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Texte :

En dehors des Européens arrêtés et souvent affreusement torturés par les troupes
françaises pour complicité avec l'ennemi, il existe évidemment en Algérie un grand nombre
de Français engagés dans la lutte de libération.

« Je me nomme Bresson Yvon. Le 06 mai 1953 je prends possession de mon poste


d'officier de police. Je suis âgé alors de vingt quatre ans.

Le premier novembre 1954 la révolution commence.

Très rapidement, je prends conscience de mon appartenance au camp de ceux qui se


battent pour une nation algérienne. Les tortures innombrables que j'aurais, dans l'exercice
de mes fonctions, l'occasion de voir, renforceront la haine du colonialisme : Algériens
écartelés par deux camions militaires allant au sens contraire, torture classique par eau,
électricité, pendaison...

Un jour d'ailleurs ma femme qui, toute la nuit comme depuis plusieurs semaines, avait été
tenues éveillée par les cris des torturés (nous habitions au-dessus d'une des salles de
torture de Saint-Arnaud) n'y tenant plus, alla protester violemment auprès des militaires
dans et des CRS responsables de ces pratiques. Elle se fit raccompagner à la maison deux
mitraillettes dans les reins. C'est pendant cette période que je suis contacté par un membre
de la cellule locale du FLN. C'est à lui que je vais fournir les différents renseignements
susceptibles d'aider la guerre nationale de libération.

Je fais ainsi savoir l'heure et le lieu des rafles, les Algériens pistés, les cafés suspectés
(.../...). Il m'arrive de signaler les agents de renseignements algériens utilisés par la police
colonialiste.

Peu de temps après je suis arrêté. Auparavant je parviens encore à communiquer au


responsable un état de l'armement de certains postes, et les réserves de munition. Le 18
novembre 1956 je suis arrêté sur ordre du général Dufour et déféré au tribunal militaire...

C'est en tant qu'Algérien que j'ai fait toutes ces choses. Je n'ai pas l'impression d'avoir
trahi la France. Je suis algérien et comme tout Algérien j'ai combattu et je continue à
combattre le colonialisme... »

Frantz Fanon, L'an 05 de la révolution algérienne, éditions Talantikit 2015

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