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1 Les suites

1.1 Définition, exemples, limites

Je ne donne que de brefs rappels. Pour plus de détails : cours AN2, notes de cours en
ligne, Godement, Buff.

1
Définition 1.1. Un nombre l est limite d’une suite (un ) si :

∀ > 0 ∃N ∀n ≥ N |un − l| < .

Une suite convergente est bornée.


La réciproque est fausse. Exemple : (un )n = (−1)n , (un )n = cos(n).

Proposition 1.2. Soient (un )n une suite convergente, l sa limite et a un nombre > l. Il
existe un rang N tel que pour tout n > N on ait un < a.

1.2 Suites extraites, valeurs d’adhérence

Suites extraites. Bolzano-Weierstrass. Limsup. Liminf. Valeurs d’adhérence. Impor-


tance de bien distinguer l’ensemble des valeurs de la suite et la suite elle même.

Définition 1.3. Un nombre a est valeur d’adhérence d’une suite (un ) si :

∀ > 0 ∀N ∃n ≥ N |un − a| < .

Comparer cette définition à celle de limite. Exemples : (−1)n , sin n, in .

Définition 1.4. Soit (un )n une suite. On appelle suite extraite de (un )n une suite (vn )n
définie par vn = uφ(n) où φ : N → N est strictement croissante.

Exemples : (un )n = (−1)n ; vn = u2n définit une suite extraite (φ(n) = 2n), wn = un2
aussi ((φ(n) = n2 ). Exercice : les suites (un )n et (wn )n sont égales.

Proposition 1.5. Soient (un )n une suite et a un nombre réel. Le nombre a est une
valeur d’adhérence de la suite (un )n si et seulement si il existe une suite extraite de (un )n
convergeant vers a.

Proposition 1.6. Si une suite converge alors les suites extraites aussi vers la même
limite.

Soit (un )n une suite bornée. Soit M tel que pour tout nN on ait

−M ≤ un ≤ M.

Considérons l’ensemble {uk | k ≥ p}. C’est un sous-ensemble de {uk | k ≥ 0} donc un


ensemble borné. Il admet donc une borne supérieure et une borne inférieure. Posons

vp = sup{uk | k ≥ p} wp = inf{uk | k ≥ p}.

Comme {uk | k ≥ p} ⊂ {uk | k ≥ p + 1} on a

vp+1 ≤ vp wp+1 ≥ wp .

2
Par ailleurs M est un majorant de {uk | k ≥ p} pour tout p et −M un minorant de
{uk | k ≥ p} pour tout p. On a donc, pour tout p,

−M ≤ wp ≤ vp ≤ M.

La suite (vp )p (resp. (wp )p ) est donc décroissante minorée (resp. croissante majorée). On
en déduit que les deux suites (vp )p et (wp )p sont convergentes. On appelle limite supérieure
et limite inférieure leurs limites.

Définition 1.7. Soit (un )n une suite bornée. On appelle limite inférieure, notée lim inf un ,
et limite supérieure de (un )n , lim sup un les quantité finies

lim inf un = lim inf{uk | k ≥ p} lim sup un = lim sup{uk | k ≥ p}.


p p

Théorème 1.8. (Bolzano-Weierstrass) Une suite réelle bornée a une sous-suite conver-
gente.

DémonstrationDeux démonstrations : dichotomie ou limsup.

Proposition 1.9. Soit (un )n une suite bornée. Les nombres lim inf un et lim sup un sont
respectivement la plus petite et la plus grande des valeurs d’adhérence de (un )n .

En particulier une suite bornée (un )n est convergente si et seulement si lim inf un =
lim sup un .

Proposition 1.10. Toute suite bornée qui n’a qu’une seule valeur d’adhérence est conver-
gente.

1.3 Écritures décimales des nombres réels

2,7 milliards de décimales de π sont connues aujourd’hui. Montrons que tous les
nombres réels ont un développement décimal. Soit x un élément de [0, 1[. On peut écrire

10x = E(10x) + {10x}

où E désigne la partie entière et { } la partie fractionnaire. Posons a1 = E(10x) ∈


{0, 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9} et x1 = {10x} ∈ [0, 1[. Recommençons avec x1 à la place de x :

10x1 = E(10x1 ) + {10x1 } = a2 + x2

avec a2 = E(10x1 ) ∈ {0, 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9} et x2 = {10x1 } ∈ [0, 1[. On définit ainsi par


récurrence une deux suites en posant pour tout k, ak+1 = E(10xk ) ∈ {0, 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9}
et xk+1 = {10xk } ∈ [0, 1[.
Pour tout k on a
ak+1 xk+1
xk = + .
10 10
3
On en déduit
a1 x 1 a1 a2 x2
x= + = + 2+ 2
10 10 10 10 10
puis par récurrence
k
a1 a2 ak xk X aj xk
x= + 2 + ... + k + k = j
+ k.
10 10 10 10 j=0
10 10

aj
Comme xk ∈ [0, 1[ on en déduit que 0 ≤ x − kj=0 1
P
10j
≤ 10k
. D’où, en faisant tendre k
vers l’infini ∞
X aj
x= j
.
j=0
10

Ce résultat donne une autre preuve de la densité de l’ensemble des décimaux (donc des
rationnels) dans R.
Quels sont les nombres dont le développement décimal est périodique à partir d’un
certain rang ?
Tous les nombres réels ont donc un développement décimal. Mais chaque nombre
pourraient en avoir plusieurs, dont certains avec des propriétés particulières, ou certaines
suites pourraient n’être le développement d’aucun nombre. Ce n’est pas le cas.
D’une part, si (ak )k est une suite quelconque de nombres dans {0, 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9}
P k
Pk k
la série à termes positifs k≥1 ak /10 est convergente (car la suite ( k=1 ak /10n est
croissante majorée par 1). D’autre part considérons (ak )k et (bk )k deux développements
différents d’un même nombre x. Soit k0 le premier indice pour lequel ak 6= bk ; on peut
supposer ak0 > bk0 , donc ak0 ≥ bk0 + 1. L’égalité x = ∞
P aj P∞ bj
j=0 10j = j=0 10j entraîne

∞ ∞
X ak X bk
k
= .
k
10 k
10k
0 0

Mais ∞
P bk k0
k0 10k ≤ (bk0 + 1)/10 avec égalité si et seulement si tous les bj pour j ≥ k0 + 1
sont égaux à 9. L’égalité ci-dessus n’a lieu que si ak0 = bk0 + 1, et pour j ≥ k0 , aj = 0,
bj = 9. En conclusion, les seuls nombres qui ont deux développements décimaux sont les
nombres décimaux. Ils ont deux développements : l’un se termine par des 0 (on l’appelle
développement propre), l’autre par des 9.

1.4 La méthode de Héron pour l’approximation des racines par


une fraction

On dispose d’un alogorithme très efficace pour approcher 2 par des nombres ra-
tionnels. Le principe est très simple. On peut le décrire géométriquement. Partons d’un
rectangle d’aire 2 de côtés 1 et 2. On essaye de modifier le rectangle pour le rendre le plus

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carré possible en conservant son aire. Rectangle R0 . Rectangle R1 . On prend la moyenne
arithmétique des longueurs des cotés de R0 et 2 divisée par cette moyenne. Et on recom-
mence. Notons Ln la longueur du grand côté de Rn , ln la longueur du petit. Pour tout

n ln et Ln sont rationnelles. On a Ln > ln et ln Ln = 2 donc Ln > 2 > ln . De plus on
a (Ln + ln )/2 > 4/(Ln + ln ) soit (Ln + ln )2 > 8. En effet (Ln + ln )2 = (Ln + 2/Ln )2 et
√ √
sur R∗+ la fonction x 7→ x + 2/x est minimale en 2 de minimum 2 2. La suite (Ln ) est
donc définie par la récurrence L0 = 1, Ln+1 = Ln + 2/Ln . L’exercice 30 montre que la
convergence est très rapide.
Extension de la méthode.

1.5 Dénombrabilité ; paradoxe de Russel

Soit E un ensemble. Il n’existe pas de surjection de E sur l’ensemble des parties de E.

Supposons qu’une surjection φ : E → P(E) existe. Considérons alors la partie A de


E défini par
A = {x ∈ E / x ∈
/ φ(x)}
L’application φ étant surjective, il existe a ∈ E tel que A = φ(a). Alors si a ∈ φ(a), a ∈
/A
(par définition de A), i.e. a ∈
/ φ(a) (car A = φ(a)) ; et si a ∈
/ φ(a), a ∈ A (par définition
de A), i.e. a ∈ φ(a). La supposition faite est donc absurde.
Paradoxe du barbier. On peut énoncer le paradoxe ainsi : Le conseil municipal d’un
village arrête une ordonnance qui enjoint à son barbier (masculin) de raser tous les ha-
bitants masculins du village qui ne se rasent pas eux-mêmes et seulement ceux-ci. Le
barbier, qui est bien un habitant du village, n’a pas pu respecter cette règle car :
S’il se rase lui-même, il enfreint la règle, car le barbier ne peut raser que les hommes qui
ne se rasent pas eux-mêmes ;
S’il ne se rase pas lui-même (qu’il se fasse raser ou qu’il conserve la barbe), il est en tort
également, car il a la charge de raser les hommes qui ne se rasent pas eux-mêmes.
Cette règle est donc inapplicable. S’agit-il pour autant d’un paradoxe ? Il n’y a aucune
raison de penser qu’un conseil de village ou toute autre instance ne puisse rendre une
ordonnance absurde. De fait, loin d’être une antinomie logique, ce ń paradoxe ż montre
simplement qu’un barbier respectant cette règle ne peut exister.
L’ensemble R n’est pas dénombrable : il a plus d’éléments que N.

5
1.6 La méthode de Cantor

Cantor 1 a démontré que R n’est pas dénombrable en utilisant les développements


décimaux des nombres réels.
Supposons que [0, 1[ soit dénombrable. Alors on peut écrire

[0, 1[= {xn | n ∈ N N }.

Chacun des nombres xn admet un développement décimal propre :


∞ (n)
X aj
xn = .
j=0
10j

Considérons alors la suite (bj )j de la façon suivante


(j) (j)
bj = 0 si aj 6= 0, 2 si aj = 0.

La somme y = ∞
P bj
j=0 10j définit un élément de [0, 1[ qui n’est égal à aucun des xn (car le
nième chiffre après la virgule de y est différent du nième chiffre après la virgule de xn et
que le nombre y a un unique développement décimal). A détailler.

1. Voir la note historique plus bas

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7
2 Les séries

2.1 Quelques rappels : définition, convergence

1) On dit qu’une série converge si la suite des sommes partielles (somme jusqu’à n)
est convergente, qu’elle diverge si elle ne converge pas.
2) Si un ne tend pas vers 0 alors la série de terme général un diverge.
3) La série de terme général xn converge si et seulement si le module de x est strictement
inférieur à 1.
4) La série de terme général n−a converge si et seulement si a>1.
5) Une série est dite absolument convergente si la série des valeurs absolues est conver-
gente. Si une série est absolument convergente elle est convergente.
6) Si 0 ≤ un ≤ vn et la série de terme général vn est convergente alors la série de terme
général un est convergente. Si 0 ≤ un ≤ vn et la série de terme général un diverge alors la
série de terme général vn diverge.
7) Pour les séries à termes positifs, si un+1 /un tend vers 0 ≤ l < 1 alors la série converge.
Si un+1 /un tend vers l > 1 alors la série diverge. C’est le critère de d’Alembert (pour l = 1
ou si un+1 /un ne converge pas ce critère ne dit rien).
(
8) Pour les séries à termes positifs, si un 1/n) tend vers 0 ≤ l < 1 alors la série converge.
(
Si un 1/n) tend vers l > 1 alors la série diverge. C’est le critère de Cauchy (pour l = 1 ou
(
si un 1/n) ne converge pas ce critère ne dit rien).
9) Si (−1)n un est de signe constant et la valeur absolue de un décroît vers 0 alors la série
converge. C’est le critère des séries alternées.

La première chose à vérifier est que le terme général tend vers 0 : si ce n’est pas le cas
la série diverge 2). Le 6) est un critère de comparaison qui ne marche que pour les série
à termes positifs. Pour étudier une série, on commence par étudier la série des valeurs
absolues associée. Si elle converge alors la série converge d’après 5). Ensuite, pour la série
des valeurs absolues, on peut utiliser les critères 6) 7) 8) et comparer aux séries de la
forme 3) ou 4). Si la série des valeurs absolues diverge alors les choses se compliquent. On
reconnaît parfois qu’on peut appliquer le critère des séries alternées.
Exemples : 1/(1 + xn ).
Si la valeur absolue de x est ≤ 1 alors le terme général ne tend pas vers 0 donc la série
diverge (pour x = −1 le terme général n’est même pas défini une fois sur deux). Si la valeur
absolue de x est >1, étudions le quotient des valeurs absolues de 1/(1 + x( n + 1)) et de
(1/1+xn ) i.e. la valeur absolue de 1+xn /1+x( n+1) = x( −1).(1+x( −n))/(1+x( −n−1)).
La valeur absolue de ce quotient converge vers l’inverse de la valeur absolue de x c’est-
à-dire vers un nombre < 1. Le critère de d’Alembert assure donc que la série des valeurs
absolues converge, donc que la série converge (5)).
1 + sin(πn)/n

8
Le sinus est nul. Le terme général ne tend donc pas vers 0 et la série diverge.
cos(npi)n( − 3/4)
Le cos vaut (−1)n . La série des valeurs absolues diverge (4)). On peut appliquer le critère
des séries alternées. La série est convergente.

2.2 Produits de séries

Développement d’un produit de deux sommes. Soit à développer le produit (a0 + a1 +


a2 )(b0 + b1 + b2 ). Plusieurs écritures sont possibles. Par exemple :

(a0 + a1 + a2 )(b0 + b1 + b2 ) = a0 b0 + a0 b1 + a0 b2 + a1 b0 + a1 b1 + a1 b2 + a2 b0 + a2 b1 + a2 b2
= a0 b 0 + a0 b 1 + a1 b 0 + a0 b 2 + a1 b 1 + a2 b 0 + a1 b 2 + a2 b 1 + a2 b 2

Pour la première ligne on a écrit d’abord tous les termes avec a0 , puis avec a1 , puis
a2 . Cette écriture permet facilement de n’oublier aucun de neuf termes du produit. La
deuxième ligne est organisée différemment : on a écrit les produits par ordre de sommes
d’indices croissantes : somme 0 (a0 b0 ), somme 1 (a0 b1 et a1 b0 ), somme 2 (a0 b2 , a1 b1 , a2 b0 ),
somme 3 (a1 b2 , a2 b1 ), somme 4 (a2 b2 ).
C’est cette façon de ranger qu’on adopte naturellement quand on fait un produit de
polynômes parce qu’on regroupe les termes qui donne la même puissance de X.

Xd Xd 2d
X
k k
( ak X )( bk X ) = ck X k ,
k=0 k=0 k=0

où ck = kl=0 al bk−l . Remarque : les deux polynômes n’ont pas nécessairement le même
P

degré mais quitte à considérer que certains coefficients sont nuls, on peut toujours écrire
le produit de deux polynômes sous cette forme. On n’est pas forcé de le faire non plus. Et
ça ne change pas grand chose ici :
d d 0 d+d 0
X X X
( ak X k )( bk X k ) = ck X k ,
k=0 k=0 k=0

où ck = kl=0 al bk−l . Illustrons par trois dessins trois manières différentes de développer
P

le produit
X8 X8
( ak )( bk ).
k=0 k=0

Ce produit est la somme de tous les produits ai bk lorsque i et k varient de 0 à 9. Il y a 81


tels produits qu’on peut placer sur une grille. La somme peut être faite dans n’importe
quel ordre. Certains ordres sont faciles à représenter.

9
On peut écrire par exemple :

X8 X8 8 X
X 8 8
X 8
X
( ak )( bk ) = ( ai b k ) = ai ( bk ).
k=0 k=0 i=0 k=0 i=0 k=0

Cela revient à faire la somme des sommes des lignes comme sur le dessin suivant.

On peut aussi faire la somme en commençant par sommer les colonnes :

10
Mais d’autres façons de grouper les termes sont possibles. Par exemple le dessin
iffi
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"
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On obtient
a--
correspond à l’écriture
X8 X8 16 X
X k
( ak )( bk ) = ( ai bk−i ),
k=0 k=0 k=0 i=0

avec la convention bj = 0 si j > 8.


Exercice : À quelle écriture correspond un groupement des produits suivant des seg-
ments parallèles à l’autre diagonales du carré ?
Considérons maintenant le cas de deux séries. On cherche à définir la somme de
nombres que l’on peut placer en tous les points à coordonnées entières du quart de plan des
points à coordonnées positives ou nulles. Comme vous le savez la définition de sommes
infinies pose des problèmes de convergence. Considérons l’exemple décrit par le dessin
suivant :

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Si on commence par sommer les colonnes on trouve 0. Si on essaye de commencer à
sommer par ligne on tombe sur des quantités divergentes ∞ 1 et ∞
P P
P∞ P∞ k=1 k=1 −1. On peut
écrire k=1 1 = +∞ et k=1 −1 = −∞. Mais on est bien embarrassé pour effectuer
la somme +∞ − ∞ (vous pourriez être tenté de convenir que cela fait 0 ; résistez à la
tentation). Faisons la somme en suivant les diagonales. On trouve alors 1+0+0+0+... = 1.
Conclusion : suivant qu’on somme dans tel ou tel ordre, on peut tomber sur des résultats
différents ou des quantités non définies. Dans une telle situation la somme de tous les
points ne peut avoir de sens que si on précise l’ordre dans lequel on somme.
Considérons le cas de deux séries à termes positifs ou nul ∞
P P∞
k=0 ak et k=0 bk .

Théorème 2.1. Soient ∞


P P∞
k=0 ak et P k=0 bk deux séries convergentes à termes positifs ou
nuls. Pour tout n ∈ N posons cn = nk=0 ak bn−k . Alors on a :

X X∞ ∞
X
( ak )( bk ) = ck .
k=0 k=0 k=0

Remarque : ce résultat est vrai pour les séries à termes positifs en général (convergentes
ou non). Si l’une des deux séries est divergente on écrit que sa somme est +∞ et on adopte
pour conventions +∞. + ∞ = +∞ et 0. + ∞ = 0. C’est naturel : pour qu’une somme de
termes positifs ou nuls soit nulle il faut que tous les termes de la somme soient nuls.
Démonstration

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P∞ P∞
Dire que les séries k=0 ak et k=0 bk sont convergentes c’est dire que les suites
Pn Pn
( a ) et ( b ) convergent (en croissant puisque les termes sont positifs) vers
P∞k=0 k n P∞ k=0 k n
k=0 ak et k=0 bk .

Le produit ( nk=0 ak )( nk=0 bk ) est la somme de tous les produit ak bl pour (k, l) ap-
P P

partenant au carré hachuré en noir.


Le produit ( 2n
P P2n
k=0 ak )( k=0 bk ) est la somme de tous les produit ak bl pour (k, l) apparte-
nant au carré hachuré en rouge.
La somme 2n
P
k=0 ck est la somme de tous les produit ak bl pour (k, l) appartenant au tri-
angle grisé.
Les nombres ak et al étant supposés positifs ou nuls, on a donc :
Xn Xn 2n
X X2n X2n
( ak )( bk ) ≤ ck ≤ ( ak )( bk ).
k=0 k=0 k=0 k=0 k=0

Mais, comme le produit de deux suites convergentes converge vers le produit des limites
les deux quantités ( nk=0 ak )( nk=0 bk ) et ( 2n ak )( 2n
P P P P
P∞ P∞k=0 k=0 bk ) convergent (lorsque n tend
vers l’infini) vers la même limite ( k=0 ak ).( k=0 bk ). Le théorème des gendarmes entraîne
P∞ P∞
donc que la suite ( 2n
P
k=0 ck )n converge vers ( k=0 ak ).( k=0 bk ). Toujours en raison de la
positivité des ak et bl on a aussi
2n
X 2n+1
X 2n+2
X
ck ≤ ck ≤ ck .
k=0 k=0 k=0

Les termes impairs de la suite convergent donc aussi vers la même limite.

Théorème 2.2. Soient ∞ ak et ∞


P P
Pn k=0 k=0 bk deux séries
P∞
absolument convergentes. Pour
tout n ∈ N posons cn = k=0 ak bn−k . Alors la série k=0 ck est absolument convergente
et on a : ∞ ∞ ∞
X X X
( ak )( bk ) = ck .
k=0 k=0 k=0

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DémonstrationPar hypothèse les séries ∞ |ak | et ∞
P P
P2n P2n Pn k=0 Pn k=0 |bk | sont convergentes. On
en déduit que ( k=0 |ak |)( k=0 |bk |) − k=0 |ak |)( k=0 |bk |) (qui correspond à la somme
de tous les produits |ak ||bl | pour (k, l) appartenant au carré hachuré en rouge mais pas
au carré hachuré en gris) temps vers 0 lorsque n tend vers l’infini. Mais grâce à l’inégalité
triangulaire on a :
2n
X Xn Xn X2n X2n n
X Xn
| ck − ( ak )( bk )| ≤ ( |ak |)( |bk |) − |ak |)( |bk |).
k=0 k=0 k=0 k=0 k=0 k=0 k=0

La différence 2n ck −( nk=0 ak )( nk=0 bk ) converge donc vers 0. Or le produit ( nk=0 ak )( nk=0 bk )


P P P P P
k=0
converge vers ( ∞ ak )( ∞
P P
k=0 k=0 bk ) (les séries absolument convergentes sont convergentes)
donc la suite k=0 ck converge vers ( k=0 ak )( ∞
P2n P∞ P P2n+1
k=0 bk ). Le fait que k=0 ck tende vers
la même limite est laissé en exercice.

2.3 Paradoxes de Zénon

Dans le paradoxe d’Achille et de la tortue, il est dit qu’un jour, le héros grec Achille a
disputé une course à pied avec le lent reptile. Comme Achille était réputé être un coureur
très rapide, il avait accordé gracieusement à la tortue une avance de cent mètres. Zénon
affirme alors que le rapide Achille n’a jamais pu rattraper la tortue. En effet, supposons
pour simplifier le raisonnement que chaque concurrent coure à vitesse constante, l’un très
rapidement, et l’autre très lentement ; au bout d’un certain temps, Achille aura comblé ses
cent mètres de retard et atteint le point de départ de la tortue ; mais pendant ce temps, la
tortue aura parcouru une certaine distance, certes beaucoup plus courte, mais non nulle,
disons un mètre. Cela demandera alors à Achille un temps supplémentaire pour parcourir
cette distance, pendant lequel la tortue avancera encore plus loin ; et puis une autre durée
avant d’atteindre ce troisième point, alors que la tortue aura encore progressé. Ainsi,
toutes les fois où Achille atteint l’endroit où la tortue se trouvait, elle se retrouve encore
plus loin. Par conséquent, le rapide Achille n’a jamais pu et ne pourra jamais rattraper
la tortue.
Le paradoxe suivant, celui de la pierre lancée vers un arbre, est une variante du pré-
cédent. Zénon se tient à huit mètres d’un arbre, tenant une pierre. Il lance sa pierre dans
la direction de l’arbre. Avant que le caillou puisse atteindre l’arbre, il doit traverser la
première moitié des huit mètres. Il faut un certain temps, non nul, à cette pierre pour se
déplacer sur cette distance. Ensuite, il lui reste encore quatre mètres à parcourir, dont
elle accomplit d’abord la moitié, deux mètres, ce qui lui prend un certain temps. Puis la
pierre avance d’un mètre de plus, progresse après d’un demi-mètre et encore d’un quart,
et ainsi de suite ad infinitum et à chaque fois avec un temps non nul. Zénon en conclut
que la pierre ne pourra frapper l’arbre qu’au bout d’un temps infini, c’est-à-dire jamais.
Dans le paradoxe de la flèche, nous imaginons une flèche en vol. À chaque instant,
la flèche se trouve à une position précise. Si l’instant est trop court, alors la flèche n’a

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pas le temps de se déplacer et reste au repos pendant cet instant. Maintenant, pendant
les instants suivants, elle va rester immobile pour la même raison. Si le temps est une
succession d’instants et que chaque instant est un moment où le temps est arrêté, le
temps n’existe donc pas. La flèche est donc toujours immobile à chaque instant et ne peut
pas se déplacer : le mouvement est impossible.
Remarque. Dans le deuxième paradoxe on considère une distance que l’on coupe une
infinité de fois : la moitié, le quart, le huitième, etc... Si on met bout à bout les morceaux
ainsi obtenus il ne semble pas surprenant qu’on retrouve le segment de départ. Si ? Le
paradoxe vient peut-être du fait qu’il n’exprime pas un découpage de la distance mais
du temps mis à la parcourir. Cela revient au même. Le dire de manière compliquée n’y
change rien.

2.4 Les ensembles dénombrables sont négligeables

Nous avons vu plus haut que l’ensemble des nombres réels était « plus gros »que
l’ensemble des nombres entiers. Nous avons vu aussi que l’ensemble des nombres rationnels
était dénombrable donc a le même « nombre »d’éléments que N. L’ensemble des nombres
rationnels est dense dans R.
Nous allons voir maintenant que les ensembles dénombrables de R sont négligeables.

Définition 2.3. Soit E une partie de R. On dit que E est négligeable si, pour tout  > 0,
il existe une réunion finie ou dénombrable d’intervalles (Ii ) telle que E soit incluse dans
la réunion des intervalles
E ⊂ ∪i Ii
et la somme des longueurs des intervalles Ii est inférieure à .

Commentaires : on dit que (Ii ) forme un recouvrement de E. Ce que dit la définition


c’est que pour chaque  on peut trouver une famille d’intervalles recouvrant E dont la
somme des longueurs est inférieure à . Les intervalles dépendent de .
Un ensemble constitué d’un seul point est négligeable. Prenons E = {a}. Soit  > 0.
L’intervalle ]a − /3, a + /3[ contient E et est de longueur 2/3 < .
Un ensemble fini est négligeable. Prenons E = {a1 , . . . , al }. Soit  > 0. Posons Ik =
]ak − /3l, ak + /3l[ pour k allant de 1 à l. La réunion des Ik contient évidemment E et
la somme des longueurs des intervalles est inférieure à l.2/3 = 2/3 < .
L’ensemble N est négligeable. On ne peut plus prendre des intervalles de longueurs
constantes. La somme des longueurs serait infinie. Il faut donc faire varier la longueur
des intervalles. Pour cela on utilise une série à termes positifs convergente. N’importe
quelle telle série permet de faire le raisonnement qui suit. La série géométrique de raison
1/2 de premier terme 1/2 (celle qui apparaît dans le paradoxe de Zénon) est un choix

16
agréable. Posons I0 =] − /4, /4[, I1 = 1 − /8, 1 + /8[, I2 =]2 − /16, 2 + /16[, I3 =
]3 − /32, 3 + /32[,... Ik =]k − /2k+2 , k + /2k+2 [. Alors on a bien

N ⊂ ∪k∈N Ik

et ∞ ∞
X X X X
k+2 k+1
m(Ik ) = 2./2 = /2 = 1/2k+1 = .
k∈N k∈N k=0 k=0

Le raisonnement fait ci-dessus ne dépend pas de l’emplacement des points de N. Le même


raisonnement marche pour n’importe quelle partie dénombrable de R. Par exemple l’en-
semble des nombres rationnels et l’ensemble des nombres décimaux sont négligeables dans
R. Cela surprend car ce sont des ensembles denses mais c’est bien le cas.

17
3 La fonction exponentielle
La fonction exponentielle comme solution de f 0 = f . C’est la définition adoptée dans
la classe de terminale (avec exp(0) = 1). Problème de l’existence, problème du calcul.
La fonction exponentielle comme fonction réciproque de la fonction ln. C’est la défi-
nition adoptée en classe de terminale avant 2002. Problème : existence de la fonction ln
(primitive de 1/x).

3.1 La fonction exponentielle comme somme d’une série

Pour tout x ∈ R, la série



X xk
k=0
k!
converge.
Par convention, pour tout x, on pose x0 = 1 et 0! = 1. Pour x = 0, la somme vaut 1.
Pour x 6= 0 montrons que la série est absolument convergente. Le quotient

|xk+1 |/(k + 1)! |x|


k
=
|x |/k! k+1

converge vers 0 ; le critère de d’Alembert s’applique.


Nous pouvons donc considérer la fonction φ définie par :

X xk
φ(x) = .
k=0
k!

Proposition 3.1. La fonction φ est continue sur R.

DémonstrationSoit x ∈ R,  > 0.
Prenons N ∈ N tel que

X (|x| + 1)k
< /3.
k=N +1
k!
P∞ (|x|+1)k
Un tel N existe car la série k=0 k!
converge.
Prenons η ∈]0, 1[ tel que, pour |y − x| < η, on ait
N N
X yk X xk
| − | < /3.
k=0
k! k=0
k!
PN yk
Un tel η existe car la fonction polynôme y 7→ k=0 k! est continue.

18
Alors, en grâce à l’inégalité triangulaire et au fait qu’on a choisi η < 1, pour |y−x| < η,
on a
N N ∞ ∞
X yk X xk X yk X xk
|φ(y) − φ(x)| ≤ | − |+| |+| |
k=0
k! k=0
k! k=N +1
k! k=N +1
k!
∞∞ k
|y| X X |x|k
≤ /3 + +
k=N +1
k! k=N +1
k!

X (|x| + 1)k
≤ /3 +
k=N +1
k!
≤ /3 + 2/3
≤ .

Proposition 3.2. La fonction φ est dérivable égale à sa dérivée.

DémonstrationLa preuve repose sur l’identité remarquable

Xk−1
k k
y − x = (y − x)( y j xk−j ).
j=0

Pour y 6= x, on a
P∞ yk (y−x)k
− ∞
P xk
P∞
φ(y) − φ(x) k=0 k! k=0 k! k=1 k!
= = ,
y−x y−x y−x

(attention au traitement particulier des deux premiers termes qui valent tous deux 1) et
l’identité remarquable permet d’écrire
∞ Pk−1
φ(y) − φ(x) X j=0 y j xk−j
= .
y−x k=1
k!

Soit x ∈ R,  > 0.
Prenons N ∈ N tel que

X (|x| + 1)k
< /3.
k=N
k!
P∞ (|x|+1)k
Un tel N existe car la série k=0 k!
converge.
Prenons η ∈]0, 1[ tel que, pour |y − x| < η, on ait
N Pk−1 N
X j=0y j xk−j X xk−1
| − | < /3.
k=1
k! k=1
(k − 1)!

19
Pk−1
j=0 y j xk−j
Un tel η existe car la fonction polynôme y 7→ k!
est continue.
Alors, en grâce à l’inégalité triangulaire et au fait qu’on a choisi η < 1, pour |y−x| < η,
on a
∞ Pk−1 j k−j ∞
φ(y) − φ(x) j=0 y x xk−1
X X
| − φ(x)| ≤ | − |
y−x k=1
k! k=1
(k − 1)!
N Pk−1 j k−j N ∞ Pk−1 j k−j
j=0 y x xk−1 j=0 y x
X X X
≤ | − |+| |
k=1
k! k=1
(k − 1)! k=N +1
k!

X xk−1
+| |
k=N +1
(k − 1)!

X (|x| + 1)k
≤ /3 + 2
k=N
k!
≤ .

Définition 3.3. On appelle fonction exponentielle la fonction



X xk
exp(x) = .
k=0
k!

Elle vaut 1 en 0, est de classe C ∞ et égale à sa dérivée.

3.2 Exponentielle d’une somme

Proposition 3.4. Pour tous x, y nombres réels, on a

exp(x)exp(y) = exp(x + y).

DémonstrationC’est une conséquence des propriétés des produits de séries. On a :


∞ ∞
X xk X y k
exp(x)exp(y) = ( )( ).
k=0
k! k=0
k!

Les deux séries sont absolument convergentes donc on a


∞ ∞ ∞
X xk X y k X
( )( )= ck
k=0
k! k=0 k! k=0

avec
k k
X xj y k−j 1 X k!
ck = = xj y k−j .
j=0
j! (k − j)! k! j=0 j!(k − j)!

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On reconnaît le développement de (x + y)k donné par la formule du binôme. On a donc
k
ck = (x+y)
k!
et

X (x + y)k
exp(x)exp(y) = = exp(x + y).
k=0
k!
Remarque : ces calculs n’utilise pas le fait que x et y sont réels. La formule est encore
valable pour x et y complexes par exemple.

3.3 Les fonctions sin et cos

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