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Bellamy David. Geoffroy de Montalembert Un notable normand. In: Études Normandes, 47e année, n°4, 1998. A travers
l'histoire normande. pp. 65-88;
doi : https://doi.org/10.3406/etnor.1998.2365
https://www.persee.fr/doc/etnor_0014-2158_1998_num_47_4_2365
Un notable normand
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représentants participèrent activement à la vie politique locale au XIXe siècle.
C'est ainsi d'une tradition familiale extrêmement riche que naît Geoffroy de
Montalembert. Il en est conscient très tôt, tant l'oeuvre éducatrice de ses parents
vise à lui en faire intégrer les divers composants. Ce cahier, dont nous avons
déjà parlé, rédigée par sa mère au début du XXe siècle, en est un instrument
exemplaire. Ayant eu son enfant à un âge avancé, elle craint de ne pouvoir
l'accompagner pendant sa jeunesse et met par écrit, à l'intention de son fils,
"quelques souvenirs de famille, quelques méditations sur ceux qui vous ont
précédé ; afin que vous sachiez combien de précieuses traditions vous
entourent, d'admirables exemples vous servent de modèles"6. On l'aura compris,
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Par ce cahier, par les récits qui ont dû bercer son enfance, Geoffroy de
Montalembert connut, très jeune, les actions et les œuvres de ses ancêtres. Elles
furent surtout des exploits militaires. Les exemples abondent à toutes les
époques. "Il est facile, à travers les siècles, sur tous les grands champs de
bataille, de suivre les Montalembert à la trace du sang qu'ils ont versé pour leur
pays" écrit le révérend père Lecanuet dans sa biographie de Charles de
Montalembert7, parue peu de temps avant la naissance de Geoffroy et dont on
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une carrière militaire brisée par la maladie, l'implantation locale de Geoffroy de
Montalembert père l'avait amené à devenir maire de la petite ville d'Annappes
puis conseiller général. Elu député en 1889 dans la 6e circonscription de Lille, il
fut réélu en 1893, 1898 et 1902. Monarchiste, il rallia la République9 comme le
70
prouvent ses professions de foi à partir de 1893, mais il fut toujours un opposant
aux gouvernements successifs et, appelant de ses voeux "un gouvernement
national, solide et respecté", il se baptisait lui-même candidat du parti de l'ordre.
En 1906, il ne se représente pas. Dans son cahier, Madame de Montalembert
explique qu'il a été découragé par l'action du gouvernement et les agissements
des députés. Geoffroy connut peu son père dans la charge de député puisqu'il
n'avait pas 8 ans quand celui-ci abandonna le Palais Bourbon mais on peut
penser que cette expérience lui fut racontée par ses parents et qu'un portrait du
député vertueux, soucieux de l'intérêt du pays, de la paix civile et de l'unité de la
nation lui fut dressé. Il vit par contre beaucoup plus longtemps son père exercer
sa charge de maire. Comment ne pas penser que cela le marqua
considérablement quand on constate qu'il en prit la suite et considéra toujours la
responsabilité municipale comme la plus exaltante ?
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L'implantation en Normandie
Très vite, les relations internationales dominent les débats. S'il se félicite des
accords de Munich, il n'en exprime pas moins sa lucidité inquiète devant ce
qu'il sait être une reculade. Il estime que le pays n'était pas prêt pour agir
autrement et ne croit pas à la sincérité de Hitler. Il conclut que si la France a été
acculée à ces accords c'est parce que, depuis 1918, ses dirigeants n'ont pas eu le
courage de regarder la situation en face et de se préoccuper d'empêcher la force
renaissante de l'Allemagne. Il rejoint très clairement les reproches exprimés par
François de Wendel14.
Pendant la "drôle de guerre", Geoffroy de Montalembert multiplie les
interventions en faveur de ses concitoyens, ici pour obtenir le retour de
mobilisés nécessaires aux travaux agricoles, là pour demander des allocations
militaires etc. En pleine débâcle, il obéit aux ordres de repli adressés au
parlementaires avant de revenir à Ermenouville, pris dans les combats de Saint
Valéry-en-Caux, puis de se rendre à Vichy au début de juillet 1940. Là, contre
l'avis de son béau-père et pour suivre son groupe, il vote les pleins pouvoirs au
maréchal Pétain. Le Parlement mis en sommeil, il se retire, dans son village,
dans un exil intérieur très occupé pour un ex-député sollicité de toutes parts par
les populations en grandes difficultés. C'est un énorme travail d'aide et de
soutien qu'il mène alors, avec son épouse, comme délégué départemental de la
Croix Rouge.
Que sait-on de l'évolution de ses sentiments politiques pendant le conflit ?
Dans une lettre de mai 1941, il précise sa position de juin 1940 : "Admettre
l'armistice dans l'honneur, pas davantage !". A aucun moment, son vote de
juillet 1940 ne l'entraîna vers la collaboration. Il reste fermement anti-allemand.
Il n'entre dans aucune des organisations et institutions mises en place par Vichy.
Si, jusqu'en 1941, il partage le maréchalisme de la très grande majorité des
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il rend possible une véritable communion de pensée avec ses concitoyens.
Cette forte implantation locale avait également pour base et pour
manifestation une présence très active dans sa région. Même en période de
session parlementaire, il passait à Ermenouville ses fins de semaines. Son
emploi du temps y était très chargé. Ses archives montrent qu'il assistait à un
nombre considérable de réunions publiques, foires agricoles, fêtes de la mer,
cérémonies diverses etc. Homme de terrain, il multipliait ainsi les contacts avec
les populations, faisant preuve d'une grande simplicité et d'un contact facile
avec ses concitoyens. Combien de fois n'a-t-il pas raconté, pour faire sourire ses
collègues du palais du Luxembourg, des anecdotes puisées sur les marchés
cauchois ou dans les concours agricoles, imitant merveilleusement l'accent des
paysans et invitant les sénateurs à trouver dans ces scènes de la vie quotidienne
un exemple de bon sens ? Sa présence se manifestait également par le rôle qu'il
avait dans un très grand nombre d'organismes locaux, sociaux, culturels,
agricoles, d'anciens combattants et autres.
en juin 1937 au Palais Bourbon, lors d'une discussion d'un projet de loi relatif à
la prophylaxie de la fièvre aphteuse, ou en février 1947 au Conseil de la
République, pour inviter le gouvernement à prendre d'urgence des mesures afin
de permettre aux paysans de pouvoir commencer à épandre les engrais de
printemps et en particulier l'azote, ou encore, au hasard des annales du Sénat, en
décembre 1974 sur la crise du marché de la viande et sur le prix de la betterave
à sucre, ou en novembre 1987 sur la compensation par l'Etat des exonérations
de taxes foncières sur les propriétés non bâties pour le reboisement etc. Dans ce
domaine de son activité, Geoffroy de Montalembert apparaît bien encore
comme le fruit d'une tradition familiale et singulièrement comme le
continuateur de l'oeuvre que son père avait menée dans le Nord à partir de ses
propriétés. C'est, lui, d'une terre normande particulièrement chérie -il y repose
sous un simple tertre-qu'il poursuivit dans cette voie.
De son père, il avait également hérité son sang aristocratique. Cela se traduit
par un mode de vie particulier et, tout d'abord, par la possession d'un château.
Quittant le Nord, Geoffroy de Montalembert s'installa définitivement dans celui
des Clercy à Ermenouville et y vécut jusqu'à sa mort. C'est avec un véritable
déchirement qu'il dut se séparer, à la fin des années 1960 du domaine et du
château d'Annappes, en raison de la création de la ville nouvelle de Villeneuve-
d'Ascq. Les bâtiments avaient très mal supporté la réquisition par les Allemands
pendant la Seconde Guerre mondiale puis l'occupation par les Britanniques à la
Libération. Des deux châteaux sis sur la commune d'Ermenouville, celui
d'Arnouville, propriété du comte de Montalembert, est le plus ancien19. Il
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constituant une équipe de correspondantes paroissiales pour la seconder. La
Ligue a un but essentiellement spirituel (formation chrétienne, prières) mais
aussi charitable voire social (entraide, bibliothèque etc.). Dans le canton, elle est
particulièrement bien implantée puisque, par exemple, en 1949, la Ligue a 736
adhérentes, soit de seize à cent dix par commune.
L'ensemble des oeuvres de Madame de Montalembert participe de
convictions sociales, familiales et religieuses qui forment un tout. L'épouse du
sénateur et maire d'Ermenouville se trouve ainsi au centre d'un réseau qui lui
permet d'agir conformément à celles-ci, de poursuivre une tradition présente
chez les Montalembert mais aussi dans sa propre famille. Ces activités la
mettent au contact direct d'une part considérable de la population locale et, en
particulier, des plus pauvres. Les manifestations de reconnaissance qui en
découlent sont nombreux, lettres, suffrages aux élections municipales alors
qu'elle n'est pas candidate, et encore très présents dans les esprits aujourd'hui.
Tous les témoignages
dévouement valut à Madame
sollicités
de Montalembert
à ce sujet utilise
d'être le
décorée
terme dedela "sainte".
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demeura attentif à cette question pendant toute sa carrière. Ce souci est une
autre clé pour comprendre les engagements de Geoffroy de Montalembert et de
son épouse. Cet attachement à la famille leur venait d'une tradition familiale et
fut certainement renforcé par les drames personnels qu'ils rencontrèrent en ce
domaine: le décès de sa première épouse et, dans son second mariage, la perte
de plusieurs enfants, peu après la naissance comme Jean en 1932, Guy en 1934,
Geoffroy en 1937, Marie-France en 1941, ou à un âge plus avancé comme
François-Xavier né en 1946 et mort à onze ans.
Dans le domaine politique, Geoffroy de Montalembert chercha toujours à
réaliser une union des droites et des modérés. Il la trouvait en partie avec la
Fédération républicaine, il la rechercha à la fin des années 1930 dans la
préparation des élections qui devaient avoir lieu en 1940, puis ensuite à chaque
échéance électorale sous la IVe et la Ve République. Il connut de nombreux
échecs. On a vu comment il n'hésita pas à risquer son propre sacrifice politique
pour réaliser à partir des années 1970 une liste commune avec Jean Lecanuet
dans son département. L'étude de sa carrière amène à penser que Geoffroy de
Montalembert se serait aisément coulé dans le modèle britannique du
bipartisme.
Enfin, l'ultime principe à souligner est le devoir de servir. Dans ce qui devait
être son dernier discours comme doyen d'âge, le 2 octobre 1992, il résumait
ainsi ce que la vie lui avait appris : "J'en ai retenu qu'il ne fallait jamais déserter
son idéal, toujours combattre pour mieux servir (...)". Très jeune, le cahier légué
par sa mère lui avait appris qu'il s'agissait pour lui d'un devoir lié à sa fortune et
à sa naissance. C'était, là aussi une grande tradition familiale. Ce dévouement
était bâti sur sa foi chrétienne dont il constituait le prolongement. "Toute sa vie
familiale, professionnelle et politique a été dominée par ce devoir de l'homme
envers son Créateur. Ses incertitudes se transformaient en prières. Il n'y a pas
d'autre explication à l'extraordinaire dévouement dont il a fait preuve (...) un
dévouement qui était pour lui dans l'ordre des choses, parce qu'il avait beaucoup
reçu, parce qu'il devait donner beaucoup, un dévouement qui était total, pas un
devoir accepté, mais un devoir voulu et fait avec joie" put dire, lors de ses
obsèques, André Bettencourt. L'idée de service du bien public peut résumer
toute l'existence de Geoffroy de Montalembert et de son épouse.
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sans chercher comment, petit à petit, une vision et des convictions se sont
enracinées en lui, qui l'ont amené vers une certaine forme d'action. Parvenir à
s'approcher ainsi un peu plus de l'homme profond, - l'historien n'est-il pas pour
Marc Bloch, l'ogre de la légende flairant la chair humaine23 ? - c'est, en
l'occurrence ici, se mettre en position de lui rendre justice.
1 . voir N.-J. Chaline, Jean Lecanuet, Beauchesne, Paris, coll. "Politiques et chrétiens",
à paraître.
2. A.-J. Tudesq, Les grands notables en France (1840-1849), PUF, Paris 1964.
3. cf. Serge Berstein, "La culture politique" in Jean-Pierre Rioux et Jean-François
Sirinelli, Pour une histoire culturelle, Seuil, Paris 1997, p. 373.
4. ibid., p. 379.
5. Eric Mension-Rigau, Aristocrates et grands bourgeois, Education, traditions,
valeurs, Pion, Paris 1994.
6. Ce cahier est un manuscrit commencé en 1908 et comporte 71 pages, tantôt de texte,
tantôt de graphiques généalogiques. Il appartient aux archives privées de la famille
de Geoffroy de Montalembert.
7. R. P. Lecanuet, Montalembert, Sa jeunesse (1810-1836), Lib. Poussielgue, Paris,
1895, p. 2.
8. Geoffroy de Montalembert, Mon journal pendant mon voyage de Lille à Bruxelles et
pendant
Montalembert.
mon séjour en Belgique, manuscrit de 171 pages, archives privées de
16. Lettre datée du 15 août 1958 publiée in Documents pour servir à l'histoire de
l'élaboration de la constitution du 4 octobre 1958, vol. II, Le Comité Consultatif
Constitutionnel de l'avant-projet du 29 juillet 1958 au projet du 21 août 1958, La
documentation française, 1988, Paris, p. 721.
17. Cf. Paris-Normandie, 30 août 1977.
18. Le Monde, 3 octobre 1989.
19. Cf. Pierre Jamme et Jean-François Dupont-Danican, Gentilshommes et
gentïllhonnières en Pays de Caux, Ed. de La Morande, Paris, 1996, p. 206-207.
20. Témoignage de Madame Buquet, sa dernière secrétaire.
2 1 . Union des Républicains et des Indépendants.
22. Rassemblement démocratique européen (centre gauche entre les centristes et les
socialistes).
23. Marc Bloch, Apologie pour l'histoire, ou métier d'historien, A. Colin, Paris, 1974,
p. 37.