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Résumé
L'auteur, s'appuyant sur des textes représentatifs de ce courant de pensée, montre que bon nombre d'alchimistes de confession
catholique établissaient et développaient des analogies très précises entre leur foi et les thèmes alchimiques. L'étude de ces
comparaisons le conduit à conclure que l'alchimie sublime en christophanie ses mythes, sa spiritualité et ses pratiques.
Anamnèse et eschatologie, célébration sacrificielle, réconciliation et sanctification universelles, le grand œuvre est l'accoucheur
des achèvements métalliques comme la Messe est actualisation de la Rédemption pascale. Une attention particulière est portée
au rôle du mouvement spatio-temporel qui permet à l'adepte, comme au chrétien, de s'affranchir des entraves du temps.
L'alchimie était peut-être et involontairement une chimie embryonnaire et une métallurgie empirique. Bien plus et délibérément,
elle fut une doctrine philosophique, une sotériologie, une ascèse spirituelle et un ensemble de pratiques rituelles faisant de
l'Artifex un Hierourgos, analogue et confrère du célébrant eucharistique. Elle fut, enfin, une liturgie et un essai de connaissance
de Dieu à partir de ce monde, complémentaire de la théologie qui interprétait le cosmos à partir de la Révélation.
Noize Michel. Le Grand Œuvre, liturgie de l'alchimie chrétienne. In: Revue de l'histoire des religions, tome 186, n°2, 1974. pp.
149-183;
doi : https://doi.org/10.3406/rhr.1974.10217
https://www.persee.fr/doc/rhr_0035-1423_1974_num_186_2_10217
Le Grand Œuvre
liturgie de l'alchimie chrétienne*
* Cette étude, sous une forme moins élaborée, faisait partie d'une thèse
de lettres intitulée Dom Jean-Albert Belin, évêque et alchimiste du XVIIe siècle
et soutenue en juin 1973.
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« Le grand œuvre des Sages tient le premier rang entre les belles
choses, la Nature sans l'Art ne le peut achever, l'Art sans la Nature
ne l'ose entreprendre, et c'est un Chef-d'œuvre qui; borne la
puissance des deux ; Ses effets sont si miraculeux, que la santé qu'il
procure et conserve aux vivants, la perfection qu'il donne à tous les
composez de la Nature, et les grandes richesses qu'il produit d'une
façon toute divine, ne sont pas ses plus hautes merveilles. Si Dieu l'a-
fait le plus parfait agent de la Nature, l'on peut dire sans crainte qu'il
a receu le mesme pouvoir du Ciel pour la Morale. S'il purifie les corps,
il éclaire les esprits, s'il porte les mixtes au plus haut point de leur
perfection, il peut eslever nos entendemens jusques aux plus hautes
connoissances ; d'où vient que plusieurs Philosophes ont reconnu
en cet ouvrage un symbole accomply des plus adorables mystères
de la Religion : II est le Sauveur du grand monde, puisqu'il purge
s
1) Cf. notre thèse de lettres (Sorbonně, juin 1973), Dom Jean-Alberl Belin,
évê.que et alchimisle du XVIIe siècle, Ire partie, chap. 2.
2) Saint-Gall, Staatsbibliotek, manuscrit 397.
3) Nicolas Niger Hapelius, Cheiragogia Heliana, in Zetzner, 1659, V,
p. 281 : « Addam et aliud (testamentům) monachi monstrosissimi Franciscani,
quid ad Burgravium Fredericum, marchionem Brandenburerensem anno 1419
scripsit Constanciae tractatum germanicum : sed liber impressus non est multis
de causis. »
4) W. Ganzenmuller, Das Buch der Heiligen Dreifaltigheit..., in Archiv,
f. Kultur Geschichle, XXIX, 1939, p. 99-146.
7>) Munich Bayerische Staatsbibliotek, manuscrit allemand, 59H.
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1) Cf. D. J.-A. Belin, évêque et alchimiste du XVIIe siècle, lre partie, chnp. 2.
2) Cf. Salmon, Bibliothèque des Philosophes (Chijmiques), Paris, 1672, II,
182.
3) Zeilschrifl f. Angewandte Chemie, XLVIII, 1935, p. 761-772.
4) Outre ceux déjà mentionnés, cf. ci-dessus ri. 2 et 3 : Wolfenbiittel (Helm-
stedt, 443) ; Berlin Kupferlischkabinell, manuscrit 78- A- 1 1 ; Dresde Slaatsbibliolek
(Kat, III, 110); Heidelberg, Pal. jrerm., Я43, f. 3; Donaueschinjren,
manuscrit 811 ; Nuremberg fîermanische Museum (cf. Peters in Mitteilungen des
Germ. Nat. Museums, 1893, p. 98). On en trouve encore des copies jusqu'au
xviie siècle : cf. Duvf.en, Le Livre de la Sainte-Trinité, in Ambix, mai Í948,
p. 26-33 ; S. de Guaïta, Essais de sciences maudites. La clef de la magie noire,
Paris, 1897, p. 702.
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1) (l.-(i. Jung a écrit sur ce sujet plus de 100 pages dans Psychologie et
alchimie. Cet ouvra sre ainsi que les Racines de la conscience sont principalement
centrés sur des comparaisons entre foi chrétienne (et plus spécialement
catholique) et alchimie. Nous précisons que nous ne reprendrons pas ce travail, ce
serait inutile, puisqu'il est remarquablement traité. Nous nous contentons
d'étudier des auteurs que Jung n'a pas mentionnés et de tirer des conclusions
qu'il n'a pas soulignées comme nous le croyons nécessaire. Pour une étude de
l'attitude du magistère ecclésiastique vis-à-vis de l'alchimie et des alchimistes,
cf. D. J.-A. Belin, évêque et alchimiste du XVIIe siècle, lre partie.
2) Alchymista christianus, chap. XXVIII, p. 196 sq. : « De Sacramento
Eucharistiae ac eius Symbolis et figuris quae apud Chymicus reperiuntur. »
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1) Psaumes, VIII.
2) Le sacré et le profane, Paris, 1971, Gallimard, collect. « Idées », p. П7.
3) Ibid., p. 70.
4) « Tous les Philosophes Hermétiques disent «pie quoique le Grand Œuvre
soit une chose naturelle, et dans sa matière, et dans ses opérations, il s'y passe
cependant des choses si surprenantes, qu'elles élèvent infiniment l'esprit de
l'homme vers l'auteur de son être, qu'elles manifestent sa sagesse et sa gloire,
qu'elles sont beaucoup au-dessus de l'intelligence humaine, et ceux-là seuls les
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comprennent, à qui Dieu daigne ouvrir les yeux... » Dom Antoine Joseph
Pernety, Fables égyptiennes et grecques, Paris, 1786, t. I, p. 7.
« Loué soit Dieu éternellement, qui nous a fait la grâce de voir cette belle et
parfaite couleur de pourpre... qui est incapable de changement et d'altération :
sur laquelle le Ciel même et son Zodiaque ne peuvent plus avoir domination ni
puissance, dont l'état rayonnant et éblouissant semble en quelque façon
communiquer à l'homme quelque chose de surcéleste, le faisant, quand il la contemple
et connaît, étonner, trembler et frémir en même temps. О Seigneur, faites-nous
la grâce que nous en puissions bien user à l'augmentation de la Foi, au profit de
notre Ame et accroissement de la Gloire de ce noble Royaume. Ainsi soit-il. »
Nicolas Flamel, Livre des figures hiéroglyphiques, Bibliothèque des Philosophes
chimiques, 1741, p. 60.
1) II suffît de penser au jeu de mots tant de fois répété :
Laboratoire-Oratoire, Laborarc-Orare.
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1) (Л. la dernière phrase du traité édité (et attribué à Frère Elie d'Assise)
par Penot in Traclatus varii... (édition augmentée, Bâle 1616) : « medicína :
quia septem dieruni spatio opus omne comprehenditur ; haec réitéra, hoc bene
stilla, per se ipsum rursus manet ordo dierum et annorum. Finis ».
2) « Dieu est un cercle dont le centre est partout, la circonférence nulle
part » et la confession de foi de Tertullien credo quia absurdum ont « tordu son
cou •> à la logique aristotélicienne en l'ayant mené à son achèvement.
L'illuminé qui n'iarnore plus rien, connaît l'humilité. Il est situé au centre, le temps
ni l'espace, qu'il habite, ne sont plus les nôtres.
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1) Rom., X, 4.
2) Gen., II, 9 ; Apoc, XXII, 2.
3) Exode, XXIX, 39 ; Mat., V ; Др., I, 8 ; Eph., IV, 9 ; Apoc, VII, 12 ; etc.
4) Durant le « Lavabo » de la messe.
5) Durant la « Consécration eucharistique » de la messe.
6} A. G. Martimort et A. Honoré, in Missel quotidien des fidèles, Tours,
1955, p. xvii.
LITURGIE DE L'ALCHIMIE CHRÉTIENNE 181
V, Ibid.
*2; L'alchimiste veut être celui qui, p;)r son art, relie eu harmonie la Sagesse
des hommes et l'Ordre de la nature. Il veut se rattacher à l'Univers car la nature
ne forme qu'un seul récrie. Il désire manifester cette harmonie qu'il a pressentie
dans les signatures des choses et qu'il croit être le dessein (lu Créateur. Il tend
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