Académique Documents
Professionnel Documents
Culture Documents
Lot 38.
EDOUARD MOYSE (1827-1908)
Le contrebassiste
signé 'Moyse' (en bas à droite) huile sur toile 167.5 x 108 cm.
Est- 1500-2000
Il expose pour la première fois en 1845 et, comme décrit ci-dessus, commence à exposer au Salon à
partir de 1853. À partir des années 1860, son œuvre principale dépeint des scènes de la vie quotidienne
juive, ainsi que des sujets juridiques et religieux. La draperie masculine est omniprésente dans le travail
de Moyse. En dépeignant d'autres sujets religieux comme dans notre peinture, à côté de ses
représentations juives, Moyse a cherché à normaliser le judaïsme dans le cadre de la société française, en
se souvenant que ce n'est qu'en 1791 que la France est devenue le deuxième pays européen (après la
Pologne plusieurs siècles plus tôt), à accorder aux Juifs des droits égaux.
Son style a peu a peu évolué, mais il ne semble pas avoir été influencé par les mouvements artistiques
radicaux de la dernière partie du c19. Peut-être est-ce la raison pour laquelle, à quelques exceptions près
(un tableau vendu en 2005 pour environ 150 000 euros), son travail n'est pas aussi apprécié que je le
pense il merite, étant donné la qualité évidente de l'œuvre et son originalité.
Prochaine etape.
Un examen plus approfondi de l'image pour voir ce qu'elle peut nous dire
d'autre et quelles autres questions nécessitent des réponses. Jusqu'à présent, je
vois :
• Cet homme peut jouer du violoncelle à un niveau élevé
• Edouard Moyse peut peindre en détail presque photographique
• Il y a des bonnes relations entre l'artiste et son sujet, malgré leurs
différences religieuses (qui auraient été connues je suppose)
• Il n'y a aucune indication à l'arrière-plan d'une autre signification
(symbolique) - c'est-à-dire que cela semble être une représentation réaliste
d'un moine chartreux jouant du violoncelle dans sa cellule
Parmi les questions:
1. Qui est le moine? Au moment d'écrire, je n'ai pas pu identifier le moine, mais je suis sur la piste ..
2. Où était-ce peint? Peut-être c'est la Chartreuse de Bosserville, qui n'est pas loin de Nancy (ville natale
de Moyse), et qui a rouvert en 1816 après la fermeture forcée de toutes les Chartreuses pendant la
Révolution française.
3. Pourquoi choisir ce sujet pour un tableau destiné au Salon de Paris? Je crois que, avec son
autoportrait, Moyse voulait montrer qu'il était capable de plus, et donc de choisir un sujet avec des
connotations religieuses et de nombreuses références historiques aurait pu le mettre sur la voie de la
catégorie la plus élevée de l'Académie - Peintures historiques.
4. Est-ce le tableau qui a été présenté au Salon de 1853? La réponse à cette question est assez complexe
et impliquait en effet les prochaines étapes de l'enquête.
Recherche sur Internet plus approfondie pour trouver des références a ce tableau, et en particulier au
Salon de 1853.
La recherche a produit de nombreuses informations utiles.
Nous regardons d’abord le Salon de 1853.
Le Catalogue du Salon est disponible en ligne chez Gallica, et l'on retrouve en effet la confirmation de
l’exposition de deux tableaux de Moyse. Nos 858 et 859.
Ma recherche d'informations sur le Salon de 1853 a également donné un document très intéressant.
L’hebdomadaire L’Illustration - 8 juillet 1853 présente une revue approfondie du Salon, y compris des gravures
de certaines des peintures dont on parle dans la revue. Ici nous trouvons non seulement une critique plutôt
dédaigneuse de la peinture de Moyse des Chartreux, mais, peut-être plus important encore une gravure de ladite
image. S'il s'agit clairement du même sujet, soit le graveur a pris de grandes libertés, soit c'est une version
différente du sujet que la mienne qui a été présentée. Signée Beer la gravure ressemble plus à une caricature qu'à
une représentation fidèle.
L’Illustration décrit également un petit tableau gris, et le mien est grand et pas gris! Le catalogue du Salon de
1853 ne donne pas les dimensions.
Cependant, la preuve la plus convaincante pour suggérer qu'il existe plusieurs versions du sujet, et que la mienne
n'a pas été accrochée au Salon, est l'existence d'une gravure du tableau, réalisée par Moyse pour la nouvelle
Société des aquafortistes en 1862, et dont il était l'un des membres fondateurs, ainsi que des noms tels que
Manet, Bracquemont etc… Des copies de cette gravure se trouvent dans de nombreux grands musées, en France,
aux États-Unis et même à la National Gallery of Australia! J’espère en ferai l'acquisition d’une copie bientôt.
Voici la caricature de 1853 et la gravure de Moyse de 1862 côte à côte, avec mon tableau comme référence.
Il convient de noter que dans cette représentation, il y a des illusions allégoriques, avec la présence d'un
crâne. Donc avec l'instrument de musique lui-même, on a deux symboles de Vanitaas.
De toute évidence, la preuve indirecte est que le tableau accroché en 1853 n'est pas le mien mais une autre
version, plus petit est probablement perdu.
Il y en a encore!
L’internet a également révélé l'existence d’un livre sur Moyse, écrit par un descendant vivant (arrière petit-
neveu), M. Jean Bernheim qui a gentiment répondu a mes questions. Je n'ai pas encore pu me procurer ce livre,
mais M. Bernheim a révélé l'existence d'une autre version du tableau, dans sa collection, plus petite que la
mienne mais presque identique. Apparemment, cette façon de retravailler le même sujet était une pratique
régulière d'Edouard Moyse, comme beaucoup d’autres. Probablement le jeune Moyse a été encouragé par le
succès du Salon de 1853 à poursuivre le sujet à travers de multiples tableaux et bien entendu l’eau forte de 1862.
Voici la version de M Bernheim ... qui, selon ses propres mots, est plus petite que le mien, bien que presque
identique. (les différences de couleur sont sans doute en partie dues aux photos)