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La problématique de l’insécurité à port -au-prince : Entre violence gangs armés à

violence urbaine, un cas d’anomie sociale de 2018 à 2021.

ORELIEN Buscando

Septembre 2021
INTRODUCTION

En Haïti, depuis plus d’une décennie, nous vivons une situation d’insécurité
généralisée. Selon plus d’un, elle remonte surtout après le déracinement du régime dictatorial
des Duvalier en 1986 et d’autres croient, c’est plutôt après la démobilisation de l’armée
haïtienne par le président Jean Bertrand Aristide entre 1994-1995. Alors, quelques soit
comment et quand il a pris naissance, elle éclate aux yeux de tout le monde. Cette situation est
présente aujourd’hui presque sous toute forme.

Dans son livre, « le procès de l’insécurité : problèmes, méthodes et stratégies », James


Boyard nous montre que l’insécurité ne fait pas seulement référence à des phénomènes
mafieux ou illicites, mais concerne aussi des faits environnementaux et de civilisations
capables de porter atteinte à la vie, à l’intégrité physique et ou aux bien des citoyens (Boyard,
2021 : 8). Elle est souvent confondue avec la criminalité qui n’est que la transgression des
normes juridiques d’un système social. En effet, ce constat lui permet de catégoriser d’autres
cas d’insécurités qu’il appelle « l’insécurité non criminelle » qui sont liés à des phénomènes,
tels, la préventive prolongée (insécurité judiciaire), les crises alimentaires (insécurité
alimentaire),les désastres naturels(insécurité environnementale), la vente de faux et de
médicaments expirés (insécurité sanitaire), les accidents de la circulation ( insécurité routière),
( Boyard, 2021 : 15), qui nous passe à parler de la vente des faux billets (insécurité
monétaire). C’est le phénomène du faux-monnayage1.

Mais dans le cadre de ce travail, ce qui nous s’intéresse c’est l’insécurité liée à la
violence urbaine, le produit de la violence des gangs armés. Depuis l’année 2018, que sa
prédominance redevient la principale source d’insécurité avec des cas d’enlèvements
spectaculaires au début de l’année 2021. Les chefs de gangs règnent sur des quartiers en
déjouant les forces de l’ordre. Qui plus est, la PNH « la police nationale d’Haïti », est devenue
complètement impuissante face à la guérilla de ces gangs armés.

En effet, nous tenterons de comprendre tout d’abord, la genèse de la violence, comment elle se
produit et les facteurs déterminants de la prolifération des groupes de gangs armés en Haïti. Et enfin,

1
Olivier Dubois. (1999). Le faux Monnayage au pays de Vaud (1775-1750) : crime et oppression, Lausanne :
Éditions du Zèbre, p 122
analyser ce phénomène violence gangs armés considéré comme un cas d’anomie social à l’aide de la
théorie du fonctionnalisme relativisé2 de Merton K. et le structuro-fonctionnaliste3 de Talcott Parsons.

Présentation du cadre méthodologique :

Comme disait Max Weber : «Tout travail scientifique présuppose toujours la validité des
règles de la logique et de la méthode, qui sont les bases universelles de notre orientation dans
le monde» (Weber, 1917 cité par Blanc et al. 2015, p. 5). En effet, tout travail de recherche
nécessite une méthode. Car, la méthode est la démarche qui va permettre d’atteindre l’objectif
fixé dans le travail. En sciences humaines et sociales, deux méthodes préconisent : la méthode
qualitative et la méthode quantitative. Certaines fois ou dans certains travaux, on utilise les
deux à la fois en vue de forger une méthode mixte liés directement au phénomène étudié. Ces
dernières sont constituées d’un ensemble de techniques qui permettent de mieux appréhender
les phénomènes humains ou sociaux.

Dans le cadre de ce travail de recherche, par rapport au phénomène que nous


compterons étudié qu’est la problématique de l’insécurité à port -au-prince : entre violence
gangs armés à violence urbaine, nous opterons pour la méthode qualitative qui vise à saisir ou
à comprendre et analyser les phénomènes sans les données chiffrées. Comme techniques dans
cette méthode, nous utiliserons, l’observation, la documentation et l’analyse de contenu.

Justification du sujet

Vu la montée spectaculaire des actes de violences quotidiennement qui est fonction de


l’ampleur de la situation in sécuritaire actuelle, c’est vrai que la violence semble être
inhérente à la dynamique social ou à la vie collective, mais celle-ci ne va pas de pair avec
aucun de respect, de protection de vivre. Et aujourd’hui on dirait qu’il devient normal de
repérer un nouveau cas de plus. Du coup, chercher le bien fondé d’un phénomène comme
celui-ci devient impératif.

2
Critique du théorie fonctionnalisme absolue de Malinowski.
3
L’approche structuro-fonctionnaliste de Talcott Parsons est cristallisée dans le paradigme des quatre
fonctions impératives : la poursuite des buts; la stabilité normative ou latente; l’adaptation et l’intégration.
(Rocher, 1968: 174-175 cité par cité par Ilionor Louis(Sd).Manuel de sociologie, Edition Revue, augmentée,
Volume, p. 152)
DEVELOPPEMENT

La genèse de la violence, entre gangs armés et urbaine :

En fait, durant toute l’histoire de l’humanité, la violence était présente. De nos


jours, elle existe sur d’autres formes (Holeindre et Testot, 2014 cités par Bibeau, 2015, p.
11).Si autrefois, on parlait de barbaries et sauvages (Bibeau, 2015, p. 11), aujourd’hui on
parle plutôt de criminalités, d’harcèlements, de meurtres, de délinquances, d’insécurités,
d’émeutes. Et ceci, ces violences peuvent être liées à l’accroissement de la population dans le
milieu urbain qui était de 3.63 milliards en 2011 et pourrait atteindre les 6.25 milliards en
2050 (Rapport de la ministre de la justice de l’Autriche, 2012, p. 1)). Cet accroissement de la
population urbaine marche de pair avec la violence urbaine (ibid., p. 6). Ainsi, ce phénomène
était récurrent dans les pays dits pays du Sud, de nos jours, des émeutes urbaines se sont
produites à plusieurs reprises en Europe comme c’était le cas en France en 2005, à Madrid
2007, à Athènes en 2008 ou encore à Londres en 2011 (ibid.).

Selon Éric Macé, les formes de violences comme délinquance, insécurité et émeutes
existent bel et bien dans les pays développés. Mais dans les sociétés où les problèmes
économiques, sociaux, politiques, psychologiques, ethniques, et autres (Macé, 1999), elle est
très récurrente. Dans son texte, les Violences dites « urbaines » et la ville : du désordre public
au conflit dans l’espace public, malgré qu’il définisse la violence urbaine comme étant une
forme de violence qui est l’œuvre seulement des jeunes masculins (conduites violentes
collectives de jeunes de sexe masculins (ibid., p.2)). Peut-être que ce constat est limité en
Haïti, dans la mesure où les réseaux de gangs sont constitués de filles et de garçons bien que
leurs niveaux d’influences ne sont pas équilibrés. Les garçons sont plus dominants. Et, on n'a
pas encore repéré une femme jusqu'à présent comme chef d’un groupe de gangs en Haïti.
Mais, l’auteur présente un ensemble de facteurs considérés comme les véritables causes de la
violence urbaine. Ce sont : les difficultés socio-économiques, la classe (grande majorité de
jeunes mineurs ou majeurs), sexe (selon lui, il s’agit uniquement des garçons), des jeunes mal
intégrés à l’école ou qui vit dans des situations précaires. Le plus souvent, ces jeunes vivent
dans des quartiers qui portent la marque de ces indicateurs qui les lient à l’espace. Comme
quoi, ils sont générateurs des difficultés sociales, économiques d’où le concept de « quartiers
défavorisées » (ibid.). Ce qui veut dire que la violence urbaine est liée à différents facteurs
sociaux, économiques, politiques et institutionnels (op.cit. p.5).
En Haïti, les violences urbaines sont majoritairement les œuvres des gangs armés qui
prolifèrent les bidonvilles à la faveur de la faiblesse des forces de polices (OFPRA, 2016,
p.2). Narcotrafic, traite d’êtres humains, enlèvements, meurtres, viols, pillages, guerres de
territoires sont entre autres les véritables activités des gangs (ibid., p. 2).

Les gens, faisant partie des groupements armés à port au prince pourraient
correspondre à ce que Hobsbawm (1999) appelle les bandits. Car, selon lui, par monts et par
vaux, des bandes d’hommes ne reconnaissant ni la loi ni l’autorité, armés et violents,
soumettent leurs victimes par l’extorsion, le vol, ou de quelque autre façon. En défiant ainsi
ceux qui détiennent ou prétendent détenir le pouvoir, le droit et l’accès aux ressources, le
banditisme défie l’ordre économique, social et politique. Telle est la signification historique
du banditisme dans les sociétés et les États marqués par des divisions de classes (ibid., p13).

Les facteurs déterminants du phénomène :

Chez nous, il est encore plus compliqué en raison que cette entité dénommée l’État
est inexistante(Gilles,2022 ). En réalité, quand nous disons que l’État n’existe pas en Haïti, ce
n’est point sur le plan externe où il y’a la reconnaissance internationale. Mais plutôt dans les
rapports que l’« État» développe entre ces citoyens-né. Il n’est pas même en mesure d’assurer
ces fonctions premières : la paix, la défense, les services sociaux et la justice.

La question de l’État est centrale au sein de la problématique de violence urbaine en


Haïti. Dans ce sens, le titre du livre de Sarah Chayes (2015) est suggestif : Thieves of State
(voleurs d’État). L’État reste la source principale de la législation et l’unique institution
pouvant jouir de la légitimité nécessaire au sein d’une société pour faire appliquer les lois. Il
est l’institution autour de laquelle se définit le « public » même que le « service public » ne lui
revient pas exclusivement. Or, comme Alain Gilles montre dans l’ordre de la corruption en
Haïti : une anomalie Normale, l’État reste un casse -tête pour les sociétés qui ont fait
expériences à la colon ouisation (Nési et cadet, 2022 : 6)4 dont Haïti. Donc, leur absence, que
ce soit pour apporter leur assistance nécessaire et faire asseoir leur autorité n'est qu'utopie. Du
coup, cette faiblesse ou inexistence institutionnelle et l’absence du symbolisme de l’autorité
légitime facilite la prolifération des groupes de gangs

Présentation du phénomène

4
Jacques cadet et Jean-Jacques cadet (2022), L’affaire du pétro caribe en Haïti. La corruption dans les pays du
sud. Entre la politique et la science, Paris : CIDIHCA-France
Comme montre Madeleine Grawitz la société est « une espèce spéciale de
groupement : groupe civil(Hegel), large(Tönnies), englobant(Gurvitch), lieu d’échange (Lévi-
Strauss) » (Grawitz, 2000 : 377 cité par Ilionor, Sd,), qui est responsable d’assurer la vie de
ses membres quelques soit la contrainte. C’est pourquoi le but fondamental de la socialisation
est d’assurer le contrôle social 5 même que dans certains cas cette vision est déviée par la
volonté des individus. Par ailleurs, ce contrôle par la socialisation serait impossible de réaliser
sans les institutions (ibid., 197). C’est-à-dire, ces dernières remplissent de véritables fonctions
dans la société. Selon Norbert Elias dans « la société des individus »6, les institutions et les
individus ont un rapport de dépendances. Donc, en absence des institutions ou dans le cas où
elles ne répondent pas à leurs rôles dans un système social, les individus ont tendances à
mobiliser leurs propres mécanismes pour satisfaire leurs besoins en dehors des normes et
principes établis. Cet état de crise, Durkheim l’appelle « Anomie7 ».

Haïti est un cas typique de l’inexistence de l’État et d’institution capable de répondre


aux besoins de ses membres. Nous avons un système politique tiré de l’administration
coloniale. A chaque fois, nous tentons de construire l’État haïtien, ce projet a été saboté par
les nouveaux colons (Gilles, 2022). En réalité, le non-respect des normes et des valeurs, et la
violence politique diffuse comme les guerres civiles, les affrontements entre les gangs sont les
caractéristiques des pays sous équipés où l’État est défaillant, faible voire inexistant. Donc,
les gangs ont profité de cette inexistence pour faire régner la terreur, la peur et la violence
physique au sein de la population. Elle est de nature différente comme violence physique,
morale, conjugale, politique etc. Celle qui est liée à la politique, peut être diffuse, venue d’en
haut et d’en bas (Michaud, 2014). Mais la violence liée à la précarité sociale et économique,
que nous subissons quotidiennement entre 2018 à 2022, nous appelons urbaine dans le sens
d’Éric Macé8 et (OFPRA, 2016, p.2), qui montre les violences urbaines sont majoritairement
les œuvres des gangs armés qui prolifèrent la faiblesse des forces de polices, est sans
pareille. Elle présente plus fréquemment sous formes d’émeutes, de pillages, d’incendies, de

5
Ilionor Louis(Sd).Manuel de sociologie, Edition Revue, augmentée, Volume 3
6
Elias Norbert(1998). La sociologie des individus, Éditions Pocket, Paris.
7
« Un état de dérèglement des relations entre l’individu et sa société : parce que les actions ne sont plus
réglées par des normes claires et contraignantes (objectifs hors de portée, escalade du désir et de la passion),
l’individu peut sombrer dans l’angoisse et l’incertitude qui conduisent à la violence ou au suicide » Emile
Durkheim(1893).De division du travail social, cité par Drouard et alt., (1991). Sociologie et invention sociale.
Manuel de sociologie générale. Centurion, paris, cité par Ilionor Louis(Sd).Manuel de sociologie, Edition Revue,
augmentée, Volume 3
8
Éric Macé(1999) Violences dites « urbaines » et la ville : du désordre public au conflit dans l’espace public,
cambriolages, de prostitutions, de kidnapping, de viols meurtres, d’assassinats, de
calcinations).

Du coup, dans le cas ce travail, on voit le phénomène de l’insécurité lié à la violence des gangs
armées à Port-au-Prince comme un cas d’anomie sociale dans le sens Durkheimien. C’est à dire, ceux
sont les institutions qui sont incapables de satisfaire les attentes des individus qui les poussent à
utiliser ses propres mécanismes pour parvenir à leur besoin. Les normes sociales ne veulent plus rien
dire pour eux. La police, et les tribunaux sont impuissants pour réguler le comportement de ces
derniers.

L’analyse du phénomène ou présentation du cadre théorique

Tout problème de recherche doit d’abord s’intégrer dans une perspective générale. A
partir de cette perspective théorique générale, le chercheur doit ensuite concevoir un cadre
théorique spécifique à l’objet d’étude. Ce dernier est en quelque sorte différente d’une théorie
car il se construit uniquement en fonction d’un problème (Lungila Matanga, 200).

Cette dynamique sociétale violente, régressive accouche a une insécurité intense, témoigne
de la profonde et durable crise institutionnelle en Haïti. La grande difficulté qu’a eu et a
manifestement encore la formation sociale haïtienne à se transformer positivement ou à
connaitre progressivement au sens chronologique et matériel de la notion de progrès et, un
changement social 9 . En inscrivant notre analyse dans le paradigme 10 du fonctionnalisme
relativisé de Merton et structuro-fonctionnaliste de Parsons, nous faisons l’hypothèse que le
phénomène de l’insécurité entre la violence gangs armés à la violence urbaine est la fonction
du dysfonctionnement du système social11 haïtien, qui, à travers ses institutions se révèle
incapable de réaliser l’intégration et l’adaptation de ses membres.

9
« Toute transformation observable dans le temps, qui affecte, d’une manière qui ne soit pas provisoire ou
éphémère, la structure ou le fonctionnent de l’organisation sociale d’une collectivité donnée et modifie le
cours de son histoire » (Rocher, 1968 : 6).
10
Par paradigme, il faut entendre une théorie scientifique arrivant à maturité et fournissant, face à d’autres
théories scientifiques concurrentes, l’explication la plus adéquate d’un phénomène. Elle peut être aussi
entendue comme « une maitrise d’opération permettent d’inscrire un ensemble de faits dans un système
d’intelligibilité, c’est-à-dire d’en rendre raison ou d’en fournir une explication ». Cf. Kuhm,T., la structure de la
révolutions scientifiques , paris, Flammarion, 1972 ;Berthelot, J.-M., L’intelligence du social. Le pluraliste
explicatif en sociologie, Paris, Puf, 1990, pp.18-23.
11
« Un système social consiste en une pluralité d’acteurs individuels, en rapport d’interaction les uns avec les
autres, et qui se trouvent dans une situation dont certains aspects au moins sont de caractère physique et
écologique (environnemental). Les acteurs sont motivés par une tendance à rechercher un optimum de
satisfaction et se définissent par rapport a une situation qui, bien que physique te écologique, les inclut les uns
et les autres, leur est médiatisée par un système de symboles communs, recevant leur forme d’une tradition
Elle dérive du mode de fonctionnement traditionnel, spontané, anachronique et chaotique des
institutions sociales de bases. Les principaux sous-systèmes sociétaux : le sous-système
social, le sous-système culturel, le sous-système politique et le sous-système économique, en
tant qu’un système social moderne, n’a pas, en effet, su jouer adéquatement leur rôle
spécifique et permettre aussi bien l’adaptation et l’intégration que le changement mélioratif de
cette société.

Le sous-système socioculturel qui est le sous-système de la communauté relationnelle et sous-


système des valeurs (Dorvilier, 2012 : 6), est constitué des institutions intégratrices comme la
famille, l’église et l’école.

La famille comme étant l’unité primaire de socialisation produit et reproduit les individus
pour tout le système social, malignement, parce qu'en soit elle est en défaillance totale. Elle a
fonctionné en vaste clos ou suivant un mode tribal. On comprend que si la famille en tant que
la première entité de transmission de valeurs et de normes est en panne de valeurs, on ne peut
s'attendre à autre chose que celle qui se produit aujourd’hui.

Ensuite, dans une logique de fonctionnalisme relativisé12 , où Merton insiste de faire une
différence entre la fonction latente et la fonction manifeste, l’école comme institution sociale
fondamentale aurait une fonction manifeste qui est la transmission de connaissances
nécessaires pour permettre à ses membres d’être compétents dans leurs communauté. Et, une
fonction latente qui est la sélection des individus selon leurs origines sociales (op.cit., p 150).
D’une part, l’école en Haïti se trouve dans l’impossibilité de répondre à sa fonction première
parce que le système éducatif n’est pas approprié avec la réalité sociale. Nous avons une
école au rabais. D’autre part, cette fonction latente de l’école qui peut être remplie est tout à
fait inégalitaire. Donc, cette entité ne participe pas à l’intégration, la cohésion sociale et la
formation d’une conscience collective. Son efficacité contribue à ce phénomène que nous
vivons.

Et enfin, l’église a une fonction sociale et symbolique. Mais en Haïti, l’église est une
institution au service de l’au-delà, s’investit dans les services sociaux de base non pas dans le
but d’intégrer et de moderniser la société d’ici-bas, mais dans celui de mieux légitimer son

culturelle » cf. Parson, T., The Social Système, New York, The Free press, 1951, p.6 cité par François Bourricaud,
L’individualisme institutionnel. Essai sur la sociologie de Talcott Parsons, paris, 199, p. 68.
12
L’assouplissement du fonctionnaliste absolue de Malinowski. Selon laquelle Merton critique les trois
postulats de ce dernier qui devraient être considérés comme étant des hypothèses pour lui ( Ilionor
Louis(Sd).Manuel de sociologie, Edition Revue, augmentée, Volume 3)
action d’évangélisation, donc de salvation céleste (Hurbon, 2021 : 133-134). Comme
institution intégratrice, l’église n’arrive pas à aider les individus à intégrer le système social.
Elle les prépare plutôt pour l’éternité.

Donc, ce dysfonctionnement a entrainé une crise culturelle et d’intégration socio-


technologique, par rapport à l’absence de ses instituions dans leurs fonctions au niveau du
sous-système socioculturel, les individus sombrent dans l’angoisse et l’incertitude qui les
poussent à vivre dans une sous structure dirigée par des lois, des valeurs et des normes
fabriquées par eux même. Par exemple, les groupes armés comme 400 mawozo, chen mechan,
5 segond, G9 an fanmi ak alye, baz pilat…

Le sous-système politique qui représente l’espace de pouvoir légal-rationnel et qui a pour


fonction de recenser, de réaliser et de systématiser, à travers une mobilisation adéquate des
ressources humaines et matérielles, les buts collectifs, a été marqué par de violentes luttes de
pourvoir (op.cit). Cette situation politique a fragmenté le territoire national, entravée à la fois
l’adaptation sociale de l’État et la construction d’une citoyenneté supposant une conscience
collective d’appartenance à une entité politique nationale ainsi que l’engagement sociale
volontaire. D’où la crise de gouvernabilité qui favorise la prolifération des gangs armes.
Quand ce n’est pas un problème d’élection, c’est un problème de mandat, quand ce n’est pas
mandant et bien décharges, nous avons toujours un problème au niveau de l’État à gérer en
Haïti. Et cette crise institutionnelle constante engendre surtout la forte présence de ses gangs.

Le sous-système économique qui constitue la base matérielle du système sociale, sa fonction


spécifique est d’alimenter les autres sous-systèmes en énergies ou ressources matérielles.
Mais l’incapacité de la population à contrôler son rythme de croissance, subvenir à ses
besoins alimentaires ont donné lieu à une crise d’adaptation matérielle. Du coup, la
population se trouve en famine face à un état incapable de garantir la satisfaction de ses
besoins. Alors, les individus utilisent leurs propres mécanismes comme le groupement en
gangs pour satisfaire leurs attentes au niveau système sociale.

Perspective d’un changement sociale

Tous les phénomènes sont appelés à évoluer parce que le système social en soit est dynamique et
évolutif. Dans le cas d’un changement social d’équilibre (Rocher 1968 : 22) qui est un processus
d’ajustement sans importantes modifications de la structures d’un système sociale par rapport aux
exigences de son environnement, le conflit entre les groupes de gangs peut servir une soupape pour
liquider les tensions du système. Autrement dit, la confrontation entre eux peut être considérer comme
élément intégrateur du système en vu de les aider à s'intégrer (Cosser, 1982 : 27 cite par De Coster et
al. 2006. Cite par Ilionor, Sd, 149). Soulager la société c’est la fonction même du conflit. Par contre,
toujours (Rocher 1968 : 22) à la suite de Talcott Parsons, pour qu’il y ait un changement social qu’il
appelle structurel, dans ce cas, on doit passer par une restructuration totale ou par un effondrement du
système social. En Haïti, pour le niveau de la tension, il ne serait pas nécessaire d’ajuster mais de
restructurer pour avoir un autre système fort constitué de quatre autres sous-systèmes forts capables de
répondre aux besoins de ses membres.

CONCLUSION

Cette montée dramatique de la violence criminelle en Haïti a coïncidée comme nous l’avons
vu avec le dilemme de la construction d’un État fort et la difficulté de renforcer la justice pour
qu’elle soit forte et puissance. la prolifération exponentielle des foyers de gangs armés
disséminés notamment dans toute la zone métropolitaine de l’Ouest et la radicalisation de
l’échiquier politique haïtien, caractérisée par la promotion des discours de haine et un genre
de terrorisme publicitaire, promu par certains medias traditionnels et les réseaux sociaux.

Quoi qui il en soit, dans le contexte où les institutions étatiques en charge de la sécurité sont
défaillantes ou presque inexistantes, de nouveaux mécanismes de gouvernance de la sécurité doivent
être envisagées pour assurer un minimum de sécurité à nos concitoyens. L’insécurité continue de faire
des victimes, tout le monde en parle mais quand il est question de la décliner, dans le contexte haïtien,
l’emphase est surtout mise sur son aspect criminel bien qu’elle soit multidimensionnelle et multiforme.
La problématique, de ce fait, est souvent mal posée. Chacun y va de son expertise et extrapole.

Il devient plus que nécessaire d’établir un plan sécuritaire comme changement d’équilibre et
faire une restructuration du système social haïtien qui permettra aux membres de s’intégrer et
s’adapter.

La limitation du travail

Dans le cadre de ce travail de recherche, ce qui nous intéresse c’est de démontrer que
l’insécurité surtout liée entre la violence gangs armées qui est engendrée la violence urbaine,
est le fuit de l’absence ou la faiblesse de l’État et les autres institutions dans le système social
haïtien qui devrait assurer le contrôle et l’équilibre social. D’une part, on montre que
l’individu ne fait que satisfaire ses attentes en sa manière par rapport à l’inefficacité de ses
institutions. C’est pourquoi on parle d’anomie sociale. D’autre part, on montre que les gangs
se trouvent dans un déterminisme social parce que le système social haïtien dès sa formation
était incapable d’établir un climat de paix. On peut dire que’ ses comportements sont sociaux.
Pourtant, un autre chercheur pourrait formuler une hypothèse en disant que l’individu est
rationnel et compétant et inscrit son analyse dans la théorie d’individualisme méthodologique.
Dans le sens qu’il sait ce qu’il fait. Il avait d’autre choix, il a fait ce qui est le plus digne selon
lui. Dans ce cas, il est le responsable. Un autre pourrait dire, ce phénomène est lieu plutôt à la
pauvreté et au chômage. Et, cette différence fait l’objet de la limite de ce travail.
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