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Serge Perrot
Paris Dauphine University
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Serge PERROT
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Nature et conséquences des conflits de rôles
Introduction
Les conflits de rôles ont été étudiés de façon relativement intensive, en raison des
conséquences négatives qu’ils peuvent avoir tant au niveau individuel qu’organisationnel
(Fisher, Gitelson, 1983 ; Jackson, Schuler, 1985 ; Van Sell, Brief, Schuler, 1981). Au niveau
individuel, les conflits de rôles sont ainsi associés à de nombreuses variables importantes
comme la satisfaction, l’implication organisationnelle, l’engagement au travail, la motivation,
le stress, l’absentéisme, les intentions de départ, et la performance. Au niveau organisationnel,
les dysfonctionnements de rôles sont également évoqués (Loubes, 1997), tout comme leurs
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Par conséquent, les nombreux travaux empiriques et tous les résultats accumulés
depuis plus de 30 ans reposent principalement sur une échelle très insatisfaisante (tant sur le
plan conceptuel que psychométrique). Poursuivre des recherches en utilisant l’échelle de
Rizzo, House et Lirtzman (1970) risque donc fort de ne pas apporter d’éléments de
compréhension nouveaux des phénomènes étudiés, ni même de permettre l’analyser des
résultats empiriques parfois contradictoires, au-delà des effets dominants constatés.
C’est une approche renouvelée des conflits de rôles qui nous semble donc nécessaire,
selon une vision multi-dimensionnelle du construit, et avec un instrument cohérent par rapport
au socle théorique et conceptuel dont il découle.
1 Définitions et mesures des conflits de rôles
contexte organisationnel donné. Katz et Kahn (1966) évoquent l’intérêt du concept de rôle,
qui permet de relier les niveaux individuels et organisationnels. Ils décrivent ainsi
l’organisation comme un système de rôles, chaque individu pouvant être localisé dans ce
système de rôles interdépendants.
Les travaux sur les conflits de rôles organisationnels reposent très largement sur les
apports de Kahn et al. (1964), puis Katz et Kahn (1966). C’est tout particulièrement le modèle
de transmission de rôle (Katz, Kahn, 1966) qui est à l’origine des définitions des conflits de
rôles. Les auteurs distinguent dans le modèle les attentes de rôles, le rôle transmis, le rôle
perçu, et le rôle joué. La transmission de rôle est alors un processus continu et permanent
d’ajustement d’un individu à son rôle organisationnel. Les auteurs suggèrent que les inter-
relations entre les attentes de rôles, le rôle transmis, le rôle reçu, et le rôle joué sont
susceptibles de créer des transmissions de rôles incohérentes appelées conflits de rôles. C’est
par exemple le cas lorsque deux personnes de l’ « ensemble de rôle »1 formulent des attentes
contradictoires envers une même personne (conflit « inter-émetteurs »). Si des attentes
contradictoires sont transmises par une même personne, on parlera alors de conflit « intra-
émetteurs ». Mais Katz et Kahn (1966) évoquent également deux autres types de conflits de
rôles possibles, comme le conflit « individu-rôle » qui peut apparaître lorsque l’individu doit
1
L’ « ensemble de rôle » est défini comme l’ensemble des personnes en intéraction avec l’individu dans
le cadre de l’exercice de son rôle.
jouer simultanément deux rôles incompatibles entre eux ou encore lorsque l’exercice d’un
rôle est contraire à ses propres attentes. Enfin, la « surcharge de rôle » est également évoquée
comme une quatrième forme possible de conflits de rôles, même si ce quatrième aspect est
contesté sur le plan conceptuel (Murphy, Gable, 1988 ; Schaubroek, Cotton, Jennings, 1989).
Au-delà de ces quatre formes possibles de conflits de rôles, Katz et Kahn (1966) précisent que
des formes de conflits de rôles sont possibles, résultant d’un mélange de ces quatre types.
L’apport et l’impact des travaux de Kahn et al. (1964) puis Katz et Kahn (1966) est
indéniable. Ils établissent notamment l’existence d’une pluralité des formes de conflis de rôles
possibles, en partant d’un cadre très lié à la théorie des attentes : ce sont les incompatibilités
entre plusieurs attentes de rôles qui créent une pression psychologique qualifiée de conflits de
rôles. De nombreux travaux empiriques se réclament de cette approche, tout comme l’échelle
de mesure de Rizzo, House et Lirtzman (1970), mais de nombreuses contradictions doivent
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C’est très clairement l’échelle de Rizzo, House et Lirtzman (1970) qui domine la
quasi-totalité des recherches en la matière. Jackson et Schuler (1985) et Fisher et Gitelson
(1983) font état respectivement d’un taux d’utilisation de 85% et 88%. Bien que très
largement utilisée dans la littérature de recherche, l’échelle de Rizzo, House et Lirtzman
(1970) est régulièrement et sévèrement critiquée sur le plan conceptuel et psychométrique. Il
semble que la fréquence de son utilisation passée soit la principale justification de son
utilisation actuelle.
Tracy et Johnson (1981, p. 464) remarquent ainsi que les deux facteurs mis en
évidence par Rizzo, House et Lirtzman (1970) ne traduisent pas une différence conceptuelle
entre l’ambiguïté et le conflit de rôle. Au contraire, ils correspondent simplement à une
différence de rédaction des items (stress vs confort), et sont donc un artefact qui résulte d’une
différence de forme entre les items, et non d’une réelle différence conceptuelle. McGee,
Ferguson et Seers (1989) constatent à l’aide d’une analyse factorielle confirmatoire que
l’ambiguïté et le conflit de rôle, tels que mesurés par l’échelle, ne sont pas factoriellement
indépendants, et appellent à un moratoire quant à l’utilisation de cette échelle, tout en
encourageant le développement d’instruments de mesure nouveaux. Perrot (2000) observe la
faiblesse des « loadings » des items sur les axes « ambiguïté » et « conflit », même après
rotation, la valeur la plus élevée étant de 0,62. King et King (1990) questionnent fortement la
validité de contenu de l’échelle et soulignent deux problèmes conceptuels sérieux : le manque
de clarté relatif aux items qui constituent chacune des deux dimensions (ambiguïté et conflit),
ainsi que la difficulté d’interprétation claire des deux composantes résultantes de l’ACP
(Rizzo, House, Lirtzman, 1970). Enfin, Schuler (1975) puis Smith, Tisak et Schmieder (1993)
mettent en évidence la faible fiabilité du dernier item de l’échelle (« Je travaille sur des
choses inutiles »).
Les résultats empiriques accumulés sont donc en très grande partie fondés sur une
échelle largement critiquable et critiquée. Certes, un effet « négatif » dominant des conflits de
rôles reste empiriquement établi et reconnu : les conflits de rôles sont négativement corrélés à
certaines variables attitudinales et comportementales (satisfaction, stress, implication
organisationnelle, engagement au travail, performance) mais positivement corrélés aux
intentions de départ, à l’absentéisme, et au turnover. Au-delà de cet effet dominant
empiriquement étable, des contradictions demeurent (Fisher, Gitelson, 1983 ; Jackson et
Schuler, 1985 ; Van Sell, Brief, Schuler, 1981) et appellent à nuancer les résultats empiriques
évoqués. Ces contradictions sont en partie liées aux effets modérateurs potentiels, aux limites
des méthodologies fondées sur l’analyse de corrélations, au niveau d’analyse retenu, au
manque de distinction entre les concepts d’ambiguïté et de conflit, et au manque de distinction
entre les différentes formes possibles de conflits de rôles (Jackson, Schuler, 1985).
1.3 Vers une mesure multi-dimensionnelle des conflits de rôle ?
Ilgen et Holenbeck (1991) ainsi que Jackson et Schuler (1985) considèrent les conflits
de rôles et l’ambiguïté de rôles comme des construits bien distincts, pour lesquels ils
suggèrent de formuler des hypothèses séparées. Plusieurs tentatives de développement
d’échelles de mesure alternatives à celle de Rizzo, House et Lirtzman (1970) sont à noter, tant
pour l’ambiguïté de rôle que pour les conflits de rôles. Nous nous limiterons cependant ici aux
échelles des conflits de rôles.
Une première étude réalisée par Kahn et al. (1964) basée sur de nombreux entretiens a
permis d’élaborer un index de quatre scores, constituant des indicateurs objectifs des conflits
de rôle. Cependant, les mesures des conflits de rôles suggérées par les études de Kahn et al.
(1964) restent délicates à utiliser. En effet, le procédé est basé sur des entretiens et reste
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extrêmement lourd. De plus, il ne permet pas de mesurer précisément le degré de conflit perçu
par la personne focale (récepteur de rôle), mais s’intéresse plus au nombre d’attentes
conflictuelles.
Ford et al. (1975) ont élaboré des échelles ayant pour but de spécifier une dimension
précise du conflit de rôle. Ils se réfèrent à une définition classique du conflit de rôle comme
l’occurrence simultanée de plusieurs attentes de rôle, et évaluent les écarts entre les attentes
des différents émetteurs pris deux à deux, pour une série de tâches répertoriées. Cependant,
leur échelle ne prend en compte qu’une seule catégorie de conflits de rôles, à savoir les
conflits inter-émetteurs, et s’intéresse à une population très ciblée (les commerciaux) et à une
série de tâches préalablement répertoriées, ce qui limite les possibilités de généralisation.
Chonko et al. (1986) ont développé une échelle multidimensionnelle des conflits de
rôle qu’ils définissent comme le degré d’incompatibilité entre les attentes des vendeurs et les
attentes des émetteurs associés à sa position. Là encore, son application se limite à une
population spécifique : les vendeurs.
1.4 Pour une nouvelle conceptualisation et une meilleure cohérence entre définitions et
mesures des conflits de rôles
Comme expliqué précédemment, ce sont les travaux de Kahn et al. (1964) puis Katz et
Kahn (1966) qui ont essentiellement marqué l’étude des conflits de rôles. Cependant, leurs
recherches souffrent de deux principales lacunes au regard de notre problématique: tout
d’abord, la validation empirique des résultats proposés reste insuffisante. Deuxièmement, sur
le plan conceptuel, les propres exemples de conflits de rôles donnés par les auteurs ne sont pas
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toujours cohérents avec le cadre sous-jacent qu’est la théorie des attentes. En effet, si les
conflits de rôles se définissent en termes d’attentes contradictoires, la surcharge de rôle ne
devrait pas être considérer comme un conflit de rôle. De même, le conflit « individu-rôle »
peut s’entendre comme un conflit entre les attentes de l’individu et son rôle, indépendamment
des attentes de son « ensemble de rôle ». Par ailleurs, les conflits de rôles étant avant tout un
concept correspondant au niveau d’analyse individuel, il semblerait plus logique de prendre
en considération les perceptions de l’individu et les conflits qui peuvent en résulter, plus que
d’éventuelles incompatibilités entre les attentes d’autres personnes vis à vis de l’individu.
Enfin, dans la mesure où les rôles (tout comme le modèle de transmission de rôles) impliquent
des interactions avec un « ensemble de rôle », la définition des conflits de rôles devrait inclure
des tensions psychologiques liées aux interactions de l’individu.
Plus que la théorie des attentes, nous pensons que le cadre théorique le plus adapté à
l’analyse des conflits de rôles est celui de l’(in)adéquation (« fit »), entre l’individu et son rôle
organisationnel. De nombreuses recherches considèrent la notion d’adéquation comme
centrale à la compréhension des liens entre l’individu et l’organisation. Schein (1988) avance
par exemple l’idée qu’il faut rechercher une correspondance optimale et non maximale entre
l’individu et l’organisation. Une trop grande conformité ne produirait qu’une « bureaucratie
stérile », alors qu’une trop grande différence engendrerait des risques de « rébellion ».
(In)adéquations entre :
Individu / activités de rôle
Individu / relations de rôle H1
Individu / contexte organisationnel du rôle (culture, valeurs...)
H2
H3
Conséquences :
- Attitudes (satisfaction, implication, engagement, motivation, intentions de départ...)
- Comportements (performance...)
- Stress
Précisions ici une différence importante entre les notions d’inadéquations et de conflits
de rôles : si elles portent sur les mêmes « objets » (l’individu et son rôle dans l’organisation),
elles sont conceptuellement différentes dans la mesure où les inadéquations en sont la cause et
les conflits de rôles la conséquence. Les conflits de rôles peuvent se définir comme une
perception négative d’une inadéquation entre l’individu et son rôle, et traduisent un inconfort
psychologique qui résulte de cette inadéquation perçue. Il y a ici une cohérence conceptuelle
forte entre cette approche en termes d’(in)adéquation sur les dimensions évoquées, et les trois
formes de conflits de rôles mises en évidence dans les résultats de Perrot (2000).
conséquences sur les variables dépendantes considérées, plus que les (in)adéquations en elles-
mêmes.
Par rapport à l’échelle de Perrot (2000), une proximité conceptuelle très forte peut
ainsi être mise en évidence entre la construction du cadre conceptuel (figure 1) et les résultats
empiriques précédemment évoqués. En particulier, les trois premières formes de conflits de
rôles identifiées (Perrot, 2000) sont les plus pertinentes car elles font directement écho à la
définition des rôles en termes d’activités et de comportements relationnels dans un contexte
organisationnel donné (Biddle, 1979), correspondent directement aux types d’inadéquations et
de conflits de rôles définis, et sont selon Perrot (2000) le plus fortement corrélées aux
variables dépendantes retenues. Nous suggérons donc de nous focaliser sur le conflit
« individu / rôle » lié aux activités de rôles, le conflit « individu / ensemble de rôles » lié aux
comportements relationnels de rôles, et au conflit « individu / climat » lié au contexte
organisationnel dans lequel l’individu exerce son rôle, en retenant comme cadre conceptuel
l’(in)adéquation entre l’individu et son rôle organisationnel.
2 Formulation d’hypothèses
Comme illustré sur la figure 1, trois familles d’hypothèses peuvent être formulées.
H1a : l’inadéquation individu / activités de rôles perçue par l’individu n’est pas
corrélée avec la perception de cette même inadéquation par son manager.
H1b : l’inadéquation individu / relations de rôles perçue par l’individu n’est pas
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H1c : l’inadéquation individu / organisation perçue par l’individu n’est pas corrélée de
façon statistiquement significative avec la perception de cette même inadéquation par son
manager.
Notre définition des conflits de rôles est directement liée à la notion d’(in)adéquations
perçues entre l’individu et son rôle organisationnel. Par conséquent, nous formulons
l’hypothèse générale que plus les inadéquations perçues sont fortes, plus les conflits de rôles
qui en résultent sont importants.
H2a : toutes les inadéquations perçues sont positivement corrélées à toutes les formes
de conflits de rôles.
Par ailleurs, comme expliqué précédemment, les conflits de rôle renvoient à une vision
multidimensionnelle du construit. En reprenant notre définition des conflits de rôles et
l’échelle de Perrot (2000), c’est en toute logique l’inadéquation individu / activités de rôle qui
est la plus fortement liée au conflit « individu / rôle », l’inadéquation individu / relations de
rôle qui est la plus fortement liée au conflit « individu / ensemble de rôle », et l’inadéquation
individu / organisation qui est la plus fortement liée au conflit « individu / climat ». Par
2
« Social Information Process » framework.
ailleurs, ces relations entre chaque catégorie d’inadéquations perçues et la forme de conflit de
rôle correspondante doivent être statistiquement significatives.
H2b : Parmi les différentes formes de conflits de rôles, c’est le conflit « individu /
rôle » qui est le plus fortement corrélé avec l’inadéquation individu / activités de rôles. Cette
corrélation est statistiquement significative.
H2c : Parmi les différentes formes de conflits de rôle, c’est le conflit « individu /
ensemble de rôle » qui est le plus fortement corrélé avec l’inadéquation individu / relations de
rôles. Cette corrélation est statistiquement significative.
H2d : Parmi les différentes formes de conflits de rôle, c’est le conflit « individu /
climat » qui est le plus fortement corrélé avec l’inadéquation individu / organisation. Cette
corrélation est statistiquement significative.
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Les conséquences des conflits de rôles ont déjà largement été observées
empiriquement sur un certain nombre de variables, qu’il s’agisse des attitudes (satisfaction,
implication organisationnelle, engagement au travail, motivation, intentions de départ...), des
comportements (performance...) ou du stress (Fisher, Gitelson, 1983 ; Jackson, Schuler,
1985). Les conséquences des conflits de rôles sont ainsi qualifiées de « négatives », dans la
mesure où ils diminuent la satisfaction, l’implication, l’engagement, la motivation, la
performance, et accroissent les intentions de départ et le stress.
Par ailleurs, au-delà de ces corrélations déjà établies empiriquement, l’intérêt d’une
approche multi-dimensionnelles des conflits de rôles est d’explorer quelles sont les formes de
conflits de rôles les plus particulièrement associées à chacun des indicateurs pris en compte.
Nous ne formulons pas ici d’hypothèse à priori, étant dans une démarche de nature
exploratoire.
3 Méthodologie
pour la mesure des conflits de rôles, deux échelles ont été utilisées : celle de Rizzo, House et
Lirtzman (1970), très largement utilisée dans la littérature de recherche depuis plus de trente
ans malgré les nombreuses critiques dont elle fait l’objet, et celle de Perrot (2000), conçue
selon une approche multidimensionnelle du construit, avec cinq formes spécifiques de conflits
de rôles identifiés.
3
Une version de 9 items (Perrot, 2003) a été utilisée au lieu de 10, après élimination de l’item 10.
4
Nous utiliserons ici l’échelle des efforts fournis au travail, comme indicateur de la motivation. Il s’agit
donc d’une partie seulement des items et échelles utilisées par Roussel (1996) pour appréhender le concept de
motivation.
5
« Globalement, je suis satisfait(e) de mon travail ».
Tableau 1 : items pour la mesure des conflits de rôles
Echelle Items
Unidimensionnelle J’ai des choses à faire qui devraient être réalisées autrement.
(Rizzo, House, Je reçois des missions sans main d’oeuvre pour les réaliser.
Lirtzman, 1970)6 Je dois contourner une règle ou une procédure pour réaliser ma mission.
Je travaille avec deux ou plusieurs groupes qui fonctionnent de façon différente.
Je reçois des demandes incompatibles d’une ou plusieurs personnes.
Je réalise des choses qui peuvent être acceptées par certaines personnes et
rejetées par d’autres.
Je reçois une mission sans ressources ni moyens adéquats pour pouvoir
l’effectuer.
Je travaille pour des choses inutiles.
Conflit « individu / Globalement, mon travail est plutôt sous-qualifié par rapport à ma formation.
rôle » (Perrot, J’aimerais bien pouvoir utiliser plus mes compétences dans mon travail.
2000) J’aurai malheureusement assez vite fait le tour de mon poste actuel.
Conflit « individu / Certaines personnes me font parfois des réflexions désagréables au travail.
ensemble de Parfois, je suis frustré(e) de ne pas pouvoir répondre aux « attaques » des autres.
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rôles » (Perrot, J’ai quelquefois l’impression de me faire taper sur les doigts pour rien.
2000) Je trouve que c’est trop souvent la « guéguerre » entre les gens au travail.
Conflit « individu / Je n’accroche pas complètement avec la culture de cette entreprise.
climat » (Perrot, Cette entreprise a parfois un mode de fonctionnement qui m’énerve.
2000) Dans cette entreprise, il faut parfois se comporter d’une façon qui ne me
convient pas.
L’entreprise n’est pas très attentive aux préoccupations de ses salariés.
Enfin, les inadéquations perçues entre l’individu et son rôle organisationnel ont été
appréhendées par des mesures mono-items de la façon suivante :
Tableau 2 :
Concept Items pour l’individu concerné Items pour le maître d’apprentissage
Adéquation J’ai le profil qui correspond bien Mon apprenti(e) a un profil qui
individu / activités aux activités qu’on me confie. correspond bien aux activités qui lui
de rôle. sont confiées.
J’ai le profil qui correspond bien Mon apprenti(e) a un profil qui
Adéquation
aux relations interpersonnelles à correspond bien aux relations
individu / relations
gérer dans ce travail. interpersonnelles à gérer dans son
de rôle.
travail.
Adéquation D’une façon générale, j’ai suis Mon apprenti(e) est, d’une façon
individu / quelqu’un qui correspond bien à générale, quelqu’un qui correspond
organisation. cette entreprise. bien à cette entreprise.
6
Traduits par Loubes (1997).
Un premier projet de questionnaire a été rédigé et soumis à cinq experts universitaires
en GRH, en leur demandant d’évaluer la clarté de la rédaction des items et, d’évaluer la
correspondance conceptuelle entre les items destinés aux nouveaux entrants et ceux destinés à
leur supérieur hiérarchique.
de février 2005, auprès de quatre-vingt jeunes de vingt à vingt-cinq ans: certains étaient en
entreprise depuis 3 à 8 mois, d’autres avaient déjà effectué une année dans leur entreprise et
avaient donc une ancienneté de 15 à 20 mois dans l’entreprise. Cette population d’enquête
était donc particulièrement intéressante, car en période de socialisation organisationnelle
l’existence de conflits de rôles est très probable. Même si le processus de socialisation est
continu et permanent, il est en effet particulièrement fort durant les premiers mois en
entreprise.
4 Résultats et discussion
ajustement mutuel entre l’individu et l’organisation, mais plutôt une difficulté du management
de percevoir et de comprendre les conflits de rôles qui résultent de cette perception
d’inadéquations. Une meilleure compréhension du vécu des individus n’est donc sans doute
pas inutile au management...
7
Rizzo, House et Lirtzman, 1970.
8
Perrot, 2000.
cela ne signifie pas que la relation est inexistante, mais que l’échelle de Rizzo, House et
Lirtzman (1970) représente un score moyen calculé sur des items conceptuellement peu voire
pas reliés. En d’autres termes, l’interprétation des items de l’échelle est plus qu’hasardeuse.
En revanche, l’utilisation d’une approche multi-dimensionnelle des conflits de rôles (Perrot,
2000) permet d’introduire plus de finesse dans l’analyse des résultats : si toutes les
corrélations observées ne sont pas statistiquement significatives (5 sur 9 le sont), il est
néanmoins très clair qu’à des formes spécifiques d’(in)adéquations entre l’individu et son rôle
organisationnel correspondent des formes particulières de conflits de rôles vécus. Ce n’est
donc pas l’existence de telles relations qu’il faut renier, mais l’utilisation d’une échelle de
mesure inadaptée.
Par ailleurs, toutes les hypothèses H2a, H2b, H2c et H2d sont empiriquement validées.
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Ces résultats, illustrés dans le tableau 4 ci-après, permettent donc d’évaluer la force
relative des corrélations entre les conflits de rôles et les indicateurs attitudinaux ou
comportementaux qui en résultent.
Le principal intérêt des résultats est, outre d’apporter une validation empirique (certes
partielle) au modèle proposé, de pouvoir mettre en évidence quels sont les déterminants clés
de certaines variables d’intérêt. Nous considérerons ci-après la notion de stress, ainsi que les
intentions de départ des salariés, qui constitue pour les organisations une variable
déterminante.
Pour ce faire, une régression multiple selon la méthode « pas à pas » est réalisée. Afin
de traduire notre modèle sous la forme d’une régression multiple, nous utiliserons comme
variables explicatives potentielles du stress et des intentions de départ les différentes formes
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de conflits de rôle9.
Par ailleurs, le pouvoir explicatif du modèle est fort, avec plus de 34 % de variance
expliquée avec deux variables. Nous remarquons également que l’échelle de Rizzo, House et
Lirtzman (1970) n’est pas retenue dans le modèle de régression multiple « pas à pas », ce qui
signale son manque de pouvoir explicatif.
9
Les quatre variables « conflit unidimensionnel » (Rizzo, House et Lirtzman, 1970), conflit « individu-
rôle », conflit « individu / ensemble de rôle » et conflit « individu-climat » (Perrot, 2000) sont prises en
considération comme variables explicatives potentielles.
Tableau 7 : élaboration d’un modèle prédictif pour les intentions de départ
Variable expliquée Variables explicatives R² R² Variation de F Significativité
ajusté
Intentions de départ conflit « individu / climat » 29,2 % 28,3 % 32,133 0,000
conflit « individu / rôle » 37,6 % 36,0 % 10,425 p<0,01
conflit « individu / 41,2 % 38,8 % 4,562 p<0,05
ensemble de rôle »
Les intentions de départ sont déterminées principalement par le conflit « individu-
climat », le conflit « individu / rôle », et le conflit « individu / ensemble de rôle », qui
expliquent plus de 38 % de la variance. Ces résultats apportent donc une explication
significative des intentions de départ, avec un pourcentage de variance expliquée important
avec trois variables. A nouveau, l’échelle de Rizzo, House et Lirtzman (1970) n’est pas
retenue dans le modèle de régression, jetant encore plus de doute sur son pouvoir explicatif
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Conclusion
Certaines limites de recherche doivent cependant être évoquées. Tout d’abord, la taille
de l’échantillon reste modeste (80 personnes), et les résultats devraient être répliqués sur un
échantillon plus large. Les contraintes de taille d’échantillon empêchent notamment
l’utilisation de démarches statistiques plus sophistiquées, comme par exemple les modèles
d’équations structurelles qui seraient intéressant pour tester l’ensemble du modèle proposé.
Deuxièmement, la nature de l’échantillon est assez classique, et leur caractère généralisable
auprès d’autres populations de salariés reste encore à établir. Enfin, les échelles de mesure
mono-items ont certes fait l’objet d’une validation auprès d’experts en GRH, mais leurs
qualités en termes par exemple de validité doivent encore être testées de façon plus
approfondie.
Les futurs travaux empiriques relatifs aux conflits de rôles devraient à notre sens
suspendre l’utilisation de l’échelle de Rizzo, House et Lirtzman (1970), qui est non seulement
en contradiction avec les fondements théoriques dont elle découle, mais qui donne en plus des
résultats empiriques nettement moins forts que ceux obtenus à partir d’une échelle multi-
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C’est donc clairement dans cette voie que doivent s’engager les futures recherches. Il
convient de proposer une alternative à l’échelle de Rizzo, House et Lirtzman (1970), qui soit
largement validée empiriquement et mieux ancrée dans le socle conceptuel de la théorie des
rôles. Nous proposons aux recherches futures, d’une part, de se situer clairement dans une
perspective d’(in)adéquation et non plus selon la théorie des attentes et, d’autre part, de se
concentrer sur ses trois formes de conflits de rôles retenus dans cette recherche (Perrot, 2000):
le conflit « individu / rôle », le conflit « individu / ensemble de rôles », et le conflit « individu
/ climat ».
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