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Nature et conséquences des conflits de rôles

Article · January 2005


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1 author:

Serge Perrot
Paris Dauphine University
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Manuscrit auteur, publié dans "Journée de recherche CEROG / AGRH, IAE d'Aix, 2005, Aix en Provences : France (2005)"

Communication à la journée de recherche CEROG-AGRH

IAE d’Aix-En-Provence, 27 Mai 2005

« Stress, burnout et conflits de rôles »

Titre de la communication :

« Nature et conséquences des conflits de rôles »

Coordonnées de l’auteur :

Serge PERROT
halshs-00360474, version 1 - 11 Feb 2009

Centre de recherche CREPA

Université Paris Dauphine

Place du Maréchal de Lattre de Tassigny

75775 Paris Cédex 16

Courriel professionnel : serge.perrot@dauphine.fr

Courriel personnel : s.perrot@wanadoo.fr

Tél : 01 44 05 49 94

Fax : 01 44 05 40 84
Nature et conséquences des conflits de rôles

Introduction

Les conflits de rôles ont été étudiés de façon relativement intensive, en raison des
conséquences négatives qu’ils peuvent avoir tant au niveau individuel qu’organisationnel
(Fisher, Gitelson, 1983 ; Jackson, Schuler, 1985 ; Van Sell, Brief, Schuler, 1981). Au niveau
individuel, les conflits de rôles sont ainsi associés à de nombreuses variables importantes
comme la satisfaction, l’implication organisationnelle, l’engagement au travail, la motivation,
le stress, l’absentéisme, les intentions de départ, et la performance. Au niveau organisationnel,
les dysfonctionnements de rôles sont également évoqués (Loubes, 1997), tout comme leurs
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traductions en termes de performance et d’utilisation inadéquate des ressources humaines.

Malgré l’importance du thème de recherche dans la littérature, et le volume des


publications qui s’y rapporte, un paradoxe fondamental demeure : l’approche théorique et
conceptuelle des conflits de rôles repose sur une vision multi-dimensionnelle du construit,
mettant en évidence l’existence de plusieurs formes possibles de conflits de rôles, alors que
l’instrument de mesure (Rizzo, House, Lirtzman, 1970) utilisé dans plus de 85 % des
recherches (Fisher, Gitelson, 1983 ; Jackson, Schuler, 1985) souffre de nombreuses limites
fréquemment évoquées, notamment sa conception uni-dimensionnelle qui ne permet pas de
rendre compte des fondements conceptuels dont il découle.

Par conséquent, les nombreux travaux empiriques et tous les résultats accumulés
depuis plus de 30 ans reposent principalement sur une échelle très insatisfaisante (tant sur le
plan conceptuel que psychométrique). Poursuivre des recherches en utilisant l’échelle de
Rizzo, House et Lirtzman (1970) risque donc fort de ne pas apporter d’éléments de
compréhension nouveaux des phénomènes étudiés, ni même de permettre l’analyser des
résultats empiriques parfois contradictoires, au-delà des effets dominants constatés.

C’est une approche renouvelée des conflits de rôles qui nous semble donc nécessaire,
selon une vision multi-dimensionnelle du construit, et avec un instrument cohérent par rapport
au socle théorique et conceptuel dont il découle.
1 Définitions et mesures des conflits de rôles

Le concept de rôle ne renvoie pas à un consensus, mais à un foisonnement


d’approches issues notamment de la psychologie, de la sociologie, et de la psychosociologie.
Une vision fonctionnaliste et interactionniste peuvent ainsi être mises en opposition, même si
ce sont leurs points de convergence et de complémentarité qui doivent être mis à l’ordre du
jour (Alis, 1997). Rocheblave-Spenlé (1969), tout en reconnaissant les différences entre ces
approches, montre ainsi leur caractère indissociable.

Un certain nombre de caractéristiques récurrentes dans les définitions du concept de


rôle peuvent cependant être soulignées. Comme le suggère Biddle (1979), la notion de rôle
organisationnel s’articule autour de deux éléments clés, qui sont les attentes réciproques
relatives aux activités et comportements relationnels, exercés par un individu dans un
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contexte organisationnel donné. Katz et Kahn (1966) évoquent l’intérêt du concept de rôle,
qui permet de relier les niveaux individuels et organisationnels. Ils décrivent ainsi
l’organisation comme un système de rôles, chaque individu pouvant être localisé dans ce
système de rôles interdépendants.

1.1 Principales approches théoriques des conflits de rôles

Les travaux sur les conflits de rôles organisationnels reposent très largement sur les
apports de Kahn et al. (1964), puis Katz et Kahn (1966). C’est tout particulièrement le modèle
de transmission de rôle (Katz, Kahn, 1966) qui est à l’origine des définitions des conflits de
rôles. Les auteurs distinguent dans le modèle les attentes de rôles, le rôle transmis, le rôle
perçu, et le rôle joué. La transmission de rôle est alors un processus continu et permanent
d’ajustement d’un individu à son rôle organisationnel. Les auteurs suggèrent que les inter-
relations entre les attentes de rôles, le rôle transmis, le rôle reçu, et le rôle joué sont
susceptibles de créer des transmissions de rôles incohérentes appelées conflits de rôles. C’est
par exemple le cas lorsque deux personnes de l’ « ensemble de rôle »1 formulent des attentes
contradictoires envers une même personne (conflit « inter-émetteurs »). Si des attentes
contradictoires sont transmises par une même personne, on parlera alors de conflit « intra-
émetteurs ». Mais Katz et Kahn (1966) évoquent également deux autres types de conflits de
rôles possibles, comme le conflit « individu-rôle » qui peut apparaître lorsque l’individu doit

1
L’ « ensemble de rôle » est défini comme l’ensemble des personnes en intéraction avec l’individu dans
le cadre de l’exercice de son rôle.
jouer simultanément deux rôles incompatibles entre eux ou encore lorsque l’exercice d’un
rôle est contraire à ses propres attentes. Enfin, la « surcharge de rôle » est également évoquée
comme une quatrième forme possible de conflits de rôles, même si ce quatrième aspect est
contesté sur le plan conceptuel (Murphy, Gable, 1988 ; Schaubroek, Cotton, Jennings, 1989).
Au-delà de ces quatre formes possibles de conflits de rôles, Katz et Kahn (1966) précisent que
des formes de conflits de rôles sont possibles, résultant d’un mélange de ces quatre types.

L’apport et l’impact des travaux de Kahn et al. (1964) puis Katz et Kahn (1966) est
indéniable. Ils établissent notamment l’existence d’une pluralité des formes de conflis de rôles
possibles, en partant d’un cadre très lié à la théorie des attentes : ce sont les incompatibilités
entre plusieurs attentes de rôles qui créent une pression psychologique qualifiée de conflits de
rôles. De nombreux travaux empiriques se réclament de cette approche, tout comme l’échelle
de mesure de Rizzo, House et Lirtzman (1970), mais de nombreuses contradictions doivent
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cependant être soulignées.

1.2 L’échelle classique de mesure des conflits de rôles

C’est très clairement l’échelle de Rizzo, House et Lirtzman (1970) qui domine la
quasi-totalité des recherches en la matière. Jackson et Schuler (1985) et Fisher et Gitelson
(1983) font état respectivement d’un taux d’utilisation de 85% et 88%. Bien que très
largement utilisée dans la littérature de recherche, l’échelle de Rizzo, House et Lirtzman
(1970) est régulièrement et sévèrement critiquée sur le plan conceptuel et psychométrique. Il
semble que la fréquence de son utilisation passée soit la principale justification de son
utilisation actuelle.

Tracy et Johnson (1981, p. 464) remarquent ainsi que les deux facteurs mis en
évidence par Rizzo, House et Lirtzman (1970) ne traduisent pas une différence conceptuelle
entre l’ambiguïté et le conflit de rôle. Au contraire, ils correspondent simplement à une
différence de rédaction des items (stress vs confort), et sont donc un artefact qui résulte d’une
différence de forme entre les items, et non d’une réelle différence conceptuelle. McGee,
Ferguson et Seers (1989) constatent à l’aide d’une analyse factorielle confirmatoire que
l’ambiguïté et le conflit de rôle, tels que mesurés par l’échelle, ne sont pas factoriellement
indépendants, et appellent à un moratoire quant à l’utilisation de cette échelle, tout en
encourageant le développement d’instruments de mesure nouveaux. Perrot (2000) observe la
faiblesse des « loadings » des items sur les axes « ambiguïté » et « conflit », même après
rotation, la valeur la plus élevée étant de 0,62. King et King (1990) questionnent fortement la
validité de contenu de l’échelle et soulignent deux problèmes conceptuels sérieux : le manque
de clarté relatif aux items qui constituent chacune des deux dimensions (ambiguïté et conflit),
ainsi que la difficulté d’interprétation claire des deux composantes résultantes de l’ACP
(Rizzo, House, Lirtzman, 1970). Enfin, Schuler (1975) puis Smith, Tisak et Schmieder (1993)
mettent en évidence la faible fiabilité du dernier item de l’échelle (« Je travaille sur des
choses inutiles »).

Au-delà de ces critiques, un autre argument majeur à l’encontre de l’échelle de Rizzo,


House et Lirtzman (1970) doit être souligné : il s’agit de la dimensionnalité du construit.
Comme le soulignent Miles et Perreault (1976), peu d’attention a été accordée aux différents
types de conflits de rôles, alors que ces distinctions semblent importantes. De même, Foucher
et Bouchard (1995) utilisent une approche multi-dimensionnelle du construit, fondée sur la
typologie de Katz et Kahn (1966), dans leur étude exploratoire des conflits de rôles vécus.
Loubes (1997) souligne quant à elle l’importance de mieux connaître les formes de tensions
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de rôles et leurs conséquences sur l’organisation et le salarié, en raison des


dysfonctionnements de rôles et de l’utilisation inadéquate des ressources humaines qui en
résulte. Enfin, Perrot (2000) suggère que l’échelle des conflits de rôles de Rizzo, House et
Lirtzman (1970) constitue une moyenne d’items conceptuellement non reliés, et par
conséquent vide de sens, qui ne permet pas de saisir la richesse du construit. Ainsi, cette
échelle constitue une moyenne insignifiante d’items, et occulte les dimensions pertinentes du
construits. De plus, l’uni-dimensionnalité de l’échelle de Rizzo, House et Lirtzman (1970) est
en contradiction forte avec le socle théorique et conceptuelle dont elle est issue et se réclame,
qu’il s’agisse de la notion de rôle (Biddle, 1979), ou de conflits de rôles (Katz, Kahn, 1966).

Les résultats empiriques accumulés sont donc en très grande partie fondés sur une
échelle largement critiquable et critiquée. Certes, un effet « négatif » dominant des conflits de
rôles reste empiriquement établi et reconnu : les conflits de rôles sont négativement corrélés à
certaines variables attitudinales et comportementales (satisfaction, stress, implication
organisationnelle, engagement au travail, performance) mais positivement corrélés aux
intentions de départ, à l’absentéisme, et au turnover. Au-delà de cet effet dominant
empiriquement étable, des contradictions demeurent (Fisher, Gitelson, 1983 ; Jackson et
Schuler, 1985 ; Van Sell, Brief, Schuler, 1981) et appellent à nuancer les résultats empiriques
évoqués. Ces contradictions sont en partie liées aux effets modérateurs potentiels, aux limites
des méthodologies fondées sur l’analyse de corrélations, au niveau d’analyse retenu, au
manque de distinction entre les concepts d’ambiguïté et de conflit, et au manque de distinction
entre les différentes formes possibles de conflits de rôles (Jackson, Schuler, 1985).
1.3 Vers une mesure multi-dimensionnelle des conflits de rôle ?

Ilgen et Holenbeck (1991) ainsi que Jackson et Schuler (1985) considèrent les conflits
de rôles et l’ambiguïté de rôles comme des construits bien distincts, pour lesquels ils
suggèrent de formuler des hypothèses séparées. Plusieurs tentatives de développement
d’échelles de mesure alternatives à celle de Rizzo, House et Lirtzman (1970) sont à noter, tant
pour l’ambiguïté de rôle que pour les conflits de rôles. Nous nous limiterons cependant ici aux
échelles des conflits de rôles.

Une première étude réalisée par Kahn et al. (1964) basée sur de nombreux entretiens a
permis d’élaborer un index de quatre scores, constituant des indicateurs objectifs des conflits
de rôle. Cependant, les mesures des conflits de rôles suggérées par les études de Kahn et al.
(1964) restent délicates à utiliser. En effet, le procédé est basé sur des entretiens et reste
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extrêmement lourd. De plus, il ne permet pas de mesurer précisément le degré de conflit perçu
par la personne focale (récepteur de rôle), mais s’intéresse plus au nombre d’attentes
conflictuelles.

Ford et al. (1975) ont élaboré des échelles ayant pour but de spécifier une dimension
précise du conflit de rôle. Ils se réfèrent à une définition classique du conflit de rôle comme
l’occurrence simultanée de plusieurs attentes de rôle, et évaluent les écarts entre les attentes
des différents émetteurs pris deux à deux, pour une série de tâches répertoriées. Cependant,
leur échelle ne prend en compte qu’une seule catégorie de conflits de rôles, à savoir les
conflits inter-émetteurs, et s’intéresse à une population très ciblée (les commerciaux) et à une
série de tâches préalablement répertoriées, ce qui limite les possibilités de généralisation.

Chonko et al. (1986) ont développé une échelle multidimensionnelle des conflits de
rôle qu’ils définissent comme le degré d’incompatibilité entre les attentes des vendeurs et les
attentes des émetteurs associés à sa position. Là encore, son application se limite à une
population spécifique : les vendeurs.

Perrot (2000) propose dans une double démarche méthodologique à la fois


exploratoire et confirmatoire, une approche multi-dimensionnelle pour la définition et la
mesure des conflits de rôles. Cinq dimensions clés des conflits de rôles sont ainsi identifiées
empiriquement : le conflit « individu / rôle », le conflit « individu / climat », le conflit
« individu / ensemble de rôle », le conflit « d’accès à l’information », et la « surcharge de
rôle ». Les qualités psychométriques de l’échelle sont bonnes, à la fois globalement et pour
chaque dimension, et sa structure factorielle stable. Ce sont principalement les trois premières
formes de conflits de rôles qui ont un impact fort sur les variables prises en considération :
l’engagement au travail, l’implication organisationnelle, la satisfaction au travail, le sentiment
de performance, et les intentions de départ. Les relations mises en évidences entre les conflits
de rôles et ces variables semblent robustes, et peu sensibles aux effets modérateurs potentiels.

1.4 Pour une nouvelle conceptualisation et une meilleure cohérence entre définitions et
mesures des conflits de rôles

Comme expliqué précédemment, ce sont les travaux de Kahn et al. (1964) puis Katz et
Kahn (1966) qui ont essentiellement marqué l’étude des conflits de rôles. Cependant, leurs
recherches souffrent de deux principales lacunes au regard de notre problématique: tout
d’abord, la validation empirique des résultats proposés reste insuffisante. Deuxièmement, sur
le plan conceptuel, les propres exemples de conflits de rôles donnés par les auteurs ne sont pas
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toujours cohérents avec le cadre sous-jacent qu’est la théorie des attentes. En effet, si les
conflits de rôles se définissent en termes d’attentes contradictoires, la surcharge de rôle ne
devrait pas être considérer comme un conflit de rôle. De même, le conflit « individu-rôle »
peut s’entendre comme un conflit entre les attentes de l’individu et son rôle, indépendamment
des attentes de son « ensemble de rôle ». Par ailleurs, les conflits de rôles étant avant tout un
concept correspondant au niveau d’analyse individuel, il semblerait plus logique de prendre
en considération les perceptions de l’individu et les conflits qui peuvent en résulter, plus que
d’éventuelles incompatibilités entre les attentes d’autres personnes vis à vis de l’individu.
Enfin, dans la mesure où les rôles (tout comme le modèle de transmission de rôles) impliquent
des interactions avec un « ensemble de rôle », la définition des conflits de rôles devrait inclure
des tensions psychologiques liées aux interactions de l’individu.

Plus que la théorie des attentes, nous pensons que le cadre théorique le plus adapté à
l’analyse des conflits de rôles est celui de l’(in)adéquation (« fit »), entre l’individu et son rôle
organisationnel. De nombreuses recherches considèrent la notion d’adéquation comme
centrale à la compréhension des liens entre l’individu et l’organisation. Schein (1988) avance
par exemple l’idée qu’il faut rechercher une correspondance optimale et non maximale entre
l’individu et l’organisation. Une trop grande conformité ne produirait qu’une « bureaucratie
stérile », alors qu’une trop grande différence engendrerait des risques de « rébellion ».

L’utilisation du concept d’adéquation reste cependant problématique compte tenu de la


multiplicité des descripteurs sur lesquels peut porter l’adéquation. Le nombre de couples
possibles « caractéristiques individuelles / caractéristiques organisationnelles » est en effet
très élevé, ce qui ne fait que renforcer la difficulté d’une validation empirique de cette
relation. L’approche en termes d’adéquation doit donc s’interroger sur l’identification des
dimensions d’adéquation les plus pertinentes au regard de la problématique considérée.

Les dimensions d’adéquation pertinentes, qui constitueront le socle d’une nouvelle


conceptualisation des conflits de rôles, doivent remplir une double condition : tout d’abord,
elles doivent se situer à l’interface entre l’individu et l’organisation et relier ainsi ces deux
niveaux d’analyse (Katz, Kahn, 1966). Enfin, elles doivent refléter les composantes clés du
concept de rôle organisationnel, c’est à dire la notion d’activités et de comportements
relationnels, dans un contexte organisationnel (Biddle, 1979). La figure 1 ci-dessous
représente ainsi les types d’(in)adéquations pertinentes entre l’individu et l’organisation :

Figure 1 : Nature et conséquences des conflits de rôles


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Caractéristiques individuelles Caractéristiques organisationnelles


 Identité (personnelle, sociale)  Activités de rôle
 Système de représentation  Relations de rôle
 Contexte organisationnel du rôle

(In)adéquations entre :
 Individu / activités de rôle
 Individu / relations de rôle H1
 Individu / contexte organisationnel du rôle (culture, valeurs...)

H2

Conflits de rôles liés


- Conflit individu / activités de rôle
- Conflit individu / relations de rôle
- Conflit individu / contexte organisationnel

H3

Conséquences :
- Attitudes (satisfaction, implication, engagement, motivation, intentions de départ...)
- Comportements (performance...)
- Stress
Précisions ici une différence importante entre les notions d’inadéquations et de conflits
de rôles : si elles portent sur les mêmes « objets » (l’individu et son rôle dans l’organisation),
elles sont conceptuellement différentes dans la mesure où les inadéquations en sont la cause et
les conflits de rôles la conséquence. Les conflits de rôles peuvent se définir comme une
perception négative d’une inadéquation entre l’individu et son rôle, et traduisent un inconfort
psychologique qui résulte de cette inadéquation perçue. Il y a ici une cohérence conceptuelle
forte entre cette approche en termes d’(in)adéquation sur les dimensions évoquées, et les trois
formes de conflits de rôles mises en évidence dans les résultats de Perrot (2000).

De plus, les schemes cognitifs individuels influencent bien entendu la perception de


chacun. En d’autres termes, une même (in)adéquation peut être perçue et vécue différemment
par deux individus. C’est le sens de l’hypothèse H3, qui suggère que ce sont les conflits de
rôles vécus (ie les interprétations individuelles des (in)adéquations) qui engendrent des
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conséquences sur les variables dépendantes considérées, plus que les (in)adéquations en elles-
mêmes.

Par rapport à l’échelle de Perrot (2000), une proximité conceptuelle très forte peut
ainsi être mise en évidence entre la construction du cadre conceptuel (figure 1) et les résultats
empiriques précédemment évoqués. En particulier, les trois premières formes de conflits de
rôles identifiées (Perrot, 2000) sont les plus pertinentes car elles font directement écho à la
définition des rôles en termes d’activités et de comportements relationnels dans un contexte
organisationnel donné (Biddle, 1979), correspondent directement aux types d’inadéquations et
de conflits de rôles définis, et sont selon Perrot (2000) le plus fortement corrélées aux
variables dépendantes retenues. Nous suggérons donc de nous focaliser sur le conflit
« individu / rôle » lié aux activités de rôles, le conflit « individu / ensemble de rôles » lié aux
comportements relationnels de rôles, et au conflit « individu / climat » lié au contexte
organisationnel dans lequel l’individu exerce son rôle, en retenant comme cadre conceptuel
l’(in)adéquation entre l’individu et son rôle organisationnel.

2 Formulation d’hypothèses

Comme illustré sur la figure 1, trois familles d’hypothèses peuvent être formulées.

2.1 H1 : perception divergente de l’inadéquation

Les trois formes d’inadéquations définies (individu / activités de rôle, individu /


relations de rôles, individu / organisation) sont liées à des caractéristiques individuelles et
organisationnelles. Cependant, nous formulons l’hypothèse que la perception de ces
caractéristiques est socialement construite (Berger, Luckman, 1966), et liée aux schèmes
cognitifs des personnes. Ainsi, une inadéquation entre des compétences individuelles et des
activités de rôles peut être perçue différemment par l’individu concerné et son supérieur
hiérarchique, pour ne prendre que cet exemple. Nous nous inscrivons donc dans la perspective
proposée par Salancik et Pfeffer (1978)2. En d’autres termes, les perceptions des individus et
de leurs managers, relativement au même objet (l’adéquation) ne sont pas corrélées, ce qui se
traduit par les trois hypothèses suivantes :

H1a : l’inadéquation individu / activités de rôles perçue par l’individu n’est pas
corrélée avec la perception de cette même inadéquation par son manager.

H1b : l’inadéquation individu / relations de rôles perçue par l’individu n’est pas
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corrélée de façon statistiquement significative avec la perception de cette même inadéquation


par son manager.

H1c : l’inadéquation individu / organisation perçue par l’individu n’est pas corrélée de
façon statistiquement significative avec la perception de cette même inadéquation par son
manager.

2.2 H2 : relations entre inadéquations perçues et conflits de rôles vécus

Notre définition des conflits de rôles est directement liée à la notion d’(in)adéquations
perçues entre l’individu et son rôle organisationnel. Par conséquent, nous formulons
l’hypothèse générale que plus les inadéquations perçues sont fortes, plus les conflits de rôles
qui en résultent sont importants.

H2a : toutes les inadéquations perçues sont positivement corrélées à toutes les formes
de conflits de rôles.

Par ailleurs, comme expliqué précédemment, les conflits de rôle renvoient à une vision
multidimensionnelle du construit. En reprenant notre définition des conflits de rôles et
l’échelle de Perrot (2000), c’est en toute logique l’inadéquation individu / activités de rôle qui
est la plus fortement liée au conflit « individu / rôle », l’inadéquation individu / relations de
rôle qui est la plus fortement liée au conflit « individu / ensemble de rôle », et l’inadéquation
individu / organisation qui est la plus fortement liée au conflit « individu / climat ». Par

2
« Social Information Process » framework.
ailleurs, ces relations entre chaque catégorie d’inadéquations perçues et la forme de conflit de
rôle correspondante doivent être statistiquement significatives.

H2b : Parmi les différentes formes de conflits de rôles, c’est le conflit « individu /
rôle » qui est le plus fortement corrélé avec l’inadéquation individu / activités de rôles. Cette
corrélation est statistiquement significative.

H2c : Parmi les différentes formes de conflits de rôle, c’est le conflit « individu /
ensemble de rôle » qui est le plus fortement corrélé avec l’inadéquation individu / relations de
rôles. Cette corrélation est statistiquement significative.

H2d : Parmi les différentes formes de conflits de rôle, c’est le conflit « individu /
climat » qui est le plus fortement corrélé avec l’inadéquation individu / organisation. Cette
corrélation est statistiquement significative.
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2.3 H3 : conséquences des conflits de rôles

Les conséquences des conflits de rôles ont déjà largement été observées
empiriquement sur un certain nombre de variables, qu’il s’agisse des attitudes (satisfaction,
implication organisationnelle, engagement au travail, motivation, intentions de départ...), des
comportements (performance...) ou du stress (Fisher, Gitelson, 1983 ; Jackson, Schuler,
1985). Les conséquences des conflits de rôles sont ainsi qualifiées de « négatives », dans la
mesure où ils diminuent la satisfaction, l’implication, l’engagement, la motivation, la
performance, et accroissent les intentions de départ et le stress.

H3 : les conflits de rôles sont négativement corrélés à la satisfaction, l’implication,


l’engagement, la motivation, mais positivement corrélés aux intentions de départ et au stress.

Par ailleurs, au-delà de ces corrélations déjà établies empiriquement, l’intérêt d’une
approche multi-dimensionnelles des conflits de rôles est d’explorer quelles sont les formes de
conflits de rôles les plus particulièrement associées à chacun des indicateurs pris en compte.
Nous ne formulons pas ici d’hypothèse à priori, étant dans une démarche de nature
exploratoire.

3 Méthodologie

3.1 Elaboration des questionnaires

La mesure des indicateurs attitudinaux (second ordre) de la socialisation


organisationnelle se base sur des instruments déjà validés et reconnus. Il s’agit des échelles de
Kanungo (1982)3 pour l’engagement au travail, de Allen et Meyer (1990) pour l’implication
organisationnelle affective, de Roussel (1996) pour la motivation4, et de Perrot (2000) pour
les intentions de départ. La satisfaction au travail est mesurée par un seul item5, afin d’alléger
le questionnaire, dans la mesure où cet item est considéré comme substituable à des échelles
telles que le Minnesota Satisfaction Questionnaire. En effet, de très fortes corrélations (>0,8)
ont été empiriquement établies entre ces deux mesures (Roussel, 1996 ; Perrot, 2000).

Les indicateurs comportementaux se résument aux concepts de performance et de


stress. La mesure de la performance est extraite de l’échelle de socialisation de Chao et al.
(1994), et le stress est mesuré par un seul item : « je suis souvent stressé(e) quand je suis au
travail ».

Afin de pouvoir contraster nos résultats empiriques en fonction de l’approche choisie


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pour la mesure des conflits de rôles, deux échelles ont été utilisées : celle de Rizzo, House et
Lirtzman (1970), très largement utilisée dans la littérature de recherche depuis plus de trente
ans malgré les nombreuses critiques dont elle fait l’objet, et celle de Perrot (2000), conçue
selon une approche multidimensionnelle du construit, avec cinq formes spécifiques de conflits
de rôles identifiés.

3
Une version de 9 items (Perrot, 2003) a été utilisée au lieu de 10, après élimination de l’item 10.
4
Nous utiliserons ici l’échelle des efforts fournis au travail, comme indicateur de la motivation. Il s’agit
donc d’une partie seulement des items et échelles utilisées par Roussel (1996) pour appréhender le concept de
motivation.
5
« Globalement, je suis satisfait(e) de mon travail ».
Tableau 1 : items pour la mesure des conflits de rôles
Echelle Items
Unidimensionnelle J’ai des choses à faire qui devraient être réalisées autrement.
(Rizzo, House, Je reçois des missions sans main d’oeuvre pour les réaliser.
Lirtzman, 1970)6 Je dois contourner une règle ou une procédure pour réaliser ma mission.
Je travaille avec deux ou plusieurs groupes qui fonctionnent de façon différente.
Je reçois des demandes incompatibles d’une ou plusieurs personnes.
Je réalise des choses qui peuvent être acceptées par certaines personnes et
rejetées par d’autres.
Je reçois une mission sans ressources ni moyens adéquats pour pouvoir
l’effectuer.
Je travaille pour des choses inutiles.
Conflit « individu / Globalement, mon travail est plutôt sous-qualifié par rapport à ma formation.
rôle » (Perrot, J’aimerais bien pouvoir utiliser plus mes compétences dans mon travail.
2000) J’aurai malheureusement assez vite fait le tour de mon poste actuel.
Conflit « individu / Certaines personnes me font parfois des réflexions désagréables au travail.
ensemble de Parfois, je suis frustré(e) de ne pas pouvoir répondre aux « attaques » des autres.
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rôles » (Perrot, J’ai quelquefois l’impression de me faire taper sur les doigts pour rien.
2000) Je trouve que c’est trop souvent la « guéguerre » entre les gens au travail.
Conflit « individu / Je n’accroche pas complètement avec la culture de cette entreprise.
climat » (Perrot, Cette entreprise a parfois un mode de fonctionnement qui m’énerve.
2000) Dans cette entreprise, il faut parfois se comporter d’une façon qui ne me
convient pas.
L’entreprise n’est pas très attentive aux préoccupations de ses salariés.

Enfin, les inadéquations perçues entre l’individu et son rôle organisationnel ont été
appréhendées par des mesures mono-items de la façon suivante :

Tableau 2 :
Concept Items pour l’individu concerné Items pour le maître d’apprentissage
Adéquation J’ai le profil qui correspond bien Mon apprenti(e) a un profil qui
individu / activités aux activités qu’on me confie. correspond bien aux activités qui lui
de rôle. sont confiées.
J’ai le profil qui correspond bien Mon apprenti(e) a un profil qui
Adéquation
aux relations interpersonnelles à correspond bien aux relations
individu / relations
gérer dans ce travail. interpersonnelles à gérer dans son
de rôle.
travail.
Adéquation D’une façon générale, j’ai suis Mon apprenti(e) est, d’une façon
individu / quelqu’un qui correspond bien à générale, quelqu’un qui correspond
organisation. cette entreprise. bien à cette entreprise.

6
Traduits par Loubes (1997).
Un premier projet de questionnaire a été rédigé et soumis à cinq experts universitaires
en GRH, en leur demandant d’évaluer la clarté de la rédaction des items et, d’évaluer la
correspondance conceptuelle entre les items destinés aux nouveaux entrants et ceux destinés à
leur supérieur hiérarchique.

Le principe était donc de pouvoir apprécier les éventuelles convergences ou


divergences de perception de l’adéquation entre l’individu et l’organisation, pour les individus
et pour leur manager. La version finale du questionnaire intègre donc l’ensemble des
remarques formulées par les cinq experts en GRH sollicités.

3.2 Recueil des données

Le terrain d’enquête est constitué de jeunes suivant actuellement une formation de


gestion (licence et maîtrise) en alternance. Les questionnaires ont été distribués durant le mois
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de février 2005, auprès de quatre-vingt jeunes de vingt à vingt-cinq ans: certains étaient en
entreprise depuis 3 à 8 mois, d’autres avaient déjà effectué une année dans leur entreprise et
avaient donc une ancienneté de 15 à 20 mois dans l’entreprise. Cette population d’enquête
était donc particulièrement intéressante, car en période de socialisation organisationnelle
l’existence de conflits de rôles est très probable. Même si le processus de socialisation est
continu et permanent, il est en effet particulièrement fort durant les premiers mois en
entreprise.

La procédure de recueil de données était la suivante : les questionnaires (anonymes)


ont été distribués et remplis en salle, durant leur période à l’Université, afin de ne pas perdre
des réponses : le taux de réponse a été de 100 %. Afin d’obtenir la réponse de leur supérieur
hiérarchique, et de pouvoir croiser les données, chaque questionnaire était numéroté, le même
numéro étant attribué au questionnaire de l’apprenti et à celui de son maître d’apprentissage.
Chaque apprenti avait comme instruction de remettre en main propre à son maître
d’apprentissage une enveloppe fermée, contenant un questionnaire numéroté mais anonyme et
une enveloppe retour. Par ailleurs, afin de maximiser le taux de retour des questionnaires aux
maîtres d’apprentissage, seules des échelles de mesure mono-items (après validations et/ou
modifications par un groupe d’experts en GRH) ont été utilisées pour restreindre la longueur
du questionnaire. Sur 80 questionnaires remis en main propre, 60 ont été retournés remplis,
soit un taux de réponse très élevé de 75 %, qui s’explique par la procédure utilisée.
Les réponses prises en compte ont été reçues dans les 3 semaines suivant la passation
du questionnaire auprès des apprentis. Le biais potentiel lié au temps nous semble donc très
limité car l’ensemble des données a été obtenu en moins de 3 semaines.

4 Résultats et discussion

4.1 Résultats et discussion pour les hypothèses H1

Tableau 3 : Divergence des perceptions (individus/managers) sur les inadéquations


Type d’inadéquation Hypothèse Corrélation Significativité Hypothèse validée
Individu / activités de rôle H1a r = 0,066 p = 0,616 Oui
Individu / relations de rôle H1b r = - 0,03 p = 0,818 Oui
Individu / organisation H1c r = 0,065 p = 0,621 Oui
Toutes les hypothèses H1 sont validées, ce qui constitue un résultat important et
corrobore l’optique de Salancik et Pfeffer (1978). Il n’y a donc pas forcément de réel
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ajustement mutuel entre l’individu et l’organisation, mais plutôt une difficulté du management
de percevoir et de comprendre les conflits de rôles qui résultent de cette perception
d’inadéquations. Une meilleure compréhension du vécu des individus n’est donc sans doute
pas inutile au management...

4.2 Résultats et discussion pour les hypothèses H2

Tableau 4 : Relations entre inadéquations perçues et conflits de rôles (H2a)


Corrélations Conflit de rôle Conflit Conflit « individu / Conflit « individu /
entre : unidimensionnel7 « individu/rôle »8 ensemble de rôle » climat7 »
Inadéquation r =0,028 r=0,606 r=0,050 r=0,148
individu / p=0,808 p<0,01 p=0,656 p=0,190
activités de rôles (H2a) (H2a) et (H2b) (H2a) (H2a)
Inadéquation r=0,133 r=0,155 r=0,247 r=0,206
individu / p=0,239 p=0,171 p<0,05 p=0,067
relations de rôles (H2a) (H2a) (H2a) et (H2c) (H2a)
Inadéquation r=0,092 r=0,289 r=0,263 r=0,500
individu / p=0,417 p<0,01 p<0,05 p<0,01
organisation (H2a) (H2a) (H2a) (H2a) et (H2d)
Le signe des corrélations est conforme à l’hypothèse H2a, qui est donc validée. Nous
pouvons ainsi conclure que les inadéquations perçues par l’individu engendrent des conflits
de rôles. Néanmoins, il est intéressant de noter qu’aucune corrélation obtenue avec l’échelle
de Rizzo, House et Lirtzman (1970) n’est statistiquement significative. De notre point de vue,

7
Rizzo, House et Lirtzman, 1970.
8
Perrot, 2000.
cela ne signifie pas que la relation est inexistante, mais que l’échelle de Rizzo, House et
Lirtzman (1970) représente un score moyen calculé sur des items conceptuellement peu voire
pas reliés. En d’autres termes, l’interprétation des items de l’échelle est plus qu’hasardeuse.
En revanche, l’utilisation d’une approche multi-dimensionnelle des conflits de rôles (Perrot,
2000) permet d’introduire plus de finesse dans l’analyse des résultats : si toutes les
corrélations observées ne sont pas statistiquement significatives (5 sur 9 le sont), il est
néanmoins très clair qu’à des formes spécifiques d’(in)adéquations entre l’individu et son rôle
organisationnel correspondent des formes particulières de conflits de rôles vécus. Ce n’est
donc pas l’existence de telles relations qu’il faut renier, mais l’utilisation d’une échelle de
mesure inadaptée.

Par ailleurs, toutes les hypothèses H2a, H2b, H2c et H2d sont empiriquement validées.
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4.3 Résultats et discussion pour l’hypothèse H3

Comme illustré dans le tableau 4 ci-dessous, l’hypothèse H3 est partiellement validée.


En effet, sur les 28 corrélations calculées, 22 ont un signe conforme à l’hypothèse. Les six
autres corrélations n’apportent pas une contradiction forte à l’hypothèse mais plutôt une
nuance, car les valeurs de ces trois corrélations sont très proches de zéro, et ne sont pas
statistiquement significatives.

Ces résultats, illustrés dans le tableau 4 ci-après, permettent donc d’évaluer la force
relative des corrélations entre les conflits de rôles et les indicateurs attitudinaux ou
comportementaux qui en résultent.

Tableau 5 : Relations entre indicateurs « proxy » (niveau) et indicateurs de 2nd ordre


Corrélations entre: Conflit de rôle Conflit « individu- Conflit « individu- Conflit « individu-
« unidimensionnel » rôle » climat » ensemble de rôle »
Engagement r = 0,042 r = - 0,371 r = - 0,253 r = - 0,096
p = 0,710 p < 0,01 p < 0,05 p =0,396
Implication affective r = - 0,233 r = - 0,308 r = - 0,625 r = - 0,356
p < 0,05 p < 0,01 p < 0,01 p < 0,01
Motivation r = - 0,375 r = - ,335 r = - 0,529 r = - 0,370
p < 0,01 p < 0,01 p < 0,01 p < 0,01
Satisfaction r = - 0,117 r = - 0,449 r = - 0,414 r = - 0,214
p = 0,301 p < 0,01 p < 0,01 p = 0,056
Intentions de départ r = 0,235 r = 0,382 r = 0,540 r = 0,390
p < 0,05 p < 0,01 p < 0,01 p < 0,01
Stress r = 0,300 r = - 0,030 r = 0,491 r = 0,484
p < 0,01 p = 0,795 p < 0,01 p < 0,01
Performance r = - 0,232 r = 0,000 r = - ,264 r = - 0,263
p < 0,05 p = 1,000 p < 0,05 p < 0,05
Nous pouvons donc considérer l’hypothèse H3 comme fortement mais non totalement
validée.

4.4 Elaboration de modèles prédictifs

Le principal intérêt des résultats est, outre d’apporter une validation empirique (certes
partielle) au modèle proposé, de pouvoir mettre en évidence quels sont les déterminants clés
de certaines variables d’intérêt. Nous considérerons ci-après la notion de stress, ainsi que les
intentions de départ des salariés, qui constitue pour les organisations une variable
déterminante.

Pour ce faire, une régression multiple selon la méthode « pas à pas » est réalisée. Afin
de traduire notre modèle sous la forme d’une régression multiple, nous utiliserons comme
variables explicatives potentielles du stress et des intentions de départ les différentes formes
halshs-00360474, version 1 - 11 Feb 2009

de conflits de rôle9.

Tableau 6 : Elaboration d’un modèle prédictif pour le stress


Variable expliquée Variables explicatives R²
R² Variation de F Significativité
ajusté
Stress Conflit « individu-climat » 24,1 % 23,1 % 24,759 0,000
Conflit « individu-ensemble 36,1 % 34,5 % 14,529 0,000
de rôle »
Le stress au travail est donc essentiellement lié aux conflits « individu / climat » et au
conflit « individu-ensemble de rôle ». Plus que le contenu du travail, c’est donc
essentiellement l’environnement organisationnel et humain qui sont potentiellement
générateurs de stress.

Par ailleurs, le pouvoir explicatif du modèle est fort, avec plus de 34 % de variance
expliquée avec deux variables. Nous remarquons également que l’échelle de Rizzo, House et
Lirtzman (1970) n’est pas retenue dans le modèle de régression multiple « pas à pas », ce qui
signale son manque de pouvoir explicatif.

9
Les quatre variables « conflit unidimensionnel » (Rizzo, House et Lirtzman, 1970), conflit « individu-
rôle », conflit « individu / ensemble de rôle » et conflit « individu-climat » (Perrot, 2000) sont prises en
considération comme variables explicatives potentielles.
Tableau 7 : élaboration d’un modèle prédictif pour les intentions de départ
Variable expliquée Variables explicatives R² R² Variation de F Significativité
ajusté
Intentions de départ conflit « individu / climat » 29,2 % 28,3 % 32,133 0,000
conflit « individu / rôle » 37,6 % 36,0 % 10,425 p<0,01
conflit « individu / 41,2 % 38,8 % 4,562 p<0,05
ensemble de rôle »
Les intentions de départ sont déterminées principalement par le conflit « individu-
climat », le conflit « individu / rôle », et le conflit « individu / ensemble de rôle », qui
expliquent plus de 38 % de la variance. Ces résultats apportent donc une explication
significative des intentions de départ, avec un pourcentage de variance expliquée important
avec trois variables. A nouveau, l’échelle de Rizzo, House et Lirtzman (1970) n’est pas
retenue dans le modèle de régression, jetant encore plus de doute sur son pouvoir explicatif
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déjà largement remis en cause.

Conclusion

Certaines limites de recherche doivent cependant être évoquées. Tout d’abord, la taille
de l’échantillon reste modeste (80 personnes), et les résultats devraient être répliqués sur un
échantillon plus large. Les contraintes de taille d’échantillon empêchent notamment
l’utilisation de démarches statistiques plus sophistiquées, comme par exemple les modèles
d’équations structurelles qui seraient intéressant pour tester l’ensemble du modèle proposé.
Deuxièmement, la nature de l’échantillon est assez classique, et leur caractère généralisable
auprès d’autres populations de salariés reste encore à établir. Enfin, les échelles de mesure
mono-items ont certes fait l’objet d’une validation auprès d’experts en GRH, mais leurs
qualités en termes par exemple de validité doivent encore être testées de façon plus
approfondie.

Cependant, plusieurs contributions de la présente recherche méritent d’être soulignées.


Tout d’abord, une nouvelle conceptualisation des conflits de rôles est proposée, fondée sur la
notion d’(in)adéquation entre un individu et son rôle organisationnel plutôt que sur la théorie
des attentes. En particulier, l’intérêt d’une approche multidimensionnelle des conflits de rôles
est à nouveau mis en évidence, et une cohérence est atteinte entre le cadre théorique sous-
jacent, les définitions du rôle, des conflits de rôle, et l’instrument de mesure utilisé. A cet
égard, si l’échelle de Perrot (2000) est une alternative possible, ce n’est bien entendu pas la
seule.
La validation (partielle pour H3) de toutes les hypothèses dérivées du modèle renforce
son intérêt a posteriori. Certes, toutes les corrélations observées ne sont pas statistiquement
significatives, mais cela nous semble constituer une nuance et non une contradiction. En effet,
reconnaître la multi-dimensionnalité des conflits de rôles et l’existence de catégories
génériques d’(in)adéquation permet justement de distinguer quelle forme d’inadéquation ou
de tensions de rôles est la plus associée à tel ou tel indicateur relatif aux causes et aux
conséquences des conflits de rôles. Il est donc normal d’observer des forces et de niveaux de
significativité statistique différents.

Les futurs travaux empiriques relatifs aux conflits de rôles devraient à notre sens
suspendre l’utilisation de l’échelle de Rizzo, House et Lirtzman (1970), qui est non seulement
en contradiction avec les fondements théoriques dont elle découle, mais qui donne en plus des
résultats empiriques nettement moins forts que ceux obtenus à partir d’une échelle multi-
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dimensionnelle des conflits de rôles. L’approche multi-dimensionnelle permet en effet de se


focaliser sur la dimension la plus pertinente au regard d’une problématique donnée.

C’est donc clairement dans cette voie que doivent s’engager les futures recherches. Il
convient de proposer une alternative à l’échelle de Rizzo, House et Lirtzman (1970), qui soit
largement validée empiriquement et mieux ancrée dans le socle conceptuel de la théorie des
rôles. Nous proposons aux recherches futures, d’une part, de se situer clairement dans une
perspective d’(in)adéquation et non plus selon la théorie des attentes et, d’autre part, de se
concentrer sur ses trois formes de conflits de rôles retenus dans cette recherche (Perrot, 2000):
le conflit « individu / rôle », le conflit « individu / ensemble de rôles », et le conflit « individu
/ climat ».
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