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Royaume du Maroc BULLETIN MENSUEL D'INFORMATION ET DE LIAISON DU PNTTA

TRANSFERT DE TECHNOLOGIE
Ministère de l’Agriculture, du Développement Rural et des Pêches Maritimes
EN AGRICULTURE
MADRPM/DERD ● Décembre 2006 ● PNTTA

Comment les producteurs de SOMMAIRE

tomate ont défié le TYLC


Etat des lieux et perspectives d’amélioration
n° 147
Horticulture

La fiche d'enquête fut établie sous forme d'un ● Mesures préventives en pépinière............... p.1
Introduction questionnaire et de tableaux en rapport avec ● Méthodes de lutte en serre de production... p.2
La maladie des feuilles jaunes en cuillère de la tous les éléments d'information sur les mesures
tomate "Tomato Yellow Leaf Curl Virus" (TYLCV) ● Mesures prophylactiques..............................p.2
entreprises par les producteurs contre le TYLCV
introduite au Maroc, était à l'origine d'impor- et son vecteur: Superficie, cultures, part de la ● Moyens chimiques.........................................p.3
tantes pertes enregistrées depuis 1998 dans la tomate, équipements (Type de serres, et de
région du Souss Massa. La maladie est transmi- filets, faîtières, portes SAS, date de semis, type
se selon le mode persistant par Bemisia tabaci; Rosaflor. Les autres types de serres comme la
de pépinière (Locale, agréée…), plantation Socodam et la Multichapelle ne sont que rare-
un insecte Homoptère de la famille des (date, densité, variété..); destination de la pro-
Aleurodidae, appelé communément "mouche ment utilisées pour des pépinières locales. Dans
duction; données sur le TYLCV (date d'appari- certains cas, les plants peuvent être produits
blanche". L'apparition soudaine de cette épidé- tion, taux d'infestation et d'arrachage…; pié-
mie peut être attribuée à l'introduction du bio- entièrement à l'air libre ou dans de petites
geages; paillage, calendrier de tous les traite- structures en plastique qui servent de "pépini-
type Q de cette mouche capable de se reprodui- ments et opinion de l'agriculteur sur les mesu-
re sur plusieurs hôtes, d'acquérir et transmettre ère".
res retenues (prophylactique, chimique, biolo-
rapidement le virus et de présenter une résis- gique, impact économique..). Les semis sont faits à différentes dates: le semis
tance aux insecticides appliqués. Le vecteur a extra précoce (avant le 15 juillet); le précoce
suscité donc un intérêt économique particulier; (du 16 au 30 juillet); le semis précoce (du 1er
il a rendu au départ les producteurs inquiets et
Mesures préventives en au 15 Août); le tardif (du 16 au 31 Août) et l'ex-
perplexes dans le choix d'un insecticide de qua- pépinière tra-tardif (après le 1er Septembre). Dans la
lité aussi parfaite que possible pour lutter cont- région, une grande part de la superficie de
re sa pullulation, raison pour laquelle certains Le premier souci qui inquiète les producteurs tomate est semée précocement: 73% à Massa
d'entre eux traitaient systématiquement plu- est le démarrage de la culture de tomate avec et 92% à Ouled-taima. Les agriculteurs primeu-
sieurs fois par semaine avec une ou plusieurs des plants sains: ristes sont contraints, d'une part, par la pério-
spécialités selon un calendrier pré-établi. Le ● Certains préfèrent monter leurs propres pépi- de et le quota de la production à exporter entre
producteur devait donc choisir entre une pro- nières. C'est le cas de la majorité des grands novembre et fin mars, et d'autre part, par l'im-
duction soumise aux menaces du TYLCV et celle serristes à Massa et en partie à Biougra, qui portance du marché local qui absorbe une
d'une autre excessivement traitée. Dans les comptent sur leurs propres moyens et leur bonne part de cette production à des prix inté-
deux cas il était en face de deux choix, le technicité (équipement disponible et traite- ressants au mois du Ramadan qui coïncide cette
meilleur d'entre eux est pire. ments) pour contrôler régulièrement les plants décennie avec l'automne et l'hiver. A Biougra,
Conscients de ces excès d'interventions et de et les protéger. En cas de besoin, ils font appel 40% de la superficie est semée tardivement; les
leur conséquence néfaste sur le consommateur à d'autres pépinières agréées. 54% des plants producteurs touchés précocement par le TYLCV
et l'environnement, les producteurs de la région proviennent de ces pépinières locales. A Ouled ont tendance à retarder leurs semis pour éviter
ont déployé tous leurs efforts et ont imaginé Taïma, tous les agriculteurs enquêtés produi- les risques de perte.
tous les scénarios possibles pour faire face à ce sent leurs plants de tomate de plein champ. Pour protéger leurs pépinières, plusieurs agri-
problème. ● d'autres s'approvisionnent auprès de pépiniè- culteurs utilisent des combinaisons de filets
Le présent bulletin relate les résultats d'une res agréées qui leur garantissent un matériel pour assurer une meilleure protection des
série d'enquêtes menées auprès des producteurs végétal indemne de maladies dont le TYLCV. plants, surtout lorsqu'un seul type de filet ne
sur toutes les mesures de lutte conçues dans la 44% des plants sont fournis par trois pépiniè- constitue pas toujours une barrière contre B.
région du Souss Massa en vue de retenir une res agréées: La Grow Group (21%), la Rosaflor
situation de référence "optimale" qui permet- (14 %) et la Maraissa ( 9%). Les deux dernières
trait d'épargner la production de tomate en pré- sociétés satisfont tout d'abord leurs besoins en
sence du TYLCV. qualité de groupes de production et d'exporta-
tion, ensuite elles répondent aux besoins de
L'enquête était réalisée sur la base d'un certains de leurs clients;
échantillonnage qui a concerné des domaines
agricoles et exploitations représentatifs de la ● Un troisième groupe de producteurs utilise les

région. Le principal outil est constitué par les deux types de pépinières, il considère qu'il peut
listes d'agriculteurs, établies par l'Association avoir plus de chance et de sécurité pour produi-
des Producteurs Exportateurs des Fruits et re des plants vigoureux.
Légumes (APEFEL) et par l'ORMVASM. La majorité des pépinières locales sont proté-
L'enquête a porté sur une centaine d'inter- gées dans la région de Souss Massa par des ser-
views (Agriculteurs, gérants ou techni- res canariennes en bois (Photo ci-contre); le
ciens…) contactés sur place en compagnie coût de production y est inférieur à celui des
d'un membre de l'APEFEL et/ou d'un ingénieur serres métalliques. Dans les pépinières agréées,
agronome appartenant à l'une des deux sub- c'est surtout la Delta 9 qui est la plus utilisée
divisions de l'ORMVASM. par les sociétés Grow Group, Maraissa et
Programme National de Transfert de Technologie en Agriculture (PNTTA), DERD, B.P: 6598, Rabat, www.agriculture.ma
Bulletin réalisé à l'Institut Agronomique et Vétérinaire Hassan II, B.P:6446, Rabat, Tél-Fax: (037) 77-80-63, DL: 61/99, ISSN: 1114-0852
tabaci, de taille plus petite. Les combinaisons des serres de plus de 2 ha regroupent les cana-
rencontrées sont: le (6x9 + 10x14), le (10x14 + riennes en bois et en métal, les multichapelles et
10x16), le 10x14 doublé, le (10x14 + P17), le les Tombarello (Photo 3).
(10x16 + P17). Certains d'entre eux confection- Quant à la taille, il apparaît que la serre cana-
nent des portes SAS de 2 à 6 entrées pour évi- rienne de 4 mètres de hauteur est la plus utili-
ter le déplacement anarchique des ouvriers et sée. Les autres grandes serres, de 6 mètres,
du matériel végétal infesté. Il faut toutefois regroupent en plus de la serre canarienne en
noter qu'il existe encore des pépinières qui sont bois, la serre métallique, la Tombarello et la
installées à l'air libre par manque de technicité, multichapelle. Celles de 3 mètres, par contre,
de vulgarisation ou de moyens. concernent toujours la serre canarienne en plus Photo 1: Pépinière de tomate
En plus de ces mesures, le paillage suscite lui de la Delta 9, et rarement la Socodam.
aussi l'intérêt des producteurs: 40% d'entre eux
utilisent un paillage blanc, alors que 23% préfè- Mesures prophylactiques
rent le paillage noir. Quelle que soit sa couleur, Etat sanitaire et propreté de la serre
les agriculteurs réutilisent généralement dans la
pépinière le paillage qui a déjà servi dans la serre Le paillage de la serre
de production pour se débarrasser des mauvaises Dans 89% des serres prospectées, les produc-
herbes, hôtes privilégiés de B.tabaci. Par ailleurs, teurs utilisent un paillage en plastique noir; pour
il faut noter que 11% des producteurs utilisent éviter le développement des mauvaises herbes
des tablettes surélevées pour que les plants res- Photo 2: Serre avec ouverture vers le haut
(Photo 4). Le paillage blanc ou jaune est rare.
tent à une hauteur de 40 à 50 cm du sol.
Les bandes et les plaques jaunes
Pour mieux contrôler le vecteur du TYLCV, les
agriculteurs ne se contentent pas uniquement de Parmi les mesures entreprises pour intervenir
l'équipement serre et de la prophylaxie, mais ils contre les aleurodes, les plaques jaunes engluées
traitent régulièrement avec des produits variés: restent un moyen utile de prévision et de lutte
contre les aleurodes. Généralement, il est
● Avant semis, ils désinfectent la serre pépiniè- conseillé d'utiliser au moins 8 plaques par hecta-
re avec des produits dont les plus utilisés sont re; or le prix d'un paquet de 10 plaques coûte
les insecticides (62,8%) suivis par les fongici- plus de 150 Dh, soit 120 Dh à l'hectare. La plu-
des, les acaricides et les nématicides (21,6%) et part des agriculteurs jugent trop cher le recours Photo 3: Serre multichapelles
enfin le formol et l'eau de javel (15,6%). à ces pièges; ils les remplacent par des bandes
● Après semis, ils traitent avec des pesticides jaunes en plastique imbibées d'huile ou de grais-
jugés efficaces: 65,5% sont des insecticides et se (Photo 5) qu'ils répartissent dans la serre (100
16% sont des fongicides. Parmi les insecticides, m² de bande à l'hectare) et qu'ils changent après
les matières actives les plus utilisées en pépiniè- saturation. Il est à signaler que ces bandes sont
re sont: l'Imidaclopride (13,7%), l'Endosulfan utilisées comme pièges de masse dans 94% des
(11,7%), le Méthomyl (5,2%), le Méthamidophos serres, alors que les plaques jaunes ne sont ren-
(8,1%), l'Acetamipride (5,4%) et l'Abamectin contrées que dans 65% des abris visités, surtout
(2,9%). Les trois premiers sont recommandés lors des premières semaines de plantation.
contre les aleurodes alors que les autres ne le Le chaulage Photo 4: Paillage de la serre
sont pas nécessairement, comme l'Abamectin
(antimineuses) ou encore la Déltamethrine et le Le chaulage du plastique est appliqué surtout
Dichlorvos conseillés essentiellement contre les pendant les mois les plus chauds de l'année sur
chenilles et les pucerons. le côté Est de la serre de production. Il permet
selon certains agriculteurs, de diminuer la tem-
Méthodes de lutte en serre pérature et d'éviter le stress de la tomate, tout
en contribuant à la réduction de l'activité de la
de production mouche blanche et des chances de transmission
Depuis l'introduction des serres au Maroc, les du TYLCV. D'autres considèrent que le plastique
producteurs ont eu recours à différents systèmes peut facilement s'abîmer lors du chaulage sous
Photo 5: Bande jaunes imbibée de graisse
d'abris; leur choix reposait sur des critères l'effet de la haute température. En tout cas,
comme la superficie réservée à la culture, les 60% des producteurs enquêtés ne chaulent pas. filets. En effet, dans certains domaines, des ser-
dimensions de la serre, la nature et l'étanchéité Le précédent cultural et le vide sanitaire res de production protégées par des combinai-
du plastique, les mailles du filet, le type du sons de filets qui traduisent à la fois l'esprit d'in-
Dans la région, ce sont surtout la tomate elle quiétude et de rigueur avec lequel les produc-
montage, le système d'aération…. Parmi ces cri- même, le melon, la pastèque et le poivron qui
tères, c'est surtout le degré d'ouverture de la teurs affrontent le problème du TYLCV. Certains
constituent les principaux précédents culturaux ont équipé leurs serres avec la combinaison
serre qui prime; il est défini comme étant le rap- rencontrés. Or, toutes ces cultures constituent
port de la superficie ouverte à celle couverte. En (10x14 + 10x20); d'autres ont préféré le (10x14
des hôtes privilégiés par B.tabaci, raison pour + P17) lorsqu'ils se sont rendus compte de l'in-
effet, certaines serres s'ouvrent sur toute la hau- laquelle les producteurs maintiennent une
teur alors que d'autres ne s'ouvrent qu'en partie filtration de la mouche blanche à travers le
période de vide sanitaire (2 semaines à 2 mois) (10x14). Or, il s'est avéré que pendant l'hiver et
par un dégagement du plastique vers le haut, où des mesures préventives sont prises pour évi-
vers le bas ou vers les côtés latéraux (Photo 2). avec le froid, le P17 peut entraîner l'augmenta-
ter l'introduction du TYLCV (arrachage, désher- tion de l'humidité dans la serre par manque d'aé-
Dans d'autres cas, les serres sont munies uni- bage, traitement insecticide, plants agréés, bon
quement de filets sur toute la hauteur, là où le ration, d'où le risque de développement de
choix du filet, amélioration du système d'aéra- Botrytis cinerea, l'agent causal de la pourriture
vent n'aurait pas d'effet significatif. Par ailleurs, tion, confection des portes SAS…).
il faut signaler que la majorité des serres sont grise de la tomate (sur fruits, feuilles et tiges).
équipées de faîtières et souvent orientées en Les types de filets latéraux et faîtiers En effet, nous avons enregistré - à cause du
Nord-Sud pour bénéficier de plus de lumière Botrytis- des taux d'arrachage (10 % à Biougra
Depuis l'apparition du TYLCV, le type de filet a et 15% à Massa) parfois supérieurs à ceux pro-
dans les deux côtés des rangées de la tomate. engendré chez les agriculteurs une polémique
Dans la région du Souss, les serres canariennes en voqués par le TYLCV.
d'opinions pour protéger la pépinière et la serre
bois occupent 75% de la superficie de tomate, de production. En effet, différents modèles de A l'issue de cette expérience vécue depuis 2001,
tandis que les autres types ne couvrent que 12% filets ont été commercialisés: le (6x9 càd 6 les producteurs choisissent les filets (10x20) et
pour les canariennes métalliques, 4,7% pour les mailles fois 9 par cm²), le (10x14), le (10x16), (10x22) pour aérer leurs serres et empêcher les
multichapelles, 3,8% pour les Tombarello, 4,4% le (10x20), le P17 (filet tissu à très petites aleurodes d'y pénétrer. Cette aération ne peut
pour les Delta 9 et 0,5% pour les Socodam. A ce mailles). Il ressort de notre enquête que 99% être assurée que par la bonne gestion du plas-
propos, il faut noter que 42,5% des serres com- des serres étaient équipées par le filet "Insect- tique et par l'ajout de bandes de filets au niveau
prises entre 0,5 et 1 ha sont des canariennes; cel- Proof" latéral: 40% avec le (10x14), 10% avec des faîtières et sur les côtés latéraux de la serre
les de moins de 0,5 ha peuvent être des canarien- le (6x9), 8% avec le (10x16), 5% avec le (Photos 6 à 7). C'est dans ce sens que l'on joue
nes (8%) ou des Delta 9 (4%), alors que les gran- (10x20) et le reste avec des combinaisons de souvent sur la hauteur des filets latéraux pour
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répondre aux besoins de la culture en aération. Ce dernier type est souvent déconseillé car la
A titre d'exemple dans les tunnels Delta 9, cer- conception de montage de la serre avec de lar-
tains agriculteurs utilisent latéralement des ges bandes de filets s'étendant depuis les faîtiè-
bandes de filets d'un mètre de largeur, d'autres res sur les côtés jusqu'au sol, créent pour l'aleu-
regroupent plusieurs tunnels et ajoutent des rode plus d'espace qui lui permet de se propager
bandes communicantes de filets entre deux ser- sans difficultés.
res (Delta 9), de manière à pouvoir fermer Ce sont surtout les variétés Gabriela, Daniela, et
chaque tunnel quand il fait froid et l'ouvrir Durinta conduites en deux brins, qui sont les
quand il fait chaud (Photos 8 et 9). plus exposées à l'arrachage dont le taux varie de Photo 6: Filet faîtier au plafond d'une serre canarienne
Quant aux autres types de serres (canariennes, 11 à 18% dans les serres et 30 à 100% en plein
multichapelle...) les hauteurs des filets latéraux champ dans la région d'Ouled-taima. Les produc-
sont variables, mais dans certains cas, ils sont teurs de cet axe optent souvent pour des varié-
utilisés sur toute la hauteur de la serre, alors tés tolérantes qui ne semblent pas exiger trop
que dans d'autres ils ne couvrent q'une largeur de charges phytosanitaires; elles sont moins
qui ne dépasse guère deux mètres. rentables et vendues à des prix faibles, mais, qui
leur couvrent au moins les charges d'entretien et
Les portes SAS et ouvertures de protection de production.
A côté des précautions prises sur les côtés laté- Sur le plan phytosanitaire, les traitements chi-
raux et sur les faîtières de la serre, les agricul- miques ne réduisent pas forcément les taux d'ar- Photo 7: Fenêtres en filets, sur une serre canarienne
teurs procèdent au montage des SAS pour met- rachage à cause parfois des maladresses enre-
tre en quarantaine leur production par crainte gistrées dans l'usage des pesticides. Cependant,
d'infiltration des aleurodes. Il s'agit d'un systè- l'emploi régulier des pièges jaunes englués a
me de portes confectionnées en filet et/ou en bien démontré son efficacité; les utilisateurs de
plastique dans la partie Est à moindre mouve- ces pièges comme moyen de lutte n'arrachent
ment du vent. Certains producteurs se limitent pas plus de 2,4%, alors que ceux qui se satis-
à un seul SAS, d'autres préfèrent deux SAS qu'ils font des bandes et des plaques jaunes non
placent dans les parties Est et West de manière renouvelées, arrachent jusqu'à 14%.
à avoir la possibilité de passer de l'un vers l'au-
tre. Ces SAS peuvent avoir entre 2 à 5 entrées Variétés tolérantes Photo 8: Vue de face d'une serre Delta 9
qui revêtissent différentes formes (Photo 10): Plusieurs variétés de tomate sont disponibles
normales, serrées, en labyrinthes, grandes, peti- (rondes, en grappe, cocktail et cerise) dans la
tes…). Dans la région du Souss, 45% des serres région; elles permettent à l'agriculteur un choix
sont munies de SAS à deux entrées. En plus de assez large pour exporter une tomate de qualité
ces SAS, certains producteurs confectionnent qui répond aux exigences des marchés destina-
sur leurs serres, des ouvertures latérales, qui taires. Les variétés les mieux appréciées furent la
permettent aux ouvriers d'y entrer pour tra- Gabriela (47%) et la Daniela (33%); elles assu-
vailler (désherbage, effeuillage etc.) et déplacer rent un tonnage et un calibre meilleurs, mais
les plateaux et les caisses sans être obligés d'y elles sont malheureusement très sensibles au
sortir. Cette disposition aussi modeste qu'elle TYLCV. Pour cela, plusieurs producteurs optent Photo 9: Côtés latéraux ouverts d'une serre Delta 9
soit, garantit un bon état sanitaire de la toma- parfois pour le choix de nouvelles variétés tolé-
te. D'autres sont allés un peu plus loin en fabri- rantes comme moyen de lutte à tenter contre le
quant des filets entre couloirs pour séparer les TYLCV. Durant la période de notre enquête, 6%
différentes serres en vue de limiter la circulation de la superficie de tomate était plantée par la
de tout vecteur de maladies. variété Tillila, suivie par la Cornelia. Les autres
Les arrachages variétés, notamment Anastasia, Avigail, Bushra
et Thomas étaient d'une importance secondaire.
Le TYLCV peut apparaître dans les pépinières En général, il semble que les variétés tolérantes
depuis juillet sur la tomate précoce, mais son ne satisfont pas tous les producteurs: En plein
intensité ne commence à devenir importante champ, certains se seraient réjouis de leur pro- Photo 10: Porte SAS Delta 9 à 2 entrées
qu'en septembre-octobre. A partir de cette pério- duction destinée principalement au marché
de, les producteurs suivent de près l'évolution de local; elle leur permet au moins de se rattraper rodes commence à diminuer pour ne représenter
la maladie et procèdent -en plus des mesures au lieu de perdre toute la culture. D'autres, dans que 4% des interventions effectuées en décem-
évoquées précédemment- à l'effeuillage, au dés- leur majorité des serristes, ne sont pas encore bre (en moyenne 1 traitement par semaine). A
herbage et à l'arrachage des plants infestés. C'est convaincus de cette tolérance, ni de la fermeté, cette période automnale, il est probable que le
une technique courante et connue dans toutes ni du tonnage qui ne répondent pas à leurs climat réduise les populations du vecteur en
les d'exploitations de la région, qu'elles soient de attentes. C'est pourquoi, des essais continuent faveur de quelques maladies cryptogamiques
petite ou de grande taille. A Massa, plus de d'être entrepris par différents organismes distri- comme le Botrytis, le mildiou et l'oïdium, contre
17,5% de plants sont arrachés; les producteurs buteurs de semences, pour sélectionner de nou- lesquels les traitements fongicides sont accen-
exportateurs de tomate y sont très prudents et velles variétés tolérantes répondant aux normes tués. Juste après la levée du froid, les aleurodes
vigilants vis à vis des risques encourus par la suivantes: un bon calibre, une fermeté accepta- reprennent leur activité et commencent à cons-
maladie. A Biougra et à Ouled-taima le taux d'ar- ble, une homogénéité des fruits, un nombre de tituer un danger contre lequel le producteur reste
rachage ne dépasse guère 10%. fruits suffisants par bouquet, plants vigoureux et mobilisé jusqu'à la fin du cycle de la culture.
Toutefois, le rythme et l'intensité des arrachages une résistance aux maladies. Sur la totalité des pesticides utilisés dans la
peuvent dépendre de facteurs liés à la structure région, les insecticides représentent 54,7% sui-
de la serre et des techniques culturales. A titre
Moyens chimiques vis par les fongicides (38,8%), alors que les aca-
d'exemple, dans les serres Delta 9, Socodam, Les principaux problèmes phytosanitaires cont- ricides, les nématicides et les herbicides ne
Tombarello et Multichapelle, les arrachages sont re lesquels les agriculteurs traitent sont par représentent que 6,5%. Le tableau 1 présente la
assez faibles (2 à 4%); le contrôle y est plus ordre décroissant: les aleurodes, le mildiou, le liste des principales matières actives insectici-
facile grâce à leur petite taille et à leur bonne Botrytis, l'Oïdium et les acariens. En qualité de des, classées par ordre décroissant selon l'impor-
étanchéité. C'est surtout dans les serres cana- vecteur du TYLCV, B.tabaci constitue la premiè- tance de leur utilisation dans la région (TU). Il
riennes en bois où l'on arrache le plus de plants re cible contre laquelle 12 à 13% des traite- en ressort que le méthomyl (Salvador et
(12% à 18%) à l'hectare; ce type de serre pré- ments sont destinés entre juillet et novembre à Lannate) et l'endosulfan furent en 2001 les plus
sente souvent des déchirures aux points de raison de 2 traitements par semaine. Cette utilisés, suivis par la déltamethrine (Décis) et le
sutures du plastique avec le bois qui sert d'ar- période coïncide dans la majorité des exploita- thiamethoxam (Actara). Ces produits sont relati-
mature. Quant aux serres métalliques, deux cas tions avec la transplantation et le développe- vement moins chers et assez efficaces contre les
se présentent: celles conçues pour la tomate, ne ment des jeunes feuilles si sensibles aux aleurodes, s'ils sont bien appliqués.
présentent pas des taux d'arrachage significatifs attaques des mouches blanches.
En effet, la majorité des producteurs de la toma-
et celles destinées à la banane, dans lesquelles A partir des premières récoltes du mois d'octob- te d'export prennent toutes les précautions
plus de 60% des plants peuvent être arrachés. re, la fréquence des traitements contre les aleu- nécessaires pour traiter selon les normes recom-
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mandées par le fabricant et le pays destinataire. methrine et le thiamethoxam entre 1 et 5 fois Tableau 1:Importance des matières actives utilisées sur tomate
Ils respectent les doses indiquées sur les embal- leurs doses respectives.
Matière active TU Matière active TU Matière active TU
lages, bien que certains aient souvent tendance ● Parmi les autres difficultés rencontrées en
(%) (%) (%)

à sous doser, surtout les spécialités à base d'en- lutte chimique, les mélanges suscitent une Méthomyl 18,7 Pymetrozine 3,1 Abamectin 0,8
dosulfan et de méthomyl par crainte des problè- attention particulière des producteurs; ils cher- Endosulfan 16,9 Pyriproxyfène 2,8 Dichlorvos 0,4
mes qui peuvent résulter des surdosages. De chent toujours à avoir une compatibilité adé- Deltamethrine 9,6 Etophhenprox 2,5 Cinnamaldehyde 0,2
même, ils choisissent les spécialités autorisées quate entre les pesticides utilisés (agronomique,
contre les aleurodes, qui leur permettent d'alter- Thiametoxam 7,4 Novaluron 2,5 Azadirachtine 0,1
biologique, physique). Pour cela, ils font eux
ner leurs interventions avec des matières actives mêmes des tests préalables de mélanges de Acetamipride 5,3 Bifenthrine 2,2 Cyromazine 0,1
appartenant à différents groupes chimiques. A petites quantités des spécialités pour vérifier Cyperméthrine 4,9 Pyridabène 1,9 Dimethoate+Malathion 0,1
titre d'exemple le méthomyl (Carbamate), l'endo- quelques paramètres comme l'effet phyto- Imidaclopride 4,6 Pyrimiphos methyl 1,2 Phentoate 0,1
sulfan (Organochloré) et l'imidaclopride toxique sur la tomate; le volume de la bouillie à
(Chloronicotinyles) sont souvent utilisés en alter- Savon 4,1 Diméthoate 1,2 Bacillus thuringensis 0,1
utiliser par hectare; le matériel de traitement,
nance par les producteurs. Ce dernier produit notamment les filtres et les buses des pulvérisa- Metamidophos 4,1 Oxalate d'hydrogène 1,1 Clorpyriphos ethyl 0,1
n'est utilisé que durant la période qui précède la teurs; la finesse et la répartition des gouttelet- Lambda cyalothrine 3,1 Méthidathion 0,8 Parathion méthyl 0,1
première récolte d'octobre pour éviter tout tes pulvérisées; l'état des particules (aggloméra-
risque de son accumulation dans le fruit. Dans ce tion ou non), la viscosité du mélange (forma- (Solanum nigrum, Malva palviflora…) sont com-
sens, toute production destinée à l'export subit tion de gel ou de grumeaux)…Généralement, munes dans les serres de tomate et dans leurs
une analyse préalable effectuée par l'EACCE les mélanges sont constitués de deux produits, abords. Le paillage plastique blanc généralisé
(Etablissement Autonome de Coordination et de le plus souvent un insecticide et un fongicide, peut être utilisé pour les empêcher de se déve-
Contrôle des Exportations) qui vérifie sa confor- mais parfois ils comptent entre 3 et 5 produits. lopper à l'intérieur, mais il faut prendre en consi-
mité aux normes exigées par le destinataire et dération sa capacité d'emmagasiner la chaleur
éviter le risque de refoulement. Donc, une atten- ● Contre les aleurodes, certains producteurs ne
qui peut induire une mauvaise nouaison. Pour
tion particulière est donnée généralement aux mélangeaient que deux insecticides; les plus cela, les trous de plantation doivent être aussi
matières actives à faible LMR (Limite maximale courants sont l'endosulfan (OrganoChloré) et le grands que possible (6 plantes pour chaque
résiduelle) comme le méthidathion et l'abamec- méthomyl (Carbamate) dont les modes d'action trou); L'utilisation du plastique peut se faire
tin à LMR de 0,02 mg/kg, la cyperméthrine, le sont différents. L'effet synergique des deux pro- même à l'extérieur de la serre (1mètre), elle per-
pyrimiphos méthyl et l'endosulfan à LMR de 0,05 duits mélangés permettrait une action conju- met d'éviter le passage répété des ouvriers pour
mg/kg. Contre les insectes pollinisateurs, aucun guée se traduisant par une efficacité meilleure désherber les abords;
effet de toxicité n'a été rencontré pendant notre que celle qui résulterait de l'addition de leurs
efficacités individuelles. En tout cas, tous les ● installer 5 à 8 pièges jaunes englués par hec-
enquête sur les bourdons. tare et à 20 cm en dessous de l'apex, pour sui-
mélanges utilisés regroupent les deux modes
Au départ, un seul insecticide, le méthomyl était d'action, systémique et de contact. vre la capture des adultes chaque jour au début
autorisé contre les aleurodes en maraîchage, mais de la culture et chaque semaine à sa fin. Ces
depuis l'apparition du TYLCV, les producteurs se Recommandations pièges peuvent servir aussi pour le piégeage de
sont trouvés démunis de moyens chimiques pour masse et peuvent être installés sous forme de
compléter et raisonner leur stratégie de lutte. Bien que le niveau technique soit amélioré dans
la majorité des exploitations enquêtées, certai- bandes en plastique jaune englué à l'intérieur et
Pour cela, ils ont demandé au ministère de tutel- à l'extérieur de la serre;
le, d'étendre l'homologation à d'autres matières nes recommandations s'imposent encore pour
surmonter quelques difficultés: ● suivre régulièrement les populations d’aleuro-
actives ayant démontré leur efficacité contre les
aleurodes à travers le monde, notamment dans Au niveau de la pépinière: des sur tomate en insistant sur les lignes de bor-
les pays de l'Union Européenne. Actuellement, dure et sur les feuilles basales, c'est là où on
● insister davantage sur le bon état sanitaire des peut facilement trouver des pupes et des larves
une dizaine de produits sont homologués sur plants, surtout lorsqu'on se trouve obligé d'arra-
tomate: l'Azadirachtine, Buprofézine Cinammalde- visibles à l'aide d'une loupe à la face inférieure
cher certains, juste 20 jours après plantation; des feuilles. L'observation des œufs reste diffici-
hyde, Dyoctilsulfo-succinate de Sodium, Imidac-
lopride, Novaluron, Paecilomyces fumoroseus (pro- ● éviter d'installer la pépinière dans un endroit le, mais la présence d'adultes sur les feuilles du
duit biologique), Pymétrozine, Pyridabène, proche des vents et des milieux où se trouvent tiers supérieur laisse supposer que les femelles
Thiaclopride et Thiamethoxam. A la lumière de des plantes hôtes de la mouche blanche; ont déjà commencé la ponte. Dans ce sens, une
cette décision, la plupart des agriculteurs enquê- ● installer des pièges jaunes à l'intérieur et à inspection à grande échelle s'impose pour
tés traitent avec au moins deux produits, en plus l'extérieur de la serre; détecter les régions à pullulations élevées de
du Méthomyl et/ou de l'endosulfan. Par exemple, ● utiliser préventivement les insecticides homo-
B.tabaci et intervenir à temps avec le produit
le thiamethoxam est utilisé par 63% d'entre eux, logués, aux doses recommandées tout en convenable contre le stade prédominant. Ceci
l'Imidacloprid par 58%, la Pymétrozine par 36%, respectant l'alternance et la compatibilité entre sera la base du choix du larvicide à utiliser.
la Pyridabène par 31%, le Novaluron par 29% et produits mélangés; ● traiter avec des produits homologués. A titre
la Cinnamaldehyde par 5%. ● opter pour des filets de type 10x 20 et 10x22.
d'exemple l'endosulfan (organo-chloré) couram-
Au cours de leur itinéraire technique, les agri- ment employé par la majorité des producteurs
Au niveau de la serre de production: n'est pas encore homologué contre les aleurodes;
culteurs rencontrent souvent des problèmes qui
se traduisent par des maladresses de la gestion ● installer des brise-vents pour réduire les arri-
● respecter les délais de traitements pour proté-
phytosanitaire: vages de la mouche blanche, surtout au niveau ger le consommateur;
de la partie Est et du côté des fermes voisines;
● Certains produits sont utilisés contre les aleuro- ● alterner les matières actives pour éviter les
● s'assurer de la qualité et de l'étanchéité du
des bien qu'ils soient recommandés pour d'autres problèmes de résistance;
ravageurs: La cyromazine d'usage normal contre filet et du plastique et de la méthode de son
montage pour éviter tous les trous et ouvertu- ● éviter les surdosages et les produits toxiques
les mineuses, la déltaméthrine conseillée contre comme le métamidophos, le métidathion et
les noctuelles, la lambda-cyhalothrine, autorisée res indésirables;
contre les pucerons et le Dichlovos homologué ● installer le filet 10x20 ou 10x22 sur toute la
autres…;
uniquement sur cultures ornementales; hauteur des côtés latéraux et les faîtières La ● réduire le nombre de traitements et renforcer

● Généralement la majorité des producteurs trai-


serre doit être étanche, bien aérée et totale- le système de prévention;
tent 1 à 3 fois avec la même matière active, ment isolée (fermeture de tous les trous); ● s'orienter vers l'utilisation des produits micro-
mais quelques uns dépassent cette moyenne et ● aménager des SAS avec des entrées serrées pour biologiques et des "IGR" à effet démontré sur le
atteignent par exemple jusqu'à 30 traitements entraver la circulation de part et d'autre de la serre; blocage de la mue;
au methomyl, 26 à l'endosulfan, 10 au pyridabè- ● diminuer le nombre d'entrées et de sorties à la ● respecter les délais de l'effet toxique des pes-
ne, 9 à la cypermetrine, 8 au thiamethoxam et 7 serre de production par l'installation de structu- ticides sur les pollinisateurs et la faune antago-
au métamidophos (hautement toxique)... res d'expulsion des plantes indésirables lors du niste, notamment la punaise prédatrice
● Les cas de surdosage des spécialités sont cou- désherbage ou de l'effeuillage; Cyrtopeltis sp et l'Hyménoptère parastoide
rants dans certaines exploitations démunies de ● éviter de cultiver de la tomate en plein champ Eretmocerus sp. ■.
moyens techniques et d'encadrement. La dose et des variétés sensibles au TYLCV à côté des
utilisée peut parfois y atteindre jusqu'à 8 fois la tolérantes; Prof. BENAZOUN Abdeslam et
dose recommandée: Le novaluron est employé ● éliminer les mauvaises herbes à l'intérieur et à EL MERROUNI Sanae
entre 1 et 8 fois sa dose, le methidathion à 3 l'extérieur de la serre. Certaines d'entre elles Institut Agronomique et Vétérinaire Hassan II
fois, le pyriproxyfène entre 1 à 4 fois, la cyper- Complexe Horticole d’Agadir
Transfert de Technologie en Agriculture Page 4 N° 147/Décembre 2006

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