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La reddition des comptes : stade ultime et décisif du processus démocratique.

Le 19 mai 1981, neuf jours après sa défaite aux élections présidentielles,


Valéry Giscard d’Estaing s’adresse au Français pour son ultime message de chef
d’Etat. Dans un espace dépouillé de tout decorum, le président visiblement ému
dresse un bilan de son mandat : « Vous m’avez donné les biens les plus précieux de
la collectivité nationale. J’en ai été le gardien. Aujourd’hui, je m’en vais, ils vous
sont restitués intacts  ». Il ajoute :  «  Je souhaite que la Providence veille sur la
France » ; puis, après un long silence, il lance son fameux « au revoir ! » ; puis se
lève et quitte lentement la pièce en laissant sa chaise vide. En fond sonore, une
Marseillaise se joue.

https://www.dailymotion.com/video/x52wnuq

La mise en scène fut diversement perçue et interprétée. Certains lui


reprochait son ton funèbre ; d’autres y ont vu une forme de menace, comme un «
après moi le chaos  ! »  ; d’autres encore une grandiloquence artificielle. Giscard
lui-même s’interrogera plus tard : «  En ai-je trop fait dans ce mot de la fin  ?
Sûrement ni le décor ni le texte qui n'avaient rien de mélodramatiques ! Peut-être
le court ballet de la fin me sera-t-il reproché ? Peut-être aura-t-il causé de la peine
à certains de ceux qui m'ont regardé ? Peut-être n'aurais-je pas dû leur tourner le
dos après les avoir regardés dans les yeux en 1974 ? Mais c’était l’unique chose que
je tenais vraiment à dire, une chose que j’avais le droit de dire : Au revoir ! »1
Pour ma part, je vois dans cette scène la quintessence de l’expérience
démocratique du pouvoir : rien ne la révèle davantage que le moment où il s’agit
de le quitter ! Il est un « lieu vide », comme dit Claude Lefort, parce que, dans le
régime du peuple souverain, étant toujours à tout le monde, il n’est jamais à
personne2. Par où se révèle le quatrième trait essentiel du Peuple-méthode de la
démocratie  : après les élections régulières, les délibérations publiques et les
décisions solitaires, mais non isolées, nous arrivons au terme du processus. Il s’agit
pour le prince temporaire de remettre sa fonction en jeu à échéance prévue et, à
plus ou moins long terme, la quitter. Ce sont alors des gestes simples et difficiles
qui doivent être accomplis : faire la passation, ses cartons et le deuil, renoncer à
son secrétariat, à son agenda, à ses laissez-passer, à son importance, …  et
redevenir inter pares en cessant d’être primus.
Mais pourquoi donc  ? Après tout, si le prince est bon, si son gouvernement
est réussi : pourquoi devrait-il partir ? Pour lui, la tentation est forte de confondre
l’exploit de la conquête, la réussite de l’exercice, avec le droit de la conservation
du pouvoir … qu’il se formule souvent à lui-même comme un devoir, et même un «
sacrifice »  : il se dévoue pour rester encore dans l’intérêt de la collectivité.
Vladimir Vladimirovitch Poutine y est parvenu grâce à une astuce institutionnelle
qui lui a permis de durer en étant Président puis Premier Ministre puis à nouveau
Président. Xi Jinping a éliminé au Congrès de 2018 la règle tacite posée en Chine

1 Le pouvoir et la vie, tome III, Choisir, Compagnie 12, 2006, p. 495-496. http://www.ina.fr/video/
I08358793

2 L’Invention démocratique, Fayard, 1981, p. 92.


2

depuis Deng Xiaoping d’une présidence limitée à dix ans. C’est aussi devenu la
regrettable habitude de la plupart des dirigeants africains. Mais dans les
démocraties libérales, c’est interdit !
Cela ressemble parfois à de l’ingratitude. Churchill en fait les frais dès
juillet 1945, juste un mois après une victoire dont il avait été l’artisan ; de même
pour De Gaulle, à deux reprises, en 1946, puis, à nouveau, en 1969. Une fois que
les sauveurs ont sauvé, à quoi peuvent-ils encore servir ? C’est cela la démocratie :
ni le salut public ni le service public ne confèrent aucun droit de propriété. Le
prince démocratique est un petit locataire d’une majesté inlocalisable.
On ne doit pourtant pas confondre cette expérience fondamentale avec le
dégagisme, qui consiste à vouloir sortir les sortants … simplement pour prendre
leur place* . La première est un principe démocratique ; le second est une tactique
démagogique, au demeurant peu judicieuse, puisque le «  dégagiste » finira
toujours par être lui-même dégagé. Entre les deux, la différence tient au respect
d’une procédure  : la reddition des comptes. Il ne s’agit pas simplement de la
vérification d’un budget, mais d’une évaluation des motifs et/ou intentions d’une
décision et des résultats d’une politique. La reddition des comptes, c’est le retour
sur les promesses des élections (ce pourquoi elles ne doivent pas être outrancières)
; c’est la levée du secret des négociations et des actions (ce pourquoi elles ne
doivent pas être inavouables)  ; c’est l’évaluation de la valeur des décisions  (ce
pourquoi elles doivent toujours être en rapport avec « l’utilité publique ») : c’est
donc un moment de vérité que l’on devrait vénérer, alors qu’on a tendance à le
négliger ! Car dans le flux de l’actualité, on préfère le contrôle continu au contrôle
terminal ; on favorise la facile indignation en temps réel au difficile jugement avec
recul  ; on goûte les protestations locales plutôt que les évaluations générales.
C’est la raison pour laquelle, la reddition des comptes est aujourd’hui le point
faible de la démocratie, sur lequel elle est encore immature et, sans aucun doute,
« peut mieux faire ». Nous n’avons pas encore inventé les modalités judicieuses
d’une reddition de compte efficace. Comment la concevoir ?

1) DANS LE GRAND LIVRE DES ACTIONS HUMAINES …

Rendre des comptes  ! Quand on y songe, l’expression est étrange. Elle


implique que la totalité des actions humaines, y compris politiques, puisse être
présentée sous la forme d’un « grand livre » comptable. Certes, on sait que la
comptabilité est une technique très ancienne, puisqu’on en trouve les premières
traces en Mésopotamie et en Egypte dès le IVe millénaire avant J.C. Mais comment
se fait-il que cette technique de gestion des biens et des échanges soit sortie du
strict domaine « économique » pour accéder au rang de quasi vision du monde ?

La métaphysique comptable

* C’est Poujade  en janvier 1956  : « Sortez les sortants  ! Pas un ministre, pas un président du
Conseil, de la droite, de la gauche, les rouges, les blancs, les verts : on a tout foutu dans le même
sac et on a dit au pays : ce sont des salauds ! Le meilleur ne vaut rien ! N’allez pas discuter, s’il est
à droite ou s’il est à gauche, foutez-moi tout ça …  et on triera après ». Voir aussi, Jean-Luc
Mélenchon, Qu’ils s’en aillent tous ! Flammarion, 2012.
3

Cela suppose que l’on puisse mettre l’univers entier en nombre et en


équivalence pour le considérer, ainsi que le dira bien plus tard Galilée, comme « un
vaste livre écrit en langue mathématique ». Cette idée est un trait caractéristique
de toutes les grandes civilisations, qu’elles soient chinoise, indienne, persane ou
arabe. Les nombres servent à décrire, à comprendre, à juger, à prévoir, et leur
efficacité est telle que, bien au-delà du rôle de simples outils, ils en viennent à
désigner la réalité elle-même. En Grèce antique cette idée a été portée à son
paroxysme. C’est là qu’on note l’apparition simultanée d’innovations décisives :
l’alphabet, la monnaie, la philosophie, la démocratie3. Tout cela est en rapport
avec une vision numérique de l’univers qui concurrence les conceptions
mythologiques traditionnelles. L’univers cesse d’être conçu comme une grande
famille, emplie de liens, de querelles et de fureurs, pour s’agencer en opérations
logiques. « Tout est arrangé d’après le nombre », dit Pythagore (580/500 av. JC).
Ce qui permet d’établir des systèmes d’équivalence et de convertibilité,
d’envisager la traduction, d’inventer l’égalité, de penser la justice comme une
balance, la santé comme un équilibre, la morale comme une réciprocité, la beauté
comme une harmonie (grâce d’ailleurs à une règle et un nombre qui seront du
même métal que la monnaie : l’or !). C’est donc parce que le cosmos est fait de
nombres que l’on peut rendre des comptes. Et cela vaut bien sûr aussi pour chaque
vie humaine puisque chacune est un microcosme, un cosmos en petit, qui doit, s’il
veut accéder au bonheur,  parvenir, au terme de l’exercice, à l’équilibre général
des résultats.
(L’égalitarisme grec fondé sur le calcul : « Le calcul raisonné (logismos), une fois découvert, met
fin à l'état de discorde (stasis) et amène la concorde (homonoia) ; car, de ce fait, il n'y a plus de convoitise
(pléonexia) et l'équité (isotès) est réalisée ; et c'est par elle que s'effectue le commerce en matière d'échange
contractuel ; grâce à cela les pauvres reçoivent des puissants, et les riches donnent à ceux qui en ont besoin,
ayant les uns et les autres la confiance (pistis) qu'ils auront par ce moyen l'égalité (isotès). » (J-P Vernant,
Les Origines de la pensée grecque))
C’est le sens de la fameuse réponse du sage Solon au richissime Crésus,
réputé d’ailleurs être l’un des tout premiers créateurs de monnaie, grâce aux
ressources de sa rivière aurifère nommée « le Pactole ». Crésus, après avoir montré
au philosophe, qui lui rendait visite, toute sa prospérité et sa puissance, lui
demanda quel était, selon lui, l’homme le plus heureux du monde. La réponse
déçut beaucoup le puissant roi.  Après avoir cité plusieurs anonymes aux morts
glorieuses ou paisibles, le sage athénien conclut  : « Nul ne peut être dit heureux
avant d’avoir fini sa vie ». Vexé par cette ingrate insolence, Crésus expulsa
l’Athénien.
Peu après, il perdit son fils adoré, puis son empire et, finalement, tous ses
trésors. Il allait perdre la vie, quand, au moment d’être brûlé vif par son
vainqueur, le roi perse Cyrus, Crésus se souvient de l’adage du sage et s’écrie : « Ô
Solon ! Solon ! ». Ce cri lui sauve la mise, car Cyrus, surpris, suspend l’exécution
et, à la suite de son récit, fait de lui son plus proche conseiller. (Hérodote,

3 Cf. Clarisse Herrenschmidt, Les trois écritures, Gallimard, 2007  : « L’invention, vers 620 avant
notre ère, de la monnaie frappée puis sa naissance […] sous Crésus sont contemporaines de Thalès
de Milet (625  ?-545  ? avant notre ère) […]. Les débuts de la mathématique, de la philosophie
grecque et de la monnaie frappée ont en commun leur lieu d’origine, l’Ionie et leur date. Il ne faut
donc pas exclure que des savants, Thalès, Pythagore (avant de quitter Samos  ?), et surtout leurs
élèves respectifs, aient pu jouer quelque rôle dans l’établissement de la monnaie et dans le décor
géométrique de leur revers, qui construisaient les figures selon des procédures rationnelles pour les
voir et y voir des nombres, pour réfléchir à leurs propriétés » (p. 277).
4

Histoires, I, 32). Les morales de cette histoire nous rappellent 1) que la philosophie
peut sauver la vie, 2) que l’argent (ou l’or) ne fait pas tout le bonheur, mais
surtout 3) qu’il faut attendre la fin de l’exercice comptable pour établir le bilan
exact d’une existence.
La leçon est reprise par la théologie monothéiste avec deux ajouts : d’abord,
à l’origine de l’harmonie du monde, il y a un grand Géomètre, Créateur de tout et
qui « a tout réglé avec mesure, nombre, poids » (Sg XI, 20) ; ensuite ce Créateur
est aussi le Grand Trésorier Payeur Général veillant scrupuleusement à l’économie
du salut sous toutes ses formes4. Comme le dit Saint Paul (Rm, 14, 12)  : «  Ainsi
chacun de nous rendra des comptes pour lui-même ». Ce qui inscrit aussi cette
vision dans une temporalité dramatique nouvelle, puisqu’elle annonce le moment
de la clôture générale des comptes, à savoir le jugement dernier. Et ce moment
terrible sera d’autant plus critique, qu’il ne s’agira plus seulement de présenter
des comptes à l’équilibre, mais,  ainsi qu’y invite la Parabole des talents (Mt, 25,
14-30  ; Lc, 19, 12-27), un compte de résultat positif. Pour être sauvé, Il faut
travailler beaucoup, bien faire, c’est-à-dire être bénéficiaire …  ; sinon on aura
vécu en pure perte.
Dans ce contexte, est-il vraiment étonnant que celui qui a perfectionné la
technique comptable ait été un moine, qui plus est membre de l’ordre mendiant
des franciscains ? Luca Pacioli (1447-1517), à qui l’on doit, outre le premier exposé
systématique d’algèbre en Europe, l’invention de la comptabilité à partie double.
Elle permet au marchand d’avoir un reflet plus exact de l’état de ses actifs, en
intégrant des éléments « invisibles », tels que les crédits et les dettes. Comme
pour les péchés et les vertus, la reddition de comptes réguliers, exacts et sincères
exige de creuser au-delà des seules apparences*.
Certes, la plume du Grand livre reste toujours dans la main de Dieu, mais,
grâce à ces innovations, l’homme peut espérer mieux guider son action et, peut-
être, agir plus efficacement pour son salut. Le regard des autres hommes l’y aidera
puisque cette comptabilité moderne exige à la fois collectivité et publicité. Pour
qu’elle soit bien établie, il faut en effet trois acteurs : l’accountor (celui qui a des
comptes à rendre), l’accountee (celui à qui il faut rendre compte) et l’accountant
(celui qui établit les comptes et fait office de tiers de confiance). Le gouvernement
de la cité n’échappe pas à cette règle, même si le tiers de confiance est ici bien
plus difficile à trouver.

Responsabilité politique

Le peuple qui a assez de capacité pour se faire rendre compte de la gestion des
autres, n’est pas propre à gérer lui-même
Montesquieu, Esprit des Lois, II, 2.

4 Cf. Peter Brown, Le prix du salut. Les chrétiens, l’argent et l’au-delà en Occident (IIIe-VIIe
siècle), Belin, 2016.

* Ami de Léonard de Vinci, Luca Pacioli joue aussi un rôle décisif dans la théorisation de la
perspective en peinture. Pour qu’un tableau rende compte de la réalité, il ne suffit pas de la
refléter, il faut la construire selon des règles mathématiques.
5

En politique, on voit bien qui doit rendre des comptes — le chef — et, assez
bien, à qui il doit les rendre. Ce peut être l’instance qui lui confère son autorité
— le « Ciel », les « Ancêtres », ou « Dieu », — devant qui un roi comme Louis XIV
disait se sentir profondément responsable « de ses peuples » —, ou encore le «
Peuple » lui-même, comme principe souverain. Ce peuvent aussi être les personnes
ou les groupes dont dépend le pouvoir du chef (notamment en matière fiscale),
c’est-à-dire les « Grands », la petite noblesse terrienne ou le vaste ensemble de ce
qu’on appelle en France le « tiers état ». Mais ce tiers-état, pas plus que les
autres, n’est « tiers de confiance ».
En fait, en matière politique, l’accountant désigne moins une personne que
le respect d’une procédure et de règles stables. Au fond, il s’agit du droit, qui est
la figure politique du tiers. Et c’est donc la construction de l’Etat de droit qui fait
naître la responsabilité politique.
Dans un livre important, paru en 2011, le politologue Francis Fukuyama
propose une analyse globale des Origines de l’ordre politique. Le programme est
ambitieux puisqu’il s’agit d’une fresque des grands modèles étatiques et de leur
« esprit », pour parler comme Montesquieu, des temps préhumains à la Révolution
française5 . Le titre de la traduction française — Le début de l’histoire — est un clin
d’œil astucieux au texte sur « la fin de l’histoire » qui a rendu Fukuyama
mondialement célèbre en 1989 quand il posait la démocratie et le capitalisme
comme horizon indépassable de notre temps. Arrivant au terme de son étude,
Fukuyama s’interroge sur l’émergence de la notion de responsabilité politique qu’il
perçoit, à juste titre, comme une caractéristique essentielle de la construction des
Etats modernes à partir du XVIe siècle6. Il identifie alors quatre scénarios
principaux, au sein de sociétés politiques européennes qui disposent, à la fin du
Moyen-Age, de composantes similaires  : féodalisme, monarchie, assemblées. On
peut résumer ces scénarios de la manière suivante :
•  Le premier modèle est celui d’une Responsabilité forte associée à un
Pouvoir faible. Il se déploie en Hongrie ou en Pologne, là où les aristocraties
réussissent à imposer des limites constitutionnelles (à travers, par exemple, la
Diète hongroise) au monarque. Celui-ci, affaibli par une puissante oligarchie
décentralisée, ne parvient ni à protéger la paysannerie contre les prétentions des
Grands ni à créer un appareil d’Etat susceptible de défendre le territoire.
• Deuxième modèle : celui d’une Responsabilité nulle associée à un Pouvoir
fort. La Russie en est le meilleur exemple : l’alliance du Tsar avec la noblesse,
petite et haute, qu’il domine, mais aussi avec le clergé, se fait au détriment des
paysans réduits à l’état de servage. Il y a donc bien une tradition russe durable
consistant à se débarrasser des pesanteurs de la responsabilité …et ce, jusqu’à nos
jours.
• Le troisième modèle réunit une Responsabilité(assez) faible et un Pouvoir
(assez) fort. Il s’agit de la monarchie absolue, qu’elle soit française ou espagnole.
C’est un type paradoxal, car en dépit de son absolutisme théorique, elle demeure,
dans la pratique, débitrice de comptes aussi bien à Dieu sur qui se fonde sa
souveraineté qu’aux Parlements ou Cortès qui sont la clé de prélèvements fiscaux
dont le besoin ne cesse de croître. Cette double responsabilité restreint son

5 The Origins of Political Order : From Prehuman Times to the French Revolution, New York, 2011 ;
tr. fr. Editions Saint-Simon, 2012.

6 Op. cit., p. 324 sq..


6

pouvoir sans pour autant le contraindre à l’efficacité. Elle empêche l’Etat là où il


pourrait devenir bénéfique sans le brider là où il demeure arbitraire.
• Quatrième modèle enfin, celui qui élabore une Responsabilité forte et un
Pouvoir fort. C’est celui de l’Angleterre, mais aussi du Danemark de l’âge
moderne, qui, écrit Fukuyama, « ont été en mesure de développer à la fois une
forte autorité de la loi et une responsabilité politique du gouvernement, tout en
construisant un Etat centralisé puissant, capable de mobiliser le pays et de le
défendre »7. A la fin du XIXe siècle, l’Angleterre dispose d’une démocratie libérale
et le Danemark a posé les fondations de la social-démocratie8.
On comprend, dans ce contexte, pourquoi c’est le terme anglais
d’accountability  qui, mieux que nul autre exprime la reddition politique des
comptes. Cela dit, —  l’honneur est sauf  ! —  il a tout de même une origine
française, puisqu’il fut d’abord utilisé, à partir du XIe siècle, par les agents de
Guillaume le Conquérant pour installer son pouvoir royal. Il était alors exigé de
tous les propriétaires du royaume d’Angleterre qu’ils établissent un décompte de
leurs biens afin de l’inscrire dans un grand livre, judicieusement nommé : le livre
du jugement dernier (le Domesday Book — par où l’on retrouve la métaphysique du
salut). C’est sur cette base qu’était établi le prélèvement de l’impôt. Par la suite,
chaque Shérifs (c’est-à-dire chaque officier —  reeve —  de comté —  shire) devait
venir présenter ses comptes devant la cour de l’« Echiquier » (du nom d’une nappe
quadrillée qui recouvrait la table des conseillers)*.

La typologie de Fukuyama est éclairante, car elle permet de bien identifier


le cahier des charges de la reddition politique des comptes. Il s’agit de viser un
cercle vertueux entre pouvoir et responsabilité. L’un et l’autre doivent se
renforcer, s’il est vrai que, comme dit le grand philosophe Peter Parker, qu’«  un
grand pouvoir implique de grandes responsabilités »9 et que de grandes
responsabilités permettent d’accroître l’autorité d’un pouvoir. Pour le dire
autrement, c’est le contrôle du Parlement qui a permis à l’Angleterre de lever une
quantité d’impôts jamais atteinte auparavant ; c’est lui qui a permis au Royaume-
Uni de devenir la première puissance maritime de l’époque et la première
puissance capitaliste de l’histoire. Avoir à répondre de ses actes permet d’agir plus

7 Ibid.

8La République hollandaise et la Confédération helvétique peuvent être également citées comme
des réussites politiques alliant puissance et responsabilité.

* En 1295, pour faire face à ses difficultés financières, Edouard Ier réunit un « Parlement modèle »
composé des représentants des comtés, ordres et corps du royaume. Il sera chargé du «
consentement à l’impôt » et de la vérification de son utilisation.  En son sein, la Chambre des
communes se distingue de la Chambre des Lords, et c’est elle qui va s’attacher à contrôler la
gestion et les nominations royales. Elle devient l’instance par excellence de la reddition des
comptes fondé sur le principe « pas de taxation sans représentation », même si, alors, la
représentation en question n’a rien de démocratique.

9 Spiderman (2002).
7

et mieux10 . C’est tout le pari de la reddition des comptes en démocratie libérale.


Elle est un instrument de la puissance du peuple qui ne devrait jamais devenir la
cause de son impuissance.

Reddition des comptes et démocratie

En démocratie, les magistrats sont tirés au sort, les charges sont soumises à
reddition de comptes et toutes les délibérations se font en commun.
Hérodote, Histoires, III, 80, 27-29

Une remarque en passant : cette exigence de responsabilité n’est pas propre


à la démocratie moderne ; elle caractérise le régime démocratique même dans sa
forme originelle. Plutarque rapporte cette anecdote du temps de l’Athènes de
Périclès (Vie d’Alcibiade, VII, 3). Un jour, Alcibiade voulant rendre visite à Périclès,
son oncle et père adoptif, trouve la porte close. Les serviteurs du stratège lui
disent qu’il ne pouvait être dérangé sous aucun prétexte, « parce qu’il examinait
comment il allait rendre ses comptes aux Athéniens ». En repartant, Alcibiade
aurait alors grommelé : «  Ne ferait-il pas mieux d’examiner comment ne pas les
rendre ? ». Réponse bien peu démocratique, mais qui montre que la procédure de
reddition des comptes (euthynai) n’était pas chose à prendre à la légère dans la
cité antique.
C’était même une vraie passion : un mot de trop ou une obole de moins … et
le procès était assuré ! Cela concernait tous les magistrats, mais aussi les citoyens
qui demandaient la parole à l’Ekklesia, les membres, tirés au sort, de la Boulè ; et
bien sûr les stratèges, comme Périclès, qui fut censuré à plusieurs reprises (voir
encadré).

Rendre des comptes dans l’Athènes antique

Le contrôle a posteriori était d’abord financier 11. Il était exercé à l’égard de tous les
magistrats par des auditeurs des comptes, les logistes, qui étaient tirés au sort parmi les citoyens et
pouvaient entamer des actions en détournement de fonds public, vénalité ou forfaiture. Mais les
stratèges comme tous les autres magistrats étaient aussi comptables de leur gestion au sens large
du terme. Chaque citoyen pouvait déposer une plainte, que ce soit pour des motifs publics ou
privés, contre un sortant devant la commission des Euthynes (redresseurs de comptes). Si la plainte
paraissait fondée, ils transmettaient alors aux magistrats compétents (les juges des dèmes ou les
thémosthètes) qui organisaient un procès. Ce contrôle permanent, scrupuleux, n’était pas toujours
bien intentionné. Bien souvent, il était un frein à la participation civique et parfois un obstacle à
l’action publique.

10 Francis Fukuyama, op. cit., p. 405 : « La liberté politique — c’est-à-dire la capacité des sociétés
à se gouverner elle-mêmes —  ne dépend pas seulement du degré de mobilisation de la société
contre le pouvoir central […] ; elle dépend de la capacité d’action de l’Etat quand une action est
requise. La responsabilité ne fonctionne pas que dans un sens, de l’Etat devant la société. L’Etat ne
peut agir de manière cohérente que s’il existe un sens partagé du bien commun […] La stabilité d’un
système politique responsable dépend par conséquent de l’équilibre plus général entre l’Etat et la
société civile ».
11Voir Pierre Fröhlich, Les cités grecques et le contrôle des magistrats (IVe-Ie siècle av. JC),
Genève, Droz, 2004 ; « Remarques sur la reddition de comptes des stratèges athéniens », Dikè, vol.
3, 2000.
8

C’est ce même critère que retient le philosophe Alain quand il cherche à


définir la démocratie, dans un de ses plus fameux Propos sur les pouvoirs12. Selon
lui, aucun des traits habituellement avancés n’est pertinent. L’égalité des droits et
des charges  ? Non pas  ! Car elle peut exister en régime tyrannique sur un mode
parfaitement égalitaire  : beaucoup de charge pour tous et aucun droit pour
personne. Le gouvernement de tous par tous ? Non plus ! Car il n’a jamais existé et
n’existera jamais. La procédure électorale ? Pas davantage, car même si un Pape
était élu au suffrage universel, cela ne ferait pas pour autant de l’Eglise une
démocratie. Aucun de ces critères n’est donc suffisant. En revanche, pour Alain, le
contrôle du peuple sur les gouvernants  : voilà ce qui définit en propre la
démocratie. A ses yeux, les régimes modernes sont des régimes mixtes qui mêlent
une part de monarchie (nécessaire à l’exécutif), une bonne dose d’oligarchie
(propre au Parlement et à l’administration) et une dimension démocratique, qui
réside moins dans la participation que dans ce troisième pouvoir qu’il propose
d’appeler le «  Contrôleur ». Par là, il entend cette faculté, « continuellement
efficace, de déposer les Rois et les Spécialistes à la minute, s’ils ne conduisent pas
les affaires selon l’intérêt du plus grand nombre »* . Et Alain ajoute : « Ce pouvoir
s’est longtemps exercé par révolutions et barricades. Aujourd’hui, c’est par
l’Interpellation qu’il s’exerce. La Démocratie serait, à ce compte, un effort
perpétuel des gouvernés contre les abus du pouvoir ». Sa conclusion semble
convaincante : « Et, comme il y a dans un individu sain, nutrition, élimination,
reproduction, dans un juste équilibre, ainsi il y aurait dans une société saine  :
Monarchie, Oligarchie, Démocratie, dans un juste équilibre »13.
L’analyse est pertinente, mais elle s’arrête un peu tôt. En définissant le
pouvoir démocratique de manière seulement négative (contrôle et lutte contre les
abus de pouvoir) — ou encore, comme disait déjà Machiavel, par le seul « désir de
ne pas être opprimé » —, elle ne dit rien des modalités de ce contrôle. Et, plus
grave à mes yeux, elle met dans le même sac des procédures institutionnelles de
contrôle et des pratiques insurrectionnelles (révolutions, barricades), dont on peut
penser qu’elles peuvent être, elles aussi, liberticides et tout aussi oppressives que
le pouvoir contre lequel elles luttent.14 Elle néglige aussi ce qu’ont pu avoir de
néfastes les pratiques antiques de l’ostracisme et le régime de l’accusation

12 N° 79, Gallimard, Folio, p. 213 sq.

*C’est ce que l’on trouve dans la Déclaration des Droits de l’homme et du citoyen à deux reprises :
•  Dans son préambule où il est dit que « Les Représentants du peuple français […]  ont résolu
d’exposer […] les droits naturels […] de l’Homme afin que […] les actes du pouvoir législatif et ceux
du pouvoir exécutif, pouvant être à chaque instant comparés avec le but de toute institution
politique, en soient plus respectés ; afin que les réclamations des citoyens, fondées désormais sur
des principes simples et incontestables, tournent toujours au maintien de la Constitution et au
bonheur de tous ». •  Puis dans l’Article 15 : « La Société a le droit de demander compte à tout
agent public de son administration ».

13 Propos sur les Pouvoirs, op. cit., p. 214 et p. 215.

14Comme le dit Olivier Beaud, la France a longtemps préféré résoudre ses conflits politiques par
des révolutions plutôt que par des procédures institutionnelles («  La responsabilité politique », in
Pouvoirs, n° 92, 2000). L’analyse de Popper est proche de celle d’Alain, mais sans cette dernière
confusion.
9

permanente. Autrement dit, ce pouvoir de « Contrôleur » me semble très confus,


comme s’il suffisait de dire « Non » pour se proclamer démocrate. C’est, je crois,
un grand défi de la démocratie actuelle que d’en définir et clarifier l’exercice.

La censure est-elle en panne ? Faut-il redoubler d’éphores ?

Pour préciser encore l’enjeu, adoptons juste un instant le point de vue du


très peu démocrate Cardinal de Richelieu. Voici un passage de son Testament
politique :

« Ainsi qu’un corps qui aurait des yeux en toutes ses parties serait
monstrueux, de même un Etat le serait-il si tous les sujets étaient savants. On y
verrait aussi peu d’obéissance que l’orgueil et la présomption y seraient ordinaires.
Le commerce des lettres bannirait absolument celui de la marchandise qui comble
les Etats de richesses. Il ruinerait l’agriculture, vraie mère nourrice des peuples, et
il déserterait en peu de temps la pépinière des soldats qui s’élève plutôt dans la
rudesse de l’ignorance que dans la politesse des sciences. Enfin, il remplirait la
France de chicaneurs, plus propres à ruiner les familles particulières et à troubler
le repos public qu’à procurer aucun bien aux Etats. Si les lettres étaient profanées
à toutes sortes d’esprit, on verrait plus de gens capables de former des doutes que
de les résoudre et beaucoup seraient plus propres à s’opposer aux vérités qu’à les
défendre ».15

Je ne sais si le lecteur partagera ma fascination pour ce texte d’un autre


âge, qui prend à rebours nos convictions les plus ancrées et notamment cette
équation  : plus de savoir = plus de liberté = plus de bonheur. En amont du siècle
des Lumières, Richelieu la néglige, nous rappelant que le savoir peut être perverti
— cela s’appelle l’idéologie  —  et que, ni la liberté ni la connaissance, ne
garantissent la vie heureuse. A quatre cent ans de distance, il dresse aussi de nous
un portrait cruel  : ne sommes-nous pas tous devenus ces demi-savants ès-affaires
communes à la fois prétentieux et dubitatifs, au courant de tout, mais connaisseurs
de rien, plus aptes à penser contre qu’à agir pour  ? J’adore ce texte aussi parce
qu’il est comme un défi lancé par le fondateur de l’Etat moderne aux consciences
contemporaines. Serons-nous à la hauteur de l’exercice du pouvoir démocratique
de contrôle, dont parle Alain ? C’est loin d’être certain, car, en vérité, ce pouvoir
est très exigeant, et il ne suffit pas de râler dans son coin ou de s’indigner sur
internet pour l’exercer.
Ces interrogations nous invitent à changer de point de vue sur la reddition
des comptes. On est souvent tenté de nos jours de penser qu’il n’y a pas assez de
contrôles et qu’il faudrait les démultiplier  en recourant au naming (constatation
publique d’un préjudice), au blaming (dénonciation d’un responsable), au claiming
(réclamation de réparation/sanction), au rating (notations par des agences) aux
watchdog committees (comités de vigilance ou chiens de garde), ou autres
whistleblowers  (lanceurs d’alerte) …

15 Testament politique, présenté par Françoise Hildesheimer, Honoré Champion, 2012, p. 135.
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Je crois, au contraire que la reddition des comptes souffre moins aujourd’hui


de son insuffisance quantitative que de son dérèglement qualitatif. Ce dérèglement
a son appellation contrôlée  : crise de confiance ou défiance, voire plus grave
encore, méfiance envers la politique. La nuance est de taille, si l’on en croit cette
subtile définition du Littré : «  La méfiance fait qu’on ne se fie pas du tout  ; la
défiance fait qu’on ne se fie qu’avec précaution. Le défiant craint d’être trompé ;
le méfiant croit qu’il sera trompé. » Et dans ce cas, il n’y a vraiment aucune raison
de vivre ensemble …  Pour Hobbes, cela s’appelle l’état de nature. Quant à la
pleine confiance, si elle existait, y aurait-il encore besoin de politique  ? Aucune
démocratie ne serait nécessaire si la vie collective se réduisait à une immense
Blockchain, si le contrat social était synonyme de contrat de confiance, si chacun
se fiait à tous. En fait, nous devons nous convaincre que toute société est, par
définition, société de défiance. Mais elle peut l’être plus ou moins. Et c’est à la
politique qu’il revient de veiller à ce que la légitime défiance ne dérive pas en
méfiance délétère. Or, c’est ce point qui semble aujourd’hui en question, pour, je
crois, deux raisons profondes qui — et c’est toute la difficulté —  peuvent aussi
apparaître comme des réussites démocratiques : il y a toujours plus d’acteurs et
toujours plus de censeurs.
• D’un côté, la multiplication des acteurs décisionnels entraîne une dilution
de la responsabilité. Elle paraît même se dissoudre dans des mécanismes de
décisions sans décideurs. La moindre des administrations, le moindre des
administrateurs ne cessent de pester, chacun dans leur domaine, contre des
mécanismes aveugles et absurdes sur lesquels ils n’ont aucune prise. Tout le
monde constate l’inanité du résultat, mais personne semble n’y pouvoir rien faire.
La plupart des décisions souffre de ce défaut d’imputabilité  : chacun voit les
dysfonctionnements, voire les menaces, mais personne ne parvient à en identifier
les causes16. D’où la contestation vague et impuissante du « système », qui permet
de penser que s’il n’y a plus de responsables, il reste toujours — heureusement  !
— des coupables … mais si lointains si cachés si sournois qu’on ne les trouve jamais
… et la plainte est d’autant plus sonore, qu’elle reste sagement incantatoire !
• Et c’est là un second phénomène. L’heureuse démocratisation de l’espace
public entraîne la multiplication des censeurs et, avec eux, la montée en puissance
du marketing de la suspicion. Car, dans un espace public ouvert, la raison du plus
suspicieux (ou soupçonneux) est toujours sinon la meilleure, en tout cas, la plus
audible. Le résultat n’est pas heureux, puisque la légitime censure se transforme
en vétocratie systématique. A quoi s’ajoute la tentation de substituer la
responsabilité pénale à la responsabilité politique, ce qui aboutit à une forme de
criminalisation de la fonction politique17 . Or, parce qu’ils sont davantage exposés
médiatiquement et parce qu’ils sont au cœur de l’immense système de décisions
qu’est l’Etat, les dirigeants politiques ne peuvent être considérés, à mon sens,
comme des justiciables de même nature que les autres. Cela ne veut pas dire qu’ils
n’ont pas compte à rendre  ; mais qu’on doit le leur demander en prenant en

16 Cf. Ulrich Beck, La société du risque, trad. Aubier, 2001, p. 399 : « A la différence de toutes les
époques qui l’ont précédée, la société du risque se caractérise avant tout par un manque  :
l’impossibilité d’imputer les situations de menaces à des causes externes »

17Cf. Olivier Beaud et J.-M. Blanquer (dir.), La responsabilité des gouvernants, Descartes & Cie,
1999 ; ainsi que le numéro de Pouvoirs, n°92, 2000.
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considération cette spécificité et en ayant conscience des effets pervers possibles


de l’évaluation.
Ils sont bien connus : on peut passer plus de temps à évaluer qu’à agir ; on
est conduit à fragmenter les secteurs et donc à perdre de vue l’intérêt général ; on
en vient à formater l’action par un effet retour. Comme le disait Paul Valéry : « Le
contrôle, en toute matière, aboutit à vicier l’action, à la pervertir […], dès qu’une
action est soumise à contrôle, le but profond de celui qui agit n’est plus l’action
même, mais il conçoit d’abord la prévision du contrôle, la mise en échec des
moyens de contrôle »18 . La planification soviétique en fut l’illustration absurde.
Bref, l’évaluation n’est pas la panacée et on ne peut pas faire l’économie
d’un examen attentif des manières démocratiques qui permettent aux rendre les
comptes. Autrement dit, il reste à inventer une manière responsable d’exiger des
comptes des responsables. Faute de quoi, le contre-pouvoir devient plus puissant
que le pouvoir, et débouche sur l’impuissance publique, négation de l’idée même
de la démocratie.

Censeurs et éphores ?

Les Censeurs. —  Dans la Rome républicaine, la fonction principale des censeurs était de
recenser. Tous les cinq ans, les citoyens romains étaient classés par niveau de fortune (cens). Mais
ce recensement n’était pas que quantitatif, il était aussi qualitatif, car les censeurs jouaient le rôle
de juges de moralité (cura morum) qui pouvaient flétrir publiquement, et sans recours, la
réputation d’une personne (nota censoria). Ils avaient également le pouvoir de destituer un
sénateur et devaient veiller à la bonne collecte des impôts ainsi qu’à la régularité des «  marchés
publics ». Cette opération de comptage se terminait par un rituel de purification, le lustrum,
symbolisant la régénération de la Cité tous les cinq ans.
Les Ephores. — Le terme signifie «  surveillants ». Il désignait dans la Sparte antique un
directoire de cinq magistrats annuels élus, chargé du gouvernement, mais aussi du contrôle général
de la cité.

18Paul Valéry, « Le bilan de l’intelligence » [1935], Œuvres, t. 1, Gallimard, Pléiade, 1957, p.


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