 3. est de tous lesScholasti-
ques, de laquelle on pense que le
premier Autheur fut Isidore aux
Commentaires sur le 9. chapitre du
Deuteron. expliquant ces mots:
Tien est le Ciel ,& le Ciel du Ciel.
Comme recite sainct Thomas en
la premiere partie, question 62. Et
apres Beda & Strabus l'ont confir
mee : C'est que les Anges furent
fàicts au fupre'me Ciel , qu'on nom
me Empirée. Ie pense que la qua
trième opinion fut de tous les vieux
Autheurs,que les Anges furent faits Ofmìm
au Ciel, non seulement au fupre'me, *
(s'il y en a plusieurs)ainsentieremét
en tout le Ciel. Et i'estime ceste o-
pinionestre fort accordante à ITSjE..
criture.Premierement, d'autant que
l'Escriture conioinct tousioursl'oi
rigine des Anges auec celîe du Ciel,
& par le nom deCiet , entend ordi
nairement tout le Ciel. Et apres,-
d'autát qu'il est vray semblable , que
les Anges ayent este' faits au lieu au
quel ils ont leur domicile. Mais
l'Eícriture dit que leur habitatioa
T R A I C T E ' DES ÀNGES,
est non seulement en vn Ciel,ains
tout le Ciel : comme quand^lle
nomme les Anges habitans des
Cieux, en sainct Matthieu 24. De
ce iour & heure personne n'en sçait
rien, ne les Anges des Cieux. Et en
sainct Marc i2. ils seront comme les
Anges des Cieux:Et à ce tesmoigna-
gc d'Esaye , le monteray au Ciel,
les Scholastiques ont bien respon-
du, que le Ciel est prins là , par Me
taphore , non pour vn lieu , ains
pourvne excellence de la Diuinite':
parce qu'on dict, que la Diuinite
habiteauCieljc'estàdire en gran
de excellence & dignité. Et que ce
soit le vray sens , les mots qui en-
suiuent le declarent : le seray sem
blable au tres-haut : comme si. c'e-
stoit mesme chose vouloir mon
ter au Ciel,& desirer estre sembla
ble à Dieu. x
dv: P. Mal d on a t. i8

S I T OV S LE S AN-
1 CES ONT ESTE' FAICTS
. ensemblément.
i ;j i-:.';~rj! - -; - -r i: ;
ACecy enjcore appartient ceste
question, si tous les Anges fli-
rent faicts par Dieu eosemble'ment.
Et d'icelle aussi les opinions des An
ciens forent diuerses. Car les He-
hrieux ( comme tesmoigne Rabbi-
Mose Egyptien, au ^. liure Moré,;
chapitre. 6Y) Disent fabuleusement
que tous les iours Dieu cre'e cent'
Anges: Lefq.uels'aussitost qui font
créez , viennent deua-nt Dieu & luy;
chantent vn Hjímae , pqis descen-
denr. La z, opinion fut d'aucuns
Chrestiens , comme de Gregorius;
au liure de la creation de l'homme.
chapitre r8. Que les Anges:,- tant:
bons que mauuais;, entre-eux-mes~.
mes encores jcngendrent . les^vn^
des autres en quelque-- maniere ad
mirable. La 3. fiat des autres ) corn-
niedelustin Martyr:enla premiere
Apologie pour les Chrestiens \ Et
Traicte des Anges,;
de Lactance Liure second, chapitré
i5. ) qui pensent que tous les A rìges
ne multiplient pas,ains aucuns. Car
ils disent que ceux qui pecherent,
excitez par paillardise , se sont mef
iez auec les semmes, &©ntengen-
dre'ceux que maintenant nous nó-
mons de'mons. La 4. opinion est de
tous les autres autheurs : laquelle
seule est vraye. Que tous les Anges-
furent faicts & creez de Dieu en-
femblement. Car en tous les en-
droicts aulquefs l'Escriture parle dé
leur origine, elleenseigne qu'ils fu
rent faicts auec le Ciel. Et âpres , el
it ne fait point. mehtfdn d'aucun
Ange, ou bon , où 'mauuais,quTaib
este fait apres la creation'- du' CieL
Ce seroit donc temerité d'en opi
ner autrement , comme la raison
mesrhe le requiert. Car il n'est'point
croyable que lês tnáfureá immunëá'
de corps & de matiere , -& qui de'
leur vertu fôhíimmorteMes , soyehei
engendrees les vnes des autre's. CelST
n'est en vsage sinon aux choses quî
m'tfíènt & meurenïi
d v P. Maldonat. i9

Q^V A T R I E S M E QJE-
STION DE LA N.ATV-
redes Anges.
CEstc question a cinq parties, en
la premiere il sout voir si les
Anges ont des corps de leur natu
re. Eala 2. s'ils font composez de
matiere & deforme.En la 3.s'ils ont
quelque autre composition. En la Si Iti
4. si de leur nature ils font immor-
tels. En la 5. comment indifferent °c"rpu
entr'eux. Quant à la premiere,il y a Vttmif
eu deux opinions contraires d'au- "«p,: -
theurs fort renommez. L'vne que
naturellement aux Anges a este'dó-
m des corps , mais si subtils qu'ils
font inuisibies à nos yeux. Et qu'en
PEfcriturë ils font nommezEfprits,
non que du tout ils foyent exem pts
áe corps , ains d'autant qu'ils font
douez d.vn corps qui ne se peut
Toîr comme aussi Pair (lequel in
dubitablement est corps ') est fou-
uent nomme Esprit en l'Efcriture»
d'autant qu'il ri.est pas veu . De ceste
opinion fut Philo luiss, au liure de
IRAtcTE des ; Anges,-
l'ouurage du monde. Ec Iustin en la
premiere Apologie pour les Chre-
stiens. Et Theodoret en l'Epitome
de la foy Catholique , lequel est
auec les ceuuresde Cleméc Alexan
drin & Tertulian: lesquels en plu.-
sieurs endroits disent qu'il n'yaricr»-.
qui n'ait corps. Et Origene au pre-;
mier liure Periarchon, chapitre ©;«-
Là où il dict que la seule Trinité, o'a
point de corps. Et au liure 2.chap.
2.. Et au traicte' i3. fur sainct kan.Êt
Lactance liure z. chapitre 15. Et S.
Hilaire sur le 5. chapitre de S. Mat
thieu. Et sainct Ambroise au liure
de Noe' & de l'Arche , chapitre 4^
Et sainct Augustin Epistre jiii 8c
1 i 5. Et an liure ^.de.la Trinite' chapi
tre ù Et au liure ii. de. la Cité de:
Dieu, chap. 23; Et au liure i5. chap..
2 5. Et au liure 2. du Genese selon la
lettre chap.27. Et au liure 3. du Gçf
nese selonla lettre, chapitre i0. (cq-j-
bien qu'en autres en droicts il sem
ble qu'il en doubte. ) Et Gassianus
Collation. 7. chapitre i3, EtGena-
ûas ( ou quiconque soit authcur du
DV V. MALDONAT; 2»
liure des Enseignemens Ecclesiasti
ques lequel est attribué à S. Augu
stin) chapitre n.& i2. Et sainct Ba
sile au liure du sainct Esprit chapi i G.
Et Athanasius & Methodius sont al
leguez au second Concile de Nice.
Et pour ceste opinion le mesrne
Çoncile,action 5-arresta qu'on pou-
uoit peindre les Anges , d'autant
qu'il ont des corps. Et Pascasius
Diacre, au 2. liure du sainct Esprit,-
chapitre 3. qui enseigne en outre;
que les Anges &c nos amespeuuent
estre tourmentez au seu d'Enser,
d'autant qu'ils ont des corps. Et Da-
masius au liure 2. de la foy, chap 3.
dict que les Anges à comparaison
de nous font incorporels .- maisab-
soluëment & à cóparaison de Dieu,
ils sont corporels. Et Cœlius au lieu
des de'mons le prouue par. plusieurs
arguments. Et sainct Bernard Ho
melie 5.8c 5.surles €antiqués,pan-
che plus ftir ceste opinion. Et Ru-
pertus liuxe premier des eenures de
la Trinite', chapitre n.- enseigne le
mesme que Damasus. Or ceste opU
' " Traicte des Anges,
nîon se peut verifier par ces Argu
ments. Premierement si les Anges-
n'ont point de corps , à peine peut-
en entendre comme ils se puislênt
remuer d'vn lieu en vn autre. Car
í'opinion de plusieurs fort graues
Theologiens a este' aussi que nos ar
me separées des corps ne se peu-
uentmouuoir d'vn lieu, ains qu'el
les sont menées par les Anges,soient
bons , soient mauuais. Le z. Argu
ment est qu'on ne peut entendre
Cornent c'est que les corps peuuent
aucunesfois estre renouez par eux,
s'ils sont entierement exempts de
' corps.Car il n'y a pas de doubte que
nostreame ne remue nostre corps,
ne de meruéille , d'autant qu'elle est
la forme dii corps/ mais î'Ange n'est
pas la forme. Le 5; ; Argument est,
que si nous ne disions que les Anges
ayent corps , àjjeinepouuons nous
declarer là ráiso par laquelle ils col-
ligent la cogrìôiíïànce & science
d'vne chacune 'chose:laquelle ( l'on.'
prouuera apres par l'Escriture ) ils
coîligent. D'autant qu'ils nepeuuét
dv P. Maldonat. - al
colliger la cognoissance des choses
corporelles sinon parleurs semblá-
ces: & ne k peuuent faire fans in
strument corporel , attendu qu'el
les font corporelles : ils ont donc va
corps. Le 4. est quel'Escriture en
seigne que les demons font tour
mentez par le seu d'Enser: mais le
seu ne peut trauailler vn Esprit , s'il
n'a quelque corps. Le 5. est, que
Pierre Epistre 2 . chap. 2. Et S. lude
en son Epistre Canonique, disent
que les diables attachez auec des
Lyons ont esté iettez en Enser. Que
s'ils n'ont des corps, comment ont-
ilspeuestreliez ? Le 6. est attendu-
que tous les Anges (comme dit S.
Paul aux Hebrieux chap.i. ) font Es
prits administratoires enuoyez au
ministere. II ne semble pas croya
ble que Dieu vsse des ministres du
tout incorporels. Le 7. & dernier
est , que par tout où il est dit
en la fàincteEscriture,que les An
ges ont esté veuz, ils ont este' veuz
auec quelque espece de corps hu
main: & ont tellement este' veur
Traicte' des Anges,
que mesme quelquesois leurs corps
ont esté touchez & manier : com-
ï.ofì. me au Genese 16. & i9. La2.qpinió
a este' de ceux qui ont estime' les
Anges estre du tout incorporels..
En laquelle opinion a este le pre-.
mier sainct Denis Areopagite au
- liure de la Hyerarchie Ecclesiastique
chap. i. Etau liure des noms diuins
chap. 4. Et Athanasseau liure de la
commune essence du Pere,du Fils,
& du sainct Esprit: Et en la dispu
te contre Arrius au Concile de Ni
ce : & au premier Dialogue de la
Trinite'. Et sainct Chrysostomc Ho
melie 22. furie Genese. Et S. Gre
goire de Nice au liure del'Oraison
Dominicale, & en l'Oraison pour
les morts. Et au ^.liure de la Philo
sophie chap. 7. Et Nazianzenus O-
rais0n7.de la Theologie, est plus
enclin à ceste opinion, cóbien qu'il
ensemble doubter. Et sainct Am
broise ayant change' d'opinion , au
liure 7. des Commentaires fur S.
Xucchap. i2. Et CyrilleAlexandrin
au liure 4. fur sainct Iean , chap. iq.
dv P. Mal d on a t. iz
ít Theodoret question 2.sur la Ge
nese: & au liure des diuins Decrets.
Et le grand Gregoire liure 4. des
Morales chapitre 4. & liure 28. cha.
6.EtBeda au premier liure des Ele
ments de la Philosophie. Et Nice-
tas au Commentaire fur l'Oraisort
de Gregoire Nazianzene , du iour
Natal du Seigneur. Et le grád Con
cile de Lateran en la consession de
lafoy. Ceste opinion ne doit pas e-
sire tenue pour article de foy Ca
tholique , d'autant que le Decret dit
Concile peut estre entendu de ma
niere qu'il nomme creature spiri
tuelle celle.qu'a comparaison de nos o^k
corps, semble spiritueHe : & toutes- de
fois elle me semble(combien qu'elle Mal'
ait beaucoup moins d'autheurs)
estre beaucoup plus probable : d'au
tant qu'elle est plus accordante aux
lettres sacrees. Et premierement ea
ce mesme que l'Escriturc les nom
me Esprits, c'est vn argument que
les Anges n'ont point de corps : car
attendu qu'au 4. de sainct Jean , Ie-
sm Christ argumente que Dieu est
Traicte' des Anges,
Esprit : & que ceux qui l'adorent, le
doyuent adorer en esprit & vente':
II n'y a point de doubte qu'il ne
nomme Dieu Esprit > de maniere
qu'il le faict du tout priué de corps:
d'autant qu'il vouloit prouuer cela-
mesme qu'il le falloit adorer, non
tant du corps que del'Esprit. Don-
ques quand il conclud qu'il le faut
adorer en Esprit , il prend le mot
d'esprit en mesme maniere qu'il le
prend lors qu'il dit que Dieu est t
Esprit.Et delàs'ensuit quenostrea-
me est vrayement Esprit : Que si
nostreame est vrayement esprit,la*
quelle est toutesfòis h forme de no-
ftre corps , il est plus que probable
que les Anges font tellement es
prits , qu'ils font priuez de tout
corps. En second lieu , les Sad
duceens auxActes 23. font reprins
de ce qu'ils nyoient qu'il y eust
Anges & Esprits : Que si les
Anges font corporels les Saddu-
ce'ens ne les eussent pas nycz : car
ils ne les nyoient sinon pour ne se
pouuoir persuader qu'il y eust au-
DY P. MALDONAt. 25
cane nature du tout incorporelle.
Doncques ils lont reprins pour
ceste mesme opinion. Cela est
donc vn Argument certain que
ks Anges font immunesde corps.
Pour le troisiesme , attendu que
Dauid dit au Pseaume cent trois,
qui faict ses Anges les Esprits, &
ses Ministres , le seu bruílant : 11
n'y a point de doubte qu'il ne
vueiile lignifier que Dieu vsse pour
fcruiteurs & nonces de ses crea
tures , non espoisses comme font
les hommes, ains des plus excel
lentes & pures. Doncques le
nom d'Esprit ne peut signifier au
cune choie corporelle , ains du
tout immune de corps. Pour le
quatriesme , lors que I e s v s
Christ dit en sainct Luc 241
Maniez , & voyez qu'vn Esprit
n'a ne chair ne os , il n'a pas seule
ment voulu dire qu'vn Esprit n'a
nechair ne osà la maniere des hom
mes (car cela ne touchoit en rié à ce
dont il estait question ) parce qu'il
vouloit faire perdre aux Disciples
Traicte' des Anges,
l'admiration de laquelle ilsestoient
detenus estonnez pour auoir vcu
vn corps qui auoit penetre' estants
les huys clos: & parce ne croyoient
pas que ce fust vn vray corps. Or
ìeíus Christ neieureust point osté
ceste admiration, s'il eust seulement
voulu dire qu'vn Esprit n'a point
de chair,ne d'os , d'autant qu'il pou-
uoit auoir quelque autre corps fans
chair, & os : Et aux Disciples eust
demeure lemessme doubte. Le sens
est donc : les Esprits n'ont point de
chair, ne d'os , c'est àdire ils n'ont
nul corps familier : Et puis en l'Es-
criture, par le nom de chair , s'en
tend tout corps. Au 5. de fainct
Marc ,& 8. de fainct Luc, il est es-
crit qu'en certain homme estoit vne
legion de mauuais Anges) laquelle
contient plus de traize mil diables
que s'ils auoyent des corps pour
deliez qulils. fussent , ils n'eussent
peu en si grand nombre se renger
en vn seul corps. Pour le sixiessme
fers que fainct Paul dit aux Ephe-
siens S. Nous n'auons point à com-
i>v P. Maldonat. 24
battre la chair & lfhomme, ains les
Princes & Puissances. Ilneveut pas
signifier lá chair & le sang, d'amant
-qu'il n'eust pas prouue' ce qu'il fal-
ìoit : parce qu'il vouloit conclure
qu'il falloit que nous fussions fort
vigilants, ayansà faire à vn ennemy
que nous ne pouuoris apperçeuoir
par nos sens , & l'euiter : ains auec
vn ennemy du tout priuéde corps,
lequel ne pouuoit estre surmonte',
ne par les forces du corps , ne par
art de l'esprit. Aux arguments con
traires, il faut reipondre ainsi. Au^*1"
premier , second & troisiesme , il se-
ra respoqdu lors que nous disseou- contre?
rerós du mouuemét des Anges. Au
4. pour ceux qui font en opinion
que le seu des ensers ne soit pas cor
porel, l'on respóudra aisement , que
les Esprits petuient estre trauaillei '"x
par supplices spirituels. Mais à ceux
quil'estimét corporel,Tort a accou
tumé de respoiídre que le corps a- i
git cótre -vn esprit,noripar'vertu na-
turelle,àins dùjine Au 5.ie responds
que les liens desquels l'on dit les de'-
Traicte des Anges,
mons estre attachez se doyuent pre-
dre par metaphore, tellement qu'ils
signifient priuation d'vne grande li
berte', pour deuenir à vne grande
seruitude en laquelle l'on a accou-
stume'de lier les esclaues, pour si
gnifier vne obligation au supplice,
auquel ceux qui sont condamnez,
sont tenus liez & attachez. Au 6.
ie responds que comme l'homme
est composé desprit & de corps,
ainsi Dieu a deux manieres de
ministres & Anges , auec lesquels
•' ' il negotie auec les hommes. Les
vns du tout spirituels de ces Anges
desquels nous parlós, lesquels pro
curent spirituellement aux hommes
le salut de leurs ames. Les autres font
les. Prophetes & les Prestres , les
quels aussi l'Escriture nommeAn-
£Wi gC$ ) qui enseignent l'homme exte-
sontjet ri€urement s'accommodent au
aH'exhi- corps. Le 7. argument reueille vne
bmtlts question des corps , auec lesquels
,*,g«- les Anges ont accoustume' d'appa-
roistre, quels ils sont, & comme ils
font prins. Dececy aussi il y a eu di-
uerscs
dv P. Maldonat. 25
aerses opinions entre les Theolo
giens. Car ceux qui ont attribue' ' 0f-
corps aux Anges (combienquetels
que nos sens ne ks peuuent apper-
ceuoir. ) Us ont dit que par affe
ction & volonte', les Anges chan
gent tellement leurs corps tres sub-
tiLs,que ceux qui auparauant estoiét
inuifibles se puissent voir. Comme
il arriueaux hommes mesmes, les
quels estans saisis de quelque pas
sion, changent la couleur de leurs
corps. Ainsi l'ont dit sainct Basile
auliure du sainct Esprit,chapitre i6,. \
Et Marcus Philosophe. Chrestien,'
en Psellus au liure des demôns. Et
ceste opinion n'est pas refusee par
sainct Augustin au liure 5. de laTri-
nite' chapitre premier.D'autres esti
ment que les Anges ont accoustu- *;0fH
me de prendre hypostatiquement mm'
des corps, commelesus Christ print
la nature humaine. De ce't argument
ont vsc entre les Ethniques ceux
íjuì ne croyent pas k mystere de
•''Incarnation : comme si Dieu ne.
pouuoit ( demeurant Dieu ) estre
Traicte' bes Anges,
fait vray homme- lis disoient, les
Anges demeurans vrais Anges, sont
faits hommes, pourquoy ne sera-il
ainsi de Dieu ? En ceste opinion
fut le seul Tertullien , comme 1 on
collige de son liure de la Resurre-^
ction de la chair , & du liure con-
j.Opi- tre Marcion. La 3. opinion fut de
nien. ceux qui ont dit , qu'ils ontaccou-
stume de prendre des .corps d'vne
matiere celeste. Delaqnelle opinion
font tacitement tous les Scholasti-
ques , comme ils font mention ait
4.0^;- second liure des Sentences, distinct.
mon. huicttessmé. D'autres ont dit , qu'ils
- se font des corps meflez des quatre
Elemens. Laquelle opinion aile--
gue fainct Bonauenture au 2. des
Sentences, distinction huictiesme,.
í. Ofi. <jUestion deuxie'me. Les autres ont
nm' dit, qu'ils prenoient des corps, des '
quatre Elemens non mestangez, ains
demeurans entiers,afin qu'ils se des-
facent plus aisément. Et ç'a este l'o-
í.opi- pinion de Ricardus & de Scotus
niofk en la susdicte distinction , en la que
stion ynique. D autres , qu'ils les
DV P. Maldonat. l6
prennent du seul air , comme a pen-
îe' sainct Thomas en la mesinc di-
stincticîn huictiesme , question pre
miere, article troisieme. Les autres
(& c'est la commune opinion des
Scholastiques ) ont dit qu'ils pren
nent des corps, de l'air non pas pur^ 7 OfU
ains mefié de vapeurs & autres tel-
les choses quipeuuent estre rappor
tees à la figure. La derniere opinion
rut de Henry precepteur d'Albert, 8 Ofi-
(comme il le recite ) que les Anges w**a .
neprennentpasde vrais corps, ains
qu'ils changent- tellement les sens
des hommes qu'il leur lemble voir
des corps , lesquels ne font point.
Combien que sainct Thomas ait
nomme' ceste opinion erreur , (dont
iem'esmerueille) iel'c-stinie fort ac
cordante à lá saincte Escriture. De
laquelle on collige (sinon tousiours,
àtout le moins fort souuent )' que
ccnojsont pas vray corps , à ceuxaus-
quels les Anges apparoissent , ains
t}ue nos sens font deçeuz. Et en pre
mier lieu,aux Nombres 22. nous li- <
sons que l'Angeìutveu par l'Afnes-
9 *
Traicte' j>es Anges,
se de Balaam , & non par ]uy. U n'a-
-uoit donc pas vn vray corps : car s'il
,cust eu vn vray corps , pourquoy
n'eust-il aussi bien este' veu par le
Prophete, qui n'en estoit pas plus
efloigne', qu'il fut veu parl'Astiesse?
íour le 2.au 4. des Roys chapitre á.
Elisee voyoit l'armee des Anges , &'
Gjesi ne la poHuoit voir, ils n'auoiét
donc.pa« de vrais corps. Pour le 5.;
les Disciples de Iesus Christ en S.
Matthieu 3.4. & S. Marc 6. Voyans
Iesus Christ cheminant fur laTner,.
penserent que ce fust vn fantasme;
Ils ne penfoyent'Jonc pas que cç
fust vn vray corps qu'ils voyoient,.
ains que ce que n'estoit pas corps,
íemhloit corps. En premier. lieu,
-d'autant que ce mot defantosme si
gnifie cela ro.esme.Et apres, d'auíajit
-qu'ils l'estimoient fantosme , parce:
^qu'ils n'estimoient pas qn'vn vray
corps peut cheminer fur la me% lis.
ne croyoient jdonc pas que ce fust
vn vray corps ains vn Esprit qui
f»ressentort vne fausse efpeçe de corps.
D'auantage , lors que les mesines
D V P. Ma IDO'NAT, iy;
Disciples en sainct Luc chapitre 24.
ont pensé que Iesus Christ fust vn!
Esprit,il leur scmbloit qu'ils voyoiét-
-m corps humain. Ilsc-royoierudonc
que ce't Esprit n'auoit pas prins vn
vray corps. D'autant qu'ils I«-
croyoient estre Esprit, ne pouuans-
penser qu'vh corps eust peu penetrer-
à trauers vn corps. Ils ne croyent -
donc pas que ce qu'ils voyoient , fust
vnvray corps. Celamesme me sem
ble estre confirmé par les paroles
de sainct Luc i2. chapitre. Là où il
dit que sainct Pierre pensoif Voir
vne vision , & que ce n'estoit pas vn
vray corps qu'il luy sembloit voirï
A cecy encore adiousté-on la raison:
Que les Anges pouuans en cemoní
de apparoistre aux hommes , il sem*
ble qu'en vain ils forgeroient des--
corps , qu'il leur' faudroit inconti
nent quitter. Quelqu'vn peut obie-~
ster qu'Elisee dit au 4. des Roys,.
chap. 6. Ouure Seigneur , les yeux-
deceluy^cy , afin qu'il voye. Donc
il semble qu'on peut colliger que leS'
corps des Anges son vrais : maií
Traictb' des Anges, :
Ouuer- qu'ils ne furent pas assez visibles aux
titre. veux fa seruiteur. Ie respons que
le mot d'ouuerture signifie commu
nément aux escritures, non la natu
re, ains l'effetrqu'ils voyent ce qu'au-?
parauant ils ne voyoient pas. Com-
' me aux Actes 7. chap. LorsqueS.
Estienne dit qu'il voyoit le Ciel ou-
uert. Car en verite' il nefutpasou-
uert , mais en effet : d'autant -qu'il
vit Iesus Christ assis fur le Ciel , tout
ainsi que si le Ciel fust ouuerr. Eii
ce sens donc dit Elisee : Seigneur,
puure les yeux de cestuy-cy , afin
qu'il voye : comme s'il disoit, fais
qu'il lúy semble qu'il voit les An
ges, lesquels'il ne voit pas, & si ne
, Juy semble pas qu'il les voye. Quel-
qu'vn m'oposera aussi , que les
corps qui . ont quelquefois este' prîns
par les Anges , ont este' esprouuez
parl'attouchement mesme, Comme
quand Loth laua les pieds à ces deux
i Anges , c'estoient donc des vrays
corps.Car il semble que Iesus Christ
mesme approuua ceste conseíquenr
ce en sainctLuc 24. disant: Maniez
DV P. Mal DO N A T. 28
& voyez , &c. car il veut veri
fier que c'est vn vray corps, d'autant
qu'il est manie'. Ie respons que Ie
fus Christ a prins son argument en
cét endroit , partie de la verite' , par
tie de l'opinion. De la verite', d'au
tant qu'il s'enfuit bien que si quel
que chose est vrayement maniee , &
non par seule opinion, elle est vraye
ment corps. Et le corps de Iesus
Christ a este vrayement manié. II
argumente aussi selon l'opinion,
d'autant que l'opinion des hommes
est que tout ce qu'il leur semble
qu'ils touchent est vray corps, com
bien qu'en verité ne le touchent pas,
Car encore que non seulement les
autres sens , mais l'attouchement
messme puisse estre deçeu , comme
il est és Phrenetiques, toutesfois les
hommes pour s'asscurer de la verité
d'vn corps , ne peuuent demander
autre argument. Et parce Iesus
Christ collige bien la verité.du corps
par l'attouchement. Finablement
l'on peut obiecter que les Anges ont
beu & mangé auec d'autres corps
C 4 '
Xraicte' bes Anges,
qu'ils ont quelquesois prins : ce qui-
est vne preuue d'vn vray corps.
D'autant que par ce messme argu
ment Iesus Chriíia prouue' que fort-
corps estoit vray corps , apres fa Re-
surré&onvEn sainct Luc 24. chap.
Auez-vous icy quelque chose ài
manger ì le ressponsà cecy comme
à la seconde obiection : que leíùs
Christ veritablement prçuua qu'il
auoit vn- vray corps : caril mange*
vrayement. Et toutesfois qu'il n'y a
rien qui empesche que les sens ne?
puissent estre deceuz au manger 8c
au.boire , comme ils se deçoyuent
cnra figure du corps. Et à cause dé
Vtfi- ceà tesmoignages ie fuis d'aduis que
mmàe l'opinion est probable. qui tient
que les Anges prennent quelque-
fois des vrays corps. Et mesmes lors;
qu'ils doyuent par quelque long-
. temps apparoistre aux hommesr
comme finisAnge -aa fils de Tobie
faisant vn long voyage auecqueluy.i
Mais en ce que Scotus pense estre
probable que les demons prennent
quelquesois les corps des morts , ie
DV P. M AL D O NA X.'- 2£
pense moy aussi que cela est proba
ble. Car tout ce que nous lisons
des morts ressuscitez par les faux
Prophetes , par le moyen des mira
cles faux ( comme par Simon le
Magicien en Egesippus liure troií-
iesme , chapitre 2. ) n a peu estre
fait que par lceuure des demons.
Quant à ce aussi que les demons se
mefient aucunesfois auec les sem
mes , ( chose qui ne se peut nyer -
est plus croyable qu'ils le font ayans
prins quelque vray corps d'v».
homme , quauec vn seint. Ce que "
Dionyíius au liure second des Sen
tences, distinction huictiesme, que
stion premiere , afferme auoir ap«-
prins par certaine fille laquelle auoit
eu familiarite' auec vn diable. -
-L-03.,.-. • —^
o:n\'~u & -- ' -': '. 1 - î I'jM'j -.: ?Uy:
-:- 1 - : - -- -
(' 'C fr''" -fS-

Mpioji'ip î3 .s: -J.ri'.îjK 'y. fy,


.V3'ln!; 49-":3V - - v h ti: .\1 ;-.';'i' il ; :
IV! .1: "i " -oil. r.i~. '£'••-
Traicte des Anges,

LA SECONDE PAR-
T I E DE LA Q_V ATRIESME
question. Si les Anges sont com-
posez de matiere & de forme.

TO v s les Autheurs qui ont


estime' les Anges estre corpo
rels j ont dit aussi qu'ils estoient
composez de matiere & de forme;
Et outre eux encore certains au
tres. Comme sainct Ambroise au
liure d'Abraham , chap. huictiesme.
Nous ( dit-il ) n'estimons rien d'e-
xempt & efloigné de cornpofitiorí
materielle, sinon ceste seule substan
ce de la venerable Trinité. Et sainct
Augustin liure 7. du Genese, selòn;
la lettre, chap, 6.& J. eserit qu'il se
peut faire que nostre esprit soit com
pose' de quelque matiere & forme
spirituelle & simple, la mesme rai-
* son est des Anges. Et l'Autheur du
liure des enseignemens Ecclesiasti
ques, chap. ii. & i2. Etquiconque
est l'autheur des merueilles del'Es-
criture sacree (lesquelles od attribue
dv P. Maldon a ri 50
à sainct Augustin liure i. chap. i^ )
Dit qu'au commencement Dieufist
la matiere,de laquelle informa apres
toutes choses , & corporelles &
spirituelles: Le ìnesmc enseigne
Boëtiusau liure de l'Vnite' & d'vn.
Et entre les Arabes Auicenna , au li.
de la vie forte, comme recitent tous-
les Scholastiques. Archange de
Neuss-bourg entre les Hebrieux, es-
crit que ç'a este' l'opinion de tous les
Cabalistes , aux Commentaires de
la doctrine Catholique.Et des Scho
lastiques, Albert le grand au 5. liure-
des Sentences , distinctions 2. arti
cle 4. Et Alexander en la seconde
partie de la Theologie, question 2.
nombre premier. Et Bonauenture
eri la mesine distinction premiere.
partie, question premiere. Laquelle
opinion fut con6rxnee contre;
sainct Thomas ( estant s- contrai-;
re aduis ) en quelques articles de .
Paris : Or voicy les argumens de
ceste opinion. Le premier , que les
Anges sont muables v & la cause de
kmutation est la matiere. Le deux*
TRA-ICTEr DES ANGESj
ìesme, d'autant qu'ils sont compo
sez de genre & difference : & le gen
re se prend de la matiere. Le trois-
iesme , qu'ils sont diííèrens de nom
bre entre eux : & toutes choses dis
ferentes de nombre ont matiere.
Le quatriesme , d'autant qu'ils re-
çoiiíét en eux quelques persections:
8c tout ce qui les reçoit à matierev-
Mais la contraire opinion est main
tenant de presque tous les Theolo
giens , & me semble la plus vraye.
Non pour autre raison, sinon d'au-'
tant que ( comme il a este verifie')
- les Anges n'ont point de corps: &.
qu'il me semble estre vrie inuention
temeraire, de penser (contre toute
experience ) qu'il y ait. matiere là oìì
il n'y a point de corps. Et les-argu*'
mens contraire* se dissoluent : enr
vn mot : c'est que mutation ,~genrey
dïfferencetdenombre & réception -
de perfection" ne' sontipoint sinon
Boùily a matiere ,ou quelque au-*
tíe' chose semblable à icelle. Gom-s
me en nostre esprit veritablement
H n'y a point de matiere , & tcwJ
u y I • m *-L u u n a i-- ^1
, resfbis il reçoit plusieurs perses '
ctions.

M*t-4fl «"! ?*♦


TR OISIESME^ PAK^
tie de LA^QjfA'TRiES-
mequestion.SiauxAnges v
. . : . y a quelque compo-
-:- ... sitiofr. - jt

tE s Theologiens recognoissent^
huictfortes de composition. La
premiere , des parties qui font l'en-, Cvmfosu.
tier, c'est à dire du corps. La deuxies-:
me,de la matiere &forme,& ces deux-
especes-, il est defia verifie' n'estre pas- -
aux Anges. La troisiesme;est du gea-'
re & disference {que les Platoniciens)
nyent estre aux Anges) mais tous les
Theologiens Accordent : Qitant à;
rnpy ieavéstime pas íeJle compositio
ostre-vraye.La qUatriesme,ést de l'eí-
sehce ou existence, ou «stre : laquelle
semblablement il faut mettre e's
Anges (sinon qu'il y en.aiaueUnsy
(ju* estiment que. Inexistence en effet;
tt'éstças duïereiite.del'eírence : Et
il est necessaire qu'ils dient aussi que
telle composition n'est pas vraye,
ains forgee en la seule pensee. Mais
ceux qui pensent qu'en effet l'exi-
stence est differente de l'essence,
estiment que ceste composition est
vraye. La cinquiesme especeest, de
la matiere & du suppose': laquelle
semblablement est reçeuë aux An
ges par tous les Theologiens : Ou
tre ce qu'aucuns dient que la vraye
composition y est en la chose mess-
me;: Comme ceux qui estiment que
la substance que comprend le sup-.
pose' , outre l'essence est distinguee'
de l'essence par la choie; mestne.i
Mais ceux qui pensent que la siíbsi-
stence n'est point distinguee de l'es
sence en effet , il saur qu'ils dyent
que'ce n'est pas vne vraye compo
sition ceile qui se fait de la matie
re & du suppose', ains vne compo
sition de raison. La sixiessme est de la
puissance , & del'acte : & ceste-cy est
triple , l'vne de lai puissance essen*
tiellej, & de l'acte! essentiel : comme
est la compositibnoie ^fbrraeiíí de;
k matiere : & du genre , & de la dis
ference. Et ceste espece decompo
sition se doit receuoir aux Anges,
en la maniere qu'on y reçoit la.com-
position qui est du genre & de la dif
ference. L'autre est de la puissance
cslèntielle & de l'acte accidentel,
comme est la composition qui se
fait de l'essençe, & des acddens
qui font en l'esiènce. Et ceste espe
ce de composition setrouuee's An
ges. Et la 3. maniere il se fait com
position- de la puissance accidentel
le , & ;4fi Dicte accidentel : comme;
de l'essprjtìíÇHi, est, puissance & ateiw,
dent de'famey &;de h çógnoissaníe,
qui est en l'esp'rit. Laquelle espece
de comppsifiójil:fist neceflàireawssi-
estre és-Anges : Si l'entendemenî &-
\9kMHe': fpa$ - djstinguie&de le^fastf
senc^fg fhpfoqui<ft pfjojb.able^;.
septjesíne espece de composition gst
de la substance & des aecidefts. Las
buictrefffle dg j^siqitfSjaícidensjn.

i '
QYATRIESME PARTIE
DE LA Q_VESTIOïf QJf A-
- "-t trìesme. Si les Anges sont
' ^ immortels. ;^v- '' 7

Lti An- TJ appert . clairement par les sain-


ges im- Actes lettres que les Anges sont
mue^ immortels , & se peut aisément ve-
t'eflfar rifier paf raisons. D'autant que s'ils
M n'ont neicorps ne matiere ,lls sonù
grâce. Ktìmortels. Au surplûs , parce que
íàinct Paul etì la premiere àTÍme-f
âítit: chap. <?. esscrit ;que lefeul Dieii
est immortel , il est «ay tne'qstestion.
entîe les Theólogi&s'i si'léíArìgêí
se doiúent nommer immortels , par1-
tìattsre, otìpar gWce. Gar presque
tous-les vittìx autheu rs ont accou-
tfûttfé -ic h órïier leâ lhrîgeè iWi»o?tf
tefe nonpar^rtatûre '> $tìs fkt grfefci'
<§êmme IUstìn ëk l'expíkâHóri d£
Ta questiórPísi .dé' c^lleY'qtìl eíïoierir

Et Origíbë &ií# í^tWtìrtWíes


le 8. chap. de l'Epistre aux Romains.
Et Dydimus liure premier du sainct
dv P. M a l d o n a t. 33-
Esprit. Et sainct Ambroise liure 3.
de lafoy , chap. %. Et sainct Hieros-
me liure z. contre Tes Pelagiens. Et
sainct Augustin au liure de la vraye
Religion chap.i3.Et Cyrille liure 8.
du Thresor,chap. 2. & liure 2. con
tre Iulian, ne reprend pas cela seu
lement en l'opinion de Plato tou
chant les Anges , qu'il ait dit que
les Anges font immortels non pas
leur nature, ains par la volonté' du
grand Dieu. Et Damascenus liure
2. de lafby chap. 3. à de'finy l'Ange
estre vne substance spirituelle , par^
ticipante de raison , de volonté- li?-
bre,immortel!e nan par nature, airts
par grace; le mesme est escrit au 6Y
Concile generai , action ii. Et des
Philosophes,les Platoniciens en par.
lent ainsi. Et Auicenna au traicte'4.
6. 8c 8. de la Metaphysique. Mais
tous les Theologiens Scholastiques
ont acconstume' dedire que les An
ges font de nature immortels. Or
ils interpretent l'opinion des anciés
Peres , disans que mortel & im
mortel se dit en deux manieres;
Traicte' des Anges, - '
ou de quelque principe interne, &
qu'en ceste maniere les Anges font
immortels de leur nature , fçauoir
est d'autant qu'ils n'ont pasdansleur
nature aucun principe par lequel ils
soient conduicts, à la mort, comme
íbrìt les choses composees de ma
tiere. D'vne autre maniere mortel
Ou immortel, est dit par m prin
cipe externe , d'autant que d'iceluy
ilpeutestrc pousse' à la mort, com
bien que de fa nature il ne soit mort
tel. Et en ceste ma-niere ih disent
que nos ames & les Anges font mor
tels , d'autant qu'ils! peuuent estre
.reduits à rien, par Dieu, qui les a
Jfàits r Cela est bien dit par les
Theologiens, toutesfoisil me sem
ble qu'autre chose ont voulu dire
les anciens Peres. Et par ce i'estime
qu'outre ces. deux manieres de
mortalite ou d'immortalite', il faut
<jue nous en mettions vne troisiess-
me;Sçaooir est quand quelque cho
ie est telle , qu'encore qu'elle o'aye
point dans elle vn principe de mort,
toutesfois de fa nature elle dépend
; i 7 _
DV P. M AL D ON A t. 34
de quelque cause superieure qui la
consente : de maniere que si elle n'e-
stoit conseruee, combien qulelle ne
fat point pousee à la mort par vn
principe exterieur, elle mourroit. Et
relies font nos ames , & les Anges. inrnttt-
Car en vne maniere ils sont immor- "k.
tels n'ayans point d'interieur com
mencement de mort : 8t c'est assez Mir"1''-
çonr les faire direimmortelsdeicui
nature. Mais ils sont dits mortels,
& d'autant qu'ils peuuent estre re
duits à rien par la cause qui les a
fait de rien : Et aussi d'autant que
de leur nature, ils tendroient à rien
s'ils n'estoientconseruez. Et en ca
ste maniere me semblent les Perés
anciens nommer les Anges immor
tels , non par nature, ains par grace: -
d'autant que ce qu'ils sont conser
vez , vient de la grace de Dieu : ser
lon ceste vulgaire sentence desainct
Gregoire : toutes choses tendroient
à vn rien, si la main du Tout-puis
sant ne les. conseruoit. Mais quand
au passage de sainct Paul , ilestexr
pliqtté en deux manieres par les
.; .-. Traicte' - des Ange r,
Comme Peres anciens. Les aucuns ont dît;
£«t«/'«»/ que le seul Dieu est immortel, d'au-
** m~. tant que seul il* l'immortalite' non
mrtel. ....
íeçeue d vn autre, ains comme nea
ehez soy. Et nos ames & lesAngeÇ-
; .. ont immortalité -reçeoë de Dieu;
auec leur nature. AinsiTescrit Iustin
en^'explication de Ja question e,ii
. des questiós proposees par les Gen-
' tils aux. Chrestiefts. Et sainct Hie*
rosme liure second contre les Pela
giens. Mais ceste interpretation est
exposee aux calomnies des Arriens.
Lesquels pourroyent dire de mes-
íne ( comme ils disoient ) que tëfiîs
-de Dieu n'auoit pas Timmortaíiflr
-de fa nature, d'autántqu'il l'a reçeitè
•du Pere : comme il dit en sainéfc
Tean 5. Comme le Pere a la vie etì
soy-mcsme \ ainsi a-il donne' au fils^
-d'auoir îà vie en foy-rriestne. Et píft
4e: l'autre explication , qtirȏftde'Sl
Augustin liure premier de la Trini
té , chap. premier. Et au liuté 7. du
Genese , selon la l'éttfe; , chap. ilert
nies , m'agtée d'auántage. ^Q^Òrt
die que le seul Dieu a l'immortaíité
d-y P, Mal don at. 35
parce que non seulement il ne meurt
pas, mais ne peutencore mourir du MM»
iout. Et n'est autre chose dire, il a"*'-
seul l'immortalite' , sinon ce qu'il a
dit en Malachie chapitre 3. Ie suis
Dieu & ne fuis point change'. Et
fainctlacques chap. 3. auquel n'y a
point de transmutation. Car nous
voyons d'autres semblables lieux de .
l'E/criture estce ainsiexpliquez. Co
rne aux Romains 6. Dieu est dit
estre seul sage,combien que les hom
mes soyent quelquefois sages. Mais
il est expliqué aux Hcbrieux 4. com
ment il est seul sage,lors qu'il est ditr
toutes choses font desscouuertes &
nues à ses yeux , c'est à dire, il n'i
gnore rien.Et en faihct Matthieu i9,
& en sainct Marc chap. rc &enS.
luc i8. Dieu est . dit ieul. bon. Ce
qu'est ioterpjreté lots qnil est dit
en lob 4. Aux Anges il. a trouué
mauuaistié. Et en h premiere de S.
Iean chapitre premier. Si nous di
sons que nous n'audns point de pe-
chí ntìus^nóHs/^uUfons", & is toii
rit*A'eôpoirjt ^irsiitSicEn "ia- pise-
Traîcte' Dés Anges,
mîere aux Corinth. 3. Iesus Christ
est dit seul fondement : Et les Apo
stres encore font nommez fonde-
mens aux Ephess. a. & en l'Apoca-
lipsezi. Mais Iefùs Christ l'eit ab-
soluément , estant fondement sans
fondement : comme il est declaré
aux Ephesiens 2. Sur edifiez fur le
fondement des Apostres & Prophe
tes, fur ceste pierre angulaire lesus
Christ. ..-; .

, ' CINQVIESME PARTIE


DE LA Q_V ATRIESME
"-- ' question.De la difference
des Anges.
Timbre TP\E v x choses font en çest cn-
des An- .L/droict traictees par les Theo-
ioniens. L'vne j combien est grand
le nombre des Anges, L'autre, com-
ìnent c'est iqu'ih different entr'eux:
soit eh n»mbre, soit en espece. Tou
chant au nombre des Anges , les
. opinions des Theologiens ont esté
fort diuerses. la;.premiere est fort
ancienne , -que fc noPmbre des Án-
Dì' P. M A L D O N A T- ^6
ges excedoit celuy des hommes de
5)9. parties : à cause de la parabole de
í'Euágile qui est en sainct: Matthieu,
28. Et en sainct Luc chapitre i5. De
ceUiy lequel ayant cent ouailles , en
laissant les 99. s'en alla pour en cher
cher vnc qui estoit perdue. Ce que
Iesus Christ ayant dit de luy-mes-
mcivc semble pas auoir voulu signi
fier autre chose,stnon qu'ayant lais
sé les Anges, il s'vnit au-móde pouf
chercher îhomme.De ceste opinion
fait mention l'Autheur des questiós
à Antiochús ( attribuées à sainct
Atha.)en la question a. Et decest ad-
uisfutCyrillus Hierosolymitain en
la Catechese i5. La 2. opinió fut,que
les Anges surpassoient de dix parties
le nombre des hommes. Comme Ci
ceste vulgaire opinion des P philoso
phes estoit encore vraye en cest en-
droict : Car ks Philosophes ehsci-
gnent que quand d'vn Element in
ferieur est engendre' vn superieur,
rinferieur €;st. surpasse de dix par
ties par îe superjftuí.Et par ce moyen
le nombre des hommes est surpasse'
. Traicte' des Anges,
de dix parties par celuy des Anges.
Ceste opinion est nombree entre
celle de saincte Brigide : & vaille
autant qu'elle peut. La troisiesme
opinion a esté que le nombre des
Anges est esgal à celuy des hommes:
à cause des paroles de Moysc au
Deuteronome chapitre 32. II a esta-
bly les limites des peuples , iouxte
le nombre des enfans d'Israël * là ou
tes vieux Autheurs lisent : Iouxte le
nombre des Anges , ou iouxte le
nombre des enfans de Dieu. De
ceste opinion aussi a fait mention
l'Autheur des questions à Antiochus
au lieu susdit. La. quatriéme , est
ne'e de l'opinion populaire : Que
Je nombre des Angesions & mau-
uais est moindre que celuy des hom
mes. Laquelle opinion recité Guil
laume de Paris au liure second de
l'Vnhrers. D'autant qu'il y en a qui
orit pensé qu'il y auoit autant d'ho m- '
mes predestinez de 'Dieu -qu'il y eut
d.Aoges qûi treíbucherent du Ciel,
Iíeslrs argumens -Íbflt;telis'':-Les Atì-
ge ,tánt bons que ma^uais, font en-
• : plus
dv P. Maldonat. 37
plusgrand nombre de deux parties.
Parce qu'en l'Apocalypse i0. il cíb
dit que le dragon < c'est à dire le
diable ) attira auec soy la troisiesme
partie des Estoilles: Mais les 'hom
mes mauuais font en beaucoup plus
grand nombre que les bons. Don-
questout le nombre des Anges est
moindre que tout le nombre des
hommes. La cinquiesme opinion a
esté du Maistre des Sentences liure
second :distinction w. que le nom
bre des Anges est d'autant moindre
que celuy des hommes, <ju'en moin
dre nombre font ceux qui doyuent
estre sauuez , que ceux qui seront
damnez. Et de ceste opinion est
Guillaume de Paris au second liure
de l'Vniuer. Leur argument est, que
ksus Christ dit : ils seront comme
Anges,& parce il s'enfuit qu'autant
d'hommes seront sauuez , qu'il y a
d'Anges bien-heureux. Et cfautant
que les Anges heureux n'excedent
les mauuais sinon de deux parties.
Et que le nombre de ceux qui seront
damnez est beaucoup plus grandi
D
Traicte' des Anges,
-que des sauuez:ils colligent , qt*e
k nombre detousles Anges est pres
que de tant plus grand , que celuy
de tous les hommes , que le nombre
des bons est moindre que celuy des
raauuais. La sixie'me opinion a esté
d'aucuns Hebreux, comme de Rab-
bi Moses au second liure Moré,chap,
septie'me , lesquels ayans ensuiuy
Aristote , n'ont pas estime' qu'il y
eust plus d'Anges qu'il y a de globes
celestes. La septiéme a este' des Ca-
balistes { comme recite Archangc-
lus aux Commentaires fur les do
ctrines desCabalistes )q«e le nom
bre des Anges est de six cens mille
raillions ,8e vn mille & six cens cin
quante cinq mille & septante deux
Anges. La; Jiuictie'me opinion fut
qu'autant- y a-H d'Anges , qu'il y a
d'Estoilles au Ciel. Cas les Autheurs
de ceste sentence interpretent ainsi
ce lieu qui est a?u Genese chap. i5.
conte les Estoilles ,'si tu peux, c'est
à dire , conte les Anges y qui font
autant en nombre qu'il y a-d*Estoil-
les, D'autaut-qwe Dieu ne vouloic
dv P. Maldona 38
pas dire qu'il seroit les descendant
d'Abraham pareils aux Estoilles,
ains aux Anges. De mesme inter-
pretent-ils ce qu'est au Pseanme i4CÚ
qui nombre la multitude des Estoil-
les, & leur donne nom à toutes : car
par ce nom d'Estoilles ne s'enten
dent pas les Estoilles du Ciel, ains
les Anges. Car Dieu n'impose point
denoms aux Estoilles, ouy bien aux
Anges. De ceste opinion fait men
tion le mesme Archangelus au suf-<
dit lieu. La neufie'me fut de sainct
Chrysostome enl'Homelie del'As-
ceníion , tome troisieme. Que le
nombre des Anges & des demons
est si grand que tous les lieux sont
plains d'iccux. Ce que l'Escriture
semble souuent signifier : comme
en l'Ecclesiastique chapitre 5. ne dis
pas deuant l'Ange il n'y a pas de pru-
dence.Et en la premiere aux Corint.
chapitre ii. que les semmes soyent
voilees à cause des Anges, comme
s'ils assistoient par tout. Et à la pre
miere à Timothee 5. l'atteste deuant
les Anges efkuz. La dixieme D a opi«J
Traicte' d-es Anges,
nion fut,qn'il y a autant d'Anges, ny
plus ne moins que Daniel en nom-
bra au septicsme chap. Mille mil'
Jiers le scruoient , & dix fois cent
mille luy assistoient. D'autant que
tous les Anges assistent & seruent
à Dieu : Et Daniel voulut nombres
tous les Anges assistans & seruans.
Le nombre n'en est donc pis plus
grand qu'il dit.L'vnzie'meest, qu'en
«ffect les Anges sont infinis. Ce
.qui semble estre verifié par les pa
roles de lob chap.25. Y a~il de nom
bre de ses combattans ? Il appert
que quelques Theologiens ont te
nu ceste opinion parles Articles de
Paris , où elle fut condamnee. La
douzie'me fut de ceux qui disoient
le nombre des Anges estre plus grád
seulement que n est le nombre des
ïfldiuidus, d'vne espece quelle qu'el
le soir. La trezie'me fut d'aucuns
-qui ont pense' que le nombre des
Anges estoit aussi grand qu'est \e
«ombre des Arithmeticiens qui est
employe' à l'vsage des hommes. Et
oue Daniel voulut dire cela: d'au
Dr P. M a i. b o n a t. 39
rant qu'entre les hommes il n'y a
point de plus grand nombre co-
gneu.que celuy qui a este exprimé
par DanieK En ceste opinion sem
ble auoir este Guillaume de Paris au
second liure de l' Vniuers. La qua-
torziesme fut de ceux qui disoienc
qu'il y a autát d'Anges qu'il y a d'In-
diuidus entierement de toutes les
choses corporelles. Comme si la
raison mesme vouloit,que puis qu'eni
l'Escriture il est dit qu'il y a dou
ble nombre , l'vn qui se peut voie
& est corporel , l'autre inuisible que
l'vn & l'autre soit compose de nom
bre d'Indiuidus. La quinziesme est
-(.comme de sainct Thomas & de
plusieurs autres Scholastiques ) de
ceux qui ont dit que le nombre des
Anges estoit de tant plus grand que
nestceluy de toutes les choses cor-
poreUes , que les corps celestes sur-
passent en grádeur tous autres corps,.
Laquelle opinion semble auoir te
nu sainct Denys au liure de l'Eccle-
siastique Hierarchie , chap. i5. La
seiziesme opinion est de. ceux qui
D 3.
- Traicte' des Anges,
plus modestement & sagement ont
dit , que le nombre des Anges est
innombrable. Comme Lactanceau
premier liure, chap. 7. Sainct Rie-
rosme sur le 7. chap. de Daniel. Et
sainct Gregoire au i 7. liure des Mo
rales chap. 7. Des sainctes Escritu-
res trois choses se colligeat claire.
ment : Premierement que le nom-
1 . bre des Anges est tres-grand , car íi
pour vn Ange fi grande multitude
«JÎAnges a este' enuoyee , au a. des
'ftoys , chap. 16. il faut que le nom
bre de tous les Anges soit incroya
ble. Et ce que dit Iesus Christ en
sainct Matthieu 2 5. qu'il peut prier
son Pere qu'il luy enuoye douze lé
gions d'Anges , declare cela mesme:
Et attendu que nous lisons en sainct
Marc 5. qu'en vn seul homme fut
vne legion de diables ( c'est à dire
plus de i3. mil ) c'est vn argument
que la multitude en est presque in
finie. Adioustons que ( comme dit
sainct Chrysostome en FHomelie de
^Ascension ) l'Escriture montre que
tous les lieux sont pleins d'Anges,
dt P- Maldona t. 4a
comme il a esté dit cy dessus:le nom
bre én est donc tres-grand. Le se
cond , qui se collige de l'Escriturc
est, que c'est heresie de dire que le
nombre des Anges est infiny : D'au
tant qu'au 1i. de la Sapience il est
dit que Dieu a tout fait en nombre^
pois & mesure. Et en l'Apocalypse
12.il est dit que la troisiesme partie
des Anges tomba du Ciel: mais au
nombre infiny n'y a point de troi
sième partie; Le troisieme qui s'en?
collige est , que les hommes ne peu-
uent cognoistre combien grand est
le nombre des Anges. Et cela signi
fie les paroles de lob, chap. 25. Y
a-il point de; nombre de ses guer
riers : car cela ne signifie pas que le
nóbre en soit infiny , mais qu'il nous
est innumerable. Comme quand il
est dit au Pseaathe 39^ U est cheue
surmoy des maux , desquels il n'est
point de UMilm] jTl puis , de la
mefme contrarieté- des lieux de l'Es
triture, là où il semble que le nom
bre certain des Anges soit mis , l'on
entend que le nombre nous est in.-
T-v
Traicte' des Anges,
certain. Car en Daniel i0^ il est dîtr
mille milliers ,& dix fois cent, &c.
Et en l'Apocaly pse 5. il en est seule-?
ment nombre mille milliers. Et au
Pscaume 67. le char de Dieu de dix
milIe,&c.De ceste difference(dis-ie).
il se col lige que ces nombres ne font
pas mis pour certains, ains pour in-
certains. Car íi FEscrhure nous eust
voulu signifier vn certain & parfait
nombre, elle eust tousiours vse' d'vn
messme : cequ'elle ne fait pas. Elle
a donc voulu signifier seulement
que le nombre des; Anges. nous est
innombrable. Mais le sens de cest
endroit du Pseaume 67. selon la
lecture des Hebreux est : Le Cha
riot de Dieu fort fouuent vingt-mil
le & mille d'Anges, comme le Para-
phraste Caldéen le tourne. Donc-
ques v n prudent Theologien doit-
respondre cela , estant interroge' de
ceste matiere. Celuy qui outre cecy
demande quelque chose est :. cu
rieux.-celuy qui en respond d'auan-
tage , est temeraire. Mais quant aux
autres tesmoignages amenez parles
t>T V. Maxdoktat, 41
autres: «n premier lieu la parabole
Euangdiquc n'est pas entendue des
Anges & des hommes,ains des hom
mes seulement. D'autant que Iesus
ehrist respond à l'accusation des
Phariseens , de ce qu'il conuersoit
auec les iustes.Et parce, si la parabole
sentendoit des Anges , elle ne seroit;
pas à propos. Aussi faut-il prendre
garde à ceste parabole , qu'elle ne se
doit pas entendre comme les paroles
semblent signifier , autrement l'on
conclurott que íe nombre des bons
seroit plus grand que celuy desmau-
uais de 99. parties. Ge qu'est ou-
uertement contraire à l'Escriture,
laquelle en seigne que le nombre des
sauuez sera petit. U faut donc en
tendre la parabole selon l'inten-
tion & opinion des luiss. Comme
si Iesus Christ disoit : encore qu'il
fut ainsi qu'il y eust 99. iustes , &
qu'il n'y eust qu'vn pecheur , vous
nemedeuriez pas reprocher, silais-
sant les 99. iustes ie cherchois vn
pecheur : d'autant que ceux qui
font sains n'ont pas besoin de Me-
Dy
Traicte' des Angesì
decin,ains ceux qui sont malades. Et
quantau passage du Deut.au 32. cb.
iî veutdtre,que lors que Dieu eut có-
fondu les langues- erí Babylone, &
eut departy les hommes en diuer-
scs contrees , il efleut en luy-mesme
k peuple díspaèlà venir, pour estre
comme son aisne': & qu'il Iuy auoit
deítine' la terre de Promission , cóms
son heritage. Mais qu'en icelfe terre
il auoit introduit autant de peuples
qu'il y en auoit de necessaires pour
la cultiuer 8c confirmer aux Israéli
tes qui deuoient venir apres. Et cela
signifie ce qu'il-dit t í'ay arresté les
limites des peuples selon le nombre
des enfans d'Israël. Et touchant ce
qu'est dit en S. Lucch. 20. que les
bien-heureux seront esgaux aux An
ges, il est tout euident que cela ne se
doit pas entédre de l'e'galité du nom
bre , ain» de l'e'galite' de piete' & da
chasteté.Car pour prouuer qu'auciel
n'auroit point de nopees entre les
hommes,il;n'estoit point à propos da
dire que les hommes seroient esgaux
ea nombre aux Anges.. Et quant à
dv Maldonat. 43
ee qui est dit des Estoilles.au Genese.
15. cela est dit par vnë similitude ac«
cpustumeeiqueDieu aidit, nombre
les Estoilles si tu peux, non pas que
quelqu'vn puisse nombrer les Estoil-
Jes,mais c'est comme s'il di soit, nom
bre le sablon de là: mer. . Et ce qu'au
Pseaume i^tf.est dit, queDieu nom
bre les Estoilles , ne signifie autre
chose sinon qu'il n'y a chose si gran
de dont Dieu n'aye le compte : do
maniere que rien ne peut fuyr saco-
gnoissancé.. Cap ; il vouloit verû
fier que Dieu assembleroit les en-
fins d'Israël dispersez par diuçrse*
parties de la terre. Et c'est ce qu'il
auoit propose edifiant Hierusalem:
Le Seigneur assemblera ses dissipa
tions. Et d'autant que .quelqu'vn
eust peu obiecter : comment: pour
ra Dieu assembler vne si grandemul..
titude fans en laisser quelqu'vn ? II le
verifie,d'autant qu'il nombre la mul
titude des Estoilles, & à memoiredu
nomd'icelles.. :.v..k
Traicte' des. Angeï,

COMMENT ILS SONT


DIFFEREND EN ESPECE..

LE s Theologiens ne s'accordent
pas aussi , commet les Anges font
entr'eux differens d'espece.Etde ce-
cy il y a sept opinions; La premiere
d'aucuns qui ont dit- que- non seu
lement tous le* Anges sont entre-
eux d'vne mesme espece , ains enco
re de mesme e spece que nos a mes.
De laquelle opinion S. Thomas fait
mention , fans alleguer l'Âutheur di-^
celle fur 1c 2. des sentences , distin
ction y. article 4. & à la premiere
partie de la question 50. article 4.
Celius en son liure de demonstra
tion recite quelque semblable opi
nion d'aucuns qui ont estimé que
nos ames , & les demons font de
mesme espece : Et que les demons
n'estoient autre chose que les ames
des hommes separees du - corps. Et
Origeneau 2; liure Periarchon cìx.
8. dit qu'en la définition de lame
font aussi- camprins les Anges. Có
D V P. M ALDO NAt. '4$:
bien quedececy il ne soit rien arre-
st e' aux regles Ecclesiastiques. Etau
li.4. il ne preuue pas autrement l'im-
mortalitcde nostreame, qu'en preu-
uant qu'elle est de mesme-especeque
Jes Anges. Geste opinion , estant en
tendue comme elle est proseree par
ces Autheurs,est impie. Car en tous
endroits ausquels l'Escriture parle
des ames & des Anges , elle en parle
comme de deux natures distinctes: &
vse d'ant it besejCome aux Hebreux Tu
II n'a donc ia mais appr ehéde les An-
ges,ains la semence d'Abraham. Mais
en certain sens,- cesie opinion pourra
estre vraye. Si quelqu'vnditquenos
ames ne sont pas de meíme nature &
especc , mais toutesfois qu'elles ont
quelque genre cómun. Comme que
l'vn & Tautre est esprit. Car c'estj'o-
pinion de tous les Autheurs Grecs;
comme il appert en Damasscenusaux
premieres institutions de Dialecti
que db. 7, J,a 2. opinion fut que
tous les- Anges entre eux font de
mesmeespece. Et ceste opinion rev
íitablement me semble fort proba
Traicte' des Anges,
blè.En premier lieu, doutant qu'elle
a plusieurs tres-graues Autheurs. S.
Denis ch. i k de la Hierarch. Eccle
siastique, Athariaseaux de'finitlons;
& au 3. Dialogue de là Trinité. Dy-
dimus au liure du S. Esprit. Basilius
au liure du S.Esprit. Gregoire Nice-
ne de la creation de l'hommecrn i8ì
& l'Autheur des questions à Antio-
chus, attribuees à Albanaises enla
question 4. Et S. Augustin liure ftj
de la Citéde Dieu ch. r. Isidore li
ure premier du souuërain bien ch.
i2.de Paschasius Diacre tiure s. du S.
Esprit chap. 3. & A-nsetmus liure 3.
pourquoyDieu & homme, &c.ch.
«- Et aussi d'autant qu'elle semble
s'accorder à l'Escritureilaquelle par
lant de tous les Anges , elle en parle
comme' de quelque vnique espece.
Comme quand elle dit au Pseaume8.
vous l'auez vn peu amoindry des
Anges. Et aiíPseaume i03. qui fait
ses Anges Esprits : & ses ministres,
ìe seu bruflant. Là ou par le mot
d'Esprits , fans faute il entend tous
tes Anges , & auec iceux conioinctc
D V P. M A L D O N A t. 44
k seu bruflant , c'est à dire les Sera
phins. Et S. Paul aux Hebreux pre
mier, compare Ieíus Christ auec les
Anges, il compare vne nature auec-
ques vne autre nature. Et lors qu'au
ch. 2. il dit : il n'a Laroais apprehendé
les Anges, ií donne à entendre qu'il
pouuoit apprehender la nature des
Anges : Et ne le pouuoit faire, si ce
n'eust esté vne seule nature de tous.
Finablement il est croyable par rai
son que ceste celeste Republique
composee d'Anges , n'est composee
que d'v«e espece , tout ainsi que ceste
Republique humaine est composee
d'vneautrei La 3. opinion fut que
tous les bons Anges font d'vne mes-
me espece : & tous les diables d'y-
ne autre. En ceste opinion est Da-
mascenus aux premieres institutions
de Dialectique chap. 7. Mais elle est
peu probable. Car , comme il sera
verifie' apres-, tous les Anges qui pe
cherent font de mesme nature , que
ceux qui ne pecherent pas : Et par le
peché , la nature ne se peut chan
ges. La 4. est d'aucuns- qui estime?
Tkaicts' d^s Anges,
rentqu'ilya autant d especes d'An'-
ges , qu'il y en a d'Ordres. En ceste
opinion fut S.Ambroise au liure }.de
la foy , ch. 4. Et quelques Scholastî-
ques,cóme Alexander part. i. quest.
îo.nombre 6. art.premier. Et Bona-
nenturesur le 2 .des Sentences,distin-
ction3.quest. i. Et Dionysiusen la
mesme distinction, quest. 3.. Ceste
opinion encore est probable. Et pre>
mierement par l'Escriture. D'autant
que quand S. Paul chap. 4.auxCo-
locences veut prouuer les Anges
aùoir esté fáits par le Seigneur , il
vsc de ceste enumeration : sok Prin--
cipautez , soit puissances , &c. II
declare donc que les Principautez,
les puissances , & les autres ordres
font de dioerse nature.D'autant qu'il
vouloit prouuer la nature auoir esté
creéede Dieir , & nonlesdignitez.
Donquesces noms-là non seulemét
signifiét dignité, ains diuerse nature.
La 5. opinion futde ceïuy qui esscriuit
les Commentaires fur les Epistres
S. Paul, qui font attribuez à S. Am*
feroisc, fur le.4. ch. de l'Epistreaiis
D V P. M A L D O N A T. 45-

sent differens de merites & d'offi


ces, sontentr'eux differens de natu
res. Laquelle opinion est autant pro
bable , qu'elle est authorissee par ce-
luyqui la tenue. La 6. fut qu'il ne
se peut cognoistre (Iles Anges dis
fèrent ou conuiennent entr'eux d'ess-
pece. Comme a dit Damascenusau
a.liure de la foy cha. 4. Laquelle sen
tence si est entendue comme ces Au-
theuts veulent ( c'est qu'on ne peut
monstrer par certaines raisons,com-
ment les Anges font difserens ) est .
vraye:& toutesfois.il y a tousiours
lieu d'où dire son opinion.La 7. opi
nion fut qpe chacun des Anges e~
stoient entr'eux differens d'especes.
Ce fut l'opinlon d'Aristote ( auec le*
quel nous n'auons rien à dessmeller.)
Mais entre les Theologiens S. Tho
mas ne fut pas 1'Autheur,com me l'on
peuse vulgairement. Car Albert 1c
Grand furie 2.desfentenees, distin
ction 9. anticle 2. & S. Thomas di
stinction 3. article 4. recitent ceste
opinion fous le nom de quelques
y
t TRAICTe' DES Anó'es,
Theologiens leurs predecesseurs^
S. Thomas estime parauanturetrop
ceste opinion , d'autant qu'il TeíH-
moit non seulement vraye ,ains ne
cessaire. En la premiere partie, que
stion 50. article 4. Et fur le i- des
sentenceSjdrstin'ction 3..árcicle 4. Et-
auî. Contrit Gentes chap.9r.pí.& qj.
Au surplus ceste opinion,com-me te
nant trop de son Aristote , a este' à
bon droict repudiee par les autres
Theologiens. EtmesmesparS. Bo-
nauenture fur le 2. des sentences,
distinction 2. question i.Et aux arti
cles de Paris elle est notee comme
erreui. ËHe peu£ estre réfutee par
plusieurs argumens ; Le pretnier est
d'Aristote : TOutés choses qui con-
tisennent en esptfcc? , & different -eii
nombre ont matiere : les Anges n'en
ont pas:ils ne comiiennenî donc pas
en espece , & different en nombre;
ïe reíponds j-quexe Principe/ d'Ari-
ctote est:fátfsí. D'alitant qu'il n'y a
rien'qufcniioMÎs íàce cònuenir , ou
differer les chcjses en nombre que
h matiere', Catien premier lieu la
DV P. M Al D ON A t. ^6
soy nous enseigne bien que nos
ames different en nombre (d'autant
que mon ame n'est pas la vostre) &
quelles conuiennent en espece.Mais
la raesrne foy nous apprend qu'elles
n'wit pas de matiere. Doncques la
inatiere n'est pas en cause que les
choses qui font de mesine espece,
soient differentes en nombre. L'on a
accoustume' de respondre que nos
ames , combien que n'ayant point
de matiere , ont ncantmoins quel
que naturel respect à la matiere. Et
par ce respect different de nombre
entr'elles. Mais ceste ressponce n'est
d'aucun moment. Car qui doute
que ce respect ne doiue auoir. quel
que fondement: & qu'autre ne peut
tstre que ressence de l ame, & que
te fondement de relation doit pre
mièrement estre par nature indiui-
du & singulier , que la relation s'en-
fuyue d'iceluy. L'essence de l'ame
tst par nature indiuiduë premier
que d'auoir respecta la matiere. Et
apres , il n'y a rien qui soit moins vn
de nombre , que la. matière. Don
Traicte' dès Ancw, -
ques il n'y a rien qui soit moins eau,-
sequ'vne chose soit vne en nombre.
Ce que se verifie d'autant qu'il n'y a
rien plus indiffèrent par fa nature,
non seulement pour vnité du nom
bre, ains de l'espece & du genre , que
là matiere. Il n'y a donc rien qui
soit moins vn en nombre que la
matiere. Finablement estre vn en
sombre, c'est auoir le dernier acte:
Donques la chose qui a moins d'a
cte , ne peut estre la propre cause,
que la chose soit vne en nombre.
Mais la matiere est telle que cela. Le
2. argument de S. Thomas. Estre
different de forme, c'est estre diffe
rent d'efpece. Tous les Anges difire-
rent déforme, d'autant qu'ils font
les formes mcsmestils different donc
tous d'esspece. Ie respons que Iá pre
miere proposition est' fausse. Car
comme a tres-bien dit Scotus : autre
chose est estre different de forme,
mitre choíc est , estre formellement
different. D autát que toutes les for
mes qui font d'vne messme efpece
(comme nos ames ) sont differentes
t>v P. Mal don a t. 47
k forme: d'autant que sont de di-
uerse forme. Mais elles ne sont pas
differentes formellement , d'autant
qu'elles diffèrent par raison& de'fi-
nùion d'essence. Estre donc difserét
d'espece n'est pas differer de forme,
ains estre different formellement.
Le 5. est : les Anges font formes fub-
sistans d'elles messmes separees , ab-
straictes de la matière : Mais s'il se
trouuoit quelque homme tel que
nous le figurerions dans nostre Es
prit abstrait de la matiere , il ne
pourreit estre qu'vn en vneespece,
Donques vn Ange n'est qu'vn en
vne espece. Ie respons qu'vn Ange
est autrement abstrait de matiere,
autrement en destrayons nous vn
homme. Car l'Ange est en effect ab
strait de toute matiere : mais l'hom-
me n'est en aucun endroit abstrait
deceste matière ou de celle-là:D'au-
tant qu'il ne feroit pas homme.
Le4.est:Les choses qui par natu
re font immortelles , se contentent
d'vn Indiuidu:d'autant que les Indi-
uidus nc sont pas multipliez par k
Thaicte' des Anges,
-nature, linon pour la conscruation
de 1'espece-& parce il n'y a qu'vn So
leil. Ie responds que l'immortalité
de l'espece est bien quelque cause
dequoy il n'y a aucimesfois qu'vn
Indiuidu,nequ'vne espece. Mais que
ce n'en est pas toute la cause. Et que
lors n'y a qu'vn Indiuidu fous vne
espece, quand non seulement vne
espece est immortelle :ains est telle
que par vn Indiuidu elle peut obte
nir toute fa fin. Et parce n'y a qu'vn
Soleil non seulement d'autant qu'il
est immortel , ains d'autant qu'vn
sijffit pour distinguer les temps,
d'autant que c'est la fin de ceste espe-
cc.Mais entre les Anges ceste secon
de cause n'a point de lieu. Car enco
re qu'ils soient immortels , toutes-
fois par vn Indiuidu ne se pouuoient
faire tous les ministeres qui deuoiét
estre faits par Anges d'vnc espece.
Par ce moyen peuuent estre aussi rc.
solos tous les autres argumens.
nv P. Maldona t. 48

La cinq^iesme qj/e-
STI.OJ* GENERALE DES
facilitez des Anges.
EN ce't endroit les Theologiens
disputent cinq choses. La pre
miere u aux Anges est la puissance
d'entendre , chose qui est facile.
La seconde si en iceux a double in
tellect , comme aux hommes l'A-
gent, & le patient : & de ceste que
stion nous parlerós apres,lors qu'on
traictera de la maniere de la co-
gnoissance. La 3. si les Anges ont
aussi faculté de vouloir : & cela 'est
aise' aussi. La 4. s'ils ont liberal arbi
tre : & de cela nous parlerons diss-
courans de l'homme. La 5. si les
fàcuirez de TAnge font en effect
distinguees de son essence. Et de
ceste .question voyez les Commen
taires dç Çaietanus en la premiere
partie, question 54. article 3. Vne
autre question est bjen plus necess-
frire*& m©ins-vsitee entre lesTheo-
logienfr-: îsi-.ç.utre -1a faculté d'en-
icndrejfc de vouloir, les Anges ont
Traicte' »ts Anges,
Deux faculté de scmouuoir ,& les corps
faculte^ qu'ils remúent. S. Thomas en U
An~ question i5. du mal , article premier
en la solution de l'Argument i4. &
Î5. & en la question vnique des créa
tures spirituelles article 6~ch la solu
tion du 8. argument & en l'opuf-
cule n.article3.&en l'Opuscule 53.
& plusieurs autres Scholastiques
pensent qu'aux Anges n'y a que
deux facultez , l'entendement & la
volonte' , par le moyen desquelles
ils operent tout ce qu'ils font.Et pat
ainsi que par la volonté' ils remuent
& eux mesmes , & les autres corps
qu'ils mouuent. Durandus au liure
a. des Sentences,distinction 7. que
stion 5. recite que l'opinion d'autres
Theologiens a esté contraire.Et fa-
prouue bien beaucoup plus ceste-cy.
Pour le premier, d'autant que nos
ames font bien autant spirituelles
{quant à l'eflence ) que les Anges : &
toutesfois outre l'entendement &
]avolonté,ellesontd'autresfa<ulter.
Car nostre Esprit ne meut pas son
corps de U feule volonte'. Pour le
- -- - — r .
D V P. M A L D O N A T. 45
second , si les Anges mouuoient les
corps par la seule volonte' ( attendu
que la volonté' n'agit pas moins aux
choies distantes qu'aux proches)
les Anges ne pourroient pas moins
remuer les corps bié fort elloignez
que les plus proches : chose que
personne n'accorde , & qui est en
tre l'experiéce que l'Escriture nous
deesare. Car quel besoin fut il qu'vh
Ange vint du ciel pour transpor
ter Abacuc iusques en Babylone,
en Daniel chapitre dernier? pourle
3. aucun des Theologiens n a dict
que les Anges eussent puissance de
mouuoir aucune chose à forme es-
sentielle,c'est à dire d'engédrer au
cune chose naturelle, sinon parac-
cidés accommodez à mouuoir les
corps naturels,& aoens & patiens.
Que si de la feule volonté les An
ges mouuoient les corps, non seu
lement ils les pourroient mouuoir
à quelque lieu , ains enecre àvnc
forme essentielle attendu qu'il n'est
parpl9mal- aise deremuërdesgrâds
ctírpsj que d'engendrer la moindre
" E
Traicte' des Anges,
petite herbe. Pour le 4.si les Anges
raouuoiét les corps par la seule vo-
lonte'J& mesme si grands que quel-
quesfois ils les remuent, veritable-
ment les hommes pourroient aussi
auec leur seule volóté remuer quel
ques corps à la verité moindre que
les Anges : & moindre que ne re-
múeroit l'homme, d'autant que la
persection de l'homme est moiru
dre que celle de l'Ange. p ourle 5.
les choses fans ame ne font pas ca
pables par leur nature , de receuoir
commandements d'autant qu'elles
n'ont pas de cognoissance : & le có-
mandemeut ne meut que par la co-
gnoissuice.sinonqueceluy quicó-
mande soit d'vne infinie puissance.
Doncques les corps qui not point
d'ame nepeuuentestre remuez par
vnAnge, de saseule volonté. Pour
le 6\l'Escriture monstre que c'est le
propre de Dieu.qu'àfon comman-
dementobeyssent leschoses mef-
' mes qui n'ont aucune cognoissan
ce: d'autât que c'est luy seul qui re-
fuscitcles morts,& appdle les cho^
dv P. Maldona t. jo
ses qui ne font pas cómc celles qui
font aux Romains 4. Cela donc ne
peut estre attribue'aux Anges.Fina-
blementdesia aux articles de Paris
entierement à este' condamne' l'o-
pinionde ceux qui disoient queles
intelligences mouuoient le ciel par
leur volonte' seule.

LA SIXIESME Q V E-
STION GENERALE.
Des actions des
Anges.

LEs Theologiens traictent îcy


deux choses : L'vne , qu'est-ce
queles Anges cognoissent : L'au-
tre,comment ils le cognoissent. Or
il y a huict choses qui peuuent venir
en la cognoiffance des Anges. La
premicrec'est DÌeu,qu'ilny apeint
de doubte qu'il ne foiteognea des
Anges. La seconde,!» propre eflen-
ce de chacun Ange: qu'il estéuidét
qu'ils cognoisientaulsi. La troisie'-
me est,lesautres Anges , qu'il est
certain aussi s'entre cognoistre en
Tràìcte'des anóes,
tr'eux. La quatrieme f Ici choses
que par les Grees font nómées my-
'fteres: comme font les mysteres de
ttostrereligion.Or dececy l'on cot-
îrge deux choses de l'Escrïtirre:LV-
íie,qué naturellement les Anges ne
cognoiflent point les mysteres dì-
uins,sinon par retielatíon. L'autre
est, que par reuelafion ils ne les co-
gnoissent pas tous : ce qui se verifie
par le 40. chap.d'Esaye.Et par le i r.
chap. de l'Epistre aux Romains. Et
par le 2. chapitre de la premiere aux
- Corinthiens: qui à cpgneu le sens
du Seigneur: ou qui à esté son con
seiller? Là où non seulement les h6-
mes, ains les Anges encore font ex
clus, comme du conseil, ainfi de la
cognoisfance. Le mesme se peut
Vérifier des paroles tíe Iesus Christ
en sainct Matthieu 24. & en sainct
Marc 13. Maisdèceiour ou heure
personne n'en sçait rien , ne les An
ges des Cieux. Et de l'Epistre aux
Fphesiens , chap. 3. Afìnque cela
soit notoire aux Princes & puissanv
ces par i"Eglise,la Sapience de Dieu
D V P. M AL D ON A T. JI
qai est diuerse en toutes choses.
Duquel endroit le sens n'est pas des
mots, Princes & Pu iflances,enten
dre que par l'Eg'ise les démons-
ayent cognu les mysteres: corame à
voulu l'autheur de* Commétaires
íùr les Epistressaint Paul, attribuez
àsainct Ambroise. Car si saint Paul
eust voulu dire celajiln'eust pas
prouuc ce qu'il auoit entreprins:
Sçauoir est,qu'il luy.auoit este' don
ne' quelque singuliere grace plus
Qu'aux autres Apostres, pourpres*
cher l'Euangiîe aux Gentils, afin
qu'il fust cognu aux Princes &
Puissances superieures. Car quelle
recommandee grace cust-ce este' s'il
eustpreíche' les mysteres que les
démons ignoroient ? Il me semble;
encore que ce n'est point le vrayr
sens celuy queGregoriusNicenus,
& Theophilacte ont anciennement
donné : que les Anges ayent co
gnu les mysteres parle moyen de
l'Eglisemó pas pour auoir esté dicts
par Sainct Paul ou par autre Do
cteur, ains par l'Eglise comme par
E iij
Traicte' des Angèsì
cfFect auquel comme dans yn mi-'
roir ils ont veu h grace de Iesus
Christ reluisante. Car il semble que
les paroles de sarnct PjuI requerent
vníèns p^shaut. Et par ce sainct
Chrisostome dict tresbien en l'Ho-
melie 7. fur la mesme Epistre. Et
Theodoret aux commentaires , les
quels de ce lieu ontcollige' que les
Ánges ont appris par les Docteurs
dcl'Eglise.que la grace qui luy a-
ttoiteoferéeestoit si singuliere, que
lion seulement il apprenoit les en-
fans de la Circoncision(queles An
ges sçauoyent auoiresté eíkuz de
Pieu)ainsencore qu'il preschast
euxGentils:queles Anges n'eussent
iamais soupçonné dcuoirestre sau-
tiez.Et pour ceste cause saint Chry-
sostome pensa que Gabriel en sain ct
Matthieu, chap. i. ne dict pas: car
i! lessauuera tous, ains son peuple,
sçauoirest lesluiss. Ce qui n'est pas
merueiHeux des Angesrattédu que
nousvoyons Sainct Pierre , lequel
auoitreçeu delesus Christle pre
mier grade desapience& de scien
r,v P. Mudonat. 51
ce , & qu'il l'auoit ouy , disant:allez
pumy toutes hations : n'auoir pas
entendu le m /stere du salut promis
auxGétils,iusque; à ce qu'il en rid
l'effeô. D'autátqueens'efbahissát
il dict aux Actes 10. En verité i'ay
trouue'que Dieu n'a poinct acce
ption de personne : ains en toutes
mtîons celuy qui le craint & faict
iusticeluyest acceptable. Vn sem
blable lieu est en saint Paul à la pre
miere à Timothé; , cbap.3. Et ou-
uertement c'est vn grand íacremet
depieté , qui à este' manisseste en la
chair. Par lest] uelle* paroles il à sem
ble aussi que sainct Paul à demon-
stréque cela n'auoit point este' de
clare' par quelque singuliere m anie.
re aux Anges.au m /stere de l'Incar»
nation: c'est qu'il ne touche points , .
seulement les luiss , ains encore les °m ' et
Gentils.Les Theologien? ont aussi , n& c*&'
arcoustume'dedemander particu- jpf'
lìerementau mystere de l'incarna- rt e ."'
tioniusquesàquand il fusteogneu carnatVL'
des Anges. A laquelle question S.
Thomas respond bien en la.premi-
E iiij
TrAICTE1 DES ANGE
cre partie/questió 57. article 5. Que
generalement ce mystere futbien
cogneu des Anges,mais non pas de
ihesme chicune partie d'iceluy &
ses circonstances. La premiers par
tie de cecy semble estrc accordante
àl'Escriture. D'autant que S. Paul
aux Hebrieux chap. i. Asseure que
tous les Anges font enuoyez au my-
nistere pour ceux qui prennét I'he-
ritage: dont l'on tire vne conjectu
re probable, que le mystere duquel
ih deuoient estre ministres, leur
estoitdeclaré.Cela s'accorde aussi à
aucuns autheurs anciens , qui pen
serent que le premier peche' desAn.
gesfustaccomply parenuie. Veri
tablement sainct Augustin au liure
5. du Genese, chap. ip. Escrit que
les Anges cogneurent generalemét
Ce mystere. Mais la seconde partie,
( c'est qu'il n'ayent pas tout enten
du) estassez verifie'e parles lieux
Tu sd icts. Les anciens autheurs sesót
essayez de le verifier aussi par ces
mots du Pseaume 23. qui est ce Roy
de gloire? Comme files inferieurs
ïxv P. Maidonat. 55
Anges demádoient aux superieurs
au Ciel , qui estoit Icsus Christ. Et
des paroles d'Esayechapit. 55. Qut
esteestai-cyqui vict d'Edom?Ainsi
led'ctSainctDenysauy.chap. de
la Hyerarchie celeste. Ètlustin au
Triphon. EtOrigeneau traicte' i5.
Sur Sainct Matthieu. Et sainct Arn-.
broise liure 4. de la foy, chapi. T. Et
Sainct Hierosme en l'Epistre à Da-
masus de la premiere visió d'Esaye.
Et aux Commentaires sur le chapi.
6$. d'Esaye. Combien qu'il ne me
semble pas que les Anges ayent in
terroge' cela par ignorance. Car qui
sepourra persuader que les Anges
ayenteognu la moindre partie Àc
ce mystere , s'ils n'ont cognu Iesus
Christ qui estoit le fondement de
tout ce mystere? Qui croira que les
Anges n'ayent pas cognu Iesus
Christ, auquel ils auoient tousiours
assiste' comme à Dieu? Et par-ce cet
interrogatoire du Pseaume:Quiest
xx. Roy de gloire ? ne me semble pas
prouenir d'ignorance, ains d'artifi
ce. Car ils interrogent , non pas
E v
TrAICTe' DES ANGÍSÌ
qu'ils ignorent, mais pour extor
quer ceste honorable rcsponcc :1e
Seigneur puissant & fort,&c. Et
ceste-cy encore: Le Seigneur des
vertus,c'est luy qui est Roy de gloi
re. Et c est autre interrogatoire en
Esaye, ne me semble pas aussi signi
fier ignoráce aux Anges, ainschan-
gementen Iesus Christ, telle que
les Anges mesmesqui lecognoifc
soient priuement , semblent ne le
recognoistre pas. Mais touchant
aux démons desquels les Theolo
giens disputent maintenant: il me
semble que trois choses s'en peuuét
colliger par l'Escriture. La premie
re, que les diables necogneurent
pas Iesus Christ, ne le mystere de
]'Incarnation,auant qu'il commen.
çastdeprescher, d'autant qu'il n'est
piscroyablc que le diable eust ten
te' Iesus Christ , s'il eust pense' cer
tainement qu'il fustvray Dieu. Ils
ne l'auoient donc pas cogneu en
core. La seconde est , qu'apres la
predication de IesusChrist les dia
bles cogneurentee fnystere. Car
dv P. Maldona t. 54
eu Sainct Mithieuch3p.8.IIs font
contraicts de consefler: Qu'auons
nous à faire aucc toy , I e s v s fils
de Damdjtues venuauantle téps
nous tourmenter.Et en sainct Luc
4 Les diables sortoiét de plufieurs
crians & disant : car tue'sfilsde
Dieu. La troilie'me , est que les dia
bles ne cogneurent pas aflez cer
tainement pourquoy Iesus Christ
estoit venu , 0ii comment il auoit
arreste' de ddiurer legére humain.
D'autant que files diables eussent
sçeu cela , ils n'eussent iamais pouf
se' ludas à vendre Iesus Christ. Mais
en sainct Luc 22. & en saint Iean i3.
il est escrit que ludas fut induit par
ledioble. Cecy aussi se peut ensei
gner non pas veritablemeut par
J'Escriture.mais par raifó fort pro-
b ible : c'est que les diables furet di-
uinerren' empeschez qu'ils ne co-
gneussent Iesus Christ & le mystere
del'íncarnation :de peurqu'auant
que Iesus Christ eust confirme' fa
religion en nos cœurs , ils ne com
mençassent de faire de plus cruels
"B vj
Traicte' des anges,
assauts aux hommes. D'autant que
par leur nature ils pouuoyent aflez
cognoistreque leíus- Christ eítoit
vray Dieu , attendu qu'ils co-
gnoiííent fort bien la nature hu
maine, & qu'ils ont deu voir enle-
í9 Christ la nature humaine n'auoir
pasvnestrc propre. Ils pouuoient
encore cognoistre que Ieíus Christ
estoit néd'vne Vierge , & cognoi
stre qu'il n'estoit pas pur homme.
Us furent donc empesscheî. Lacin-
quiesme chose de laquelle ont peut
douter si les Anges cognoissent
toutes les natures des choses au gè
re vniuersel. U est fort croyable
qu'elles font toutes cogneues aux
Anges. D'autá t que nous colligeót
de l'Efcriture qu'elles furent con-
gneuës au premier homme :comme
-a ceíuy qui leur donna lenomi
toutes : U est donc vray semblable
qu'elfes furet cogneuës aux Anges.
La sixiefu-e est,s'ils cognoiffer tous
les indìutùus ({es choses naturelles?
Ie refpom qu'il est notoire parles
E(critures,quefcs Anges appren
DV K. Maldo-kat. 5J
acnt les choses indiuidues& parti
culieres. Dtautát que ces deux An
ges qui furentenuoyezà Loth au
Genese i9. doutoient s'il auoit des
filles Si des gendres. Etenl'Exode
i2. chap. Dieu commanda aux luise
qu'ils marquassent les huys de leurs
maisons du sang de l'Aigncau.à fin
que ï Ange vastateur passant, con-
gnutpar fa vision du sang quec'ei.
iloient maisons des luiss. Et en lob
chap. i. & t. Dieu dict à Sathamn'as
tu point prins garde à mon serui-
teur!ob?Par lesquels motsjlmon-
strequele diable pouuoitle con-
gnoistre , ou ne le cognoistre pas.
La septiesme chose est, si les Anges
peuuent cognoistre l'aduenir: Car Siles
d'vn costeTEscriture semble l'attrî. jLng.co
buer au seul Dieu. Comme auGe- lefittur,
nesechap.40. lorsqueloseph dict
l'interpretatio est elle pas de Dieu?
comme s'ildisoit,elle n'aî pas d'au
tre cjue de Dieu.Etau ihap.4i.Les
Sages & Magiciens auoient accou-
stume'ti'vserde l'œuure du diable
pour deuiner : Ec ne pouuoìent pas
Traicte' des anges,
predire à Pharaon la cause avenir
queloíephpatTeíprit de Dieu pre
dit. Et en Esayechap.4i.celaestmis
comme argument certain de!a Di-
uinite'. Annoncez nous les chose s
avenir, & nous sçauron» que vous
estes Dieux. Et au chap 44.demes-
meníaniere Dieu prouue qu'il est
seul Dieu. Ie suis le premier & le
dernier, & outre moy il n'y à point
d'autre Dieu ; qui est semblable à
moy?Qn'il appelle,& qu'il die l'or
dre, qu'il me declare dés quand i'ay
constitue' l'ancien peuple. Qu'il
leur annonce les choses à venir , les
choses futures.Et en Daniel#hapic.
2. lorsqu'ildit:ilyà vn Dieu au
Ciel reuelant les mysteres, il par-
loit des cho'es futures : signifiant
que les Magiciens n'ont peu aeui-
ner, d'autant que cela est au seul
Dieu. Et au 5 chap. aucun des Ma
giciens ne^peut interpreter l'Escri-
turequiauoit apparut en la murai).
Je, d'autant quelle concernoit les
choses à venir :& le seul Dieu la
peut interpreter par Daniel. A ce y
DV P- M AL DON A T. Jó*
aussi touche ce que IesusChrist dict
eaS. Matthieu 24. &Sainct Marc
i3. que les Anges ignorent le iour
duiugement. Et quant sainct Paul
dict aux Romains 4. Que le propre
de Dieu est d'appelîer les choses
qui ne sontpas, comme cel'es qui
sont. Mais d'autre part auísi & l'ex-
periéce , & l'Escriture enseigne que
les Anges, les diables, & les homm
mes mesmes deuinent quelque sois
lefutur. Comme au Leuitique îo.
I/hommeoulasemmeausquels se
ra l'esprit Pithonique ou de diuina-
tion, soient misa mort. Et au r.des
Roys,chap.-22 le diable, par vne
semme PithonuTe (comme tous les
vieux autheurs dignes de foy inter
pretent ) predit à Saúl , que le iour
ensuyuant il mourroit. Et sainct
Lucaux Acteschapit.i5.esc rit que
certaine fille, en laquelle estoit l'es
prit Pithonique, apporta vn grand
gain à ses m3Ìstres par fa diuinatió.
Les Theologiens ont accoustume'
dexpliqner cefte question en don
nant six reigles; & mettant premic-
Traicte des anges,
remét quatre distinctions des cho
ses futures. La premiere est, queles
choses futures ont leurs causes ne
cessaires, ou contingentes , ou li
bres. La deuxie'meest, que les cho
ses futures sc peuuent cognoistre
en deux manieres , ou en elles meí-
mes , comme presentes, ou en leurs
causes, comme si elles estoient. La
troisiéme, que les choses futures se
peuuent cognoistre certainement,
& de necessité: ou seulement pro
bablement. La quatrie'me , quelles
se peuuent cognoistre, ou naturel
lement, ou par reuelation & per
mission de Dieu. Doncque^ la pre
miere reigle est: Que les choses su
intes qui ont leurs causes necessai
res se peuuent cognoistre certaine
ment & necessairement, non en el-
' les mesmes, ains en leurs causes,nó
seulemétpav reuelation, ainsenco*
re naturellement par les Anges,par
les de'mons , & aucunesfoispar lei
hommes. Comme, que demainle
Soleil se leuera.Et toutesfois il faut
prendre garde qu'en telles choses
dv P. Maidona t. 57
/es diables ont accoustumé de de-
ceuoir les hommes: d'autant qu'il
arriue fou uent que les demons co-
gnoissent toutes les causes necessai
res d'vn e'uenement futur , & que
les hommes les ignorent entiere
ment. Et par ce les diables peuuent
certainemét predire que tellescho-
ses arriueront:& Iescómuniquants
aux hommes, ils s'acquierent aucu
nement reputation de diuinite' en
tre les hommes. Laíeçonde reigle *.rt£.
est , les choses qui ont causes cotm-
gentes ou libres font souuent con-
gneuesparles Anges , de'mons , &
hommes, non par art naturelle-
ment, ains par reuclatió diuine.Ep
en ceste forte il est croyable que cêt
esprit Pythonique ai» premier des
Roys,chap.28.cogneot la mort fu
ture de Saiil : Et ce diable qui pre
dit que Achab seroit deçeu au 3. des
Roys,chap.22.& qu'il mourroit en
laguerre:il est croyable qu'il lcCO*
gneut parce moyé.Demesme ma
niere ie me persuade que ancienne
ment ces diables qui ont predit soit
Traicte' des Anges,
parles Sybilles, soit par Idoles,
quelquechosede vray ,ont pronô-
cé les choses à veoir pour plus gra
de confirmation de nostre religion.
Dequoy l'on peut lire Lactance, au
liure preniierjchap.y. Ouilyen à
cu entre les Theologiens qui ont
pense' que ìamais les demon* n'ont
cogneu en aucune maniere les cho
ses futures jfinon par lareuelation
de Dieu. Comme Damafcenus au
second liure , chip. 4. La troifie'me
règle est , que les choses futures qui
ont causes contingentes, peuuent
quelquesfoisestre cogneuës natu
rellement par les Anges, les de'mós
& aucunesfoís parles hommes non
pas en elles mesmes,ains en leurs
causes,noncertainement,ains pro
bablement. Mais de tant plus cer
tainement par les Anges & par les
diables,qu'ils sót d'vne nature plus
subtile & de plus long vsage& ex
perience. Cestereigle donne sainct
A ugustin au liure second du Gcnes.
chap.iy.&aulîureia.chap.iy.&au
liure de la diuinatió des diables ch.
D V P. M A L D O N A t. 58
4.8c 5.Laquatrie'mereigleest,que 4.^,
les choses fut u res qui ont leurs cau
ses du tout libreSjComme celles qui
despendent de la volonté de Dieu,
ou des Anges , ou des hommes , ne
peuuent estrecogneues parles An
ges ne par les hommes , n'en el!es
n'enleurscauses. Et neantmoins,
elles peuuent eflre entendues auec
quelque probabilité, ou par effects
semblableSjOu par la mauuaise cou-
stume des hommes. Comme ce de'-
mon au \, des Roys- chap. 22.deut-
naqu'vn esprit de mensonge seroît
en la bouche des faux Prophetes &
deceuroit Achab. Ce qu'il n'eust
peu deuiner s'il n'eust cognu qu'A-
chab par inclinatió naturelle & pa r
mauuaise coustume croyroitaisé-
mrt aux faux Prophetes. Celames-
me enseigne saint Augustin au lieu
de la diuinatîon des de'mons cha. 5.
Laj.reigleest , que les Anges & -y,
les diables peuuent certainement
&sans erreur cognoistre& predire
leschoses futures qui despendent
4e leur volonte'. Comme dit saines
Traicte' des Anges,
Augustin au Hure preallegué.Com~
me le diable apres auoir reçeu la
puissance de Dieu pour tourméter
lob , il pouuoit veritablement pre
dire^ uededás tant de iou r* la mai.
son tomberait, & que les enfans de
lob moursóient. Et en ceste manie
re le diable à sonuétaccoustume' de
tromper les hommes en leur predi
sante qu'il à luy .mesme deliberé
( defjire:&parcemovensefaict a-
dorer des hommes, pour leur Dieu.
'" ^£5. La sixie'me reigle est, les choses fu-
turesde'pédantesou des causes có-
sequentes,ou des causes libres ne
peuuentestre certainement reco-
gnuës,non seulement en effect,ains
aux causes mesm<s,sinon parle seuí
Dieu. Et c'est ce qu'eseigneTEsc ri-
ture." Annoncez nous les choses à
venir & nous dirons que vous este?
Dieux.Mais quad on dict que Dieu
cognoist les choses futures en elles
mesmes,celanese doit pas enten
dre cóme s'il les cognoissoit vraye-
ment en elles mesmes :d'aut|t qu'il
ne cognoist pas mesme les chose?
dv P. Mal don a t. 50
presentes en eHes mesines 3 ains en
íòy- mesmc plustost : D'autant que
se voyant foy,iLvoit toutes choses. c^£íe(í
Au demeurant,lesensestque Dieu co ' ^
cognoìst les choses futures cn elles jei. cy0res
mesmes^c'est à dite qu'il les regarde en enes
comme presentes.Car l'on dict que mefmes,
les hommes cognoissent les choses
en elles mesmes que l'on void pre
sentes aux yeux. Et à Dieu , toutes
choses futuressont dictes estre pre
sentes: selon ce qu'est eícrit aux He
breux 4. Toutes choses font nues &
ouuertes à ses yeux. Et enceres
quand on dict Içs choses sot ures e-
ftre presétes à Dieu,il ne le faut pas
prendre comme si vrayement el les
y estoiét presentes. Car ccqui n'est
pas.ne peut estre present: mais cc!a
est dict pour deux caufes : L'vneest ^
la certitude de lacognoiíTancede
Dieu: d'autant que Dieu ne co-
gnoistpas moinscertainement le's
choscsfutures quecelles qui font
prcsentes,& par l'aduenement eiles
ne luy font point plus certaines.
L'auirscaufecst la certitude de l'e-
, TrAICTb' DES ANGES,
uenemenc mesme.'car tout ainsi que
quád quelque chose nous eit prèfe
te, il eit necessaire qu'elle soit. Ainsi
quand Dieu cognoistque quelque
chose arriuera , il est autant certain
que cela se sera , que si desia il estoit
arriue'. Et par-ce .celaestdictestre
rJínzts PreíentàDicu. Lehuictiéme gen-
^ re des choses qui peuuentestre co
iffe»- gnuës pari' Ange, ce font lespen.
réesfâ
Jees & tées de 1 entendement, & les affe
volonte\. ctions de la volonte' & des homes,
& des Anges mesmes. Combien
que la Saincte Escriture enseigne
par tout que c'est le propre du seul
Dieu d'entendre lès pensees & vo
lonte:. Au premier des Roy s cha p.
i5.fe ne iuge pas selon le regard de
l'hommc: l'hoínme voit les choies
qui apparoissent, mais le Seigneur
regarde le cceur. Et au 3. des Roy î,
chap. 8. Tu cognois seul les cœurs
des hommes. Et au premier du Pa-
ralip. ch ip. 28. Car le Seigneur re
cherche tous les cœurs, & entend
toutes les peníe'esdes entendemës,
Etau a^.çhap^IcsçayjSeigneurjqiiç
cv P. Maldona t. 60
rous csprouuez les c aeurs,& aymez
/asimplicite'.Etau 2.du Parai ip. ch.
d.Tu cognoisieul les cœurs des hó.
mes. Etau pseaume^.Dieu esplu-
chant les cœurs & les rains. Et au
Pleaumep. Tó oreille à ouy la prc.
paratió de leurs tœurs.Et au Píeau-
mei6. Tuas cíprouuc' mon cœur,
Sc Tas visité. Et au p(éaume32. Qui
à sonne vn art en leurs cœurs, c'est
adire, il touche quasi auec le doigt
lespeníe'es d'vn chacun. Et au Psc-
aume 43. Car il à cogneu !es secrets
des cœurs. Au surplus, l'experience
nous enseigne que les diables mes-
mescognoifsentquelquet fois nos
peníc'es & affections. Car comme
en certain enJroict dictsainct Au
gustin , le diable n'eust poil ct plu-
stost incité Iudas qu'vn autre, s'il
n'eust cogneu qu'il 3uOÍC pèse' quel
que choie de cela. De lanaistvne
question, où les Anges ou bons
ou mauuais peuuent cognoistre
nos pe niées & volontez. En quoy
ìlà plusieurs choses manisestees à
tous. Et premierement cecy:C>ue
Traicte'des ANGES,
îusq.o'U les Anges peuuent aisement coti
se* jíng. gnculìre ce que nous pensons & de
co»"»^- lirons par les effccts.Car tout ainsi
nos fen- que quelques actions externes ne
fies. peuuent prouenir sinon de l'enten-
dernent&dela volonte'; &quicó-
que les voit , entend aisement ce
que nous pensons ou voulons. Et
qui me voit parler entend que ie
veux parler & pense à cequeie dis.
En second lieu, aussi il est cuident
que non seulement de telles actions
les Anges peuuent cognotstre ce
que nous pensons ou vou!ons,ains
encores par d'autres cfR-cts qui ont
coustume d'estre conjoincts auec
quelques certaines pensees & afse-
ctionsde la volonte'. Comme celuy
quivoitquequelqu'vn regarde vo,
lontiers vn autre il col lige aisc'inent
qu'il l'ayme. Pour le troisie'me , co
rne dictsainct Augustin au liure de
la diuination des demons , chap.4.
& 5 . Les Anges peuuent cognoistre
nospense'es& volontez par les in
dices qui ont accoustume'deredó-
der au corps ; corne nous cognois-
" sons
TW P. Maldonaï- 61
sons que quelqu'vn craint , quand
il deuient palle. Et il est croyable
qu'il y a quelques signes en nostre
corps qui nous soit occultes, & ne
le sont pas aux Anges, Et parce, a-
uec nostre esoahiflement ils decla
rent quelquesfois tout ce que cha
cun pense ou desire. Pour le qua-
triesme, sainct Thomas en la pre
miere partie , question 5 7. article 4.
en la solution du 3.argument,adiou-
ste que les Anges encores peuuent
cognoistre quelques pense'es &
volontez nostres par l'imitation de
la faculte qui se nomme fantasie.
Car àpeine se peut-il faire que nous
pensions ou desirions quelque cho
se attentiuem'ént , que nostre pen
see & imagination ne soit esmeuë.
D'autant que c'est vne faculte' cor-
porelse , & est: cognuë aux Anges. Si Uï
Et parce du changement tTicelle,ils ^get
peuuent cognoistre ce que nous
pensons ou voulons : Mais toute \& v*-
question est,íLsçaUOÌr-mon si les An- mfmt
ges cognoifTént lesmesmes pense'es /«f«,-
de l'esprit , & 'les inclinations de/M',^îv
F1
Traicte' des Anges,
1î volonté d'eux- mesmes. Et de cela
il y a eu six opinions des Theolo-
i.ofm'ti. giés Scholastiques.La premiere d'A
lexandre en la i.part.quest.io'.mem-
bre 3- & d'Albert le grand au 2. des
sentences distinct. 8. art. i0. & -S*
Thomas en la prem. partie quest.
57. article 4. Que les Anges ne co-
gnoissent pas nos peníeps. & volon-
tez entièrement , si nous ne voulons.
Dequoy S. Thomas amcne denx
raisons. L'vne que nostre volonté
de'pend de Dieu, pour le plus proche
4 & parce elle peut estre cogneuë de
luy.seul. L'autre est que lçs pensées
& volontez font d'vn autre ordre
que les choies naturelles , & parce
ne font pas cogncuësdes Anges.Par-
ce que les Anges lors qu'ils furent
créez de Dieu , rcçeurent- seu|e-
ment les esspece,s , & similitudes des
choses naturelles, -& non pas de cel
les quj font outre 011 par: dessus Tor
dre de nature , comme font les
actions libres. Et parce qu'ijs ne peu-
uent cognoistre que les choses des-
.. .quelles il ont les similitudes } ils ne
D V P. M A L D O N A T. ÓZ
peuuent cognoistre les pensées &
volontez. Contre ceste sentence
tous les autres Scholastiques se sont
efleuez auec plusieurs argumens.
Le premier est , l'action de l'enten-
dement est de la volonté, & ne tou- j^faì
che pas moins à l'obiect de l'intellect fîfmit*
que la nature & faculté. Mais les contrai-
Anges cognoissent naturellement rtìS.
la nature des autres Anges , & la no- Thm*f:
ftrç- , & cognoissent encore les fa-
cultez:ils cognoissent donc natu
rellement aussi l'esprit & la volonté.
Le second est de tant quequelqu'vn
est plus par action , de tant est-il d'a
ction pour estre'cogneu , d'autant
qu'il est plus estant. Mais l'action
de l'entendement & de la volonté
est plus en action, quel'entendement
& la volonté : elle est donc plusay-
se'ment cogneuë que l'entende-
ment & la volonté. Míis l'entend*-
ment & la volonté font cogneuës
aux Anges : les Actions le font donc
aussi :ie}- est fi quelque chose em-
peschoit que les actions de l'enten-
dement & de la volonté ne fussent
Traicte' des A NOE s,
cogneuès aux Anges naturellement,
ce scroit principalïement ce que dit
S. Thomas , qu'elles sont du plus
proche dépendantes de Dieu. Mars
cela «empesche pas. Car où l'on
dit qntelles de'pendent prochai- ;
-nement de Dieu , en ce qui touche
à la cognoiísance,( & ce scroit pren
dre pour argument ce qu'est mis
en question : à sçauoir , si elles
font cogneuës à Dieu seul ) ou bien
sont dictes desoendre de Dieu pro
chainement, en ce qui touche à l'o-
rigine : D'autant que le seul Dieu
peut estre cause de l'entendement -
& de la volonte'. Mais cela encore
n'empesche point. Car il ' est seul
cause de la matiere , & de nostre en
tendement , & de Tessence des An
ges: choses qui naturellement sont
cogneues des Anges : où ils sont
dit dépendre prochainement 'de
Dieu, en ce qui touche au motíue-"
ment : d'autant que ne peuuent estre:
esmeuës que de Dieu seul , & cela
mesme n'empesche point , d-au-
«ant que si nous posions le cas que le
l.Ciel fust meu par Dieu seul ^coroe
p Y P. M A t D O W A T. 6$-
plusieurs ont dit ) neantmoins les
Anges cognoistroient slaturellemét
le premier Giel , & son mouuemenr.
Le 4. argument est. Si les Anges ne
cognoissoient point naturellement
nos pensées & volontez , ce scroit
principallement pour la raison de S.
Thomas , mais ceste raison la ne
prouue rien : d'autant que par ce
moyen il s'ensuyuroit que les An
ges ne peuuent cognoistre aucune
action libre : d'autant que toutes les'
actions libres sont d'vn autre ordre'
que les choses naturelles. Le 5. est,
s'ils ne cognoissoient les pensées Se
volontez; ce seroh principallement
« cause de l'indifièrence de l'enten-
dement & de la volonté , d'autant
que ce sont des facilitez incertaines.
Mais ceste raison n'empesche point
d'autant qu'elle prouue seulement-
que les Anges ne peuuent cognoi
stre ce que nous deuons penser ou .
vouloir auant que nous le pensions
ou veuillons. D'autant qu'à lors les
facilitez sont indifferentes pour
agir ou n'agir pas. Mais puis qu'il ne
F 3.
Traicte' des Anges,
semble y auoir aucune occasion en
effet , que les Anges ne cognoissent
ce que nous pensons ou voulons,
lors que nous pensons & voulons.
Le 6. est , si les Anges ou les hom
mes pouuoient celer aux autres An
ges leurs actions & facultes-, beau
coup mieux leur pourroient-ils ce
ler leur essence : d'autant que l'essen-
ce de chacune chose est plus inter
ne que l'action. Le 7. est-si v"n An
ges pouuoit cacher à l'autre ses pen
sees & volontez, il se les pourroit
aussi cacher à soy-mesine, d'autant
qu'il y a mesme raison : estant pareil
le raison que faire qu'il ne soit pas
veu des autres. Mais les Anges ne
peuuent n'entendre pas ce qu'eu x-
mesmes pensent ou veulent. Ils ne
peuuent donc celer aux autres leurs
pensées & volontez. Le 8. est, les
Anges superieurs cognoissent &
comprennent entierement non seu
lement nostre nature , ains encore
la nature des Anges inferieurs. Or
ecluy qui a comprins quelque cho
se , cognoist de necessité tont ce
qui est en icelle : doneques les An
D V P. M A L D O N A t. 64
ges nepeuuent auoircomprins no-
itre nature, ou celle des autres An
ges qu'ils ne comprennent les fa
cilitez d'icelle, & ne peuuent com
prendre ces facultez, qu'ils ne com
prennent tous les accidens d'icel-
les. Les Anges les comprennent
donc. Le 9. est , si les Anges ne co-
gnoissoient les pensées des autres,
& mesmemént des Anges , ce scroit
nommément d'autant que les au
tres les cachent:mais ils ne les pour-
roient cacher. Parce que où ils les
cacheraient par la messme action par
laquelle ils pensent , ou par vne au
tre. Par la mesme, ils ne peuuent , car
d'icelle est la question: par vne au
tre ils né peuuent , d'autant qu'on
demanderoit d'icelle messme com
ment ils la cachent aussi. Le i0. est
si les Anges pouuoyent celer leurs
pensées & volontez , ils ne pour-
xoientpas quand ils voudroyent les
declarer aux autres Anges : parce
que où ils les declareroient par quel-

ire ainsi. Car comment cognoì


F 4.
1 RAICTE DES AUGES,
stroient les autres Anges ceste pen-.
fée & volonte' ? ou ils les declare
raient par quelques signes corpo
rels : ce qui semble estrange aux;
Anges qui n'ont pas de corps. Ces
.argumens ont adduict les autres
Theologiens d'en opiner diuerse-
jmentJEt parce la a.opinion est, que
les Anges cognoissent bien- voire*
ment les pensées & volontez, mais
qu'ils ne cognoissent pas la fin des
.pensees & volontez. Et en cestê
opinion est Henry au troisiéme
qijoIibet,quest. i3-Mais elle est trop
íiudacieuseestant contraire aux sain-
ctes lettres , aux Theologiens an-
ciens,& à la raison. Aux sainctes let-
tres,d'autant qu'elles enseignent que
c'est le propre de Dieu de cognoi-
stre les pensees,8£ non pas seulement
decognoistre la fin & but des pen
sees. Aux peres anciens , d'autant
qu'ils ont tous enseigné que non
feulement les Anges en ignorent la
fin , ains encore messmesles pensees
de la volonté. Gomme dit fainct •
Augustin au septie'me de là diuina-
tion des diables, chapitre 4. & j. Èt~
DV P; MÁlDO-ïíSiï <fj
l'iutheur du liure des doctrines Ec
clesiastiques : Nous sommes ( dit-
il ) asseurez que le diable ne voie
point les interieures pensees de l'en-
tendement. Et Cassianus en la col
lation i0. chap. 35. dit que les an
ciens Chrestiens auoient accouílu-
me de prier , non de parole , ains de
la seule pensee de l'esprit : de peur
que s'il prioyent de paroles, les dia
bles n'entendissent ce qu'ils deman-
doient à Dieu , & qu'ils se missent
en deuoir de l'empescher. L'opinion-
de tous estoit donc que les diables
n'entendent pas ce que les hommes -
pensoient. Finablement les autheurs
anciens prouuoyent de la contre les
Arriens & Macedoniens , la diuini-
té du Fils & du sainct Esprit : d'au
tant que l'vn & l'autre cognoissent
les interieures pensees de Tesprit,
chose propre à Dieu , comme dit
sainct Hierosme sur le 9. chapitre
de sainct Matthieu. Ceste sentence
aussi seroit contraire à la raison:d'au-
~ tánt qu'il ne se peut faire que les An
ges cognoissent parfaictement les
T"'
Traicte' des Anges,'
pensees qu'il ne cognoissent la fin
d'icelles. D'autant que s'ils cognois
sent parsaictement comment les es
peces conuiennent , ou diríer'ent en-
tr'elles, 8í fi les pensees de l'entende-
ment & les actions des volontez
prennent leurs especes de la fin : ce-
luy donc qui cognoist leurs espe
ces cognoist aussi de necessite leur
fin. La 2. opinion fut d'autres .qui
ont peníe que les Anges cognois-
soient les pensées de l'entendement
mais non pas les affections de la vo
lonté. Non pas que les affections
de la volonté ne se puiflent de mes-
me maniere cognoistre parles An
ges , de leur nature : mais. d'autant
que Dieu ne veut point auoir pour
compagnons les Anges , à les co
gnoistre. Et ne le veut pas , d'autant
' qu'en icelles est logee la vertu , ou
le peçhé. Et parce qu'il est le. seul iu-
ge des pechez, il à voulu se reseruer
la cognoifla nce d icel les. Ce fu st l 'o-
pinionde Scotusau liure second du
Raport, distinct. $;.& de ie ne sçay
quels autres Theologiens en Gre-
goriusAriminenfissurle second des
dv P. Maldona t. 66
Sentences,distinct. 9. quest. i. Ceste
opinion encore me semble teme
raire : d'autant que l'Escriture en
seigne que les pensees font con-
gneues au seul Dieu, non moins que
les affections de la volonte'. Et en
ce que ces autheurs là ont trouué
que l'Escriture ne dit en aucun en
droit que le seul Dieu ne cognoist
pas les pensees , ains les cœurs : &
que le coeur signifie la volonte', c'est
vne tres vaine obseruation. Car au
9. de sainct Matthieu , Iesus Christ
dit : Pourquoy pensez-vous dtes
maux en vos coeurs, & au chap. i5.
Du cœur sortent les mauuaises pen
sees. La 4. fust que les bons Anges 4 "f
cognoissent les pensees & volon-
tez:mais les mauuais,non. Car que
les bons les cognoissent , cela ne
peut en rien cmpescher nostre sa
lut, mais les mauuais les cognoissans,
le pourroient cmpescher. De ceste
opinion fust Gabriel Biel , au second
des Sentences, distinct. 9. quest. %.
art. z. Et fur le Canon de la Messe,
leçon 3i. Mais ceste opinion enco-
Traicte' des Anges,"
re est contraire à l'Escriture : laquel
le enseigne que les mauuais Anges
n'ignorent pas moins les pensees
que les bons. La 5. opinion , fust de
' Gregoire de Rimini au second des
Sentences , distinct. 9. question i.
Lequel pense que ne les bons An
ges, ne les mauuais ne cognoissent
les pensees ne les volontez. D'au
tant qu'encore que naturellement
elles puissent estre cogneuës d'i-
ceux , elles ont toutesfois quelque
certaine maniere par laquelle elles
doiuent estre cogneuës : car elles ne
se peuuentcognoistre si elles ne font
au cognoiflant , comme au sinect.
Et parce qu'elles ne font pas air co-
gnoissant comme au fuiect ( sinon
queceluyqui pense veuille quelque
chose ) il arriue que lu.y ne le voulant
pas, }es Anges ne cognoissent pas
ses volontez &C affections. Cestex»pi-
nion , encore que ne soit pas con
traire aux sainctes lettres, est tou
tesfois contraire- à la raison. La
quelle enseigne en la Philosophie
que tout ce qui appartient à l'obicct
D V Pi M AL D O N At. 6j
de quelque faculté , est apprins par
lá mesme maniere que cet obiect:
attendu que les Philosophes disent
que les obìects font distinguez en-
tr'eux de la maniere par laquelle on
cognoist les choses. D'auantage, il
s'ensuy uroit de ceste Sentence , que
Dieu ne pourrok cognoistre le»
pensees des Anges , d'autant qu'el
les ne font pas en luy comme- au fu-
iect. Pour troisiessme , il s'ensuy uroit
aussi qu'vn Ange ne ppurroit de
clarer à l'autre ses pensées. D'autant
qu'il ne peut faire qu'elles partent
de son entendement , en l'entende-
ment d'vn autre , pour y estre com
me en vn fuiecti La 6. opinion fut
de Bonauenture au second des Sen
tences, distinct. 8. quest. 6. Que les tf.ofiníj;
Anges ne cognoiflent pas les pen
sees & volontez, d'autant qu'il est
concede' de Dieu à la creature rai
sonnable comme vn priuilege , que
comme elle à le liberal arbitre , ainsi-
aye elle le secret de sa conscience,
lequel personne ne puisse ' cognoi-
stre sinon celuy à qui elle le descou-
♦ - TRAICTE DES DEMONS,
wrira. L'opinion de sainct Thomas
me semble la plus probable de tou
tes , comme plus accordante à la
saincteEscriture & aux anciens a a-
theurs. Eh cecy seulement suis-ie
Mal. de contraire opinion à la sienne:c'est
qu'il pense que les Anges ne co-
gnoissent pas les pensees, d'autant
qu'ils n'ont pas reçeu de Dieu les es
peces d'icelles lors qu'ils ont esté
cre'ez.Mais moy,d'autant que ( com
me nous verifierons apres )i'estime
que les Anges prennent la cognois-
sance de chacune des choses des
messmes choses:ie fuis contraint d'e
stimer aussi que les Anges ne co-
gnoissent les pensees , d'autant que
-fans le consentement de la volonté,
dis ne peuuent prendre d'icelles
-les especes par lesquelles ils lesco-
gnoissent; d'autant que c'est la na
ture des pensees & actions de vo
lonte', que non seulement leur essen-
ce est mise en liberté de vouloir,
sìmìtitu ains encore la multiplication des
de. similitudes par lesquelles elles font
cogneuës. Tout ainsi que le corps
DV P. M AL D ON A t. 6%
de Iesus Christ de fa nature estok
visible : mais parce que non seule
ment fa nature estoit en la puissan
ce de Iësus Christ, ains encore mess-
mel'effusion des similitudes par less-
-quelles il falloit qu'il fust veu : nous
lisons fouuent que Iesus Christ
estant au milieu d'vne trouppe de
personnes , ne fut pas veu d'iceux.
Car en quarante iours aufquels il
conuerfa entre les hommes apres fa
Resurrection passant à trauers la
ville de Hierusalem , il ne fut pas veu
sinon des Apostres. Comme tes-
moigne fainct Pierre aux Actes des
Apostres : Dieu le disposa pour estre
manissesté non à tout le peuple,
ains aux tessmoings preordonncz,
Et par ce moyen fc peuuent aisse'ment
foudre tous les argumens , Les seuls
9. & i0. ont difficukc: mais le 9. est
resolu ainsi : Que les Anges cachent
leurs pensees & volontez en ce qu'ils
ne les veulent pas descouurir : Si
vous demandez s'ils les:descouurerit
par, U. messme action , ou par quel-
qu'autre , ie vous respondray qu'il
Traicte' dèî Anges,"
ne peut chaloir , mais qu'il est plus
probable que cesoit par autre- »-
ction. Le la. argument reueille vne
autre question du langage des An
ges & de leur parler,- dequoy la dit-
uersité des opinions a estémerueil-
leufe. Au demeurant, quelques cho-
létngage ses s'en colligent certainement de
ktjtn- la saincte Escrittrre : Et cecy pre*-
mierement. Que les Anges se par
lent entr'eux. Le second est , que
c'est en deux manieres : aucunesois -
en nostre mode gardans les instru-
mens de voix des corps qu'ils pren
nent. Comme nous lisons l'Ange
auoir parle' anec Agar au Genese i6.
& 2i. chap. Et auecques Loth au
Genese i9. Et anec Abraham GeneC
22. Autresfois ils parlent en leur
façon , comme quand ils se parlent
entr'eux. Comme declarent saïnct
Paul en la premiere aux Corinthiens
i3. Si ie parle du langage deshom
mes, & des Anges. Eten- KApoca-
íypse çî.' l'ay- enterìda la ' voix de ! pu*-
sieurs Anges à'I'entout BûfThrótte;
Tiercement , il se coiliige- que noj»
ri v P. Mald m
ona-t. 6g
íulement les Anges parlent en-
rr eux, les pareils auec les pareils, ou
les superieurs auec les inferieurs,
ains encore tous eux auec Dieu. Car
en Zacharie chap. i. vn Ange dit à
Dieu ; Seigneur des armees iusques
à quand auras-tu pitié- de Hierufa-
JetTr?<^uatriesmetnent, il se collige
que quelle que soit, en fin la langue
des Anges elle est beaucoup plus
belle que la nostre. Et c'est ce que
signifie fainct Paul lors qu'il dit : Si
ie parle les langages des hommes
& des Anges , c'est à dire non seule
ment des hommes , ains ( ce qui est
bien plus ) des Anges encore. Mars
des anciens Authìeurs nous colli-
geons , premierement qu'il en a esté
aucy ns qui ont pense' que les Ange»
ne parlent pas : mais que ce passage
de fainct Paul se doit entendre par
parole exccdant la commune foy,
Comme s'il disoit,les Anges n'ont
point de langue:mais s'ils en auoient
& que ie parlasse de la leur , & n'euG.
se. point de charité, &c. Car nous
wyons que fainct Paul a accoustu?
Traicte' des Anges,
méde parler ainsi des Anges: corn-
me quand il dit aux Gálutes i. ch.
Encore que nous,ou vn Ange du ciel
vous Euangeliste, outre ce que, &c.
D'autant qu'.vn Ange du Ciel ne

aux Romains 8. Ie fuis certain

ges, ne les Principautez ,&c. D'au


tant que les bien-heureux Anges ne
pouuoient pa-s vouloir separer S.
Paul de la charite' de Dieu : mais c'est
vne hyperbole. En eeste opinion
furent Primasius & Sedulius aux
Commentaires fur ce lieu de sainct
'Paul. Les autres ont dit que ce lieu
tle sainct Paul se deuoit entendre
partie par metaphore , partie par
vertu : par metaphore en ce qui fon-
cerne le nom de la langue , qui si
gnifie quelque instrument de chair
àuec lequel les horftmes parlent, ce
qui ne se peut dire des Anges que
par metaphore. Et par vertu , d'au
tant que sainct Paul à voulu signi
fier que ce que nous faisons auec
ce': instrument , les Anges le font
D V P. M A L D O N A T. 70
autrement , c'est à dire , parlant en-
tr'eux. Comme quand il dit aux
Philipiens 2. Afin qu'au nom de
Iesus tout genoiiil soit steschy , des
choses celestes , terrestres & inser
nales , car les choses celestes n'ont
pas de genoiiil pour le ployer: mais
elles font ce que nous faisons en
nous agenouillant , c'est à dire , ado
rent Dieu en leur maniere. Ainsi
lescrit sainct Chrysostomeen l'Ho-
melie 32. sur la premiere Epistre aux
Corinth. Et Theodoret , & Theo-
philacte sur le i3. chap. & Genna-
dius en Oecumenius aux Commen
taires fur le messme passage. Les au
tres ont dit seulement que les An
ges n'ont ne langue ne ouye: mais
qu'ils parlent entr'eux , se commu
niquants entr'eux leurs pensees &
volontez. Ainsi le dit Damascenus
au second liure de la foy.chap. 3. Les
autres ont dit que parler entre les
Anges n'est autre chose que desi
rer. Ce que pense Gregorius au liu.
second des morales , chap. 5. en ces
mots : Les paroles des ames , font

1
TÌIAÏCTe' DES! " AttGBSíl.
Jbs desirs-mesines. Car sikdesirin'e-
stoit point langage- Le Prophete
ne dirait pas .' ton oreille à entendu
kur desir. Le messme dit Beda au
líorc second íCir lob , chap.. y. i;e*
autres ont dit que les Anges par
lent entreus par signes casorne ho.
chemens de teste. Et de ceste opi
nion Stratusaeste' autheur furie i3.
chap. de la premiere aux Corimh.
Toutes ces choses se colligent par
quelque raison. Et premierement',
d'autant que le parler est par meta- -
phore transfere' par les hommes aux
-Anges : & que les hommes parlent
« n'est' autre chose que declarer
aux autres autat qu'ils peuuent leur s
pensees, soit par paroles, soit par es-
crit, soit par d'autres signes. D'au
tant qu'il arriue fouuent que quand
nous parlons , nous n'apprenons
rien à ceux auec qui nous parlons;
& toutesfoîs en parlant nous vou
lons leur expliquer ce qu'ils igno-
joient. II est donc neceflàire que le'
parler d'vnÁnge ne fait autre. cho
se sinon autant qu'il peut declaree
xy-v P. Maldona-t. 7i
£rs pensees>en quelque façon qu'il
les declare. En second lieu, aussi la
raison enseigne , qu'il faut que les
Anges parlent par quelque chose
qui soit plus cogneuëqueleurspen-
sees, d'autaritque la chose incognuë
ne peut estre declaree que par k
plus cogneuë.Tiercement , il se col-
lige que les Anges ne parlent pas
entr'eux en la. maniese qu'ilparlent
aoec Dieu : ne Dieu aussi auec "les TmòU
Anges , D'autant que Dieu parle deP'<Mà
bien quelquesois fans aucune voix
ou signe, imprimant par foy , & fans
aucunes causes secondes la cognois-
sance de la chose, de laquelle on dit
qu'il -parle aux esprits ;de ceux aus-
quels il. parle. Mais les Anges ne^
peuuent parler en ceste manière:
d'autant qu'ils ne peuuent grauer
aux esprits des autres aucune co-
gnoissance , fans employer des cau
ses secondes. Et encore, les Anges
parlent entr'eux , d'autant .que veri
tablement: l'vn declare à l'autre ce
-qu'au parquant ili .ignoroir. Mais
aaco'DÌEu;:ilflé peat parler ainsi:
Traictk des Anges,
d'autant que Dieu n'ignore rien^
mais il parle à Dieu ( comme dit
làinct Gregoire ) par afsection : tout
ainsi que JMoysc y parloit en l'Exo-
de i4* Auquel ( combien qu'il ne
proserast aucune parole ) Dieu dit:
pourquoy cries-tu à moy ì Mais
toute la question est , qu'est-ce par
le moyen dequoy les Anges decla-
Uíjngts rent ^eurs pensées- aux autres. Car -
decíarem c'est íans doute ce que: l'Eseriture;
Uursiìo- nomme langage .des Anges. - Or de
lmu\. dix opinions des Theologiens que
i'en tíouue:, il n'y.en a que deux qui
me - semblent probables. Desquel
les 1* ne iSt de sain ct Thomas en la
quest. ioy.járticle premier. L'au
tre est de sainct Bonauenture au se
cond des Sentences distinction i0.
partie t.question 1. Et d'Alexander
en la seconde partie de la Théolo
gie , quest. 2 7p ! Et d'Albert Je grand
au premier des. Sentences, distinct.
t.ifmii. p.arr.i}. La premiere-opinion de S.
Thomas est, Qufe ce qu'en nous est
hlàrigue,c'est à dire, cétinílrumént
de chair auec lequel nous parlons.
DV P. MAtDONAT. 72
aax Anges c'est la volonté.Car com
me no'stre langue est fort remuante,
de mesme la volonte de l'Angese
tourne aise'ment. Et ce qu'en nostre
langue est ceste vertu donnée par
la nature , cela est en la volonté des
Anges certaine faculté naturelle: &
ceste volonté peut dresser la part
où il luy plaira & les actions de leurs
façultez, & celles des Anges. Et cei
qu'en nousestla parole, c'est à dire,
l'actiondu parler, cela est aux An
ges l'action de. leur volonté par la
quelle ils addressent leurs affections
& pensees 4e leur Esprit à l'Ange
auque,! ils parient. Et parce vn An
ge peut- parler auec vn autre estans
d'autres prescris , de maniere qu'il
ne sera pasouy d'eux. Çe qu'est bien
accordant à la raison : d'autant qu'il
ne dresse passes pensées aux autres,
ains à eeluy;^ul; - Tputcela me sem
ble estre foilj vjsay , ie-n'.en trouue.
qu'adire seulement en ceste opi
nion , .f'estj'mie sainct Thomas. de-
clarastiC.^o^f .qu'il (aljpit- nommé
ment deçjair^)- puis qu'il dit que
Traicte' des Anctes,
Jes Anges ne peuuent rien cognoi-
streque par les especes, { car il dit,
que les Anges ne eognoissent pas
les pensees , d'autant qu'ils n'ont pas
reçeu de Dieu les especes d'iceilís)
comment il se fait que la volonté
dressant les pense'es à vn autre An
ge , l'autre Ange empoigne les es
peces qu'il n'auoit pas auparauant.
Car de dire que les especes luy
font alors infuses de Dieu , il sem
ble quece toit deuiner : de dire aussi
-qu'il prend les especes de l'autre
qui luy parle, c'est contre son opi
nion: puis qu'il pense que les An
ges ne reçoiuent aucunes especes
des choses. Et parce, ee qui dessaut
à ceste opinion , pour estre la plus
probable de Mutes , ie fuis d'aduk
qu'on le doit píendre de l?opinion
de sainéîr Botìauëntiure;i Aìlexàridre
& Albert : lesquels' estiment que
TAnge parfc 7 lequel par volonté
nnilriplie les' spirituelles especes de
íes pensees, iusques à l'entendement
de celuy auquel il parle : tout ainsi
vç^iele corps multiplie les especes
-córporel-
í
BV r. maidonat. 75
corporelles iusques aux yeux par les
quels il est veu.Car pour le premier,
il me semble probable que l'Ange
ne puisse parler à vn autre, en quel
que lieu qu'il íbit : ains qu'il y a
quelque certaine distance entre ce-
luy qui parle & celuy qui oit , com
me elle est entre les hommes. Car
en Zacharie second chap. nous li
ions que Dieu enuoya vn Ange,
feulementafin qu'il annonçast à ce
luy qui parloit à Zacharie,qu'il par-
last à quelque enfant.il ne luy a dóc
peu dire cela qu'il n'y allast. En
troisième lieu , i'estime estre fort
probable , que les Anges n'ont pas
íeulemétvn langage,ains plusieurs,
c'est à dire plusieurs manieres de
parler. Car lors que sainct Paul dit:
Si ie parle des langages des hommes
& des Anges , il ne parle point de
l'elegance du langage , comme s'il
vouloir dire , si ie parlois fore diser-
tement : d'autant qu'il comparoit
vn don auec autre don , c'est à dire
la charité auec le don des langues,
.&" auec le don de la foy , & auec le
. Traicte - des Anges,
don de la science , 8c auec le don de
la prophetie :mais l'elegancedu par
ler n'est point contee entre ces sin
guliers dons de Dieu. Car encore
que tous les Apostres ayent eu le
don des langues , ils ne furent pas
toutesfois diserts en parole , ains
presque barbares , comme S. Paul
cóseíìè de íby. Mais le don des lan
gues consiste en la diuersité d'icel-
les. Doncques le sens de sainct Paul
est neceiïàirement,si ie parlois non
feulement autant de langages que
les hommes en parlent , ains autant
que les Anges en parlent. Et par cet
argument il declare ouuertement
que les Anges ont plus de langages
que les hommes. Et de là est née
l'opinion d'aucuns qui estimerent
qu'en la confusion des langues que
Dieu fist en Babel,il y auoit 7 z. lan
gues diuerses , d'autant qu'il y auoit
autant de langues des Anges qui
estoient descendus auec Dieu pôur
confondre les ligues des hommes.
Car plusieurs ont estimé que Dieu
parloit auec les Anges au Genes- 1*.
©V P. Maldonat. 74
quand il dit : Venez , descendons,&
confondons leur langage.

DE LA MANltKtí c N
LAQVELIE LES ANGES
cognoissent.

LEs Theologiens demandent


;n cet endroit trois choses. La
premiere comment les Anges co
gnoissent , sçauoir est , parquoy ils
cognoissent. La seconde , comme
ils cognoissét, c'est à dire si c'est par
discours oujplustost par le simple
regard. La troisième, s'ils cognois-
sent en composant & diuisant à la
maniere des hommes , ou fans la
composition & diuision. Ostê vne
infinie varieté d'opinions , i'estime
ainsi premierement qu'autre chose
est demander ce qui fut fait lors
que premieremét les Anges fuient
creez : autre chose,demander ce que
requiert la nature des Anges. Si la
question est donc du fait , celle de
íàinót Thomas me semble fort pro
bable Ôc celle de tous les Theolo
1RAICTE DES ANGES,
giens: c'est que les Anges cognois-
íënt les autres choses , outre Dieu,
Sç outr e les indmidus , par les espe
ces infuses par Dieu mefme , en leur
premiere creation. Car ceste opi
nion ne fut pas seulement des Peri-
patetiques , comme aucuns estimét,
ains encore des anciés Theologiens.
. Ainíi en parle sainct Denis chap. 7.
des nós diuins , lors qu'il enseigne
que les Anges ne prennent pas leur
science des choses. Et S. Aug. liu. 2.
du Genese selon la lettre , chap. 8.
La creation ( dit-il ) du Ciel estoic
premierement en la parole de Dieu,
selon la sapience engendree , & a-
pres elle a esté faite en la. creature
ípirituelle:c'est à dire en la cognois-
íàncedes Anges , selon la sapience
creée en iceux. Et d'auatage cela est
conuenable à la raison. D'autant
que Dieu a fait en persection tout
ee qu'il a fait : Il saut donc peníer
qu'il fist les Anges pleins de scien
ce , non pas vuides. Et apres il est
probable que les Anges furent
creez de Dieu auecques grace , &
dv P. MAldonat. 75
par consequent auec science : n'e
stant pas croyable que Dieu leur
ait donné yn don supernaturel
sans le naturel. Pour le troisième
nous colligeons de l'Escriture que
le premier homme fut fait de Dieu
plein de sapience. Car tout incon
tinent luy furent amenez tous les a-
nimaux,& à tous il donna des noms
accommodez à leur nature : laquel
le veritablement il n'auoit pas co-
gneuè' encore par experience : Il les
cognoiííbit donc par reuelation. Et
si le premier homme a esté creé tel,
à plus forte raison P Ange. En ce se
cond lieu, i'estime que si l'on dis
pute non du fait ains de la nature:
que les Ange? font de telle nature,
que s'ils n'euíTènt receu de Dieu la
science des choses vniuerselles par
linfusion des formes , qu'il se la
pouuoient acquerir en prenant les
especes des mesmes choíes.En trois
ième lieu , ie croy quesila question
se fait des choses indiuiduè's , &
qu'on dispute non feulement de la
nature , ains du fait encore : Que
G iij.
Traicte' des Anges,
les Anges en effect cognoissent les
indiuidus comme les hommes,
pienans nouuelles especes d'icel-
les. Car premierement il semble
que cela lecollige appertement de
l'Elcriture. D'autant qu'au dou
zième de l'Exode il est eícrit que
par le commandement de Dieu les-
luiss marquerent les huits de leurs-
maiicnsdulangde l'Agneau , afin
que f Ange en parlant cogneut que
c'estoient maisons de luiss. L' Ange
en auoit donc la ccgnoillànce par
ce ligne exterieur. D'auantage ie
ne doute point que ce n'ait este-
l'opinion de tous les Theologiens-
anciens ( elle fut bien de sainct Au-f
gustin ) car ceste senne opinion
de la ccgnoiflàncedu matin & du
Cognais- vespre des Anges ne peut demeu-
sace n:a- te: en son entier , si les Angei ne
tutmale, reç0;uent: cognoiífançe par les
&vy~ choses , 6c d'autant qu'elle est vn-
ferema- obscure , sainct Augustin la
nomme du vespre. Et apres 1t£
mesme sainct Augustin au huitié^.,
me de la Cité de Dieu , chapitre <s.
DV P. Maldonat. 76
enseigne que les Anges sentent ôc
entendent non pas qu'ils ayent des
)' sens corporels ains spirituels: Com-
medeclare lemesme lamct Augu
stin au i z. de la Trinité chap. 7. Et
le mesme encore au liure du Genese
selon la lettre chap. i7. dit que les
Anges cogr.oistènt certaines choses
par experience. Or experience ne
peut estre en eux s'ils ne prennent
cognoilîàncepar les choses. Encore
futTopinionde plusieurs Scholasti-
ques : d' Alexander seconde part.qu.
14. membre 13. De Scotus au lè-
cond des Sentences distinct.3.quest.
ii. de Gregorius Ariminensis dist.
7. question 5. Et de Richardus en
Dionysiusdistinótion3. question 5.
Sc Albertle Grand distinction 3.art.
i5. conselîè qu'auant son temps c'e-
stoit l' opinion de grands personna
ges. De mesme opinion surent n'a
pas long temps plus de 15. Theolo
giens. Et me semble que cecy se
peut prouuer par raisons indiilòlu-
bles.Car attendu que l'Escriture en
seigne , que les Anges cognohTent
G iiij
Traicte' des Anges,
les indiuidus lesquels ils ignoroient
aupaiauanf.il est neeellàire qu'ils les.
eognoissent ou par l'essence diuine
(comme aucuns ont pensé) ou par
reuelation diuine ( comme aucuns
ont dit ) ou par l'essence d'elles mes-
mes (qui futTopinion d'Henricus)
ou par la seule presence ( cóme l'ont
creu ceuxqui ont esté nommez No
minaux ) ou bien par les especes-
Par la diuine essence y ils ne peu-
uent cognoistre : d'autant qu'il ne
£e pourroit rendre aucune raisort
pourquoy ils ne pourroiét auffi bien
cognoistre les choses futures que les
presentes : attendu qu'en la diuine
essence non moins íbnt represen
tees les choses avenir , que les. pre
sentes. Et c'est la seule cause pour
quoy Dieu ne cognoist pas moins-
le futur que le present , parce qu'il
cognoist par fa presence. Us ne peu-
uent pas cognoistre auffi par reue
lation : parce que la memoire de
cognoistre par reuelation n'est pas
naturelle. Et nous cerclions la natu
relle maniere par laquelleles Anges
dv P. Maldoîí'at'. ff
cognoissent par leur ellènce mesme.
Car s'ils cognoiflòient par icelle,
les Anges inferieurs ne pourroient
cognoistre les superieurs , d'autant
qu'ils ne font ne leur cause , ne leur
eísect : 8c ne cognoistroient pas les
indjuidus des choies naturelles,des~
- quelles ils ne font pas la cause: d'au
tant qu'ils- ne seroient pas represen
tez en leur eísence. Il ne sepeut dire
aulïì ( ce que pourtant quelques vns
ont dit ) que parce que la nature
des Anges est plus parfaite que les
choses naturelles, ils les cognoistet,
Et que cela est en certaine maniere,
cauíê pour laquelle les Anges co-
gnoiflent les choses indiuidué's na
turelles'u Par ce que par meírne
raison l'on diroit que l'homme pat
son elsence cognoist les autres cho
ies naturelles, d'autant que fa natu
re est plus parfaite. Les -Anges ne
peuuent cognoistre encore les in-
diuidus par leur presence : car ce se~
toit oster du tout les eípcces , les
quelles l'experience mesme con
traint d'aduouer. Il reste donc qu'iL
G v.
Traicte' DES AnGÎS:,
les cognoissét parles especes. C'est
dóc par les especes infuses de Dieu
en la premiere creatió, ou par les es
peces prises des choses. Et non par
les eípeces insuses,car elles seroient
ou singulieres ou vniueríelles : elles
ne seront pas singulieres , d'autant
qu'il faudroit qu elles fussét infinies
en l'esprit d'vn chacun Ange, parce
que les indiuidus qui se^euuent eo-
gnoistre, íont infinis. Ne seront pas
vniuerselles , d autant que par vne
espece vniuerselle, ne peut parfai
tement & distinctement estre co-
gneuëvne cholè singuliere : ils co-
gnoiflent donc par les eípeces pri
ses des choses messmes. Seconde
ment : si les Anges cognoiífòient les
indiuidus par les especes infuses en
la premiere creation , ils'eníiùuroit
qu'ils ne poun oient pas mieux co-
gnoistie les choses indiuiciuës à ye-
nir que les presentes : parce qu'ils
n'ont pas moins leurs especes ', que
des presentes. Mais cela est contrai
re à l'Eícriture. Tiercement il s'en-
suiuroit que les Anges ne cognoi-
DV P. Maldonat. 78
stroiét moins les choses futures que
lespassees,n'ayans pas moins les es
peces des futures , que des passees.
Car si vous dites qu'ils ne cognois-
sent pas les futures d'autant qu'elles
ne font pas encores,ie diray de mes-
mes qu'ils ne cognoissét pas les pas
sees d'autant qu'elles ne íbnt desia.
Quatrièmement , si par les especes .
infuses les Anges ne pouuoient co-
grioistre les choses à venir, ce seroit
principalement pour la raison de S.
Th. D'autant(dit-il)que les especes
des choses futures qui font en l'An-
ge,n'ont pas reelle relatió aux cho
ses futures,n'estant point leur terme
reel. Mais lors que les especes com
mencent d'estre , elles commencent
d'auoir la relatió reelle.Et parce les
Anges peuuent par elles cognoistre
les choses presentes & non les futu-
res.Cette raison ne vaut rien: Car il
s'ensuiuroit que les Anges cognoi-
troiét tous les indiuidus qui font en
estre. D'autant que si rien n'empes-
choit auparauant qu'ils ne les co-
gneuílent , sinon d'autant qu'elles
TkArcTE' bes Anges,
ft'ëstoient pas : 8c par ce leurs eípe
ces n'auoient point relation reelle,-
lors qu'elles sót desia,ils les cognoi-
stront neceiíàirement comme cho
ses vniuerselles. Mais cela est con
traire à FEÍcriture, qui apprend que.
les Anges ignorent beaucoup d'in-
diuidus.Et puis íteette raison valloif
quelque chose , il s'ensuiuroit que.-
les. Anges ne peulsent cognoistre les .
choses paíïèesîd'autant que leurs es
peces qui sent és Anges n'ont pas
relation reelle, ains de raiíòn : mais
cela est absurde. Finablement si par
les especes infuses les Anges cognois
soient les indiuidus , ce iéroit prin-
eipalement.(comme dit S.Bonauen-
turc) en appliquant les eipeces vni
uerselles infuses,auxindiuidùsqu'ils
veulent cognoistre. Mais en cette
maniere ils nepeuuent cognoistre
les indiuidus, lesquelles pour appli
quer- les. especes à quelque indiuidu, .
il est necellàire qu'ils cognoilsenc-
plustost.Ils necognoilîent donc pas
par {application de Feípece. Quel—
-qu'vn demandera,çamment les An—
DV P. MALDONAt. jçy-
ges estans incorporclypeuuent pren
dre les esoeces des choses corporel-
les.Ie respons en proposant sembla
ble qiiestion cornent î'esprit de l'hó-
me estant incorporel reçoit les espe
ces deschoíes corporelles? Vous di
rez, qu'il les prend.par les sens cor- Offir
porels: cóment les pcend-il donc des
sens meímesîVous direz,par l' intel
lect agent.Mais quoy,si en l'homme
n'a point d'intellect agent comme
plusieurs ont estimé , neprendra-il
pas pour cela les eípeces:Pourquoy
donc les Anges aussi^ siins intellect
agent ne les pourront receuoir. Et tes^yin-
apres.quedira-onsi és Anges y a in- $"
S, X} . , , 9- \ intellect.
tellect agent ? comme plulieurs tres
grauesautheurs ont estime, Alexan-
der z.p.q.Z4.mébres ij.&c 4.Et a1-
bertusMagnus de Tadmirable scien
ce de Dieu, .i.p.traicté z.q.i4.mem-
bre $.art.i.Ricardusli.i.des Senten
ces,^ Dionisius,dist.3.qu.5. Scotús
& Bonauenture , en la meíme dist.
Ce que i'estime estre fort veritable-
D'auátage encore q l'intellect agent
fut neceilàire auxhómes pour pren
Traicte' des Anges,
dre les especes , il ne le seioit pas
pourtant aux Anges. Car S. Thom.
enseigne íouuent que ce qui se fait
par les choses inferieures se fait par
beaucoup de facultez , & par les sii-
perieursjse fait par vne. Pourquoy
dócles Anges auec vníëul intellect
ne peuuét taire ce que les hommes
font par deux? En fin cornent Pame
separee du corps n'acquiert point
vne nouuellerecognoilîànce, íïnon
par nouuelles especes j attendu que
pour les prendre elle n'vse point de
î'intelleót agent, lequel n'a point de
lieu,là où il n'y a point deíëns.Veri-
tablement S.Aug.au li.d'auoir foin
des morts ch. 15. efcrit que les ames
des morts apprénét ce qui íe fait ici,
par ceux qui se partent de cette vie.
S I LES ANGES VSENT
DE DISCOVRS.
LEs Theologiens dient qu'il y a
de quatre fortes de discours. La
'4. sortes pie. quand nous entendons qu'vne
de dis- cauie est Peffect d'vne autre. Etce-
luy là est nò feulcmít aux homes Sc
dv P. Maldonat. ?o
Anges ains en Dieu meíme. La x.
quád nous entendós 1 vn apres l'au
tre mais nó par l'autie.Còme quand
nous apprenons deux arts diuers en
diuers téps „ne colligeáspas l'vn de
l'autre:mais d'autant q nostre esprit
ne les a peu comprendre tous deux
; en mesme téps. Cesteelpecede dis
cours nepeutestre enDieu,d'autant
qu'il ne peut rien apprendre. Mais
aux Anges & aux hommes, tons les
Theologiens le reçoiuent: d'autant
que les Anges ignorans beaucoup
de choses, ils peuuent beaucoup ap
prendre. Or ils apprennent quel
quesois non en mesme téps : & c'est
discourir en ceste meíme maniere.
La 3. est quand nous entendons vne
choie par l'autre , mais non apres
l'autre. Comme ayant mis quelque
principe fort gênerai , auec iceluy
nous regardous ensemblèment les
conclusions qui prochamemét l'ont
deduites d'iceluy. Car alors par le
commencement nous eutendóns la
conclusió,mais uó pas apres le com
mencement , d'autant qu'il n'est p.is
Tratcte des Anges,
fousiours necessaire que la cause pré
cede l'effet de quelque téps. Ce dis
cours encore est receu és Anges par
tous les Theol. N'y ayant point de
doute qu'ils ne cognoiisent vne cho
se par l'autre.La 4.est quádnous co-
gnoiiïbns l'vn pat l'autre , & apres
l'autre:comme nous hommes auons
accoustumé de cognoistrc plustost
les principes que les conclusions. Et
c'est proprement discourir. Et de ce
genre de discours les Thcolog* dis
putent, s'il est aux Anges. Dequoy
la vulgaire opinion dé S.Thomas &
de tous presque,queles Anges ne sot
pas de diicours.De ceste sentence se
font departis Scotus au z. desSent.-
dist.7.q.i. Et Greg. Ariminensis en
ïtstjn- la mesine dist.j.EtGabriel en la dist.
S" dis- 4. quest.i- conclus.8. Laquelle opi-
çvment. njon.je cr0y estreplus vraye. Pre
mierement d'autant que si les Anges
ne discouroient point en ceste ma
niere , ce seroit principalemét pour
la raison de S.Tho.d'autant ( dit-il )
que les corps celestes n'acquierent
pas par succession de téps leur per
ì;v P. Maldonat. 8i
fcction,ains tout ensemblèmét d' vit
coup,ainsi faut-il croire que lesAn
ges n'acquierent point leuríçauoir
par discours conime par succession,
ains ensemblèment , c'est à dire par
vn simple regard. Mais cette raison
ne prouue rien. Car sielleprouuoit
quelque chose, elle prouueroit aussi
que les Anges n'acquierent aucune
cognoiííànce , ou science , comme
les corps celestes n'en acquierent
pas.Mais cela est faux.En z.lieu s'ils
ne discouroient,ce seroit meímemét
pour la 2. raison de S. Thom. c'est
d'autant qu'ils ont vne abondante
lumiere d'entendemét.Car les hom
mes discourent pour auoir cette lu
miere petite & qui ne peut esclairer
les principes & tout ce qui est caché
en iceux.. Mais cette raison verifie
seulement que les Anges discourent
moins que les hommes. Car encore
que les Anges ayent plus grande lu
miere que les hommes , ils ne l'ont
pas pourtant infinie. Or la lumiere
doit estre égale aux choies qui doi-
ucnt estre illuminees. Mais les cho,
Traicte' des Anges,
ses cachees aux principes" font infi
nies : Dócques la lumiere de l'Ange
estant finie , elle ne les peut toutes
esclairer eníemblèment. Et parce si
les hommes vient de discours pour
cette occasion, les Anges tn vseront
auflî:Tiercemét il est manisseste que
lesAnges nepeuuent cognoistreen-
semblément choses infinies. Mais
aux premiers principes fort gene
raux par puilîance font contenues
choies infinies. L'Ange ne peut dóc
cognoistre eníemblèment les prin
cipes & toutes les choies contenues
en iceux:il vie donc de discours. La
4. cauie pourquoy les hemes vient
de discours, est d autát que ce qu'ils
ignorée, ils l'apprennét par le moy é
de ce qu'ils sçauent. Les Anges au ffi
ignorés beaucoup de choies. Donc-
ques en les apprenant ils ne le peu-
uent faire, sinon par le moyen de ce
qu'ils sçauent & ne le sçauent pas
çnsemblèment. Us discourent donc.
L'on y peut adiouster que ce fut lo- -
pinion de tous les anciens autheurs
auarit que les Scolastiques fuilent en
DV P. MAtDONAT. Sl
rogne : car tous deffinirentl'Ange
(cóme fît Porphire ) animal capa
ble de railbn , immortel. Comme
Athanase au li.de l'eiîence du Pere,
du Fils, & du S. Esprit. Dnmascene
aux premieres institutions de Dia
lectique chap. 7. Car il n'estima pas
qu'il y eu st aucune difference entre.
l'Ange & l'hóme{en ce qui concer- .
ne la raiíon d'entendre ) sinon de ce
que l'Ange entend plus subtilement
& plus promptement.
DV LIEV DES ANGES.
Ceste 'partie de discours se l»*tk*
doit rapporter la question du ^"S"-
lieu des Anges , d'autát qu'il est nÓ- "^J*
brc entre les actions. L'on demande ;í(»rJ
en cet endroit 7. choses. La i.si l'An- diiottK
geesten quelque lieu. La %. par le;
moyen dequoy il est en lieu.La 3.s'il
alieu definy & certain seló la quan
tité. La 4.s'il a certain lieu íeló la fi-
gure.La 5.s'il a certain lieu d'habita
tion &c d'office, comme les artisans
ont des boutiques. La 6. s'il a cer-
táinlieu,selonle nóbredu lieu:c'est;
Traicte' des Anges,
a dire s'il est en vn lieu de maniere
qu'il ne peut estreen plusieurs,La7.
s'il a certain heu selon le nóbre des
Anges : c'est à dire si vn chacun des
Anges doit auoir son lieu distingué,
de rnaniere que plusieurs ne puis
sent estre en raesme lieu.Qtunt à la
premiere question , S. Thomas au
premier des sentences dist.37 . quest.
i .art.i.recit e lopini ó d'aucuns,qu'il
dit auoir pensé les Anges n'estre pas
en lieu. Ce qu'écore que puiste estre
vray en certain sens,toutesfois il n'é
faut pas ainsi parler simplement, at
tendu que l'escriture parle autre
ment : laquelle dit que les Anges
font au Ciel & en farir. Touchant à
la z.qu. Ie trouuc qu'il y en a douze
opinions des Scholastiqucs : cha
cune desquelles semble auoir quel
que chose de vray , & quelque cho
ie de faux. Mais il me semble que la
lit-com question se doit expliquer y met-
mecon- tant premierement 5. dist. Lapre-
fidtre. miere qU'vn lfeu peut e{tre con_
sideré en plusieurs manieres. La.
premiere Metaphisiquement aucu
bv P, Maldonat. 8j
nemenr , non entant qu'il est lieu,
ains entant que c'est quelque chose.
La seconde Mathematiquement
feulement , entant que c'est vne su
perficie d'vn corps continu. La y.
naturellement, entant que c'est cer
tain espace auquel la chose se trou-
ue bien , & conuenablement à íà
naturç,ou au contraire , comme di
sent les Philosophes : comme est le
plus bas lieu, à laterre:le plus haut,
au seu. La 4 . naturellement & ma
thematiquement ensemble , entant
que la superficie d'vn corps qui est és
lieux Mathematiques est considere
du Philosophe naturel , cóme ayant
tel ou telle situation en l'vniuers,
ou telle distance des parties du
monde. La 5. moralement & Theo
logalement : comme nous disons le
siege du Roy estre Paris , non pas
qu'il occupe toute la ville : mais.
d'autant qu'il a accoustumé d'estre
là. Et comme nous disons auflì que
le Roy est en tout le Royaume, non
en verité , mais par domination 8c
puissance. La i. distinct;- estre en vn
Traicte' des Anges,
lieu se peut prendre ou proprement
ou par Metaph. Estre proprement
en lieu,c'est estre en iceluy accómo-
. dèment no à la nature dulieu,ainsà
la nature de la chose qui est au lieu.
La $.d'autant qu'estre en lieu se trás-
fere des choses corporelles, aux ípi-
rituelles:& qu'aux choies corporel
les se trouue trois choses par le£
quelles elles sont en quelque lieu,
sçauoir est l'esséce comme principe
efloigné : la quantité cóme principe
.moyen : l'occupatió du lieu comme
principe prochain. Car c'est estre
en lieu par son essence, &par sa qua
lité', & d'autant qu'on occupe lieu
& place : ces meímes trois choses se
doiuét cercher aux choses spirituel
les. La 4. distinct- est lors qu'on cer-
che ce parquoy la chose est en vn
lieu , & se peut demander ce par
quoy elle est en lieu de íà nature,oii
parquoy elle est en lieu en ce qui
touche à nostre cognoissáce. Donc-
ques en premier lieu c'est chose cer
taine si l'on demande ce parquoy les
Anges sont en vn lieu , en ce que
- dv P. Maldonat. 84
toute chacune cognoilsance , en
quelque maniere qu'on prenne le
lieu,c'est l'operation de F Ange pas-
' sancen vn lieu corporel. Nous ne
pouuons autrement cognoistre ou
est vn Ange que par íbn operation. L^"Se
r F 11 opinion
Et en ce íens - - j ceux est
de n en
. .lie»
„.
vraye qui ont dit que 1 Ange n'en- ratim. '
tre point autrement en lieu que par
son operation.En íecód lieu,il íêm-
ble qu'on doit dire si nous parlons
du lieu pris mathematicquement,
que proprement & abfbluè'ment
les Anges ne font point en lieu. Et
en ce sens est vraye cette premiere
opinion. Car le dire de Boetiusau
liure des sepmaines , est vulgaire,
que la commune opinion des sages
est , les choses spirituelles n'eíhe
point enlieu. Mais si nous parlois
de l'estre en lieu metaphorique-
mrnt , l'Ange est en lieu par son es
sence comme par vn principe estoi-
gné: Et par sa vertu pour agir,cóme
par principe moyé : Et par operatió
paíïante , comme par vn principe
proche par lequel en quelque ma-
1RAICTE DES ANGES,
niere il occupe lieu , combien que
. par son eísence is n'en puisse occu
per. Et en ce sens encore est vr,aye
î'opinion de sainct Thomas. Il se
peut direaulfi ( comme d'autres ont
dit) que l'Ange est en lieu parle
moyen du corps auquel il est , d'au
tant que par iceluy il occupe lieu
.que de soy.il ne pourroit occuper.
Comme nostre ame est en vn lieu
par le moyen du corps , c'est à dire,
occupe lieu qu'autrement n'oecu-
Íieroit pas. Mais si nous parlons de
ieu Phisicque , ainsi encore est-il
Thijïc. vray que les Anges ne font pas en
lieu.D'autant que ne receuans point
du lieu aucune naturelle affection,
ils n'ont pas proprement de lieu na-
turel,comme ont les élemens.Com-
bié que par quelque similitude nous
pouuons dire que le naturel lieu des
Anges , est le Ciel : & leur lieu con
tre nature,c'est Penser. Non pas que
par nature il se puilse mieux conser-
uer en vn lieu qu'en vn autre , mais
par l'ordonnance diuine , qui a
voulu que le Ciel fut le lieu de
beatitude
ttr P. Maldonat. 8j
beatitude: Etl'snser, celuy des sup
plices. Si vous demandez par le
moyen dequoy l'Ange est en ces
lieux là, ie refpons , par eflènce có-
raepar principe estoigné : par me
rite ou peché , comme par principe
moyenmar ioye ou íûpplicc,commc
par principe proche.Mais si la quest.
est du lieu, pris en parrie Physique
ment en parrie Mathematiq. ie ref- '
pósque l'Ange est en îreu,c'està df- -
re en quelque place par le moyen ddS
choses par leíqirelles il est eir lieu
Marhemacicqur. Car les corps
rrieimes par les choses,par 1b moyen
deíq'.ielles elles font en Heu Mathe-
maticque.íbrrt en licu,paxtic PWyff-
que , partie Mathematicque, c'est à
dire ert telle distance. Mais s"iî est
question- du- lieu pris' Mathematie-
qaemént , comme la chose est r Ifs";
me semblent auoír bien' parlé ccux
qui ont dit que l'Ange est en heu,
par la pre senee de son eíïèntre: Gas 1
par ce moyen Dieu est en temps
& en lieu comme en deux choses: 1
d'auantage fort eiîcrrce est presente
^ H
Traicte' des Anges,
L'et. au temps & au lieu. Que s'il eíl
meraí- question du lieu pnns moralement,
l'Ange est en lieu par ion essence,
comme principe efloigné : parpuis-
íànce d'agir quelque choie en ce
1 ieu là, comme par principe moy en :
par l'office qui luy est commis de
Dieu , comme par principe pro-
. chain : Tout ainsi que l'Ange qui
est dit par Daniel. Prince des Per
ses , estre en toute la Perse , non pas
comme l'oecupant toute , mais par
ce que par toute icelle il exerça íbn
-x.Quesi office. Touchant à la 3. question: à
fçauoir si l'Ange à certain lieu selon
la quantité. Quelques Theologiens
ont peníé que l'Ange ne pouuoit
estre sinon en vnpoinct. Laquelle
opinion recite sainct Thomas, en la
premiere partie, quest.i5.arr.2. mais
les Theologiens l'estiment fausse.
D'autat qu'il n'y peut auoir aucune
raison que ce que nostre ame (estant
indiuisible ) fait par nature , l'An
ge ne le puilïe faire par vol óté.Mais
nostre ame est non seulemenr en vn
p£;inct,ains en ront le temps :Donc-
ques l'Ange peut estie en tout quel
DV P. Maldonat." $6
que lieu. Les autres estiment que
l'Ange a certain lieu determiné fe
lon la quantité : tellemét qu'encore
qu'il voulust , il ne pourroit estrc ne
eh plus grand hc en plus petit. Et de
ceste opinion fait mention Grego-
ríus Ariminensis en la dist. 2. quest.
z.art. 2. Et Gabriel l'a enfuiuie en la
messme distinct- quest. 2. Mais ceste
cy semb le estre encore fausse. Car'
puis que l'Ange à vne essence indi-
uisible,ne pourra-il estre aussi en vn
lieu indiuiiìble?. La 3.opinion fut de
Scotus distinct.z.quest. 6. q.ie l'An
ge a certafn lieu tort: granite ma
niere qu il ne puisse eihe en moin
dre &itoute ;fois indeterminèment:
c'est à dire de maniere qu'il puisse
estre en vn moindre qu'vn fort gi'ád,
& en vn plus grád que le momd e,8c
qu'il peut estre en vn poinct a;dE,ce
queie n'entens pas comme le puis
se accorder. Doncqies l'opinion
de fainct Thomas & des autres
Theologiens me semble plusveri-'
table:Q[ue l'Ange à certain lieu tress-
grand & qu'il ne peut estre en plus.
H ij

1
Traicte' des 4nses,
grand. Car il est notoire que íbn es
sence ne peut estre sinon là où est
sa puilïànce:Et que sa puissance n'est
sinon là où est ton actió: Et que son
action est sinie : Il y a" donc vn lieu-
jSny & determiné où il ne peut estre
en plus grad : Et qu'il n'a pas vn lieu:
determiné dedans le plus grand,
ains qu'il peut en vn plus- grand ou
plus petit , voire & dans vn poirtct. i
4-Qtf'ft ^ ^a flliatrième question , il s'est
trouué des Theologiens qui ont die
que l'Ange a auffi vn lieu determi
né íelon la figure,tellement qu'il ne
peut estre qu'en vn lieu, rond com
me recite Gregoire d Arimini dist.
seconde quest. 2. Mais c'est chose
absurde de prescrire vne figure à
yne chose spirituelle. Touchant à
S.Quest- la question 5. les Theologiens en
ont eu diuerses opinions. Les au
cuns ont pense les bons Anges
estre au Ciel& en la terre: & que les
mauuais ne font qu'en l'air,& qu'ils
ne font point punis auant le iouc
du tiìgement. Et c'a esté l'qpinion
(teplpsicurs ScÍolx graues autheurs.
jBV P. Maldonat. 87
Mais cet erreur sera resuré cy apres.
L-aa. opinion a esté du maistre des
Sentences au liure 3. distinct. 6. Et
deRicárdus en Dionisius en la mes
me distinct.quest.3. Et de Bonauen-
ture cnla mcsme distinct- quest. i.
Que les diables font bien desia pu
nis , òc toutesfois -qu'ils ne íont pas
en enfer , ains en l'air seulement-
les autheurs de cçste opinion em-
pioyent ces tessmoignages. Premie
rement, que le diable n'est iamais
nommé Prince de l'enser en l'escri-
ture,ains Prince du monde, comme
tn íainctlean 14. Secondemét qu'il
est nommé par sainct Paul Prince
de cet air,aux Ephes. Tiercement
que le mesme Íainct-Paulaux Eph.
<>. nomme les diables recteurs de
ces tenebres , comme monstrant
les renebres quisontsur.la terre. Fi-
nablement qií'-eií enser n'a'aucune
Redemption. Et parce, si lesdiableá
estoient vne fois iettez en enser, ils
he íbrtiroient iamars- de iá. Mais
ils en sortent , comme 1 experience
le monstre. Geste opinion n'est pas
Traicte' des Ange»,
seulement fausse , ains est presque
contre la foy.Car en Efay e chap.19;.
est dit que Lucisser incontinent
apres le peché fut tiré en enser au
Înofond du lac. En sainct Luc 8,
es diables prioient lesus Christ
qu'il ne commádast point qu'ils al-
lassét en Tabismcll y aúoit dóc desia
quelques demons qui estoiét en l'a-
bissme, ou ils ne vouloient pas re
tourner de peur de chômer de tour
menter les homes. Pour le 3. S.Paul
aux Ephess. 1. dit,aiìn qu-'au nom de
Ieíus tout genoiiil soit fleschy des
celestes , des terrestres, & des inser
naux. Il y a donc quelques- Anges en
onser,comme au Ciel. Pour le 4, S.
Paul dit en fa i.Èpist. ch.i.que Dieu
n'a pas pardonné aux Anges pe
cheurs, ains les ayant attachez à des
gros chables d'enser, les a chaííèz au
plus profond , ces. mots de chables
d'enser,& du profond(signifiát pro
prement le lieu plus bas ) declarent
que lès diables furent deiettez en
«nser. Finablementla loy nous en
seigne maintenant queles ames deg
tiv P. Maidonat. 88
damnez sont incontinent punis en
Enfer.Orl'Enscr est le lieu des sup
plices, appresté non aux hommes,
de fa premiere institution , ains aux
diables , comme dit lesus Christ
en S. Matth.^il n'est donc croya- .
blequeles ames des hommes dam-^ m
nez y soient , 8c que les diables n'y
íbient pas. Aux argumens ie reipós:
quelediable est nommé le prince
de ce monde , &c de l'air , & des te
nebres', & non pas de l'enser : d'au
tant qu'il n'exerce pas sapuiíîance
& ses cóbats en enfer , ains en l'air,
en ce monde , en ces tenebres. Mais
ce qu'on dit qu'en enser n'y a point
de. redemption , doit estre entendu
des supplices : que celuy qui vne
fois aura commencé d'estre puny
des supplices eternels , ne pourra
estre delinré d'iceux quelle part
qu'il soit. La troisième opinion fut,
comme recite le Maistredes Senten.
liure second, distinct. 6. de ceux qui
ont pensé que le seul Luciser est lié
.en enfo-' iuíques autempsde l'An-
techrist : d'autant que ce fut celuy
- «- Traicte' des Awges,
qui deçeut les premiers parens , &:
qui apres tenu Iesus Christ : par le
quel ayant esté vaincu , fut ietté &
lié en Enser. Et que les autres de
mons conueríenr en l'air. Ils colli-
geoient cecy des paroles de S. Iean
en l'Apocalypse 20. chap. lors que
mille ans seront acheuez Satan le-
radefliè de sa prison, & sortira pour
íeduire les gens qui font fur les qual
ite coins de lá terre. Mais cette opi
nion est faillse encore. D'autant
qu'il a esté verifié cy deflus que le
propre lieu des diables , est l'enser..
Et ce partage de l'Apocalypse a vn
autre íéns. Car tout ainsi que quand
Satan est dit estre lié , Ton n'entend
pas qu'il soit attaché de cordes, ains
que fa pu; (lance est diminuce^elle-
ment qu'il ne peut à son appetit
exercer cruauté contre les hommes-
De messme quand il elt dit qu'il sera-
denié, cela ne s'entend pas des vrays.
liens,ains qu'il receura de Dieu plus
grande puillànce qu'il n'a mainte
nant, afin que regnant l' Antechrist,-
il íèduise ( si faire fe peut ) les efleu*
»v P. Maldonat. 8_9
mesmes. La quatrième opinion est
des Theologiens: Qiuly a aucuns
des diables qui tousiours font en
enser afind'auoir leurs peines, ou
pour tourmenter les hommes dam
nez : les autres qui demeurent en
J'air pour exercer ks hommes : les
autres qui vont íbuuent en enser &
en retournent. Ce qu'est fort con-
uenable à la raison. La cinquième
opinion a esté anciennement fort
celebre :qu'i l'y a trois genres de dia
bles, l'vn qui habite en l'air , l'autre
en terre,&J'autre en enser. Laquel
le opinion Chaleidius en ses-com-
mentaires íùr le Timee de Platon
aíseure estre des -Hebreux & Plato
niciens. La sixième fut d'aucuns
anciens aulïî qui ont pense qu'au
cuns des demons sont au Ciel , ou y
entrent quelquesois : De-màniere
toutesfois qu'ils ne voyétpàs Dieu.
En laquelle opinion est fainct Am
broise au Sermon huitième sur le
Pseaume cent dix-huitième : A
rauíede cet exemple qui est: en lob
-ch&gíntt premier , oh il est dit que/
H Y
Traicte' des AjígesV ~*
Satan vint auee les Anges de Dieu^
en fa presence. Et à cause des pa
roles de sainct Paul aux Ephes. 6„
contre les Princes & puiííances,
contre les gouuerneurs du monde
de ft: renebres , contre les spirituel
les choies- de malice aux lieux cele
stes. Mais à bon droit eecy est re-
prouué par les Theologiens. Car
ce qui est dit que Satan vint en la
presence de Dieu auec les autres
Anges ( comme dit íainct Gregoire
au 2„ liure des Morales chap.?. ) ne
lignifie pas qu'il montast au Ciel:
d'autant qu'il n'est pas dst -que les
Anges vinsent en la preí éca de Dieu
parce qu'ils sont montez au Ciel:
car Dieu est par tout : mais parce
qu'il a esté veu de Dieu &í enquis
qu'est-ce qu'il auoit fait.' Et toui-
chant ce que dit sainte Paul contre
les choses Ipiriíuelles ,.&c. ia ,sçay
. quc.presque tous les anciés authsurs
- J' -cni entendu ce mot aux lieux' cele
stes , c'est à dire en 1-air. Mais moy
prenant garde à la coustu.me.de par--
MJdatt^çj- de íainél Paul & ne t£o»uaj-it
bt P. Maldonat. - 90
qu'en aucun lieu fainct Paul nomme
les lieux celestes que le vray Ciel,
comme en l'epistre aux Ephess. cha.
.i. & z. Il me semble qu'il y a vn au--
tre sens que les choies de malice(se-
lon la vertu du mot de Grec ) soient
lesdiables:lesquels premiers de tous
estans au Ciel ont respiré malice;
c'est à dire ont fait mal. Et c'est ce
que vouloir dire fainct Paul , que
nous auions à combatte contre des
ennemis lesquels estans au Ciel,0ht
ose faire guerre contre Dieu. La
7. opinion fut d'autres ( comme
d'vn certain Marcus de Philosophe
rendu Chrestien en Psellus au liure
des demons) lesquels par vn long
vfage & sciéceaflèuroient auoir ap^-
pris qu'il y a de 6. eípeces de demos.
Le premier etherec habitant au fil-
prémelieu du seu. Le z- a esté haí-
bitant en l'air. Le 3 ^aquatique qui a
accoustumé d'exciter les tempestes
en mer. Le 4. terrestre. Le 5. inser
nal habitant sous terre. Le 6. fuyant
la lumiere , habitant en lieux te
nebreux. Et tout cela semble auoir
Traicte ci s Angss,
quelque choie de probable parl'eC-
ci imre. Car du premier genie, pres
que tous les anciens onr interpreté
ce que dit S.Paul au lieu preallegué..
Du i. S. Paul dit íbuuent: Le Prince
de cet air.Du3.il semble qu'il est si
gnifié en S.Matthieu 8. lorsque ces-
diables firent precipiter les pour
ceaux en la mer. Du 4. sembloit
estre de Satan en lob i. qui dit , i'ay
enuironné laterre,& Tay toute par
courue. Du 5. parleíainct Paul aux
Phihppiens z.des creatures celestes,
tarreíhes & insernales. Et du t.- il
-semble que l'Eícriture parle íbuuét:
Comme quand il est dit au premier
chap. de S. Iean la lumiere luit ea
xenebres -& les tenebres ne VoUt
pas-ccmpriíe , c'est à dire les diables
comme il est expliqué au chapit. i4..
Le Prince de ce monde est venu. Et
aux Ephes. sixième contre les re
cteurs de ce monde de ces tenebres..
EtauxCollocences z. nou$ a deli
vrez de la puiíîànce des tenebres..
Et ainsi ont exposé quelques vns ce
-que dit Dauid au Pseaume i05. Tu.
DV P. MAtDONAT. 9T
as mis les tenebres, & la nuict a cité
faite , c'est à dire tous les demons
qui habitent és tenebres. Au de
meurant , ce sens peut estre allego
rique &c ne peut estre historial. De
messme expliquent les Cabalistes au
Genese 2i. ce que l'Ange dit à Ia-
cob: lailse moy..alíer, car l'Aube ap
proche. Car ils pensent que cet-
Ange là ne fut pas bon , ains mau-
uais : ayant voulu fuyr quand l' Au
rore approche , parce qu'il n'habi-
toit qu'aux tenebres. Mais cela est
fabuleux: d'autant que Iacob dit bic
peu apres qu'il auoit veu Dieu face
à face. Quoy qu'il en íbit,toutesois
cette opinion des diables habitans
és tenebres , est auffides Hebreux:
lesquels disent que les demons do
mestiques font nómezen Hebreux
Lilythim, & Laïla, qui signifie la
nuict. La huitième fut de ceux qai lilyihl
ont pense qu'aucuns des demons '**1»*
liabitoient de leur nature en quel
ques parties du monde : Et que les
aucuns estoient Orientaux, d'autres
Occidentaux ,.aurres Meridionaux,
Traictê des-Anges^
& les antres Septentrionaux. Ce
qu'ils eolligentdu Pseau. 90. De la
-chose qui marche en tenebres de
-l'allàut & du demon meridional:
comme s'il faiíoit distinction du
demon meridional , d'auec l'occi-
dental & des autres. Et aucuns Ca-
bahstes l'asleurent ainsi , seignant
beaucoup de choses de la nature de
-ces- demons , comme escrit Mar-
-cus Marmensis au Hure de la do
ctrine commune , & Archangelus
Burgobensis. Mais le Rabbin Salo
mon rapporte ce pallàge nó au lieu
ains au temps : disant qu'il est nom
mé Meridional r d'autant que prin
cipalement il- fait ses mauuais ex-
. ploicts fur l'heure du Midy. - tes
- Chrestiens Pont anciennemét rap
porté aux vices. Car au liure pre
mier de l'espritde pareíser, Calîìan
dit que {'interpretation de tous les
plus vieux en Egypte fut quedemó
meridional se nommoit celuy qui a
de coustumede rendre les hommes
pareíîèux à bien faire , prenant la
; metaphore du Midy,d'autant qu'est.
-T>V V. MAtEOXAT- v^t
re temps là les hommes ont ac
coustomé d'estre plus pareiseux.
Apres. L'on: a prins garde qu'ily a
certains demons qui demeurenî
volontiers aux sepulehres , comms
on collige.du 8. de lainct Matthieu^
oi; il est dit qu'il y eut deux. demo
niaques qui habitoiét és sepulehres
de maniere que personne n'y pou-
uoit palser. Ce que fut cogneu goh
core par des- autheurs prophanes,
messmement Grees , qui ont nommé
certains demons Sorodemons, com
me- demons íêpulehraux. D'autres-
croyentque tous les. Anges qui tó-
berent du Ciel , sont en enser ; mais
que les demos qui font sortis d'eux,
font demeurez en l'airj\insi l'escrit
Lactance au liure deuxième -chap.
quinzième. D'autres ont obserue.
par experience que. les demos cou-
- stumierement se retirent aux lieux
ou il. y a moins de religion pour y
eítreen plus grádeseureté. Et par Ge
les plus recentes histoires recitent
que ces années pailles au nouueau
^mande y. ^aQítLÇ grande multitude
iraicte des Anges,
de demons , qu'il n'y auoit person
ne qui ne parlast familieremét auec
eux v'il vouloir. Er Cáffianus en la
collation septième , chapitre vingt
troisième raconte que lors que
pour luy les Moynes venoient en
Egypte , il y auoit si grande trouppe
de. demons ,& qui exerçoit fa cruau-
-tt siaudacieuíèment , que les Moy
nes n'oioient dormir en ce temps là,
mais pendant que les vns dormoïét,
les autres fuioient la íéntinelle en
Oraisons & Prieres. Inexperience
Montdì- apprend auflî que les demons se
gnes Jt plaisent d'habiter les mohtaignes,
demons. mutant qu'ils font superbes. Et les
r- „ arts de la Magie ont esté tousiours
$iyn conleruez aix montaignes. Ce
iJnge qui ne semble pas efloigné de la
putestre sainéte Eícriture. Car ce ne fut pas
en pU- ^ns cause que 'Fesprif malin mena
ímx Iesus Christ en la móntaigne pour
le tenter. Touchant la sixième que
stion , tous les Theologiens s'accor
dent qu'vn Ange ne peut estre en
plusieurs lieux. Combien qu'il me
íemble que cela s'enfnirnecdiaire
DV P. Maìdûnat. £>5
ment de l'opinion par laquelle ils
pensent quel'Ange est en lieu par
î'operation. Car il n'y a point de
doute que l'Ange ne puine operer
en deux lieux extrêmes , n'operant
point au milieu : ou appliquer fa
puiííànce à operer en deux lieux , ôc
non au milieu. A kv septième que
stion S. Tho. reipond en la question
cinquantedeuxième que plusieurs j.QueJt
Anges ne penuent estre en mesme
lieu. D'autant qu'ils ne peuuent
estre cause (comme il dit)d'vn mes
me effect tQtal. Mais presque tous
les autres Theologiens font de cort-
îraire aduis, & mieux comme il me
semble. Car comment se peut-il mMs^
faire qu'vne legion d'Anges entie-
re ,fut en vnseul hóme,cóme nous
lisons en sainct Marc, si plusieurs
n'estoient en meírne lieu ; Et apres,
rien n'empesche que deux corps ne
puiisent estre en vn lieu , sinon d'au- ,
tant qu'ils occupent place : Or les
Anges n'en occupent pas : ils peu
uent donc estre en mesme lieu..
Jrouiémernenr x deux acodens
Traicte' des Anges,
corporels (comme aulaictlafaueur
"ÎÇw & la couleur ) sont entierement en
*«yin£' vnlieu. Doncques à plus forte rai-
feutcjtre çon cjeux ^nges estans incorporels.
enfla- - & r
j7i«rí vuatnemement , ii plulieurs ne
dieux- pouuoient estre en mesme lieu , ce
íéroit principalemét d'autant qu'ils
seroient en lieu par operation. Mais
il a esté verifié qu'ils sont en lieu
■ non seulement par operation , ains
quelquefois par essence. Estant donc
leur essence indiuiíible,ils pourront
estre plusieurs en meíme lieu. Ad-
ioustez qu'encore que oous disions
- auecfainci Thomas que les Anges,
sont en lieu premierement d'autanî
que la vertu de l'Ange est limitee,
quelque corps pourra donc estre fi
grand , que par vn seul Ange il ne
pourra estre remué , & le pourra
estre par deux. Doncques l'vn &
l'autre operera en meíme corps. Et
par ainsi l'vn & l'autre sera en mes
me lieu. Secondement jd'autant que
l'Ange n'employe pas necessaire
ment toute fa vertu : mais selon fa
/volonté en peut yser , ou de toute,
... dv P. Maldonat. 94
'ou de" partie. Il se peut donc faire
-qu'vn corps qui pourra estre remué
par vn Ange , s'il ne veut employer
toutes ses forces , sera remué par
deux. Ils seront donc deux en vn
lieu- Tiercement rien n'empesche
qu'vn Ange n'exerce vne action sur
ce corps,& v n autre en face vne au-
"tre , comme si l'vn detient , l'autre
esschauíse. Doncques si par action
ils font en lieu,l'vn& l'autre íeronc
enmefme lieu.Finablementen Dtu
. niel ch. i0. nous lisons que Gabriel
fut detenu par le prince des Perses.
J/vn Ange peut donc detenir l'autre
' èc ne le peut detenir s'ils ne font ea
inesmejieu.-1 <. ...

DV MOVVEMENT
des Anges.

DE ce que nous auons dit du


lieu des Anges,vne autre que
stion se peut expliquer , de leur
mouuement. Or elle a quatre par-
.ties.. Lapremiere , si les Anges peu
Traicte' Dis. Anges,
uent remuer de lieu. ha. z. parquoy
ils sont remuez. La 3. s'ils sont rc%
muez en remps, &c en instanc. La 4.
s'ils peuuent estre remuez d'vnlieu
en vri autre, non par moyen. Tou-~
chant à la premiere partie, Duran-
jt.îW/í dus au premier des Sentences, diíl.
37. quest. z. futen cet erreur , qu'il
estima que l'Ange en effet ne ïè pou-
noit aucunement remuer , ains qu'il
íe remuoit seulement par nostre
opinion. D'autant que quand nous
voyons qu'il agit là ou il n'agilsoit
pas auparauant, nous pensons qu'il
soit venu de ce lieu là en vn autre.
Ce qu'est ouuertement contraire
aux lettres sainctes : leíquelles en
seignent qu'vn Ange vint d'vn lieu
en vn autre en efFect & non seule
ment par action. Touchant à la 2.
5 -partie partie , il faut penser qu'en ce qu'on
dit estre remué de lieu , deux cho
ses sont encloses , îvn estre en iíeu:
l'autre agit en se t'emuát par vn lieu.
Si nous regardons ce premier, l'An-
ge est remué de lieu par les meímes
choses par leíquelles il n est pas eh
dv P. Maldonat.
Heu. Si nous regardons le second,
l'Angc se meut par lieu,par le moy é
de só eíséce,commc par principe es-
loigné : par la puissance mouuante,.
comme par prmeipe moyen : par
l'action de se mouuoir , comme pan
principe procite. Touchant à la.
troisième partie , il y en a eu cinq
opinions des Scolastiques. La pte-fj****^
- miere de Henricus au quorlibet ij.
question 7. & de Gregorius Arimi-
nensis au i. des Sentences dist. 6.qu.
j.art. premier. Et de Herbeius au z.
des sentent quest. 7. article troisiè
me. Lesquels ont pense que l' Ange
poiuioit estre remué en vn instant,
voire d'vne tres-granie distan
ce. . Mais ceste opinion est fauste.
Car il s'ésuiuroit que l' Ange pour-
roit estre par tout : d'autant qu'en
vn instant il pourroit estre remué
'en toutes les parties de l'vniuers, en ' .
vn mesme temps il seroit donc en
toutes les parties , qui est estre par
tout. Secondement il s'ensuyuroit
qjie ifAligo plus haut ne pourroit
estre remué , plustost que le plus
- 'Traicte' des Anges,
bas, d'autant qu'aucun mounenienf
ne peut estre plus viste que celuy qui
se fait en vn instant. Mais cela est
absurde. Troisièmement l'Ange en
vn corps qu'il a prins , ne peut estre
remué en vn instant , comme tous
accordent: parce que cela est contre
la nature d' vn corps.Doncques il ne
peut- sanS'Xorps auflî estre remué
en vn instant, d'autant que l'Ange
ne se meut pas au mouuement du
corps , attendu qu'il n'est pas la for
me d'iceluy: ains le corps , au mou
uement de l'Ange. Et l'Ange pour-
roit prendre quelque corps pesant
qui se mouueroit vers le bas , & qui
retarderait son mouuement. Si donc
en vn tel corps il ne peut estre re
mué en vn instant, il ne le peut fans
iceluy auíîì. Toutes les autres opi
nions ont quelque chose de proba
ble. Car lors qu'on demande si l'An
ge peut estre meu en l'instant , l'on
parle du mouuement prins propre
ment, lequel de fa nature comprend
succeiììon. Et ainsi il est éuident
qu'il ne peut estre meu en vn instát
OV P. MaLDONAt. 9t»
d'autant que succelsió ne peut estre
qu'auec temps. D'auantage il faut
entendre qu'entre les Theologiens
autre est l'instance de-nostre temp?,
autre celle du téps des Anges. Car
d'autant que les Anges ne mesurent . „ -
pas leurs actions par le mouuement jgs '
du Ciel, ains par d'autres leurs a- ^iimt,
ctions , vne chacune aótion d'vn
Ange est nommé vn instant. Et le
temps qui est compose de plusieurs-
actions d'vn Ange , est nommé
vn temps distinófc d'vn Ange. Et
parce que l'Ange peut prolonger
vne meíme action par vn long es- -
pace de nostre temps , il arriue que
quelquesfois à vn instant d'Anges
reípondent plusieurs de nos annees.
Et parce quand on demande si vn
Ange peut estre remué en vn in- .
stant : Si Ton parle de 1 instant des
Anges,il n'y apomt de doute qu'il
ne puisse estre remué en vn instant.
Mais quand on dispute de cecy,
la question est des instans de no
stre temps. En troisième lieu il
iàut yser de cette susdite distin- .
Traicte' des Anges,
ction. Car si l'on die que l'Ange
fbic en vn lieu occupant lieu par
operation exterieure ( cóme S.Tho.
a pense ) son opinion estvraye que
l'Ange ne peut estre remué en vn
instant: parce qu'estre remué en vn
instant, seroit en cet endroit trans
ferer en vn instant vne operation
exterieure d'vn lieu en vn autre:
Ce qui ne se peut faire,d'autant que
toute exterieure operatió, tout ainsi
que de sa nature elle est en lieu,ainsi
de nature elle est par íúcceiîìon-
Maissinous disons que l'Ange est
en lieu par eíïènce,la question en est
bien plus difficile. Et pour l'expli-
quer,il faut mettre vne autre distin
ction. Car vn Ange peat estre re
mué ou d'vn lieu qui luy est égal,
en- vn autre égal à luy,entre lesquels
il y ait plusieurs autres lieux égals
entre deux : Et en cette maniere il
V*Jnge est manisseste qu'vn Ange ne peut
en yn eavn instant estre remué d'vn lieu
lie» par ,.i
eseace en vn autre' ™ autant que s it
estoit trouué en vn instant , en mes-
jare instant il-serok aux-deux lieux
1 extrêmes
. dv P. Maidctnat. - 97
extrêmes & en ceux d'entre deux.
Il seroit donc en vn lieu sort grand
ci tres-grand. Ou. bien l'Ange
peut estre meu d'vn lieu égal, en
vn autre lieu -égal proche, de ma
niere qu'il n'y ait rien entre deux;
Ou d'vn lieu inégal , c'est à . dire
moindre que le fort grand , en
vn autre lieu égal praehCEt en cet
te maniere. me rfémble vratye l'o-
pinion refutee par íàinct: Thomas
en la premiere partie, question cin
quante troisième , article troisiè
me , de ceux qui disoient que l'An-
ge pouuoit estre remué: en instant
à leur sens : que tout le temps pre-
sent , il soit eti quelque heu , ôc :ai»
dernier -instant de ce temps il soir
en vn autre lieu. Car la raison par-
laquelle sainct Thomas refute cet--
teopinion , à bon droit est reprou-
uee par les Theologiens. D'autant
que ce qu'il dit ne se pouuoit faire,-
que quelque chose soit en repos
tout le temps precedent lòus vne
forme , 8c qu'au dernier instant , il
íoit íòus vne autre , est fauise. Et
I
ìraicte des anges,
les Philolòphes dientque lors que
de l'eau ce fait de l'air , la matiere
de l'eau en tout temps auoit esté
lbus la forme de l'eau , &c qu'au
dernier instant elle est sous la for
me de l'air : parce qu'au commen
cement elle est dite en forme es
sentielle en l'instant. En ce íêns aus
si est vraye l'opinion de l'Escot au
deuxième - des Sentences , distin
ction deuxième , question vnzième.
Lequel dit qu'en cette manlere
l'Ange peut estre remué en vn in
stant: non pas qu'il paiïè toute la.
distance en l'instant , mais qu'à vn
seul instantiiL semtre en tout le lieu
qui luy est égal auquel il tendoit , &
non pas luccelîìuement Sc peu à.
peu comme nous. En ce mesme
sens ie iuge vraye l'opinion de Ga
briel en la mesme distinction , que
stion troisième , qui dit que l' An
ge peut estre remué en vn instant
d'vn lieu inégal , à vn lieu proche
égal, nó qu'en mesme instant il soie
cn l'vn . 8c l'autre :.çar cela est con
traire , mais ce .qu'au temps ptece-
1
DV P. Maldonat. t?S
dent se seroit en vn sen vn seul instat
sc seroit en l'autre. D'autant que 11
nostre ame en tout le temps prece-
-de n'informant point nostre corps,
peut en vn iêul instant infor
mer le corps,il n'y peut auoir aucu
ne raison, pourquoy l'Ange auflî
n'occupe tout vn lieuegal àluy,du-
quelilíoit, combien qu'en tout le
temps precedent il fut en vn lieu
prochain. A la question faincl
Thomas reípond que le mouue-
ment des Anges est double. L'vn Mouuc-
est continuel , qui íê fait par opera- ment de
tion exterieure non interromouè'. l^"Ze
L, i.r . i - r r - continuel
autre chlconunue qui le rait par
diueríes operations exterieures in- continue.
terrompuè's. Il dit donc que le
mouuement de l'Ange continuel
ne le peut faire d'vn extrême en
l'autre sinon par vn moyen : mais
que si peut bien le mouuement dis
continué. Les autres Theologiens
preíque tous nient absoluè'ment ôc
formèment que l'Ange se pu ìlseia-
mais remuer de lieu en autre sinon
par quelque moyen. Ainsi le dit
1R.AICTE UES ^lNUliS,
Alexander en la seconde partie,
question trente- troisième , nom
bre deuxième; Et Albertus au pre
mier des sentences distinction tren
te-septième , article vingt troisiè
me. Et Scotus au deuxième des
Sentences , distinction deuxième,
question douzième. Et Gregorius
Ariminensis,distinct.tí.quest. 3. ait.
x. Et Gabriel distinct- i. question 3.
Quant à moy i'estime que si nous
dilòns l'Ange estre meu par ope-
ration exterieure , il peut estre meu
d'vn lieu à autre non par moyen:
d'autant qu'il peut operer en deux
extrèmitez,n'operant pas au milieu,
mais ( pour dire le vray ) c'est parler
improprement. Mais si nous di-
sós,que l'Ange se remué' par le corps
auquel il est , ou par lequel il est en
vn lieu, il ne se peut pas plus remuer
fans vn moyen que ce corps mes-
me- Que si nous disons qu'il est meu
far actions interieures de l'esprit &:
de la volonté , comme l'on dit que
les hommes diuaguent & dilcourét
lors que par la pensee de l'esprit ils
DV P. Maldonat. 99
discourent en diuers lieux: Ainsi n'y
a-il point de doute que l'Ange ne
puifle estre remué d'vn lieu à au
tre, ne passant pas par le milieu
comme nostre esprit est remué
de la terre au ciel,lors qu'il pense du
ciel ne pensant pas de l'air qui est le
milieu : mais cela n'est pas propre
ment estre remué. Et si nous disons
que l'Ange est remué appliquant-
son essence à diuers lieux ( comme
Testime qu'il est r emué) il ne se peut -
faire qu'il íe remue de lieu à autre
íàns moyen. '- -

LA DEVXIESME PARTIE
DELADISPVTATION
qui est des Anges, partis : '-
culierement,bons
& mauuais. * - '

LA disputation de bons Anges-


à trois parties. La premiere de
la creation & qualité , de laquelle
Dieu les a faits. Lai. de leur distin
ction,. La troisième de leurs offi-
Traicte' des Anges,
ces. La premiere partie à cinq que
stions. La premiere si les Anges ont
esté faits bons. La 2. s'ils ont esté
faits en grace. La troisième s'ils
ont esté faits heureux. La quatriè
me si ayans esté faits heureux , ils
peuuent pecher , & perdre la bea
titude qu'ils ont. De la premiere
quest.il y a eu diuerses opinions. La
premiere fut l'heresie des Valenti-
niens , Manicheens & Prisscilliani-
stes ( comme en plusieurs endroits
tesmoigne S. Aug.) que les Anges
de leur nature estoient mauuais 8c
creez par vn mauuais principe. Mais
c€t erreur a esté refuté cy deiíìis. La
1. opinion fut de laquelle fait men
tion le maistre des Sentences au li.
2. dilt,3 . Que les diables sont vraye-
ment mauuais , de qu'ils furent
creez de Dieu tels qu'ils sont main-
tenant.Cet erreur est aisement refu-
té auffi par ces mots du Genese pr&r
mier : Dieu vit tout ce qu'il auoit
fait , qui estoit fort bon. La troisiè
me fut de quelques anciens Theo
logiens , de laquelle parle S. Aug-.
DV P. Malconat. ioo
liure n. de la Cité de Dieu, chap. i>.
Etáu li. n.du Genes. selon lalettre,
chap.zo.Et au premier li.des Retra
ctations chap. i5. Que les demós en
verité ne font pas mauuais , mais
qu'ils font mauuais à nous, d'autant
qu'ils nous font cause de pecher: Et
qu'ils furent faits tels de Dieu qu'ils
font maintenant non pour autre rai
son sinon afin qu'ils nous exercent.
Ce qu'ils prouuent premierement
patles paroles de lob, cha.40. Il est;
le commencemct des voyes du Sei
gneur. Et des paroles du Pseau.ioj.
Ce dragon que vous auez creé pour
le deceuoiric'«st àfçauoir l'homme.
C'eii-heresie auflî , amibien que S.
Aug. ait dit fort modestement que
ceux qui auoient ceste opinion n'e-
stoient pas Manicheens. Mais l'cs-
criture nous apprend que les de
mons furent quëlqiiesfois bons. En
Efayccha: i4..' comment estes vous
jtrefbuche du CiéLLherser,qui quel-
quesfoisivousleuie? du matirtfEr erâ
Ezech. t$. tuas esté parfait en tou
tes tes voyes dés le commencement
I iiij
Traicte' des Axées,
.de la creation , iusquesàce qu'ini
quité aestétrouuee en toy..Et en S.-
kan 8. ces mots le monstrent : il
n'est pas demeuré en verité,d'autant
qu'elle n'est pas en luy : comme s'il
diíbit ileutquelquesfois veritè,c'est
àdireiustice ,mais il ne persista pas
en icelle. Mais ce qu'ils alleguoient
de Job , cela procede de l'ancienne
version corrompue: carnous & les
Htbreuxlilòns autremét, celuy qui
l'a fait, a appliqué son glaiuc, c'est
à dire l'oecira. Semblablement cc
qu'ils ameinent du Píàl. toj- scloit
les Hebreux à vnautre íêns^çauoîr:
lequel tu as fait norì pour le dece-
uoir , ains paur se ioiier' eníceluyv
c'est Adire en la; mer.. Gr ií parlok
de Leuiathan cc grand poitíbn, qu'il
est ditqué Dieu fit en Genes.i.qu'on
dit se ioiier ënla mer , c'est -àdirey
qui y domine & y fait ce qu'il luy
plaist : ainsi qu'en la terre le lyon
domine entre les bestes sauuages^
La quatrième opinionsut celle que
recite sainct Thomas au deuxième
des Sentences , distinction quatrié
dv ' P. Maidonat. IbV
me,qu. 3. Que les diables ne sót pas
mauuais de nature, & n'ont pas esté
faits mauuais de Dieu. Et toutes-
fois , qu'au premier moment qu'ils
fuient faits , ils pecherent. Cc qu'il
verifie par ces paroles de íainct Iean:
U estoit homicide dés le commence
ment. Il semble qu'icy encor ait er-
reur.Car des luídits paiïages de Vcí-
criture il est clair qu'il fut quelque
tempsque le diable fut bon.Êt cecy :
qu'il fut homicide dés le cómence-
ment(combien que S. Augustin l'in-
terprete en plusieurs manieres.) Ie
l'entends fort simplement qu'il fut
homicide dés le commencement
du móde:de maniere que commen
cement ne signifie- pas vn moment,-
ains tout Tespace des six ioufs aus-
<juels est dit que toutes choses fus
sent creées. Car dedans cet espace '-';'
-de temps le diable fut premierement
bon, oc apres mauuais. La 5. fut de'-
sainct Thomas & de ceux qui l"en~
íìiyuent en la premiere partie de la
cjuestion 63. article . cinquième..
Tráicte' ces Anges>
Que tous les Anges non seulemeiiÊ
fuient faits bons,ains encores qu'ita
ont merité la vie heureuse.Et que les.
bons Anges en perseuerant auoient
obtenu lafelicitéíju'ils auoient me
ritee : & les mauuais, en pechant la-
perdirent. Et que quand bien ils
eussent voulu, ils n'eussent peu pe
cher au premier moment- de leur:
creation.. Latf.futd'autresSehola-
íliques , comme de Scotus , Gre-
gòriusAr-iminensis,Gabriel au j.des
Sentences,distinc"L 5. Ocham. au 2.
quodlibet,quest. 6. Que tous meri
terent incontinent au iunoment , &5
<jue.toutesfois tous peurent pecher
auûî , mais qu'ils ne pecherent pas.
Il me semble que ceste question se
doit expliquer auec six chess. Le ii
qu'vne bonté est naturelle,- l'autre
lìtttAb- morale, l'autre Theologale oudiui-
jpsfMts- ne.5i l'on demande donc de la boiii-
y. té naturelle , . la foy Catholique en~
-swûl? seigne- que tous les Anges furent
faits bons. Car ainsi fáut-il entent-
dreçecy : Dieu vit tout Ge qu'U
auo.it fait-, & cela estoit fort bon..
ï>V P. Maidónat. i02
Mais si la question est de la bonté
Morale , ou Theokigale,la foy n'en
prescrit rien , ains est libre d'en opi
ner. Lé 2. chef, les Attges bons &
mauuais ont peu meriter la vie heu
reuse incontinent au premier mo
ment. Premierement d'autant qu'ils
auoient autant parfait liberal arbi
tre qu'ils ayent euiamaispar apres.
Secondement d'autant que c'est l'o-
pinionde tous les Theologiens que
ï'áme de Iesus Christ merita aupre-
mier instant qu'elle fut faite : donc-
ques les Anges peurent meriter aus
si. Le 3. tous les Anges & bons &
mauuais en effecì; meriterent incon
tinent au premier moment de leur
creation. Car ils auoient le liberal
arbitre & la grace , lesquelles deux
choses font neceflàires-pour meri-
ter,& ils ne furent pas oysifs. Ils eu
rent donc quelque actió prouenan-
te de grace &du liberal arbitre.Mais -
toute action qui procede de grace
& du- liberal arbitre est meritoire.
Ils meriterent donc. Le quatrié-
xne ches est que tous les Anges
- Tratcte des Ançes,
feons &ç mauuais incontinent aft
premier moment de leur creation
peurent peches,si vous regardez seu
lement; à leur- nature ren ostant la
grace de Dieu. Et en celaje fuis de
l'aduis des Theologiens qui se íbnt
departis de l'opinion de íàinct Th^
Car en Theologie c'est vne demon~
stration tres- certaine, Tous les.An-
ges ont peu meriterais ont donc peu
pecher auflì- Parce que mesme fà*
culté est celle de meriter,, & celle
depecher. Et- apres ( ce qu'est plus)-
plus dechoies íont neceilajres pour
meriter que pour pécher. $à d©ncv
ques incontinent en leur-- premiere
action qu'ils eurent,ils peurent mef
riter «}h peurent pecher aufli. Pour
le 3..s'ilsnePeúirentpeufaire,s'eust
esté. principalement' pour la raisoa
qu'ameine sainct Thomas, que H
premiere action de l'Ange creé doit
estre attribuee au Createur & non à
l'Ange ereé. Mais cette raison ne
fait rien. Car si elle estòitbohne,el~
le verifieroit que l'Ange ne pouuòit
aneriter deia premiere actionJD'au-
-©v F. MAtDONAr. roj-
tant quel'action par laquelleils pe
cherent ne d oit pas estre dite moins-
leur, que celle par laquelle ils.meri
terent : ains encore pechons nous
quelquesfois par l'action d'autruy:
eóme par le peché des premiers pa-
rens:& toutesfois4ious ne meritons
iamais par faction d'autruy. Si pour
cette- cause donc les Anges n'ont
peu pecher au K momerit,beaucoup
moins ont-ils. peu .meriter.Finable-
ment s'ils n'eulîentpeu pecher , c'e-
stoit principalement d'autant que
Dieu fut autheur de cetteaction.Or
.il n'est point moins autheur de tou
tes actiós qui s'enfument apres, que.
de- la premiere,d'autant que rien du
tout nepeut estre dequoy Dieu he
loitautheur: Si doneques les Anges
pour cette- cause n'eiuTent peupe-
.eher en leur premiere- action , ils
n'euflent. iamais peu pecher apres.
Le 5.chesest,si l'on considere nó pas
la nature des Anges ains leur fait,
nuls Anges ne pecherent inconti
nent au i. moment de leur i„ action:
d'autat que l'eícriture enseigne que
Tráictë' t»ÊS AnCés,"
ïes diables fui ent quelque téps bonsí
Comme en Efay e i4.cpmment es tu
eheut Lucisser? Sec. Et en Ezechiel
18. tu as esté parfait en foutes tes
voyes dés le iour de ta Natiuité,&c'.
Le 6. ches est : Si nous regardons
non seulement la nature des Anges
& la condition auec laquelle ils fui
rent faits de Dieu , íçs&ioir- est en
graceaen effect ils n'ont pas-peu pe
cher en leur premiere action; Non
pas pour la raison deS.Tho. ( que
eette action doiue estre attribuee au
Createur ) ains pour l'autre raison
que les autresTheologiens ont ame-
nee:C'est que le peché ne peut estre
ensemblement en messme moment
de temps auec la grace. Er parce,ces
deux choses font contraires entre
telles-, que l?Ange au premier mo
ment de íà creation aiteu la grace^
&lepeché„ - ; : - s
uv P. Mae do HAT. i04

DEVXIESME QVESTION , SI
les Anges ont este'
faits en glace. - -

DE cecy il y a eu cinq opinions;


ies Theologiens. La premiere:
de ceux qui ont dit que les Anges
furent faits auec leur nature seule
& non douez d'aucuns dós. Etqu'a-
pres, ils receurét des graces de Dieu..
Le maistre des Sentences recite &
approuue ceste opinion au 1. liure
des Sentences , distinction 4. & 5.
La seconde opinion fut de ceux qui
dirent que les Anges n'eurent point
de grace, iuíques à ce qu'ils peurent
meurement deliberer. De cet aduis
est Héricus au quodlibet 8. Latroiss-
ième fut d'autres qui ont pense que
les Anges furent faits auec la grace
donnee gratuitemét , mais nonauec
1a grace rendant agreable. Et en ce-
ste opinion est Alexander , en la
partie , question i9. membre 2. La
4.filt d'aucuns Theologiens qui ont
Traicte' des Angïs,
pense que tous les Anges bons &
mauuais , superieurs & inferieurs
furent faits en pareille grace ren
dant agreable. D'autant qu'ils ne
pouuoient trouuer aucune cause
pourquoy Dieu donnast plus de gra-
€e à l'vn qu'à l'autre. La 6. est de
presque tous les Theologiens. Et
mesmes desainct Thomas en la pre-
Maldou m'cre Pavrie question 62.. Que tous
Tous Us furent faits en grace , mais non pa&
«jnges égale: D'autant que Dieu leur di-
fnits m stribua grace plus grande & plus pe*
grtue tite,seló la nature d'vn chacun.Moft
uKgaU. 0pjnjon est premierement que tous
Anges furent faits en grace. D'au
tant que celá se collige ouuertemét
du i4. chap. d'Esaye,& iS.d'Ezech, ,
& du 8. chap. de í'ainct Iean : il n'a
pas perseueré en la verité. Car il ne
nomme pas verité , la nature , que
le diable ne perdit pas, ains la grace
qu'il perdit. Et apres i'estime fort
probable ce que les Theologiens
enseignent : que Dieu leur donna
grace , selon la nature d'vn chacun:
Non qu'il la leur dónast pour leurs
dv P. Maldonat. rsy
merites qui estoient nuls :mais d'au
tant que c'est à vn prudent distribu
teur de departir les dons selon la ca
pacité de ceux à qui il les donne. Er
c'est ce que signifie cette parabole
du Pcre de famille en sainct Matth.
25. lequel donna à vn de sesserui-
teurs 5.talents,à l'autre z. à l'autre i..
selon leur vertu.

TROISIESME QVESTION,.
Si les Anges evrent i
. faits bien-heureux. - i - !
- ' . ' ---..- _' c. í
DE cette question encore il y x
eu diuerses opiniós. Car quel
ques vns ( comme recite Bonauen..
lure au deuxième des Sentences di-.
stinction quatrième, quest. premie-
re) ont estimé que les bons Anges
furent faits de Dieu, bons : mais les
mauuais,non pas de mesme: & par
ce ils peurent pecher. Mais cette
opinió fe peur resuter tout de mes
me Sc par mesme argument, qurvnc:
autre semblable estoit refutee par
sainct Augustin en. plusieurs lieux,
Traicte' des Anges,
de ceux qui disoient que les botté
Anges cogneurent leur selicité auát
qu'ils l'eusiènt,mais que les mauuais
ne cogneurent pas leur cheute. Car
il ne faut pas croire que Dieu íàns
autre cause en eust fait aucuns heu
reux, les autres non. Et mesme àt-
xendu que l'heiu del'cíprit reípond
àladiuinité. Maispreíque tous les
anciés autheurs semblent dire : Que
tous les bons Anges , ensemble les
mauuais en pechant , perdirent la
beatitude. Ainsi le dit S. Aug. en la
15. Epi. àHieronymus. Car il argu
mente que les mauuais Anges ne
peurent cognoistrc leur peché futnr
auant qu'ils pechassent:d'autant que
s'ils l'euísent cogneu , ils se fussent
contristez pour leur future damna-
ticV: c'est à dire,ils eussent esté mar
ris de ne pouuoir estre heureux. Et
celuyquifutautheur duludes ensei-
gnemens Ecclesiast. au chap.59. es-
crit en cette maniere : les Anges qui
ont esté creez en cette selicité,ilsne
tiennent pas de nature ce bien,de ce
qu'ils ne pechent auec les autres. Et
DV P. Maldonat. icS
5. Greg. au i. li. des morales chap.
7. & li. 14 . chapitre 5. escrit que les
bons Anges furent confirmez en
leur beatitude , de ce qu'ils virent
Dieu,qu'ils condamnerent les mau-
uais Anges à cauíê de leur peché:
comme ayans esté faits plus adui-
sez par le peril d'autruy , de façon
qu'ils ne peuuent plus pecher. Il a
donc opinion qu'encore les Anges
malins furent quelquesfois heu
reux. De messme en parle Isidore au
li.i.du fouuerain bien,cha.iz.EtBe-
de aux quest.sur le Gen. en la dispu-
tation dui.iour,& S.Thom- en la i«
partie quest. 61. Et presque tous les
autres. Les Scholastiques resoon-
dét qu'il y a double beatitude : l'vne : . , --
naturelle , qui est la i. persection de tltreUe -
nature : l'autre supernaturelle que &/».
persóne ne peut obtenir par les for- ptrtu*»-
ces de la nature. Que tous les An- rellt-
ges furent creez.en selicité naturelle
d'autant qu'ils furent faits de Dieu
autant parfaits qu'ils pouuoient
estre. Mais qu'ils ne furent pas^
acea ea felicité fupernaturelLest

\
Traicte' dis Anges,
d'autant que celuy qui a desia vrrc
sois obtenu eeste beatitude , ne peut
pecher. Et parce si les mauuais An
ges l'eussent eue quelquesois,iamais-
n'eullent peché.Et en ceste maniere
ils interpretent lestesmoignagesdes
'JHaldo- anciens autheurs. Mais il me semble
àmoy que ces autheurs ont voulu
dire quelque chose de plus.Car quád
S. Aug. dit que la douleur ne peut
estre coniointe auec la selicité natu
relle, à laquelle la douleur repugne.
De mesine quand l'autheur des en-
seignemens Eccles. dit que les bons
Anges perseuerent en ceste felicité,
veritablement il parle de la felicité
supernatuielle qu'ils ont. I'estime
donc que les mauuais Anges nç íbnt
Eoint dits par les anciens auoir esté
eureux pour la felicité naturelles
ains encore pour ta surnaturelle: nó
qu'ils lapollederent en effect , ains
presque & cóme au.ee tiltre. Car at- ;
tendu que telle selicité se dóne poul
ies merites prouenásde la grace,qui-
conque a merité,à droit pour acque
rir la selicité, estât heureux,presque
dv P. Maldgnat. i07
íertains'ilperseuere.Tout ainsi dóc
que nous auós accoustumé de dire q
Je fils de famille qui n'estoit point simitíí
encore emancipé , s'il a esté exhe- taie.
redé par son pere , auoir perdu V he-
redité,non qu'en effect il l'ait eue,
mais d'autant qu'il y pouuoit auoir
droit,& l'a perdu par fa faute : ainsi
dirós nous que les mauuais Anges
ont perdu la beatitude,non qu'ils a-
uoiét, mais qu'ils auoiét meritee. ïe
collige ceste interpretatió de S. Aug.
au li.n.du Gen.selon la lettre ch.i6-
Ouilescrit, qu'on dit que le diable
ne demeura pas en la verité, non pas
qu'il ait eu la verité , mais qu'il la
ouuoitauoir s'il eust voulu. Sébla-
le est cet exemple de l' Apocalypse
$.tiens ce que tu as,afinque person
ne ne prenne ta couróne.La couron
ne ( dit-il) signifie la beatitude : la
quelle celuy qui l'a ne peut perdre.
Comment dit donc S- Iean tiens là,
de peur qu'vn autre ne la prenne:
Et c'est parce qu'il parle de la couró-
ne , que nous ne tenons pas auec les
mains , ains auec le seul .merite.
Traicte' des Anges,
& parce la pouuons perdre. De
ceste façon , i'ay opinion qu'il faut
entendre quelques tesmoignages
de PEscriture , qui semblent mon-
strer que tous les Anges ont esté
heureux.Cóme estcestuy-ci : com
ment es-tu trcíbuché Lucisser qui te
leuois du matin î car il n'est pas dit
qu'il soit cheut de la gloire qu'il ait
eue , mais de celle qu'il pouuoit
auoir. EtcecyduzS.d'Ezechiel : tu
as esté aux delices du Paradis de
Dieu, & s'il y en a de semblables.
Les Theologiens ont coustume de
disputer : Si les Anges n'ont pas
esté faits heureux , combien y a-il
Ctmbìe» eu d'espace entre leur heur , & la
Us tJn- creation des bons , & le peché des
£eslie~ mauuais î La dispute de cecy entre
rem'* les Scholastiques est vulgaire. Car
pcber. sainct Thomas en la premiere partie
quest. Çi. art.5. & bonne partie des
Scholastiques , ont pensé qu'il n'y
cust qu'vn instant , c'est à dire vn
acted'vn Ange, auquel tous meri
terent. Et qu'au second instant , tous
les bons enpersfucrant ioúirent de
dv P. Maldonat. ioS
k felicité : & les mauuais en pechát
la perdirent. Mais Scotus au deux
ième des Sentences , distinction y.
quest. i. Et aucuns autres , mettent
trois instances , qu'ils nomment pe
tites demeures :de maniere qu'au i.
instant tous ayent merité: auiêcond
les bons ayét períeueré, & les mau-
uais ayent peché : Etau troisième,
les bons ayent receu la felicité , &
les mauuais la damnation. Car il ne
semble pas qu'il se soit peu faire
que les bons & les mauuais Anges
ayent esté efgaux en merite , en
tout le temps de leur voyage , le
quel selon fainct Thomas , ne fut
qu'vn instant , auquel tous merite
rent : 6c à la fin du voyage , qu'ils
ayent esté efgaux en la recompense.
L'vne 6c l'autre sentence est proba
ble : mais cette derniere se peut plus
aisément dessendre.Toutesfois d'au
tant qu'à vn instant les Anges , vn
long temps du nostre peut corres
pondre , les Theologiens deman
dent encore, combien a esté grande
la demeure de nostre temps , entre
Traicte' des Anges,
leur creation,& leur peché.Dequoy
l'autheur de Phistoire Ecclesiasti
que sur l'histoire du Genes- chap. 4. "
Et Albert le Grand en la grande
science de Dieu seconde partie,que-
stion dixhuitième racontent l'an-
mienne tradition des Docteurs , qui
penserent les Anges auoir peché le
íècondiour. EtparcePEgliseau z.
iour de lá sepmaine , auoit accou- •
stuméde celebrer tousiours l'ofKce
dçs Anges, à cause des bons Anges
qui perseuerent. Laquelle opinion
ie iugeestrevraye ,non parce que
l'Eglise ait pour cela celebré le 2.
iour que les bós Anges persisterent:
ains parce que (comme delíus a esté
dit) l'opinion des Hebreux est fort
probable, que tous les Anges furent
faits le second iour. - - - ....-. .1

-QVESTY
:i -.' : '. 1 ..'y . : !..
: ;1 -:<.
dv-P. Maldonat. i09

QVÁTRIESME QVESTION,
5 i l E S: B I £ N-H E V R E V X
Anges peuuent pecher.

ORigene en l'Homelie iy. & 35-,


fur sainct Luc , & en l'Home
lie 20. & '42. sur les Nombres tn-:
seigne que les bons Anges non fèu-^ .
lement peuuent pecher , ains qu'il
ont aecoustumé de pecher rous les
ioiirSj&treíbucher da GieL Pecher
(dtt-il)s'ils gardent trop incurieuse-
mençlës hommes, desquels ïlsont
pris Já charge de Dieu. Ce qu'il col-
lige du 2. chap. del'Apoc. Qilles'
Anges d'Ephefë font repris , & de
Pergame ,pour. n'auoir bien gardé 1
lëttrs Eglîses.Mais cet erreur est ou- '
uertemet eèïitre l'E sc¥stur e : 1 aqnel- *
le a de coustume de nommer cette
vie -heureuse eternelle , d'autant:
qu'elle ne se peut perdre. Et apres,
li les hommes vne fois rendus heu- :
reiix, ne peuuent pecher , beaucoup
moins le pourront les Anges. Et cec
K
Traict-e bëí Anges,
endroit de l'Apoc. qui deçeut Orî-
gene , ne se doit pas entendre des"
Anges , ains des Èueíques de ces.
Eglises , qui souuent en l'Escriture
sont nommez Anges : comme en
Malachie i- S. Hieroíme au liure
a, des Commentaires fur Michee,
chap. 6. escrit le mesme qu'Orige-
ne. Et par ce ie ne douterois point
de Je mettre au mesme erreur d'O-
rigene,si ie ne voyois que le mesme
sainct Hierosmc reprend ledit Ori-
gene pour cet erreur , sur le 6. cha,
de sainct Matth. Quoy qu'il semble
à sainct Hierosme des Anges per-
dans leur beatitude , veritablement
fur le premier chap. auxEphes, en
seigne que les meímes Anges heu
reux pechent quelquesojs 3 mais
qu'ils nc perdent pas- pouiiçela leur-ì
felicité , d'autant qu'ils pechent pa- ,
rauenture legerement. Et verifie ce-
cy par les paroles de lob , chap. i.
En ses Angesilatrouué de la mau-
uaistié.Et toutesois celasemble estre
ouuertement contre feícriture. En
l'Apocal- premier. II est dit qu'en
DY P. Maidonat. ii0
celle cité rien ne peut entrer de
fouillé/Et aux Ephes. 5.que celle E-
glise est sans macule & ride. Mais
ce qu'a dit lob , preíque tous l'ont
entendu des demons auíquels Dieu
trouua mauuaistié.Ce qu'encoreque
soit vray , me semble estre insuffi
sante responce pour ce passage de
lob. D'autant que la force de l'ar-
gument seroit petite, s'il disoit que
Dieu à trouué mauuaistiè auxdia--
bles : à plus forte raison donc aux
hommes. Car quelle rnerueilk est
ce de trouuer mauuaistié aux dia
bles ì Lc léns me semble donc estre,
qu'il parles des Anges mesmes bien
heureux , non qu'en iceux Dieu
ait trouué vrayement de la mauuai-
stié,c?est à dire coirlpe : mais qu'eux
menues (..fi on les compare- acec.
Dieu )semblent encoré auoir coul-
pe, tout ainsi qu'au chapitre ij: il dit :
que les estoilles ne font pas nettes
au regard de Dieu,.non parque
vrayement elles ayent quelque ma
cule , niais que leur netteté compa
ree à Dieu , ipeut sembler immefa-
Kij .
Traicte' des ; Angií,
dice. L'on pourroit adiouster icjr
encore ce que dit sainct Paul à la
premiere auxCorint. 6.ch. nesça-
uez vonspas(ditiil) que nous iuge.-,
rons les Anges ì Ils ont donc qudU
que chose de peché. Quelques au--
theurs,cóme recite ChrisoILHom..
líSat la mesme Epistre par les An--
ges ont entendu en cet endroit- liesi
Prestres : mais à quel propos eut dit
cela sainct Paul ? Preíqúe tous les;
autres autheurs comme Chrylost-
Ambroise , Heyr. Theodoret , Pri-
masius,Theophilacte aux commen
taires , l'Ont entendu des diables,-
qu'ils diíent deuoir estre iugez'pan
comparaison , par les hommes. En
ce qu'eux estans de tres-excellente .
nature ont peché , & les hommes
fragiles auront imitéla vie Angeli-^
que. Cela est bienvrayimaisil sem^í
ble que sainct Paul veut bien dires
quelque choie daplus.:Carx:e.h'efl[>
pas grand ca* de iuger les diakiesi .
mais iugerles bons An^BSC7est.vne.'
grande choie. HientebA^ciCjrfiçeiíirj
à m'oraiaduis-i 'non pasv:qu!ert£Íía%i
nv P. Maidonat, ' rn
hous deliions iuger ceux qui n'ont
pas de peché, mais qu'en ce inge
nient les Anges assisteront , non en
estat de iugeans , ains de ceux qui
deuront çstre iugez. Mais les Apo-
-strcs seroitt assis fût douze sieges, en
sainct Mátt-rr. i9. ce qu'est propre à -
iuges. Et par ainsi , si les bien-heu
reux Anges ìiuoient quelque chosc
qui peut venir en iugement, ils íe-
roient iugez par.ies Apostres. Pres
que tous les autres autheurs anciens
ont accoustumé de parler ainsi de
cecy , qu'ils disent que tous les An
ges , voire & les heureux font mua-
fcles du bien au mal. Ce que semble
/ìgnifier autant que s'ils disoient,
qu'ils peuuent pecher. Ainsi en par
le sainct Hierosme en l'Epistre à
Damasùs,de la vision d'Esaye. Et
sainct August. de Iavryye religion
chap. i3. Et Gregor. aitípremier des
Morales c hap. 7 .& íwali4. des Mo
rales, chap. 5. &Tfid0i5e liure i. du
souuerain bien, ch. H. & Beda liu.
z. fur Iob,ch.8.Damá!Ícenus liure z.
de la foy -chap. 3. Les Schoiastiques
K iij
Traicte' des Anges,'
ont tres-bien expliqué comme cela
íe cloit entédre,que les Anges soient
muables & puiilent pecher , fi l'on
regarde leur nature , & non pas la
grace & felicité qu'ils postaient.
Comme a declaré l'aucheur des en-
seignemens Ecclesiastiques 55?.

i—T-—— .' I ;;" 11


QUESTION CINQVIESME,
SI LES. B I E. N -H E V REVX
Anges meritent plus gran
de felicite. ,

LE maistre des Sentences , liure


deuxième , distinction cin
quième a pense que les bien-heu?
reux Anges meritent tous les iours,
non vne nouuelle beatitude : ains
celle messme qu'au commencement
ils receurent de Dieu. D'autár qu'ils
l'eurent fans aucuns precçdens me-
rites:mais qu'ils le meriteroi et apres
par seruices à venir. En ceste opinió
fut Prepositus autheur de ce temps
là : comme recitent les Scholasti-
--ques en celle distinctió. tyais à boa
6V P. Maldonat. nir
droit cette opinion est repudiee par
les Theologiens. Car si la felicité
estoií donnee de Dieu pour les eri-
íuiuans merites , la grace serost
donnee aussi : attendu que la felicité
fe donne à cause de la grace. Mais
. que la grace premiere se donne pour
les merites , cela est contre l'Escri-
ture. AuxRomainsn.sipar les œu-
nres, non pas donc par la grace. S.
Thomas en la premiere part- quest.
62. art. 9. recite l'opinion d'autres,
qui ont pense que les Anges meri
tent maintenant non la beatitude
qu'on nomme eírentielle,mais l'ac-
cidentelle : c'est à dire nouuelles
ioyes qui arriueront quelquesois
aux bien-heureux. Selon ce qui est
escrit en sainct Luc i5. Les Anges
se resiouylsent au Ciel fur vn pe
cheur qui fait penitence, &c. S.Th.
respond beaucoup plus subtilement.
QjTencore qu'aux bien-heureux ar-
riuent nouuelles ioyes , toutesfois
elles ne font pas donnees pour le
present merite des bien-heureux:
ains que c'est le fruit de la beatitude,
K ihj
Traicte des Anges,
qu'ils prennent pour les meritci
precedentes. D'autát qu'apres qu'on
. est paruenu à la derniere lin , il" n'y a-
plus de lieu pour les merites.

LA SECONDE PARTIE
DE LA DISPVTATION.
, de la distinction des
bons Anges.

LE s Theologiens ont enseigné


vne double distinction des bons.
~ Anges: l'vne des Hierarchies , l'au-
- tre des Ordres. Nous ne lisons pas.
rien aux fainctes lettres touchât les.
Hierarchies , mais le teûnoignage
de íàinct Denis Areopagire doit
auoir beaucoup de credit. Lequel
au 6. chap. de la Hierarchie EccJeC
alseure qu'il auoit appris par les dis
ciples des Apostres , ce qu'il nous n
laiííe par escrit des Hierarchies. Ad-
ioustons que les Hebreux encore
ont eu leurs Hierarchies d'Anges.
rChose qui tesmoigne que la tradi-
:tion eu a eûé perpetuelle. Or Hie-
íarchie est.(í-J'-on regarde au nom)
vne Principauté sacree : si le fuiect,
certaine Republique saincte des
ministres de Dieu, composee de dî
ners ordres. Comme Hierarchie
Ecclesiastrcque est vne Republique
d'hommes i'eruans à Dieu en diuers
Ordres. Sainct Denis a fait triple
Hierarchie,Legale,Ecclesiasticque,
& celeste.Legale appelle-il ceste re
publique du vieil testament, la Si-
-nagogue: laquelle comme .dit sainct
-Paul aux Hebreux i0. estoit seule
ment des biens futurs. Et parce ce
fut quelque repi blique puerile.
IL'Ecclesiastique nóme-il celle que
nous aoós en l'EglueEuangeliquei
laquelle n'dstpas seulement ombre,
ains figure de celle qui est au Cielj
Comme móstre sainct Paul aurnes-
mc endroict. La republicque des
Anges-il la noiftmC'celeste,exempre ~
de tonne perturbation.- Les autres
Theologiens tint fait trois Hierar
chies :1a terrestre ( en laquelle ils ont
eópris k legale tk l'Ecclesiastiqu'e:)
la celeste à c'est hdi&ì l'Ahgelicqué fc
- K v
- Traicïe des Ancts*
îa sur-celeste , sçauoir est -la diuiné
qu'ils ont dit és períbnnes estre la
Trinité. Ainsi L'a eícrit Altislldoren-
sis au deuxième liure de la somme
Theologique, & Aurricus liure 4.
Bonauenture au deuxième des Sen
tences , distinction 9. ôc Taranta-
sius en Dionysius en la mesme di
stinction , question premiere. Et
Guillelmus Parisiensis en la deu
xième partie de l'vniuers.. Mais
ces Theologiens n'ont pas-pris gar-
-\JrrUns^ qu'ils fauorisoient fans y pren,-
Htresit- dre garde à l'heresie. òc erreur des
Arriens.Car cefurét les Arr-iens qui
anciennement. constituaient. Hie
rarchie entre les personnes de. la
Trinité : Coihpárans la- personne
du Pere , ài'Eueíque : du Fils , au.
Prestre : du sainct Esprit, au Diai-
<rcy comme escrit sainct Athanase
au premier dialogue de la Trinité.
Sainct Denis a d'abondant ensei
gné que. les Hierarchies celestes
(c'est àdiredes Anges) estoief trois;.
En vne chacune desquelles y a trois
«©rdres d'Anges.En la premiere le?
'' v A '
- »r F. ' Maldonat. ii4
Cherubins, les Seraphins , 8c des
Throíhes.

DE LA PREMIERE
HIERARCHIE.

DEs Seraphins est fait seulement


mention en Eíaye cha.6. Com
bien qu'il en soit fait en autres lieux
plus obscurement Sc par periphrase
comme au Pseaumeió3- Q^i fait
ses Anges les Esprits : & ses mini
stres le seu bruflant , c'est à dire
Seraphin : car c'est ce que signifie •
ce mot. Et en íainct Paul aux He
breux chap. i. Or nous lisons deux
offices des Seraphins : l'vn qu'ils
chantentà Dieu cet Hymne Sainót,
Sainct , Sainct, en Esaye 6. & l'A-
Ecâl. 4. L'autre est qu'ils purgent
hommes d'ardeur de charité.
Car nous lisons qu'vn Seraphin fut
" cet Ange, lequel ayant pris vn char
bon ardant de í' Autel, toucha les
leures d'EÍàye 8c les nettoya. Nous
lisons en outre que les Seraphins-
IRArCTE DES /iNcics,
sont proches du Throsoe de Dieu~;
Suprême qui monstre qu'ils sontlessuprèmes.
fi elle des Anges. Nous lisons encore au
fa"7 ^ i*e^mel*eu'"^u€ &tìk Serapkaw
j)ieil* ont six aules. Ce que íerable signi
fier queux seuls ont autant- de di
gnité , que tous ceux de l'Ordre in--
ferieur en ont ensemble. Car en
l'escriture les autres íbnt ordinaire
ment depeints auec deuxaistes.. En
core lisons nous qu'auec deux de
leurs ailles ils couurent la face de
Dieu , des autres deux les pieds , 8c
des autres deux qu'ils voilent.. Ce
- qu'Origene Homelie premiere íùr
, Esaye,. & íainct Hifflofine en UEpiT
stre àDamàseenus deíá vision dE-
saye,dkntaiióii vne ekgajite aile-,
gorie : c'est que personne «e peut
máBtgp coghoistreenlafàcede Dieu, c'est
^*f^ à.direles choses precedentes la crea
tion dumûnde : ne les pieds , c'est
dire ce que íêra apres la nu du mon-
de:ains seulement les choses du mi
lieu , c'est adire, ce qu'on peut <:o-
gnoistre en Dieu par les choses
-creées. Cecy encore- est à. noter,.
-u V l. ÌVIAJ.ÌJUHAT. IIJ
qni est escrit par le mei'me sainófc
Hieromie au mesme lieu , qu'an
ciennement fut introduit enl'Egli-
se vn erreur par aucuns , qu'en la
preface de laMelle-ils disoient : qui
és alîìs fur Cherubin & Seraphin,. -
combien qu'en l'cscriture nous ne
liions iamais qu'ìLíbit aflìs surSera-
phin. H faut r*ter encore Terreur
d'Ongene en THomelie premiere ^rrm''
fur Elaye qui estima Seraphin n'e- „ç
stxe pas Ange,ains le Fils & le sainct
Esprit: de maniere que ce n'est pas
fans cause qu'il a esté nommé par
d'anciens autheurs , l'autheur de
l'Arrianismc. Le second Ordre est
de? Cherubins: deíquels la mention
est fott frequente en l'escriture. Or chin^
tous ks autheurs Grees & Latins lcMr
preíque interpretent le mot de C he- "om'
rubin,multitude descience. Mais les
Hebreux estiment generallemenr,
qu'il signifie toute figure.. Les autres
«stiment qu'ils ont esté nommez
Cherubins,comme enfans:d' autant
qu'aux escritures ils font tousiours
depeints en forme puerile.. Nous
iRAICTE DES ANGES,
cognoislons par les lettres íainctcs
qu'il y a trois proprietez des Che-
7 -;ew rubins. La premiere est,qu'il est dit
tfiií sur que Dieu est assis fur eux au pre-
Us cbe- mier liure des Roys ch. quatrième:
rubms. il apporta de là l'Arche du Seigneur
des armees assis fur les Cherubins.
Et au liure z. chzp.6.ÒC au liure 4.
chap. i3. & au pBmier du Paralip.
. - i3. & au Píeau. i7. Il est monté fur
le Cherubin & a volé , il a volé par
dessus-les aifles des vents. Et auPf.
79. Toy qui sieds fur Cherubin,fois
maniseste. Etau Pseau.98. Et Efaye
chap. 37. Et en Daniel 3. Tu es be
nit qui regardes les ábysmes & és
assis fur Cherubin. Or Dieu est dit
s'asseoir fur les Cherubins ( comme
ie pense ) pour íîgnisiancc qu'il
gouuerne toutes choses íâgement.
Car estre assis , est le propre du gou-
uerneur. Et parce fainct Paul Va.
pris pour le meíme à la premiere
aux Corinthiens quinzième que
Iesus Christ est assis , & regne,
& gouuerne TEglisse , parce donc
que Cherubin signitìe abondance
bV- P. MuVI/DONAT. II(T
íe. science : Dieu est dit estre aíîîs
fut' iceux. Leur féconde proprieté-
est qu'ils tirent le char de Dieu- charde
En l'ECclesiastique 46. En Eze- Dieu.
chiel premier, & i0. Ce que ligni
fie aussiyque tout ce que Dieu fait,
il le fait- sagement. Car que Dieu
soit rrainé íïir. vn char , ce n'est au
tre chose , sinon- qu'en quelque
maniere il se disposa à faire quel
que chose. La troisième que les
ièuls Cherubins fònt dits en l'eí-
eriture estre. pleins d'yeux. Est
Ezechiel premier & i0. Cè qu'est la
messme chose.D'autant que les yeux
signifient preuoyance ou vigilance:
laquelle apparoist en les petits fer- Tbrcsi
uiteurstirans son char.Le 5. est Tor
dre des Throfhes: Desquels S< Paul
- à fait mention aux Coloscences I.Est
quel endroit Caluin a nié.temerai-
tement , que Throfhes signifient
aucun Ordre d'Anges. Car íainót
Paul vouloir reciter en c£t. endroit
que les choses inuisibles , que peu
auparauant il auoit dit auoir esté
creées de Dieu : Encre lesquelles
Il nombre les Throfnes^Puiffances,
Dominations,Et parce , ce n'eìt pas-
moindre impudence de nier que'les
• Throíhes foitl'Ordre d'Anges, que
les Vertus & Puillànces. Or ils
font nommez Throíhes ( comme
:estime D ionyfius au chap. i3. delai
Hierarchie Ecclesiastique ) parce
-que naturellement ils íont aptes à
xeceuoir Dieu. Mais , comme dit
fainct Gregoire en l'Homelie^; fur
les Euangiles, Throfnes senommét
îreçe cte ils d'autát que Dieu se sied en iceuX,
pu-- nón en la messme maniere qu'aux
Cherubins. Car aux Cherubins il
est affis comme Gouuerneur : aux
Throíhes , comme luge. Selon
ce qui est escrit au Pseaume 9. Tu
t'es aísis fur le Throfne , toy qui iu-
ge la iustice : Et encore- au messm&
Pseaume.il a appareillé son Throf
ne en iugement-. De ceste maniere
ont entendu les aucuns ce que Dieu
aditaux Apostres , En sainct Mat
thieu i9. Vous encores serez affis
fur douze sieges yc'est à dire fur les.
Throíhes meímes en iugement.. Et
dv P. Maldona t.' 1i7
ce qiie Icsus Christ dit en fainct
Matthieu 14. Vous venez le fils de
l'homme venant auec ses Anges,
c'est à dire seant és Throsnes.

LA SECONDE
H Y E B. A R. C H I E.

LE premier Ordre de la 1. Hie- IW-


rarchie , est des Dominations. nM"ns
Desquelles fainct Paul fait mention í"".r~
aux Ephes. chap. premier , Et aux ^jg
Coîocenses premier. Orjls fe nom- nome^
ment Dominations,ou d'autant que
ils ont puiilànce fur les hommes
(comme veut S.Gregoire ) ou d'au
tant qu'ils exercent domination en
tre les Anges inferieurs , comme
veut fainct Hieroíme fur le chapit.
premier aux Ephes.. Ou bien parce
que par leur ministere Dieu exerce
iadominatió fur les hommes , com
me aucuns pensent. Le 1. Ordre est
des vertus : Desquelles parle fainct
Paul aux Romains 8. aux Ephesiens.
premier. Et fainct Pierre en lapre.-
Traicte' des Anges,
miere Epist. ch.3. Et cóme d'autres
estiment par tout là où au vieil Te
stament il y a, Dieu des vertus, cela
s'entend de meíme. Comme au Pf.
13.47 .58.79. 83. 88.67. Os çes Anges
fc nomment Vertus ( comme perËse
S. Hier.)d'autant qu'ils corroborent
les autres Anges pour faire ce qu'ils
doiuent. Mais cóme peníë S. Greg.
ils se nomment Vertus,d'autant que
parleur ministere se font les mira
cles. D'autant que les miracles ont
accoustumé estre appeliez Vertus
à la premiere aux Cor_u. Le 3. Or
dre est des pui fiances : desquelles
parle S.Paul aux Ephesi.&3.& aux
Colos.í. Sc 2. Et S .Pierre en la pre
miere Epistre. ch. j. & se nomment
Puissances (comme pense S. Hier.)
parce qu'ils exercent puissances fur
les Anges inserieurs. Ou (comme
dit sainót Gregoire ) d'autant que
par leur ministere Dieu chaise les
diables-. I. '
cv P. Maldonàt. iiS

DE LA ÏROíSI,ESME
HIERARCHIE.

EN la troisiesme Hierarchie , se
premier ordre est des Princi- rmct"\
pautez: desquelles parle sainct^Paul'. *******
aux Romains 8. aux Ephefifrts i.
aux Colocenses premier. Orils se
nomment Principautez ( comme
pensent; presque tous les Sçhola-
stiques ) tT autant qrçe premiers de
tous, ils ont accoustumé d'executes
les mandemens dç Dieu.Or(commc
dit sainct Hierosme au mesme en
droit ) d'autant qu'ils font Princes
fur les Anges inferieurs. Le second, Knhaa^
est Tordre des Archanges : comme gtu
dit S- Paul en- la i. aux Thessaloni-
ciens chapitre 4. & en l'Epistrede
S. Iude. Lesquels sont nommez Ar
changes , poùr estre superieurs aux
Anges,comme-veut S. Gregoire. Lei
Anges annoncent les petite s -çho*
ses : les Archanges les plus gran
des.- Le dernier. - est Tordre des
Traicte' des AnpEs,
Anges. De tout ce discours il faut
noter ce que fainct Hicrasme' eH a
noté de la maniere de parler- de
fainct Paul,qu'il íe collige vn argi-
ment certain , qu'il a dit de s Ordres
des Anges,il l'á dit selon la' traditsôn
des Hebreux. D'autant qu'il ne par
le pasjd'eux comme de choies inco-
gneuesains comms des choses vul
gaires en proposant seulement des
exemples. U aflèure encore que les
Hebreux fonr neusOrdres d'Anges,
differents feulement da nom. Et
qvi'encore Iamblicuç autheurprofa-
ne ( qui apprint beaucoup des He
breux ) au liure des mysteres des
Egyptiens recite les mesmes Or
dres, -'- ii. : *:

fi GSM 1 w-»,
DES OFFICES DES
-.t. ♦ A n g e s.

NOus colligeons des fàinctes


lettres qu'il y a dix offices des
bons Anges. Le premier est de gar- (
der.Ordeía garde des Anges il peue
DV P. . M~AJ.DONAt.
auoir plusieurs questions. La pre
miere s^l~y~à~querqiïës Anges qui
íònt gardiens des Royaumes & pro- ^„zes
uinCes. A quoy ie respons, que cela pûtimi
se collige ouuertementfdu i0. ch. de des Vra.
Daniel: là où est n.6mé le prince des *'™**:
Grecs , le Prince des Hebreux, & le
Prince des Períês , & le Prince des .-- "
luiss. Le mesme ontcolligé les au» '-"
theuJ's anciens duch. 3i..du Deut.'
L'ayestabLy les limites des peuples:
& de leurs Princesqui furet en icel-
le selon le nombre des enfans de
Dieu:c'est à dire des Anges- : comme
fi ì chacú d'eux il aaoit assigné Chá-Í
cune prouince. Ainsi en a esçrit;
Clement auliure des recognítionst '
Et Clement Alexandrin au liure ''. . :
sixième des stromates , Et Theodo-- ^ ('
ret oraison dixième sur Daniel , Et - ;- ; ;
Isidore:m li; pttemier du soUueràïh: i
bienichapáre ro. y>- - 1
-Vi\A ìml k ìuu : .:'jì
y -( -/ s.-nnA su-si .;i •'- li ;
: ì lv%Á .'ò-st j;iÁ-Siì .'k'ríÍìuci

ív' j .î:. ì '-


Traicte' des Anges,

DEVXIESME QVESTION,
Sl LES EgII O ^-Xtlllít
' - auflìjleurs- Anges í'r.->
-..i. 'gardiens. -'

iJnfts~ TT\E cecy encore la tradition a


gardiens J[ yesté perpetuelle qu'vne1 cha-
4"Egl.- cune Egliíe a des Anges par les-
quels elle est gardee.Commc dit S.
Hilaireíur lePleaumc.iZ4.&Greg.
Naziarïzcnus en l'oraiíon qu'il pro
nonça deuant i^c-. Etiennes. Et.S.
' Hierosme líurje i. oh. dël'Eccl. Et
l'autheur desCommentaires siir l'E-
Chacun pistre aux Cor. attribueìzs à S. Hier.
€hreftií en la i .Epistre chap.i i Xa 3 .question
est si tour çpacun Chrestienà son
r»ckm Angegatâitn«- le respons que cela
' ' se cplligcauín del'Escrifure,auGe-
nese^S. l'Ange qui m'adeliùré de
— tous mes maux. Et en íàinct Mat-
. thieu i6. Leurs Anges voyent
tousioúrs la face de. mon Pere. Et
au i1. des Actes : c'est son Ange,
sçauoir est de sainct Pierre. Auffi
BV P. Maldonat. IlO
i ce esté tousiours la tradition de
/Eglise. Comme il appert de Iustin
quest. 30. de celles que les Gentils
proposoient aux Chrestiens , 5c
Lactance liure z. chapitre i5. Et S.
Basile furie Pseau.j3.& 58- & le
8, chap.d'Efaye,& au liure du sainct
Eípritchap. i3. Et sainct Chryíbst.
Homel.do.íúr S. Matthieu. Et en
l'Homelie 40.de l'œuure imparfait
sur S. Matthieui Et S. Hierosine sur
le ch. (íí.d'Esaye. Et sur le ch.i8.de
S, Matthieu. Et de Theodoret li. 5.
des decrets diuins, au ch.des Anges.
Et en l'otaiíon i0. fur Daniel. Et S,
Gregoire au 17. liure des Morales
chapit. 7. Et Isidore liure premier
du fouuerain bien chapitre dou
zième. Et ne íe trouue aucun au-
theur qui ait iamais niè «là. La
quatrième queûion est à fçauoir,
si non seulement à chacun Chre-
stjen , ains à chacun des autres ,ont
esté donnez des Anges gardiens.
QHgene en 1 Homelie 5. fur sainct
Matthieu , fait obscurement men
tion de l'opinion d'aucuns , qui ont
--t ' Traicte' dès Anges,
pense qu'il n'estoit point donné
d'Anges pour la garde , sinon aux
baptiíéz. Et Chrvíostome semble
auoir fuiui cette opistió^n l'Hom.
cinquième de l'œuure imparfait.
Mais cela est ouuertement contre
l'escriture,& contre ce qui est escrit
en sainct Matthieu dixhuitième,
leurs Anges voyét tousiours la face
dé mon Pere,d'autát qu'ils n'estoiét
pas baptisez.L'opinion donc de tons
les Theologiens a tousiours esté,
qu'il n'y a pas vn hóme qui n'ait vn
Ange , voire , & que l' Antechrist
meíme en aura.- Encore meíme y eit
í *Jn- cu qUi ont pèse qúe Iesu's Christ '
techrifi messme cut çon Ange gardien ( mais
cela est abfurde.)Et que ce fut celuy
qui le consolaj comme il prioit-, En -
sainct Luc iíí AltisSdorensis l'ësti- !
ma ainsi áu deuxième- liure de'iîi'
somme Theologíque:mais temferai-
rcmït.Cai' luy-quiestoit Dieu-, n'a-
uoit pas besoin d'Anges pour k gar-
t.C n en dèï,aiíis pouf IcseraihGbrhme ripits •
*%Me.- lisons ;en S. Matrhieù quatrième -
qn^apres k tfehtatión i;Ìës Anges le :
v seruoient
fev P. Mamosax m
íêruoient. La 5.quest. est sichacun
homme adeuxAnges,l'vn bon,Pau-
tremauuais. Ie respons , qu'il s'en sìchn-
peut colliger quelque choie de l'es- c«nhom-
criture. Car il est desia verifié que me a x.
tout chacun à vn bon Ange ; mais ^"S"
qu'il ait vn raauuaisAnge,no us l'ap- bom °"
prenons par l'exemple de S. Paul UAÌS^
qui dit: iîm'aesté donné vn Ange
de Satan qui me soufflette , &c. Et
en outre , ç'a esté la perpetuelle tra-
ditió, 8c des Hebreux, & des Chre-
stiens. Touchant la tradition des
Hebreux , le Rabbin Mpse le tesl
moigne au liure 3.Moré,cha.z5. De
la tradition des Chrestiés, il est ma-
fcisseste.Car premieremét ce tres-an-
ci en liure .qui estoit nommé , du
Pasteur , auquel estoienc contenues
plusieurs traditiós , contenoit-enco-
re oette-cj^ çómePontaccoustumé
d'alleguer presque tous les anciens
autheurs.. Cette Epilfcreaulìì.»qui fut
longuemèat entre les Chrestieas,
qu'6 disoit de Barnabas , enseignait
le mesine. Comme tesmoigne'Ori-
gene ectl'HomeUi,su£:S.LucJ&;au
Traicte'. des Anges,
j. liure du Periaxchon ch.ix.Il con
firme la meíme tradition. Et Callîa-
nus en la collation 8. ch.i7. & en la
collat. i 3 .ch.i 1. & Beda íur le i i.cha,
des Actes tous lesquels citent ce tes-
moignage du liu. du Past. En outre
Çhrysost. enJ'Hom. 40. de l'œuure
imparfait. Et Gregor:. Nyssenus en
la vie de Moyse. La 6. question est,
quand ont esté donnez les Anges
Qumì gardiens au genre humain. Lactáce
ils furet liu. 1- chap. i5. semble auoir esté ea
dmne^. cette opinion que les Anges ne fu
rent pas donnez aux hommes , auant
le deluge. Ce qu'encore que ne
puisse parauanture estre resuté par
aucun tessmoignage de l'eícriture , a
heantmoins esté dit legerement,
contre l'autho'rité de tqus les autres
qui en ont esserit. Sainót Hierosmc
aulïï fur le quatrième chapitre de
-l'Epistre aux Ephesiens, recite l'o-
piniond'aucuns,qui íêmblent auoir
pense, que les Anges ne furent pas
donnez aux hommes auant l'Ascen-
sió de Iesus Christ au Ciel : & qu'il
jçs enuoya comme en íàplace. Maií
*iv P. Maxdokat. i11
Cela est aisement resuté par les pa
roles de Iesus Christ : leurs Anges,
voyent tousiours la face de mon
pere. La septième question est,
. quandtc'est qu'à vn chacun les An-
ges font donnez. Origene en l'Ho-
melie cinquième fur S. Matthieu,
dit qu'aucuns ont pensé qu'à per
sonne n'est donné Ange , sinon
apres le Bapteíme: d'autant qu'au-
parauant, l'on est sous la puiliánce
du diable. Il semble que S. Cnryso-
stome ait -íuyui la mesme opinió en
l 'Homelie 66. sur sainct Mat. Au
cuns ont estimé qu'ils sont dónez à
chacune personne d'auffi tost qu'el-
leest coneeuèau ventre de la mere.
Et ce fut l'opinion d'aucuns Scho-
lastjques : comme recite Bonauen-
tureau z. des Sentences distinction
ii. partie z.question 3.M.i!S tous les
autres-ont suyui l'opinion de sainct
Hierosme sur le dix-huictième
chapitre de sainct Matthieu , qu'à
tout chacun est donné l' Ange gar
dien , incontinent qu'il est né. La
huitième question est , si à l'vn
Traicte' des Anses,
en sont donnez plusieurs , à l'autre
moins. De cela les Theologiens ne
disent rien : mais il me semble que
de l'escriture il se collige , que par
certaine loy comme ordinaire à
chacune personne bonne ou mau-
uaise en est donné deux : mais aux
amis de Dieu par quelque sienne li
beralité , communèment íbnt don-
\J»x nez plusieurs Anges. Car cela me
itm pi»- semble estre signifié par cet exem-
P'*rt pie au quatrième des Roys , cha-
rarJiens P*0* í^izieme : ^s ^ont en
' grand nombre auecques nous
. qu'auec eux. Et semblablement
ce que nous lisons au Pseaume jj.
L'Ange du Seigneur enuoycra à
Pentour de ceux qui le craignent &
il les delivrera : les Hebreux lisent,
l'Ange du Seigneur campera sont
autour de luy , comme s'iidisoirt
pour deliurer les iustes , il ne vien
dra pas seul ,&ins aràehefaauec luy
vne armee d'Anges. Le meíme se
colUge du Pseaume nonante-, il d
donné charge pour toy à ses An-,
ges , afin qa'ils te gardent , &c.
OV P. -M'ALDOiíAT.- Ili
comme si particulierement -les- An
ges gardoient les iustes. Car sainel
Hieioí'me à tres-bien noté fur le i
quatrième chapitre de sainct Mat
thieu , que le diable proposant ce
passage à IcfUs Chrift , l'accommo-
da mal à luy , attendu qu'il se de-
uoit entendre de l'homme iuste , 8c
non de Iesus Christ,qui estoit Dieu.
Lçs Theologiens croyent proba-
• bkment aulïì qu'aux hommes pu-
- bliques íbnt donna plusieurs
Ánges pour leur garde , & non aux
priuez. La neufíéme question est,
attendu qu'aux hommes font don
nez plusieurs Anges , s'ils íbnt tous
pareils en dignité. Laquelle que- Si Us
stion est née des paroles de sainct tAnges
Matthieu dîxhyiclt : leurs Anges Sard'",s
voyent tousiours la face de mon °"'^a'
Pere , comme si les autres ne la
voyoient pas. - Et veritablement
Origene en 1" Homelie trente cinq,
fur sainct: Luc , par ces paroles a
confirmé son erreur : que les An
ges heureux , quelquesfois pour la
negljge'ce qu'ils empíoyoient à gar- .
Tr.ai.cte' des Ahges.,-
der les hommes , perdent leur bea
titude. Caril penlequele sens fut,-
que les Anges des enfans voyent
touíîours la face de Dieu , d'autant
que les enfans ne pechent pas: mais
les Anges des hommes la voyent
quelquesois, & quelquesois. ne la
voyent pas , d'autant que les hom
mes pechent quelquesois. Mais cet
erreur a esté refuté. Sainct Chry-
íòstome enThomelie 66.fur faines: .
Matthieu est en opinion que tous
les Anges heureux ne voyent pas la
face de Dieu , ains ceux seulement
qui font du suprême ordre , comme-
plus proche : Ôc que le sens est: leurs.
Anges voyent touíîours la face de
Dieu, c'est àdire , ils ontdes Anges
gardiens du superieur ordre plus-
haut que tous les autres. Ce qu'il-
verifie par l'estcc! , d'autant qu'ils-
voyent là face de Dieu. Cecy en-
coie est defia refuté. D'autant que
tous ceux qui sont heureux voyent
la face de Dieu. Theophilacle en,
ces Commentaires pense que voir
la face de Dieu/oitle mesme , qu'a-
' êv P. Maiìdoítat. i24
uoir Dieu propice. Et, que les An
ges des - enfans voyent tousiours là
Face , signifie auoir Dieu appaiíè
à ceux qu'ils gardent,d'autant qu'ils
ne pechent pas. Et les autres n'en
sent pas de meíme , parce que les
autres hommes pechent. Par aduan-
ture Dieu n'a pas voulu en cet en
droit preferer les enfans aux autres
hommes , ains les desendre seule
ment ( d'autant qu'ils sembloient
deuoir estre en nulle estime ) d'au
tant qu'ils font en estime enuers
Dieu qui leur donne des Anges
voyans tousiours fa face.
La dixième question est : si les ' !eS
hommes font quelquesfoïs delais- \ nPcs
lez dés Anges qu ils ont pour gar-
dìens. Origene dit en la seconde dûment
Homelie íúr Hieremie ,.& fainct l*t hom-
Bernard en la septième Home- meu
lie,- fur le Cantique des Cantiques,
que toutes les ibis que nous pe
chons , les Anges gardiens se par
tent d'auec nous,selon ce.qui est es-
crit au Pseaume 87. Tu as esloi-
gné mes amis de moy. Et encore.,
L iiij
Traicte' des Anges,.
ta as chalíé loin de moy ceux de m"3t
cognoiiíánce. Etau Píeaume trente
sept , ceux qui estoient pres de moy
s'en tindrent loin. Laquelle allego
rie n'est pas à resuser , combien que
le sens de la lettre íbit autre. Les
autres ent creu que les Anges ne
s'en vont point , sinon lors qu'ils
voyenr que s'est fait du salut de ceux
qu'ils gardent. Ainsi l'estime Ri-
enrdus au second des Sentences , di
stinction vnziéme. Les autres ont
dit qu'ils ont accoustumé de s'en
aller de ceux qu'ils yoyent desia
confirmez en grace , & ne pouuoir
pecher , comme fait Altiíîidoren-
sis au second liure de la somme de .
Theologie. Mais la commune sen
tence dès Theologiens est que les
Anges s'en vont bien quelquesfois
de place , ne laistàns pourtant pas
leur office. S'en vont aulîì quel
quesfois d'autant qu'ils relaschenc
le soin & cure de garder les hom
mes. Car en cette maniere auflï
Dieu est dit s'en aller d'auec les pe
cheurs. Ils verifient cec^ de ces pa-
X»V P. MaLDO-NÀT.
rôles d'Efâye , chapitre cinquième, N
I'osteray fa haye , fte il sera foule:
c'est à dire , i'osteray la garde des
Anges & ils pecheront à leur fan-
tasie. Et des paroles de Hieremie,
chapitre cinquante'^ vn , nous a-
uons medicamenté Babylon, & elle
n'est point guarie , delaiifons là , tk
allons vn chacun en son pays. Car
il semble que ce font les Anges qui
parlent, leíquejs y estoient enuoyez
de Dieu. La vnzième est , si les silet
Anges sefaschentaucunernentpour singes
les pechez ou aduersitez de ceux gardiens
qu'ils gardent. Sainct Ambroise au s'M-
finquième liure des Epistres , Epi- cì""''
stre vingt-huictième , estime que s"
les Anges se faíchent non seulemét
pour les pechez , ains de leur mef-
ine office de gardiens :'fainct Bona-
uenture dit aulîi que quelques
Schol'astiques ont esté de ceste opi
nion , fur le deuxième des Senten
ces , distinction a. seconde partie
questiom g. Ce qu'ils prouuent pre- .
miereraent par Efay.e chapitre 33..
les Anges de paix pleureront ame-
TrATCTe' DES' AnGES^
rcm'enrJ& du i5. chapitre de S.Luc:
les Anges se resioityisent sur an pe
cheur taisant penitence , &c. Car si
vne nouuelle ioyearriue aux bons
Anges de la penìtéce des pecheurs,
pourquoy ne leur arriuera douleur
de leur impenitence ? Au surplus il
est bien certain qu'il y a aux bien
l>ouleur . heureux Anges aucune douleur có-
dese^n- jointe auec quelque perturbation,
S"' & toutesfois qu'il y a certaine dou
leur s c'est adire quelque deíplaiíîrj
tel que Dieu le reçoit de nos pe
chez. La derniere question est , en
quel sens il faut prendre ce qui se
Cmme ^ que jes ^\n„es gardiens cOm-
es raf battentencr eux : corne nous liions
Síe^LíS- en Daniel chap.io. S.Hierosme aux
lattent Cámétaires sur ce paflage,&-Theor
*ntr'eux..doretu? en l'oraison io.sur^Daniek
Et S. Gregoire au i7 . liu. des Mora>-
les ch.7. respondent, queles Anges
cóbattententr'eux , non d'euxmesi-
jnes,& comme auec des armes , ains
par les merites , ou pechez de ceux
qu'ils gardent. Il estbienditqueles
Jtngés viennét les vns contre Jes au

cv P. Máldgnat. i16
tres(dit S.Greg.)d'autant qu'ils con
tredisent entr'eux les merites des
passions qui leur íbnt subiertes. Car
comme. vn chacurr prie pour celuy
qu'il garde, & comme celuy duquel
les merites font plus gráds,furmon-
te , il est dit aussi que son Ange a
vaincu. La z. office des bons Anges
est(comme nous colligeons de l'Ef-
criture ) d'estre enuoyez faire quel
que chose, encore qu'ils ne soient
pas gardiens. Les Theol. disputent,
de qviel ordre les Anges ont accou-
stumétl'estre enuoyez.Et veritable-
mét S.Denis Areopagite au c. i3. de
la Hierarchie Eccles. & S.Th.en la
pre. par. que.iu.ar.i.auec plusieurs
autres Theologiens, ont pense qu'il
n'y a que les Anges de la plus balle
& moyenne. Hierarchie qui ayent
accoustumé d'estre enuoyez: & que
les autres assistent tousiours à Dieu.
Selon les paroles de Daniel au ch.7.
Les autres ont dit que iamais A nge,
ne sont enuoyez que de la plus balle
Hierarchie. Et de cette opinion; S.-
Thomas faijpmention au deç -
- 1RAICTE DES ANGES,
Sentences , distinction dixième»
question troisième , & Bonauen-
tureenla meíìne distinction quest„
i. les autres ont dit, que .tous en
tierement font enuoyez. Et ç'a
esté l'opinion du maistre des Sen
tences distinction 10. EtdePropo-
íîtusautheurdecetempslà,& d'Al-
tiísidorensis , comme recitent les
Scholastiques en la rneíme distin-
M*Uo- ction. Et ie iuge cette opinion tres
vraye : car íainct Paul aux EpheC
<hap. premier,fans exception les a£-
seure , tous esprits seruans enuoyez
au ministere.Mais il parloit lors aus-
- si des Seraphiîas qui font au í upré-
me ordre : car il les auoit nommer
flammesde feu.En outre,quand Da-
nid dit au Pseaumc i03.Qu.Ì fait ses
Anges les vents , & ses ministres le
íeu brustant , ouuertement par le
£e\i braflant signifie les Seraphins
estre enuoyez aux hommes mes-
me , comme ministres de Dieu..
D'auantage , en Esaye chapitre si
xième , nous lisons : que ÍVn des
-Seraphins fut enuoy épour nettoyer
DV P. MALDONAT. IZJ
les leures d'Efaye. On peut adiou-
ster , qu'à tous les ordres des Anges
est attribué le nom d'Ange, qui lì-.
gnitìe menager ; ils íònt donc tous
messagers , ce qu'ils ne pourroienr
estre,s'ils ne font enuoyez. Letrois- -yOfsicr-
ié.mc oíEce est d'annoncer : mais
tous les Anges qui font enuoyez, '
ne font pas enuoyez pour annócer,
ains quelquesois pour faire autre
chose. Car l'Ange qui luitta aue£
Iacob , n'estoit pas enuoyé pour
annoncer , ains pour luitter. Et
TAnge enuoyé au iìís de Tobie , ne
fut pas enuoyé pour annoncer airis
pour le conduire. Leur quatrième ^.Offa
office est d'offrir nos prieres à Dieu.
Comme nous apprenons par le li
ure de Tobie chapitre douzième.
Lors que tu faisois tes prieres auec
larmes , & ertseuelissois les mortsr
Et laiilant ton diíher , tu cachois ert
ta maison les morts , pendant le
iour,& les enseucliflòis la nuiób
l'ay presenté ta priere au Seigneur..
Et du huitième chapitre de fApo-
4alypse. Ed'autre Ange vint & da-
Traicïe ces Anges, .
meura deuant l'Autcl ayant vn ere-
ctfnsoir d'or,& il luy fut donné plu-
- sieurs choses à bruflei pour donner
^Office- des oraisons des saincts. Leur cin
quième office est , de prier pour
nous. Comme nous colligeons du
premier chap. de Zachanc;: là où
î' Ange prib Dieu en ces paroles:
Seigneur des armees msques à.quád
n'auras-tu point pitiéde Hieruíàlé,
' éc- des villes de la Iudee , &c. Et
cela meíme signifie cet autre office,
d'offiïr nos prieres à Dieu. Car ils
ne les offrent pas pour autre occa
sion, sinon pour aider aux nostres,
' y adioignant les leur. Autrement
quel besoin est-il d'apporter nos
prieres aux oreilles de DieuîEtpar-
ce Caluin messme a esté contraint
de consesser cecy au liure troisiè
me des Institutions , chapitre 20.
c&05" Leur sixième office est d'inciter les
hommes à .bien faire. Ce que nous
colligeons' des paroles de lacob au
Genesc 48. chapitre. Où il declare
qu'il a esté gouuerné par l' Ange en
cloute fa.vie.Et du liure deTobie cb. -
' "' DV P. Málbonat. IlS'
"S. où l' Ange a exhorté le fils de To^
bie,qu'auant s'approcher de fa nou-.-
uelle eípousse, ilappaisast Dieu par
oraisons. Et de 1a i. EpistreanxCor.
chap. n. là où sainct: Paul dit qu'il
est incité par l'Ange' malin , à mal
faire. Et de là flsecollige au cótrai-
ic que les hommes sont beaucoup •
plus incitez à bien faire par les bons
Anges. Leur septième office est
de donner les recompenses mxbós-jloffrè^
&c punitions aux mauuais comme
ministres de Dieu. Conduisans les
bons au lieu de la recompense , 8c
ks mauuais au. lieu du supplice: i
comme il se cognoist par S. Luc,ch.
6.11 estarriué quele panure mour-
rut , Sc fut porté par les Anges an
' sein d'Abraham. S. Hierofme aúíîi
aux commentaires fur le 7. ch. de
Daniel , tesmoígne-que les meschás
font portez en enser par les mau
uais Anges. L'office des Anges
(dit-il ) est double: d'aucuns qui
president aux recompenses des lu
îtes : des autres qui president aux-
;íouxmens des mauuais. .Le. mesmej
lK.Al.CTli DES ANGÍJ,
semble dire S. Ambroise au liure 5".
Epistre ix. Combien que l'opiniort
- vulgaire des Theologiens est que
les bons font conduits au lieu de la
recompense,par les bons Anges: Et
les mauuais par les Anges mauuais,
%.Osfice. aulieudusupçlicc.Le S.estd'aífist«
. à Dieu &c le seruir comme nous li
sons en Daniel cha.7.0r les Theol.
doutét íî c'est vne meûne chose as-
ïtJ0er sister,& seruir: Et la plus gtáde par.
iírserutr t-e efl.jme qu'aube chose est aflìster
à Dieu : autre chose est luy seruir.
Et qu'alïìster est comme accompa
gner Dieu : mais ministrer, est estre
enuoyc pour faire quelque chose.
Quant- à moy i'estime que c'est en
tierement tout vn : d'autant que ie
trouue ceste hebraïque repetitió fi- .
P . -gnifiante vne mesme chose. Leur -
9- tfi"' nenfième office est de benir &
loiier Dieu : comme nous liions au
Pseaiune cent deux. Benissez Dieu
tousses Anges:EtauPseaume cent
quarante huit. Benissez , tous ses
xo. OjÇî- Anges, &c. Leur i0. office est , que
«. Jious liíbns en llescsituae qu'ils hx-
t>v P. Maldonat. i19
taillent pour les hommes,non seu- -
lement contre leurs ennemis spiri
tuels, ains contre les homes encore:
cóme en Exod.33.Dieupromer que
par l' Ange il extirpera toutes ses na
tions qui faisoiér la guerre aux luiss.
Et au 4.des Rois i9. cil est dit qu'vn
Ange , en vnenuicttuai85.mil de
ceux de Syrie.A cecy appartiét auflï
l'autre office,que les Anges meuuét
les corps naturels & les changent
quád besoin est.Carpar le ministere
des Anges, Dieu a de coustumed'é-
uoyer la peste. Comme il fe collige
du 2.des Rois,ch. 24. Et parce tous MlracU
ses miracles faits par Moyse en TE- àeMoy-
xode ( comme pense S. Augustin) /f &r*
ont eíte faits par les bons Anges: (ígf^
comme lesíniracles des Magiciens
furent faits par les mauuais Anges.
Nous lison . auffi en Daniel chapit.
dixhuirième qu'vn Ange transporta
Daniel iufques en Babylone. Et par
ce les Theologiens demandent auflî
en ce lieu , li Toflice de quelques
Anges est de remuer les ronds celé-
stes.Dequoy ií y eut quatre opiniós.
. Traicte' èes Angés,
Si les I^a premiere d'aucuns qui penserenf
.*JnZ" le Ciel estre remué par le lèul Dieu.
*Us*Tbs ^e ^aclue^e opinion sainct Thomas
A ts.
itelejt [. fait mention
... . au second des Senten-
.
ces , distinction i4. question pre
miere, art. 3. Et Albert le Grand en
la- me/me distinction , art. sixième,
laquelle opinion il afleure auoir esté
dePtolomeus & Alpetrigius Astro
logues. Or encore que cette opi
nion ne soit patauanture pas vraye,
elle a toutesfois quelque esspece de
pieté. La seconde fut des autres qui
penserent que les orbes celestes
estoient meus par trois principes,
premierement de Dieu, cóme d'ob-
' - iet , qu'ils nomment desirable : &
apres,de quelqueAnge qui les pous-
soit.En 3.1icu,parl'ame(flu'ils nom
ment ) du Ciel , non pas informee,
ains assistante. Laquelle opinion
certains Theologiens , Tcstimans
estre d'Aristote, ont embralìee ,có-
- me dit Albert le Grand en la secon
de partie de la somme , de la science
merueilleuse de Dieu , traicte vn-
.aième , question cinquante uoi$y
dv P. Malbona*. ijo
membre 3. La 3. est de S. Thomas
&c de presque rous les Scholasti-
ques qui croyent que le Ciel -est
meupar les Anges íèulement,d'au-
tant qu'ils peníent que ce fut l'opi~
nion d'Aristote. Et ©nt accoustu-
mé delaconfirmer , premier emenc
des paroles de lob, chapitres)- fous
lequel font courbez ceux qui por
tent le Ciel, fçauoir est les An^es.
Et de l'Ecclesiaste chapitre premier,
Lesprit tournoyant tout poursuit,
& le tourne en son cercle , il parle
du Ciel. Et par cê,il semble signifier-
par l'esprit. que l'Ange mouue le
Ciel tournoyant tout, & le meut en
rond.Ils le verifient encore par tes-
moignages des vieux autheurs. S.
' Augustin au liure huitième du Ge-
neíeielon la lettre cha. zo .enseigne
que l'cípritse. meut par temps,& nó
pas par lieu :. mais que le corps fc
meut.& pat temps 8c par lien ,dóc-
ques l'Ange meut le corps celestev
D'auantage.le messme S. Augustin
au mesme liure,chapitre vingt troi-
iìème & 'i4, enseigne y que Diea;
TruUcte' des Anges,
le Createur sousmec lá crcarure cor«
-porelle à la creature spirituelle. Ec
5. Gregoire au 4. liure des Dialo
gues , que Dieu meut les cor ps par
le ministere des Anges. Ceste opi
nion fut encore des Hebreux, com
me recite le Rabbin Mose au sécód
liure Moré, chap. 7. Et le Rabbin
Isaac, en l'explicationdu Dialogue.
Maisl'authem- duliure de lacognoií-
íànte de la vraye vie ( quiconque il
ait esté: car on l'attribué'à saint Au
gustin , au tome 9. ) asteure claire-
mét que le Ciel est meu par les An
ges. Ils verifiet auflì par raisons',que
le Ciel,n'a pas d'ame,il n'est dóc pas
meu par soy , ains par autre qui le
poulse : Et que ce ne peut estre.par
autre , que par vn Ange. En second
lieu , "iì le Ciel estoit meu par soy
- mesme , comme semblent estre
meuè's les choses pesantes & lege
res , le mouuement du Cfel seroit
naturel. Or il ne peut estre natu
rel : d'autant qu'aucun corps na
turel ne sc meut lors qu'il est en
son lieu naturel. II ne peut donc
&v P. Maldonat. i3i
naturellement estix esmeu par soy.
Tierccment , si le mouuement da'
Ciel ne sefaisoit parvn Ange , ains
procedoit naturellement du Ciel
meíme , attendu que la foy no-.is
apprend qu'apres la fin du monde
ie Ciel se reposera , il s'ensuiuroit
que ce repos seroit violent au Ciel
comme estant contraire aÙTnojue-
ment naturel. Mais cela est absur
de. Il ne se meut donc pas naturel
lement. La quatrième opinion fut
(celle que i'estime plus digne des
Theologiens ) de ceux qui ont pen
sé que le Ciel estoit meu par le mi
nistere des Anges , mais par certai
ne vertu naturelle & propre. Et
de ceste opinion sainct Thomas à
fait mention au second des Sen
tences , distinction quatorzième,
question premiere , article troisiè
me. Et Bonauenture en la. meíme
distinctioh,partie &conde,question
deuxi ême : Car en premier lieu , la ~
costtraite - opinion ne semble pas
anoír esté introduite aux escoles,
sinon d'autant qu'elle a esté d'Ari-
. TuAicTf' des Anges,
Cmtfe stote , & cela de soy messme est va
ftprtfr* gsanj vjce. Ec apres quand bien elle
tftme». p0Uirojt' auoir quelque aurhorité
par Aristote , elle ne l'auroit pas
maintenant. D'autant qu'Aristote
n'a pas dit pour autre occasion que
le Ciel estoit meu par les Anges , si
non par ce qu'il a pense qu'vne ver
tu finie estant en vn corps , ne pou-
uoit mouuoir par inlìny temps. Et
par ce il colligea le Ciel ne pouuoir
estre meu.de fòy , parce quil pen-
; !ía son mouuemenr deuoir estre éter
nel.. Mais maintenant nostre re
ligion nous apprend , que le mou
uemenr du Ciel ne fera pas eternel:
doneques Aristote raeííne s'il fust
deuenu Chrestien , eust changé d'o
pinion. Tiercement ce principe
d'Aristote est faux , qu'vne vertu fi
nie , corporelle , ne puiífe agir par
xemps infiny : car par son opinion
meíme la venu d'illuminer au So
leil est corporelle &par íbn aduis
il illuminera par temps infiny. D'a-
uantage, il n'est venu en l'entendc
DV P. Maldonat. i31
ment d'aucun des anciens : que ie
lçache,dedirequeleCiel suc meu
par les Anges : Et l'escrtmre ne fait
preíque aucune mention de cecy,
cela n'est donc pas le deuoir d'vn
bon Theologien de Paflcur«r.radT
iouste encor qu'il semble estre con
tre toute Philosophie & raison,
d'attacher aucunement des creatu
res spirituelles tres-excellentes, aux
rondeurs celestes, à ce que comme
quelques potiers ils les tournent.
Aux atgumens , ie respons ainsi : à
ce patïàge de lob chapitre neufié-
me. Ie dis premierement qu3en Her Kes}"net'
breuxonlit autrement , sçauoir est <MX ar'-
sous luy seront courbees les aydes f^'**
puilïantes. Et le sens en est,qu'iin'y- ~ '
a aucune puitlànce qui puilîè eftre
comparee à celle de Dieu„ Caries
hommes mesme qui sont estimez si
puiílans &c ont accoustume d'aider
aux autres' seront pliez sous la puis
sance de Dieu, . .
•Qifencores si nous vouli 6s siiiure
nostre propre &c commune version,
Traicte' des Anges,
ie respons que le íêns est : fous le
quel font pliez ceux qui portent les
rondeurs , c'est à dire les Princes,
leíquels d'autant qui gouuernent
tout le rond de la terre , semblent
porter la terre sur leurs espaules. Et
c'est ce que ce mot semble signifier
en l'escnture : comme aux Hebreux
premier , & portant toutes choses
par fa puissante parole. Touchant
au passage de l'Ecclesiaste , ie res-
pons ainsi , comme les Hebreux
interpretent qu'en ce lieu le mot
£esprit ne signifie pas vn Ange,
ains l'air. Çar s'il signifioit vn An
ge , les mots n'auroient pas le sens
conuenàble. D'autant que l'Ec
clesiaste vouloit prouuer qu'il n'y
a rien de nouueau fous le Soleil:
& pour verifier cela , il n'a verita
blement peu prendre aucun Argu
ment des Anges. Ains a com-
•meacé d;argumentcí par. degrez,
<lés leCiel iusques en la terre:& a dit
:jKemieremení que lç Soleil se leue,
$ç iç couche. Et aptes , que l'esprit
(c'est à dire l'air qui est sous le
Ciel
DV P- MáIDONAt. i 3 j
Ciel entournc tout & s'en reuaàson
cercle. Finablement queles.riuieres
s'escoulent dans lamer 2>c*n reuien-
nent. Quant aux tesmoignages de
Si Augustin & Gregoire , ie m'es-
bays que les Theologiens les ayent
employer- Gar ou ils ne; preuuent
rien ou ils preuuent plus que les
Theologiens ne veulent , & que la
raison mesme ne peut porter. Car
lors que sainct Augustin dit que
i'esprit meut le corps par temps &
par lieu. II ne párlepas à'vn corps
celeste ains de tout corps : Et quand
il dit que la creature corporelle est
suiette à la spirituelle , il traicte de
toute creature. Et lors que.sainct
Gregoire dit que Dieu gouuerne
la creature corporelle par les Anges,
il parle semblablement de tout le
mondfc corporel. 11 estoit donc ab- . . .
surdê <le colliger par ces paroles
que tapierre ne se meut pas vers le
íías , he le corps ccleste finon par -.- •.
Jes^À'ngès. Et quant à l'autheur du
liufede la cognoissance de la vraye
viCjie respons qu'à peine doit-il estre
M
l'RAICTE DES ANGES
- escouté en la Theologie , d'autant
que ç'a esté quelqu'vn fort recét qui
n'estoit point homme de grand
iugement ne de grande doctrine.
Mais aux raisons qu'on apporte, ie
respons qu'en vne mesine manie.
re j en vne chose il n'y a pas vn seul
mouuement naturel. D'autant que
si l'on considere l'eau , entant que
c'est quelque chose totale y naturel
lement elle est meuë vers le bas : Si
l'on la cohsidercentant que c'est
certaine partie de l'vniuers, elle mo
te aussi naturellement , comme ie^
pense pour remplir le vuide, de peur
-que la liaison de l'vniuers ne íe re-
íoluë. Ie dis de mesme que si 1e ciel
«st consideré , entant que quelque
-corps naturel ,il.ne peutestremeu
naturellement en son lieu naturel.
fcecìeJ 'Et leurs raisons ne verifient autre
femeut chose que cela. Mais si on le consi-
ttaturtU dere entant que quelque partie de
jamo. l'vniuers, il est meu naturellement
^our la conseruation de 1'vniuers.
Et parce lors que son mouuement
ne sera point necessaire pour cette
DV P. MA £ DONA T- I34
fin , il se reposera lors naturelle
ment. . . '

DES DEMONS.'

LE traicte'des demons est de trois


parties. En la premiere il faut
parler du peche' par lequel les de
mons ont este' faits mauuais. En la
deuxiesme , de la distinction & dis
ference des demons.En la troisiesme
de la puissance, actions, & deceptiós
d'iceux.La premiere partie se termi
ne par sept questions. La premiere,
uel fut le peche' des Anges : La z.
quelqu'vn d'iceux peena le pre
mier. La troisiesme si celuy là fut au-
theur du péché aux autres. La qua-
triesme qui furent les autres Ànge$
quiensuiuirent le premier pecheur^
La r. combien grand a este le nom
bre deceuxqui pecherent. La 6. s'ils
pecherent de maniere , qu'il ne leur
íbit yeste' aucun remede" de salut.
La séptiesme comment & quandils
furent punis de Dieu, De la pre-
Traicte' des Anses
miere quest. il y eust 8. opinions des
Theologiens. La premiere & plus
ancienne, fut de ceux qui penserent
que le premier peché des Anges fut
la luxure : d'autant qu'ils descendi
rent du ciel,pour abuser des semmes
<juiestoient desia faites. En laquel
le opinion fut Iustin martyr. Et Ter-
tulien au liu. de Voiler les Vierges,
&Methodius au liu. de la Resurre-
€tion,& en Sixtus liu. 5 . de la Biblio-
íhecque.Et S. Ambroise en la t. Apo
logie, pour Dauid,& au i. liure des
"Vierges: & Sulpitius Seuerus tout au
.commencement du premier liu. de
l'Histoire sacree. La z.fut de Lactan-
-ce qui semble auoir pense' que tous
les Anges ne pecherent pas par lu
xure , ains aucuns seuteKrient qui
àuoiefit esté donnez gardiens aui
hommes áuoir esté "attirez à cou
cher auec les semmes. La troisiesine
fut desEscot au 1. deí'Sen. distinct.
sixiesme,question 1. artide 2. Qui
dit;auslî que îà luxurìé fut le prèmier
peché fies Anges hon la luxu
re de la chair , ainscelle dcl'csprit,
dv P. Maldona t. i3/
d'autant que l'Ange nc se pleut pas
assez en ces biens naturels. Et l'on a
accoustumé de se mocquer de cette
opinion aux escolles des Theolo
giens : combien qu'elle ait este' de
Clemens Alexandrinus au liure
Stromatum. Laquatriesme futd'au-
tpes qui pensent que leur premier
peche' fut l'enuie qu'ils auoient con
tre l'homme nouueau nay:pcuri'a-
uoirveu faict & formé à l'imagede
Dieu. Laquelle opinion est recite'e
par sainct Augustin au liure qua-
triesme de la Resurrection. Et par
CaíEanus en la collation huicties-
me, chapitre neusiesme. Or est -elle
subtilement resute'e par sainct Au
gustin , que l'enuie naissante de l'or-
gueil n'est pas le premier peché. La.
cinquiesme fut celle qu'on attribue
à sainct Bernard & à plusieurs Scho-
lastiques , & nommément à Ale-
xander en la troisicsme partie , que
stion deuxiesme , membre trohies-
me , que leur premier peché fut,
qu'eux sçachant que Dieu scroit
fàit homme a ils conceurentjenuic
N iij
Traicte' des Anges
contre l'homme. Laí. fut sans doir-
te du mesine sainct Bernard en
l'Homel. i7. sur le Cantique des
Cantiques. Que les Anges furent
enuieux de Thomme , preuoyans'
qu'il obtiendroit ausii grand gloire
qu'eux comme par apres Iesus
Christ dit: ils seront eígaux aux An
ges de Dieu.La7.fut d'aucús moins
anciens , comme recite Altisidoren-
sis au deuxiesme liure de la somme
Theologique-, qui dirent que ce fut
omission. Iem'eíbahys qu'ils ne con
siderassent qu'ils n'auoient- rien
qu'ils n'eussent receu de Dieu. Cet
te opinion encore qu'elle soit vraye^
n'est pas subtile. D'autant que les
Theologiens ne nomment pas pe-
ehe d'omifllon , toute omissionjains
c-elle seulement de laquelle toute la
vertu & nature consiste en l'omis-
sion du precepte. Comme- de ne
rendre pas le depost , lors qu'il le
faut rendre. M ais encore qu'au pe
che' des Anges il ak eu quelque-
omission de consideration , ou d'au
tre chose en icelle , parauenturc que
o y P. Mal d on à- t. i56"
toute la nature d'icelle ny consistoit
pas. La huictiesme (laquelle est seu
le vraye ) fut que le premier peche' Origine
fut orgueil. Et cela nous enseigne trer*
Vescriture au i0. chapitre de l'Ec-^ne)fe
elesiast. Le commencement du pe
che' est l'órgueil. Et cela monstrent
les paroles d'Esaye i4.. Comment
es-tu ch'eut Lucisser qui te leuois da
matin ? Laquelle parole est dicte
aux superbes. Et en lob, chapitre
quarante & vn. Il est Roy fur tous
les enfans d'orgueil. Ceste opinion
auffi a este' receuë par vne perpetuel
le tradition. Ainsi en escrit Basi-
lius en l'Oraison de 1 orgueil , sainct
Ambroise au 10. liu.Epillrc Sj.&au.
3. Sermon, sur le Pseau. ii8. & Sr
Augustin l.u.du Genese selon la let~
trechap. i4. & i6. &au liu.ii.de la-
Cite' de Dieu chap.6.Et sainct Chry-
sostome Homelie i 5. sur sainct Iean^.
Et sainct Greg.au liu.5. des morales.-
chap.23.Et sainct Hierosme sur le i6.- y
cha. d'Ezechicl. Etceluy qui fut au-
theur des questions à Antiochus.
question 6. Et Prosper liure premier-
M iiij
Traicte' des Anges
de la vie contemplatiue chapitre '3.
CommtftEt Damascenusliu. ì.de la royìcha^
dtùprí- or les Schdastiques disputent
illp'jl" en quel sens se d'oit prendre que lé
du dia- premier Ang. ait peché par- orgueil:
Ht. c'est à dire comme il faut entendre
ces motsr ie monteray aw Ciel y & se-.
ray semblable au tres-hauti Car le
diable a peu vouloir en plusieurs
manieres estre semblable à Dieu . Er»
premier lieu , en desirant que Dieu-
ne fust pas , ains desirant estre vray
Dieu luy-mesme , esgal au vray
Dieu. Secondement en ne desirant
paslavraye diuinite', ains quelque
íemblance de diuinite', plus grande
que naturellement il ne l'auoit:
c'est à dire la felicite' qu'il auoit lors,
mais ' 1 -auoir desire' fans le moyen
de Dieu & comme l'ayant voulue
obtenir Dieu le voulant 0ii ne le
voulant pas:pour le troifiesme en de
sirant cette mesme semblance non
pas fans Dieu , mais toutesfois fans
consideration d'iceluy , c'est à dire
ne pensant pas qu'il í'auroit par le
moyen de Dieu : pour le quatriesme
nv P. Maldonaï. i0
en desirant ceste semblance moin
dre que la sienne naturelle, airns la
naturelle seulemem qu'il auoit def
ia en partie , voulant ioúir d'icelle
mesme sans Dieu. Pour le cinquies-
rne en desirant ceste mcfmc sem
blance de nature,non pas fans Dieu,
mais toutesfois ne le considerant
pas comme autheur de la nature.
Doncques S. Thomas & plusieurs
autres Scholastiques font en opi
nion que l'Ange ne pecha pas au
trement sinon qu'en ceste cinquiess-
me maniere il acquiesça moins en i
fa selicité naturelle , ne la rese
rant pas, comme il deuoit,à Dieu. MaU*
Mais quant à moy , les paroles d'E- n.w.
faye me persuadent fort de croire
que l'orgueil de l'Ange fut plus
grand. Car ces mots ie monteray
au Ciel , & m'aflerray fur les Astres,
& seray semblable au tres-haut,
font d'vn Ange non content de
fa naturelle beatitude qu'il auoit3 .
ains desirant quelque chose de plus
prand. Quelqu'vn demandera, que
desira-il donc de plus ; le resspons
M v
TftAtcTE'- des Anges
vp'û ne me semble pas probabîe
qu'il ait desire' d'estre Dieu en la pre
miere ou seconde maniere susdictes.
Car quicroira vn Ange creé recen-
tement , auoir tant oublie' toute îa
science & cognoiífance en laquelle
ìlauoit esté creé, que d'auoir desiré
ou que Dieu ne fut pas , ou qu'il fut
le vray Dieu , ce que ne se pouuoit
faire , non pas que la volonte' ne
soit encore quelquesfois des choses
impossibles comme sainct Thomas
pense. D'autant que la volonté &
election est double : l'vne preceden
te' qu'on nomme conditionelle,
comme quád ie diSjie voudrois qu'il
y eult vn autre monde. L'autre con-
îccutiue , qu'on nomme esficace:
lors que non seulement quelque
chose est desirée auec condition-,
ains absolument , de maniere qu'on
met la main à l'ceuure. Et par ainsi
fi nous regardons à la premiere vo
lonté & election , il me semble que
Scotus est de bon aduis au deuxies-
me des sentences , distinction sixies-
'çttie, question premiere , que VA nge
D-V P. MaidoN ATV IjS
a peu auoir ceste peruersc volonte.
Ie voudrois que Dieu ne fut pas , &
que ie fusse Dieu. Car ceste volonté
& election encore qu'elle ne soit
efficace & absolue' , toutesfois suf
fit pour faire vn tres-enorme for-
faict. Mais d'autant qu'en Esaye Lu
ciser ne dit pas, ie voudrois, ains
d?vne volonte' &- election esficace,
ie monteray : ie ne croy pas que le
premier Ange ait peche' en la pre
miere ou deuxiesme maniere , ains
en la troisiesine desirant vne sem-
blance de la diuinite' plus grande
quelasiennenaturclle,fans conside--
ration de l'Autheur duquel il la dcr
uoit receuoir.

... LA SEC O N DE. k..


ÇVV E S T J O N. . . . j; '

IL est euidentpar l'eseriture que


quelqu'vn des demons pecha le
premier. Et cela signifient les mots
4'Esayechap44.Çómentes-tu tom
be Lucisser;. Et; les paroles d'Ezecb
Tk-Aicte des Ange»
i8. ch. Tu as estéChcrub. aux deli
ces du Paradis. Et en S. Luc io.Ie.
voyois Sathan comme vn foudre
tombant du Ciel. Et en S. Mattb,
i5. aile» au seu eternel preparé au
diable , & à ses Ang. Mais les Theo
logiens ont accoustume' de derrian-
Pe qutl der de quel ordre fut celuy qui pe-
oráre cha le premier. A laquelle question
tíìoit Ul. 1 r^ 1 .m c j -
aucuns ont.reipondu , quil rut du
fuhcur. plus bas ordre des Anges. Comme
Lactance liure ì.chap. i5. Et Dama-
scenus liu.2.de la foy,chap. 4. De la
quelle opinion faict mention S. Au
gustin au liure vnziessmedu Genese
íelon la lettre chapitre dixsepties-
me. Les autres ont pense' que ce fut
vn Archange : comme S. Ambroise
aux Commentaires fur le 4.chap. de
fainct Luc. Les autres (& c'est main
tenant l'opinion presque de tous)
qu'il fut du superieur ordre de tous
les Anges. Comme escrit Metho-
dius aux reuelations chap. prem. Et
Chrysost.en l'Hom.d'Adam& E*ie.
Etenl'Hom.delacheutedu i. hom
me } fk S. Greg. au liu. 5 z. des M ©ra
dv P. Maldonat. IJ9
les chap. 14. 25. & 26. Et Isidore au
liure premier du Souuerain bien ch.
i2.Il se peut encore demander com
ment se nommoit celuy quî premier
pecha. Ie-respons qu'en l'escriture
iladiuersnoms,mais n'en a aucun
propre. Gar il se nomme serpent
au Genese 3. D'autant que celuy
qui deceut nos premiers peres est
estime' celuy qui pecha le premier,
il est dict dragon en l'Apocalypse
i2. i3. & i6. & ic. il est nommé Be-
hemoth en Job 40. il est nomme' Le-
uiatham au mesme endroit." Et en
Esayech. 27. il est nomme' Lyon ru
gissant, en la premiere de S. Pierre
chapitre 5?. il est nommé Lucisser , en
Esaye i4. est nommé Cherub. en
Ezech.28.il est nommé Sathan, c'est
à dire nostre aduersaire , en S. Luc
Ki. il est nommé Beelzcbub , c'est à
dire prince des mouches, au 4. des
Rois à cause d'vn Idole consacré
aux mouches. Il est dict diable c'est
à dire nostre agueteur , en S. Matth.
25. Mais ces noms luy ont '_esté don-
iiez apres le peché. Et les anciens
Traictï' des Anges-
ont pensé que son nom propre sut
Sathael comme si vous disiez , ad
versaire de Dieu. Et en ceste opinion
est sainct Ghrysostome en ThomeJ.
d'Adam & Eue. Et enl'Homelic de
ia cheute du premier homme, . au (.
tome. '.

QV EST ION TROISIESME,


Si CELVY QJI PECHA
le premier fut autheur
de peché aux.
autres. .

SAimct Thomas au deuxiessme


des sentences distinction sixics-
me,question premierejarticle deux
iesine recite touchant cecy - trois
opinions. La premiere d'aucuns que
le peché du premier Ange n'estait
differend que de la' seule grandofur,
& non pour la durée «u cause, Ce
que semble estre contre l'escrkure:
laquelle monstre partout que celuy
qui pecha le premier fut autheur de
jpeché aux autresv Comme quand
t; V P. M A L D O N A T. i40
elle dit en l'Apdcalypse douziesme
qu'il attira auec soy la troisiesme
partie des estoilles,& en lob quaráte
& vniesme , qu'il est le Roy par des
sus toùs les enfans d'orgueil. La 2.
opinion fut d'autres qui penserent
que le peche du premier Ange pré
ccda le pèche' des autres & de gran
deur & de duree , & de cause, de ma
niere qu'il fut la cause d'iceluy, d'aui-
tant qu'il fut faict le premier. Ce qui
ne semble pas accorder à la raison-
D'autant que l'Ange ayát este' dam
ne' au mesme moment qu'il pecha,
les autres n'eussent pas ensuiuy l'e-
xemple du premier qu'ils voyoient
damné si son peche' eut preeedéde
temps.La tfoinesine opinion est cel
le de S. Thomas au mesme endroict,
& en la premiere part.quest. «^.arti
cle 8.Que le peché du premier Ange
-precede non de durée, ains de gran
deur & de cause , le peché des au-
íres , c'est à diise qu'il fut plus grand,
«& la cause d'iceluy. Ce qui s'ac
corde aux escritures. Mais les
Traicte' des Anges
Comm U ment celuy qui premier pecha fut
fecbeur caussc aux autres de pecher : Si ce fut
caáedc Par le seul exemple, comme lesPéla-
fschUux giens disoient qu'Adam nous fut
outra- caussc de peché:ou si ce fut encore en
les incitant & poussant au peche'. Et
de cela il y a deux opinions etale
ment probables. L'vne de S. Tho
mas , & de presque tous les Scolasti-
ques,lefquels estiment que celuy qui
pecha le premier 3 incita les autres à
pecher. L'autre est , de Ricardus &
d'aucuns Scholastiquessur le deux-
iesine , des sentences distinction
sixiesme qui ont pense' que parle
seul exemple de celuy qui pecha Iç
premier,les autres pecherent.
J3V P. M. A L D O N A T, i4i

QVATRIESME QVESTION,
D E <Ì_V EL ORDRE
estoient lesautres Anges
qui pecherent..

L"Opinion des Theologiens a


touGours esté , que de tous les
Ordres , aucuns pecherent.D'autant
que sainct Paul aux Ephesiens 6.
semble mettre entre les demons les
Thrones, principautez, dominatiós,
& les autres Ordres. II n-'y a que le
seul Caflìan que ie sçache , en la
collation quatriesme chap. i 3. & en
la collat. 8. ch.8. qui dit que tous
les Anges qui pecherent furent du
plu« haut Ordre : par les mots d»
l'Epistre Catholique de sainct Iude,
les Anges qui ne garderent pas leur
principaute' , comme s'ils auoient
este les premiers de tous. Et des
paroles du Pseaume 8 i. Mais vous
mourrez comme hommes & tom
berez comme vn des Princes,sçauoir
est des Anges comme il l'interpre-
Traicte' des Anges
maintenant encore. Le 4. s'ils ne
peuuent& n'ont peu , qu'en *st<au-
se. Lc j .s'ils font si efloignez dffaire
penitence., quemessmesils ne peu-
uent rien faire de bon . A la premiere
partie Origene respondit que quel
quesois tous les demons seront pe
nitence comme plusieurs autheurs
luyobijcent. S.Athanase au liure de
la commune eísence du Pere,du Fils
& du S. Esprit. Et S. Hier- en l'Ep. à'
Druitus & fur le i4. chapitre d'Eze-r
chiel.Etsurle j.chap;de Dan. &fur
le j. chap. de Ionas. Et S. Augustin
au i z. liure de la Cite' de Dieu cha
pitre i8. & 24. Ce qu'il colligeoit
en partie de la part des demons
mesines: D'autant que le Roy de Ni-
niue ( qui signifioit le diable ) fit pe
nitence en Ionas troisiessme chapi
tre ,& le Roy Nabuchodonoforen
Daniel cinquiessme. De la part de
Dieu , il le colligeoit : d'autant que
Dieu n'oubliera point d'vser de mi
sericorde , & en son ire n'arrestera
point ses misericordes : & ailleurs
quand tu te seras courrouce' tu te
©v V. Maldonat. i4 j
fouuiendras de ta misericorde & ail
leurs : 11 ne se courroucera pas eter
nellement. Mais ces choses premie
res sont allegoriques , & ces demie.
res Entendent des hommes, voire
.& de ceux qui viuent encore. Cat
touchant aux damnez , l'escriture
enseigrie,qu'il n'y a aucune esperah*
ce de salut pour eux. En l'Ecclesiastí
chap. n.quelquepart que tombe le
bois , il sera là. Et en Esaye dernier
chapitre , leur ver ne mourra pas, 8c
leur feu ncs'estaindrapaSj&ensaint
Matthieu 1 j. allez au seu eternel.En
ce que touche la seconde partie,
Scotus au deuxiesme des sentences,
distinct.6.question 2. article 2 . a dit
quelque chose merueilleuse contre
l'opinion de tous : c'est que le pe-
thé des Anges ne fut pas simple,
ains en grand nombre & diuers. Et
qu'entre le premier , & les autres ils
éouuoient faire penitence s'ils eus
sent voulu: laquelle opinion , par sa
íióuueauté est refutée. Quant à la
tróisiesme , tous les Theolog. fans
nul excepter, ont dit , & la foy l'en
- Traicte' des Anges
feigne aûflî , que les demons ne peu>
uent maintenant faire penitence.
Mais touchant à la quatriesme par
tie , les opinions des Theologiens
furent fort différentes. Car ceux qui
ont pense' que les diables n'ont peu
ou ne peuuent faire penitence , à
-cause que leur liberal arbitre est
înoyenen celuyde Dieu& des. ho
mes : Svauoir est que le liberal ar
bitre de Dieu est immobile , & de-
uant l'Election & apres. Le liberal
arbitre des homes est muable auant,
& non apres l'Election. Mais le li-
beralarbitre des Anges est mobile
auant l'Election , & apres l'Election
immuable. Cette sentence est reci
tee par fainct Thomás au deuxiet
me des sentences distinction 7 . que
stion premiere , article deuxiesmc.
Et est refutee d'autant que c'est ren
dre vnc raison fiour la cause,car c'est
le doute dont il est quest. Sçauoir est
si le liberal arbitre des Anges est de
telle maniere qu'apres l'Election il

ne se puisse remuer en autre partie.
La quatriesme opinion fut d'autres,
dv V. Maldonai, i44
c'est qu'apresJe peché , l'Ange nc
peut faire penitence d'autant qu'il
est indiuisible:de maniere qu'à quel
le chose qu'il s'applique il s'y atta
che tout entierement. Cette opi
nion aussi est recite'e par sainct Tho
mas au mesme lieu. Et est refutée.
D'autant qu'encore que l 'Ange soit
indiuisible de substance , toutesfois
en la vertu de l'action il est diuisi-
ble : pouuant ou plus ou moins a-
gir. La troisiesme comme recite 1c
mesme sainct Thomas, fut deceux
qui ont pensé que les Anges nepeu-
uent faire penitence d'autant qu'ils
pecherent par l'intellect qu'ils nom
ment deisorme. Cctte-cy est enco
re resutée. D'autant que la diffe
rence entre l'intellect de l'Ange &
de shomme n'est pas infinie. Et
parce elle- ne peut estre cause que
l'Ange soit par sa nature suiet aux
ïtipplices éternels & infinis : & l'hè
me aux temporels. La quatriesme
opinion estcelle que sainct Thom.
asuiui en la premiere partie questiô
soixáte quatriesme , article quatries
Traicte' des Anges
me que les diables ne peuuent faire
penitepee.., d'autant qu'ils font de
telle nature , que tout ce qu'ils ap
prehendent , ils /Vapprehendent
immuablement : c'est à 4lse de ma
niere qu'ils ne se peuuento departir
de leur opinion.: tout ainsi que nous
apprehendons les premiers prircci.-
pes. Cette opinioii entípre me sem
ble à bon drotct reproiuuée par plu
sieurs Theologiens. En premier
lien d'autant qu'il s'enfuyuoit que
les demons n 'auoient peu pecher.
-D'autant que sainfr Thomas con
fesse 4 ce qu?est vray, que,les'demons
furent quelquesfois bons ,& meri
terent la vie heureuse, Donques ils
apprehendent quelque . those de
bon : s'ils font donc idfc telle; nature
-qu'ils apprehendent i-mmuablemeof
il ne "pouuoient; pecher.:íît apres,
il me semble bien incroyable que
maintenant les diables'n'ayenp a,utf-
opinion qu« lors qu'ils pcghgrent.
Car qui doute qu'à pifçsentjLucV
ser nc eognoisse qu'U, ne; peut p^s
monter au ciel , & estre semblable
au
BV P. Maldonat. i4^
au tres-haut ? pour le troisiesmc que
S. Thomas aulii dit, que les demons
pecherent par inconsideration , &
non par vraye apprehension d'aucu
ne chose. Or il n'y a rien qui empes-
che que le diable ne considere à pre
sent cequ'auparauant il n'auoit pas
considere'.combien que parauenture
il apprehende immuablement. Ce
ne peut doncestre la cause pour la
quelle les demons ne font pas pe
nitence. En 4- lieu , tous les anciens
Autheurs enseignent que les bons
Anges ne peuuent perdre la beati
tude qu'ils ont : non pas à cause de
i leur nature ,alns à cause de la grace.
Donques la nature des bons Anges
n'est pas telle , qu'elle apprehende
immuablement. Encore moins donc
celle desmauuais Anges. La 5. opi
nion fut d'aucuns qui penserent que
les demons ne pouuoient faire pe
nitence , d'autant que Dieu engen
dre en eux de necessité vne hayne
de sadiuinité : par causes necessaires
& non libres concurrentes pour e rt
tirer vne hayne. Laquelle opinion
- ^T
. IRAICTE DES AlfGI-S
{ n'ayant point d'autheur ) refute
Gabriel Biel au deuxiesme des scn-
.tenees , question premiere, article
septiesme. Xa sixiesme fut presque
semblable du mesme Biel au mesme
lieuj&d'Occamau deuxiesme des
Sentences , question dixneufiesme,
quotlibet prem. question i4. Que
les Anges n attirent pas de necessité '
la haine de Dieu : mais toutesfois
que Dieu conserueeniceuxneces-
«iremét cette haine.Et parc£,qu'ils
jie se peuuent departir de leur mau-
uaise resolutien.La septiesme fut de
JMarcillus au deuxiesme des Sen
tences quest. 5-art. 3. Que Dieu en
tendre certaine habitude aux de-
jnons,laquelle les contraint d'auqir
le mesme Dieu enhaine.Lesquelíes
{rois opinions font indignes non
-seulement de la langue & sens des
Theologiens , ains de leurs oreilles
-encoiie. Car qu'est-ce autre chose,
sinon faire Dieu autheurde peché?
Voire & d'vn tres-grand peché ? la
huictiesine fut d'vn Autheur qui es-
criuit trois liur. des merueilles de U
Bt V. M ÂL D O H A T. i46
sainte Escriture au $. tome des ocu-
ures de S.August. lequel au liu. pre
mier chap. i. enseigne que le diable
ne peut faire penitence d'autant
qu'il csteheutde troohaut. Et par
ce ( dit-il ) estant tombe' il ne peut
retourner , pour estre dechcu d'vn
estat tres-haut.La derniere opinion
fut comme i'estime de presque tou*
les autheurs anciens : que la cause
pour laquelle les demons ne peuuët
raire penitence , ne se doit point re
chercher de leur nature , ains de
Dieu. D'autant que Dieu ne leur
donne pas la grace, encore qu'il la
donne aux hommes.De cecy les an
ciens ont rendu diuerscs raisons. La
i. d'autant que l'homme pecha par
la persuasion du diable , & le diable
sans la persuasion de personne: Ain
si l'escrit Greg.au 4.1iur.des Moral.
ch.^.Et S. Aug.aux Serm. de la Tri
nité: Le diable (dit-il) tomba par fa
malice , l'homme fut prosterne' par
.celle d'autruy. La 1. cause fut , d'au
tant que l'hóme par son peche ruina
toute fa posterite', & il n'estoit pas
Taisonnable que tout le genre hu
N ij
Traicte' DfcS iAlfGES-
main perit. Et parce Dieu n eust pas
tant de soin de rácheter les Anges
pechearSjqueles hommes.Cóme dit
S. Augu. en l'Enchiridion ch. zp.il a
. pleu(dit-il)à Dieu Creat.&gouUer-!
neurdel'vniuers, que d'autant que
toute la multitude des Ang. ne s'e-
stoit pas perdue en le delaissant , cel
le qui estoit perie demeurast en per
petuelle perdition. La 5 .est d'autant
que l'hôme pecha par l'infirmité de
la nature humaine : & l'Ange non
pas de mesme. Cette raison en ont
' xendu S. Ambroise au Sefcm. 8. furie
Pseau.i 18. Isidore lia. i .du souuerain
i,iéch. i ì.Casilanus collat. 4.cIU.i4.
Damascen.l.z. de lafoy ch. 5. La 4.
fut d'autant que le peché des demôs
fut tres- grand, parce qu'ils voulurct
«stre semblables à Dieu. Et par ainsi,
tout ainsi que Dieu semble aussi des
nier la grace de la penitece à qlques
personnes à cause de leurs enormes
pechez: ainsi la refnsa-il auxdemósà
cause de ces mcschácetez tresgrádes.
C'est la cause qu'en red C.hrysost.en
VHom.d'Àdá Si Eue. La j.futjd'aa-
*»c qu'incontinent apres le peche' les
d* P. Mai&onat. 147-
demós furent hors du chemin : c'est:
à dire hors du temps de meriter , ou
ne meriter pas: cóme font les homes
apres la mort.Cette raison en donne
Damascenus au H. ì.de la foy, cha.4.
ce qu'est (dit-il) aux hómeslamort,
lémesme fut la cheutc aux Ang. Et;
si quelqu'vn demande, Pourquoy
Dieu donna si bries temps de la voye
aux Anges, & aux hómessi long: ie
rcspons qu'il est vray semblable que
Dieu le tìt pour la fragilité de l'hom-
me. Quelqu'vn pourra obiecter que
S.Paul auxColocens.ch.t.semble di
re que I. C. est mort pourles Anges.
En iccluy îl fut só bó plaisir que tou
tes choses fussent recóciliees 8tc. Ce Si lesus
passage donna occasion à quelques chriP'fc
autheurs d'estre de cet aduis qu'ils fmsn
penfoîentvrayementquel. C.estott yinui}
mort non seulemét pour les homes,
ains pour les Ang. Entre lesquels fut
S.Hier.aux Gôment.fur le i. ch. aux
Ephes.cóbië q persône n'ait dit qu'il-' -
soit mort pour les diables , ains pour
lës bós Anges, aufquels ils estimoiét :
cftre qlque coulpe;Selon ce qu'cscrit
Niij
Traicte' DES ANGES
lob au i5.ch.en ses Anges il trouua
mauuaistié. Les autres ont pesé qu'il
«stoit mort pour lesbós Anges : non
pas qu'ils eussét aucune coulpe, ains ,
d'autant qu'ils en pourroient auoir.
Par ainsuxomme par laraort de Ie-
susChristles hommes ont este'deli-
urez du peché : ainsi ont-ils dit que
les bons Anges ont este' confirmez
en leur selicite', L'vnc & l'autre opi
nion me. semble fausse. Et d'autant-
qu'il a este' verifie' cy dess9 qu'aux bô*
Ang.n'a estéiamais aucune coulpe.
Et d'autát que c'est chose absurde ce
que Caluin a dit que par la mort de
lesits Christ les Ang.ont este' confir
mez en leurselicite' : cóme s'il ne l'e-
stoient pas auparauát. Les autres ont
beaucoup mieux entendu que I. C.
par fa mort auoit recócilié les hom
mes & les Ang.non pas à Dieu)d'au-
tant que Dieu n'estok pas courroucé
aux Ang.(aìns entre euxJParce qu'a-
uant que I.G.mourut les hômes ser- "
Hoiét au diab. Et parce les bós Ang. -
estoìét cóme courroucez contre les
Jiómes,Donqueslors que les homes
- DV P. M A ID O N AT. I48
par la mort de I.C. ont esté deliurez
de la puhTance du diab. la paix a'esté
au cunement faite entre les hommes
&les Ang. Et que pour cela les An
ges auoient chante' à l'aduenement
de Iesus Christ gloire à Dieu aux
lieux tres-hauts: &en terre,paix aux
homes &c. Ainsi le dit S.Chryso. en
la 3. Hom .fur l'Ep.aux Collocëfes,&:
au Serm.de l'Ascési.áu 3.tome}& Isi
dore au 1 .liu.du íouucrainbié cK.i1.
& l'autheur des Cóment.siirl'Episti
aux CollocêTes , attribuez à S. Hier.
Et Primasius fur le i.ch.aux Colloc.
Et Theodoret^Sí Theophilactus, &

Eph.Màis touchât à la 5. part.de ce-


ste e.q.ie voy qu'il y en a 4. opinions
desTheolog. í'Escot au 2. des Sent.
dist 7. quest. vnique : Et Gabriel au
mesrne endroit pen sent que les de- s,
mons peuuét faire quelque bien mo- **nl"
.... r 1 ,. . peuucnt
ralement , mais non mentoirement. ^rt -
Ce que n'a aucune probabilice' d'au- autant
tant qu?il est cotre l'opinion de tous Um
les vieux autheurs. S. Augu.ou qui
conque fut autheur duliu.de lafoy à
N iiij
TR.AICTE* DÈS AEMOKS
Pierre au' troisiesme ch. que lesde-
môs font tellement obstinez au mal
qu'ils ne peuuét peser rien de bien.
D'autres disent qu'ils ne peuuëtfien
faire de bien, ains que plustost en
chacune de leurs actions ils pechent
de plus en plus: & se meritêt de plus
grands supplices. Et ce fut l'opinion
d'Alexáder en la z-.part.de la somme
-de Theologie:& de Bonauenture au
1. des Sen. quest.7 .partie i.& quest.
3 . Et de Ricardus-Et de Tarentasiu*
au messme endroit , Les autres cóme
S. Thom. en la t. part. 2. quest. 89.
art.4. En 'a 24. question de la verité
1 1 .ai - C*. \-ím la vjucifc. j . A u mal^art.
ii. ont bien pensé que les demons ea
chacune de leurs actions pecherent:
mais que pour cela ils ne meritêt pas
de plus grades peines. Qu'ils pechet
bien d'autant qu'ils font cotre la vo
lonté diuine: mais qu'ils ne meritent
pas plus grandes peines d'autát qu'il
íont hors de la voye: c'est à dire hors
du temps de meriter bien ou mal.
les autres (entre lesquels est S.Aug.
en l'Enchiridion chap. troisiesme )
r>v P. Maldonàt.' r49
pensent que les diables ne pçuucnt K< p**.
-meriterplus grandes peines , nepe-
cher. Laquelle opinion me semble rhtt
fort probable. .

QV ESTION S EPT I E S M E
D £ S PEINES DES
demons.
y
€Ette question a quatre parties.
Car l'on demande communé
ment, fi les diables commencerent
d'estre punis incontinent apres le
Îiechc\ Et apres de quel genre de
upplices ils font punis. Et puis fi
leurs peines font eternelles ou non. -
Et finablement en quel lieu ils font
tourmentez. De" la premiere partie:
l'opinion de presque tous les anciens
Theologiens fut , que Ici diables ne
seront pas punis auant le iour du iu-
gement. Car tous ceux qui ont pen
se' que les ames des hommes dam
nez ne font pas punies auant la re
surrection , ont pense' cecy aussi.
Comme Ireneus au lin. ?. chapitre
Nv '
*Tït.Aìcrt.v des Anges
liu. 5. Et Iustin au Triphoac£
7 5 .& 7 6.àc celle que lesGétils pro-
pofoientaux Chrest.EtTertulié au
Hu.4.cótre"Marcíó,&au liur.du tes-
moignage de l'ame,& au cómencc-
nient du liure de laTrinite'. Et Ori-
gene Homel. 7.sur le Leuitique, &
Lactanceauliure7.chap.JLi.EtVi-
ítorinus martyr aux Commétaires
fur le ó.çh- de l'Apoc. Et Chrysost.
Homelie 9. contre les luiss , Hom.
39. fur la i. Epiïtre auxÇorinth. &
Homel.z8.sur l'Ep.aux Hebreux,&
l'Autheur de l'œuure imparfaict
Homcl.34.surS.Matth. EtSi.Amb.
au 2. Itu. de Cayn & Abel ch. 2. Et
au liur.du bien de la mort, ch-i o. &
1i. Et Prudétius enl'hymne pour les
defuncts , & en l'autre des dix Mar
tyrs de Cesar Auguste,& Aretas fur
lé 6. chap. de l'Apoc.Et Theodorct
& Theopbilacte. Et Oecumenius
furie ii. chap. des Hebreux. EtEu-
thimius fur le ij.chap.de S. Luc, -&
ì'autheur des questions à Anthio-
xhus attribueesà Athanafius,quest.
160. Et I'autheur4u liu. 4e l'eíprit
TFV MXIDONAT, lf0
& de l'ame faussemét attribuez à S.
Augustin ch. 48. Et encore mcsm«
l'on dit queIeani2.Pape de Rome
par decret public confirma ceste
opinion : finablement c'est iusques
auiourd'huy l'opinion desGrees,&
des Armeniens,desAnabaptistes,Sc
. .des Caluiniens. 11 semble que cestc
opinion se puisse trouuer par 2. tes-
moig nages de l'escritu*e : l'vn de la
z.Epist. de S. Pierre chap. z. Si aux
Anges pecheurs Dieu n'a pas par
donne' : ains les ayans dechassez , *-t.Jrg£
uec les chaines d'Enser illes a liurcz"""*-
aux plus bas lieux pour estretour-
mentez,les reseruant au iugem€nt,Jjf^u"
&c. l'autre de l'Ep. de S. Iude, mais
les Anges qui ne rescruerent pas
leur principauté,ains laisserent leur
domicilie, il lesareseruez sous les
tenebres attachez de liens eternels
pour le iugement du grand iour.
Ceste opinion n'est pas condam
nee de soy { qu'il m'en souuienne) ;
en aucun Concile : mai] d'autant
<ju'vne semblable a este condamnee
au Concile deFLorence , touchant
" N vj '
Traictè' des Anges
les ames des homes dánez ,cette-cy
encore semble condamne'e, car fi. les-
. hommes mourans en peché , font
Keftonct incontinent tourmentczjil est beau-
aux «r- coup plus croyable que les diables
g«wfn- je çQnt^ £t mcsmes attendu que les.
lupphees ( corne I.C. declare au ij- •
de S.Matth.)n'ont pas esté en i. lieij '
instituez pour les homes , ains pour
les diables : allez dans le seu eternel
qui est appresté au diable , & à ses
Ang. Dereches, personne n'a iamais
nie' que les bons Anges n'ayent defia
la iouïssance de la vie heureuse. Il ne
íè peut donc nyer que les mauuais
ne soient desia punis. A ces deux
tesinoignages de S. Pierre & Iùde,
ie reípós:Que pour trois raisons l'es-
criture dit que les diables font reser-
uez pour le iour du iugemét , cóbien
qu'ils soient desia punis. La pre
miere est d'autát que les peines qu'ils
souffrent maintenant ne leur sont
point adiuge'es par vn jugement
public3ain£ par la priue'e sentence de
Dieu.Orest-il necessaire qu'ils foiét
manisestez deuát le siege iudicielde
DV r« MAL D ON A T. IJI
Icsiis Christ comme les hommes en
core : afin qu'ils rendent compte,
non en priue', ains deuant les Anges"
& les hommes. Et parce il est die
qu'ils sont reseruez , comme pour
▼ne plus grande ignominie. La 2.eít
d'autant qu'encore que de's mainte
nant ils soient punis jtoutesfois ils
font en outre plusieurs autres offi
ces. Car ils tourmentent les hom
mes en diuerses manieres. Mais
apres le iour du iugement, ils n'ont
autre chose à faire que d'endurer.
La 3. est d'autant qu'encore qu'ils
soient maintenant punis , toutesfois
d'autant ;.que ( comme penserent
quelques Theologiens ) tous les
iours ils metirent plus grandes pu
nitions , l'on dit; qu'ils sont reser-
uez à ce iour là auquel ils rece-
uront la punition de leurs crimes.
Combien que cette opinion ne
soit vraye , -toutesfdis ceste-cy
( qui est de tous les Theologiens) est
vraye , que les peines des diables
seront plus grandes apres le juge
ment ^qu'elles ne sont à presentt
« non pas essentiellement , ains par
accident. Et parce il est dit qu'Us
font reserues , comme l'on dit estre
reserue' à la roue' celuy qui ce pen
dant est retenu lie' en prison & ce-!
pendant est puny & genenné. La se-.
conde partie de ceste question est
propre pour la fin du quatriesine li-.
ure. La troisiesme est traiítee desia
cy-desllis. Et à la quatriesme tous les
Theologiens refpondent fuiuans
í'opinion del'Escotaux Commen
taires fur le troisiesme de l'Epistre
les dU- deS.Iacques : Que les Diables en
bits nus. quelle part qu'ils soient,soit en Fáir*
soms en çQ-lt fous ja terre,endurent .tousiours.
us An. 'est°urmens du seu. Totit ainsi que
gts tous. les bons-Anges, lors mesines qu'ils
iourstn sont enterre, voyent tousiours la fa--
siikké. ccde. Dieu. "".y.;
i
FIN. :
TRAICTE'
DES DEMO MS;
DV P. M AL D ON A T
leíiiite Espagnol, eiv.
Tannee 1570..

Escritfius luy., faisant à Varissoit -


cours tk Theologie.

O v s auons accoti-
I stume' de disputer en-
! Theologie contre le*
! Athées , contre les>
I luiss contre íes Philo-
lbphes & contre lesheretiques : Or
ce font les genres d'aduerfaires que
le Theologien a de combattre, pour
deffendre la religion. Les premiers
d'eux, (qui ostent toute diuinite': )
,comme ils font fort estrangers & es
1 Ut5 UCMUHS
soignez de nostre religió : auíïï sont
athéei ^S barbares & fort cruels , mais.tou-
ùmides. tesfoisfort craintiss. Car comme les
Iosué 6. Gabaonites , ay ans entendu iadis
& 8.." -la prinse par assaut de Hierico Sc-
de Haï villes tres-fameuses , pour
- consemer leur vie , se rendirent
frauduleusement à Iosué ches des
Hebreux : ainsi les Athe'es procu-
rans (comme ils dient ) la seule paix
de la republique , ne se soucians en
rien de la religion;se soignent tous-
iours à la partie la plus forte. Mais
f it les Philosophes sont belliqueux , &
vú.bel- °e se rendront iamais sinon vàin-
Uq. eus par raisons : Comme les Cana-
ne'es , Amorrhe'ens ,Hethe'ens,Phe-
reTens ,& Gergese'ens ne se voulu
rent iamais rendre à Iosué , qu'ils nc
fussent surmontez par armes , &for-
ccz. Car i'estime que ces sept natiôs
ans Ube. là "sont les septr arts qu'on nomme
liberaux : Desquels les Philosophes
furent armez. Et tout ainsi que Dieu
Voulut que cette partie de la terre
qu'il auoit promise aux Hebreux, en
attendant que les vrais possesseurs
;#! V- P. M A L D O N A t. _IJJ
-d'icelle arriuassent , fut habite'e des
sept nations susdites , de peur que
lçs Israelites que Iosue' y deuoit a-
mener,ne trouuaiîent la'regió incul-
. .te.8c sterile. Tout- de rriesme il me
semble qíi'auant quelesus, nônpas pp,^
le fils de Naue , ainsXhrist ,mit en
possession les Ghrest. vrais fils d'A
brahams e la terre de laquelle le pe
re luy auoit dit : ie dóneray les gents
ton heritàge,& ta pbssesiió. Les con
fins de la terre, les Philosophes par
quelque permission diuine, occupe*-
rent tout le rond de la terre: afin que
pai-vne plus gròŒcit cuiture,n pre
parassent ko cœurs des homes pour s .
receuoir la semence delavrayereíí- "
gion. Les luiss voisins de nostrere- tuluífs,
gion , me semblent estre en nostre
endroí&cc qu'estoient entierement
tu leur jlës Arabes,Ammonites, &
Asotiens comme recite Neemie.Car
comme les luiss d'vne mainbàstis-
soient les murs de Hieruíalem, & de
l'autre, repoufloiét les ennemis dess-
silsdrts : nous áufii auec l'vn Test. .
comme auec quelque main edifions
TRAICTE' DES DEMONS
l'Eglise: & âuec l'autre Testament,
nous repoussons les assauts des luiss.
Btrttíq. Mais les Heretiques cncores qu'Us
tiHStl*n- soient nais & nourris auecnous, en
W"*' mesine Eglise, quasi comme en mef. *
me ville , & presque en racsme mai
son, font de tant pîusdangereux que
les autres, comme les guerres ciuf-
-les & domestiques sont pires qu«
'jf„x les estrangeres. Etparcelesa. Apo-
Ksm.dtr- stres fainct Paul & fainct Iean" ont
rútrt x.à. enseigne' entierement à .mesme in-
Ttmotee ient{oa & par mesmes argumens
i.Tamot. *f(& saiUoic fui* Jes - Heretiques
j. ' auec plus desoin & dediligence.qnc
S.icin 2. tous autres ennemis de Ja religion.
Efistrei. j^g guerre- que nous font les here-
g *** tiquesest telle que celle d'Absalon
4. contre Dauid, & de Ieroboam,con.
fyh.ii- tre Roboam : lequel edifia le pre
mier Autel , contre Autel : Et ( ce
qu'est le propre des heretiques)
diuisa la religion auparauant entiè
re. Veritablement grands & ef
froyables. sont.cesl quatres genres
. d'ennemis ,- desquels i'ay parié , SC
aucc lesquels les Theologiens ont
dv P. Maldouat. ij4
accoustume' de batailler : toutesfois
ils font hommes , chair & sang,
cóme parle l'escriture. Lesquels ou.
font ramenez à la vraye religion par
les autheurs Ecclesiastiques, ou sont
arrestez par les Rois Chrestiens auec - ^
punitiós & par crainte )QU-quclques du ad
mis font abolis par la seule longueur uirfàrt».
du temps : ou pour les mesines guer- t*« eEz
tes dont ils ont accoustume' de tra-
uailler l'Eglise , ils font estaints : ou :
par le mutuel disseord, qu'ils ont en-
trcuxjils font peu à peu desfaits. Et
pour bien gaillards qu'ils soient,tou»
tesfois estans hommes -, encore peu-
uent-ils estre vcus,&euitez parles
hommes. Mais ce cinquiessme genre
4'aduSrsaires- duquel nous auons
proposé de parler, encore qu'il soit
presque passe' sous silence par les
Theologiens, ou du moins traicté
auec moins de foin & plus briesue-
iaent :est toutesfois beaucoup plus
puissant & effroyablei Car nous n'a-
uons pas-meshuy à faire contre 1*
chair & le sang,ains contre les Prin-t
oçs & puissances, contreks gouuer-
TrAICTe' DBS DEMONS
néurs du móde de ces tenebres con
tre les choses spirituelles de malice
és lieux celestes.. Les autres font ter
restres de nation : ceux-cy célestes..
Les autres non pas en ssgrád nóbre:
ceux-cy innumerables:ceux-làmeu-
rent tous les iòurs, ceux-cy ne peu-
uent mourir : Eux foibles, &- de pe
tites forces : ceux-cy tant puissans.
que l'escriture tesmoigne , qu'il n'y a
aucune puissance en terre qui se
puisse comparer à la leur. Les autres
font souuët rudes & ignorans: ceux-
cy & de subtilité d'esprit , & d'expe^-
rience d'vn tres-Iong temps,nô seu
lement entendet merueillcusement
tous les artifices de cóbatre ôs'aece-
uoir:ainseux-messmesiles ont ínuen-
te'es,enseigne'es,augmente'es. Ceux-
là meinent feulement la guerre in»
teríeurement : ceux-cy nous iettent
les mesines semences des guerres-
dedans les plus interieurs iens de
nostre ame. Et ( pour dire tout en
vn mot)ceux4à sont-hommesiceux-
cy malings Anges. Ges mauuais de
mons di-ie- nous enuyans nostre.
D v P. Maidonai. Ifs
salut ( d'autant qu'ils ont perdu. le
leur,) combien qu'ils exercent tous-
iours leur cruauté contre le genre
humain , toutesfois principalement
(comme on peut voir) en certains
ìnteruales detéps :mais nómément
en ce nostre siecle ^plus que iamais.
Pendant lequel(comme fuie dernier
iour approchoit,auquel S.Iean a an
noncé en l'Apocal. Lucisser deuoit
estre deflié)il semble que tous les au
tres demons soient sortis en lumiè
re des plus creuses cauernes de la
terre , pour faire la guerre. Dequoy
quád ie recherche la raison en moy-
mesme , ie n'en treuue qu'vne seule
quest. la petitesse & deprauation de
la foy. Car la foy est celle seule par

seils , estudes & efforts des diables


sont brisez. Et certes ce n'est point
fans cause ^ S. Paul ne faisát presque
point métio des autres vertus,a vou
lu que nous fufiions armez du seul
bouclier de la foy ; auec lequel nous
peuflïósesteindre toutes les armes à
feitdutres-malin,&parce quád noas
THAICTE' DES- DEMONS
reduirons en memoire le decours
de tous les siecles, noustrouuerons
qu'auxtemps qu'il y a eu moins de
vraye & solide foy , en ces temps là
Dieu tres-bon & tres-grad a donné
plus de puissance aux diables d'ex
ercer leur cruauté fur les hommes.
Auat l'aduenemet de I. C. en terre,
par toute la terre il y auoit multitu
de grande de demóSjtellemét qu'ils
parloient par tout dans les idoles,
apparoissoient par tout , se faisoient
partout adorer pour Dieux parles
miserables homes. Mais apres l'ad-
ttenement de I. C. cela s'est yeu és
lieux efquelsou la vraye foy n'estoit
point paruenuë encore,o"ul>ië là où
«11c estoit deprauee par diuers er
reurs, ou du tout perdue & esteinte
de nostre memoire. Encore les de
mons parloient familiairemét auec-
ques les homes : Ce que nous auoní
peu recognoistre & par les autres
histoires des Indes,& par les lettres
que nos Collegues les peres Iesui-
tesquiyhabitent,(ausquelles ie dó-
ne beaucoup de foy) nous ont esseri-
»v P. M al t> o n aï. ij£
tes,des mœurs de ces nations là.-Or
attendu quel'heresie esteint Jafoy, :
ilaeste' obserué par personnes tref.
doctes,ou que les autheurs & Secta
teurs des heresies ont esté eux-mes-
mes magiciens,ou que les arts de la
magie ont tousiours suctede' aux ffij-
heresies. Simon le i. presque des he- çlt-
retiques, a esté si fameux en ces arts,
qu'il en a eu le surnom de magicien.
Eusebe aussi , autheur graue asicure
au 3 .liure de son hist. chap. 16. que
Menander eust vn demon familiers.
Finablement dg Marc Valentinian,
de Pridllian ,& de Garpocrates Ire
nee escrit le mesme fS. Hier- en son
Epist. à Clezephont contre les Pe
lagiens,de Hermogenees , & Sulpi-
tius Seuerus au 1. liu. de i'histoire
sacree:&de Berengarius aucuns as-
seurétle mesme. Les histoires d'Es
pagne recitent qu'apres que les Ar-
riens eurent longuement demeuré
cn E(pagne,les diables y furent veus
vn long temps deceuans les homes.
Mais apres cette cloaque de Sar-
I tasins pleine de toute impieté , les
' v Traicte des pemons
artsde'la magie y cuçent tant d'ac-
«roiffance,que l'ignorance de toutes
i "' . les autres sciences y estoitdesiaín-'
croyable , la Magie presque seule..
estoit enseignée es eschole j publi
ques. Encore voit-on aukJurd-huy à
" Salemanque les vestiges d;vn colle
ge des arts magiques, lçquel jà peine
y a-il quatre vingt ans que Ferdiriád
cinquiesmç fermar En B'qërae& Al
lemagne l'heresie. des HusEtes íat
suiuie d'vne teìletépestededernons,
que les Sorciers donnoient plus d'af
faires enl'Allemag. gue ne faifoient
les heretiq. De cecy peut estre tes-
moin feu* surfifent laeques Spein-
ger Allemand , & qui yiùoit de ce
temps-là : lequel en. a eserit vn liure
entier. Iadis plus pre's de France
personne n'ignore qu'aux monts
Apennins il n'y eut( & encore au-
iourd'huy) autant de Sorcieres qu'il
y a de semmes. Et c'est d'autant que
Paul- les Vauldois heretiques y font de-
-M'. meurez cachez iufques auiour-
d'huy. Ie ne voudrois pas qu'au
cun des Caluinistes s'offençast de
- . . ce
dV P. Ní aì d o* a t. ij7
<e que ie vois dire , ausejuels certes
i'aymerois mieux estre auteur de sa-
, lut que de scandale. Au surplus , cer
tainement i'estime que ces illusions
de diables desquels nous sommes
maintenant souuent trauaillez , sont
sortis du mesme Lac de Gencue, Gtmut-
duquel sont venues à nous leurs he
resies. Car il a este' verifie que cette
ville a commencé la premiere d'e-
stre troublee par les demôs. Et dou
tant que la petitesse d'ìceile n'estóit
parauenture pas capable de la mul
titude d'iceux croissant de_iour à
autre,i'estimc qu'il est aduenu qu'cl-
les'est auíîìrespanduëen nos villes.
Pour moy ie pense qu'il y a cinq cau
ses pour lesquelles les arts magi
ques suiuent î'heresie. La premiere
est: d'autant que les demons ont leur
habitation dedans les heretiques,
comme Hs auoîent anciennement
dïns les idoles. Et sainct Hierosme
a tres-bien accoustumé de dire que
le diable ayant veu par terre les ido-
ley esquelsil habitoit auparauant ,il
aforgé auec les saintes lettres mes-
TrAJCTE' DES DEMONS
mes , des Idoles pires e's cœurs des
heretiques.Calfían autheur graue &
aneien, enla collation 7. chap. 31.
asseure auoir entendu vn diable,
consessant que par Arrius & Euno-
mius il auoit publie' l'impieté de la
,,ïfí- doctrine Sacrilege. Et par-ce il est
necessaire que comme la guerre e-
stant finie ,les gens de guerre espars
par tout se rendent vpleurs , afiìe-
geans tous les passages : de mesme
les diables ( estans les heresies qui
floristòient auparauant abolis ) com
me si les Temples esquels ils estoient
adoren , estoient ruinez , cerchant
nouuelles habitations en autresper-
sonnes.Carles diables ( estans con
trains de sortir deJ'homme dans
lequel ils habitoient ) ont accou-
stume' defaire ce que fonteeux qui
fatiguez d'ynlong siege ,sont con
trains de rendre le fort qu'ils te-
noient : ils demandent par leur ca
pitulation , qu'il leur soit permis de
se retirer en vn autre lieu. Ce que
. nous cognoissons par l'exemple de
Ja legion quidemádaà Iesiis-Çhrist
dvP. Maibonat. i 5 S
Iny estrc permis d'étrerdás les pour- s«,t
ccaux. I'ay veu ( dit S. Ieá en l'Apoc.
i6. )delabouchedudragonJ& dela
bouche de la bestc , & de la bouche ^ s '
du faux prophete , sortir trois esprits t»c 8.
immondes comme font les demons,
faisans des prodiges, & ils s'en vont
aux Roys de la terre pour lçs assem- „ ,
bler a la guerre. La z. caule eit ,que
l'heresie à son commencement est
violente & vehemente du tout, mais mime-
eile ne peut longuement demeurer ment'
en mesme degre',outre ce que lapro-
uidence diuine ne le souffre pas. Car
encore les choses messme sc portent
de façon, que l'erreur ne peut lonr
guement imiter la verite'. Et parce
il faut de necessité que toute here
sie (si elle ne retourne prompte
ment à la religion dont elle est par
tie ) degenere , ou en la magie,ou en
l'extreme impiete' de T Atheisme.
Car estant z. causespour lesquelles
principalemétles homes sont rédus
heretiques: l'vne est l'orgueil d'vn
esprit trop gaillard , & qui ne croit
rien sinon ce qu'il void de ses yeux:
X».AICTE DES DEMONS
fterttìf. l'autre est certaine desreiglée curio-
faror- f^é & desir de nouueauté : il ardue
S*'*1' necessairement que ceux qui par
orgueil ont esté faits heretiques
quand en l'ardeur de la premiere
inuention de la secte qu'ils ont trop
- soudainement embrassee ce qu'ils
iugeoient estre lumiere ; le mesme
ardeur se resroidissant, ils ont treu-
aé que s'estoit tenebres, par deses
poir de treuuer ailleurs la verité, ils
Herttìfl. necroyentriendutout.Et ceux que
far eu- la curiosité auoit poussé en heresie
«g/»í. voyans que ce que leur sembloit du
commencement nouueau s'enuieil-
lit vn peu , poussez de raesme curiosi-
té,ils font esmeus à prendre accoin
tance & familiarité auec les de
mons , & à apprendre & exercer
Jeurs sciences. La troisiesine cause
«st, qu'il semble estre naturel , que
tout ainsi que la peste ensuit la faim,
ainsi l'hercsie soit suiuiede diuersi-
íé d'arts curieux. Car l'heresie mes
me est quelque faim de parole de
Dicu,en Amos 8. chapitre. Etcom-
jme en la cherté des viuçes les hom
©v P. Ma t d o n a t.
mes font contraints d'vser de vian-
des mal-faines ( dont il arriue que
les humeurs estans corrompus la pe
ste s'engendre : ; de messme l'herefie
«stant en vigueur , ce que les hom
mes vsent du sens corrompu de l'ess-
eriture , ils tombent e's arts magi-
ques,qui font comme pestes de l'hs-
prit.La4.est que les demons ont ac- Hêttffts
toustumé de s'ayder des heretiques f'11-'
pourdeceuoir les hommes, comme aes'
de quelques belles paillardes. Car
il esteuident qu'en l'esscriture , l'he-
resic est nommee paillarde , Efaye
premier : comment a este' faite pail— • **
larde la cite' fidelle ? Et parce, tout
ainsi que les maquereaux lors que
la beaute' de la paillarde est decheuë,
de paillarde en font rne maquerel-
le, de mefme les diables lors que la
premiere beaute' de l'heresie est tel
lement perdue qu'elle n'attire def
ia plus tant les hommes en erreur
des heretiques, ils en font des Ma
giciens. La cinquiessme cause est, la
negligence des recteurs de l'Eglisse.
Car comme e's champs fans] culture
O iij
TrAICTE' DES DEMONS
les sautereauxs'engendrent ordinai
rement , ainfi de l'indigence de la
parole de Dieu les arts magiques
naissent. Car aussi les sautereaux en
l'escriture signifiant les Diables en
l'Apocal. ç). Et parce il semble estre
conuenable à ce temps , eequedit
Ioël chap. premier : le restant des
chenillesjle sautcrau l'a mangé: & le
restant da sautereau a este' mangé
par la roiiilleure: Gar ce qu'estoit re
ste' aux heretiques , les sorciers par
l'art des diables le depópulent : & ce
<jue les magiciens laislent,les Athées
le gastent.

DE LA DISTINCTION
Dli DEMONS.

LA distinction des demons se


prend de sept choses,du nom, de
la nature, des lieux qu'ils habitent,
des temps esquels ils dominent, des
offices , & des vices esquels ils pre
sident. Da nom , encore que nous
en ayons parle' cy-deuant, nous en
.parlerons neantmoias encores,
D'v P. Maldona t. i60
mais vn- peu autrement Si: plus am
plement. Mais ce qu'on dit les dé
mons estrc distincts par le nom , ne
se doit pas prendre tellement que la
distinction se prenne du nom ,ains
d'autant que par le nom, nous co-
gnoissons la distinction. Comme
quand nous disons deux hommes
estre distincts, d'autant queTvn est
nomme Pierre.& l'autre Paul. Or les
choses qui sepeuuent dire noms des
démons font en double difference:
les aucuns font vrayes , les autres su
perstitieuses. 11 nous faut premiere
ment parler des vrayes. tes noms
des demons se prennent de cincj
choses. La premiere de la propriete
naturelle : comme ce mefme mot,
demomcarils sont nommez demons
c'est à dire prudens & sages , comme
dit Plato au Cratlye. Ht par les He
breux le diable est nomme' Sathan
signifiant aduerfaiie & calomnia
teur. Lesquels deux noms encore
qu'es saintes-lettres soient communs
à tous les demons, font neantmoins
quelquesois propres au prince
Traicte' DES DÍMONS
de tous eux. Comme en fainct Lue
io. chap. Ie vois Sathan tombant
du Ciel comme le foudre. Et en S.
Matthieu i o. Sathan chasse Sathan..
Et en la premiere de sainct Pierre: le
diable cóme vn Lyon rugissant en-
uironne , cerchant quelqu'vn pour
deuorer. Eten l'Apocalypse ìo. Et
il empoigna le dragon serpent an
cien ( qui est le diable & Sathan) &
le lya pour mil ans. Et en S.Matthieu
aj. Allez au seu eternel lequel est
prepare' au Diable & à ses Anges*
c'est à dire à Lucisser. Autresois en
core ces deux noms font attribuez-
aux hommes » comme en S. Matth..
\6. Va arriere dcmoy Sathan (c'est
à dire Pierre ) car tu m'es scandale..
De là est arriué que quelques au-
tres noms ont esté donnez aux
diables selon les proprietez. Car les.
Hebreux en nomment les aucuns
ìfymifc ^e8astans 1" autres, nuissants. Ainsi
toi tet^ Rabby Selemo fur ce Pseaume 90^.
;ropri*. <le la sagette volant au iour , de la
eK- chose cheminant en tenebres , de
l'assaut & du diable meridional,esti-
d v P. Mai. d oîîatI i 6t
me que le nom fignifiant peste est le
nom d'vn Demon qui apporte la pe
stilence. Et l'autre figniliant morsu
re est le nomd'vn demon qui mord.
Gomme au Deuteronome 22^ Ils
seront consumez par faim , & les
oyseaux les dechireront d'vne mor
sure tres-amere:le mesme Rabby Se-
lemo estime que ce soit le nom d'vn
demon. A quoy s'accorde ce qu'en
sainct Iean en l'Apocalypse 9. quel
que demon se nomme en Hebreu
Abadon , Grec Apollin , qui est
à' dire exterminateur. Comme en
Job vn autre est nomme' Asmodee, Sthu léi
c'est à dire vastateur. Quelquesois i'2,a^w--
les noms des demons font pris des
figures esquelles ils apparaissent..
Ainsi les demons qui apparaissent
aux nommes en boues , les Hebreux
les nomment d'vn nom signifiant
Velus , pelus : selon le tesmoignage
de Rabby Dauid sur le liure des lu
ges. Etau 2.dePáralípomenon,ch.
1i, là où nous lisons : Hieroboam.
ordonna pour soy des Prestres des •
lieux hauts & des demons , ôí des
O v
Thaicte' des démons
veaux qu'ils aùoient faits , les He
breux lisent , des velus. EtenEsaye
chap. i 3 . & 1 i . mais les bestes s'y re
poseront : & leurs maisons seront
remplies de dragons, & y habiteront
les austruches &les velus sauteront.
Les Hcbrieux par ce mot de velus
entendët les diables.Et en Esaye 14.
Et y accourront les demons:le mon
stre demy homme & demy-asne , le
velujerieront l'vn à l'autre.Au Leui-
tiquei7. Et ne sacrifieront plus aux
offrandes aux demons auec lesquels
ils ont paillarde'.. De mesine les
Grees nomment Onoscelides cer
tains demons , d'autant qu'on les.
void ordinairement apparórstre a-
uec des iambes d'asnes. Sozomene
au 8.1iùre,chapitre£.escrit : Par ain-
si ce qui se dit vulgairement que
le diable que les sorciers adorent
leur apparoir en figure de bouc,
n'est fans probabilité & n'est pas
efloigné des lettres saintes : car .
nous auons. quatre tesmoignages
esquels les diables à cause de leur
forme sont nommez velus. Et puis- -
BV P. M AL B ON A T. \Sl
le nom de bouc ne se prend iamais
en h sainte cscricure , sinon en mau-
uaise part : comme le nom d'ai-
giieau est tousiours prins en la
bonne. Gomme en íainct Mat
thieu vingt-cinq : 11 placera les ai-
gneaux veritablement à la dextre:
& les boues , à la senestre Et au
]Leuitique quatriesme , neusiesme,
vnziesme , seiziesme , le bout estoit
dit porter les pechez- du peuple,
d'autant qu'il porte la figure du pe
ché-: tant à cause de son orgueil , de
claré par les cornes iigninans hau-
táincté , & par la barbe signifiant
vn cœur trop efleué : & encore à
cause de la paillardise remarquable
en luy:d'autant qu'en toutes les par
ties de l'annee il se mefle aucc la se
melle, combien que les autres ani
maux ont certains temps establis
pour faire leurs petits. Et d'au
tant que ces vices font propres-
aux demons ( l'orgueil selon cc
qui est escrit : ic monteray au
Ciel,&seray semblable au treshaut:
& la paillardise d'autant qu'encore
O vj '
TrAICTE DES DEtyOKS. -.
qu'ils ne puissent d'eux-mesmestô--
ber en ce peche' , toutesfois ils ne se
plaisent tant d'aucun autre ) ils se
monstrent en figure de bouc. Il y a
vne autre cause, c'est que Dieu nc
permet pas qu'ils apparoissent en
meilleure forme , de peur que les
hommes ne puissent auoir pretexte-
ou excuse d'ignorance.Ie pense qu'il
y en a vne autre cause : c'est que l'es-
criture sacre'e nomme les hommes
effeminez boues , & les mauuaiscs
femmes cheures. Car elle dit qu'au
iour du iugement les boues seront
placez à la scnestre.Au demeurant il
n y arien de plus equitables, sinon
que Tes hommes boues rencontrent
vn mailrre bouc. Quelquesfois les
îîf" demons prenoient les noms des
Jdste" ^°'es e^lue^e! ^s regnoient : corn-
— ' me Beelzebud nom qui est frequent
au nouueau testament. Etau 4. des
Rois, z. & chapitre se nommoit
Astaroth , ceste fameuse Idole des
Sydoniens. Et de là a este' donné
nom aux demons , aux luges cha. 2.
& j. Et d'autantque ces deux Idole»
D V P. M AL D ONAt. iC $.'
furent for-t renommez àpeineya-it
aucun des demons qui ne die qu'il
se nomme Astaroth , ou Beelzebud..
De là les anciens ont obscrué les
noms des Idoles comme Iupiter,
Mercure & tels estre noms de dia-
_hles,& non d'hommes. Comme Ori-
gene,contre Celfus liure ó.Lactance
liu.i.ch. i6. Eusebelia.4. de la pre
paration .Euang.elique.en plusieurs
chapitres. Les noms des diables se
píennentde l'office qu'ils font:en S. ^m
Marc 5. Legion est mon nom. Garce pi, de
demon ri°a pas voulu signifier seule- l'office-
ment - toute ceste multitude de la*
quelle cet homme. là estoit tour
mente' se nommer Legion , ains que
luy-mesme auoit ce nom, d'autant
qu'il commandoit à vne legion. Et'
que cela soit ainsi , il a este' par apres
confirme' par vsage: comme nous di
rons apres , quand nous parlerons
des exorcismes. Cinquiesmement ^C'f
par la volonté d'eux-mesmes-, lors ^7

le nom , pour donner opinion de di-


uinite'. Ceey leur est commun auec
TaAlCTE' DES DEMONS
les bringands , & les heretiques,
lesquels à tous propos changent
leurs noms , d'autant que qui malr
fáit , hait la lumiere. Et parce ,il.ne
faut pas tousiours croire qu'ils se
nomment comme ils dient : ains
seulement quand ils respondent
contrains par la vertu diuine
deuëment adiurez en la forme de
l'Eglise. Comme les larrons fou-
uent ne decelent pas leur nom,
s'ils ne font contrains par la tor
ture que leur fait donner le iûge. .
Et que cela soit vsite' , il appert
par Minutius Felix , à Iouian : Plu
sieurs (dit- il ) sçauentque les diables
consessent d'eux-messmes , toutes
les fois que par nous & auec le me
rite des paroles & par les ardeurs-
des oraisons , ils font tirez des corps.
Saturne mesme,& Iupiter,& tout
ce que vous adorez de demons,
vaincus de douleurs, dient ce qu'ils
font. Et Lactance , au second li
ure d& l'origìne de l'erreur , dit:
ils nuisent voirement , mais à ceux
qui les craignent , à ce-ax que Ja puis-
dv P. Maldonat. i64
fânte& haute main de Dieu n'a en
sa protection. Mais ils craignent les
iuites adorateurs de Dieu , au nom
duquel adiurcz ils s'en vont des
corps. par les paroles desquels estans
forcez ils declafent leurs noms,ceux Exorâs-
qui sont adorez e's temples. Lesquels ,•*•
tesmoignages doiuent estre de tanfe
plus curieusement obseruez , que
plus ouuertement ils monstrent,
tousiours auoir este' la coustume de
l'Eglise d'vser d'exorcisme des dia
bles voire en la mesme forme que
Iesus Christ vsa : sçauoir est interro
geant du nom : tant s'en faut que 40
soit temerité, comme les aucuns ass-
íèurent mesines des Chrestiens.

DE LA DISTINCTION
dis demons par la nature; ! -

IL a este' dit cy-deflus si les de


mons sont entr'cux difserens
d'espece , en la disputation des
Anges. Maintenant la question est
s'ils sont differens en moeurs ou
TRiAICTE: tvES DEMONS
inclination naturelle : ic reciterar
premierement les Opinions que i'e-
llime fausses , & âpres i'adiousteray
eclle que i'estime probable. Les He
breux en content fort touchant l'in-
clinacion des demons : car ils dient
les aucuns estre faits del'eau & de
Tair, combien que les autres foyent
composez ou des quatre Elements,
ou de nul. Ilsdientque cèux-là ont
ttois proprietez qui leur font com-
. mimes auec les bons Anges, & au
tant aucc les hommes. La premiere
auec les Anges : qu'ils font aiflez.
fcti 2. qu'ils volent tres-legerement.
La j . qu'ils cognoissent & predisent
les choses futures, non pas verita
blement de leur nature & puissan
ce : mais d'autant qu'eux volans au
tour des ronds celestes, ils esseoutent
continuellement ce que Dieu parle
áuec ses Anges,& par ainsi que com
me gens qui fument la Cour , fls
font tousiours fournis de forces
nonuelles , & que de là est ne'e pres
que toute la Magie.Ils ont commun
auec les hommes , premierement
»v P. Maldona t. i6j
qu'ils mangent ( or ils mangent en
sucçant l'mirnid.ite' de l'air ) & que
de là vient qu'ils font atrraicts: par
-humeurs & par fumees, & y prénent
plaisir tant eux que les sorciers auflì
à succer le sang. En second lieu,
qu'ils engendrent & procre'ent : Ce
qu'aucuns des Chrestiens ont estime
des bons Anges messmes :.& que de incuhtì
là est sortie toute ceste nation d'in- d-s««
cubes & succubes. Pour le j. de ce1"*"*'.
qu'ils meurent Les Hebreux adiou-
stent encore que les anciens font du.
tout spirituels:commeceux aùfquels
Dieu n'eust pas loisir de bastir des~
corps , le Sabbat commençant à
poindre. Lesautresncrdefang hu
main , & par ce nommez nuisibles,
d'autant qu'ils font fasscheux aux
corps humains. Et parce qu'il ne
faut pas enterrer vn corps que le
Sepulehre n'ait este' purifié sept
fois. Cccy est recite pris d'vn Rabby
par Munster, fur le i7. chap. du Le-
uitique. Les aucuns ont dit que
quelques vns des- demons font par-
ticipans de raison, les autres en sont
Traicte' des- demohs
priuez : Ainsi en ont- parlé Proclus
& Auicenne. Lequel Proclus a dit
ausiì au liure de lame & du demon,
que les aucuns d'eux font plus efloi-
gnez de la matiere, les autres moins.
11 y en a qui asseurent que les aucuns
ont conionction auec certaines
herbes : prenans leur argument de
ce que les aucuns íbrît ou attirez,
Jobitt. ou chassez parles aucunes d'icelles:
comme au liure de lob Asmodeus
fut chassé par le foye du poisson:
Origene au 4. liure contre Celsus
escrit que les aucuns ont quelque
semblance auec aucuns animaux.
Et que pour cette occasion Moysej
en l'Exode 8. chap - nomma les ani
maux d'Egypte abominables , d'au
tant qu'ils estoient. adorez , à cause
de quelque semblance qu'ils auoient
auecques les diables. Et Psellus au
hure du demon & de la Magie nom
me certains demons Solaires appa-
roissans en forme de lyon : & par-ce
que voyans vn coq ils estoient
chassez , comme les lyons , on a
exeu qu'ils fussent , comme les
D v P; M A L D O N A T. \C6
lyons de nature contraire aux coeqs;
Quelques Chrestiens, comme Cas-
sian , collation sept , chapitre trente
deux , & PalladiUs chap. dixneuf, &c
vingt j liure premier recitent que
l'opinion a esté par vn long vsage
approuuce par tous les moynes:
qu'il y a certains demons doux &
paisibles de nature , lesquels pour-
suiuent seulement les hommes par
rise'es , & font vulgairement nom
mez Faunes : les autres , par trop
cruels tels que font depeints en S.
Matthieu 8. les autres vulgairement
nommez Badusces ou Bacusées, les
quels font & cruels , & superbes en
semble : rendans cçux qu'ils auoient
vne fois saisis non seulement enflez
de cœur , ains encore grands pro
digieusement. Des fainctes lettres
nous apprenons les aucuns estre
muets , les autres sourds, en fainct
Matth. 9. & en fainct Marc 9. S. Luc
i i. les autres Lunatiques , en fainct
Matthieu i7. Mais comment sedoi-
uent prendre ces Epithetes, si c'est
des hommes , ou des. demons qui les
TRAICTE' DES DEMONS
tourmentent ; Il est vray qu'au $.. de
saint Matthieu , il y a vn homme
muet demoniacle : mais des autres
lieux jil est cuident qu'il faut referer
«ces épithetes au demon- En sainct
Matthieu : I'ay presenté mon fils
ayant vn demon muet. Et là mesme
Iesus-Christ dit : sourd & muet es
prit sors de luy. Etensainct Luc u.
Et ce demon estoit muet. Mais com
ment peut vn diable estre sourd &
muet; Non pas certes naturellemét,
car il est esprit : mais c'est ou par ef~
fect,d'autant qu'ilfait muet, comme
aucuns veulent: ou comme dient les
autres,par habitation , d'autant qu'il
habite en vn muet , ie pense non seu
lement que c'est pour l'habitation,
ains encore pour l'efret qu'il est ain
si" nommé quelquesois. Iesus Christ
dit en fainct Luc ir. ee genre de
diable ne se chasse que par oraison:
attribuant à la nature mesme des
demons de les rendre tels. Mais ils
sont dits Lunatiques , d'autant que
pour nuire ils attendent le change
ment de la Lune. Et pourquoy ì afin
bv P. Maldonat. i67
.{dit S. Hierosme) qu'ils diffament 1*
Lune creature de Dieu.

DE LEVR DISTINCTION
PAR l' ORDRE.

TO v s les Theologiens , fur le


second des sentences , distin
ction 6. accordent qu'entre les de
mons il y a ordre triple:de nature,de
grace,& de gloire. Doncquesles au
cuns mettent vn ordre de nature
excepte' ceux qui ont pense que tous
les demons cheurent ou des plus
hauts, ou des plus bas ordres. A ce-
cy ils ont coustume de rapporter ce
qu'esserit lob 41. des esscaílles de
Leiriathah : l'vne sera iointe à l'au
tre , & le vent messme ne passera pas
à trauers d'icelles , l'vne sera atta
chée à l'autre , & s'entretenans. ne
seront aucunement separées. Mais
cela est reçerche'de trop loin. Ilse
collige beaucoup mieux d'vn au
tre endroit du messme chapitre. Il
est Roy par dessus tous les enfans
TrAICTE' DES DEMONS
d'orgueil. Car là où il y a Roy&su-
iets,il est necessaire. qire l'ordre y.
soit diuers.Et encore du i i.de sainct:
Matthieu & de sainct Luc vnziesme
en Beelzebud prince dessables, il
chasse les diables. Et encore : si Sa-
than chasse Sathan , son royaume
est diuisc'. Et en S. Matthieu z;- le
quel est prepare' au diable , & à ses
Anges. Et enl'Apocalypse ij.il a tiré
auecqués soy la troisiesme partie
des estoilles. Et aux Ephesiens 6. les
g . Principautez , & Puissances. Mais
dtut des de grace & de gloire, il est bien cer-
demons. tain qu'entre les demons n'a aucun
certain ordre : ains vn autre qui
correspond à iceux , d'autant que
fvn est plus grand que l'autre , en
malice : l'vn plus grand que l'autre-
2tym- en supplice. Touchant au nombre
6rf: des Anges , les opinions sont diucr-
ses : comme recite Guillaume de
Paris en la i. partie de son vniuers.
Les aucuns ont dit qu'il y en auoit
douze : & ce , de l'opinion de cer
tain Necromantien qui asseuroit
auoir familierement conucrsc auec
dv P. Maldona t. i68
les diables treize ans tous entiers.
Les autres ( comme lemeíme GuuV
laume) disent qu'il n'y a qu'vn seul
ordre j & que c'est la Legion. Mais
qui dira qu'en vn homme fussent
tous les Diables ? Les autres,la plus-
part dient qu'il y a autant d ordres
des mauuais qu'il y en a de bons:
d'autant que de chacun ordre en
tomba quelques vns:En l'Apocal.
i5.se dragon tira auec soy la troiíies-
rae partie des estorlles. De la distin
ction selon le lieu, &letemps il en a
ieste' parle' cy-dessus.

DE LA DISTINCTION
SRI ON LES OFIICES.

QV'i l y ait des demons qui


commandent , & les autres demons
qui obeissent, il sepeutcolliger de P"',«-
ces paroles : en vertu du prince des t4"*'
diables, il chasse les diables. Et de
celles , les princes de ces tenebres.
Mais l'on peut demander si c'est se
lon leurs merites ouselon la nature
TrAICTE' DES DEMONS
que les offices font separez- Teílime
vray &l'vn& l'autre. Car l'escritu-
re mesme declare qu'entre les An-
geSflui pecherent cciuy qui pecha le
premier,est maintenant leur prince.
Et sainct Hierosme sur le 6. aux E-
pheses , recite l 'opinion d'aucuns
qui disoient que le prince des. dia
bles commet aucuns d'eux à au
cuns offices. Caffian est de cette o-
pinion enïa collation 8. chapitres.
& i <í. recitant livision d'vn Moine,
par laquelle eelafut verifie.

DE LA DISTINCTION
P. A R L fi í V I C ÈS.

L'Escritvrb enseigne qu'à


certains vices , certains demons
president Osée 4. l'esprit de fornica-
tion a deccu , &au 5. l'esprit defor-
nication aumilieu'íPemc. Au Leuiti-
que 10. Deuteronome i8. 1'hormne
ou la semme esquels sera 1'ísprit de
diuination , meure de mort. Etau u
des Roys , chap. tï. Ie sçay l'esprit
mensonger
D y P. M AL DO N A T. I5p
mensonger en la bouche des Pro
phetes. En l'Ecclesiasticque tren
te-neus : ily a des Esprits - qui sont
cre'es pour la vengeance, & en leur
fureur ont confirme' leurs tourmés.
Et en sainct Mathieu sixiesme:
vous ne pouuez seruir à Dieu , & à
Mammon : car parauanture que
(comme aucuns anciens ont votì-
lu) Mommonestle nom d'vn dia
ble qui preside à l'auarice&aux ri
chesses , en la premiere à Timothee
quatre,ne soyez atte tiss aux Esprits
d'erreur. Sine faut- il pas peníer
que tous les de'mons ne íoyeíit parv
ticipans de tous vices : mais qu'au
cuns font plus addonnezàcertains
pechez. Mais de ceux qui president
àmessme vice, le nombre est innu- binions
merable : comme dict Origene, twsnki*
Homelie quin?e. Et sainct: Hiejros- eux,
me fur le csçh. aux Ephesiçns,
TRAlCtE1 DBS DIMONSÌ

DE LA PVISSANCE DES
DEMONS.

ENcore que tout ce suject soit si


embrouillé qu'il semble qu'on
ny puisse trouuer ne cómencement
ne fin d'en parler : ie pense toutes-
fois qu'il peut estre compris en cinq
questions. La premiere de la mesu
re de la puissance des de'mons. La 2.
ïusques où il leur est loisible d'en
vser. La 3. en quelles manieres ils
deçoiuent les hommes par presti
ges. La 4. en quelles choses les en-
chantemens font exercez. La £•
quels remedes il y faut opposer.

COMBIEN GRANDE EST


LAPVISSANCB DES
diables.
-
L'Escritiire enseigne clairement
que la puissance des de'
mons est si grande, qu'il njrenà
DV P. M A. ID ON A T. i70
point t n terre qui luy puisse estre
compare'e. Premierement en lob
40. chapitre, le diable est descrit
par vne beste bien fort terrible,tant
pour la grandeur de'meiurée de son
corps ,quepoursa cruauté." voicy
( dit- il) Behemotquci'ay frit auec
toy ( cy dessus i'ay explique cenom)
mangera le foin comme vn bœuf,
c'est à dire,il deuorcra tout ce qu'il
trouuera&ledepopuIcra,sa force
est en ses reins , & la vert u au nom
bril de son ventre , c'est à dire , il se
delecte fort de la luxure , & deçoit
fort les hommes par le moyen d'i*
celle: il estrainct fa queuë comme
vn cedre , les nerfs de ses genitoires
font retortillez , & ses os comme
tuyaux , & ses cartilages comme
lamesdeser. Par lesquelles paroles
est comme depeinct certain hor
rible & cruel Taureau. Et plus
bas --voicy il engloutira vn fleu-
ue & ne s'en esmerucillera point:
c'est à dire, si cela estoit permis il
lefcroit } & n'cii seroit pas grand
TrAICTE1 DES DEMONS,
cas d'autát qu'il pourroit faire beau
coup plus grandes choies. Ec en
lob 4i.Qui descouurira le deuát de
son vestemét ? & qui entrera au m i-
lieudesa bouchePc'est à direqui
pourra durer dcuantluy? qui cou-
urira ses parties?autour de ses dents
estlapeur,soncorpsestcóme des
escusdefonte,il estentafle' d'escajl-
les qui se pressent l'vne l'autre, c'est
à dire, il est arme' de toutes parts,&
ne peut estre frappé d'aucun en-
droict. Et apres auoir accumule'
plusieurs autres propos de luy , il
adiouste en fin : il ny a point de
puissance fur la terre qui soit com
paree à la sienne. En secód lieu par
tout là où il est nomme' prince de ce
nionde,cómeenlob 8.Êt princede
eût airjc'est à dire , monde , comme
aux Ephef.2. E^ la mesmemous n'a-
uonspasàcombattrelachair & le
sang, &c. Le mesme nous monstrét
ces noms, Basilic , Lyon, Dragon,
auPsalme 90. aii5. del'EpistreS.
Pierre,en l'Apocatypse i î.cV 20.
D V P. M AL D O N A t. i7I

IVSQVES OV S'ESTEND
LA PVISSANCE Bï
diable.

MMsìln'vsepas de cette puis-


•Vnce sienne si grande, sinon
autant que Djcu le permet: ce que De Dieu
nous doit estrevne grande conso-- yjtut lit
lationrcomme au 3.des Rois , chap. puissance
22. & au 2. do Paralipomenon.cha. dudïa.bk.
i 8. ieseray lespritméteur en la bou
che des Prophetes : encore que le
de'monse void suffisant pourdece-
uoir Achab , il ne l'oia entrepren
ds*, qu'il n'eust eu premierement
lapujssácedeDieu. Encore enlob
chapitre prcmier&2.1e diable ne
le tente pas, sinon par permission
de Dieu. La où, en passant il faut
prendre garde qu'il y à deux inter
pretations de ces mots , peau pour
peau , &c.L'vne ( comme dit le Pa-
mphraste Chaldeen) l'hommedó- Pf.<«/;"*
nera peau pour peau, c'est a dire petti.
l'homme donnera membre pour
"] T R À I C T V DES DEMONS,
membre , comme s'il disoît : si
l'homme expose sa main en danger
pour sauuer sa teste , combien que
sa main ne soit pas moins partie de
son corps que la teste, quelle mer-
ueille est-ce s'il expose ses biens
pour fa vie ? L'autre interpretation
est , peau pour peau , c'est à dire,
toutes ses facultez , de maniere que
cette repetition signifie la multitu
de des richesses. Et en sainct Ma
thieu huictiesme , la legion ne peut
enuahir les pourceaux fans la per- -
-mission de Dieu (comme auiour-
d'huy les diables passent des hereti
ques, comme d'hommes de quel
que entendement,dans les sorciers,
cóme dans des pourceaux.) Et en la
I.aux Corint.i.ch.Il ne souffrira pas
que vous soyez tétez par dessus vos
Similitu- sorces.Et en l'A pocalypse 20.Il em-
£e. poigna le dragon serpent ancien,&
le lia pour mil ans, c'est à dire iusqs
au iour du iugemét. Tout ainsi dóc
qu'vn Lyon attache', combien qu'il
.... retienne ses forces naturelles , n'en
peuttoutesfois vsser : ainsi le diable
D V P. M A L D O N A T. ÏJZ
pour grande force qu'il ay e, toutes-
fois retenu par la volonté diuine,
comme par des liens, ne la peut e-
xercer: car le de'mon ne nous tente,
sinon comme vn seruiteur,ou com
me vn bourreau. Mais pourquoy
Dieu permet que nous soyons ten
tez : les causes en peuuent estre in- Les tet4-
finies. Dont les principales sem- tionsdes
blent estre celle- cy: pour nouse- hommes.
xercer à plus grande vertu , comme
il permit Ioseph estre tenté au Ge
nese^. Et le diable au contraire,
nous te te pour nous abattre du gra*
de de vertu auquel nous sómcs. La
a.pourno9chastiercóme pere, aux
Heb.ia.Dieu chastie celuy qu'il ay-
me,enl'Apoc.^.ceux qi'ayme,ielei
blasme&chastie.auxProu.i-. & i2.
le pere n'espargne point la vergete
diable au cótraire, d'autát qu'il no9
veut mal. La 5. pour nous destour
ner de peché: d'autant que le tour
ment donne intelligence le diable
au contraire pour nous induire au
peché: car le bourreau encore frap
pe par haine. Et parce les Caluini-
• - P iiij
Traicte'des rs e m o n s,'
iles qui dientque Dieu nouscon-
trainct au peché, fót Dieu pire que
-ïe diable, d'autant qu'à Dieu l'on
ne peut resister, on peut resister au
diable.La quatriesme occasion est
afinqu'il propose pour exemple
ceux qu'il tient pour esprouuez.
Dela est venu q quelques Irlebreu*
(comme RabbiMosc Egyptien au
Sl lob efi î. liure More, chap. 23} ont pensé
bifloire «« qu'au liure de lob n'est pas recitée
parabole, vne histoire, ain 3 seulement qucl-
tt}iie! parabole, & le nommé denS
'signifiant comme vne vaine tnuen-
- tion. Maisilest fort deceurcar au
trement Ezechiel n'allegeroit pas
lob pourvu personnage tre^- loua
ble: son nom fíyaxrictfiftèiièéjSç
-telles choses propres à í'histoírejOu
eloignees des paraboles ne seroyét
point spécifiées en ce Hure -' au con
traire le diable tente non seulemét
pour'huire àteux qu'il tente , ainfs
encûre'a'uraiitrésVpâríeûr exéple.
AinítÀi ìíe1 tem ps il à pousse' à l'he.
relie plusiéurs demy-doctes,afin
que par leur exemple d'autres plus
simples fussent induits à icelle •- Et
dv P. Maldona t. i73
par-ce le vulgaire n'estime aucun
estre homme d'esprit.s'il n'est here,
ticque. A.in(ì en Calsianus collation
3.chap.i).Vnde'móconse(sc auoir
cmp!o\ é id.ans entiers à tenter vn
moine, & qu'il le vainquit enfin:
mais toutesfois Cassian adioustc
qu'il sérauisafinalemét& fit peni-
téce,d'autât qu'il auoitprins goust
à la vertu. La 5.pour auoir occasion
de no9 dóner quelque chose (c'est à
dire)à fin qu'il la nous face meriter,
laquelleautrement ilnous eust dó-
ne'e: comme le pere quelquesfois
voulant donner à ion petit enfant
vne pomme , il luy cómande de de
cliner son nom, & luy faictcomme
par quelque recompense rachepter
ce don. Dequoy nous auons l'exé-
ple en Abraham : car Dieu luy ayít
promis qu'il multipliroitfascméce
comme les estoilles du ciel, toutes
fois il luy commanda de sacrifierïo
jfils^afin de le luy donner alors pour
son mcrite.Etpar-ceil luy dit:d'au~
tant que tu asfaict ceste chosccy,
te benissant iete. beniray. Et cestç
Pv
TrAICTE* DES DEMONS,
obseruationfaict merueilleusemét
pour accorder les passages qui sé-
blent estre directement contraires:
l'vn aux Romains 4.oùilest dict A-
brahá estre iustirìé,non par les œu-
ures : l'autreen l'Epistre S. Iacques
2. oùilestdictauoir este' iustifié par
lesceuures. Car il est ayle de dire
luyipca- que lors que pj-emicremét ces cho-
V°nf ses furet promises à Abraham , il ne
vraham. jes auQjt merjte'es? mais iors
qu'elles luy furent promises la se
conde fois , il les auoit desia me-
rite'es.Il y en a qui expliquent ainsi
cecy aux Epheses 2. à cause dequoy
Dieu l'a exalté, & luy adonné vn
noru qui est par dessus tout autre
nom,&c Car lesensest,non pas
qu'autrement Iesus Christ n'eust ,
esté exalté, ains que le Pere à vou
lu qu'il lait obtenu parle merite de
fa pass ion , & que par ce moyen , il
ait rapporté auec pl9 de gloire ceste
recompése.La d.cause est afin qu'il
jîousfacecognoistrecombic nous
auons profité : comme vn prece
pteur interroge souuent son disci-
dv P, Maldonaïi i74
pie a mesme fin, ce qu'il sçait que le
dilciple n'ignore pas, au Douteron.
23. Car Dieu vous tente afin de voir
íi vous l'aymcz de tout vostre cœur
c esta dire afin qu'il vous le face co-
gnoistre.La y.afin qu'il nous punis
se par iusiiee. Ainsi permit- il Pha
raon estre tente enl'Exode:& les
Romains: de mesme, aux Rom. i.
chap. Dieu les àliurez e's desirs de
leurs cœurs: car les vns & les autres
auoient donne' à la creature,la gloi
re deuè à Dieu. Et en ce temps il
permet plusieurs estre faicts hereti
ques ( comme en la 2. aux Theflal.
2. ) D'autant qu'ils n'ont pas receu
la clairté de la verité pour estre sau-
uez , par-ce il leur à enuoyé l'ope-
ration d'erreurjafin qu'ils creussent
au menteur , mais le diable tente
pour nous punir, non par iustice,
ains par haine, comme le bourreau
frappe quelquesois par haine celny
qui est legitimement condamné.
!T-á A î t r t' D E S D F. M O N S,
';.. y f~i tîi.:'i :".-- ./ ' -'

EN COMBIEN DE Ma
nières VSE LE DIABLE
' •' ' -- 'de ceste puissance.

LE diable vseendeux manieres


dé ceste puissance. Quelques-
fois hostilement , mais à cachette,
commeles ennemis qui de -siuict
vont recognoistre la ville qu'ils
veulent ássieger:ainíi tous les iours
il en tente infinis de larcin ,d'a-
dultere & d'autres tels pechez. Au-
-tresfois (comme Ciceroàdicr que
'quelqù'vrï pratiquoit trop fami-
"licremëht l'inimitie')le diable cher-
cheoccasion de s'aboucher & s'in-
-sinuc en nostre familiarité. Et cecy
^acoreen deux manieres. Car ou
.il ne se môstre point.'& alors il ne-
"gptieaueçnbùs tout ainsi que , par
lettres rìoirs recherchons ou eri-
tretenons l'amitie' de quelqu'vn : ͣ
vne telle familiarité il exerce fort?
auec partie Ades sorciers & de uine-
Sorciers. restes. Car voyant le diable vne
dv P. Maldonat. i75
semmelette curieuse , pour faire
quelque ie ne sçay quoy , employer
rne chandelle decire,ou de la lai
ne, ou vn cierge, ou ie ne sçay quel
charactere,ilfauoríse à ses entre- ,
prises pour cet effect: l'effectcon-
firme ceste semme, tellemét qu'elle
s'estime defia estre poussée de quel
que merueilleux esprit :Sc cela sé. '
ble estre yn pacte occulte. Ou bien faffeoc-
le-de'rhpnse.móstre:&ce quelque- culte.
fois en paslan t seulement. Comme Histoire.
pour exemple; Quelque marchant
dás y ne forest , sache' pour ses affai
res deplorez , & pour se pendre ne
luy defaillant autre chose qu'vne
"corde, vnde'mon luy apparut en
habit d'homme de village passant
d'auanture, ayant vne corde sur ses
espaules:cestuy cy voyant la corde,
l'emprunte & se pend. Maisautre-
Tois il apparoit familierement. Et -
alors ce íaictvn pacte exprez auec faBetxi
le diable, ou appelle, ou non ap- pesfìm-
pelle. Et iceluy encore , double^
comme ' dict Iacques Speinger,
Tiommelequèí ayant esle'plusieurs
TRAICTE' DES DEMONS,
anne'es en Allemaigne inquisiteur
dcla foy , auoit apprins plusieurs
exemples de cette matiere. Car où
le pacte est simple, c'est à dire fans
tefmoins. D'vn tel pacte ayant vie
quelqu'vn, moy estât ieune enfant,
futprinsparlesiugesj&brusié. II
auoit este'trauaille' d'vnecxtre'me
HiBtirt. pauurete'j&pour-ce le diable I'a-
r- yant veu en angoiíïe,Iuy apparut
&luy promet qui le sera tres- riche
s'il Je veut croire. Cestui-cy luy
ayant accorde', le diable luy com
mande de faire vne cage de ser, &
entre dans icelleen forme de Nain
d'vne prodigieuse petitesse : mais
neantmoins auec si grande propor
tion de ses membres que rien ne
sembloit plus admirable: cestui-cy
donc en le monstrant apres auoir
faict vn grand amas d'argent,cstant
„ en fin attrape' fut puny. Ou bien
fdtit {u- Je p3ctc est pubHc - teJ quc l'on dict
' que se s enchanteresses le font , lors
qu'elles s'assemblent pour adorer la
beste & prester le serment. Ce qui
se faict en cette manieres ce que
bv P. Maldona t. i76
dict lacques Speinger. Premie- Vorme
rement que tous les Sorciers s'as- des Sor-
semblent en vn mesme lieu : & ciers.
âpres qu'vn de'mon leur apparoic
cn ie ne sçay quelle figure ( ils le
nomment Maistrot,ou petit mais
stre)qui leur explique publiquemét
certaines loix:Et apres s'il void que
celuy qui se presente pour estre:
enrollédes siés;soit mal-habille'.il
le resuse:s'ilestbon, ille reçoit.Et
en premier lieu il le contrainct de
renier la foy & resuser l'honneur
deu aux Sacrements : commandant
en second lieu qu'il se dóne au dia
ble de cœur&decorps ensemble-
ment: & luy enioignant d'attirer
d'autres autát qu'il pourra à la mes.
meprosession.L'on dit commune'- chara-
mentque telles personnes prennét Beredu
vne marque du diabIe,commed'vn dialjlt.
vestige de Heure ou de chat.Ce que
ie n'estime pas fabuleux : tant par
ce que ceseroit acte d'vn homme
impudent , de ne croire pas à plu
sieurs iuges,disans qu'ils l'ont apris
TrAICTe' DES DEMONS,
par certaine experience:quepar ce
aussi que cecy est accordât aux sain-
ctes lettres:commetout mensonge
prend son origine de la verite'. Car
encore que Dieu n'a point besoin
de signe pour cognoistre les siens
il veut neantmoins qu'ils vsent de
signe pour se rendre à luy,&estre
recognus entre les autres. Comme
à este' la Circócision au vieil Testa
ment: au nouucau, lacroixaufrót:
car icy,il à fallu que le signe fut e'ui.
CbdTÀ- dent:& là, qu'il fut occulte. Et
ffere de qu'au signe de la Circoncision ait
pieu. fuccedéle signe de la croix , fa inct
Hierosme , & Gregoire de Nazian-
zeneensont Autheurs. Lediableà
tousioursimite'cecy : premieremct
àl'endroict des Heretiques. Car
í comme il appert par Irene'e au pre
mier liure, chapitre vingt-quatre,
les Gnosticques marquoient leurs
disciples d'vn cautere derriere i'o-
reilledroicte.Ët apres, aux enchá-
Ueretiu teurs .'desquels toutes lessupersti-
quesmAu tions estrene'es de la religion, Iu-
1M\' stin l'enseigne au Triphon- , & Tcr^
dv P. Maldona t. i77
tullien au premier liure à sa semme.
Et au liure de la Monogamie, & de
la prescription des hereticquesril
laue (dit-il ) ancuns veritablement
desesfidelles&croyans,Ieur pro
met p urgemét à cause deson laue-
ment& encore ainsi les initie ati
culte du Soleil : là ìl marque au frót
ses soldats:il celebre encore l'obla-
tion du pain, & leur n troduict vne
reprelentation de la resurrection,
rachetant la couróne sous le glaiue.
Et par-ce,encore n'est pas incroya
ble quisedtô vulgairement que le
diable dóne aux siens quelque mar-
qucMaintenát d'autant que ie voy
que pour la. fcrìefueté du temps le
-ne peuxpouríuiureceque i'áuoïs
commence', ie diray quelque chose
de ce qui sert pour les mœurs. En
premier lieu, pour quelles causes
le démon se monstre aux hommes?
^Veritablement ie pense qu'il y en' a
'sèp't/princin'alç'sYL'a premiere d'aú-
"tant qu'il void quelques vris vuides
tant des autres choses, que de la
TRAl-CTE' DBS DEMONS^
foy : de façon qu'il semble qu'ils
cerchent maistre , ou bien qu'ils
attendent leur hoste. Par ainsi
quelle merueille est- ce si voyát vne
belle maison bien ballie'e , il silo.
ge ? La seconde est que souuent ap
pelle', il assiste à ceux qui n'ont rien
plus frequent en la bouche que ces
roots : ie me donne au diable ? Par
ainsiceluy qui de son bon gré rode
cerchát quelqu'vn à deuorer, ne re
fuse pas ceux qui se presentét à luy.
La troisiesme cause est , la curiosi
té, aux Actes vnziesme , qui ont
suiuy les curiositez. Et en lob cia.
quiesme. Car il ny a rien qui plus
conuie le diable que la curiosite',
de laquelle aussi il est fort studieux.
Et c'est la cause pour laquelle il y a
plus de Sorcieres que de Sorciers:
d'autant que les semmes font plus
enclinées à la curiosité.La 4. est l'a-
uarice : car aucuns pressez d'indi
gence s'adonneht à l'Alehimie, les
autres aux arts diaboliques. Mais
par la diuine il arriue,que iamais ny
desvnsny des autres personne n'en
Dr P. Maldona t. i78
deuint riche. Lacinquiesme cause
est la paillardise &luxure,de laquel
le le diable se delecte fort , & tous
les sorciers. Et par-ce, il est inouy
qu'vne Vierge ait este' sorciere. Cy-
íene' la paillarde nous seruira d'exé.
pie , & tyra la semme de Symon
le Magicien: selon Irene'e au liure
premier, chapitre vingt. EtEuse-
bc, liure deuxiesme, chapitre trai-
ziesme. II y a grande alliance entre
lapaillardise&la Magie: ce qui se
cognoist par son contraire :1a cha
steté void Dieu: bien- heureux ceux
qui ontle cœur net,&c. Et la luxu
re faict voir le diable.La 5.cause est
la haine & le defîr de vengeance.
Ainsi au i. des Roys i8. chapitre, le
malin esprit enuahyt Saiil lors qu'il
brufloit de haine. De mesme aussi j^/fcw
quelqu'vn pésantestre aux champs
corne il pourroit blesser só ennemy
contre lequel estoit irrité & fort a-
charné.voiát à l'improueu passervn
cheual,pensant(cómeil estoit vray)
quecefutvndémonjilcomméce à
lesuiurc:& estant conduit par luy
TrAICTE* DES DEMONS,
en certain lieu , ou il n'eust iamais
pen é que son ennemy peut eírre
cache', il tue. Cequim'aeste'quel-
quesfois recite' par iceluy auquel le
meurtrier mesme l'auoit racompté.
La septiesme cause est la triíleíTc-: en
laquelle l'on ne cerche point con
solation en Dieu.

SI LE DIABLE P E VT
ESTRE AR RE S T e' PAR
aucun art.

/"N Velques vns ne crovent pas


veyoir V^quele diable apparoisse à per
ist esprtts. fonne. Les autres au contraire font
familiers.- si credules que tout ce qui se pre
sente à leur veuë ils estiment estre
vn de'm on. Et l'vri & l'autre est er
reur: le premier naist quelquesois
de diuerses causes: comme d'im-
pìete' en aucuns comme ceux qui
ne croyent qu'il ny ait ne Dieu ne
diable. Desquels il est auiourd'huy
tres-grand nombre,tellemët qu'au-
euns se vantent ouuertement qu'ils
»v P. Mal d on a t. i79
dónccoot tout leur bien àceluy qui
leur monitrera vn démó. Ht par- ce
ilíeinbleque la prouiuéce de Dieu
permet que 1c diable se monstre si
familierement à tant de gens: afin
qu'au moins les Athees apprénent
par là}ce qu'ils ne croyent pas, qu'il
y ait quelque chose par de(sS le mó-
de.Es auties cet erreur naist de trop
de foy: c'est à dire de foy indiscrete:
appuyee fur certaine grande opi
niatrete'. par laquelle ils se sont per
suadez n'estre pas vray ce qui se dit
des démons. & ceux- là encore diset
qu'ils payeront bien cherement-
celuy qui leur monstreroit vn de'-
fnó.Et l' vn & l'autre erreur est cau
se que souuét le diable on ne puisse,
ou veritablement ne vueillepas se
móstrer. Mais le contraire le colli-
ge assez des lettres íacrees. Car en
l'Exode ch-y.& S.Plur.ió avant ap
pelle les diables, imita quelques
miracles de Moy se, comme l'inter-
pretent les Theologiens qui pen
sent que" les serpens qu'il exhiba
estoient vray s, Q,ue si ce passage est v
TrAICTe' DES DEMONS,
De laVy- debatu , veritablement l'exemple
tboniffe fi qui est au premier des Roys, chapi-
Samud tre vingt-huit de la Pythonisse , est
fut fujìté. clair, par laquelle tous les anciens
pensent que Samuel mesme ne fut
pas appelle, ains en fa personne,
vn démon. Comme Tertullien au
liu. del'ame,chapitre penultiesme:
ja n'aduienne que nous croyons
l'ame d'aucun fainct ( tant s'en faut
qued'vn Prophete ) auoir esté tirée
par les démons : estans apprins que
Sathan mesme se transforme en
Ange de lumiere. Et iustin(uu qui
conque ait esté l'autheur des que
stions proposées par les Gentils)
question cinquante deux. Et Sainct
Augustin en la 2. EpistreàDulehias
& au liure du soing qu'ó doit auoir
des morts ch.i5. & au lui. 2. desqu.
du vieilTestament,cjuestiÓ2i.&S.
Hierosme sor le 5. chap. d'Esaye , &
l'autheur des merueilles de lafacrée
eseriture au liure 2. chap. n. en S.
Augustin tome 3. & Eucherius,&
AnselmuSj&Strabussor kìp.d'E*
íaye, & Procopius en la fin des Có-
dv P. Maldona t. i80
me ma ires fur le premier des Roys,
8c Isidore au liu. des Etymologies,
chap. p. & est recité en la 26. quest.
5. chapitre commençant : nec mi"
xum. Tous les Rabbins aussi font en
cette opinion , excepte' Sbcodis &
AïaCVoyez Munster fur ce passage}
tous ceux cy confirment cette opi
nion par ces raisons. La premiere,
qu'il n'est pas à croire que l'ame
d'vn sainct au commandemétd'vne
enchanteresse eust laissé le lieu de
repos. La deuxiesme , qu'vn si
grand Prophete n'eust pas ap-
prouuéparson exemple, la magie
chose tres- execrable- La troisiesme,
qu'il n'eust pas permis que 5aiil
l'eust adoré. La quatriesme qu'vn
esprit n'a peu estre veu cóme peut
le diable ayant prisvn corps. La 5.
par ces paro!es:demaí toy & tes en-
fans serez auecques moy , d'autant
que le lendemain , ils s'é allerent au
lieu non de repos , ains de tour-
mens. RabbiRinchi adiouste qu'il
est vray semblable que Dieu eust
plustost rcspódupar les Prophetes
TRAICTE' DES DEMONS,
& Prcstres que Saiil auoit consulté
que par lá Pythonisse. Le scullu-
itin(queiesçache) auTriphó,&S.
Ambroise fur le premier ch. de fait
Luc, furent en contraire opinion.
Etleurs argumens font, lé prem.
parce que l'Escriture le nomme
Samuel. Le deuxit sine parce qu'il
dict:pourquoym'astu troublé mó.
repos.Le troisie'me parce qu'é l'Ec-
clesiastique chapitre 45. il est dict
<j Samuel prophetisa apres fa mort.
Le quatriesine parce qu'il annon-
çoit les choses futures, & le démon
les ignore. L'argumét des Rabbins
est de ce q la Pythonisse fut effrayée
ce que ne fut pas arriuésice n'eust
esté Samuel mesines. Sainct Augu
stin en donne aisément la solution.
Car encore que cet ombre se nom-
mast Samuel & ait dit qu'elle estoit
inquietée,&c. cela neantraoins se
peut penser auoir esté dict seló l'o-
pinion de Saiil & de la - Pythonisse.
Ie laisse le demeurant- Mais quand
bien l'ame de Samuel #4.0 ra point
esté rappelléepar la Py thWfl~e,ains
D Y P. M A l D O N A T. l8l
1e demon mesme : Toqtesfois d'au
tant quel'opinion est grande parmy
h vulgaire, que par certaine Necro-
mantie les amesdes mortspeuuent
«stre rappellees. U ne sera point
Jiors de propos d'en discourir. Et
veritablement si nous en deman
dons l'-ad«is aux Poetes, il- ny a pr«s-
queriçn chez emc deplus frequent,
epmme d'V lisses en l'Odisse'e d!Ho-
mere tarifa* Et .en Virgile au
-quatrieme des Enéides,Dtío.,ditde mcrs.
quelque sorciere. mmiei
Par charmes elle promet deftier les
• '. ecrits,
Qu'elle veut, & dormer aux antres du
- V fa*®. yeri
lArrefler Veau du fie*ue,&faire à Con- »"f"™i
- ; ireçaurs ..." - & *".**
Les efioïlles rouler,® ks ambres noBur-
» t. ntS .J- .. r
J{appeller du tombeau. - '
Eten lá Paarmaceutrie ikícrit.
Ces herbes cespoifops^cpt,font choisis ai
Ponte,
^fatrisimtilesjihma ( a» Tome en naifi
TRAICTE' DES DEMONS*
\Auec icenx t'ay veu Maris deuenir
loup,
Et se mujser sonnent dans les fotests
espoifest
Et fument ramener les ornes du tom-
i.i -t»eMt&ó)' ''• '
II y a plusieurs telles choses dans
Lucianauò~. liure. Et Horace au i,
liure des Sermons Satyre huictiesme
escrit.
Canuhe i'ay xeu fur noir* robbecein-
ffe •/,:^.a
flâner auec nuds pieds , & leschentux
espars
%Auec Sagane : vrlans (lapâleur les ren-
doit :
Toutes deux d'vn regard horrible ) auec
-'-"--:. Iturs ongles i .
Elles gratoient la terre , & dément-
broient mordans '
Vne ^Aignektte noire : & par sonsang
confus
Les ombres rappelloient , pour leur don
ner response, drc,

Mais laissans à part & leors tables,


«clopinion du vulgaire, U£ut ar
dv P. Maldona t. ifrs
rester sermement. Et que les ames
nepeuuent estre rappellees par au
cun art , & si elles estoient rappel
lees , qu'elles ne pourroient predi
re le futur. Ainsi en parle Tertullien
& Isidore e's lieux susdits , sainct
Chrysostome en l'Homelie vingt-
neufiesme sur saint Matthieu, & tous
les autres anciens Chrestiens. Mais
bien, encore que par ce't art lesames
ne puissent estre rappellees, peuuçnt
a elles neantmoins apparoistre ? De
ceci il y a quatre opinions. La pre
miere de ceux qui nient qu'elles
n'apparoissent iamais:& disent que si
quelqu'vn asseure en auoir veu , il
est agité de quelques vaines visions.
La raison de ceux-là est qu'ils ne pé-
sent pas qu'il y ait de Purgatoire: 8c
que du ciel,ne de l'Enser ellesne peu-
uent estre tirees. Pour laquelle cau
se ne croire pas que les ames appa-
roissent, c'est heresie , combien que
de le croire simplement ne soit pas
heresie. Mais à tort Iacq. Lauather
& les autres Caluinistes nient qu'el
les apparoissét,par raisó qu'ils níét ìç
TRAÎCTE DES DEM0T9S,
(Purgatoire , attendu que leur Do
cteur Caluin, au troisiéme liure des
Institutions, chap. quinzieme, nye
que les ames iouyslent de la vie heu
reuse auant le iourduiugement. Et
fiuis, attendu que les Anges & bons
-&mauuais apparoisiènt ,.pourquoy
•n'apparoistront les ames ? La deux
ieme opinion a este' des anciens
-Chrestiens : qu'il ne faut iamais
croire qu'aucune ame apparoisse,
.encore que les aucuns asseurent _
.qu'ils en ont veu. Ainsi en escriuent
Tertullien , & Chrysostomee's lieux
alleguez. Et encore le mesme Chry-
íbstomeenla 2. & quatriesme Ho
melie du Lazare. Et en S. AmbroW
-sel'Autheur des questions à Antio-
fhus, question vrtzie'me, & i3. Et
Theophil. fur le huictie'me chapi
tre de sainct Matthieu , &' Berthe-
4cmy de Bresse au Canon nonferen-
lium , trezie'me , question deuxie'
me, dit que l'opiniondes Iurisscon-
sultesest, que ce sont purs fantómes.
Ces Autheursne font differens des
premiers, sinon de la raifon,attcndu
I5V; P: M A EDO N A't. . i85;
qu'ils croyent le Purgatoire. La troi-^
siéme opinion est du vulgaire : e*
stre ames , ces visions qui se di
sent estreames. Mais il faurvoircó-
biexi il en faut croire. Tenons dona
en somme que les ames ont accou-
stume' d'apparoistre quelquesfois,
mais rarement. Et cecy sc preuue,
premierement par le liure du soin^
qu'on doit auoir des morts , en
ftinct Augustin chapitre quinzic-
me , & seizie'me. II ne se peut ( dit
celuy qui en est l'Autheur quicon
que il soit ) nyer, sinon impudem
ment , que les ames des trespafièa
n'apparoifsent quelquesois. Et le
confirme par certaine experience:
mais luy-mesmea opinion que cela
arriue peu souuent. Et puis si en S.
Matthieu dix-scptie'me , Helie de
Moyse.par le vouloir de Dieu ap-^
parurent , pourquoy ne croirons-
nous que par le mesme vouloir de
Dieu , les ames des morts apparois-
sent quelquefois aussi.MaiS comméV
faut-il discerner si c'est vne ame qui'
apparoit ou non ? Ie pense qu'il laJ
TRAICTe' DES DEMONS^
faut demander ainsi. II arriuequel-
quesfois & que ce n'est pas ame ce
qui apparoist , ne l'Ange bon ou
mauuais , ains vne pure imagina
tion de l'homme , ou craintis ou
fort fasche. Comme sont aucuns
lesquels autant de pierres qu'ils
voyent és tenebres pensent voir tout
autant d'à mes. Autresois ie pense
que le bon Ange apparoist: ce que
ie pense arriuer lors que quelqu'vn
propose de faire quelque chose de
bon,encas que si l'ame de son pa-
jent apparoissc : Comme au con
traire le demon fut prest de se re
presenter à Saiil , au premier des
Rois , vingt-huictiesme. De cc
peut estre exemple ce que recite
Damascene au liure , s'il faut prier
pour les trespassez , prins de Palla-
dius : de quelqu'vn qui estoit en
peine s'il falloit prier pour les morts
&setournant deuersvn test de teste
qu'il auoit d'auenture deuant luy,
il entendit vne voix partant d'iceluy
disant: les oraisons nous profitent.
A mon iugement ee fut le bon An
©v P. Maldona t. i84
ge, d'autant que la chose estoit bóne.
En 3. lieu ie pense que le diable ap-
paroist quelquesois pour deceuoir.
Comme nous rend assez de foy ce'c
exemple de.Laon fi cler & remarqua»
ble que personne ne le peut desnyer.
Pour le 4. i'estime qu'aucunefois ap-
paroit lame m.esine , ou pour nostre
faueur (comme apparurent Moysc &
Elye ) oupouf la sienne , afî;q qu'elle
demande quelque chose. Mais de
quels remedes faut-il vserîle respons
,qu'en partie de prudence, en partie
de piete. Efçpjftqdençjeque l'on croye
moins aux femmes qu'aux hommes,
comme dénature plus timides : &
encore mojnsaux hommes craintiss,
qu'aux asseurez. Et puis ne pensons
pas que les remedes de l'Eglise y doi-
ue,nt estre employez , auant que
la phose soit certaine. De pieté : que
lorsque cela sera cler, nous yfions
des remèdes de l'Eglise d'exôr-
cismes , d'aumosnes , de ìcusnes , &
d'oraisons. Mais retournons auijhç-.
min duquel nous estions departis,;
Les demons peuuent-ils estte ap-
peliez pair quelque chdfe , ou chaP
sez? Les chose^aùec lesquelles nous-
entendons que cela sc'&it- sont fort'
difserentesi tes aucutìeís- diuitìesV
ewwme laPv'olostté de DieuH aífee-te-'
quelle íesttS Christ mesme chassa-
les diables. Les aufres-sont nattwel-1
les, coiwrarç pierMS,4Wit;es-,-stfears;:
l&ï autres nse? fehí. dkHStíS^ itëKM
rtîles , ai«S pW ctírtaîfiè'pítfpVttíç:1
iïioraW f par &p*bfir*Ìnst£tTft$W
4e* hommes y 'fignifiàtftesi GàriiT,-
me sont les véi^par feíqtìefleS/íes ,
tíheiíauj: ícmtr^tàïfe^2>Waí'èft!-.'
te* à là' cotìffé:' íLeá!sàtí»leS 'q^tf'oW
seulement ve'rïtt d^!sigfleV prftWïí
comme lors qù:^ fon^pellò efìteP
quVn, pïr quelque stgfte de main,
pat lequel w auwe petffereíit' estrC
diassé; Et - V^tatltemeW' 'refus
€hrist stKe'ék- WÙtíuVX& ï&ÙAi~
tttf guerit vn atìeugiè r d'autant" que
la saliue signifie la vertu dîuine : & 1*
boue, la naturelle. Et toute magie1
& foperstition est née <Fvne per-
uerse imitation des dHoses sacrées:
Açíst patatíenture que les choses
&'t K'.MÁid'o» 'a t. i85
diuines peuuent estre mefiees auec
les naturelles : donques de ce pte-^,.^,,::
mier genre des sacrées il semble que sesacree..
les demens peuuét estre attirez d'au.
tant que cela est accordant aux let
tres sainctes: toutesfois Dieu ne le
permet iamais. Donques cecy soit
tenu pour reigle : toutes les fois que'
les Magiciens vsent des choses
sacrees pour attirer vn demon
(comme des Sacremens , du signe
de la Croix -, des mots de TEuan-
gile ys'ilapparoit il faut croire qu'il '
est venu no pour la vertu de ces cho
ses là j ains de. sa propre volonte' : ou
parce qu'il y auoit d'autres choses
conioinctes Scelles. Mais à sçauoir far
s'ils peuuent estre allichez par cho-^"*"^
- ses naturelles comme les Magiciens '
se vantent ? Nous lisons aa premier
des Rois, chapitre iií. Que toutes
les fois que l'esprit malingdu Sefr
gneur empoignoit Saiil , Dauid pre-
noit fa harpe Sc en ioiioit , 8c Saiiî *
se recreoit & se trouuoit mieux. -
Car l'esprit' rhalihg s'en alloit d'à*
uecluy. Et au quatriesme des Rois -
TRAICTE DES DEMONS,
chapitre troisiesme Elisee voulant
deuiner , commandoit qu'on luya-
menastvnioiieur d'instrumés, cora
me si le bon esprit deuoit estre attiré.
Et en Tobie 6. le demon Asmo-
dee fut chasse' par vn petit lopin de
foye. Ioseph au liure des antiqui-
tez huictiesme chapitre escrit qu'il
auoit veu vn ieune homme luis
deuant Vaspasien , chassant vn dia
ble , en luy presentant vn anneau
au nez , auquel estoit enclose vne
racine que Salomon auoit escrit a-
uoir la vertu de chasser les diables.
Eusebe au liure de la Preparation
Euangelique chapitre 6. Quelle di-
uinite' ( dit-il ) ont cerik qui font de-
iettezà si grande misere que d'estre
detenus par les hommesìCar si la na
ture diuine est du tout impassible,
comment seront Dieux ceux qui
par quelques habits , linges , figu
res couleurs , fleurs d'herbes , &
par certaines ineptes & barbares pa
roles font attachez par les hommes
.comme par quelques liens ? Sainct
dv P. Maldona t. i86
Augustin liure vingt-vniesme de
la Cite de Dieu , chapitre sixiesme:
Mais les demons font allichez pour
habiter , par des creatures que non
pas eux, ains Dieu a faites, pardiuer-
ses choses delectables, selon leur di-
uerfìté, non pas comme animaux par
viandes, ains comme esprits par si
gnes conuenables à plaisir d'vn cha
cun i par diuers genres de pier
res , herbes, animaux , carmes, ce
rémonies. Et Pscllus au liure de la
Demonstration , chapitre dernier
dit ( prins de la somme de Marc
Ephesien ) que les démons sont
attirez , & effrayez par choses na
turelles: Entre lesquelles il met aus--
si vne espee desgainee ( Car encore
que ce ne soit pas proprement vne
chose naturelle , toutesfois elle a-
git en maniere naturelle } & dict
que par icelle est chasse' le diable,
& le Ly#n. Ioscph au liure sep-
tiefme de la Guerre Iudaïque cha
pitre vingt-einquiesme escrit qu'il
y a vn lieu nomme' Baaras auquel il
TkAÏCTB' DES DEMONS,
iHtist vne herbe de mcsinc nom, ay át-
la vertu de chasser les diables. De
maniere qu'il peut sembler moins-
febaleuxcequefcrit Pline de Aglo-
photis & de Phoetis) an vingt-qua-
triessme liu. cliapitre. dix-septiesme. -
Et .£liam au liure quatorziesme des
animaux. Dionylìus Aphricanus &
Synesius au fueillet 92. Mais si les
démons font allicbez par choses na
turelles, cela s entend en quatre ma~-
riieres. La premiere promptement-
par leur vertu : comme le sea; attire
rOr pur , &- chasse- l'impur. Et en-
ceste maniere il est certain qu'il ne.
fë peut. En premier lieu , d'autant
que les demons n'ont pas de matiè
re. Et vne chose materielle ne peut
de fa vertu agir contre vne ípiri<*
«relie. Et puis quand bien seroient
corporels , ils ont neantmoins vne
volonte' libre. Et parce ils ne peu-
went estre ou attirez, ou ctlalsez, si
non par vne apprehension violen
te. La seconde maniere impropue^
ment à cause de la volupté , ou fas-
cherie qu'apportent les choses aa-
»? P. Mal d on a t. i87
turelies : comme quand on dit que
quelqu'vnest attiré par vnbeau lieu
& chassé par vn mal plaisant. Et en
ceste maniere encore cela ne se
peut faire , attendu qu'ils n'ont pas
de corps : & là où il n'y a point de
corps , il n'y peut auoir ne volupté
rie douleur , ne Sympathie. Caren-
core queSynesio* & Eusebe & par .
auanture sainct Augustin ayent esté
de contraire opinion, il ne s'en faut
pas tant esmerueiller : car de leur
temps tous les Anges bons & mau-
uais estoient estimez auoir corps.
Ils estoient esmeuz par les exem
ples cy dessus alleguez, d'Asmodee
chassé par la íumee du foye , du bon -
eíprit attiré par Elisee parle moyens
tfvri ioiïeuriì'instrumens , & au con
traire du malinjpchassé par la harpe
dë Dauid:. Mais les Theologiens
interpretent Aímodee auoir esté
ehassénofî par lá vertu du foye, ains
par la volonté de Dieu: Comme et* -
fairict Iean 9. leíu» Christ guerit
ainsi' les yeux: de l'àueugle né, non
par la vertu de la boue ains par la
» 1 RAÏCTE DES PfcMONS,
sienne cóme tous les iours les pechez
par le moyen des Sacremens. Car
Dieu a de coustume de faire quel
que chose .aucunçsfois par^vn seul-
clin d'œil ou par vne parole , queN
quesfois s'accommodant à la na
ture des choses , c'est à dire- y ad-
ioustant quelques choses presque
comme medicarnens, aufquels tou-
tesfois n'est pas la vertu d'agir. Ain
si quand il a guery auec de la bouë
les yeux de l'aueugle-ne' , d'y auoir
niis vne chose exterieure , il le fit
s'accommodant anostrenature:mais
l'ayant fait en vne telle chose qui
sembloit plustost yestre du tout con-
traire,il monstra fa puissance. Et que
ceste-ci soit vraye interpretation, il
se colligedece passage de Tobie: A-
lors ( dit-il ) Rappel empoigna le
diables l'attacha au desert de la plus
haute ^Egypte. Quelqu'yn dira pa-
rauenture que cela est contraire au
«í.chap. de.Tobieou l'Ange interro
ge' par le fils de Tobie , reípond : v-
ne petite partie du cœur si vous
h mettez fur les charbons chasse
DV P. Maidonat. 188
toute espece de diables. Par lesquel
les paroles semble estre signifiee vne
vertu naturelle de ce cœur. Ie res-
pons que cela se doit rapporter à Ie
sus Christ par mystere, & allegorie
double. La premiere est de Prosper
auliu.des promesses & predictions,
partie 2. ch. 39.0u il interprete qu'e
stant le poisson euétre Asmodee sera
chasse' , c'est à dire mort Iesus Christ
le diable sera chasse' du monde. Et
pense que la mesme allegorie soit
en ce't acte delesus Christ en sainct
Ican 2 z. là où ayant trouué vne pie-
ce d'argent dans vn poisson euentré,
il paya la taille. Car il dict, ainsi c-
stant Iesus Christ ouuert en la croix,
le pris de nostre Redemption fut
trouuee. L'autre allegorie est ame
nee par Lyranus , au premier des
Rois , chapitre seiiiessme , que ceste
fumee signisie loraison partant de
l'tnterieur du cœur. Par sa vertu le
demon est chasse' , En sainct Mat
thieu dixseptiesme , sainct Marc
neufiesmej ce genre de diables n'est
chasse' sinon par oraison & par ieusne.
TRAICffE' DBS DEMOSTS,
Et que par la fumée soient signifiez
les orai!bns,il appert par le huicties-
me chapitre de l'Apocalipfè. Mais
rí/Z que lcsus Christ ait esté nommé pai
« lès anciens , poisson , & en Grec
'• ìx&m; sainct: Augustin au dix-hui-
tiesme de la Cite de Dieu chapitre
vingt -troisiesme, dit que cela est ve
nu de la diuination de la Sybille
Erithrée : laquelle par vers acrosti-
ques exprime és premieres lettres
des vers ces mots Ie^òuj Xyrìs ©íw
viò? eiarnç c'est à dire , Iesvs Christ
Fils oh D^ihv, Savvevr.
Et par ceste raison Ckero au deux-
iesme liure de la diuination preuue
les vers des Sybilles p§rtir d'vn es
prit qui n'est point esmeu , ou
poussé de fureur , ains attentis:
sainct Augustin recite lesdits vers1
au lieu cy dessus allégué. Est mefiné
opinion est Prosperau liure cotécy
deuant: iy$ì,< ( dit-il ) nos maieurs
en la saincte EscritureTont interpre
té poisson : le colti geant des vei1s Sy-.
bíllains qu'est Ie<vs Oh r is t1
Fils -q- et Diev^ SayveyR.
S V P. M A L D Ò N A T. l8p
A cela bat ce dire de Tertullien au
prem. liure du Baptesme: les cruels
Viperes, & les Aspics, les Serpens
Basiliques, suiuent les lieux secs Sc
fans eau : mais nous petits poissons
viuonsenl'eau selon nostre poisson
.X&û, I e s v s C h R i s t. Ou
H faut noter que par le nom des
cruels animaux , Serpens Basili
ques & tels mots- sont entendus
les heretiques qui sent oient mal du
Baptesme : Au contraire, les Cfare-
stiens qui sont baptisez , sont en
tendus par le nom des petits pois
sons. "Tant à causiV de! h s y j;
€ tí R i s t îxâùj que- parce auíiì-
qu'ayans esté Serpens pleins de ve*
nin auant le Baptesme, par. le Ba
ptesme ils ont esté faits petits pois
sons , c'est à dire , vuides de tout ve«
nftt. D'autant qu'il fait allusion à
îa nature des poissons qu'il est cer
tain estre fans venin : Et des Serpens-
desquels on dit les aquatiques estre
exempts de venin-: & les terrestres
au contraire sont venimeux. En la
troisiesme manière il se peut enten*

-
TRAICTE- DES DEMONS",
dre que les demons sont attraicts,
ou chassez par choses naturelles, non
quelles agissent contre les demons
ains contre- les hommes : ou en les
disposant aux effects que le demon
veut exercer fur eux , ou en leur
ostant la disposition. En . ceste
maniere il est vray-semblable que
le demon estoit constumier de se
departir: deSaúI , la harpe sonnant
& que le bon esprit saisit Elisée, le
loueur dlnstrumen&faisantfon of
fice. Et òr Mòyse ò'a point -eu be
soin d'vne telle ayde: car il est dit,
qu'il fut plus excellent que: tes. au-.
tfNcs: 'Prophetes. i Rlufíeurs autres
eboses sont ' recitées sor íce propos
par Rabi .Mose ./Egyptien aii
liure; More, & au liuret des srei.ze
articles; ^ En la trpisiefóie manie
re les demons ipeuuent eûfe .ap
peliez où chassez par _chpses na
turelles , comme par signes 'insti
tuez par les messmes demons ., com
me dit Eusebe :,- su liure qua-
triesinede la Preparation Evangeli
que , chapitré sixjiesme Gc septief
DV P. Maldonàt." I90
me, comme aucuns des chess-, par
signais diuers , assemblent les sol
dats en la guerre. Et ainsi est-il
semblable tous magiciens , en
chanteurs & sorciers attirer le dia
ble : c'est à dire par pacte pu se
cret , ou corps comme nous a-
uons dit ci dessus. Et par ce
quand en iugement ils consessent
auoir employé quelque chose de
tel , il n'y a poinct de doute qu'ils
ne soient punissables , comme
ayans , fait pacte auec le diable.
D'autres fois ils méfient des cho
ses naturelles auec- des diuines en
imitation de nostre religion r ou
nous voyons qu'aux paroles , nous
adioustons l'eau. Eux de mesme
quelquesfois à la cire ( pour
exemple ) ou à ta laine, ou à quel-
ques linpes , adioustent des Sacre-
mensdeTEglisc, ou quelque Pseau-
níe. Toutes ces choses font supersti
tieuses ,&monstrent quelque pacte
ou secret Ou expres auec le diable.
Maintenant auant que nous parlions
de ee qu'il fottt dire des choses fur
. . Traicte' dss^ DEMOKS% »
D'apftl- lesquelles le demon peut exercer far-
ht le puissance, ie veux attester s'il nous-.
étblt- est licite d'appeller les- diables. Vc-
ritablèment oest chosamerueiHìeu^
Sk de voir auec quelle seuerite les
seihctes lettres le piodíilíent au Lc-
uitique dix-neufiéme : Ne vous ad—
dreísez point aux Magiciens , 85 ne
vtous- enquestez; de ri«n aux de-
uins pour vous souillèr^ar eux: I©
sois le Seigneur vostre Dieu. Car
ces derniers mots adioustez ont tel
le vertu , qu'ils signifient ce qu'est.
deffendu estre tel, que s'il est fait,
on commet idolatrie. Et au vingt
ième chapitre , llrorrrme óu lar
semme , esquels sera" l'esprit Pytho-
nique ou de diuination, qu'ils meu
rent de morr, Us seront lapidez, ôc
leur sang sera sur eu*. Et au. Deu-
teronóme dix-huictiesme. Lors que
ru seras entré en la terre que le Sei
gneur ton Dieu te donnera , garde
toy de vouloir imiter les abomina
tions de ces nations-là : Et qu'if ne
se trouue entre vous aucun qui face
passer son fils ou fa fille par le sety
Psv -P. Mal dona t. ît?i»
ou qui interroge les deuins, ou qui
£;bserue les songes-, jOu les chants
des oyseaux , & qu'il jiy ait aucun
sorcier ne enchanteur ,ne qui de
mande aduis aux esprits familiers,
ne deuins , ou . qui demande la veri
té aux morts. Car le Seigneur á en
abomination tout cela. Età cause
detelles meschancetez il les chasse
ra à son entrée. Tu- fe-is .parfait , &
fans macule deuant ton Dieu. Ces
nations desquelles tu possedes la ter
re escoutent les enchanteurs & de
uins: mais tu as este' autrement ap
pris de ton Seigneur , &c. Et an
deuxiéme du Paralypomenon , cha-
-pitre trente-troisiéme, entre les im-
pietez de Manafïez cecy est , recité
^qu'il obseruoit les songes , s'addofl-
nojt aux Arts magiques , & auoit
-auec luy des interpreteurs de songes
deuins. II y a d'autres tels :tesinoi-
gnages en Eseye chapitre liuicties-
me , en Hieremie chapitre vingt-
huìctiesme. Et és Actions neufiéme,
ici liures.de ceux qui auoient recer-
daé des ; curio fit.e z i fu rent bradez.
- • iRAICTE DES DEMONS,
Et parce , que personne ne s'abu
se sous ce pretexte , qu'il n'y a

ía verité, ou d'aucun autre tel. Car


l'escriture apprend absolument estre
vne atroce meschanceté de pren
dre aduis du diable en quelque ma
nière que ce soit, & la raison est ai
see. Car nous ne pouuons appeller
les diables sinon comme superieurs,
ou pareils , ou inferieurs. Comme
superieurs , on par l'authoritc de
Dieu , encore que le diable en puisse
estre contraint , toutesfois Dieu ne
permet pas que nous en vsions. Et
quant nous l'vsurperions nous se
rions comme les feruiteurs qui pren
nent quelque chose sur des lettres
Falsifiees de leurs maistres,ou par no-
streauthorité, & en ce nous serions
témérairement , d'autant qu'il ap
pert par les eferitures que nous
-sommes inferieurs à eux. Nous
ne les pouuons pas appeller com
me pareils , les prians amiable-
ment , ou comme inférieurs c'est à
dire obligez à eux par vœu, d'autant
DV P. Maidonat. ' TQZ
que Dieu ne veut pas que nous
ayons aucun commerce auec eux.
Adioutons , que consulter le demon * s^le
ou les deuins, & autres tels touchant mestre À
les choses à venir, c'est le raire Dieu: direquel-
d'autant que c'est à Dieu seul de c<3?1utchofe
gnoistre telles choses. * tntT-e
o t.chas.

EN QVELLES CHOSES LE
DIABLE PEVT EXERCER
fa puissance.

IL y a de trois sortes de choses fur


lesquelles le diable peut exercer
fa puissance.Les biés de l'esprit, ceux
du corps, & les exterieurs : fous le
nom de biens d'esprit est entendu
l'entendemét & la volonte'. Sur 1 en
tendement il exerce fa puissance en
trois manieres en ostant le sens , en
persuadant ,tSí en âpprenantîesiatts
dedeuination. Or que Jes demons
puissent oster le sens l'eseriture. l'en
seignera nt par l'exemple de Síiil tó-
'fcant eu fiírotwìau premier des; Rois
i6;quçpar eehj dès. Ltiaayij. en S.
1RAICTH ITES DEMONS,
Matthieu dix-septie'me desquels il
n'y a point de doute, que le diable
: ne leur oîle le sens en certains temps.
Et puis , il y a des mcdicamens qui
ont la vertuîde raeecre hors du sens;
laquelle yerta n est cogneuë deper-
íbnne mieux que du diable. -Ceque
les Theologiens ne prennent pas.de
maniere que rc diable agisse contre
l'entendement , mais .d'autant qu'il
trouble la partie.capable.de la fan-
tasie , tellement ., qu'elle ne petit
exercer son office i il en fart de mes-
tne en retenant longuemét les hom
mes en quelque orde meschance-
te. Car ceuxqui ont esté. long temps
addonnezj.ou à l'amaur, ou à l'a-
;uarice,ontaccoustume d'estre trou-
-blez d'esprit. Et parce i'esti me qu'il
«rriuequelquesfois par l'ccuure du
diable , ce dont ces ministres se van
nent souuent , c'est qu'ils hebetent
'leshommes, & les mettent hors du
sens. Quant à la persuasion ,;ce pro
pos est reserue' pour vn autre en
droit r Et parce il reste à parler de
î'art de deuiner. Les Grecs nom-
D V P. M A I D O N A T. Ip^
ment l'act de cìiuinaticn ou bonne
ou mauuailc Mantic ou M igie. Us
l'ont diuisc'e en especes presques
innumerables, comme recite Pline
au 7. liure chapitre 50. kqucl à tort
oblerue' la methode de la diuinatió.
Aucuns en nostreteps ont dit que
l'vne est naturelle, c'est à dire,prin-
sedes choses naturelles : l'autr e est
diabolique. Laqaelìídiuision ils
ont pris de PÍellus au liure p.ehapi-
tre 25. Les autres ont d ict plus exa
ctement qu'il y à l'vne nommce
Pneumatique c'est à dire venant
d'inspiration Diuinc : l'autre rhisi-
quenaturelle ouartisiciclle:l'autre j}'u<iflon
commune ou populaite , propre fa\.xnntr.
des personnes ignorâtes Sc compo-
se'edequclqsobseruatiós de vieil
les. Quant à moy íe pense qu'il faut
la dmiser ainsi que Vvrtt. soit natu
relle; l'autre nónatureHe.Et encore
de celle qui n'est pas nitsrelle^l'vne
est l)inine5comme est la prophetie,
attendu que' c'est certaine ficulrc
de deuiner : l'autre est diabolique-
suggerée par les malin.is demens:
R
„ TRAICTE DES DEUUfli,
j L'autre est me sle'e:e'est à dire cópo-
see,partic de la diabolique partie de
la naturelle. Et ceste tipeie-cyeít
tres pernicieuse : d'autant que les
hómes parent souuétìa diabolique
du beau nom de naturelle magie,
Tildtbem. Etparccil me louaient de ce qu'vn
excellent mathematicien auoit ac-
coustumé de dire : qu'il y en à plu
sieurs quiestudient aux mathema
tiques en intétió seulemétde cou-
lirir les arts diaboliques de ladiui-
nation, de l'Iionneste nom de Ma
thematique. Ces gen^ là font sem-
- biables aux semmes qui se marient
"Magie- pour leur aduItere.La magie à pits.
naturelle- que autant de genres qu'il y en a Je
chofcsnaturelles.Carl'vne-cstprin.
se des Astres nommée Astrologie:
l'autre dufeunóme'e pyromantie:
& ainsi des autres choses , com
me de l'eau , de l'air, des herbes,
des arbres. Or il faut prendre gar
de que les choses naturelles sent
eníemblement causes tk signes des
choses futures : comme au pre-
. micr du Genese : le íokil & la Lu
dv P. Maldona t. i04
nc ont este faicts en (ignes & temps.
Autresois au contraire font cstccts
& iìgnes,comme l'Ecclypse est l'cf-
fect de rinterposition de la terre &
le signe de la meime interposition.
D'autre rois, les (hoses- naturelles
font telles quelles ont quelque s-
fois vnc commune cause auec ce! les
fur lesquelles sefondc !a diuinatió.
-Et parce c n S. Mathieu i6. íeíus
Clrrist dict: loi s que vous voyez le
ciel rouge, vous dictes, il sera de*
mainclair & íerain ,car le Cielest
rouge- Car la refplendiíTeur du So
leil & de la Lune est signé de sere
nite' : non pas qu'elle en soit caule,
ains d'autant qu'elle est l'effect de
la serenite' future. Quelquesfois el
les sont seulement signes instituez
pour signifier. Comme en Gencse
dixneufiesme. L' Arc au Ciel à este'
institue' de Dieu pour signifier qu'il
ne sera point d'aurre deluge. Quel-
qfoîs font signes de la chose ou pas-
sec ou future, mais c'est tellement
que parla permission de Dieu elles
arriuent contre l'ordre de nature.
R ij
TRAÏCTe'dES DEMONS,
Comoie lors que le Soleil arresta
soncours enloluë ]o. & se recula
par dix degrez , En Esaye dixhuict-
iesme. Etïeíus Christ endurant fa
mort&pa.sion il s'obscurcit : &
s'obscurcira vers la fin du mon de en
S. Luc 25. Et que l'estoille alla de
liant les Roys,Et toutes telles cho
ses se nomment prodiges. Tenons
donc pour reiglcgeneralle , Que
toute deuination prinse des choies
naturelles, lesquelles ne font ne la
cause, ne les effects , ne n'ont la
cause commune est diabolique ou
certes fort suspecte , iusques à ce
qu'elle se verifiera estre diuine.Có-
me siquelqu'vn deuine vn sutre de.
uoir estre pendu,ouque quelqu'vn
ait desrobe' quelquer chose. Parce
qu'il ny a aucune chose naturelle
qui putsse signifier rien de tel. 11 est
à noter ausíi qu'il importe beau
coup à quelle intention quelqu'vn
tleuine par les choses naturelles.
Car il y en a qui pensent que par i-
celleson peut vrayeméteogneistre
ks choses futures ; Et par- ce qu'ils
DV P. M AL DON A T. TpJ
sont en ignor áce ils n'ó: pas merité
autre chose fuió d'estre enseignez;
Les autres, doutans de la vertu des
choses naturcUes.toutcsfoiss'cíFor,
cent de deuiner : & ceux-là font bié
en plusgride fjute.&meritent d'e
stre re primez, comme gés curieux.
Les autres, fç/achant bien que des
choies naturelles ne se peut pren
dre aucuniugemét des.choses,tou-
tesfoisfouz ce pretexte ils couurét
l'art diabolique: & ceux- là fans au
cun doute doiuent estre bruslez.
Mais la diabolique & mefiée deui-
nation à esté inuétée par les démós
èl'imitation de la diuinc. Dócques
attendu que la diuine se faictaucu-
nesfois fans choses externes ( corne
Elie prophetisa sás aucune ceremo.
nie ) d'autresfois auec choses exter
ne (comme au 4. desRoys3-& 29.
cha.vnioueurd'instrumens fut cm-
ployé , afin qu'Elisée prophetisast,
& ailleurs est employée vne dáce.)
De mesme aussi quelquesfois le
démó suggere de luy seul à deuiner,
quelquesfois il y adiouste chose ex
il iij
TRAICTî.' DES DEMON S»
ternes Et encore, fans choses exter
nes , ilfsltdem'ner tous les veillans
ou Jormans , encore cecy à i'imi-
tation des choies diuines. Et les
veillas encore en quatre manieres.
La premiere, d'autant qu'il habite
auí c eax.il parle secrettemét à leurs
esprits. Et cecy se peut nommer
fseado Píeudo prophetie , de laquelle il se
Prjp/;. parle tintés lettres sacre'es. La 2.
comme les Prophetes estoient si a-
grtez delcur esprit qu'ils sembloiét
insensez (cóme auprem. desRoys,
i9. Sauleìt il pa . entre les Prophe
tes ? car ils deuinoient estans nuds
& dançans : ) de mesine aussi le
diable tourmente les siens par yr,
Enthusiasme. Et de cette espece,
c'est à dire inspiratió& certaine fu
reur diabolique me semblent auoir
Sybilles, c^e' poussées les Sy billes ( combien
que ie sçay qu'aucuns en pèsent au
trement) &contrainctes par la vo
lonté diuine , auoir dict le vray,có-
meen l'Euangile le diable dictttu
es le fils de Dieu. La troisiesine:
est celle qui est ordinaire en l'hom
DV P. Maldonat. 1ç6
me , comme le bon esprit occupoic
tousiours Moyfe. On les nomme
magiciens eiprics de Pithon. Des- fythonì-
quels on à faict; diuers iugemens. ^ue.
Origene à p:níe'qij'aucuns des leur
ens\mceauoiem vn espritPythont-
que. Contre laquelle opinion Me-
thodius à escrit tout vn liure. Les
autres ont nommé Pythonîque
tout maling esprit de diuination.
Les autres,celuy qui deuinoit par
les Astres. Les autres ccluy,qui
deuineparleventrc.Etainsise de-
uoien c entendre les passages de l'E-
críture esquelsilse traicte desPy-
thoniques cóme il se collige des au
teurs prophanes.Plato auTime'e a
escrit de certain Euricles Pythoni-
ques: De la maniere de deuincrda
quel Aristophanesfaict.allusion en
h page cent- quarantiesme. Etpar-
cec'estoitvn esprit lequel demeu
rant au ventre, parloit par Testo-
machjOupar le nombril, ouparlej
parties honteuses. De mesrne aussi
Plutarque au liure pourquoy les O"'
R iiij
TrAICTè' DES DEMONS,
racles ont cesse':il n'eít(dict- i\) pa s a
croire que Dieu entre dans les ho
mes comme lont les Engastromi.
thes dans les Pythoniques.Et Iam-
bliquc au liures des Egyptiens , se
mocquedequoy les Dieux des Gé-
tils ieuinoiét par ces mébres-là.O-
rigene au commencement dusept-
iesme contre Celsus (ce que toutes
fois explique autrement Eusthatius
fur le 7. de llliade ( enseigne que la
deuineresse de Pythius Apollo
Delphique deuinoit tellement que
kde'íronparloitparses parties de
la generation. Et par cêt argument
làilapreuué qu'ils n'estoient pas
Dieux. Demesmeenfaict sainct
Chrysostome en l'Homelie vingt-
neufiesme sur la premiere Epistre
aux Corinth. Adioustonsy l'opinió
des Hebr.lesquels(comme ditGe-
ródësis 2: .&28.sur les l.de l'exode)
dyent qu'il y a des Pythons qui ha
bitent au ventre ,& parlent par Je
nombril, ou par la poictrine, qui se
nomment Sternomithes. Cœlius
au liure quatriesme,chapitre dix
DV P. Maldonat. ipy
ìcfmeeícrrt qu'il à veu vue semme
nommee lacquette ayant vn eíprit
Pythonique parlant aucunetfois
parle i ombril- autresois parla poi-
ctrine : quelquefois des choses pas
sees ouuertement , autrefois des
futures par vu bruit.c'eftàdirc ob
scurement. La troisiesme maniere
est quan J le diable parie à l'oreille:
comme Dieu reuelaà l'oreille de
Samuel pour oindre Saiil. Cettecy Vaytn-
n'a pas de nom: d'autant qu'elle n'a teduqp.eU
point esté remarquee par les au- cjuechofe
theurs. Et toutesfois i'ay apprins detelde
par evpcriencc qu'il yen a de tels: Mo(ìr<t~
Etquelquedeuin , lorsqu'on l'in. damus
terrogeoitauoitaccoustumc dedi- parvn
rc: à tt 11c heure , cela s'apprend à homme
l'oreille. Cela se peut nommer E- digne dç
nothismeou inaurition : mot que foyejiti
sainct Hilairc à vsur pe' combien l'*uoit
qu'en autre signifisation. Ladeui- ytu,
nation se fait par songes aussi. Mais
d'autant que les songes font fort di,
uers & difterens , afin que les vrays
puîstet estredifcerne's d'aueclesfaux
il me scble qu'ils sc peuuct :diuiler,
R v
TRAICTE' DES DEMON. S-,
ou selon la cause , ou selon la forme
en laquelle ils font veus, ouselon ht
fin : De la fin ie n'ay pas delibere de
patkr. Miis si nous regardons la
cause , le songe est de quatre sortes.
La premiere diuine: comme fut ce-
luy de Ioseph,de Pharao , de Nabu-
ehodonosor. Ladeuxiesmc est dia
bolique. La 3. naturelle: comme
quand ceux qui sont pitniteux son-
gét qu'il pleuuira. La 4.est animale
procedant de la pensée ou afsection
comme tesmoi^ne Greg. de N.fziá-
ze, Si nous regardons à la forme:
il y en a de cinq gentes. Lepremier
retenant le nom generai de songe.
Le 2. nommé Vision. Le Oracle.
Lc 4. Songe ou ùifumnium qu'ó vott
pendant qu'on dort. Le 5. phantof-
me ou apparition. Ainsi en parle
Macrobesur le premier liu.du Son
ge de Scipìon,cba.5 Et S. Augustini
au liu.de l'espritck de la lettre, cha.
tome Songe propremét est-ce
que noús monstre quelque cas par
vne chose ob;cure. Comme est ce
lui de íacobGenese itf.de l'Eschelle
D V P. M A L D O N A t. Ip8
&auGen. y. de loseph touchant
les gerbes , comme estoit celuy c!e
Pharaon , de fou tìh Eschanson,de
Nabuchodonosor. De cc genre cst
celuy que recite Epiphanius en la
vie J'H lie: Ec qn'escritGreg. Pre-
stre en la vie de Theodore, & eclny
de policarpe , lequel dormant vit
par songe queson oreiller brus-
loit, comme recite Eusebe liu.4.ch.
i 4.& ceux qui sent tels, ne font pas
naturels. Car aucune chose naturel
le ne peut signifier par vne chose
obscure, vne plus claire. Et par ce
il est necessaire ou qu'ils soient di-
uinscommeonen licte's sainctes
lettreSjOu qu'ils soient diaboliques
tels qu'on les lict aux lettres pro-
phanes : comme en Herodote de
la fille de Pobcrates letvrá, laquel
le songea estre emportée en haut &.
rauieparle Soleil & par luy estre
oingte:Et celuy que recite Plutar-
que de Symon Athenien en fa
vie.La vision est lors- qu'on voit ou-.
uertementcelamessme qui doit ar-
riuer. Decesteesspeceont accou--
R vj
'.s. -
TRAICTE' DES DEMONS,
stuméd'cstreceux qui prouiennét
des causes naturel les, ou animales.
.Et par ce à peine s'en trouue ild'e-
xéples es lettres sacrees. S.August.
au liure des Consessions chapitre
vnEiesme-- Etau liure huictjcsme
chapitre douziesme recite le songe
de sa mere saincte Monique qui ió-
geaqueson filsestoit arriué,bier*
peu auant qu'il fut venu. Pline au
scptiesmeliure^o.ch.dit que Cor
nelius Ruffas perdit kveuë, ayant
íbngé.que cela ! uy arriuoit Galien
au liure du presage par les songes
esscritquequelqu'vn songea vne de
ses iábes luy estredeut nuë de pier
re , de laquelle H fut apres paraly
tique. Septimius Seuefus ne nom
ma pas son fils A.ntonin,pour autre
occasion, sinon parce qu'il auoit
songe' que quelqu'vn^e ce nom-là
luy fuccederoit, comme escriuent
Spartianus & Xiphilin. Theodo-
ret,au cinquiesme liure de ses hi
stoires chapitre íbixante-septiesme
recite queTheodosc songea, que
Meletíus luy mettoit fur la teste h
»v Maldona t. ipp
«rourónede l'Empire, IcquWil n'a-
uoit iamais veu , &c le cognut apres q
parletnoyen de ce songe. Oracle
est lors que quelque choie est an-
nonce'eàceluy qui dort : Et cc, ou
par opinion seulemét , attendu que
personne n'ánonce rien , ains que
ieulement il le luy semble ainsi. De
ceux cy ie ne parle pas car il n'est pas
à propos: ou c'est en verite'. Et ou
c'est de la part de Dieu, ou de la part
du diable. Etencores,deIapartde
£>ieu ,en quatre manieres. Caj' au
cunes fois Dieu messms l'annócepar
íoy-mcsme. Comme quand au 20.
du Genese il fut annonce' à Abime-
lechqueSarraestoit la semme d'A-
biahâ, &ensainct Matthieu dcux-
iessme, aux Mages qu'il s'en retour
nassent par autre voye. Autresfois
il annonce par vn Ange , comme là
mesme,quád I-oseph est auerty pre
mierement d'aller en Egyp.secóde-
mét de retourner en Iudee3.de pas
ser IaGalile'e. Et S.Paul lutapprins
par T Ange que per'ónene periroit
de lanauirejaux Act.27. Quelque
TrAICTE1 DES DEMONS,
fois Dieu admoneste par les hom
mes vtuans qui apparoissent és
songes:commeaux Actes id.sainct
Paul rut prie par vn homme de Ma-
cedone,qu'il allast en só païs.Qucl-
quesfois par les hommes morts:có-
, me est le songe que íainct Augustin
escrit au liure dusoing qu'on doit
auoir des morts,cha.i i.de la caurió
monstre'e par songe à certain Mila-
nois, & celuy que recite Cassiá liu.
8»chap.i6\ de l'inuention des Reli-
Vljìon en ques de sainct Estienne. Vision par
songeant songe est lorsque ce que veiilans &
insonium. nous pensons & nous desirons, no*
le voyons en dormât. Tel interpre
tent aucuns auoií este'ccluy de saint
Paul aux Actes i6. vn homme Ma
cedonien estoit de'oout & nous pri
ant, passant par Macedone.ayde
nous. Et celuy que met sainct Au,
gustin au liu. du soing qu'on doit a-
jîbpttì- uo\r des morts , de lean le Moync.
tton. Apparitió eít , lors que nous vovó»
quelque forme ou q ce soi' quelque
chose,ou que ce ne soit rien. Et cet
te sorte de songe est bien fort natu
DV P. Maidonat. 10O
relie. Or quand aux songes il en est
quatre opinions. La premiere est
qu'ils font tous de Dieu , & qu'ils
ont quelque chose de diuin com
bien que nous ne l'entendions pas
comme l'cscrit Homere aux liures
de niiade.Et Philo. Laquelle opi
nion il appert elire tres-ancienne
en ccqu'Aristote à escrit vn liure de
diuination par songes , pour la re
futer. Et fa raison est,que tout aussi
bien songent les meíchans que les
bons: ce que n'arrmeroit pas fi les
songes prouenoient tous de Dieu.
Ladeuxiessme opinion est,qu'ils fót
tous naturels,de ceste opinion font
Aristote &Galien au liure desfon-
ges & presages. La troifksmecst
que non seulemét ils font naturels,
ains que messme ils pcuuent estre
excitez par choies naturelles : com
me font les Oracles. Ainsi en parle
Pline auliure trentiesnic, chapitre
dixhuictiesinedílant qu'es Bactres
il y a vne pierre precieuse nommce
Emmetris semblable à vn caillou:
laquelle mise sous la teste fait que
TRAICTE DES DEMONS,
lessongesdeuienentoracleî. Tout
cecyest contre la faincte Escriture
laquelle prohibe d'obscrucr les lo
ges , Deuteronorne dixhuictiesme.
Et qu'il ny ait personne qui obler-
uelessonges.audeuxiesmedu Pa-
ralipomenon chapitre 33. Manassez
est blasme' d'autant qu'il obseruoit
les songes. En Eíaye cinquante cin-
quiesme , en Hieremie 23. & 2 4. La
quatrtesme opinion est plus accor
dante à la verite' & religió, c'est que
Iefonge,lavision)& l'Oracle Tien
nent de Dieu. Et l'autre visio ; en
dormant & phantosmes vienrent
descauses naturelles, comme dict
Macrobeau liure premierlur le só-
ge de Scipion , chapitre troisiesme.
Au demeurat pour discerner quand
£*uandil il les faut croire, ou non, il faut te-
faut croi- nir cette rcigle: Si la chose de la
rdesson- quelle on songe est telle, qu'elle
ges. puisse auoircause naturelle, ou ani
male , il faut croire que c'est vn
songe diabolique , iusques à ce
qu'il sera e'uident qu'il soit diuin.
Góme Lucianus ne creut pas tout
DV P. MALD0NAt. 20i
ì ncontinent qu'il eust sógé des Re
liques deS.Estienne, ains pria. Et
apres l'ayant resongé la 2.&2-fois, ™4&1f
& prie encore il employa l'cxperié- ^Hec chose
ce , laquelle encore fut confirme'e txttrau
par mirac les. L'autre genre de Ma
gie diabolique est celle cy qui se
faictenyadioustant des choses ex
ternes,^ c'estcelle qu'exercét tou
tes les sorcières. D'icelle il y a íept
especes. La premiere se saison par
les idoles.à l'imitation de Dieu leqi
respondoitdel'Arche&du Propi
tiatoire. Et seríommoit Chrismos.
La 2. par sacrifices : & se nommoit,
Hicromantie & Theoscopie : com
me les Hebreux tiroient leurs refc
ponces par le moyen des sacrifices
qu'ils faisoîent auant consulter. La
3, par charmes & enchantemens,
nommée Epode. Car encore les
saincts Prophetes auoientcoustu-
me de prophetiser enchátant au r.
des Rois ip.Et en éployát des instru.
mens de musique , cóme au Parali-
pomenó 25X3 4. par les merts resu.
scitez.Carenceste maniere au i. des
TRAiCTE' DES DEMONS,
Rois 28. la Pythonisse s'efforça de
resusciter Samuel : ce qu'ils nom
ment Necromance. Lî 5. par quel
que petitepartie d'vn mort, donc
nousauonscy dessus amené vn e-
xemple : cela se peut nommer Cra-
fytboins. niomance. Or les Hebreux dyent
quePythonisse se nomme gene
ralement , ou celle qui resufeite
les mortsi on celle qui seulemët de-
uine pa r le crane d'vne teste: Enco
re adioustent i!scecy,quc les morts
fontexcitez piryne Pythonisse les
pieds réuersez cótremót.Et qu'ain
si fut essiaye'e la Pythonisse ayant
veuS'amuël , d'autant qu'il apparut
tout droict & non renuersc'. La 6.
par vn miroir, dans lequel les en-
chaoterefles dyent qu'elles vojent
l'auenir: & la nomment Carorro-
mantie. A. cestuy-ci ilsemble qu'in
finis genres se peuuent rapporter.
- Et mesmeceluy auquel les sorciers
x deuinét regardant vn verre auquel
ils se vantent d'auoir vn de'mon re
sermé ,l«quel leur exîbe les figu
res des choses futures. Le 2. quand
tiv P. Maldona t. 20a
la magie s'exerce eD regardât dás vn
bassin plein d'eau, qu'ils nomment
Lecadomátie. Ce que peut sembler
cstre venu dessainctes lettres: Car
les Hebreux & mcsine Geronden-
sis dyentVrin & Thumaùn estre
noms propres de pierres esquelles
reluisent la volonte' de Dieu:de ma
niere que toutes les fois qu'il
estoit besoing de le consulter il ne
falloit sinon contempler ces pier
res. La septiéme est par sortsS& no9
trouuons ecttui- cy vsité es saiuctes .
lettres. Çar en Iosue' septie'me A-
cham fut descouaert par sort lequel
auoit prins de l'anatheme. Au pre
mier des Roys chapitre dixième
Saiil fut esteu Roy, par sort. Au
premier des Roys quatoriie'me Io-
nathasfut decele'par fort. Enlo-
nas premier il fut trouue' par fort
lonas cstre cause de la tempeste. Es
Actes premier ch.Mathias fut efleu
par fort. A cegenresepeuuent re
duire infinies especes esruelles l'a-
uenture & la fortune dominent:
comme l'Ostracìsme , l'anagrara.
TrAICTE1 DES DEMONS,
niatisme,l'arithmomantie,& chi-
romantte,font rapportez au fort,
& semblent estre especes de deu;-
nation naturelle lors qu'elles se ré-
conuent auec le cas fortuit. De
mesmequld quelque vieille regar
dant la lune dictauoirveu quelque
chose qui signifie guerre à venir, il
Ja faut eíH.ner sorciere : mesme iu-
gement se doit faire de celle qui
Sortdici- prend augure par le brillement du
tes ou ML seu!ou mouuenent de la terre. Or
cites. encore que ces choses sovent natu
relles, toutesfois elle n'en vsset pas
v comme d'icelles. M n's pourenten-
dre lorsqu'il sera loisible d'vserde
sorts, il faut obseruerdeux choses.
La premiere de par combien de
causes peùuent estre regisles forts:
& puis combien il y a de genres de
forts. D'autat qu'il ne faut pas faire
mesme iugement de tous. Donc
ques les forts peuuent estre regis
par cinq causes. Ou par le seul ha-
zard ,ou parles astres,ou p aria for
tune, ou par vn demon, lequel se
DV P. HA1D0NAI- 203
mefle quelquesois aux sorts (& de
la vient qu'auieu de cartes & sem
blables quelques vnsgaigrtét touss-
iours)ou qu'il est regy par Dieu.
Les E iniques nommoient les au
cuns des forts, Liciennes , pour a-
uoireste'trouuezen Lycie, les eu-.
tres Delyennes , d'autant qu'on les
pratiquoitenDeles: les autres A.
reatines,&c. Ainsi en parle Cicero
au deuxiesme liure de la deuinatio'
Les Theologiens les diuiient au
trement commeSainct Thomas en
la question nonante & cinq , article
huictiessme.Caril en nomme k s au
cunes diuinatoites , qui ne sc pva-
ctiquent sinon pourfçauoir, & par
Jes antiens ont este nommez les
forts des Saincts ou des Apoiîres.
Dont vsa Iofré au dixiesme cha
pitre lors qu'il trouua qu'Achan
auoit prins de l'Anathesme : par
les meímes forts Ionathas fut
desscouuert auoir mange' au pre-
miet des Roysquatorziessme, & lo-
nas auoir este' cause de la tempeste.
TRAICTE' DES "DEMONS,
Ils ont nomme les autres coniulta-
toires,qui se pratiquent pour faire.
Par icelíes au Deuteronome saizies
me Helie eíí efleu pour le sacrifi
ce: btSaiil oingt Roy au premier
des Roys,suieimc , Sainct Mathias
en Apostre , aux Act. premier cha.
Les autres diuiioires qui font em-
ploye'espourpartagts : de l'exem-
pic desquelles, preíqnc tout le liu.
de Iosué & du Leuiùque , & des
Sortdi- Nobres,íont pleins. Et de la vient
nia, que les Hebreux nommét l'herita-
ge fort. Cccy se nomme en Grec
Cleronomie. Or touchât auxíotts
diuinatoiresjil n'est pas loyíible d'é
vser. Car en icelles n'ayant poinct
de vertu naturelle,ou l'on attend Ia
respóce des quatres premieres cau
ses fufdites,& cela n'est pas pe rmis,
ou bien elle s'attcd de Dieu ,& c'est
tenterDieu. Cc^enreest prohibe
-h parl'Eglisscau Concile d'Ancire,&
en celuy d'Agathe chapitre vingt-
quatriesme,tomci. EtenGrati:n
enla26".quest.deuxiesmeau Canon
comméçant^íí/;jM.vu, Et en íuon,
CY P. MALDONAT. 204
partie vnziesme, chapitre quatries-
me. Et au Concile d'Orleans pre-
mier,Canon trente- dcuxieíme. Les
forts consultatoires ont quelque af
finite' auec les diuinatoires.Et par- Set con*
ce ils'en faut abstenir auíshde peur rj
qu'il nc semble que nous affubje-
ctilsiós les cas humains ou à hazard
ou à la fortune, ou auxestoilles , ou
aux esprits malings.D'icel es vlalc
Royce Babylone lors qu'il mefla
lesflefchesen Ezcch.vingt vnic'me.
Les índois aussi commencent leur
guerre par vne vo'.e'edeflefches.Et '
en Esth. 3. & 9. Aman deuine par
fort auquel iour il faut que les luiss
íbiécextcrmincz.Et par ce les saints
reprennes ces forts icy.Sainft Hic-
rosrne e's Commentaires fur le pre
mier chapitre de louas, Sainct Au
gustin en l'Epistre ect dijuieuíies-
me.Et Bedafur le premier chapitre
des Actes. Les forts des hommes
doiuent cllrela prudence,les adms
de plusieurs. Ainsi Dieu n'çstab-
sent- là où est la prudence. Celles
des Chrestiens doyucnt estre les
TRAICTE DES DEMONS,
prieres.beigneuv monstre moy tes
voyes. Et ìe sçay Seigneur que la
voye de l'hóme n'est pasensapuií-
sance. Etnous te fuppliós Seigneur
qu'en aspirant à nos actions, tu
les preuiennes. Et toutesfois ces
forts pourroieiucítre fans coulpe
pour ces railons.La premicre , lors
que touï conseil humain defant , a-
presauoir presente' prieres à Dieu,
comme firét les Apostres : c'est l'o-
pinion de Beda: combien que luy
&fainct Thomas admonestent ce
la se dcuoir faire p'ustosten toutes
autres actions, que e's Ecclesiasti
ques. La deuxiçsme pour e'uiter de.
bat & ambition. Ainsi tíict sainct
Ambroise sur le premier chapitre
de sainct Luc, que Zacharie fut ck
leu par sort. Auxproucrbes dix-
huictiessmele sortnrrcste les con-
traditions,& iuge entre les grands
mesme. Vlpianauxdigest.'s,an til-
tre desiugemës.'mais quád tous les
deuxappellétdu iugemét !at.h ìfeì
accoustume d'estre vttid*'epar (orr.
Et
sv P. Maldona t. " 105
Etau Code au tihrc de teg. &fdet- -
comm.enÌ3Ìoy,Jìduobus. La} pour
éuiter enuie ou complainte , S. Au
gustin en l'fcipistse 1 80 ceuxquifui-
ront,s'eflirout parlort.Et au r;Ko.
de la doctrine Chretienne, cha. 28.
les aumolnes se donneront par sort
aux pauures. les forts diuìfoirts sót
nonseulement licites, ains vtiles $ort jj
encore, & vlìtes par les Saincts,có- j~0jïe«
meilaeste tíict cy defìus:de ma
niere que l'heritageaeste' nommé
fort. Et est loiie'e la loy qui s'obscr-
ue en plusieurs lieux , que s'il y en a
trois appeliez à l'heredite',.le pre
mier face le partage, le second iette
lesort,& le3.c'estàdireleplusieu-
nc choifiíse.

COMMENT1" C'EST QVE


1ES DEMONS EXERCÍNI
leur puissance fur la volonte'
. - deThomme.

M Ars comment les démons


puissent inciter les homme*
S
T R A 1 C T Es E S DEMON S,
à pecher,cecy est propre à vn autre
l'oloté li~ endroit. Nous dirons cecy íeule-
hreen ment icy, cément les de'mons peu--
l'homme. u" prouoqueràl'amour d'autruy.
Et premierement il faut bien tenir
pourfoy Catholique , que les de
mons ne leurs ministres ne pcuuent
contraindre la volonté humaine
par enchantements: icclle estant de
tel naturel que Dieumessme ne la
peut contraindre, si elle ne perd le
nom de volonte'. Carqu'vne vo
lonté soit contrainte, cela empor
te contrarieté, attendu que vouloit
n'est autre chose, sinon qu'estre en~
clin. Et par-ce quand l'escriture de-
clareles hommes auoir cíic inci
tez à peché, iamais nedict con
traints, ains allechez, ou tentez.
Au contraire , comme est esserit au
3. chapitre du Genese: fous toy
fera fa volonté (sçauoir est dupe-
chc(& tu auras puissance sur luy.
Et le serpent ne contraignit pas les
premiers paren.,il les tenta, &
deçeut.Et les anciens,quand ils dis
courent des demons, iamais ne les
dv P. Maldona t. 206*
nomment contraigneurs , ains in-
citateurs. Comme Cassianus en la
collation 78. chapitre?. Ainsi di-
íons nous lesde'monsestre contrai
res à nostreauancement, que nous
les croyons incitatetirs au mal, non
pas forçeurs.Et Clement au 4-liure
des recognitions escrit : veritable
ment nous voulons bien quc vous
sçachiezquc les diables n'ont point
de puiflance fur les hommes , fìnon
quequelqu'vnde gaves é de cœur
seíous-metteà leursvolótcz. Mjìí
encorequecefoyent chose s repu
gnâtes que la volóteloit contrains
cte ou forcee, toutes sots ce n'est
pas chose repugnáte qu'elle s oit en-
cIíne'e,voireencoreqce fut neces- p.
sairement mcsme,d'autát que la ne- -creJH'~.
ceísirc ne signifie pas touliours có- te'
tra^te,ains est fouuét cójointe auec
l'inclinatió: comme nous croisions
bië necesiai remet, maistoutesfois,
volótierj.Mais d'estre beaucoup in
clinez ou peu,cclase peutfairelibre
ment:cáiTjçestincHnéceluyquiest . ,u'.W
attire'par nos raisós,à nostre opiaió
S ij
TrAÏCTE1 DBS DEMONS,
En la premiere saçó Dieuseul peut
incliner nostre volonte', estantíeul
le maistre d'icelle. E t ainsi se doit
prédrececydes prouerbesi2.chap.
. comme les diuiuons des eaux, ainsi
le cœur du Roy est en la main du
Seigneur : car il l'incline là où il luy
plaira: le sens est que cela est pro
pre à Dieu. En second lieu les dé
mons peuuent incliner àaymer in
directement comme l'on dit com
munément* &ccen plusieurs ma
nieres. Eri lapremiereinterieure-
ment seulement, persuadant à l'cf-
prit d'vn homme quelque semme
estretres-bclle,qui leralaide. Se
condement en mouuantle corps,
c'estàdirel'honneur auquel est le
siege de la luxure. Tiercement, par
- meflange des deux sçauoiren per
suadants donnant quelque mou-
uement au corps. Quatrie'mement
en adioustant exterieurement des
medicamens. Car il ne se peut nier
qu'il ny ait des choses qui ay et telle
philtres, vertu nommees Philtres : comme
est fefiinca Silifestris , ou Sapbk
dv P. Maldonat. 207
nos, tesmoins Discorde liitre 4-cha.
25. EtEustruti9 íurie6\delMliade.
Cínquiem-menc en mcfiant di-
uersement toutes ces choses. Sixie'
mement , en employant des cho*
ses cxterieures,mais non toutesfois
au corps.-comme lors que les sor
ciers ìoignent deux images de cire
entr'elles en la manière de person
nes qui s'accouplent , & toutesfois
ne les appliquent point aux corps
de ceux qu'ils veulent rendre pas
sionnez. Septie'mement en ioignant
ces meímes choses díucrsement:
mais il y a cette difference entre les
démons & enchanteurs, c'est que
les démons peuuent & ont accou- v
stume' d'vserde toutes ces manie
res: & les enchanteurs, seulement
en employant des choses exteneu-
res au corps, ou bien les employans inom w
non au corps comme il a este' dit cy cite\ne
dessus. Et par ainsi ii estvray que contrai-
les Sorciers peuuent inciter à l'a- ê.neJl['
mour : mais il est faux que la volóte'
ie puisse contraindre. II est bien
vray aussi que certaines chose* qui
S iij
TrAICTe' DES DEMONS,
sont appliquées au corps, n'ont pas
ccttc vertu naturelle : c omme lors
qu'on porte pendu au col vn cercle
ou iëneíçjy quoy d'escrir. D'autres
Aussi ont bien vnc vertu naturelle
d'esmouuoirabsolument,mais non
paien vn plustost qu'en vn autre.
Car autune chose naturelle n'a
cette vertu. Et par-ce incontinent
que quekjuVn est surpris d'auoir
incite quelqu'vn à l'amour contre
toute raison, celanesc doit point
attribuer à la vertu du medicamét,
ainsàla science iuperstitieufe,

DE LA PVÍSSANCE DES
DEMONS SVR LES
corps humains.

ICyse faict huict questions. La


premiere, si les demons peuuent
transporter les corps humains jd'vn
lieu à vn.autre, ou en les enleuant
simplement, ou en les portant fur
quelque beste;ou autrement. Et en
premier lieu il est bien vrai qu'ils le
DV P. M AL DON AT. îo8
puiííent faire par la permission de
Dieu. Car il appert par les escrim
ées que les bós A liges l'ont faict : &
puis que des vns & des autres le iu-
getnentest ynen cette partie. Co
rne au quatorzie'me de Daniel A-
bîcuc en vn moment de temps fut
transporte' de lude'een Babilone,
& en Sainct Mathieu quatriéme
Iesus- Christ fut transporte' du de
sert sur le pinacle du Temple. Car
il est croyable que Tesus-Christ,có-
me par fa volonte' il fut tente' parle
diable , permit aussi que le diable le
transportast : comme des bons au
teurs Tont interprete' Sainct Chry-
sostome,& sainct Gregoire. Etaux
Actes huictie'me, Sainct Philippe
fut transporte'en Azotus. Aussi ce
qu'ondict que Simon le magicien
vola, n'est pas fableîd'autát qu'Ege-
sipele recite au liure 3. delaruinxe
de Hierusalem , chapitre 2.& sainct
Ambroise au Sermon 66. &e's Có-
nientaires fur le 8. chapitre aux Ro
mains. Et Sainct Augustin au 30.
Sermon desSaincts Pierre & Paul.
S iiij
TrAICTE1 DES DEMONS,
Siles sor- Et en Philoltrateil me íbuuienta-
ciers font uotr leu de certain Apoloni9 Thya.
yeritjble neemBerenguier aussi estant magi^
met tr'df- cien,l'onescrit deluy qu'en mes- .
fortes me nuict il fut à Rome,&fit vnele-
ôurcàTours : Guillaume de Nan-
giaclereciteenfa Chronique.Mais
si ven'tab'ementles hommes font
transportez parles diables, il est
mal aise' de l'expliquer à cause du
chapitrecommençant ainsi,£//;tco-
pietrummie minifiri , en la 26\ quest.
5. d'autant qu'il semble qu'il le des-
nie. Et ce passage donne bien des
affaires aux íurisconlultes quil'in-
terpretent.Et puis l'experiéce y est.
Car il y a des maris quidient anoir
picque leurs femmes forciereí cou-
cbe'es mec eux ,&les auoit frap-
pe'es de maniere que les meurtris-
seures leur apparoiíToient, & tou-
tesfois qu'elles n'enauoient rien
senty. Ceqúcpreuue qu'elles n'a-
uoient este transportez quedcl'es-
prit seulement & par opinion. Mais
îenepeux medepartirdel'opinion
contraire : comme de celle qui est
u V r. ivi n. l u u n n. 1 . me?
approuuee par autheurs tres dignes
de toy , [acqucs Speinger , & Syl-
uester : desquels l'vn tue inquisiteur
de la toy en Allemaigne, & l'autre
a Home , & encore apres maistre
du Palais sacre , lesquelles charges
ont accoustumé d'apporter vne
grande experience en telles matie
res. Et par- ce i'estime que les Sor
cieres font transportees en quatre Comme
manieres. Quelques fois auec leurs fontiras-
pieds , ce quetesmoigne Syluester, portes les
par leurconsesiion. La2. maniere, Sorciers.
par Tceuure du diable soit qu'elles
soient fmplement transportees,
soit qù'eìles (ojét porte'es par quel
que animal. La 3 nonenerTcct, ains
en opinion seulement. La 4. est de
te! le sorte qu'elle mesme ne sçauét
si c'est en effect.ou par opinion seu
lement. Car en autant de manieres
nous voyons aucuns auoir este
transportez de lieu en autre e'ssain-
ctes lettres. A l'imitatió desquelles
jl est certain que les arts Magiques
ont este inuente'eSiLe premier trás-
port faict auec leurs mesmes pieds,
JtRAICTE DES DEMONS,- ]
estayle. L'autre elt par lc rauifse-
mentd'vn Ange, comme Abacuc.
Quelquefois pu la feule peníée,
comme ea Ezechiel huiòtie'me,
J'eíprit m 'á transporte' en Hierusa-
lem par vision , c\st à dire non
pas en efsect. La quatrieme de
íbrte qu'ils ignorent si c'eít en ve
rité, ou par opinion feulement,
. :- "; Comme Saìnct Paul à ladeu-iie'me
- j -" aux Corinthiens , chapitre dou.
ïie'me , si c'a esté en corps , ou
; hors du corps , ie n'en íçay rien,
Dieu Je íçait. Et puis d'ailleurs
cclaeíi accordíntàla raison: Car
si cela se peut Liire& à este' faict
quelquefois ( comme il à cire veri
fie') ìiu'est pas absurde qu'il fc face
encore maintenant. Etmesmes at
tendu que les Sorcieres le conses
sent. Outre cc que l'expcrience Je
confirme: dequoy Syluestcr recite
infinis exr pies en ses liuresdes mer.
Vieil'eí des sorcieres & des de'raons.
"! : re. \\ mcsusfirj d'ep alleguer quelque
va cli: deirieme; liu re. A ComcCdit
il)le Vicaue de l'Eucsquc &l'it;qur
PV 1J. MALDONA T. 2IO
siteur,ou par curiosite, ou verita
blement pjr-cc qu'ils ne croiét pas
entierement à des Sorcieres qu'ils
auoiem en leurs priions , fur la
minuict s'en vont au lieu ou elles
ioiioient leurs jeuxdcquelestoit as
sez proche de la, & virent le tout
d' v n lieu estant vis à vis .Mais estas
toutes licentices, le demon cjuie-
stoit le cher de ce jeu/eignát ne les
auoir veus pendant ces mysteres-
rappelle incontinct tout l'assem-
blee,cíc frapperent tellement ces
deux iuges auec des bastons, que
dedans quinzaine & l'vn & l'autre
en mourut. Ainsi Dieu pusiit,par fa
permission , leur curiosite', & para-
uanture d'autres pechez. Et long
temps âpres il adiouite vne chose
admirable qu'il suoit accoustumé
reciter de luy-mesme. Vn certain
plaisantin nóiré Hierosme aymant
au monde certaine nîle,en iotiit par
^e moyen de quelque encháteresse,
à^aquelle il accorde d'aller àceieu
du diable, laquelle y transporta &
S vj
1RMÍTE' DES DEMONS,
luy & la filie (y assistant le diable)
en telle maniere estant despoiiillé il
s'oignit decertainonguétentre la
main & le bras faisant certain signe
comme ceite Sorciere luy enseigna,
( . laquelleenfit tout autant & la fille
de mesmequiestoit la presente & a.
uoit esté violée par luy :&. tout in
continent ils furent tous enleuei
par l'o uuerture du toict. Luy estant
montésur vncheua! ronflant(com-
me il luy sembloit ) fut porté auec si
grande vitesse vers la ville de Benc-
ucnt que l'air fendu rendoit vn sif
flement tres- aigu. 11 s'y trouua plu
sieurs milliers d'hommes & de fé,
mes,dançans, auec peu de lumiere.
Le ieu estant finy, il fut ramené à fa
maison (comme auparauant) pas-
fêt par Venise. Et remarejua la ville
mesme de Venise laquelle il n'a uoit
iamaisveuë auant ce ìour»& plu
sieurs autres lieux & riuieres entre
dcnx,«nalknt& reuenant. Tous
Je^nels lieux n'àyantL iamais veu>
ks reuoyant apres , il les fecognut
& Venise principal lement. Estant
BV P. MALDONAT. 21i
retourne en sa maison & assouuyde
sa paillardiíeauec celte vitrge,&
ayant det-ja son forfaicten tres-
grand'horrcur, comme d'auanture
ilestoic bien nay , ou la pieté diuine
ayant pitie' deluy, il s'en va vers
l'Euesque ou bien son Vicaire, &
consesse entierement le tout : & les
huisclos fut solemnellemét fouetté
dansI'Eglise.Etpar la misericorde
de Dieu ,estant entré en vnc reli
gion il y vesquit honnestement , &
parauanturey vitencore de prefet.
Et vn peu apresilescrit souuentdes
enfans & filles de douze ans , ou de
huict par la doctrine , & exhortatió
des inquisiteurs se sót rauisez, Aus- Dances
quels pour lamerueille d'vne si merueil-
grande chose l'on commande de \tuft.
dancer à la maniere de ce ieu là , &
le font de telle maniere qu'il n'y à
hême accord qui puisse nver qu'ils
n'avent esté apprins par quelque
industrie plus haute,& qui surpasse
celle des hommes. Carestansces
dances làentoutes choses dissem
blables à celles des hommes j en
Tu AICT E' DES DEMONS,
ce me!me qu'en icelles lestémes
lont tenues contre le dos cks hom
mes, on ne dance pas en auançant
ains en reculant. Et en fin lors qu'il
faut faire la reuerence au diable qui
y prelìde,se courbans en arriere,
ils inclinent la teste non pas en
auánt,ains en arriere, & ne flef-
chiflent pas lepied en arriere, ains
en auant les leuans en haut. Tout
cclase faisant auec tant de gentil-
lefse&de grace, qu'il est impos
sible de l'auoir apprins inconti
nent & en sigrande ieunefle. lus-
-qaes icy font lesparoles de Svl-
uester. Çe qu'estant ainli , il est
certain que les S'orciei es font quel-
quesfois transportees realement.
Mais que font elles. , pour estre
transportees?. Vo%. dict qu'elles
s'oignent.d'vn oignement.fajctdu
corpsd'vn petit enfant.-& que par
ce moyen elles font enkueçí. Et
cela est cause que les sorcieres ont
accoustume'de tuer des petits en-
fans. Celles qui ne font poinct
transportees, sien s'oignent elles
DV P. MALDONAT. 212
veulent voir cequiscfaict en leur
ieu, elles se couchent sur le coite'
gauche : si c'est en veillant , on dict:
que de leur bouche sorc quelque
grossiere vapeur dans laquelle elles
regardent les figures de tout ce que
íi faict. Cela estant ainsi il faut
voir que c'est qu'il faut respondre
au Concile Anciran , au Canorr,
Episcopi 16. qu/e/l. 5. Cecy à tant
tourmente' les interpretes du droit
Canon,qu'estant leur courtume de
remplir toutdegloses inutiles, ils
n'ont pas escrit vn seul mot surce
Canon. Voire & Syluesier reci
te que luy estant iuge , il ne se
trouuoît personne qui voulut ac
cuser vne Sorciere : par-ce que
s'arrestans fur ce Canon fils pen-
soient que les Sorcieres ne pou-
uoientestre vcritáblemét transporv
te'es. Syluester messme respód qu'en
ce Canon là il s'agit vrayement des
Magiciens, mais non pas des Sor
ciers. En second lieu, que le sens est
que tQutes choses nysót pas vrayes,
& d'autátque Diane n'est pas vraye
TRAICTe' DES-DEMONS,
decile, &!es belles lur lesquelles
lesenchátcrestesíedyenteltrepor-
te'es nesont pas vrayes aussi: mais
tout cecy est deuiner , attendu qu'il
est certain que tousiours ilyaeu
des Sorciers; combien que certain
heretique debat que ce font songes.
Iacques Speinger respond,qu'en ce
Canon s'agit de la transformation
essentielle : & que les Sorcieres ne
font pas veritablement transfor
mees , tous si accordent , mais ce
Canon parle aussi du trásport d'vn
lieu à autre. Paul Grill and en son li
ure des Sortileges dict bien beau
coup mieux , que par la raison de la
loy,laloy se doit interpreter. Et
par-cequxstant la raison dece Ca
non qu'il ny arien dediuinite'hors
du seul Dieu, il y est desnie' estre
vray ce, dont se vantet les Sorcieres
d'est re trásporte'esd'vn lieu àautre,
entant qu'elles croyent cela se faire
en vertu de quelque diuinité. Quát
à moy festime , premierement ce
Canon n'estre pas du Concile An-
ciran,& c'est par- ce qu'il nyesten
»V P. M AL DO N A T. 2i}
lieu du monde, & qu'aucun Canon
de ceConcilene commence ainsi,
& puis il ne sent en rien sa phrase
Grecque r& d'abondant d'autant,
qu'il est fort long , combien que les
autres soyent fort briefs.D'auantà-
ge quád bien il seroit de ce Conci
le il faut regarder de pres ce que fait
le Concile. Or iln'auoit autre but,
sinon qu'il ne faut pas penser qu'il y
ait rien de diuinite' outre yíi íeul
Dieu.Etpír-cejcequ'il dit du trás-
port des Sorcieres, n'est non plus
rcrohi & determine' par le Concile
Anciran , qu'il est arreste' par le 7.
Concile, si les Anges sont corpo
rels ou non.

SI PAR L'AYDE DV DE-


MON, LES SORCIERES SE
peuuent rendre inuisibles.

C'E s t ìcy la seconde question:


& veritablement il estayse' à
Caluin de respondre , qu'elles ne
peuuent, attendu qu'il nie Iesus
T R AIC te' DES DEMONS,
Christ nostre Seigneur le pouuoir
faire.Toutesfois il est assez e'utdent
que Iesus-Christ s'est íouuent ren
du inuisible. EnsainctLucchap.4.
en lainct lean 5-5£ iï.enSainct Luc
24,Eten ce qu'apres la resurrectió
il conuersa quarante iours en terre
Seneantmoins fut rarement veu.
Ierespons donc, que les de'mons
le peuuent aussi, non veritable
ment par leur seule volonte, com
me Icfus- Christ , ains ou en fc
transformant: ou empefehant les
especes visibles, ou en mettant au
dcuantquelquescorps dehe\ou au.
irement.Maisiìparîe moyen des
choses naturelles ils peuuent faire
le messme, c'est ce dont il est que
stion. Et cettes on dit qu'vne her-
bequ'on nomme Uex, à vertu de
rendre inuisible. Et ce qu'est re
cité par Platon au liure second de
l'anncau de Gyges, est assez vulgai
re. Et ce que -_ díent les poetes du
Bouclyer de Persus. Toutesfois,
ces-choses font toutes fabuleuses
car encore que quelques choses
dv P. Maldona t. 2i4
peussent rendre ou moins visibles,
ou du tout inuisibles (comme l'on
parle qu'il se faictauec la fume'e de
certain poiure, que les poultres des
maisons semblent estreserpés) tou.
tesfois elle ne peuuent pas telles
choíes.-

SI LES CORPS PEVVENT


ESTRE CHANGEZ EN
diucríes formes ,par les
denions.

DEccc'y dispute S. Augustin au


dtx-huictie'me liure de la Cir
te' de Dieu chapitre seize , dix-sepr,
& dix-huict. Et veritablement il
ny a pas eu faute de personnes an-
ciennemét qui ont pensé que Dieu
mesmenelepouuoit faire. Et par
ainsiscmoquoientdela Metamor
phose d'Ouide. A ceux-cy sont sem
blables les Caluinistesquádilsniét
la Transubstantiation , & aux Cen,
taures fils d'Ixion chez le mesme
Ouid.Dóques il se trouueplusieurs
T RA ICTE* DES DEMONS,
exemples de la transmutation entre
les prophanes.Caren premier lieu,
les compagnons de D iomedes fu
rent conuertis en oyseaux, comme
ilestescritau 12.de l'Eneide.
Pers me- Mes compagnons perdus s'enuolerent
furent? eul'air,
rime\. Et vaguent feîts oyfeaux , i trauets
les rwieres
-(0 supplice dés miens trop cruel ) de
leurcry,
Lamentable &piteux les rochers iw-
portuneut.
Et au 2. de la Metamorphose , les
compagnons d'Vlisses changez cn
bestes. EtHomereaup.del'Odis-
se'e,Theocrite &Virgileen la Phar-
maccutrie. Euátçs en Pline liure 8.
chap.u. Asseurem les hommes Ar
cades ayans paííe à nage vn estang
demeurer neuf ans changez en
loups. Et Fabius , & Agriopas
aurheur des Croniques Olympio-
niques dit , que Demenetu ou De-
Lycdn- marchusParrhasienfutcóuerty rn
tropit. loup au sacrifice des Arcades. Et de
la vient que Pan fut nóme' Louuier
dv 1^ maidonít; 2i j
& Iupiter Lucien en Arcadie. S.
Augustin pense aussi que de la viét
que les Romains ont nommé leurs
Luperques. Pomporcius me la es-
crit aulsi que dei ScytheSjNeuriens
quiconque veut,en quelque certain
temps peut estreconuerty en loup.
Apuleyus recite encore d'vne Sor
ciere qui conuertit (on amy en
Castorjd'autarrt qu'il auoiteíjouzé
yne autre semme :vnTauernier en
Raine.'vn Aduocaten Belier, sainct
Augustin au i8. liure de la Gte'de
Díeu^scrit qu'estant en Italie il en
tendit qu'en quelque endroictde
ce pn'îs-là.il y auoit des semmes les
quelles donnoient dans des forma.
ges certaines poisons par le moyen
desquellesellescn3ngeoiét les hó-ì
mes qu'il leur plaifoit cn bestes à
somme. Luciandit ensen Lucius
qu'ilfuttrásforme'en Afne, voulát
se commuer en oyseau. Atoutcecy
te respons que les de'mons pcu-i
uent transmuer vn corps en vn au
tre: &ce en trois manieres. là Trafmw
realement: comme les Magiciens tathu.

L
Traicte* des dçmons,
de Pharaô changerent leurs verges
enSerpens. Car quece fut vn vray
changement,Sainct Augustin ledit
autroisie'meliurede la Trinite', &
au liuredes 2i. Sentences en la 4.
Sentence: & tous les autres Theo
logies l'interpretét ainsi.Pour moy
ie n'estime pas que les demons ay ét
»ccoustumé,ou puissent muer les
homes en cettç façon. Tant à cause
de l'ame doiie'e de raison , que par-
ceaussi quelamuance en est plus
mal-ayse'e. Et par ainsi il n'est pas
croyable que les Sorcieres soient
commuées : sinon en apparence.
La seconde non pas veritablement
en estect , & toutesfon c'est de
telle façon que ceux qui sont trans
formez scmb'ent tels & à eux &
aux autres. Ainsi la semrccd'vn fut
parenchantemerttcommue'eeniu-
ment j Pallàdius l'escrit en la vie de
Macharius Alexâdrin ; chapitre ip.
& îo. La troisie'me est , fors que
celuy qui est change' cuide l'estre,
mais il ne semble pas te! airx nu-:
tres. L'exempleen est du pere d'vn
DV P. Maldônat. 2i6"
certain Prestantiusen Saint Augu
stin liure dix-lmictieíme delacité
deDieu,chapitre 8.

Sl LES DEMONS PEV-


VENT T V E R LES
hommes.
j.. .
LA quatrie'me question est, si les ' y
démons peuuent tueries hom- I-edtmì&
mes?Ieresponds qu'ils peuuent. ffítttccire
Car le démon tua les enfans de lob.
&lesíept maris de Sarra, en To-
bie. Et lefaict en partie par affe. \.
. ctationde la diuinite' : car il a vou
lu auoir ses martyrs commeDicu
& ses Sacrifices. Et veritablement
il U siirpaíïéen vnechosc.Car Dieu
n'ayant iamais permis qu'il iuyîit
este immole' des victimes humai
nes : luy comme Tyran l'a faict par
tout la où l'idolatrie à eu vogue:
encore entre les Romains mes--
m °s, nation la pka^polie qu'i} c-
stoit possible. Comme leur rej*
proche Amobius au liure second.
TrAICTE' DES DEMONS,
Voyez Euiebeau4. liure de la pre
paration Euangehque.Et au 5. iiu.
de lademonstration,chap. ptemier
& S.Hicroíme en 1'Epiítre à Dama-
í us,dict qu'il àíoifdu sang humain.
Ainsi les Sorcieres tuent les enfans
deírobez apres les luy auoirofferts.
Et ce qu'aucuns dient qu'elles suc-
cent leur ság n'elt peu tertre pas fa-
Corne les buleux. Marc Ephesien en Pscllus
sorciers enrendlaraiíon. Or elles tuent les
tuentles enfans en trois manieres. La i. par
enfans. leurs mains. Laa.pardesbreuua-
Dona. ges. La 3. en y employant des cho-
t'wnsmx- les, lesquelles veritablement n'ont
Udiesfdf. pasla vertu de tuer, ains d'inuo-
cination. quer le démon qui lestuera. La5-
question est, de donner des mala-
dies. & ceste cy est claire d'elle mes-
me-Lao'.est de la fascination, faisát
du mal par enchantements & im-
precations:combienque les autres
pensent mieux que cela prouìenne
d'enuier (auteur Ciceron en ses
Tussculanes) commequi diroit, de
trop voir ou fur voir: d'autant que
ceux qui enuientà peine peuurnr
deítourncr
» V P. M AL DON AÏ. 2Î7
destournerlesyetrx de la chosetn-
uie'e.Qrçeste faítma-tioft est don-
ble, comme iugesaiiict ïl/ortuii.
partic,quest. n 3. L'trie est naturelle"
tpii se faict auec (es yeux setjls :cortr-
íne est escrittn Virgile.
le nefçdy quidesyetfx P?enforcúlt
& enchante.
-' 7>îes tendret aignelets,&û. ;--' °-í
Sçauoirest qu* cause ekhrdelica-î
teslèflc tendreurdeí yeaxíl sefarct
iaysc'ment influence ou éseatrlemÉt
des especes :& par te moyest U
chose tendre insecte.Et par ce dtct
on que le miroir S'insecte par le re»
gard dVne semme monstrèuse: ve-
rí tabiemëc Pay apprhrs par experié-
ee que l'herbe nommée Basilic s'ett
desleiche. Et cVst la cause poar la
quelle les enfarrs sont bien fort su-
jects à cèt ensoTceUentent. I/autre
espete est diabolique : de laquelle _
parksainctPaul airx GalatesrO ìn.
sensez Galates qui votwirertforcelez l*tts,ì'
de n'obcïr pas à la verite- deuant les
yeu* desquels Iesus Christ à este,
crucifie en yous?I1 seroit mieux tra-
T
TrâICTe' DES DEMONS,
duit de dire: deuant les yeux des-
quels lesus Christ à eilc depeinct,
Car il faict illusion à la fascination
diabolique. Comme s'il di soit : vo'
n'eussiez peu si aiíe'mcnt vous de
partir de la foy,laquelle vous n'auez
pas receuï autrement que si Iesus
Christ auoit este' crucifie' deuát vos
yeux,si quelqu'vn ne vous auoit en.
íbreelez. A ce la mesmebat ce qui
s'ensuit: vous estes tellemét estour-
dis qu'ayans commence' par l'esprit
maintenát vous finisse* par la chair
comme s'il disoiteecy est semblable
à quelque enchantement. Et au
Deuteronomech.28.la où nous li
sons la semme tédre & delicate qui
ne peut marcher fur la terre portera
enuieàfon mary qui couche en son
sein.La vieille impression auoit,cn<
chantera son mary , comme lict S.
Auguflìnau liure des manieres de
parler du Dcuteronome, chap. 6i.
car legrec signifie cela.
• T P. M AL D Ò N A f'. " Îl8

SI LES DEMONS ABVSENT.


D E S ' CO R P S' H V M Al TU Sj -
-^ pour la paillardise. '. ; s
. . / ."- ."i -; .•' ....
LA septieme question est : s'il
îst-vray ce qu'on dict vulgaire-.
ment, que les de'moris abusent des
corps des hommes pour la luxure; Incubes
íçauoir est s'ils font incubes & suc- g'Jfent»
cubes. Dequo)í ie trouuc trois opt- succubes
nions. Caries aucuns ïcfponáent fxtijjent
& dyent que c'est vne vaine fable,
Comme Saine! Chrysostome ca
l'Hòmelie vingt deuxieme fur se
Genese : ouille m oeque de ceux
qui interprètent ce passage du- Ge
nese (ses enfant de Dieu ont veá
ses filles des h-ommes,&c.)des An*
gés. Asseurant nc se pouiìoir aucu
nement faire que les Anges ( atten-
du qu'ils font esprits ) ayent à faire
auec les sem mes. Cafsían aussi en la
Collation huictîe'me chapitre }C
'ne fautaucunemét crdíreC dit- il)
cjue ses natures spirituelles paissent
TRMCTi' DES DEMOKsi
naturellement s'accoupler auecles
semmes. De mesme en diâ Phila-
strius au chapitre i08. EtCyrillus
au liure p. contre Iuliaa. Et Pro-
copiuschap.6'. Et le Concile An.
ciran25. quest. 5. Canon Epifcopi,
Et Agripa contre les enquesteurs
des Sorcieres. EtViretHeieticque
au chapitre i8. & ip. Lequel vse de
deux argurnens, l'vn pnns de l'au-
thorité de S. Chry sostome , & de
Caísian susdictes. L'autre, d'vne
Hifiojre. Histoire qu'il ametne d'vne fille
" d'Holande : laquelle ayso* efréçm-
poigne'e, comme cn!a menoitáu
tien du supplice, d'autant qu'elle a-
uoit consessé auoir eu à faire auec
Vn maling esprit , toatesfois exhi
bée aux sages femmes, fut trou uéc
▼ietgc LesEg)"ptttdMtcbmmcrci
cite Viues au 13. chapitre du ii. li
ure de la Cité de Dieu) dient qu'ils
a des démons incubes , des succu
bes , ils le nient ,les autrcsí('& oettí
' opinion est tces-áricieáoe-as ïres*
veritable ) ont peníé qu'U-y^a des
jócmom 51 incubes & succubes: nó
dv P. Maldowat. 2T9
pas qu'il y ait emr'eux diflvreoce dtt
sexe : ains à cause que les mefines,
iouent tátoít le personnage d'hom
me tantost celuv de la femme. Et
par-ce cequi est escrit aux Corinrtu
i1. que les sem taes doi uem prier h
teste couuerte a cause des Anges^
aucuns le rapportent aux démons,
lesquels ont accoustumé de faire a-
guets à la pudicité des fémes.Il y en
à aussi lesq! s rapportent à ceîa mes-
mecëquìest escrit au Gen.6*. voyás
les fils de Dieu , les filles des hom
mes estre belles,&c. Encetteopì-
moii est lustia en ses Apologies
pr-emiere & seconde , ìosepb au
Kurepremier des antiquitez Iuday-
ejues , chapitre 3. Athenagoras au
liure de la Resurrection , L'actance
au liure z.ehapttre ij.Tertullian au
liure de voiler les Vierges. Et Marc
Ephefien en Psellui.Euíëbeau 5. li
ure de la pfeparation Euangelique,
chapitre 4. S. Ambroise au liure de
Noé* de P Arche, chapitre 4. S.
A ogustm a a 1 titre i 5 . de la Cité<le
DieUthapttresj.lebruit dît- il est
Tiij
.TrAICTe' DES" DEMONS,
tres-grand,& plusieurs confirment
auoit experimenté ou l'auoir en
tendu de personne, de la foy des
quels il ne faut point douter, qui
l'auoient esprouué, que les Syluans
& Faunes (que vulgairement l'on
nomme incubes-) auoir fouuét este'
mçschans& importuns aux fem
mes, & auoir desiré, & accomply
leurs embrasse mens : & plusieurs
(votrc&tels quece seroit impu
dence de les mescroire) asseurent,
quecertains démomqueles Gau
lois nomment Drusiens , font &
pratiquent ordinairement cette vi-
lainié. Adioustonsàcecy l'Epistre
decretée d'Innocent 8. Et finale-
menr que le» femmes mefmes le
confessent à la torture , combié que
ce soit fort contre leur reputatioo
& salut. Etpar-ceilne faut point
douter qu'il ny ait des démons
incubes & succubes. Et par ce,
ceux qui sont de contraire opi
nion semblent n'auoir point enten
du lesautheurssur l'authorité des
quels ils s'appuyent. Car quanti
DV P. Mudonat! Ï20
S.Chrysost. il n'a pas nyec par les
démons ne peuísét exercer la pail
lardise auec les hommes : ains seu
lement qu'ils neleponuoient pas,
par leur nat ure,eítans espris. Et en
ceste maniere il à peu nier aussi
qu'ils mangent ou boiuent: encore
que les Anges l'ayent faict souuenr.
Cóme en Genese i o. & iR.&cnTo-
bieiz.deCassíanilest biê plus mer-,
ûeilleux, lequel à pense' que les de
mons eussjnt corps, en la collation
7-cb.ij Mais encore à il son inter-
pretation.Car luy esti m ant les An
ges estre corporels voirement,maii
toutesfois nó distinguez par le sexe
pour ceste occasion ìl n'a pas pense
qu'ils peuflet faire l'ceuure de chair
mesmei en leurs propres corps. Ie
tiens qu'il faut ainfiLentédre les au
tres anteurs. Philastrius ne nye p ;f8
Îesdé,tn5s ne puiífent paillarder àî
Dec les hómesjtoutesfoisil nyeque
les Geans mentiónez au 6\du Gen.
foiét nais à'va tel accouplement. Au
Concile d' Ancire.íe respós qu'il ne
disfinitrié sinó qu'au seul Dieu il y a
T iiii
T&AJC.TB' D.E.S DEMONS,
l.a dijiioite & que Jc teste se doit
prends* comme dit en passant
Touchant à l'txemple de Viret,îe
dis qu'U falloir plustost croire à I*
fjll? estant en danger de fa vie,quà
la sage fcjntne; & meímc attendu
queTe démon a peu aûoir afíàirc a.
uepel!e,demeurintsaVirginite'en-
tieie.Or bien puis qu'il este'uident
qu'ijya de'mqns incubçs fie succu-
bes, U faut voir s'ils peuuentengé-
Stles de- dxer.Dequoy je trouue quatre opi-
tmas en- njom La i.estque nonseBÎemét ils
penètrent. pCwuent engendrer , ains encore le
peuuét faire de leur propre seméce.
Aipsi sis doute l'ont estimé losepb,
fustin u\a^tyj:^thtt»*g0r3»;Tertul.
lian,& MaccEphestes : lequel à dit
qu'ils ont certaine destiée semence
çngédrante qui n'est pasapperceuS
par dos sens. La seconde est beau»
coup plus merueilleuse :que non
seulement ils peuuent «te-leurfe.
'iSítHí propre engendrer vn hom
me ou v n Ange ains qu'ils ont ei>
CQrp'entr'e»x leur mukiplicationt
ainn en esc rit G r ego ire de Nazian
-Û V P. M A L D O N A T. 12i
ze au liure cie la creation de l'hom-
me,chap? 8. La 5 est qu'ils peuuent
bien engendrer auec les semmes,
mats non pas de leur propre semé-
c-e. lustin en la 2 Apologie. Clemét
au 2. liure des recogninós dict que
Simon le magicien auoit accoustu-
medeíeiacter qu'il estoie rìay dfi
Rachel peadant qu'elle estott en"
core vierge: Et Vin cens au r.li« -ch. ^erHnt
30. recite que Merlin sot engendré
d'vne gentil semme & d'vn demon
incube. Hector Boétius recite cela
mesme , & au 8. liure de rHistoirtf
d'Eseosle.racompce quVnJa fegio»
M.irrhone vne fille conçeue d'vnt
demon. Vineensau liure premier
chap. 25 recite qu'vn Siîicien auoit
feictv-n fils à vnde'mon succube le
quel comme ií nageoií luy auoit
apparu en forme de settiftic. láeJ
ques le Roux Medecin recite quel
que chose telle de certaine Magde-
feinc de Constance. En cetterepi'-
rriefti est de fainct? Thomas & apre*
hiff pkiiteurs-Trfeoíogiens ) en la
prttmiere partiejqae.jj.art.^cx fus
nr ... .
: -T R A 1 C t B-' D e S d e m o n S
Iedeuxie'me des Sentences , distin
ction huictiémc,artic. qtf&triéme.
Et des prodiges , quest. ô\art. 8. le
quel dict toutcsfois que i'homme
oay ainsi ne doit pas eítrc nomme'
fils d'vndémon.ains fils d'vnhóme
D'autant qu'il n'engendre point de
fa propre semence, (n'en ayant au-
eune)ains de celle d' vn home colli-
gée& conserue'e en chaleur natu
relle , ou en songeant, ou aux báins,
ou bien lors qu'auparauant il auoit
este' succube. C'est tout ainsi que le
laboureur n'est pas pere du fromet
d'autant qu'il ne la pas engendre' de
sasemence. Comme il est escrit en
Sainct Augustin, au liure troisieme
dela Trinité , chapitre huictie'mc
& neuíìe'me. De mesme opinion
ìestc Alexáderen la premiere par-
tic, question septante- huict- article
deuxieme. Et Durandus sur le se
cond des sentences , distinction
huict .qufstion 2. La quatriéme
opinion est de ceux qui ont dict
qu'en cette manière mesme les dé.
monsnepeuuct engendrer: ce que
DV P. MaLDONAT. 21Z
i'estimeestic tort probable En pre
mier lieud'aucanc qu'estant ties-
paríaicte la generation de l'bomme
elle est aussi tres- difficile. Pour le
second ie ne voy pas comment la
semence puisse cooscruersa vertu
& chaleur genitale , finon dans le
corps humain. Pour le troisiéme,
d'autant que ce qu'a este'alIegue',ou
il à este prins d'histoiresincertaines'
ou de fables certaineí.comme Ions -
celìes de Perseiis , Simon le Magi
cien, & í.4crlin. Mais quant au pas
sade du Genese 6. encoreque des
graues auteurs Payent entendu des:
Anges ,toutesfois plusieurs; autres'
ont eu opinion contraire. Etil est'
certíin qu'il ne se peut entendre-
ainsi selon le texte Ht breu. Les au- Enfans dt
Oins ont donc interpreté les fils.Djf#,
de Dieu , estre les enfans de Setlt
qui fut hómesainct Et les filles des
hómesíignifierles filles de Cham,:
qui fut meschant. Ainsi l'cntendenV^
Thcodoret, Procopius, & aucú au
tres par Elohim entendit les iuges;

T vj
- îT#4Afi>*C' 01 I DEMONS
de forte que ce lieu à emphase , &
q^eMoy se dict les- hommes, de ce
Ijeclfclà auoir eflé tant adonnez à
JflJttxuse vq«fi les enfás messmesdes
iugesi qui dcuoicot pac-hoonestste
& deuoir estre les p! as- temperaos)
rauiíïoient les plus belles semmes.
Abeo Efra.par les enfâns de Dieu,
entend les gens de bien: par les fil
les des hommes , entend les mau-
naises fémes. Kimhí , par les enfaos
de Dieu veut entendre les hommes
grands & de haute stature par la
phrase hebrayque, par laquelle Ics^
montaignes hautes font nommées
fnon taignes de Dieu . Et ce sens me.
(érable fort conuenable, d'autant
que d'iceux l'Escriture dict estre
tKÚx les Geans. L'ínterprete Cal-
dee interprete les enfás des grand*
& puìssans : d'autant que plus- m
homme est puissans,plus il estime
luv estre !oysibIe,mcfi»eroeot au?
actes de Venus. : .- .

--• y't.;:\ -;'.j'.iÌÌÙqI.ÌH .:..ì


DV P. Mal DON AT.'

Sl LES DEMONS E T
ENCHANTEVRS PEVVENT
cmpeícher l'accouplement
charnel.

I AS. question est que les démos ,


JL-.& par leur ayde les Sorciers
peuuentempescher les œuuresde
la generation. Dequoy aussi dispu
tent les lurisconsultes au titre des
froids & malefices : & les Theolo
giens, qui nomment ect e m pefchc- Lyt
ment,Lyen. Il y a de cecy quatre
apimons. La premiere de ceux qui
nyent que cela se puisse faire: d'au
tant qu'ils ne croy en t pas qu'il y ait
des de'mós:ce que nous auós refuté
cy dessus. La seconde est de ceux
qiri encore que confessent qu'il y à
des de'mós , nyent toutesfois qu'ils
puissent empescher le congrez:
mais cette cy est de gens qui igno
rant! eatibremcm l'experience. Ca«
site peuvent tirer îes hommes , & !
leur enuoyer des- maladies , pour !
T R A t C T E! DE S "DE MON-S,
quoy en pourront ils aussi empes.
cher les œuures de mariage ? Com
bien que de cecyilny aye point
d'exemples en la saincte Escriture,
ny aux anciennes histoires que ie
íçache , & puis Inexperience appréd
qu'il y en a aucuns quipeuuét exer
cer ces actes là auec vne semme, &
nepeuuentauec vne autre. Voire
mesmesjèV n'ont pas de puissance
auec celle qu'ils ayrnent le plus."
chose qui ne peur proceder d vne
cause naturelle. Adioustons encore
que l'expericficenousapprenJ que
i'ensorcellement citant ostr , ils
peuuent ce quau parauant tu ne
pouuoient Finablementcecy mes-
me a este' resolu en la trente troisie'- '
mequestion premiere, au chapitre.
Si fer Sorcurias,.&c au chapitre
fyqaifîfti. La troisieme opinion est
qUe les de'mons le- pemient faire,
maisrconpastousiours:c«tte-cy est
recite'epar l'interprete fur lecha-
pitre tSiper SoreLriat. Mais si le
de'mon lepeut faire pour vn temps
{ans doute il le peut aussi faire per-
dv P. Maldonat. 224
petucllement. Et puis il peut don
ner à tousiours la vertu d'engen
drer, qui est bien plus : à plus forte
raison il peut empescher le cógre?, -
La quatriéme opinion est qu'il le
peut faire & par tcps & perpetuel
lement : laquelle par la refutation
des autres demeure assez prouue'e. çon}me
Mais comment se faict cel%îil est ^mm
bien certain qu'il nç se peut faire 1 -
en vertu des choses qui s'y en> "
plovent (car il ny a nœud , aiguil- -
îette,ou chose mise fous vne aiguil-
lette, ou fous vnlict qui puisse faire '
rien de tel ) cela se faict par lceuure
des diables incogneus auec pacte
secret ou exprez. (Or comme dict
Pauludanus Eueíque de Ierusalem
fur le 4. des Sët.dist. 32.qu.2.art.7.)
il faict cela en 5. manieres. La prem.
par interposition d'vn corps. La 2.
parresroidissemétde la vertu d'en-
gendrcr.La J.par retention des mé.
bresseruansà lageneratió :car fi le
démo peut remuer les corps il nya
poít de doute qu'il ne les puisse te>
tenir. La 4.parobstsuctió des efpris
T R a i c t e' d e s d e m on s,
parle moyen desquels cêt acte s'e?
xerec. La cinquieme par Tespece
mise detrant îesprk: comme pour
exemple par î'objiectd'vne femme
fort laide; Et Speinger fescrit ainsi;
adioustamqHe paree moyen iiari.
- iiuequeceuxquiontdetres-bel'les
: - --". semmes ses bayent mortellement,
& - soní extremement passionnez
. d'autres sort laides. Et ie pense1 que
lé démon ( ^ni sans doute peut
mouuoir la fant a si c ) à de coust u me
delier presque tousieurs en cette
Combien maniere. Mais iniques à <jucïu mps
ftut du- peut m teJmaTehfe empeschcrle
rerlelie. marifege? Ffonorhis' au- eh»pirre
commencjînt , Lner*, aru- titre des
froids & mafeficies, rcípon d qife's
Í'iërsònnes comprises en cetitre , il
ant attendre trois ans : & fi d&ns ce
tèmpslesmarlezn'epeuutínt exer*
cerl'aérede marrage , quil Icfsut
dìflbudre:commeauC»r au droict
Ciufl, celufduquerÇestant aWe'à la
guerre ) l'cmnesçaixnníses nouueK
les de trois ans, esltenu ponfmort;
D e 1 a naift vue au tre question ; que
DV P. Maldonat. 235
dira on si apres ce trienne on trouuc
que l'vndes mariez peut faire les
actes de mariage ? Car la chose est
douteuse à cause de deux Decrets
quisembléten apparence estrec ó-
t raires. L'vn de Gregoire le grand
33 quest.r.cín Hfquiststi, l'autre d's-
marus Eucsque de Reims ( i'estime
qu'il faut lire ainsi non pas Gnar us,
ou ígnarus.ou Igmarus, ic l'ay ain
si trouue' à Reims en vnvieilexem-
plaire escrit en main ) car par ce de
cret il ordonne que ce mariage la
ne se peut reprendre.Mais il les faut
accorder ainsi,c'est que l'vn ordon
ne que siapres letrienneil íetrou-
ue que les mariez entr'emf peuuent
accomplir les œuures de Va chair,
le mariage sedoit réprendre : d'au
tant qu'il est certain alors quelert-
c h an te ment est ost e. M a is si le m ar y
exerçoit telles œuures apres le trié-
tte, non pas auec son esp ouse , ains
auec quelque autre semme , le ma
riage ne íe pourroit pas reprendre

: l'on peut estre empefche' de


TrAICTe' DES DEMONS,
«'accoupler auec vne femme , & nó
pas auec d'autres. Aux susdites que
stions en estconjoincte vn autre
Des de ,jes demoniaques que i'auois ob-
monia- mise .'desquels ilfauttraicterqueV
Vts' ques chefs. Le premier s'il y en a,
cho.'equiest cuident par l'escritu-
Te:en Sainct Mathieu chapitres
quatre, sept , huict, neus, douze,
quinze, dix- sept. En sainct Marc
chapitres premier trois.six»sept,&
seize. En Sainct Luc quatrie'me
^.g.n.&ij.chapitres Iustin,Tcrtul'
lian& autres eicrîuent que les an.
ciens Chrestiens auoient accoustu-
mé de prouucr nostre foy aux
Ethniques,par la guerison des De.
inoniaques.Lai.pourquoyau vieil
Testament il nesefaict aucune Dic
tion , ou du moins presque nulle,
desdemoniaques.Car il nyen a si
non la où il est escritque le mau-
uais esprit agita Saìil au premier des
Rois ifi.Ie pense qu'il y à deux cau
se* pourquoy les demoniaques e-
stoient alors plus" rares:l'vne parce
qu'encore n'estoient pas nées les
D V T. M A X D 0 V * *, ;. 22c?
sept heresies des luiss recitees par
Epiphanìus au commencement de
son Panarius : d'autant que les he
resies font accueillies par vne mul
titude de demoniaques. Et c'est la
cause pourquoy au temps de Iesus
Christ, ils estoient presque innu-
merables: ce qu'à este' obserué par
Ioseph. La seconde est d'autant
qu'encore qu'à lors ils fussent par
auanture plusieurs , toutesfois ils
appiroissotent de tant moins que le
Medecin n'estoit pasarriue'encore:
comme nous disons que làoù il y a
plusieurs Medecins & Aduocats , il
y a plusieurs maladies , & proces
c'est d'autát qu'ils apparoissent d'a-
uantage. En second lieu,comment Ctgnois-
doiuent estre discernez les demo- face des
niaques Par-cequclesaucunssont demonu-
estimez demoniaques à cause de 2"fí.
quelque m aladic & les autres,d'au-
tant qu'ils seignent de l'estre. Ie rc.
sponsqu'óles peuteognoistreen j. .
manieres. La prem.fi y employant
des medicamens naturels ils ne có-
mencét point de se trou uer mieux.
Ta Al t * § * DtSDEM ONi,
Dequoy Fc'rne4ameine vn tres-bel
ex e m pie a u second' 1 i u re des occul
tes causes des choses, chapitre \6.
Lai. fi l'on y employe les remède*
de l'Egl-ísc,foosaucBn profit ou ap
parence : car c'est vne p reu ue qu'ils
ne font pas Demoniaques. Que fi
par aucun de ces remedes il ne se
trouuent mieux, il est certain que
c estfiction.Laj.sictlujr qui est tra-
uaille, par le langage quiluy fut au-
parauant incogneu,car en ce cas
il ny a pas de doute qu'il ne soit
demoniaque. Sainct Hierosmeen
la vîed'Hilario.n : vous verriez que
de la bouche d'vn barbare & q ui nc
spit que la langue Françoise & La
tine, resonnent les mots Siriaq ues,
& que ne lestridor , ne autre naïfue
prolatton dulangage Palestin ne
luy manque point. En quatrie'me
lieu-il faut dire pourquoyDieu per-
met que les aucuns soient agitez du
Vottrquoy diable. Icrcspons quec'est le plus
Dituptt. souuent pour six raisons. La pre»
ivetles miere est d'autant que les enfans
d(„,otìïai ^ont aucunesfois offèrts aujt diables
D y P. MAtDONAT. Ì2J
ou par leurs parens , ou par les
nourrices Sorcieres. Ainsi reípon-
dit vn démon U y a quelques an
nées toucha* la fille cTvn luis magi
cien. La seconde cause est quelque
peché propre : ainsi s'irrua le malin
esprit en Saúl. Ainsi recite Prosper
au liure des predictions chapitres-
qu'vnetìllc nommée Arabe en fut
saisie pour auoir comparé sa beauté
auec celle de Venut,de laquelle elle
auoit veu la peinture aux bains. La
troisie'me cause est le peché origi
nel, car la peine d'icduy est ( tout
ainsi que les maladies , la pauureté
& semblables) le tout ment dudia-
ble:& sainct Augustin escrit que les
innocens y font swjects , aupre-
mier liure de la Cité de Dieu , < fia-
pitre i-4. Et an 2.ai liur-e^clyipitre
vingt-deu*. Et Bedaen |a vif; de
HubcrtEuesque d'Ane leterre.çha-
pttre ciBquie'me. Carildict qu'vn
démon interrogé pourquoy - & a-
uoitenuabv quclqu'yn, respondil
qu e c eíloit pou r: la peine- dujpgchi
originel. La quatrième cause est
T !ì A it î t'' DÉS DEM OjN S,
pour esprouuer la vertu des homes,
& meímes celle de patience , lors
quequelqu'vnesttourmenté inte
rieurement & exterieurement, le-
stime que la cinquiéme est afin
que la vertu de Dieu apparoisse, 8c
des choses sacrées- le pense que
pour ceste raison. Dieu permit que
cette viere£ de Laon fut- tourmen
tée ,poui Vaire apparoistre la verta
de l'Eucharistie en ce miserable
temps. Et si ainsi tst-, en saint Iean
neuHéme ? qu'vn homme estoit
nay aueugle , non pour occasion
qu'il eust peché ne ses parens, ains
afin que la gloire de Dieu fut mani
sestée en lui,il ny a pas de doute que
pour mesme occasion quelqu'vn
ne puisse aussiestre rendu démo
niaque, l'on dit vulgairement que
la sixiéme cáuse est quand quel-
qu'vn n est bien& dcuëmentba-
ptizé. Ce qu'encore que ie ne trou-
nepasdáslesauthenfs apprôuucz,
toutesfois ìele eróy ayfément : Et
y adiouste encore que cela peut
DV P. MAIDONAT, 228
arriuer pour le mespris du Sacre
ment de Confirmation (duquel
U principale vertu est de confir
mer & de fortifier les ames contre
le Diable.) Et par auanture est ce la
cause pour laquelle en France, en
ce temps que bien peu reçotuent
le Sacrement de confirmation, il .
y a si grand nombre ou de De
moniaques ou d'Enchanteurs. Ad-
ioustons encore que quc'qu'vn
(lequel ie pourrois nommer) par
íe seul Sacrement de Consirmatió;
fut deliurc du diable. La neufieme
question est: si par le moyen des
Sorciers les de'mons peuuent estre sikoSor-
iectez dans les corps des hom- àersfeu-
mes. Ce qu'ayant ces anne'es pa£ wnt ren
iées este' dispute' à Rome , il fut fa cìtmoi
conclud qu'il le peut faire , ic le „ t
crois pour quelques argumena
qui le pteuuent. Car eu premier
lieu: si le Magicien peut enclorrç
vn de'mon dans vn anneau , ou vn
verre , il semble que rien n'em-
pcsehe qu'il oc le puisse enclorrc»
T R A l C T l' DIS D I M O N S ,
dans le corps d'vn homme: sinon
d'autant queie croy que Dieu le
permet pins rarement. En second
Keutelis ensainct Hierosmeenla
▼ied'Hilatk>nqu'Tn certain jeune
homme reçeut d'vn Magicien vn
de'mon familier. A quoy est sembla.
blel'exemple de Fernel allegué cy
dessus.Car la aussi k démon respó-
dit qu'il auoit esté mis par vn Ma
gicien j dans le corps de ceieune
homme. '

DE LA PVISSANCE
D y DEMON SVR LES
choses exterieures.

IL est cuident par les lettres sain-


ctes qu'il à plus grande puissan-
cesur les choses exterieures ,qoe
n'a pas toute la nature. Au qua
triéme chapitre de lob , il n'y à
point de puissance en terrequiluy
puisle estte comparée. Espar ce il
ne faut supportes en l'ignorance
ou la malice de ceux , lesquels
dv P. Maldonat. 229
siqueiqu'vnestacculé que par lai
dcdudiableilarenuerfé les bleds,
oa insecte les fruicts dela terre,
dyent qu'ifnc fáut pai condam
ner, d'autant qu'ils pëlestt le diable
nepouuoir faire rien de tel. Car
par la permission de Dieu il ruina
tous les biens 8c moyens de lob, &
fit semblant que cclaíuy estoit plus
aise',que de tourmenter 1c corps c!ç
Iob.Qr plusieurs telles choses, que
no'us liions dans les Auteurs profa
nes comme en Virgile en IaPhar-
maccutrie. Les bleds ensemencez
i'ayveu porter ailleurs. Etauqua-
trie'me de l'Eneide:Et ramener
ailleurs les fresnes,des montaignes.
Et cc que recite Pline au dixfe ptie'-
ffie liure chapitre 23. D'vn bas d'o-
liuiers transporte' par enchantemés
hors. la voye publique. Etau liure
dixhuictieíme chapitre sixie'me,
de quelqu'vn qui fut accqse'qpar
charme il trásportoit dans son iar-
dinlesfruictsdes iardís de ses voi
sins. Et ce qu'est eserit e's loix des
dotue tables Celuy qui aura en-
Tr aic ti' des de won s,
chanté les bleds soit puny ) cho.
se que sainct Augustin n'apasmes-
pnse'auhuictie'me liuredelaCiíc
de Dieu , chapitre vingt-ncnfie£
me.) Telles choses n'ont parauen-
ture pas este' faictes:mais celuy .qui
nyequ'clles se puissent faire par
art du diable, contredict aux sain-
ctes Escritures. D'auantage nous
lisons que par vn mouuement de
terre les montaignes ont este' trans.
porte'es.ll ny a donc point -..- duu--
te que lesdc'mons n'en puissent fai,
re de mesme: desquels la puissance
est p lus grande que celle de toutes
les choses naturelles. -

SI LE DEMON P E V T
FAIRE MIRACLE.

"V T Iracleàprins le nom.d'ad-


M™&. Mmiraticn. Qr nous admi-
rons,quandnous voyons vneffect,
ignorât la cause.Et de la vient que
ce qu'est miracle auxvns,ne Test
pas aux autres'Et ce qui est miracle
bvP. Maldonat. 530
faict par vnc cause, s'il se fait par
vne autre ne l'est pas. Doncques
d'autantquel'hommese peut cósi-
derer cettui-cy,ou cettui là,ou vni-
uersellement , tout homme,& aussi
vne cause naturelle cette cy ou cette
là ou toutecause, miracle se nóme
doublement. L'vn absoluement,
duquel aucune cause naturelle ne se
peut trouuçr & qui à bon droict
est admirable à tous : comme créeí
quelque chose de rié, ressusciter les
mortSjauec le seul commandement
guerir les malades. Et ceux- cy font
proprement miracles par le moyen
desquels l'esscriture enseigne que
nostre foy est confirmee: le seul
Dieu les peut faire,au pseau.71.be- r
nit soit le Seigneur Dieu d'Israël r*
qui seul fajct choses merueilleuses,
&au pseau.7o.QuicstleDieugrád
comme nostre Dieu ? tue'sle Dieu
qui faict les merueilles. Au surplus jaUX
si le diable essaye quelque chose de m\t
tel cela se nomme vn faux & men7
songer mtrade.Cóme aux Thesalor
nie. deuxieme, laduenement du-
V ij
' 1 R A I C T B UKS JL; K M U N 5,
quel selon l'aduenement de Sathan
en toute vertu & signes , Ô£ pro
diges mensongers. Là où saint Paul
annonce que l'Antechnftpar l'œu-
ure du diable fera des faux miracles
Ainsi fut faux la ressuscitat ion du
Taux mi- mot t,& le voler de Simon le Magi-
racle. cien,en Egesippus liure troisième,
chap. deuxieme de la ruine de Hie-
rusalem , si toutesfois ceste histoire
estd'Egesippus&non pli-stost de
SainctAmbroise.Il y ad'autrçs mi
racles qui se fót par industrie y em
ployant quelque chose natutel'e.
Comme quand Moy se iettant de la
cendre en l'aír excita de» nuees.Sí
quand Dieu ayant faictle-uer vnvét
'Miracle brufiant- , St ventr des Sauterelles.
industri" De tels eopeuuét faire les diables:
eux. ...'•/t &que!que fois encore fes hommes
joignant aucc quelque choie na
turelle , ou industrie humaine -' ou
veritablement diabolique : comme
ce qui fut faict parles Magiciens
2rtJHgt. de Pharao. L'.s autresfonr miracles
de nom fcu!ement,&ìion pas en es-
sect, & ne fout pas tels qu'on peiìse
D y P. M AL D ON A f.v î^x
& proprement se nomment Presti*
ges desde'mons : Commesont or
dinairement tous ceux qui se font
par le demon & par les Magiciens*
Et finiblemét d'autres qu'on nom
me bien miracles , mais ne le font
pas, combien que soi*nt tels qu'ils
semblent estre: d'autant qu'ils ont
des causes naturelles : mais par cfc
qu'elles nous font inconnues, nous
les nommons miracles.

r:: ■ - - --
S'IL EST LOISIBLE DE
DE M AN DER R Ë M B » Ê
aux démons, contre les de-
monsmesme-

COmbienquepar !a Theriàqutt
Fàictede la vipert, la morsu
re de la vipere , «st guerie , & là
piqueure del'Escorptoh,par l'huil-
lefaîákd'cscorpioni Toutesfois co
tre le diable il n'est pas licite d'em
ployer l'aide du diable.Cela est ma
niseste au Leuitique chapitre dix-
fjeufiéme, au Deuteronome dix
V ìij
T R A I C T E DES DEMONS,
huictiërne,au premier des Roy s 28.
Et en la vingt- sixiéme , question
deuxie'me, au chapitre , qui com
mence : | Qui fi;-e faluatore salu-
tem vult taWí.D'auantage tous les
Chrestiensau Baptesme renoncent
au diable , & à ses œuures. Et quant
à moy i'estime que c'est vne des
principales causes pour lesquelles
le diable fait des maux aux homes,
pour les cótraindrç à implorer íbri
aiderestant fur toutes choses ambi
tieux d'estre adoré pour Dieu. Et
par-ce la vraye resolution est qu'il
faut recouurir à Dieuj&n'implorer
point l'ayde du diable quant bien
on deuroic mourir. Ausurplusles
Theologiens disputent fi encore
qu'il ne soit loisible de demander
aideau de'mon,s'íl est permis d'vser
de l'aidequi nous est offerte pjr vn
Magicien. Et veritablement Pe-
trusAureolus , fur le quatrie'me
des Sentences, distinction trente
deuxiéme , question deuxie'me.
Et Angelussurle mot , Superflitio:
au Parafrazc traiziéme , pensent
D v P. Maldonat. 23»
qu'il íoit licite. En premier lieu,
d'autant qu'il est permis deprédre
à Vsure pour le deuxie'me: parce
, qu'il est licite de prendre le Sermét
d'vn infidele, par ses faux Dieux.
Comme il est esscrit en saint Augu
stin en l'Epistre cent-cinquáte qua-
trie'me. Isaac le reeeut d'Àbime-
lech au Genese vingt- sixieí me. Et
ïaçob, de Laban , Genese trente
vnie'.n?. Mais cette opinion est nó
seulement faule.ains encore perni-
tieuse & qui ne se doit aucunement
proposer aupeuple.Car il y a tres-
grande difterence:d'aurant que qui
préd à vsure,peut donner sans vsu-
re,& ainsi aymeroit mieux le pren
dre celuy qui emprunte. Et qui
iure par vnfauxDieu peut iurer par
íèvray. Mats celuy qui demádeay-
deà!'encháteur,fçaitbien qu'il ne
peut rien fans Paide du diable. Tou.
tesfois i'estime bien estre vray ce
dont plusieurs Theologiens font
d'aduis: qu'il est. licite de deman
der à vn enchanteur qu'il desface.
't-"': J - V iiii
■ «nu- ip U E ) U b m U IN S ,
ionmalefice:comme qu'il desnou'é
l'aiguillette. Car ce n'est pas demá-
der qu'il face vn nouueau mal, ains
?[u'il desface celuy qui est desia
aict., -'. -

t>ES REMEDES ECCLE-


' sl SI AS TI QVSS, .",

Bw.cfcrí p. Rçptre les remede* Ecdcsia-


fc dublt. \J tliques. Le premier est la gra
ce d'expeller contre lesdhbles.En
sainct Mathieu septieme, plusieurs
me diront en cc iour là , Seigneur,
en ton nom nousauons chasiéles
diab!es,& auós prophetisé. Et en S.
' Marc , troisie'me il leur donna puis.
sancedeguerir les malades, & de
chasser les diables. En sainct Ma
thieu neufuie'me, nous auons veu
qudquVn chassant les diables, le
quel ne no" fuit pas.En sainct Marc
íeizte'me.Or les signe* de ceux qui
auront creu s'ensujruront tels, ea
mon nom ìhc hs siéront les diables.
Et en sainct Luc dixième. Seigneur
dt P. Maldona t. 233
les diables mesmes nous font aíïu-
jectisenton nom. Que fi par vne
grace les diables sont expelie's:à pl*
forte raison leurs malefices seront
dehicts par cette grace. Or ce don
de chaster les diables Dieu le don
ne quefquesfois indifferemment
aux bons & mauuais. Comme il
appert par l'exemple de ceux leC.
quels chaslbient les diables combiê
qu'ils ne suyuissét pas Iesus Christ.
Quelqnesfois ledonneponr quel
que excellente vertu. Ainsi le con
fera il à saint Anthoine cóme escrit
Pallidias en la vie d'iceluy. Ejt àS.
Martin Euesque de Tours,en Sene-
rus Sulpitius. Cecy estoit si frequet
en la premiere Eglise que cóme les
baptisez parloicnt incontinent di-
uers langages, ainsi aussi ilschas-
soient les diables. Et c'est oitVocca-4
sibn pour laquelle alors ne se pra-
ctiquoit point l'ordre des exorei.
stes:commeil appert en Clementf
au huietie'me liure des constitutifs
chapitre trente- deuxie'me : l'exor-.
ciste n'est point ordonne': & neant
V v
TRAtCTE DES DEMONS, -
moins ce combat est d'vne volor,
taire dilectió , & grace de Dieu par
Ieíus Christ, y luruenát lesáinct Es
prit. Et toutesfois ie ne me peux
garder de reprédre Vierius, lequel
au liure des Prestiges collige,par ce
tesmoignage deCkment.qu'ilny a
point d'ordre d'Exorcistes. Car au
mesme Clement il y a vn autre pas
sage auquel il nomme celuy cyaussi
entre les ordres. Dót il est e'uident
qu'en ce temps-là il y auoit deux
genres d'Exorcist. l'vn de ceux qui
a- Genre pestoient par tjon de Dieu : & latt
is exorct- tfc cjeceux quj festoient d office ou
Qes.Mt. p0ur rajfon de Tordre. Et de mesme
autépsdeCyprîan, lequel velquit
enuiron deux cens ans apres Ieíus
Christ. Car cela se voit en son liure
4. chapitre septie'me. Etparl'Epi-
stre de Cornelius Pape de Rome,
en Eusebc liu. sixieme de só histoi
re chapitre trente- troisième. Et par
te 4. Concile de Cartage , chapitre
quatriéme. Le deuxieme remcde
Eccless. est ce mesme Ordre Ecclefl
des Exorcistes. Office qui a esté &
dv P. Maldona t. 234
entre les luiss (aux Actes chap^ip.
& qu'i la ic esté entre les Chrestiens
en l'Eglise, il appert par le qua
trie'me Concile de Cartage chapi
tre 4i7. l'Exorciste quand il reçoit
l'ordr^il reçoit dela main de J'EueC
q ue vn liuret auquel sont escrits les
Exorcismes, l'Euesque luy disant:
Prens , & apren!i par coeur : & aye
puiflance de mettre la main furie
demoniaque, ou baptiíe', ou Cate-
chumene.Etdu Cócile d'Antioche,
chapitre dixie'me. Or ic reciteray
quelques choies des ceremonies
des Exorcismes, dignes de memoi
re. En premier heu, non seulemét
l;Exorctste estoit entre les Ordres Kcmlre.
Ecclesiastiques , ains en chacune cart.d'E-
Eglise le nóbre des Exorcistes estoit nercif-
ckfiny & arreste'. Comme U appert mes,
par l'Epistred'Anacletus aux Eues-
quesd'Affrique. Et par le Concile v
d'Ancire , & par l'Epistre du P. P.
Cornelius , aux histoires liure 6.
chapitre tréte troiíìe'mc.D'auanta-
ge l'Exorcis.íe faisoit auec certaines

V vj
I RAIOTl U. h 5 UÍMUNií,
& determinees paroles. Comme il
se monstre en N4inutius Fœlix, en
Octauius.. Et eti I.actance , liure ì.
chapitre sixième. Et en Calsian col.
latió quinzieme, chapitre ciaquié-
^ me & au 4. Concile de Cartage,
chapitre septieme. Pour le troisie'
me , les autres oraisons ayanstou-
jourskurfin & conclusionvP.arna-
streSeieneur Ieíus Christ &c. Elles
restans employées , n'auoiertt pas
cette fin (ne maintenant encore^íi-
áó par ces mots : Par celuy qui doit
▼entriuget' le siec!e,parseu.LeMi-
Crologuecn ameine la raison, au ]*•
upc des Sacreovens : c?est d'autan*
que les diables font bien fort ef
frayez entendans fairemention dm
iugement. Cc qui se collige de ces
paroi les desainctCypriáj à-Deme-
trian : Sentans les fleaux s ils coi»..
^ sestent le iugement futur. En 4. Iwuj
les demós estoient iocewgez, quel
nom ils auoient. Ce que léíus
Christ fit en Sainct Marc,3f samâb
Bue huicticme.Queîect tna mim^
Cecy se collige aussi de Lactance
DV P. MAL DONA t. I35
ils declarét ( dict- il) leurs nós,ceux
qui font adorez es temples. Pour
k 5. comme l'ó impoíoit les mains '
aux Catechumcnes tos les iours de
Caresme,ainsi en faisoit on aux De.
moniaques : comme il appert par le
messme 4.Concile de Cartage. Et au
tiltrç de la Consecration , distinct,
cìnquie'mc , au chapitre commen
çant , Omni dit. Pour le sixieme , les g
Exorcistes ne chafsoienc iamais íe '
diable ne dans le Temple pour la
reuerence du lieu : ne és maisons
priuéespour la craincte. Comme
il appert par le Cócile de Laodice,
chapitre cinquante neufuie'me. Et
parcc,iufques au iourd'huy la cou-
ftume est demeurée que lors que
les Catechumcnes font menez au
Baptefme, l'on ny employe point
d'éxorcismes , sinon deuát l 'entree
de l'EglifcPour leseptie'me apres -
que le démon cóiuré auoit promis
qu'il sartiroit,on luy demandoit vn
figncexterieur de son vssoé'.En Pal-
htcbius |ilola rit. de; J?ossidanigs,te
diable donna pour signe de son y £
TRAIC'Té' DEi DEMONS,
suë, la ruine d'vne muraille. 11 est
e'uident aussi que cecy estoit en vía-
ge entre les suifs, en Ioíephe au
huictie'me liure des Antiquitei
chapitre deuxie'me. Pour le hui
ctie'me ( chose qui conccrnoit
plus la- -discipline , que la cere
monie) tous les demoniaques ha-
bitoient ensemble ( comme font
en ce temps aussi, en quelques
villes , tous ceux qui font hors du
sens ) & n'estoient gouuernez
par autres , que par les Exorci
stes mesmes: comme les bestessau-
uages ontaccoustume d'estre trai-
ctees parleurs gouuerncurscelaesfc
escrit au quatrie'me Cócile de Car-
tage, chapitre neufuiéme. Adjou-
stons encore que les Exorciímes
estoient employez non seulement
pour chasser les diables, ains tes
autres choses encore , comme les
serpens, les fautereaux, les -Ora-
ges. Dequov les Heretiques ont
accoustume' de (e mocquer -, par ce
qVili dyent<juetelles choses n'en
-í^ ítuì^ i :n.j:,.";..gq i.fifiïb i.]t t .
DV P. M AL DO N A t. 236*
pas la vertu d'entendre. Mais nous
ne le faisons pas à cette intention
que nous pensions qu'elles enten
dent : mais sçachans par la saincte
Escriture que telles' choses /ont
souuent excitees par les de'mons
nous les voulons chasser d'icelles,
non plus que des corps humains.
Et comme il appert par le Pscau-
mc cinquante septie'me , les scr-
Pens sorVt enchantez , combien
qu'ils n'entendent pas les paro
les de l'enchanteur: qu'il leur ar-
riue(dict-il ) selon la íemblan-
ce du serpent : comme du seurd -
Aípid , & bouchant ses oreilles
laquellen'orra pas la voix des en.
chanteurs , du sorcier enchantant
sagement. En fin i'ay veu moy
mesme au Royaume de Grenade,
vne estrange multitude de saute-
rcaux ayans tout depopule'par l'es- Hïst.
pace de trois ans entiers , auecgrád
degast de viores & peril des per
sonnes , apres auoir faict des prie
res publiques, & l'auoir conjurée,
. TrAICTe'dÈS DEMONS,
en fin auoir este chassee. Letroisié-
meretnedeestlaseale Prononcia-
je tiondu nom de Iesus : auee lequel
àpeineyauort-it aucun Chrertfen
quineehassast les diables en lapri-
mitiue Eglise. Parcêt argumét.Iu-
stin prouue la diuinité de Iesus
Christenson Triphon , Apologie
premkre.Et Origine au premier li
ure contre Celsiis. EtTertulicnau
liure dela Coróne du gcdarme,& à
Scapula. Et en l'Apol. chapitre tré-
te-septie'me. Etau liure de l'Ame,
chapitre 2. Si les ames demeurent
&c. 'Et au liure des Spectaclt s, ch.
du nóbre, & au liure de l'Idolarrie,
Et sainct Cvprian en l'Epistre àDe.
metrius .Et au liure dek vanite' des
Idoles. Et Minutiusen Octauius.
Et Lactance liure deuxie'me chdpt*
trëíìxie'inc. Etau liure quatricmej
chapitre virígt-scptie'me, & au liu.
ciîiquie'me chapitre vingt- deuxi.
ie'me,& vingt-troisie'ole'. Et Atli3-
nasiusau liure de ^Incarnation du
Verbe. Cecy; mesme allegue Aleiai
en la \oy3Ojìeutnms aux Digestes d;
DV Pi Mal DON at. 237
la significatif des mots . Mais ie de
sire r ois bien qu'il eust parle' pl9 ac-
cortement. Car il a dict que ce n'e-
stoit pas argum et de saíctçté. Cho
se qui est có traire à la sainctc Esc ri-
turc. D'autant que Icsus Christ dict y
Mais ceux qui auront creu seront
ces signes: à mon nom ils chasse
ront les diables. Lequatr^me re- signe de
medeest le signe de la croix :auec croix.
Jeq«el les aotiens Chrestiens chas.
soient les diables. S. Cyprian au Ser.
monde la passion de Iesus Christ:
Je lais vott defia, & quiconque
citant en la seruitude d'Egypte de
tout sondeíìr tend à la patrie proí-
mise, que le sang de íe sus Christ
chaste bien les puissances aducrsai-
res auec plus d'efficace que non pas
Iesang da cest aigneau qu'Israël inv-
moloit en Egypte, duquel Tautho-
rite'& puissance est auiourd'huy si
grande qu'il defend non seulement
les portes des Israélites : ains enco- -
rc le féul signe de ce Sacrement
chaste les diables , de ceux qui ne
yiuent pas Israclitiquemét.Orige- -
' Ï"R AjÒTÉ ' DES DEMONS,
ne au troisie'me liure sur Iob,re-
prédlesGétils,dece'qu'ils ostoiét
les malefices des diables par autres
malefices : Et au contraire dict
-que les Ghrestiens vsoient du si
gne de la Croix contre les dé
mons. Lactance au Hu. quatrieme,
chap. vingt quatrie'me, lors qu'ils
immolét à leurs Dieux, s'il y assiste
quelqu'vn ayant lefront garny du
íignedelacroix leurdeuinne peut
rié impetrer par ses sacrifices, & ne
peut, consulté rendre aucune res-
ponse. Et les mauuais Roys ont
Îirins de la souuent occasion de pep
ecuterles Chrestiens.Car assistans
aucuns des nostres à leurs mai-
stres lorsqu'ils facrifioient faisant
surleur front ce signe,ils ont chaise
leurs Dieux, tellement qu'ils ne
pouuoient depeindre les choses à
venir e's entrailles de leurs bestes
sacrifiées.CyrilleEucsquede Hie-
ru sale m en fa quatrie'me catéchese
Que ii ( dict-il ) quelqu'vn le cele,
signe toy de là croix , afin que le'
diables tremblans au signe du Rqr
vdv P. Maldona t. 238
s'en aillent bien loing. Epiphanius
en son Pana. Heresie trentie'me
recire trois exemples des demons
chassez au signe de la croix. Sainct
Chrysost.enlacinquantíe'me Ho
melie sur sainct Mathieu admone
ste les Chrestiens qu'ils n'ayent
point de hóte de se signer du signe
de la croix: Car sien voyant seule- Similitu^
ment les lieux efqucls ceux qui font
condamnez à perdre la teste sous-
frentleurs supplices , noussommes
frappez d'vne horreur grande;
Qu'estimez- vous que le de'mon
souffrira s'il vo9 voit tenirle glaiue
auec lequel Iesus Christ à brisé ses
forces? Athanasc en l'oraison cotre
les Idoles;apres l'aduenement de la
croix le culte de tous les Idoles à
este' oste',& tous les enchátemês des
diables sonteffacez parce signe. Et
au liu.de l'Incarnat.du Verbe,mais
par le signe de la croix les effects de
la Magie font arrestez,& les enchá
temês rédussás efficace. Etpl'bas:
iadis les de'mos auec apparéce vai
nes &illusiósépestroiét les homes
TRAIC TE' DES DEMONS,
assiegeant en aucuns lieux ks fon
taines, atHeufs leí r iuieres,les prai
ries , tes bey s,Br pat ce rnoyen auec
tes prestiges , ils estotmoient les
ny ais. Mais maintenant que le Ver
be de Dieu à apparûtes effroyables
visions & illusions des figartfs ont
teíïé. Car l'hoffistievsant du seul si
gne de U croix, chasse tes diable*
d autour de foy- Gregoire Nazian-
Etneenl'oraisori contre Iulìan, es-
crit:QueIulian estant en me grot
te & se seignant de la croix , les dia.
blessefquarterent,8t en Toraison
à Nemesie : Et ne se faot pas efrner-
ueiller ( dit-il ) que les forces de le-
sesChrist ayehteste' si gfandes.Car
celuy encore qui sVst enroolle' à le.
fus Cbristjlouuehrpronónceàpei-
nece nom augustequ'incontinent
le diable, & non ftnsgririserrnîht &
tresgriefuedoufcursedesrobe bien
foingdeià. Ge que mesme arriuí
souuentjitìOy ayant depeint lacroii
non en vn tableau , ains en l'àirseû' ,
kment. Gregoire de Nitír,enli
vie de Gregoire Taurnaturge,noff
jyv r. MALDONAT. IJQ
me le signe de la croix , les armes
d'iccluy aucc lesquelles il auoit ac-
coustume' de chasser les diables. S.
Hietosraeçnla vie d'Hilarion: il
cogneut lçs illusions des diable», &
s'estantagenouilléfitlesigne de la
croix de lelus Christ au r"ront.& ar
me' d'vn tel moi ioa&comiert dV-
ne tçlle cuyrafl'e, estant couche' , ii
cóbattoit plusgaillarderrKt.Theo-
doreten laviedeMacedoni* esserit
qu'Afsir ia Demoniaque fut guerie
parle signe de la croix. Etau troi
sieme liure d« l'histoire Ecdes.cha-
pttre tioisiéme, il recite vae histoi
re de luiun , & au liure cinquieme,
chapitre onzie'me, que MArcellus'
Euesque de Pamies chassa des dia
bles d'vn temple des Payens ayant
imprimé le signe de la croix ení
l'eau. S. Augustin au deuxieme liu.
duSymbole au* Catechumene* :si
quelqucsfois le diable aduerfure
voudra encore agueter,celuy qui
cstrachapte',sçachequ'auec le Sa
crement du Symbole, &l'estendart
de h croix ií luy faut obuier. Et au
TRAiCTE' DES DEMONS
Sermon du temps. i8u II n'a donc
pas voulu qu'il hit lapidé, ou bit fié
d'vnglaiue: d'autant que nous ne
pouuós pas tpusiours porter auec-
ques nousdes pierres, ou du fer,
pour nous defíedre:mats il à choy-
íi la croix laquelle est representee a-
uec vn leger mouuemét de la main,
Scauec laquelle nous sommes mu
nis contre les ruses de l'ennemy .Le
tenues * remede est d'employer les Reli-
dêsSS tlues s Saincts. pourchasser les
diables. Abdias au 7.IÌu. ameinevn
exemple du fils du RoyHirtacus
demoniaque, lequel deuant les Re
liquaires de saint Mathieu, deseou-
uroit les meschancetez de son pere.
Et au liure neufréme qu'vn autre
filsduRoy enfut deliure' des de-
rnons.GregoiredeNazianz. en 1 o.
raison de S.Cyprianescrrr, qu'a son
sepulehre des diables furent chas
sez. Sainct Chryíostomc en l'Ho-
melic vingt sixie'me, fui- la deux-
ie'me aux Corinthiens , díct qu'aux
íepulehres des Martyrs les démons
dv P. Maidonat. 240
sónt fouettez. Luymesme au liure
contre les Gentils, qu'vn démon
qui fouloit donner ressponse
en l'Idole d'Apollon de Daphné
deuint muet apres quelecorps.Ce-
Babylas martyr fut mis aupres. Ce
que Ruffin encore recite au i0. liu.
chapitre huictie'me. Sainct Am
broise au Sermon 77.ÍV 92. dict
qu'aux Reliques/ainct Geruais,&
íainct Protl.ais les démons auoient
accoustumé de rugir. Sainct Hie-
rosme contre Vigilantius , l'essprit
immonde (dict.il) qui t'a contraint
d'escrireces choies , a esté fouuent
tourmente' par cette vilcpouldre.-
Sozomenus au liure septiéme , cha-.
pitre vingt- fixie'me, dict qu'Fpi-
phanius estant mort, fit ce que vi-:
uant il n'auoit pas faict d'autant
qu'à son sepulehre des diahles fu-:
rentehassez. Ruppcrtenla vie de
Herbert de Coloigne , chap. trei-
ziéme, dict que les demoniaques
auoient accoustume'de visiter les
fcpulehres des Martyrs. ;Et de !a
est demeurée encore lacouíhimc
TR A-ÏCT e' DES DEMONS
entre les Chrestiens d'entourner
les scpulehres des Martyrs.Cat Fex.
periêce enseignant que kt Demo
niaques menez autour des Scpul
chres des Martyrs eftoiem gueris-
ceste eoustume( comme ie pense)
est venue de là. La sixiéme cít que
par la recitation du Symbole les de.
mons estoient chalsez. Sainct Au
gustin, au deuxie'me liure du Sym
bole aux Catéchumcnes : que le ra-
chepte sçache que totríìours &c.
du eu il admoneste que contre les dia-
bles il faut vser du Symbole. Car
tout ainsi qu'auiourd'huy quand il
nous vient au deuant quelque cho
se effroyable, nous disons ìesvs,
ain'ì ils recitoient le seul Symbole,
afin que,seló sainct Paul , ils oppo
sassent le bouclier de la foy- Et de la
J'estime qu'il sepractiquott aussi
qucle commencement- de l'Eu3gi-
le de Sainct Iean se pendait au col.
Sainct Hicrosmc sur le vingt-troi-
fie'me chapitre de Sainct Mathieu,
& sainct Chry sostome en la septan
te troisie'me Homelie fur sain&
Mathieu
dv P; M al d on a t. 241
Matthieu: Et le Concile d'Antioche
Et'Emanuel à Costa aux Commen
taires des choses passées en l'Orient,
recite qu'ainsi fut chassé le diable,
d'-vne semme. Si quelques .vns re
prennent cecy , ils ne blasaient pat
la chose, ains la superstition qu'on y
conioinct:eomme qu'il soit escritenr AV
lettres rouges , ou en parchemin-
vierge, &c. Mais si quelqu'vn lesais
pour faire prosession de fa foy , il n'y
a point de doute que cela ne soit; -
louable. Le 7. par oraisons & ieus-
nes : comme en Tobie 6. & sainct?
Matthieu i7. sainct Marc 91 là où Ie-
sus Christ dit ; ce genre de diable»
ne se chasse sinon par prieres &ieu£.
nes. E'exemple en est de- Paul îe
simple e« Palladius. Auquel passa- oráson
ge ie n'approuue pas l'interpretátion & ìeus-
de sainct Ghrysostomeylequel pen- ,*•
íè qu'il s'agit là de tout genre de dia^
bles:ains plustost de ceux quiitigent
qu'il s'y partede ceKain:genrc : sça*
noir est de-celuy! qui prouoque à.
gourmandise & voluptez : lesquelles
chosesestát bien gueries par oraison
- 1KAICTE DBS DEMONS,
âï.ieusne*, Iesus Christ a voulu de?-
clarer qu'il faut que le contraire soit
guery par son contraire. Comme
s'il disoit les autres se peuuent gue
rir par autres manieres * & eejstuy-cy •
par oraison 6c ieusae settleraera:. Le
Vtucha- 8.remedeestl'Eueharistie^Le$eaeBi*
rifiit. plC9 en sont en sainâ: Cypr ian,-Ser m.
quinziesme. S. Augu. au 2 z. de Ja
Cité de Dieu, chap.; 8í Profper , au
milieu du temps, chap. 6. Et l'exem-
ple de Laon en ce nostre temps est
tres-celebreauísi y auquel aucun ho
me de bien ne peut mescrotre. Le^M
V.auls- est auecques 1 eau benite. L'exem-
iw. pk en est en EpipKanius heresie 30.
Ou tl est dit qu'yn certain Ioscph
chassa deux fois le diable, ayant ex-
,.. (-1 píimç^ínl'eauleugoeàeJa^cfoisoEt
- en Theodopet lit». ^ dcJ'hiÀoireJEe^
clesiafr. ch. 21. Apameon ayant im-.
prime le figne de la croix dans l'eau,
- ' & arrouíànt de cestc eau St bimster
vn temple d'Idole? que! les diables
ompesschaient de brúfleri Eblesnic
Diacre en la vie de Gregoire legrád
escrit que par ce- moyen vn Mo»
I tfY V. MAL DONA T. Ï^Z'
msteré fut delniré des diables. Gre/
goire le Prestre en ìa vie de Thcoio*
re dit que par ce raoyeii il ddiigri* .t\tng
vnc maison des démons qui en estoit
fort traaailïée. Et Hugo de Chu»]».
«ni la vieíi'Hogo Abbe' de Ciúayï
recite le mefine auoir esté .fàit pat
iày.<Em%tJçaafi -tiòfkt<??b&s choses „slli
ne se font pas entre nous sisouuent
cefbpar1 iiostfe faute , .qui a auons
pás assez de foy. Attendu que nous
voyonáerirce mesme nostre temps, -
auxíiidoií í oa ìttfôf eik .plus- graní - .i:wî
tJé ) les -demons estre expellez auec
l'cau sacree : comme il appert par le
I2.1iu. desaffaires du Iappon , Epiír.
premiere. Le i0. la seule presence de
quelque fainct personnage. Gomme Trefinct
Cafsiá recite de'Kusttcus , en la Col- *• si
látion i4-chap. -2. Et Beda , de Gui-
debert,enla vie d'iceluy.cháp. i5. Et
Sozomene au liure 6". chap. 20. reci-
te que les diables s'enfuyrent dVne
Iíìe d'Egypte par l'árriue'e des Re
ligieux de Macharius. Et Socrates
au quatriesme liure, chapitre i 9. Et
Nicephóre auliu. iï. chap. z. Palla-
TRAIC DES-DEMI Ì>V .P. M^LD.-
éias escWt'quebquc. chose de. sem.
blable, ú «mà'ncáe. M 3 cari u&,' chap.
Parole. ï^^^il !Leao; est izcfèaLq; pát»ie
par laquelle les. .diables font chassez:
eorrirneilfutfiit par Eaphnutius^se-
lon Ruffin,au i. de rhist©ireEccle-
iiast. ch. 4. Le i2. par lettres : ce ijue
lunes. certaindisçipleid'EBgeniuseícrit. eri
fr vie^âiioireste' fartipar-fon máistre^
Le 13. est par cotrps. Pálbidius recite
en Phistoitede Paul le Simple. Et
c,ups Gregoire Prestte-énlaf vie deTheod.
faurtef- Etdece rernede |ieiiue*i^ *ser les iu-
ftehue, ges lors qu'il y a soupçon que cjueí-.
. cm^fesejgnéiestredcmontaquei '.
31iq3 , rrc: -ri t-f>. ' : s;
th -yjtii^ìicl^U.zt , 1 .cr s.í .?-.;'' '1
m1\,. i -u'slnTí.;") .^gFtinoliîq fini^ì íííj.'îim.
' -IpO cl na ^uSíïoH^foy. Yul rs>
,itfO ab 1H .t-.cfsri:...;. I r:c' " '
3.1 .jx .q.:rlv(' i^ílj ~Ì7fiI.iO. .
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