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OSER

CHANGER
MARIE BÉRUBÉ ET MARC VACHON
© IDEO 2019, un département de City Éditions

pour l'édition française


© Marie Bérubé et Marc Vachon
Couverture : Shutterstock/Studio City
ISBN : 9782824632308
Code Hachette : 61 6227 8
Collection dirigée par Christian English & Frédéric Thibaud
Catalogues et manuscrits : city-editions.com/IDEO
Conformément au Code de la Propriété Intellectuelle, il est interdit

de reproduire intégralement ou partiellement le présent ouvrage, et ce,

par quelque moyen que ce soit, sans l’autorisation préalable de l’éditeur.


Dépôt légal : Mai 2019
À nos enfants Philippe, Nicola,

Marc-Olivier et Marie-Noëlle,

à leurs conjoints et à nos précieux

petits-enfants
Le seul fait de rêver est déjà très important.
Je vous souhaite des rêves à n’en plus finir
Et l’envie furieuse d’en réaliser quelques-uns.
Je vous souhaite d’aimer ce qu’il faut aimer
Et d’oublier ce qu’il faut oublier.
Je vous souhaite des passions.
Je vous souhaite des silences
Je vous souhaite des chants d’oiseaux au réveil
Et des rires d’enfants.
Je vous souhaite de résister à l’enlisement,
À l’indifférence, aux vertus négatives de notre époque.
Je vous souhaite surtout d’être vous…
Jacques Brel
Avant-propos
Quand j’étais adolescent, je rêvais d’être un écrivain. J’aimais la littérature
à laquelle m’avaient initié plusieurs professeurs passionnés. Vers la fin de
mon lycée, alors que je devais choisir mes études universitaires, mon cœur
balançait entre deux orientations  : Lettres et Psychologie. J’ai finalement
choisi cette dernière, ce que je n’ai jamais regretté, bien au contraire.
Malgré tout, mon rêve d’écrire est resté intact. J’ai d’ailleurs beaucoup
écrit tout au long de ma vie. Pour moi surtout, pour réfléchir et me
comprendre, posant des mots sur papier afin de mettre de l’ordre dans mes
sentiments et mes pensées. Pour les autres aussi, les mêmes mots me
permettant cette fois, je le souhaitais en tout cas, d’aider en proposant des
idées et des moyens de mieux vivre sa vie.
Aujourd’hui, je réalise ce vieux rêve de publier un livre. Il ne met pas en
scène des personnages sortis de mon imaginaire ni des péripéties inventées,
comme dans le roman que je rêvais d’écrire plus jeune, mais il signifie
encore plus pour moi. Dans les prochaines pages se trouvent en effet
assemblés plusieurs des outils qui m’ont aidé à vivre, à progresser et à
réaliser bien d’autres rêves. Il n’y a rien ici que je n’aie pas pratiqué, jour
après jour, jusqu’à ce que cela fasse partie de mon identité. Ces moyens ont
fonctionné pour moi, ils m’ont permis de me connaître et de m’épanouir, et
je souhaite qu’il en soit ainsi pour vous, lecteur.
Je crois, au plus profond de moi, que nous sommes tous beaucoup plus
que ce que nous croyons être. Rêver permet justement d’entrevoir à
l’avance qui nous sommes au mieux de ce que nous sommes. Et quand on
s’investit, semaine après semaine, année après année, dans cette direction,
ce n’est qu’une question de temps avant que le rêve ne se concrétise. Sa
réalisation ne sera peut-être pas tout à fait à l’image de ce que nous
imaginions au départ, mais notre rêve existera à sa manière à lui, et c’est ce
qui importe.
Ce livre a maintenant lui aussi sa propre existence. Qui que vous soyez,
lecteur, je rêve maintenant qu’il vous aide à avancer d’un pas, qu’il vous
donne l’impulsion nécessaire pour changer et qu’il déclenche en vous la
même étincelle qu’ont provoquée en moi certaines personnes et certains
livres à des moments importants de ma vie.
Devenir tout ce que nous pouvons être, voilà, je crois, ce que l’on doit à
ceux et celles qui en sont empêchés en raison d’une carence intellectuelle
ou physique, ou de l’oppression qui les tient dans l’ignorance, ou de la
famine qui les oblige à lutter à chaque instant juste pour survivre… Alors,
osez changer et mettez résolument le cap sur vos rêves.
Marc Vachon,
1

Changer de cap
Avez-vous déjà rêvé de changer de cap à 180 degrés ou, à tout le moins,
de changer un aspect important de votre vie  ? Avez-vous déjà souhaité
changer de carrière, lancer votre entreprise ou retourner aux études ? Vous
arrive-t-il d’avoir envie d’aller vivre à la campagne, dans une autre ville,
une autre région, un autre pays peut-être ? Si vous étiez certain de réussir,
seriez-vous prêt à entreprendre un changement majeur dans votre vie ?
Il nous arrive souvent, dans nos conférences, de poser des questions de ce
genre à notre auditoire. À chaque fois, après quelques instants de réflexion,
plus de la moitié des personnes qui le compose répond qu’elle rêve de
changer de vie, ce que confirment d’ailleurs deux sondages plus
scientifiques, l’un effectué à l’échelle du Canada1, et l’autre en France2.
Vous pensez sans doute qu’il est bien facile de rêver, mais que c’est une
tout autre affaire de réaliser ses rêves. Combien posent les gestes qu’il faut
pour y arriver, selon vous ? 5 % ? 10 peut-être ?
Croyez-le ou non, selon le sondage canadien, une personne sur quatre
brave la peur, la résistance, l’inconnu pour entreprendre une démarche
importante de changement qui va la conduire, selon ses dires, à être plus
heureuse, plus à l’aise financièrement ou en meilleure santé.
Résultats étonnants, et qui surprennent d’autant plus que nous baignons
quotidiennement dans un climat d’inquiétude et de défaitisme qui n’a rien
pour inspirer une démarche de changement.
Pourtant, si vous ressentez au plus profond de vous-même ce désir de
renouvellement, si vous êtes capable d’imagination et si vous avez le goût
de reprendre contact avec vos rêves, ce livre est pour vous. Vous pourrez y
puiser une démarche concrète et des outils utiles qui vont alimenter votre
élan et vous stimuler dans la mise en œuvre des changements que vous
souhaitez.
Voici d’abord un bref tour d’horizon de ce qui vous attend dans les
prochaines pages.

Décider ce que l’on veut


La toute première étape pour initier un changement, aussi simpliste qu’elle
puisse paraître, consiste à décider ce que vous voulez précisément. Bien
souvent, quand on écoute les gens parler, on apprend ce qu’ils ne veulent
pas, et non ce qu’ils souhaitent vraiment. Pourtant, tous ceux qui écrivent
sur le changement sont unanimes  : ceux qui parviennent effectivement à
changer se sont d’abord donné un but précis et bien déterminé. Définir ce
que vous désirez, le plus précisément possible, surtout quand cela
correspond à vos valeurs personnelles, donne une orientation à suivre, porte
vers l’avant et mobilise l’esprit dans une direction précise.
Un peu comme le pilote de ligne connaît sa destination avant de partir,
puis réajuste sa trajectoire s’il en dévie, notre esprit a lui aussi besoin d’un
objectif précis vers lequel porter ses efforts.
Mais contrairement au pilote qui va aller là où le conduit son plan de vol,
même si cette affectation ne l’intéresse pas vraiment, l’être humain a besoin
d’une destination qui le mobilise et qui l’anime vraiment. D’où l’intérêt de
réfléchir et de préciser avec soin ses objectifs. D’où l’importance aussi
qu’ils soient cohérents, puisque plusieurs directions contradictoires créent
en nous une confusion qui nous condamne fatalement à l’immobilisme.
Pour vous aider à accomplir cette tâche malgré tout assez complexe et qui
demande réflexion, nous vous proposons, aux chapitres 2 et 3, une méthode
qui vous aidera à mener à bien cette première étape capitale. Vous aurez
l’occasion d’y dresser un bilan de votre vie présente et de prendre la mesure
de l’équilibre qui y règne, pavant ainsi la voie à une meilleure identification
de vos rêves et à leur mise en œuvre effective.

Développer son allié


Quel est, selon vous, le pire ennemi qui vous attend sur la route de vos
aspirations et des changements que vous souhaitez  ? La pénurie de
moyens  ? Le manque de temps  ? La difficulté à faire les pas qu’il faut,
quand il le faut ? Les mouche-chandelles de tout acabit ? Un peu tout cela,
sans aucun doute. Mais le principal adversaire avec lequel vous aurez
maille à partir, c’est vous-même, ou plutôt une certaine image de vous-
même qui sape peut-être votre énergie et sabote vos efforts.
Devant un changement, cet ennemi se manifestera souvent par de petites
phrases assassines comme : Tu ne seras pas capable ! C’est impossible ! On
ne fait pas toujours ce qu’on veut dans la vie ! Tu n’as pas ce qu’il faut ! Ce
n’est plus de ton âge ! Il faut savoir se contenter de ce qu’on a dans la vie !
Tu n’as pas le choix ! Tu vas tout détruire ! C’est trop difficile ! Tu es trop
paresseux ! Tu le sais, tu lâches toujours avant la fin ! Tu n’as pas l’étoffe
d’un gagnant  ! Ces phrases viennent d’une perception que vous avez de
vous-même, laquelle agit comme un frein au lieu de vous soutenir et de
vous aider à avancer.
Le potentiel que vous allez mobiliser pour introduire un changement dans
votre vie et les résultats que vous allez obtenir font partie d’un processus
qui prend racine dans une croyance, une idée préconçue. Si vous vous
percevez comme incapable de faire quelque chose, allez-vous mobiliser
toutes vos ressources ? Bien sûr que non !
Prenons deux exemples pour mieux comprendre. Une femme d’à peine
soixante-cinq ans est convaincue que sa vie arrive maintenant à sa fin, que
le meilleur est derrière elle et qu’elle devrait mettre de l’ordre dans ses
affaires et se préparer à mourir. Son mari est décédé, ses enfants sont partis.
Elle vend sa maison, s’installe dans un deux pièces et attend la fin,
désœuvrée, triste et déprimée.
Une septuagénaire, qui se perçoit elle-même comme une femme ordinaire
ayant vécu une vie ordinaire, décide à soixante-quinze ans de se mettre à
l’écriture et entreprend de rédiger son autobiographie. Elle soumet son
manuscrit à un concours destiné aux auteurs du troisième âge, mais le jury
lui explique que cette histoire n’intéressera personne d’autre que sa famille.
Sans se laisser arrêter, après trois refus d’autant d’éditeurs, elle décide de
publier son livre à compte d’auteur pour célébrer ses quatre-vingts ans. Prix
du grand public au salon du livre de Montréal en 1996, Le Tour de ma vie
en 80  ans3 devient un best-seller québécois. L’auteur, Marguerite Lescop,
récidivera deux ans plus tard avec un nouveau livre (En effeuillant la
Marguerite4), puis en publiera même un troisième.
On croit souvent que ce sont les événements qui nous arrivent qui
déterminent le genre de personne que nous sommes ou la vie que nous
menons. Si c’était vraiment le cas, pourquoi le vieillissement a-t-il été, pour
Marguerite Lescop, le point de départ d’un projet et d’une évolution réussis,
alors que pour la personne précédente, il a eu des effets paralysants et même
destructeurs ? Parce que ce ne sont pas les événements qui nous arrivent qui
modèlent notre vie et ce que nous devenons, mais le sens que nous leur
attribuons, l’interprétation que nous en donnons. Et ce sens est largement
déterminé par les croyances que nous entretenons.
Les croyances sont des conditionnements et elles se caractérisent par un
sentiment de certitude qui nous fait agir et réagir de telle ou telle façon face
à des événements ou à des personnes. Elles ne sont pas la réalité, mais nous
agissons comme si elles l’étaient. Elles déterminent très largement notre
perception de la réalité et conditionnent nos comportements.
Quelles sont donc ces idées arrêtées que vous avez sur vous, sur vos
capacités, sur vos habiletés, sur les autres, sur la vie, sur l’avenir, sur ce
qu’il faut pour changer  ? Ces idées vous aident-elles, ou agissent-elles
plutôt comme un poison insidieux qui a tôt fait de vous décourager et de
vous inciter à démissionner ?
Après que nous aurons, dans les premiers chapitres, défini mentalement le
genre de vie auquel vous aspirez, vous pourrez, au chapitre 4, comprendre
le pouvoir immense dont sont investies les croyances, tant pour bâtir que
pour détruire. Vous serez surtout invité à dresser l’inventaire de vos propres
croyances, puis à départager celles qui vous paralysent et celles qui vous
portent en avant. Vous apprendrez également comment vous défaire des
conditionnements paralysants qui sabotent vos tentatives d’améliorer votre
vie et celle des autres. Vous aurez enfin l’occasion, en vous inspirant de
personnes qui ont réussi à donner un nouvel élan à leur vie, d’identifier les
croyances qui seront vos meilleures alliées dans ce voyage que vous
entreprenez.

Trouver un levier pour agir


Ce sont les petits et les grands pas que nous faisons, jour après jour, avec
persévérance, qui vont nous mettre sur la route de nos aspirations et leur
donner vie progressivement. Mais comment nous motiver concrètement à
poser les gestes nécessaires  ? Comme la vaste majorité des gens, nous
attendons souvent pour agir de ne plus avoir le choix et que le feu soit déjà
à la maison.
Il est vrai que la souffrance demeure un très grand moteur de la
motivation. Quand les événements nous obligent à secouer notre inertie,
nous trouvons souvent beaucoup d’énergie et de force pour nous mettre en
branle. Nous avons tous entendu des récits d’efforts surhumains accomplis
par des personnes qui ne se seraient jamais crues capables de tels exploits et
qui, dans la nécessité, ont mobilisé toutes leurs ressources parce qu’elles
n’avaient pas d’autre choix.
Mais pour introduire des changements majeurs dans notre réalité, il faut
être proactif, c’est-à-dire prendre soi-même l’initiative, sans attendre
d’avoir le couteau sur la gorge. Il faut en venir à percevoir le changement
souhaité comme une urgence, comme une nécessité si grande qu’on ne peut
faire autrement qu’agir. En somme, il faut reprogrammer son esprit de façon
à associer plus de douleur au statu quo qu’au changement.
Trop de personnes savent ce qu’elles veulent changer, mais ne passent pas
à l’action, associant plus de souffrance au fait de changer qu’à leur situation
actuelle qui, pourtant, ne les enchante pas non plus. J’aimerais changer
d’emploi pour en trouver un plus satisfaisant, mais que va-t-il se passer si
c’est encore pire ailleurs  ? Et puis, de toute façon, il n’y a pas
d’ouverture… J’aimerais introduire tel changement dans mon travail pour
le rendre plus satisfaisant, mais comment vont réagir mes confrères, mon
patron  ? De toute façon, la situation est supportable… J’aimerais bien
perdre un peu de poids, mais ça va me demander tant d’efforts. De toute
façon, je ne suis pas seul avec quelques kilos en trop…
Admettons-le, on retire certains bénéfices secondaires à laisser inchangée
une situation qui nous déplaît, ne serait-ce que celui de pouvoir s’en
plaindre et de recevoir, en retour, l’attention de notre entourage. En ne
bougeant pas, on évite également de déplaire aux autres et de perdre ainsi
leur affection. Mais si l’on veut opérer un changement véritable dans sa vie,
un changement qui dure, il faut absolument se défaire de ces vieux modèles
de pensée ou d’action et adopter de nouvelles stratégies, plus efficaces, et
qui nous donneront de plus grands bénéfices encore.
Le chapitre 5 portera donc sur la motivation. Il vous apprendra comment
vous servir de ce levier pour ressentir profondément la nécessité du
changement que vous souhaitez. Vous apprendrez comment associer un tel
inconfort au statu quo que vous vivez et n’aurez plus le goût de vous y
complaire. Et pour donner encore plus de puissance à ce levier, vous verrez
aussi comment associer des sensations plaisantes au changement, et le
rendre encore plus attrayant, sinon irrésistible.
De plus, comme notre motivation est très fortement associée à nos valeurs,
nous prendrons tout le chapitre  6 pour en expliquer l’importance et vous
aider à reconnaître les vôtres. Ce n’est pas un exercice inutile. Les valeurs
auxquelles on adhère jouent en effet un tel rôle dans le processus de
décision que, ne pas harmoniser ses rêves à ses valeurs, c’est se vouer
irrémédiablement à l’échec.

Et le temps ?
La vie est une maladie mortelle sexuellement transmissible, dit avec
humour Woody Allen. Nous sommes des êtres mortels et personne ne
connaît la durée de sa vie. Nous mourrons peut-être demain, dans dix ans,
dans soixante ans… Ce qui est sûr, c’est que le temps nous est compté.
Une fois que nous avons décidé de l’orientation à donner à notre vie, tout
ce qui nous sépare de notre objectif, c’est le temps. Ce qui nous en
rapproche, ce sont les gestes que nous posons. Le chapitre  7 devrait
stimuler encore plus votre goût de passer à l’action. En apprenant comment
fixer des étapes intermédiaires, accessibles et réalistes, vous pourrez mieux
ancrer vos rêves dans la réalité. Et comme le temps nous manque souvent
pour ce qui compte vraiment, nous prendrons une partie de ce chapitre pour
vous exposer une méthode qui vous permettra d’utiliser au mieux cette
denrée précieuse qu’est le temps.
Que vous travailliez au bureau ou à l’usine, dans un centre hospitalier ou
dans une maison d’enseignement, à la maison ou ailleurs, il vous arrive
certainement de vous retrouver, le soir, complètement épuisé, avec
l’impression de n’avoir rien fait de valable et d’avoir plutôt passé votre
journée à éteindre des feux. Tiraillé entre les téléphones, les rendez-vous, le
travail qui s’accumule, les impératifs familiaux, les courses, le ménage, il
vous reste peut-être juste assez d’énergie pour vous étendre devant le
téléviseur et vous promener d’une chaîne à l’autre jusqu’au moment d’aller
au lit.
Il nous arrive à tous de ne pas distinguer les tâches qui comptent de celles
qui comptent moins et de mettre tout ce qui se présente à nous sur le même
plan. Nous manquons alors de temps et nous remettons à plus tard un tête-à-
tête, une lecture, un voyage, un projet de livre, une soirée entre amis, un
spectacle, un hobby, ou ce simple geste qui nous aurait fait avancer dans la
réalisation d’un rêve. Le stress augmente, les insatisfactions s’accumulent,
la mauvaise humeur s’installe, les problèmes digestifs et les troubles du
sommeil apparaissent. Et pendant ce temps-là, la vie passe…
Les personnes les plus stressées sont celles qui sont perpétuellement
habitées par un sentiment d’urgence, occupées qu’elles sont à répondre aux
demandes des autres. Elles ne parviennent pas à se réserver du temps pour
des activités qui les réalisent, qui leur redonnent de l’énergie, qui les
actualisent. Pourtant, il s’agit bien souvent d’une simple question d’emploi
du temps. Non pas parce qu’un bon emploi du temps élimine les demandes,
mais parce qu’il permet d’intégrer, dans ses priorités, des activités de
l’ordre de l’épanouissement, sans attendre que ne survienne la maladie,
l’épuisement, la crise existentielle… ou la retraite.
Au chapitre 7, vous pourrez donc évaluer l’usage que vous faites de votre
temps dans votre vie. Vous y apprendrez surtout comment l’utiliser en
fonction de vos valeurs, comment programmer judicieusement vos activités
et ne pas vous laisser paralyser par une tâche.

Pour appuyer votre démarche

de changement
Tout changement, même souhaité, charrie avec lui son lot d’émotions, et
certaines sont plutôt destructrices. Telles peuvent être la peur, l’inquiétude,
l’insécurité, la colère, la frustration ou la démotivation, autant d’états
d’esprit qui peuvent nous paralyser et mettre en péril nos efforts.
Or, ceux qui parviennent à changer se caractérisent non seulement par leur
capacité à ne pas se laisser arrêter par ces émotions, mais aussi par leur
habileté à provoquer en eux des états d’esprit positifs, tels l’enthousiasme,
l’entrain, la curiosité, la gratitude, l’assurance, l’humour, la passion, la
détermination, la confiance en soi, la compassion.
Pourquoi est-ce si vital ? Tout simplement parce que nos comportements
dépendent directement de ces états d’esprit. Qu’il nous suffise de penser à
ces journées où nous nous levons du mauvais pied et pendant lesquelles
nous avons l’impression que rien ne fonctionne, que tout va de travers, que
tout ce que nous entreprenons n’aboutit à rien. Certains vont y voir le signe
du destin qui s’acharne sur eux, d’autres diront que les personnes qui les
entourent font vraiment tout pour les contrarier, d’autres encore se
plaindront de la température, du manque de sommeil ou de la mauvaise
qualité de l’air. Toutes ces explications ne sont peut-être pas sans
fondement. Mais elles laissent aussi supposer que l’individu est une victime
passive des événements extérieurs et de ses émotions. Or il est possible, et
même probable, que notre état d’esprit de départ ait lui-même conditionné
nos comportements, pavant ainsi la voie à la lamentable journée que nous
avons vécue.
Toute personne qui désire entreprendre une démarche de changement doit
prendre la responsabilité de ses états d’esprit et cesser de croire qu’ils
dépendent des événements extérieurs. Si vous ne parvenez pas à maîtriser
vos états d’esprit, vous êtes condamné à être contrôlé par eux, victime
impuissante du temps qu’il fait, du résultat d’une partie de hockey ou de
football, ou de l’humeur des gens qui vous entourent. Voilà, sans aucun
doute, une habileté fondamentale à développer pour réaliser ses rêves.
Bien sûr, modifier des états d’esprit paralysants pour en provoquer
d’autres plus dynamisants demande plus qu’un simple acte de volonté. Mais
nous croyons qu’il est possible d’y arriver. Nous allons donc vous proposer,
aux chapitres 8 à 11, des stratégies qui vous aideront dans cette démarche.
Que vous soyez en train de mettre en œuvre les changements dont vous
avez rêvé, ou d’en subir d’autres que vous n’avez pas souhaités, ces moyens
concrets vont faire toute la différence. Leur connaissance et leur application
nous ont d’ailleurs beaucoup aidés nous-mêmes à réaliser nos propres rêves
et à passer à travers des moments difficiles.
La maîtrise de nos états d’esprit ne se réalise toutefois pas en vase clos.
Nous vivons en effet dans un environnement qui nous sollicite sans cesse. À
chaque seconde, des millions d’informations bombardent nos sens. Ne
pouvant accorder son attention à tout en même temps, notre cerveau opère
donc un choix, sélectionnant certaines informations et en éliminant d’autres.
Or, et il faut en prendre conscience, nous devenons ce sur quoi nous
concentrons notre attention. Pour mieux comprendre, voici un exemple.
Vous êtes en vacances, dans votre jardin, avec quelques invités. Votre
attention se promène librement et passe des gouttelettes d’eau qui perlent
sur votre verre au papillon qui vole au-dessus des fleurs, pour revenir
ensuite à la conversation enjouée de deux de vos amis. Bref, vous êtes
détendu. À brûle-pourpoint, l’un d’eux vous demande si vous avez hâte de
retourner travailler la semaine prochaine. Tout de suite, avant même de
répondre, votre attention se déplace vers le lundi qui vient et votre cinéma
intérieur vous présente, plus vraie que vraie, l’image de votre bureau qui
déborde de dossiers tous plus urgents les uns que les autres. Voilà que vous
ressentez un malaise au creux de l’estomac. En un instant, votre état
d’esprit s’est modifié parce que vous avez centré votre attention sur une
autre partie de la réalité qui, c’est le moins qu’on puisse dire, ne semble pas
vous enthousiasmer vraiment. Peut-être même allez-vous perdre votre
bonne humeur, blâmant plus tard ces malotrus d’avoir gâché votre journée
de vacances.
Ce genre de situation, qui nous arrive à tous, illustre bien l’importance
qu’il faut accorder à ce sur quoi nous portons notre attention. Il témoigne
aussi de la nécessité de protéger notre état d’esprit contre les «  poisons  »
extérieurs qui le menacent.
Les personnes qui réussissent à introduire des changements dans leur vie,
ou à progresser à travers des moments difficiles, semblent décider
consciemment à qui et à quoi elles veulent faire cadeau de leur attention.
Leur état d’esprit en dépend et, par conséquent, leurs comportements. Ce
savoir-faire, qui est au cœur même de toute démarche de changement,
s’apprend. Nous vous montrerons donc comment faire le meilleur usage de
votre cinéma intérieur et comment modifier vos façons de voir pour
maintenir ces états d’esprit essentiels qui vont soutenir votre démarche et
accélérer le processus du changement. Vous aurez, entre autres, l’occasion
d’expérimenter un exercice qui, pratiqué régulièrement, modifie
durablement notre humeur pour le mieux, diminuant ainsi le stress et
l’anxiété.

Les autres
L’être humain étant un être social, nul changement important n’est
possible sans la collaboration des autres. En fait, les personnes qui nous
entourent constituent une des richesses les plus importantes dont nous
disposons pour introduire un changement et cheminer dans la réalisation de
nos rêves. Rien ne s’accomplit sans l’aide des personnes qui peuplent notre
intimité ou que nous rencontrons à divers moments sur notre route.
Si vous vous intéressez aux autres et savez écouter, si vous êtes doué de
cette intelligence relationnelle qui permet de communiquer avec respect,
vous disposez d’atouts majeurs dans la démarche que vous entreprenez. Ces
avantages vous permettront même d’aider les autres à progresser avec vous.
Au chapitre  11, nous nous arrêterons donc à une importante clé de la
réussite : l’art de susciter un climat de confiance dans vos rapports avec les
autres. Vous y apprendrez comment créer des ponts avec ceux qui vous
entourent, comment aussi les recréer quand ils sont rompus, dans le respect
des objectifs et des valeurs de chacun. Et surtout, vous y apprendrez une
voie royale vers la réalisation de ses rêves.
Nous tenons enfin à vous présenter une dernière clé sans laquelle aucun
accomplissement n’est possible : la flexibilité et la capacité de lâcher prise.
Plutôt que d’abandonner ou de se décourager, celui qui veut aller de l’avant
doit posséder cette habileté à faire le deuil de manières de faire habituelles,
quand elles ne donnent pas les résultats voulus, pour explorer de nouvelles
avenues. Dans le chapitre  12, vous comprendrez pourquoi il est normal
d’éprouver des difficultés à lâcher prise. Plus encore, vous apprendrez
comment vous pouvez y arriver sans devoir sacrifier votre objectif.
De rêveur à acteur
Voilà donc un aperçu de ce voyage que vous vous apprêtez à entreprendre
avec nous. Si vous êtes prêt à introduire des changements dans votre vie et à
découvrir de nouvelles facettes de votre personnalité, vous vous apprêtez à
vivre une magnifique aventure qui fait que la vie vaut la peine d’être vécue.
C’est un grand privilège que vous nous accordez de nous laisser vous
accompagner tout au long de ce périple, sur cette route où vous allez
découvrir, c’est notre conviction la plus profonde, que vous êtes tellement
plus que ce que vous croyez être. Passer de rêveur à acteur dans sa propre
histoire est, sans aucun doute, un grand plaisir de cette existence et un des
fondements d’une vie épanouie et heureuse.
Laissez donc monter en vous l’excitation que l’on ressent avant de partir
pour un long voyage de découvertes : vous ne serez plus jamais le même,
c’est promis.
1. Isabelle Pauzé, « Changer de cap », in Sélection du Reader’s Digest, Canada, novembre 2005.
2. Ghislain de Montalembert, « 79 % des Français en rêvent : changer de vie ! », Le Figaro magazine, 17 avril 2009.
3. Marguerite Lescop, Le Tour de ma vie en 80 ans, autobiographie, Éditions Lescop, 1996.
4. Id., En effeuillant la Marguerite, autobiographie, Éditions Lescop, 1998.
2

L’inventaire de votre vie


Êtes-vous heureux  ? Votre vie vous satisfait-elle  ? Réussissez-vous à
préserver un équilibre entre les multiples demandes de votre vie personnelle
et de votre vie professionnelle ? Voilà des questions auxquelles il n’est pas
facile de répondre simplement par un oui ou par un non. Mais bien que
difficiles, ce sont pourtant des questions qu’il faut se poser si l’on veut
cerner l’origine de ses insatisfactions et élaborer des stratégies efficaces
pour donner un nouvel élan à sa vie.
Nous allons commencer notre périple par un exercice qui vous permettra
de préciser vos propres réponses à ces questions. C’est un exercice que nous
aimons nous-mêmes pratiquer régulièrement, non seulement parce qu’il
nous donne une sorte de radiographie de notre vie, mais parce qu’il nous
permet de faire le point sur la mise en œuvre de nos projets.
Avant de continuer, nous vous suggérons de vous procurer un cahier qui
vous accompagnera tout au long de ce livre et dans lequel vous allez
consigner les exercices, les réflexions et peut-être les questions qui ne
manqueront pas de surgir au cours de votre cheminement.

Votre vie personnelle


Pour les fins de ce premier exercice, nous allons vous demander de
considérer votre vie personnelle et votre vie au travail comme deux univers
différents. Il s’agit là d’une distinction purement théorique, bien sûr,
puisque dans les faits notre existence n’est pas compartimentée de façon
aussi simpliste. Mais en procédant ainsi, vous pourrez plus aisément dresser
l’inventaire précis de vos insatisfactions et définir les changements qui vous
apparaissent souhaitables.
Concentrons-nous d’abord sur le premier de ces deux univers, celui de la
vie personnelle. C’est un monde très vaste et qui touche à des réalités très
diverses, propres à chacun. Voilà pourquoi personne ne peut, mieux que
nous-mêmes, dresser la liste de tout ce que nous associons à cette grande
sphère de notre existence.
Quelles sont donc les principales composantes de votre vie personnelle ?
Quels en sont les grands domaines, ceux dans lesquels vous trouvez
essentiel d’investir du temps et de l’énergie  ? Pour vous aider dans cet
exercice, nous vous présentons, ci-dessous, quelques-unes des catégories
qui reviennent le plus souvent dans nos ateliers.

La santé physique
C’est le fondement de tout. C’est l’énergie vitale, fondamentale, celle qui
nous permet de passer activement à travers nos journées, de travailler et de
réaliser nos projets. Pour la préserver et l’entretenir, nous nous efforçons de
bien nous alimenter, de rester en forme, de perdre du poids peut-être. Il
suffit d’ailleurs d’en être privé pour en mesurer toute l’importance.

La santé émotionnelle
C’est le carburant émotionnel qui alimente notre vie et lui donne toute sa
saveur. C’est la passion qui nous anime, le feu intérieur qui nous aide à faire
reculer nos barrières, c’est le courage, l’assurance, la confiance en soi, la
motivation. Pour la protéger, nous essayons d’éviter les trop grands stress,
d’entretenir des émotions dynamisantes et de canaliser le mieux possible
celles qui menacent de nous paralyser.

La famille
C’est une grande source de bonheur pour la plupart d’entre nous et
probablement une des valeurs dominantes chez un grand nombre de
personnes. C’est à elle que nous faisons spontanément appel dans les coups
durs, comme c’est vers elle que la majorité d’entre nous se tourne dans les
grands moments de célébration. Elle inclut, bien sûr, le couple, les enfants,
les parents, les frères et sœurs et la famille élargie.
Les amis
C’est la famille du cœur, celle que nous choisissons et qui nous accepte
tels que nous sommes. Ce sont ces personnes élues qui nous accompagnent
à certaines périodes de notre existence, et parfois même tout au long de
notre vie. Ce sont ces gens que nous retrouvons avec plaisir et qui nous
accueillent avec chaleur, ceux avec qui nous aimons rire et échanger autour
d’un bon repas ou en partageant une activité de loisir.

La santé financière
C’est une importante récompense de notre travail. Grâce à elle, nous
pouvons satisfaire nos besoins fondamentaux et ceux des personnes qui
dépendent de nous. Elle nous permet également d’accéder à un confort
certain, de voyager, de nous procurer des biens de consommation et de
contribuer aux œuvres qui nous tiennent à cœur.

La spiritualité
C’est tout ce qui nous met en contact avec plus grand que nous, avec la
nature, la création, l’infini, Dieu. C’est l’essence même de notre être, la
pulsion vitale qui nous met en communion avec l’ensemble de l’univers.
C’est cet immense réservoir d’énergie auquel il nous arrive de nous
abreuver à l’occasion, par exemple devant un paysage exceptionnel, un
magnifique coucher de soleil, ou lors d’une expérience mystique.
Voilà donc six domaines de la vie personnelle qui font à peu près
l’unanimité. Plusieurs personnes trouveront cependant plus pratique de
distinguer la famille et le couple et d’en faire deux catégories différentes.
D’autres vont créer un domaine spécifique qui regroupera tout ce qui touche
à l’apprentissage, à la création, à la culture, à ce qui permet de se
développer et de grandir. D’autres encore accorderont une place spéciale à
leur engagement dans la communauté, au bénévolat, ou encore identifieront
expressément une de leurs passions. Le nombre de catégories retenues peut
donc varier sensiblement d’une personne à une autre.
Prenez donc quelques minutes de réflexion pour répondre à votre tour à
cette question  : quels sont les grands domaines de votre vie personnelle,
ceux que vous trouvez important d’enrichir et de développer pour être
heureux  ? Consignez-les ensuite par écrit dans votre cahier avant de
poursuivre votre lecture. Ne vous contentez pas de ne faire l’exercice qu’en
pensée, sans rien écrire, en vous réfugiant derrière des excuses comme : Je
n’ai pas le temps ! Je ne suis pas au bon endroit ! Je suis trop fatigué ! Je
n’ai pas de cahier ! Je n’ai pas de crayon ! Partir à la recherche de ce qui
vous manque est déjà un premier geste concret dans votre démarche…

Votre vie professionnelle


Que vous soyez employé de bureau, enseignant, cadre, ouvrier,
entrepreneur, professionnel ou étudiant, il y a des domaines qui sont
spécifiques à votre vie au travail. Là aussi, comme dans votre vie
personnelle, vous devez investir temps et énergie pour vous épanouir. Le
choix de ces catégories dépend, bien sûr, du type d’emploi et du poste que
vous occupez, mais certaines sont assez courantes. Mentionnons le
développement de ses compétences, le réseau de contacts, les relations avec
les collègues, les relations avec les supérieurs ou avec les employés, la
recherche d’emploi, le service à la clientèle…
À titre d’illustration, voici quelques-unes des catégories que nous avons
choisies pour notre entreprise de consultants. La performance, qui réfère à
notre habileté à communiquer et à intéresser les auditoires lors de nos
interventions publiques comme les séminaires de formation et les
conférences. L’écriture, qui nous permet de rejoindre les gens par des
articles et des livres qui pourront les inspirer et les aider. Le marketing, par
lequel nous faisons connaître nos produits et nos services. La recherche et
le développement, qui rend compte de notre recherche d’idées nouvelles
pour faire avancer notre entreprise. Le dépassement de nos limites, qui
marque l’importance que nous accordons au fait de nous développer,
d’apprendre et de nous améliorer.
À votre tour maintenant de définir les catégories de votre vie
professionnelle, de retenir celles que vous jugez importantes et de les noter
ensuite dans votre cahier.
Un inventaire chiffré
Maintenant que vous avez dressé la liste des principales composantes de
votre vie personnelle et de votre vie professionnelle, nous pouvons procéder
à la deuxième étape de l’exercice : tenter d’évaluer sommairement où vous
vous situez dans chacun de ces domaines. Nous y arriverons en attribuant
une valeur chiffrée à chacune des composantes que vous avez associées à
ces deux grandes sphères de votre existence.
Commençons par l’univers de votre vie personnelle. Il s’agit ici de
considérer, à tour de rôle, les catégories que vous avez définies (comme
votre condition physique, votre santé émotionnelle, votre famille, et ainsi de
suite), puis de leur attribuer une valeur en pourcentage. Cette valeur
représente, sur une échelle de 100, le degré où vous estimez vous situer
aujourd’hui dans chacun de ces domaines.
Par exemple, une personne pourrait penser  : Ma catégorie santé
physique ? Hum ! Je fais des efforts pour bien m’alimenter, j’ai même cessé
de fumer il y a quelques mois. En plus, je fais de la marche assez
régulièrement. C’est vrai que ces temps-ci, j’ai une vilaine grippe et je me
sens plutôt fatigué en raison d’un surcroît de travail… Je dors moins bien
aussi, ce qui fait que je ne suis pas au mieux de ma forme. Globalement,
j’évalue ma condition physique à 70 %.
Ma catégorie famille ? Je l’évalue à 90 %. Je réussis à prendre du temps
avec mes enfants, d’autant plus que mon aîné vient de commencer l’école et
qui demande davantage. C’est vraiment important pour moi d’être là pour
eux. Les rapports sont très bons aussi avec ma famille élargie  ; on se
rencontre régulièrement ces temps-ci pour aider un de mes frères à
emménager dans sa nouvelle maison.
Par contre, pour ce qui est de ma catégorie amis, je sens que je la néglige
un peu. Cela fait un bon moment que je ne les ai pas vus. Je n’ai même pas
pris le temps de leur téléphoner et je me languis de nos rencontres autour
d’un bon repas. J’évalue son développement actuel à 30  % de ce que
j’aimerais qu’il soit.
Ma santé financière  ? Ouais  ! Ce n’est pas mon domaine le plus
développé. L’argent sort plus vite qu’il n’entre, j’ai toutes sortes de
dépenses. Les réparations sur ma voiture m’ont coûté cher. En plus, mes
placements sont difficiles ces jours-ci. 40 % décrirait bien l’état actuel de
cette catégorie.
Vous avez bien compris le fonctionnement de l’exercice ? C’est le moment
de procéder à votre propre inventaire. Sur une échelle de 100, où vous
situez-vous aujourd’hui par rapport à chacune des composantes de votre vie
personnelle ?
Après avoir noté ces premiers résultats dans votre cahier, répétez
l’exercice avec les catégories que vous avez associées à votre vie
professionnelle. À combien évaluez-vous votre situation actuelle dans
chacune des composantes de votre vie au travail ? Là aussi, prenez le soin
de consigner vos résultats par écrit.

Les roues de l’équilibre


Vous disposez maintenant d’un inventaire détaillé et chiffré de votre vie
personnelle et de votre vie au travail. Cet inventaire est intéressant à
plusieurs égards. Tout d’abord, parce que c’est peut-être la première fois
que vous réfléchissez aux principaux domaines à développer et à entretenir
pour vous épanouir dans ces deux grandes sphères de l’existence. Ce
premier pas est capital pour la suite des choses. Non seulement il contient
déjà l’amorce de votre démarche de changement, mais il suggère aussi les
lignes directrices qui vont vous guider dans le partage judicieux de cette
denrée rare qu’est le temps. Nous consacrerons d’ailleurs tout le chapitre 7
à cette délicate question de l’utilisation de notre temps.
Pour mieux visualiser les résultats de votre inventaire, nous allons
maintenant les transposer sur deux graphiques similaires, l’un représentant
votre vie personnelle, l’autre votre vie au travail.
Dans votre cahier, commencez par tracer un grand cercle : c’est la sphère
de votre vie personnelle. À présent, divisez-le en autant de parties que vous
avez attribué de composantes à cette sphère majeure de votre vie. Chacun
des domaines de votre vie personnelle est ainsi illustré par une pointe, qu’il
ne reste plus maintenant qu’à identifier. À l’extérieur du cercle, vis-à-vis de
chacune des pointes, inscrivez donc le nom que vous avez assigné à
chacune des catégories, comme illustré dans l’exemple présenté à la
figure 1.

Figure 1
Pour compléter le graphique, vous n’avez plus qu’à transposer, dans
chacune des pointes de votre cercle, les valeurs chiffrées que vous avez
définies dans votre inventaire. Convenons que la valeur zéro (0) est en plein
centre du cercle, là où les lignes se croisent, et que la valeur cent (100) se
trouve à la périphérie. Tracez maintenant dans chaque pointe une ligne
transversale qui correspond à votre évaluation, comme l’illustre l’exemple
de la figure 2.

Figure 2
Vous venez de dessiner la première roue sur laquelle roule votre vie.
La deuxième roue, c’est celle de votre vie professionnelle, que vous
pouvez maintenant dessiner en procédant de la même manière. Tracez donc
un deuxième cercle et, comme vous l’avez fait précédemment pour votre
vie personnelle, séparez-le en autant de sections que nécessaire en y
transposant chacune des catégories professionnelles retenues, puis en
traçant une ligne transversale qui correspond à la valeur que vous lui avez
attribuée.

L’équilibre
On entend souvent parler de «  l’équilibre travail-famille  ». Mais cette
notion demeure trop souvent restrictive et abstraite.
Elle est restrictive, parce qu’elle ne prend en compte que deux des
nombreuses composantes de notre vie, et encore en termes très généraux.
C’est également une notion abstraite, dans la mesure où elle n’offre aucun
moyen concret pour mesurer l’équilibre dont elle se réclame.
Il en va tout autrement pour l’inventaire que vous venez de dresser. Ce
double graphique constitue, en effet, une représentation imagée de
l’équilibre qui règne dans votre vie, avec ses forces et ses faiblesses. Pareil
à une radiographie prise à un moment précis, il fournit une image complète
et nuancée de l’équilibre qui règne dans votre vie et suggère même déjà des
pistes à emprunter pour l’enrichir.
Comme nous menons bien souvent nos vies à cent kilomètres à l’heure, il
est essentiel que notre véhicule s’appuie sur deux roues bien équilibrées,
sous peine de tensions qui nous forceront, tôt ou tard, à ralentir, sinon à
nous arrêter pour réparer les dommages. Ces tensions, ce sont les stress
exagérés que nous nous imposons et qui s’accompagnent d’états d’esprit
qui usent prématurément, comme l’irritabilité, le découragement,
l’insatisfaction, la démotivation, l’anxiété, la peur, la nervosité, la
frustration, le doute et la culpabilité. Quant aux dommages résultant des
mauvais traitements répétés imposés à notre «  véhicule  », ils peuvent se
présenter sous diverses formes, telles l’insomnie, les maux de tête ou de
dos, l’hypertension artérielle, les troubles de l’appareil digestif, la baisse de
la libido ou l’impuissance, les malaises cardiaques et la dépression.

Alors ! Ça roule ?
Vous trouverez certainement plus aisé maintenant de répondre aux
questions que nous avons posées en début de chapitre. D’un seul coup
d’œil, vous pouvez embrasser le bilan de votre vie. Prenez donc un peu de
temps pour examiner de plus près les deux roues dont dépend votre
équilibre.
Autant dans votre vie personnelle que dans votre vie au travail, il y a
certains domaines où votre niveau de satisfaction est plus élevé qu’ailleurs.
S’il en est ainsi, c’est probablement que vous y mettez beaucoup de votre
énergie et de votre temps, peut-être parce que c’est plus facile pour vous ou
que vous privilégiez particulièrement ces domaines dans votre échelle de
valeurs. Si votre couple se porte bien, en effet, c’est sans doute que vous
prenez le temps de l’alimenter. Ce n’est pas un hasard non plus si votre
santé physique est au mieux  ; il y a fort à parier que vous y mettiez les
efforts nécessaires. Si votre réseau de contacts est particulièrement étendu,
c’est que vous avez pris soin de le créer et de l’entretenir. Si le service à la
clientèle de votre entreprise est si performant, c’est que vous en avez fait
une priorité et que vous consacrez les ressources nécessaires pour former
votre personnel en ce sens.
Est-ce à dire que les domaines les moins développés souffrent forcément
d’un manque d’implication de votre part ? C’est vous qui pouvez le mieux
répondre à cette question. Bien sûr, personne n’est à l’abri d’un accident de
parcours qui diminue le niveau de son énergie physique, d’un coup dur qui
mine sa santé psychologique, ou d’un imprévu qui perturbe ponctuellement
l’un ou l’autre domaine de sa vie. Mais bien souvent, les domaines les
moins développés souffrent d’une carence d’engagement de notre part, soit
par négligence, soit par manque d’intérêt, d’habileté ou de moyens, soit tout
simplement en raison de croyances qui paralysent notre action.
Il se peut enfin que votre degré de satisfaction soit à peu près le même
dans chacune des composantes de votre vie, mais sans toutefois atteindre un
niveau très élevé. Est-il possible alors que votre vie se déroule relativement
bien, mais qu’elle ne soit pas à la hauteur de vos aspirations et de vos
attentes  ? Peut-être même, à la limite, fonctionnez-vous en mode survie.
Vous seriez alors, pour reprendre l’analogie utilisée plus haut, un peu
comme une bicyclette équipée de deux petites roues  : même si elle roule
relativement bien, elle requiert cependant beaucoup plus d’énergie pour
parcourir la distance qu’un vélo mieux équipé couvrirait en quelques tours
de pédalier.
Quelles que soient les carences que vous signale votre inventaire, il ne
s’agit pas pour l’heure de chercher des excuses ou de distribuer les blâmes.
Il s’agit tout simplement de prendre acte des forces et des faiblesses que
vous avez détectées. Faire le point sur ses réussites et ses insatisfactions est
déjà un pas important sur la voie du changement.
Avant d’aller plus loin, permettez-nous d’insister encore une fois, auprès
de ceux qui ne l’auraient pas encore fait, sur l’importance de dresser dès
maintenant leur bilan et d’en consigner les résultats par écrit. En vous
permettant de vous centrer sur ce qui compte le plus pour vous, il vous
donnera peut-être le signal que vous attendiez pour passer concrètement à
l’action. Mais surtout, il sera la pierre d’assise sur laquelle, dans les
chapitres suivants, nous nous appuierons pour donner une forme plus
concrète à votre désir de changement.

Une goutte à la fois


Déjà, plusieurs questions doivent vous venir en tête  : Est-ce que ce sera
possible dans ma situation ? Est-ce j’ai ce qu’il faut ? Ne suis-je pas trop
vieux  ? Est-ce que je vais trouver le temps et l’énergie  ? Est-ce que c’est
encore possible de rêver, j’ai tellement été déçu  ? Par quel bout dois-je
commencer, cela m’apparaît tellement gros et difficile ?
Pour le moment, laissez-nous vous raconter une anecdote. En 2000,
pendant notre premier voyage en France, nous avons traversé plusieurs
villes et villages du sud de ce magnifique pays. Nous y avons visité, entre
autres, des églises, des cathédrales et quantité de monuments très anciens.
Souvent, on mentionnait que tel ou tel village était une étape sur le chemin
de Saint-Jacques-de-Compostelle. C’était la première fois que nous
entendions parler de ce pèlerinage millénaire qui attirait en Espagne, dès le
Moyen Âge, des gens de tous les milieux et de toutes les conditions. Après
nous être mieux documentés, nous apprenions qu’aujourd’hui encore, des
milliers de marcheurs convergent vers ce centre de la chrétienté. Petit à
petit, l’idée d’aller marcher à son tour sur ces routes d’Espagne a germé
dans l’esprit de Marc. De simple souhait à l’origine, l’idée s’est ensuite
transformée en rêve, puis en projet. Mais, en même temps, toutes les
questions que nous avons évoquées plus haut se sont mises à affluer. Ces
questions, vous l’avez sans doute déjà remarqué, agissent un peu comme un
verre déformant qui amplifie nos doutes et mine notre confiance.
À l’été 2002, Marc partait avec Marc-Olivier, un de nos enfants, pour
parcourir à pied la distance qui sépare Saint-Jean-Pied-de-Port, en France,
de Saint-Jacques-de-Compostelle, en Espagne. Il se confirmait ainsi que
tout commence par un rêve qui nous inspire, qui nous mobilise, qui nous
pousse vers l’avant. Mais surtout, il faisait la preuve qu’il n’y a qu’une
façon de venir à bout d’un trajet de 850  kilomètres, et c’est de s’engager
résolument sur la route, puis d’avancer, un pas après l’autre. Jamais son fils
et lui n’auraient cru possible de parcourir 25, 30, voire 40 kilomètres en une
seule journée, surtout pas avec une douzaine de kilos sur le dos. Et pourtant,
un kilomètre à la fois, ils atteignaient Saint-Jacques-de-Compostelle
six semaines plus tard.
C’est un peu la même chose avec la démarche que nous avons entreprise
ensemble dans ce livre. Même si vous ne savez pas encore où commencer,
même si vous n’êtes pas convaincu d’avoir ce qu’il faut pour y parvenir,
même si vous êtes incapable d’imaginer à l’avance les paysages que vous
allez traverser et les collines que vous aurez à gravir, vous avez ce qu’il faut
pour y arriver. Nous sommes d’ailleurs là pour vous servir de guide et vous
accompagner, pas à pas justement. Et un soir prochain, comme sur le
chemin de Compostelle, vous regarderez derrière vous et serez étonné de
constater toute la distance que de simples gestes, posés l’un après l’autre,
vous auront permis de franchir.
Guy Laliberté, fondateur du Cirque du soleil, a créé en 2007 la fondation
One Drop5 pour réaliser son rêve d’un monde où chaque être humain aurait
accès à l’eau et pourrait vivre dignement et en bonne santé. « Une goutte à
la fois, un geste à la fois, nous pouvons y arriver », écrit-il dans une formule
qui résume très bien la façon dont nous devons voir les choses pour réaliser
nos propres rêves. L’inventaire de votre vie constitue déjà un premier pas
significatif vers l’existence que vous souhaitez vivre. Terminez-le, si ce
n’est pas déjà fait, puis laissez-vous glisser dans le prochain chapitre où
vous aurez le rare privilège de visualiser, pour la première fois peut-être,
l’existence à laquelle vous aspirez.
5. Voir le site Internet de la fondation One Drop (https://www.onedrop.org/fr).
3

À vos marques, soyez prêts, rêvez !


Tu peux tout accomplir dans la vie si tu as le courage de le rêver,
l’intelligence d’en faire un projet réaliste et la volonté de voir ce
projet mené à terme.
Sidney A. Friedman

L’inventaire de votre vie personnelle et de votre vie au travail, que vous


avez dressé au chapitre précédent, a probablement déjà mis en évidence
quelques-unes de vos insatisfactions, là où s’accumule l’énergie qui vous
propulsera bientôt en direction de vos rêves. C’est bien connu, l’inconfort
fait bouger et constitue un excellent moteur du changement. Face aux
lacunes que vous avez relevées, la pire réaction serait de vous décourager,
de vous blâmer, de vous sentir coupable et démotivé. Ne regardez pas
négativement ces carences et les sentiments qu’elles provoquent  ; au
contraire, accueillez-les comme des amies. Nous verrons justement, dans le
présent chapitre, comment vous pouvez les utiliser comme un tremplin pour
introduire dans votre vie les changements que vous souhaitez.

L’importance du rêve
«  Ayez des rêves et travaillez très fort pour les réaliser  ! Mais surtout,
faites des choses que vous aimez parce qu’alors, les efforts pour les
atteindre paraîtront moins exigeants. » Cette recommandation sort tout droit
de la bouche de Julie Payette, première astronaute canadienne, qui
s’exprimait ainsi en 1999, juste avant son premier voyage dans l’espace à
bord de la navette spatiale Discovery.
Nous retrouvons dans cette phrase trois éléments fondamentaux et
indissociables pour réussir à introduire des changements dans notre vie. Le
premier, c’est le rêve. Bien avant de répondre à l’annonce de la Nasa qui
recherchait des astronautes, Julie Payette avait dit  : «  Un jour, je partirai
dans une fusée et je ferai le tour de la Terre pour contempler le monde6. »
D’où la nécessité de voir loin, de laisser notre imaginaire créer ce qui
n’existe pas encore et que nous désirons voir apparaître dans notre vie. Le
second élément, c’est la découverte de nos intérêts. Apprendre à nous
connaître, donc, afin que nos désirs et nos choix correspondent
profondément à ce que nous sommes et qu’ils ne résultent pas bêtement
d’un caprice, d’une mode ou, pire, des besoins des autres. Le troisième
élément, c’est l’effort et son corollaire, la persévérance, qui permettent de
faire les choix qui s’imposent, de travailler jour après jour, patiemment,
pour maîtriser les habiletés qui rendront possible le changement. Voilà ce
qui a permis à la petite fille de dix ans, qui regardait avec envie les
reportages télévisés sur les missions spatiales américaines, de faire partie du
vingt-sixième vol de la navette spatiale.
Vous objecterez peut-être qu’il est question ici d’une femme brillante,
exceptionnellement douée, et surtout pas d’une personne ordinaire. Sans
doute. Mais contrairement à ce que l’on croit souvent, ce ne sont pas
nécessairement les gens les plus talentueux qui persévèrent jusqu’à la
réussite. Ce sont ceux qui sont animés, au départ, par un rêve, par un vif
désir de réussir, et qui sont prêts à investir le temps et l’énergie nécessaires
pour poser les gestes qu’il faut, même si ce n’est pas toujours palpitant.
Quand il avait cinq ans, Alexandre Despatie, comme bien des enfants qui
s’amusent dans la piscine familiale, démontrait un intérêt pour le plongeon.
Mais ce sont les efforts qu’il a déployés, jour après jour, pour se
conditionner physiquement et mentalement, pour répéter les mêmes gestes
et pour supporter la monotonie des entraînements, qui lui ont permis d’être
le champion qu’il est devenu7.
Vous n’ambitionnez sans doute pas de gagner une médaille olympique ou
d’effectuer un voyage dans l’espace. Votre rêve à vous, c’est peut-être
d’abandonner une habitude que vous jugez nuisible, d’avoir une relation de
couple plus satisfaisante, de maîtriser un instrument de musique,
d’apprendre une nouvelle langue ou de lancer votre propre entreprise. Ou
encore, vous souhaiteriez orienter autrement votre vie professionnelle et
vous investir dans un travail où vous auriez l’occasion de rencontrer
d’autres personnes, dans un environnement plus stimulant, en ayant le
sentiment d’être plus utile, plus créatif, mieux payé. Peut-être même êtes-
vous depuis longtemps attiré par l’idée d’aller à l’étranger pour œuvrer en
coopération internationale.
Quels que soient les changements auxquels nous aspirons, ils prennent
tous d’abord racine dans notre imaginaire et dans le formidable potentiel
d’énergie qu’il recèle. Pour chacun d’entre nous, comme pour ceux et celles
dont les exploits font parfois la une des journaux, la pierre angulaire d’un
changement réussi, c’est notre capacité à lever un coin du rideau qui
masque nos rêves.

Le subconscient comme conseiller


Dans tous les séminaires de formation que nous avons suivis et dans tous
les volumes que nous avons lus sur le thème du changement, depuis
Napoléon Hill avec son best-seller The Law of Success écrit en 1928
jusqu’aux gourous actuels de la motivation comme l’Américain Anthony
Robbins, nous avons trouvé la même injonction. Elle pourrait se formuler
ainsi  : ayez des objectifs clairs qui vous appartiennent et que vous rêvez
d’atteindre.
Il s’agit là d’une prescription fondamentale à laquelle il nous faut revenir
régulièrement, un peu comme les athlètes professionnels reprennent
inlassablement les mêmes mouvements lorsqu’ils sont à l’entraînement. On
pourrait croire, en effet, qu’arrivés à leur niveau d’excellence, les grands
champions peuvent se passer de pratiquer certains exercices élémentaires,
mais c’est pourtant loin d’être le cas. C’est la même loi qui s’applique
quand nous voulons introduire des changements dans notre vie. Voici une
histoire qui vous aidera à en comprendre les raisons.
Un jour, une personne se présente dans une agence de voyages pour
rencontrer la conseillère. La conversation s’engage :
—  Bonjour  ! On m’a beaucoup vanté vos mérites. J’espère que vous
pourrez me guider.
— Je vais faire l’impossible. Comment puis-je vous aider ?
— Eh bien, j’aimerais, si c’est possible, ne pas aller à Ottawa.
— Pardon ?
—  Je vois que vous hésitez. Pourtant on m’avait dit que vous pouviez
m’aider…
— Euh… Bien sûr que c’est possible de ne pas aller à Ottawa, mais…
—  Ouf  ! Je suis rassuré. Pendant un moment, j’ai eu peur que votre
réputation soit surfaite. En fait, comprenez-moi bien, je n’ai rien contre
cette ville, vous savez, mais je suis allergique aux tulipes et il y en a partout
à Ottawa.
— D’accord, mais…
— Serait-il possible aussi de ne pas aller en Floride ou dans le sud de la
France ? Parce que moi, vous savez, le soleil, la chaleur…
— Oui, c’est possible aussi de ne pas aller en Floride ou dans le sud de la
France, mais dites-moi…
— Ah ! Et puis j’aimerais bien, si c’est toujours dans vos cordes bien sûr,
ne pas aller sur les plages de l’Île-du-Prince-Édouard. Je ne parle pas très
bien anglais et je n’aime pas beaucoup avoir du sable dans mes souliers. Et
puis, tant que j’y suis, est-ce je pourrais ne pas aller au…
— Excusez-moi, mais pourriez-vous me dire où vous souhaitez aller ?
Si vous aviez été à la place de la conseillère, voilà certainement la
question que vous auriez posée. En fait, tant que notre voyageur en
puissance énumère les endroits qu’il ne souhaite pas visiter, il n’utilise pas
vraiment les compétences de la conseillère et elle ne peut pas l’aider
comme elle en est capable.
Considérons notre cerveau, notre subconscient si vous préférez, de la
même manière que cette conseillère. Quand nous lui présentons ce que nous
ne voulons pas, nous le paralysons jusqu’à un certain point. C’est le cas
lorsque nous nous plaignons constamment d’une situation ou d’une
personne, au lieu de réfléchir et de formuler ce que nous souhaitons
vraiment. Nous nous privons alors d’un outil prodigieux qui pourrait se
mobiliser pour nous aider à réaliser des objectifs qui nous appartiennent en
propre, qui nous animent, qui nous passionnent même. Encore faut-il les
formuler clairement.
Revenons à notre client de tout à l’heure. Après avoir bien réfléchi, il
exprime son désir ou son rêve de voir l’Europe, plus particulièrement la
France et Paris qu’il veut visiter depuis fort longtemps. Aussitôt, la
conseillère se mobilise et lui présente une kyrielle d’informations
pertinentes pour l’aider à préparer son voyage. Elle lui offre des cartes, lui
parle de sites à ne pas manquer, lui suggère des routes à découvrir et
d’autres à éviter, lui propose différents types d’hébergement, de transport, et
combien plus encore. Et quand notre voyageur quittera la conseillère, son
propre subconscient prendra la relève. Curieusement, tout ce qui se
rapporte, de près ou de loin, à sa destination va dès lors prendre un nouveau
sens. Il remarquera un livre dans une librairie, un reportage à la télé, un
article dans un magazine, les paroles d’une chanson, et ainsi de suite. Cette
information était là précédemment, mais maintenant, elle est devenue
significative pour lui. C’est ainsi que fonctionne le cerveau.
Nous avons d’ailleurs nous-mêmes vécu une expérience similaire pendant
l’année qui a précédé le pèlerinage de Saint-Jacques-de-Compostelle. Ce
périple à pied, qui n’avait été qu’un vague souhait au départ, était désormais
un rêve qui animait et qu’avait résolu de réaliser l’un de nous deux. Une
abondance d’informations ayant un lien avec cette marche millénaire s’est
alors présentée à nous, comme si l’univers nous faisait un formidable clin
d’œil. Le plus cocasse fut sans doute quand, lors d’un séjour de pêche
plusieurs mois avant le départ, nous sommes tombés sur un vieil exemplaire
de la Sélection du Reader’s Digest qui traînait au chalet et dans lequel il y
avait un article intitulé «  Sur la route de Saint-Jacques-de-Compostelle8 ».
Coïncidence ? Magie ? Bien sûr que non. Simplement la suite logique d’un
objectif déjà bien défini, d’une motivation effective à l’atteindre et d’un
subconscient qui se mobilise pour relever les informations pertinentes.
Décider ce que l’on veut vraiment permet de mettre à son service les
ressources insoupçonnées de ce magnifique outil qu’est le cerveau.
Rappelez-vous : presque tout ce dont vous profitez actuellement dans votre
vie a commencé par un souhait sincère. Rien n’arrive qui n’a pas déjà été
imaginé. Que ce soit la personne avec qui vous vivez, le bébé que vous
portez, la maison ou l’appartement que vous habitez, le voyage d’agrément
que vous allez entreprendre bientôt, le livre que vous êtes en train de lire ou
les gens que vous fréquentez, rien n’est le fruit du seul hasard. Vous l’avez
voulu et désiré à un moment donné.

À quoi rêvez-vous ?
Il est souvent difficile de savoir par où commencer lorsque vient le temps
de formuler des projets et d’expliciter nos rêves. Cela peut même nous
sembler compliqué, voire décourageant. Tel n’est cependant pas le cas avec
la démarche que nous allons maintenant vous proposer. Simple, concrète,
elle vous facilitera grandement la tâche et vous permettra d’amorcer les
changements auxquels vous aspirez.
Notre démarche s’appuiera largement sur le bilan de votre vie personnelle
et professionnelle que vous avez dressé au chapitre précédent. Détaillé et
chiffré, cet inventaire vous a déjà permis de prendre la mesure de vos
propres réussites et insatisfactions. Il est donc la pierre d’assise idéale sur
laquelle édifier votre vision d’avenir et lui donner une première forme
concrète.
Pour les fins de l’exercice, nous allons nous concentrer essentiellement sur
l’univers de votre vie personnelle, étant bien entendu que vous pourrez
ensuite appliquer la même procédure à la sphère de votre vie
professionnelle. En vous appuyant, donc, sur ce que vous avez déjà noté
dans votre bilan personnel, que rêvez-vous de changer, de vivre ou de
réaliser dans cette importante sphère de votre vie ?
N’ayez crainte, nous vous donnerons ci-dessous quelques repères pour
vous guider dans la formulation de vos réponses. Pour l’instant, permettez-
nous d’insister sur un point capital. Une des clés pour réussir cet exercice,
c’est de mettre de côté votre sens critique, d’imaginer qu’il suffit
d’exprimer vos rêves pour qu’ils prennent forme, un peu comme si vous
aviez en main la lampe d’Aladin. C’est de cette façon que vous vous
engagerez sur la voie de vos aspirations profondes et que vous formulerez
des objectifs que vous serez ensuite motivé à atteindre.
L’autre clé du succès, c’est de ne pas hésiter à hausser vos standards
habituels. Qu’est-ce qu’un standard  ? C’est une norme de fonctionnement
ou de développement fixée par la société, par l’entourage ou par soi-même.
C’est ce que nous considérons comme notre niveau normal de performance
ou de développement. Il y a, en effet, trois choses à modifier quand nous
voulons arriver à un changement qualitatif intéressant  : tout d’abord, nos
standards, ensuite, les croyances qui nous limitent et, enfin, les stratégies
inefficaces. Nous reviendrons plus en profondeur sur les croyances et les
stratégies dans les prochains chapitres. Mais pour que vous compreniez
mieux ce qu’est un standard, nous allons à nouveau vous faire part d’une
expérience.
Avant d’entamer leur périple vers Saint-Jacques-de-Compostelle, plusieurs
pèlerins en puissance sont déjà des amateurs de marche, cela ne fait pas de
doute. Mais, contrairement à ce que l’on pourrait croire, la majorité d’entre
eux ne sont pas des habitués des longues randonnées. Tout au plus se
livrent-ils, à l’occasion, à des balades de cinq ou dix kilomètres, et encore
avec un bagage très léger. Voilà leur standard. Or, quand ils partiront à pied
sur les routes de France et d’Espagne et qu’ils emprunteront le Camino
francés, chemin le plus fréquenté par les pèlerins, ils s’engageront dans un
périple de plusieurs centaines de kilomètres, pendant lequel il leur faudra
parcourir tous les jours, bien souvent, vingt et parfois trente kilomètres,
avec un bagage d’une dizaine de kilos sur le dos. Inutile de dire que l’esprit
se rebelle à la perspective d’entreprendre et de mener à terme une telle
expédition. Pour y arriver, le marcheur devra donc hausser ses standards
habituels, développer progressivement la croyance qu’il est possible de
venir à bout d’une telle distance, et poser quotidiennement les gestes qui lui
permettront, un pas à la fois, c’est le cas de le dire, de se renforcer et de
dépasser ses limites actuelles.
C’est la même chose quand nous voulons modifier l’un ou l’autre aspect
de notre vie. Chacun de nous possède des normes de fonctionnement et de
performance qui lui sont coutumières, sa zone de confort qui lui procure
sécurité et tranquillité d’esprit, même si elle ne lui offre pas toujours la joie
et la satisfaction qu’il peut espérer. Or, l’exercice que nous vous proposons
maintenant vous fournit une occasion en or pour fixer, dans certains
domaines de votre vie, de nouveaux standards. Ils vous apparaîtront peut-
être inaccessibles au départ, mais ils feront, demain, partie de votre vie
parce que vous y aurez cru et que vous aurez posé les gestes requis pour les
atteindre. Rappelez-vous : vous êtes beaucoup plus que ce que vous croyez
être.
Revenons donc maintenant à la sphère de votre vie personnelle et aux
changements que, sur la base de l’inventaire que vous en avez dressé, vous
souhaiteriez y apporter. Arrêtons-nous d’abord à la catégorie Santé
physique. À quoi rêvez-vous dans ce domaine particulier de votre vie  ?
Quelle sorte de personne désirez-vous être physiquement  ? Que voudriez-
vous améliorer  ? Si vous étiez sûr de réussir, qu’est-ce que vous
souhaiteriez pour vous-même à cet égard ?
Suspendez un instant la question, bien naturelle, de savoir comment vous
allez vous y prendre et reprenez contact avec l’enfant en vous qui croit qu’il
lui suffit de demander pour obtenir ce qu’il veut. Fermez les yeux et prenez
le temps d’imaginer, dans votre cinéma intérieur, la personne que vous
souhaitez devenir. Comment vous voyez-vous physiquement au mieux de
votre forme ? Même si vous êtes encore loin de cette réalité, écrivez dans
votre cahier la vision qui va donner une direction à vos efforts
d’amélioration et de changement dans le domaine de votre santé physique.
Il ne s’agit pas ici d’écrire des choses comme : Je veux faire de l’exercice
ou : Je veux manger plus de légumes ou Je veux m’inscrire dans un centre
d’entraînement. Ce sont là des moyens – que vous allez peut-être d’ailleurs
choisir de mettre en action un peu plus tard. Pour le moment, décrivez
plutôt ce à quoi vous rêvez pour vous dans ce domaine, quelque chose qui
vous mobilise et qui vous attire. Et n’hésitez pas à voir grand.
Voici comment des participants à nos ateliers ont formulé leur propre
vision dans ce domaine. Un premier écrit  : Je vois un corps sain, qui
dégage une grande énergie et dans lequel je me sens bien, confortable. Je
me vois en possession d’un véhicule physique qui me permet d’accomplir
facilement mes journées et qui me porte dans l’atteinte de mes désirs les
plus chers.
Un autre écrit : Mon corps est un exemple de beauté, de force, de vitalité,
de puissance, d’endurance et il m’aide dans ces activités qui me permettent
de rendre ce monde encore meilleur.

D’autres exemples dans la sphère personnelle


Quand vous aurez terminé avec le premier domaine, vous pourrez suivre
la même démarche dans tous les autres. Voici d’ailleurs quelques exemples
additionnels.

Le couple : Je me vois dans un couple fort, générateur d’amour et


de réussites, heureux de se retrouver, de partager des expériences.
Un couple en marche, allumé, créateur. Je me vois comme une
personne amoureuse, qui désire rendre heureuse la personne qui
l’accompagne dans sa vie. Ou encore  : Je me vois comme une
dynamo qui pousse le couple en dehors de la routine, hors des
sentiers parfois rabat-joie de l’habitude. Je vois mon couple comme
une équipe soudée par une affection commune, qui développe des
rêves partagés, qui explore de nouveaux horizons.
La famille : Je me vois comme un supporteur de l’énergie vitale de
mes enfants. Un exemple à imiter et à dépasser. Une personne
disponible, qui assiste, écoute et appuie les efforts de ses membres,
intéressée à favoriser leur développement et contribuant à créer un
climat d’amour et d’affection mutuelle.
La santé émotionnelle : Je me vois comme une personne confiante,
sûre d’elle-même, qui n’a pas toujours besoin de la confirmation des
autres, capable de se référer à elle-même pour affirmer ses goûts et
ses préférences. Je me vois comme une personne qui avance vers ses
objectifs de façon déterminée, en gardant le contrôle de ses moyens.
Ou encore : Je me vois comme un être positif, irradiant la confiance,
l’humour, la détermination, les qualités humaines. Je me vois comme
un combattant qui relève ses manches et qui continue à faire reculer
les barrières de la peur, capable d’affirmer positivement ce qu’il est,
sans violence verbale, sans colère.
La santé financière : Je me vois indépendant financièrement, avec
assez d’aisance matérielle pour pouvoir aider qui je veux et voyager
où je veux. Je me vois capable d’économiser pour placer et faire
fructifier mon argent.
La spiritualité : Je me vois comme une personne émettant des ondes
de bonheur, rendant meilleurs les gens qu’elle rencontre. Quelqu’un
de bon, qui fait le bien autour de lui, qui sait entrer en lui-même,
prendre le temps de méditer, de se retrouver, d’entrer en contact avec
la nature et d’apporter sa contribution aux autres.

La sphère professionnelle
En procédant à l’inventaire de votre vie professionnelle, vous avez
probablement choisi de privilégier certains domaines bien spécifiques. Pour
chacun d’entre eux, et en utilisant la technique que vous venez d’appliquer
aux domaines de votre vie personnelle, vous pouvez maintenant formuler
votre propre vision d’avenir. En guise d’illustration, voici notre vision
personnelle, formulée à la première personne, dans cinq des catégories
spécifiques à notre entreprise Oserchanger.com, soit la performance, la
recherche et le développement, le marketing, les traces de lumière et le
dépassement de nos limites.

La performance, domaine vital pour nous puisqu’une grande partie


de notre travail consiste à nous présenter devant des auditoires pour
livrer des conférences et animer des séminaires de formation : Je me
vois devant des centaines de personnes. Je soulève l’auditoire par
mon énergie, mon originalité, mon humour, mon authenticité et mon
don de la parole. Je réussis à mobiliser et à intéresser par ma
sincérité et ma passion. Peu importe le groupe devant lequel je me
retrouve, je suis enthousiaste et performant. Je me vois comme un
des excellents communicateurs du monde francophone, précédé
d’une réputation de compétence, de connaissances, de savoir-faire et
d’énergie. J’ai la capacité de faire bouger les gens, de les
conscientiser, de les outiller, de leur faire réaliser qu’ils sont bien
plus que ce qu’ils croient être et qu’une partie de leur mission sur
terre consiste à faire reculer leurs barrières.
La recherche et le développement, catégorie de notre vie
professionnelle qui fait appel au désir de faire progresser notre
entreprise  : Je me vois comme un entrepreneur qui développe sans
cesse le potentiel de l’entreprise, toujours à l’affût d’idées nouvelles,
à la recherche des personnes et des moyens de formation qui
répondront le mieux aux besoins de la clientèle. Je suis un créateur
et un transmetteur des meilleurs outils pour aider les gens qui le
veulent à prendre conscience de leurs possibilités et à avancer.
Le marketing, domaine qui réfère aux moyens à prendre pour faire
connaître tout ce que notre entreprise a à proposer. Je trouve des
idées extraordinaires pour informer nos clients potentiels sur la
qualité de nos services et la compétence de nos formateurs. Je
m’assure que nos produits sont en constante demande et que notre
entreprise est perçue comme un choix incontournable quand il s’agit
de conférences et de séminaires de formation sur la gestion du stress,
le développement d’habiletés en communication, l’adaptation réussie
au changement et le développement personnel.
Les traces de lumière, catégorie qui évoque, sous forme imagée, nos
productions audio et nos écrits, livres et articles : Je laisse des traces
de lumière qui appellent à aller plus loin, à dépasser ses limites. Des
traces de lumière dans l’esprit des gens, qui se répandent à travers le
monde francophone. Des textes et des productions audio et vidéo qui
poursuivent le travail des conférences et des formations et qui
rejoignent un grand nombre de personnes, là où elles sont.
Le dépassement de nos limites, domaine qui rend compte de la
valeur que nous accordons à notre constant développement, comme
personne et comme professionnel : Je me vois comme quelqu’un qui
va chercher les enseignements et les connaissances qui lui
permettent d’apprendre, de grandir, de dépasser et de faire reculer
ses limites. Je rencontre des gens qui sont des modèles, qui proposent
des stratégies nouvelles me permettant de raffiner mes outils et de
mieux les transmettre. Je me vois comme une personne qui apprend
et se développe à partir de documents inspirants issus de plusieurs
sources.

C’est le moment de vous lancer


Ne faites pas de trop petits rêves, car ils n’ont pas

le pouvoir de faire avancer les hommes.

Goethe

Cet exercice, vous l’avez compris, demande réflexion. Voilà pourquoi


nous vous invitons à le faire à un moment où vous disposerez de
suffisamment de temps devant vous, dans un endroit calme où vous ne serez
pas dérangé. Arrêtez la sonnerie du téléphone et avertissez les personnes
autour de vous que vous souhaitez rester seul.
Il nous est arrivé, à quelques reprises, d’avoir cette grande chance de
mener cette réflexion au bord de la mer, ou encore bien installé dans un
hamac au jardin, pendant nos vacances. Voilà ce qui s’appelle joindre l’utile
à l’agréable. Nous avons hâte aussi de refaire cette démarche au moins une
fois l’an. Loin d’être une corvée, elle nous permet de revenir sur l’année
écoulée et de dresser le bilan de nos récentes réalisations et de notre vie en
général. Mais surtout, elle nous fournit l’occasion de réactiver notre vision
de l’année à venir et, s’il y a lieu, de la modifier pour tenir compte de
l’évolution de notre situation. C’est un moment privilégié pour nous
associer à nouveau à nos aspirations profondes.
C’est maintenant à votre tour de reprendre contact avec le trésor de vos
rêves. Commencez à esquisser les grandes lignes de la vie que vous
souhaitez vivre, un peu comme cet architecte qui dessine l’ébauche de la
maison de rêve qu’il désire habiter. En cours de route, posez-vous
régulièrement cette question  : si j’étais certain de réussir, qu’est-ce que je
souhaiterais pour moi ?
Assurez-vous également que ces rêves sont bien les vôtres, c’est-à-dire
qu’ils sont conformes à vos valeurs, ces grandes forces, parfois
inconscientes, qui nous motivent tous à agir. Les valeurs donnent un sens à
notre vie et c’est lorsque nous vivons en conformité avec elles que nous
nous sentons le plus cohérents. Si, quand nous étions enfants, nos choix
étaient normalement influencés par ceux de nos proches, ils devraient
aujourd’hui nous appartenir en propre et ne pas être dictés ou influencés par
les valeurs d’autrui, que cet autrui soit un supérieur hiérarchique, une
entreprise ou un proche. Nous aurons l’occasion d’aborder ce sujet plus en
profondeur au chapitre 6.
Pendant que complétez cet exercice et notez vos conclusions dans votre
cahier, ayez à l’esprit que vous êtes bel et bien engagé sur la voie du
changement. Prendre le temps de dresser le bilan détaillé de sa vie, puis
s’en servir comme d’un tremplin pour rêver l’avenir, c’est déjà travailler
concrètement à améliorer son sort. C’est aussi se prouver à soi-même qu’on
y croit vraiment, qu’on a raison d’aspirer à plus et à mieux. Et comme nous
le verrons dans le prochain chapitre, cette croyance est capitale dans toute
démarche de changement.
6. Brenda Branswell, « Ambition Accomplished: The Multitalented Julie Payette Joins the Roll of Canadian Space Travellers », in
Maclean’s, vol. 112, n° 20, 17 mai 1999, p. 57-58.
7. Le Québécois Alexandre Despatie est triple champion du monde, médaillé olympique aux jeux d’Athènes (2004) et de Pékin
(2008), et il a brisé le record du plus haut total de points aux tremplins de trois mètres et d’un mètre lors des championnats
mondiaux de natation de 2005, à Montréal.
8. James A. Michener, «  Sur la route de Saint-Jacques-de-Compostelle  », Sélection du Reader’s Digest, vol.  37, n°  217,
juillet 1965, p. 50-58.
4

Développer l’allié en soi


Ils peuvent parce

qu’ils pensent qu’ils peuvent.

Virgile

Pour mettre en œuvre les changements qui nous permettront de réaliser


nos rêves, nous avons besoin d’un partenaire important qui va nous soutenir
de façon indéfectible  : nous-même. Il nous faut aussi, bien évidemment,
l’appui de personnes qui nous aiment et qui croient en nous, mais cette aide
tombera à plat si, au départ, nous ne croyons pas en nous-même, si nous
mettons en doute nos capacités d’introduire les changements nécessaires, en
un mot si nous ne sommes pas notre propre allié.
Il y a, en effet, un lien très étroit entre l’estime de soi et la capacité à
réaliser des changements dans sa vie, tant sur le plan personnel que
professionnel. Avoir une bonne estime de soi suppose qu’on se fait
confiance, qu’on croit à sa capacité d’apprendre, d’entreprendre et de
réussir. Cette capacité est présente dès le départ dans notre vie et personne
n’en est complètement dépourvu ; c’est un cadeau de naissance, en quelque
sorte.
Une personne qui a une perception positive d’elle-même ne remet pas en
question sa valeur et, par le fait même, elle reconnaît aussi qu’elle a les
capacités d’acquérir les connaissances nécessaires et de faire les
apprentissages requis pour atteindre ses buts. Elle accepte également parfois
de vivre des tiraillements intérieurs. Comme elle fait des choix, elle accepte
la responsabilité de ces choix et les conséquences qui en découlent.
Cette confiance de base lui permet de réfléchir et de développer des
croyances qui vont la soutenir plutôt que la paralyser : croyances sur elle-
même, sur ses capacités, sur les autres, sur la vie, sur l’avenir. Plus elle
réfléchit et prend conscience de sa valeur personnelle, plus elle agit en
accord avec sa réflexion et son jugement.
Dans ce chapitre, nous allons donc nous attarder à cet important filtre de la
perception que sont les croyances. Nous expliquerons en quoi elles
consistent, quel potentiel d’énergie elles peuvent mobiliser pour nous faire
progresser ou, au contraire, pour saper nos efforts à la base. Nous vous
donnerons enfin l’occasion de réfléchir à vos propres croyances et d’évaluer
leur impact sur vous.

Les croyances : ce qu’elles sont


Les croyances sont des distorsions cognitives, des a priori que nous avons
à propos de nous-même et des autres, de nos capacités et de celles des
autres, de nos talents, de ce qu’il nous faut pour être heureux, et ainsi de
suite. Ce sont des idées irrationnelles, des affirmations, des généralisations
qui structurent notre expérience de la réalité, qui déterminent ce que nous
percevons, comment nous nous sentons et comment nous agissons. Elles ne
sont pas la réalité, mais nous agissons comme si elles l’étaient et elles
déterminent le potentiel que nous allons mobiliser dans une situation
donnée.
Voici un premier exemple pour mieux comprendre. Il y a de nombreuses
années, deux chercheurs, Robert Rosenthal et Lenore Jacobson9, qui avaient
fait carrière dans le monde de l’éducation, ont voulu tester l’hypothèse
selon laquelle les attentes des enseignants à l’égard d’élèves issus d’un
niveau socio-économique faible contribuaient au taux élevé d’échec chez
ces enfants.
Choisissant une institution publique d’enseignement de niveau primaire
dans un milieu socio-économique faible (Oak School, aux États-Unis),
Rosenthal et Jacobson ont fait passer un test d’intelligence à tous les élèves.
Ce test, ont-ils dit aux enseignants, déterminait non seulement le quotient
intellectuel (QI) des élèves, mais permettait aussi de repérer les enfants qui,
pendant l’année en cours, étaient les plus susceptibles de faire des progrès
intellectuels rapides et au-dessus de la normale, que ces enfants aient été ou
non de bons élèves par le passé. Après avoir colligé les résultats, les
chercheurs ont communiqué aux enseignants les noms de ces enfants
prometteurs.
À la fin de l’année scolaire, un second test d’intelligence est venu
démontrer que ces enfants avaient augmenté leur score de QI de 12 points,
en moyenne, comparativement à 8 pour le reste de la classe. Cette
augmentation allait même jusqu’à 20  points et plus chez des enfants des
premiers niveaux élémentaires.
Là où cette recherche devient encore plus intéressante, c’est quand nous
apprenons que les noms de ces enfants supposément doués avaient été pris
au hasard dans la liste des élèves de la classe  ! Dans les faits, donc, leur
ascendant naturel sur les autres élèves n’était, au départ, que pure fiction.
Mais comme les enseignants croyaient en leur potentiel et anticipaient leur
réussite, ils agissaient avec eux de façon à confirmer leurs attentes. Ils
encourageaient donc subtilement les comportements auxquels ils
s’attendaient de ces enfants «  doués  », non seulement en passant plus de
temps avec eux, mais en leur manifestant, inconsciemment, plus
d’enthousiasme et de chaleur qu’aux autres, avec pour résultat que ces
élèves se sentaient plus capables, qu’ils croyaient davantage en leurs
propres capacités et qu’ils se comportaient conformément aux attentes de
leurs instituteurs. En fin d’année, leurs enseignants ont même noté que ces
enfants, que rien au départ ne distinguait des autres puisqu’on les avait
choisis au hasard, étaient plus curieux, plus intéressés et qu’ils avaient plus
de chances de réussir dans l’avenir que leurs camarades.
Pour expliquer ces résultats, Rosenthal et Jacobson ont parlé du
phénomène de l’autoréalisation des prophéties. Tout se passe comme si les
attentes que nous avons à propos de l’issue d’un événement rendaient celle-
ci plus susceptible de se produire. Quelqu’un vous explique un travail en
vous prévenant que vous ne réussirez pas, et c’est effectivement ce qui
arrive ; vous croyez que votre nervosité va compromettre votre entretien, et
c’est précisément ce qui se passe ; on vous recommande de faire attention à
ne pas laisser tomber un objet, et vous le laissez échapper.
Or, cet effet Rosenthal, comme il est convenu de le nommer, n’opère pas
seulement quand il s’agit d’attentes à l’égard d’une autre personne, mais
aussi à l’égard de soi-même. Pensez à cet étudiant qui, parce qu’il a échoué
à un contrôle de mathématiques, se met à croire qu’il est nul en maths.
Insidieusement, telle un poison, cette perception de lui-même l’incitera à
mobiliser moins d’énergie dans cette matière, augmentant ainsi la
probabilité d’y obtenir de mauvaises notes, ce qui, infailliblement,
renforcera sa croyance qu’il n’y réussira jamais. Pensez aussi à l’employé
qui s’est fait refuser un projet ou une promotion et qui, au lieu d’ajuster son
tir, interprète cet événement comme un échec et une preuve de son manque
de valeur. Prenant alors de moins en moins d’initiatives, convaincu qu’il ne
sert à rien de s’impliquer puisque tout est décidé d’avance, il glissera
tranquillement dans le camp des victimes. Pensez encore à cette jeune
femme qui sort d’une relation affective très difficile et qui se convaincra
qu’elle n’est pas faite pour la vie de couple, qu’elle ne mérite pas d’être
aimée et qui, ainsi, aura tendance à éviter tout nouvel engagement,
accréditant par le fait même sa croyance.
Notre identité et l’image que nous nous faisons de nous-même sont
fondées sur un ensemble de croyances issues de notre éducation, de nos
expériences, de ce qui nous a été répété, et même de ce que nous imaginons.
C’est ce que nous appelons des références. Plus ces dernières sont
nombreuses, plus aussi l’intensité émotive qui leur est reliée est forte, plus
la croyance sera solidement installée. Par exemple, un enfant qui s’est
entendu répéter par ses parents et ses professeurs qu’il n’est pas intelligent
disposera de références très solides pour donner foi à cette affirmation. Il se
comportera d’ailleurs en conséquence, confirmant par le fait même les
attentes de ces adultes et, au bout du compte, les siennes. Tout se passe
comme dans une boucle rétroactive : la croyance s’alimente et se renforce
elle-même.
La croyance est donc un filtre majeur qui influence notre perception, triant
l’information qui parvient au cerveau et déterminant ainsi la façon dont
nous allons l’interpréter. Elle conditionne ce à quoi nous allons accorder
notre attention et ce que nous allons ignorer, ce que nous allons
entreprendre ou abandonner, ce que nous allons réussir ou échouer.
Imaginez un individu qui croit que le pire est à venir, que le monde actuel
court à sa perte et que la décadence nous menace inexorablement. Il va
filtrer l’information et privilégier celle qui confirme sa vision de la réalité,
éliminant du même coup celle qui pourrait l’infirmer. Quand il lira les
quotidiens et les magazines ou écoutera le journal télévisé, son attention
sera spontanément attirée par tout ce qui va mal dans le monde, par ce qui
ne fonctionne pas, donc par tout ce qui lui donnera raison. Même ses
conversations refléteront son état d’esprit  ; vous l’entendrez ainsi vous
entretenir éloquemment des mauvaises nouvelles, des dernières rumeurs de
désastre, des signes de la déchéance prochaine de notre monde moderne et
de l’impuissance à y faire quoi que ce soit.
Einstein disait que nous avons tous un choix à faire dans notre vie  :
décider si l’univers est une place amicale ou une place dangereuse. Dans un
cas comme dans l’autre, nous allons trouver de quoi nous donner raison.

L’image de soi
Les croyances, nous l’avons déjà dit, ont un impact majeur sur la manière
de se percevoir et, conséquemment, sur l’estime de soi. Voici d’ailleurs une
recherche étonnante10 qui démontre comment le simple fait de se percevoir
comme ayant ou non du pouvoir et du contrôle sur sa vie peut affecter le
processus du vieillissement.
En 1979, la psychologue Ellen J. Langer, entourée d’une équipe de
l’université de Harvard, eut l’idée de placer deux groupes d’hommes, âgés
de soixante-quinze ans et plus et en bonne santé, dans deux situations
expérimentales différentes. On invita le premier groupe à passer une
semaine à la campagne, dans un endroit où tout avait été aménagé pour
recréer la vie comme elle était vingt ans auparavant. Les exemplaires de
magazines disponibles (Life et Saturday Evening Post) dataient de 1959 et
la musique était de la même époque. On demanda aux participants de se
comporter comme s’ils avaient vingt ans de moins. Ils devaient s’entretenir
au présent d’événements et de personnalités se rapportant à ces années
passées, parler de leurs proches comme s’ils avaient eux aussi vingt ans de
moins et faire comme s’ils travaillaient encore, même s’ils étaient
maintenant tous retraités. Pour ce qui est de l’autre groupe, il fut lui aussi
invité à passer une semaine à la campagne dans un endroit où rien n’avait
été modifié en ce qui a trait au temps et à l’époque. L’hypothèse de départ
des expérimentateurs était la suivante  : le processus du vieillissement est
directement influencé par le fait de se voir jeune ou vieux.
Après seulement une semaine, les résultats obtenus dans le premier
groupe, comparativement au deuxième, se sont avérés étonnants. Une
batterie de tests physiques et mentaux, passés avant et après l’expérience,
révéla que «  les participants du groupe expérimental qui avait remonté le
temps montraient une amélioration de la mémoire et de l’habileté manuelle.
Ils étaient plus actifs et plus autonomes pour des choses telles que se servir
eux-mêmes au moment des repas ou nettoyer leur chambre, et se
comportaient davantage comme s’ils avaient 55 ans plutôt que 75 ans11. »
Les résultats révélèrent également des modifications dans certains aspects
du vieillissement habituellement considérés comme irréversibles. Par
exemple, les doigts des voyageurs dans le temps s’étaient allongés, alors
qu’ils ont plutôt tendance à diminuer avec le vieillissement. Leurs jointures
étaient devenues plus flexibles, leur posture était plus droite, leur force
musculaire avait augmenté, l’ouïe et la vue s’étaient améliorées. En
comparant les photographies prises avant et après l’expérience, des juges
estimèrent que les visages étaient plus jeunes de trois ans en moyenne. Une
mesure de l’intelligence montra même un accroissement du rendement
intellectuel chez la moitié des membres du premier groupe.
Les responsables de cette expérience expliquent ces phénomènes de la
façon suivante. Si les participants du groupe expérimental finissaient par
croire qu’ils avaient vingt ans de moins, c’est non seulement parce qu’ils
s’étaient comportés comme tels, mais aussi parce qu’on les avait traités
comme s’ils avaient l’intelligence et l’autonomie de gens plus jeunes. À la
lumière de ces conclusions, on peut facilement imaginer quel impact négatif
peuvent avoir les attitudes et les comportements plutôt infantilisants dont
certains entourent parfois les personnes âgées.
C’est la façon dont nous nous définissons et dont nous sommes définis par
les autres – notre apparence, notre condition physique, nos capacités
intellectuelles, nos qualités et nos défauts, nos talents, nos aptitudes, notre
confiance en nous-même – qui forme l’image que nous nous faisons de
nous-même. Or cette image aura, sur nos comportements, une influence
déterminante. Elle jouera en effet un rôle capital dans la réussite, ou non, de
nos entreprises, et même dans notre décision de nous lancer, ou non, dans
tel ou tel projet.
Si quelqu’un se voit comme incapable d’arrêter de fumer, de perdre du
poids, de trouver l’amour, de passer à travers une épreuve ou d’entreprendre
un changement de carrière, il ne mobilisera assurément pas l’énergie
requise pour y arriver. À moins qu’il ne prenne conscience des croyances
qui le paralysent et qu’il croit immuables, puis qu’il se mette au travail pour
les modifier. Sinon, il cherchera inconsciemment à justifier ces croyances
limitatives en pratiquant « l’autosabotage », c’est-à-dire en minant à la base
ce qu’il est en train d’accomplir, comme pour se prouver qu’il a raison. Et
l’échec qu’il aura ainsi provoqué viendra, à son tour, le confirmer encore
plus solidement dans sa croyance. Ainsi, s’il est retombé dans ses
mauvaises habitudes après avoir réussi pour un temps à perdre du poids,
c’est qu’il n’avait, au départ, aucune chance de réussir (Je savais que je suis
fait pour être gros !). S’il a recommencé à fumer après un arrêt de plusieurs
mois, c’est que la mission était en soi impossible (Dans le fond, je n’ai pas
de volonté  !). S’il a malheureusement gâché la relation amoureuse qu’il
avait sincèrement travaillé à établir, c’est qu’il n’a pas les qualités requises
pour vivre en couple (Je suis tout simplement incapable d’avoir une
relation amoureuse avec une autre personne !). Et si, au moment même où
son entreprise connaissait un certain succès, il a posé des gestes
inconsidérés ou pris des décisions qui l’ont finalement acculé à l’échec,
c’est qu’il avait surestimé ses capacités (Je suis comme mes parents, je n’ai
pas le sens des affaires !). Dans tous ces exemples, et dans bien d’autres qui
vous viennent sans doute à l’esprit, il suffirait probablement de gratter un
peu la surface pour trouver une image de soi négative et des croyances
paralysantes.
L’exercice que nous vous proposons maintenant devrait vous permettre
d’évaluer l’image que vous vous faites de vous-même.

Exercice

1. Prenez quelques instants pour réfléchir et écrire dans votre


cahier au moins une quinzaine d’éléments qui vous
viennent à l’esprit quand vous pensez à vous. Pensez à
des étiquettes que vous vous êtes accolées à vous-même,
à des phrases qui définissent le mieux votre perception de
vous-même. Commencez vos phrases par les mots Moi je
suis ou Moi je ne suis pas. Pensez à vos caractéristiques
importantes, vos traits de caractère, à la façon dont vous
évaluez vos capacités intellectuelles, vos talents, vos
aptitudes, vos défauts, votre apparence, votre condition
physique.
2. À côté de chacun des éléments de votre liste, inscrivez le
signe positif (+), si vous évaluez que cette caractéristique
vous aide et vous stimule à avancer, ou le signe négatif (-),
si vous jugez qu’elle vous limite, qu’elle vous paralyse et
vous nuit. Utilisez le signe d’égalité (=) si elle vous semble
plutôt neutre. Ce premier coup d’œil devrait déjà être assez
révélateur.
3. Révisez maintenant la liste des caractéristiques que vous
avez marquées d’un  + et encerclez les trois qui vous
semblent les plus positives. Écrivez ensuite quelques mots
pour expliquer comment ces caractéristiques que vous
estimez posséder vous aident à progresser  ; décrivez les
effets qu’elles ont sur vous.
4. Encerclez ensuite les deux caractéristiques négatives que
vous évaluez comme étant les plus limitatives. Écrivez
quelques mots pour expliquer comment elles vous nuisent
et vous paralysent.

En terminant cet exercice, rappelez-vous que la grande majorité des


particularités, positives comme négatives, qu’une personne s’attribue
découlent de croyances qui se sont inscrites en elle par conditionnement.
Elles la font agir et réagir automatiquement, presque mécaniquement, aux
gens et aux situations qui se présentent à elle. Elles déterminent également
le potentiel qu’elle va mobiliser pour atteindre des rêves comme ceux que
vous avez formulés au chapitre précédent. Certaines d’entre elles la
soutiennent et l’aident à progresser, d’autres la freinent et l’empêchent
même d’être heureuse. Les premières sont à entretenir et à préserver, les
secondes sont à changer.

Les croyances sont-elles vraies ou fausses ?


Mais, protesterez-vous peut-être, il ne s’agit pas seulement de croyances.
Je suis vraiment comme ceci ou comme cela  ! Si vous croyez vraiment à
quelque chose, cela devient votre réalité et vous trouverez toujours des tas
de raisons pour démontrer à quel point vos croyances sont réelles, justifiées,
même si elles sont très paralysantes. Si vous êtes convaincu que vous ne
pouvez pas apprendre une langue étrangère parce que vous n’avez pas le
don des langues, vous pourrez citer mille exemples pour démontrer aux
autres, mais surtout à vous-même, que vous avez raison. Si vous croyez
qu’il ne faut pas faire confiance aux autres, vous allez rappeler des
situations vécues ou rapportées par d’autres pour vous justifier. Si vous
croyez que le pire est à venir, vous allez sélectionner tout ce qui le confirme
et laisser de côté ce qui démentirait cette croyance. Somme toute, la vie se
passe bien souvent à vouloir avoir raison…
Les croyances servent à structurer notre expérience de la réalité. Elles
rassurent et donnent un sens à ce qui nous arrive, un sens à l’univers qui
nous entoure. Elles aident à expliquer les choses. Quand les Anciens
croyaient que le tonnerre était la manifestation de la colère d’un dieu, c’était
une façon pour eux d’expliquer un phénomène naturel incompréhensible et,
d’une certaine façon, de se rassurer. Quand des gens autour de nous croient
que le monde d’aujourd’hui court vers la catastrophe, c’est aussi une façon
d’expliquer des changements qu’ils ne comprennent pas ou de légitimer
leur peur du changement.
La question n’est donc pas tant de savoir si nos croyances sont vraies ou
fausses, mais bien plutôt de déterminer si elles nous servent ou nous
nuisent, si elles nous aident à nous épanouir, à atteindre nos objectifs et à
vivre à la hauteur de nos possibilités, ou si elles nourrissent, au contraire,
l’impuissance et l’inaction. Bien sûr, certaines croyances sont plutôt
anodines et n’affectent pas l’ensemble de la personnalité. Par exemple,
s’empêcher de pratiquer le parachutisme parce qu’on croit ce sport
dangereux ne prête pas à conséquence. Mais croire que la vie est finie après
un échec personnel ou professionnel, ou croire que personne ne nous aime,
affectera considérablement notre développement affectif et social.
Il y a quelques années, nous avons rencontré un homme qui, après plus de
vingt ans de loyaux services dans une entreprise, s’était fait congédier du
jour au lendemain pour des motifs peu valables. Sans avertissement, tout
son univers s’était écroulé. Pendant trois jours, il était resté assis devant son
téléviseur éteint, les yeux dans le vide, cherchant des recours légaux et
autres contre son ex-employeur. Jamais il n’aurait cru qu’une telle chose
aurait pu lui arriver. Il était sous le choc, découragé, et se sentait bafoué et
dévalorisé. Il nous a raconté qu’à un certain moment, une image
douloureuse lui a traversé l’esprit. Il s’est vu en train de perdre sa maison,
de perdre aussi ceux auxquels il tenait le plus parce qu’il ne pourrait plus
subvenir à leurs besoins. Cette souffrance a réveillé chez-lui un vieux rêve
qu’il croyait enterré, soit celui d’avoir son propre commerce. Convaincu
que s’il s’y mettait vraiment, il pouvait y arriver, et que cet événement était
une occasion en or pour réaliser son rêve, deux croyances constructives, il a
adressé près de deux cents demandes d’emploi pendant les trois semaines
qui ont suivi. Il a rencontré tous les gens qu’il connaissait et a rapidement
trouvé un travail qui lui permettait d’abord d’assurer sa survie et celle de sa
famille. Parallèlement, il a commencé à poser les gestes qu’il fallait pour
réaliser son rêve. Moins d’un an après son licenciement, il travaillait à son
propre compte dans des installations ultramodernes. Il avait retrouvé le
sentiment de sa valeur, reconnaissant même que son licenciement avait été
la meilleure chose qui pouvait lui arriver.

L’origine des croyances


Pour bien comprendre leur impact, il n’est pas inutile de nous interroger
sur les sources de ces idées irrationnelles que sont les croyances.
L’environnement familial est le creuset dans lequel se forme notre
identité. Nous y apprenons par imitation de nos parents et y puisons des
valeurs et des croyances souvent transmises de génération en génération.
Nous y trouvons aussi des modèles de réussite ou d’échec et y recevons des
enseignements qui, à force d’être répétés, s’inscrivent en nous de façon
marquée et nous font agir de manière conditionnée. C’est là que nous
apprenons ce qui se fait et ce qui ne se fait pas, ce qui est possible et ce qui
ne l’est pas. C’est là aussi que nous rencontrons nos premiers modèles de
vie de couple.
La vie durant, nous transporterons dans nos bagages plusieurs habitudes
familiales, les fameuses recettes de maman ou certaines superstitions.
Loretta Laroche12, consultante dans le domaine de la gestion du stress,
raconte l’anecdote suivante. Alors qu’elle déposait un rôti dans une
casserole pour le mettre au four, sa fille lui demanda pourquoi elle coupait
les deux extrémités de la pièce de viande. Elle lui répondit que c’était
comme ça qu’il fallait faire et que sa propre mère avait toujours procédé
ainsi. Intriguée tout de même par la question de sa fille, elle demanda à sa
mère la raison de cette habitude, pour apprendre que cette pratique venait de
sa grand-mère. Elle posa alors la question à sa grand-mère, qui lui dit que
c’était simplement parce que sa marmite était trop petite…
Certaines croyances héritées de la famille sont certainement plus nocives
que d’autres. Par exemple, croire, inconsciemment peut-être, que la maladie
est la meilleure façon d’attirer l’attention et d’avoir de l’affection, ou encore
croire que nos enfants doivent être élevés de la même manière que nous.
Tout le monde sait aussi que les mauvais traitements ou les abus subis
dans l’enfance sont à l’origine d’une faible estime de soi. Quand, au
contraire, l’enfant a été encouragé à croire en lui et en sa capacité de réussir
ce qu’il entreprend, il a pu développer des croyances positives qui lui
serviront à faire face à l’adversité. Les jeunes prodiges, quel que soit le
domaine dans lequel ils excellent, ont été des enfants stimulés, récompensés
dans la réussite et soutenus malgré l’échec.
L’environnement de travail est aussi une autre source importante du
développement de croyances chez une personne. Elles trouvent leur origine
dans les valeurs de l’entreprise où elle travaille, bien sûr, mais aussi dans les
rapports qu’elle entretient quotidiennement avec son entourage, les
encouragements des patrons, la rétroaction des collègues. Il y a aussi les
résultats qu’elle obtient, ses bons comme ses moins bons coups, le fait
d’avoir ou non du contrôle sur son travail, d’en voir ou non le résultat. Tous
ces facteurs concourent à former son image professionnelle. Il suffit de
penser à ceux qu’on ne consulte jamais et qui en viennent ainsi à croire que
leur opinion n’a aucune valeur. Ou à ceux qui font les frais d’une
réorganisation après l’autre et dont les capacités d’adaptation sont tellement
mises à l’épreuve qu’ils ne croient plus à la valeur de leur travail. Ou à ceux
qui subissent une faillite et qui croient qu’ils sont eux-mêmes un échec. Ou,
au contraire, à ceux qui ont la chance d’avoir un mentor qui les aide à croire
en leurs capacités et à se développer.
Des personnes marquantes rencontrées sur notre route peuvent
également avoir eu un impact majeur sur notre vie, parfois à leur insu.
Rappelez-vous cet instituteur, cet entraîneur ou ce compagnon de voyage
qui vous a démontré, par ses paroles et ses actes, qu’il croyait en vos
capacités, contribuant ainsi de façon notable à hausser votre estime de soi,
votre confiance et peut-être même votre créativité. Inversement, il arrive
que l’on rencontre des détracteurs, des personnes qui contribuent,
volontairement ou pas, à diminuer l’estime de soi et le sentiment de sa
compétence.
Dans le même ordre d’idées, certains événements nous affectent
davantage et inscrivent en nous d’autres croyances, surtout s’ils sont
accompagnés d’une importante charge émotive. Ce peut être une épreuve
dont on est sorti grandi, avec la conviction que peu importe ce qui arrive, il
y a toujours quelque chose à en tirer. Ou c’est un défi qu’on a relevé avec
succès et qui nous a persuadé qu’on arrive à tout ce qu’on veut si l’on s’y
met vraiment. Peut-être encore est-ce la disparition tragique d’un proche qui
a avivé en nous la croyance qu’on peut toujours faire quelque chose pour
aider les autres.
Les connaissances acquises au fil des ans alimentent aussi plusieurs de
nos croyances. L’école, la télévision, le cinéma, les lectures contribuent à
faire reculer l’ignorance. Bien des phénomènes naturels, jadis attribués à
des divinités, sont maintenant expliqués par la science. Pensez à un livre, un
film ou un cours qui sont à classer au rayon des révélations et qui ont
modifié pour toujours votre façon de voir la réalité.
Voici une anecdote qui illustre bien comment les connaissances
influencent nos croyances et, donc, ce à quoi nous sommes attentifs.
L’histoire se passe à Paris le 11 août 1999, le jour même d’une éclipse totale
du soleil. À l’approche du nouveau millénaire, charlatans et prophètes de
malheur rivalisent déjà pour annoncer, qui la fin du monde, qui un
tremblement de terre, qui quelque autre funeste catastrophe. Paco Rabane,
le célèbre couturier, prédit même que la station spatiale russe Mir va
s’écraser en France et que des débris tomberont sur Paris, provoquant des
milliers de morts. Or, quelques jours avant la date fatidique, alors que nous
sommes attablés à un restaurant de Troyes, notre voisine de table, une
Parisienne, nous confie avoir quitté la capitale précisément en raison de la
prédiction du grand couturier. Elle nous incite donc très fortement à ne pas
être sur place le jour de l’éclipse. Et quand nous lui objectons que nous
devons absolument être à Paris le 11 août, elle insiste pour que nous allions
nous réfugier à l’intérieur de la cathédrale Notre-Dame, où nous serons à
l’abri.
Devant l’inquiétude irraisonnée de certaines couches de la population, le
gouvernement français n’est pas demeuré inactif, multipliant les
interventions dans les médias écrits et oraux pour démystifier ce
phénomène naturel rare. À Paris, les murs du métro sont même placardés
d’immenses affiches expliquant en long et en large ce qu’est une éclipse du
soleil.
Le 11  août, comme prévu, nous sommes à Paris. Absorbés par notre
découverte de la Ville lumière, nous avons complètement oublié l’éclipse
totale. C’est donc par hasard que nous nous retrouvons sur le parvis de
Notre-Dame à l’heure même où des milliers de curieux y sont rassemblés
pour observer le phénomène. À l’intérieur de la cathédrale, des centaines de
personnes sont en prière, plusieurs d’entre elles probablement convaincues
d’une catastrophe imminente. Et au même moment, des dizaines de
touristes, le nez en l’air, se font faire les poches par des voleurs à la tire…
Trois comportements différents dénotant trois états d’esprit différents, trois
façons de voir une même réalité  : un phénomène naturel scientifiquement
expliqué pour les uns, un désastre imminent pour les autres, une occasion
en or de faire de bonnes affaires pour les troisièmes…
Cela nous amène tout naturellement à une dernière source des croyances :
l’imagination. Comme le cerveau ne fait pas complètement la différence
entre le réel et l’imaginaire, nous pouvons développer des croyances par la
seule expérience anticipée de résultats. Les athlètes ont compris cela, eux
qui visualisent à l’avance les résultats qu’ils veulent obtenir, puis répètent
cette visualisation des dizaines de fois. Alain Laroche, un des premiers à
avoir popularisé le ski acrobatique, disait voir et répéter tous ses sauts en
imagination avant de les pratiquer. Sylvie Bernier, la première Canadienne à
remporter une médaille d’or olympique en plongeon et la première
Québécoise à gagner une médaille d’or olympique (Los  Angeles, 1985),
revoyait inlassablement ses plongeons dans son cinéma intérieur jusqu’à ce
qu’ils soient parfaits, amenant ainsi son cerveau à croire qu’elle en était
capable.
Il en va de même pour une personne qui s’apprête à intervenir en public et
qui se voit à l’avance aux prises avec des trous de mémoire ou en train de
bafouiller devant un auditoire qui se moque d’elle. Elle installe ainsi,
sournoisement, un état d’esprit paralysant qui risque de provoquer
exactement ce qu’elle craint, renforçant ainsi sa croyance qu’elle est
incapable de parler en public. Nous aurons d’ailleurs l’occasion de revenir
plus en profondeur sur l’utilisation de l’imaginaire dans le chapitre qui
porte sur la motivation.
L’environnement familial et de travail, les personnes et les événements
marquants de notre vie, les connaissances acquises et l’imagination
constituent donc les principales sources où nous puisons les références sur
lesquelles s’appuient nos croyances, véritables conditionnements qui nous
conduisent à percevoir les choses, à éprouver des émotions, à agir et à
réagir de façon prédéterminée, irréfléchie et automatique. Ces
conditionnements ne sont pas nécessairement mauvais, sauf s’ils nous
gâchent l’existence, nous empêchent d’avancer et nous rendent malheureux.
Par exemple, croire qu’il est préférable de boucler sa ceinture de sécurité
dans un véhicule, ou qu’une alimentation saine est un gage de santé, ou
encore que la fumée de cigarette est dommageable, conduit à des
comportements qui, aussi conditionnés soient-ils, peuvent nous éviter bien
des ennuis. Ce ne sont pas ces croyances-là qu’il faut changer, mais plutôt
celles qui nous paralysent et nous empêchent d’avoir un regard authentique
sur nous-même, sur les gens et sur les événements, un regard qui nous
permette de progresser et de créer vraiment notre vie.

Les sortes de croyances


Il y a trois catégories de croyances. Pour les différencier, il suffit bien
souvent d’être attentif aux termes que nous utilisons, tant dans nos
conversations que dans nos dialogues intérieurs. Il y a d’abord les
croyances globales, sortes de généralisations à propos de la vie, des gens,
de soi, de la réussite, de l’école, du travail, du temps, du plaisir, du
changement. Elles se reconnaissent à l’emploi de mots comme : personne,
tout le monde, toujours, jamais, tous, rien. Par exemple : les hommes sont
tous des menteurs  ; personne ne s’intéresse à moi  ; tout le monde dit que
c’est mauvais ; il ne m’arrive jamais rien d’intéressant ; je fais toujours des
erreurs ; il n’y a rien à faire.
Les affirmations dont nous avons perdu l’origine et qui contiennent un
jugement ou une évaluation sont du même ordre. Par exemple : la vie, c’est
une épreuve ; c’est mal de faire cela ; les études sont inutiles ; cela ne se
fait pas ; il n’y a qu’une façon de réussir dans la vie. Certaines affirmations
peuvent être plus stimulantes  : il n’y a pas d’échec, il n’y a que des
occasions à saisir  ; avec le temps, on passe à travers tout  ; vouloir, c’est
pouvoir ; peu importe ce qui arrive, il y a quelque chose à en apprendre.
La deuxième catégorie de croyances, ce sont les règles. Ce sont des
généralisations à propos de ce qui doit se passer pour que nous ressentions
telle émotion, pour qu’un de nos besoins soit satisfait ou qu’une de nos
valeurs soit respectée. On les repère, dans le langage courant, par le recours
à des mots et des expressions comme : il faut, il faudrait, il ne faut pas, je
dois, je devrais, je ne dois pas, je peux, je pourrais, je ne peux pas. Par
exemple : il faut beaucoup d’argent pour être heureux ; je dois être parfaite ;
il ne faut pas montrer ses émotions ; je ne peux pas le faire ; il faut penser
aux autres en premier. Les règles se révèlent également dans les phrases
contenant la formule si… alors… Par exemple  : si je travaille deux fois
plus, alors j’aurai de l’avancement  ; si je vais chercher de l’aide, alors je
montrerai ma faiblesse. Certaines règles sont plus aidantes : si les autres le
peuvent, alors je le peux aussi  ; si je m’y mets vraiment, alors je peux y
arriver  ; si je fais ce que j’aime, alors je vais réussir  ; si je crois en moi,
alors j’ai plus de chance d’y arriver ; si je change, alors les choses autour
de moi vont changer aussi.
Enfin, la troisième catégorie de croyances, ce sont les croyances
particulières, celles qui concernent nos capacités et nos incapacités
personnelles et qui définissent notre identité propre. Ce sont celles que vous
avez formulées dans l’exercice plus haut sur l’image de soi.

Comment modifier une croyance paralysante


Au chapitre précédent, nous vous avons demandé de formuler des rêves
dont la réalisation améliorerait grandement votre qualité de vie, voire celle
des autres. Si vous ne l’avez pas encore fait, c’est peut-être que cette seule
idée de rêver heurtait certaines de vos croyances personnelles – qu’il serait
d’ailleurs important d’identifier avant de poursuivre plus avant. Par ailleurs,
si vous êtes parvenu à écrire vos aspirations, vous n’êtes pas, pour autant, à
l’abri de distorsions cognitives qui risquent d’en compromettre la
réalisation.
Toute démarche de changement déclenche en effet une série de réactions
automatiques. Certaines vont vous aider et vous stimuler, d’autres au
contraire agiront comme un frein. D’où l’importance d’en prendre
conscience et de les formuler clairement. Vous seul pouvez les reconnaître,
et la démarche qui suit devrait vous y aider.

Première étape
Prendre conscience de vos croyances paralysantes
Choisissez un des rêves que vous avez déjà formulés, dans l’un ou l’autre
domaine de votre vie, et répondez par écrit à cette question. Quelles sont les
raisons qui font que je n’arriverai jamais à réaliser mes aspirations dans ce
domaine ? Écrivez toutes les réponses qui vous viennent à l’esprit. Nous
vous suggérons de formuler vos phrases comme si une autre personne
s’adressait à vous, en commençant par le pronom Tu, comme dans Tu n’y
arriveras jamais, parce que… Utilisez aussi quelques règles limitatives en
vous servant de la formulation Si… alors… Faites cet exercice avant de
poursuivre votre lecture, même si votre esprit vous envoie des messages
comme  : C’est inutile de faire cet exercice  ! Je n’ai pas le temps, pas de
crayon, pas mon cahier ! C’est trop fatigant ! Si tu réalises l’exercice, alors
tu vas ouvrir la porte à un tas de choses négatives. Vous voulez réaliser vos
rêves ? Alors commencez par écrire pourquoi vous n’arriverez jamais à le
faire dans ce domaine particulier.
Voici quelques phrases types qui ressortent bien souvent dans ce genre
d’exercice :
—  Tu n’es pas assez… intelligent, travailleur, entreprenant, talentueux,
persévérant…
— Tu es trop… habitué, paresseux, lâche, fatigué…
— Tu n’as pas ce qu’il faut, tu n’as pas l’étoffe d’un gagnant !
— Tu as passé l’âge… Tu es trop jeune, pas assez mature.
— Tu n’as pas le choix.
— Tu vas tout détruire.
— Tu n’y es jamais arrivé avant, alors ce sera la même chose cette fois-ci.
— Tu ne réussiras jamais à gagner ta vie dans ce secteur d’activité.
—  Si tu réussis, alors tu seras rejeté, tu vas te faire critiquer, tu vas te
retrouver seul.
— Si tu retournes aux études, tu vas tout perdre et tu ne trouveras pas de
travail.
— Si tu vas chercher de l’aide, tu es un faible.
D’autres croyances, plus globales, peuvent aussi émerger, comme :
— C’est impossible.
— Ce n’est pas le moment d’entreprendre un changement ; les débouchés
sont nuls.
— Le pire est à venir, tout va sauter, c’est une question de temps.
— On ne fait pas toujours ce que l’on veut dans la vie.
— Il faut être parfait.
— Il faut savoir se contenter dans la vie !
S’il est vrai que pour réaliser nos rêves, il faut «  développer l’allié en
nous  », on conviendra aisément que les phrases ci-dessus ne sont pas des
partenaires exemplaires  ! Elles témoignent cependant de perceptions qu’il
serait illusoire de vouloir nier et qu’il faut bien débusquer si l’on souhaite
avancer.

Deuxième étape
Faites appel à votre avocat de la défense
L’être humain est ainsi fait qu’il recherche naturellement ce qui lui procure
du plaisir et fuit ce qui le fait souffrir. Pour réussir à modifier durablement
une croyance paralysante, on peut donc la neutraliser en y associant
suffisamment de douleur pour vouloir en changer. Un bon moyen d’y
arriver est d’appeler à la barre le passé, le présent et l’avenir, puis de les
interroger sur le prix à payer pour entretenir cette croyance. Que nous a-t-
elle coûté dans le passé ? Quelle charge représente-t-elle pour nous dans le
présent  ? Quels sacrifices risque-t-elle de nous imposer dans l’avenir
prévisible ?
En fait, il s’agit d’entrer en contact avec son propre avocat de la défense,
son sens critique en somme, qui va poser quelques questions habiles pour
ébranler la force de ces croyances. En voici quelques-unes :
1. Qu’est-ce qu’il y a de ridicule dans cette croyance ? Par exemple, n’y
a-il pas quelque chose d’absurde à vous dire  : Tu es trop vieux pour
apprendre ? Y a-t-il vraiment un âge pour apprendre et un autre pour cesser
de le faire ? N’apprenons-nous pas toute notre vie ? Tu ne termines jamais
ce que tu entreprends. Est-ce bien vrai que vous ne terminez jamais ce que
vous entreprenez  ? Rappelez-vous telle fois ou telle autre où vous avez
terminé ceci, puis encore cela.
2. D’où vient cette croyance, qui vous l’a apprise ? Qui vous a fait croire,
par exemple, que vous n’avez pas de volonté ? Cette personne en avait-elle
vraiment plus que vous  ? Est-elle vraiment un modèle que vous voulez
suivre ? A-t-elle réussi à atteindre ce à quoi vous aspirez ?
3. Que vous en a-t-il coûté dans le passé d’agir suivant cette croyance ?
Quelles occasions avez-vous manquées, quelles opportunités avez-vous
refusées, quelles chances avez-vous perdues, de quelles expériences
enrichissantes cette croyance vous a-t-elle privé ? Ici, nous vous suggérons
de retrouver vos regrets les plus profonds et de revivre le plus possible la
souffrance qui leur est associée.
4.  Quel prix devez-vous payer présentement en continuant d’entretenir
cette croyance ? Comment cela affecte-t-il votre vie affective, sociale, votre
santé physique, vos finances ?
5.  Quel sera le prix à payer plus tard physiquement, émotionnellement,
socialement et financièrement si vous maintenez cette croyance ? Que va-t-
elle vous coûter à long terme ? Quel prix votre famille et les gens que vous
aimez devront-ils payer si vous ne modifiez pas cette croyance ?
À vous maintenant de devenir votre allié. Choisissez les deux croyances
les plus limitatives que vous avez notées plus haut et appelez à la barre
votre avocat de la défense. Qu’il commence par mettre en doute les mots
qui expriment une généralisation comme personne, tout le monde, toujours,
jamais, tous, rien. Par exemple, si vous vous dites  : Tu ne sais pas tout,
donc tu n’es pas prêt, votre défenseur objectera  : Faut-il vraiment tout
savoir pour être prêt et pour agir ? N’y a-t-il pas plein de gens qui passent à
l’action sans attendre de tout savoir ? Tu ne peux rien faire. Est-il vrai que
vous ne pouvez absolument rien faire  ? Quand on rêve, on est toujours
déçu. Est-on réellement toujours déçu  ? Peut-être avez-vous connu la
déception à une occasion en particulier, mais avez-vous toujours été déçu ?
Servez-vous aussi de votre avocat de la défense pour vous aider à casser
les généralisations contenues dans certaines de vos règles. Prenons par
exemple la règle  : Il faut être raisonnable. Qui a dit qu’il fallait être
raisonnable  ? Est-ce qu’il faut toujours être raisonnable  ? Les gens qui
soutiennent cette affirmation font-ils partie de ceux qui ont réalisé leurs
rêves, ou de ceux qui se sont résignés avant même d’avoir essayé  ? Ne
connaissez-vous pas nombre de gens déraisonnables qui sont très heureux ?
Il faut penser aux autres en premier. Mais que va-t-il arriver de si effroyable
si vous pensez à vous en premier ? Si je réussis, je vais être rejeté. Qui vous
a dit que lorsqu’on réussit, on est nécessairement rejeté  ? Cette personne
est-elle crédible ? Est-on toujours rejeté quand on réussit ?
Troisième étape
Remplacer la croyance limitative
Vous est-il déjà arrivé de réussir à vous défaire d’un comportement, d’une
façon de penser, d’une habitude nuisible pendant un certain temps, puis de
revenir au point de départ, encore plus convaincu qu’il n’y a rien à faire ou
que vous êtes un incapable ?
Tous les spécialistes du comportement l’affirment  : on ne peut se
débarrasser d’une façon d’agir, d’une manière de penser ou d’une habitude
nuisible sans lui en substituer une autre, sous peine de la voir ressurgir, ou
encore remplacée inconsciemment par quelque chose de tout aussi nuisible.
Pensons au cas classique de l’ex-fumeur qui se met inconsciemment à
manger. La nature a horreur du vide, disait le philosophe grec Aristote, il y
a plusieurs siècles.
La même chose s’applique quand vous voulez changer, modifier ou
éliminer une croyance négative. Vous devez lui trouver un antidote, la
remplacer par une autre qui a sur vous un effet contraire. Par exemple, à la
croyance limitative  : C’est trop long, je n’ai pas le temps, vous pourriez
substituer cette nouvelle croyance : Si je le veux vraiment, je sais que je vais
trouver le temps. Ou encore remplacer Tu n’es pas capable de terminer les
choses par : Je termine les choses qui me tiennent vraiment à cœur.
Nous vous suggérons de formuler une nouvelle croyance de façon
positive, comme un processus en devenir. Par exemple, il est plus réaliste de
se dire : Je deviens de plus en plus confiant en moi que d’affirmer : Je suis
parfait. De plus, faites en sorte que cette nouvelle croyance soit sous votre
contrôle, c’est-à-dire que sa réalisation dépende de vous seul, et non d’un
changement que vous attendez des autres. Par exemple  : Je suis heureux
quand les gens m’aiment ne dépend pas complètement de vous. Par contre :
Je crois que j’agis de manière aimable est davantage sous votre contrôle.

Quatrième étape
Appuyer la nouvelle croyance sur des références
Une fois formulée la croyance de remplacement, il faut vous mettre au
travail pour la consolider, comme si vous placiez plusieurs pieds sous une
table pour l’aider à tenir debout solidement. Sinon, cette croyance
demeurera une idée vague et n’aura pas d’effet sur vous. Vous pouvez
trouver ces références en vous basant sur des situations vécues, ou en
prenant modèle sur des gens que vous connaissez et qui partagent cette
croyance. L’imitation est la voie royale de la réussite. Si vous ne connaissez
pas personnellement de gens qui pourraient vous servir de modèle, les livres
et les médias peuvent vous en fournir de très nombreux.

Cinquième étape
Associer du plaisir à cette nouvelle croyance
Nous vous avons indiqué comment associer de la souffrance à une
croyance que vous voulez modifier. Vous pouvez compléter la démarche en
associant le plus de plaisir possible à la croyance antidote que vous avez
formulée, créant ainsi un levier pour vous motiver à la développer. Ici
encore, quelques bonnes questions vous seront utiles. Demandez-vous :

1. Quels sentiments positifs cette nouvelle croyance provoque-t-elle en


moi ?
2. Quelles portes m’ouvre-t-elle, quelles choses rend-elle possibles
dans mes relations avec les autres, dans mon travail, dans ma vie en
général ?
3. Quel impact positif aurai-je sur ma famille et mes amis si je
développe cette croyance ?
4. Comment mes enfants, mon conjoint, mes amis vont-ils me regarder
plus tard si j’opère ce changement ?

Sixième étape
La pratique
À vous maintenant d’oser agir, jour après jour, conformément à cette
nouvelle croyance, de façon à l’appuyer sur des expériences bien réelles.
Un pas à la fois, un succès après l’autre, ce qui n’est encore qu’une idée
deviendra progressivement une certitude bien ancrée.

Septième étape
L’inventaire de vos croyances aidantes
Si, jusqu’à maintenant, nous nous sommes surtout intéressés aux
croyances plus limitatives, il ne faut pas pour autant oublier les autres,
c’est-à-dire celles qui vous soutiennent déjà et qui vous ont permis de vous
rendre là où vous êtes aujourd’hui. Démasquer les premières est capital si
l’on veut en contrer les effets négatifs. Mais il est tout aussi important de
prendre conscience des secondes, car elles sont vos alliées dans cette
démarche pour réaliser vos rêves.
Reprenez donc les aspirations que vous avez formulées précédemment et
faites une liste exhaustive des croyances positives qui vous habitent, ces
affirmations qui font déjà de vous un allié pour aller de l’avant. Quelles sont
ces croyances qui vous donnent du pouvoir et du contrôle et qui vous aident
à mobiliser votre potentiel ?

Sept croyances associées au succès


Pour clore ce chapitre, nous vous proposons sept croyances fondamentales
que nous avons tous intérêt à développer. Ces croyances positives, certains
auteurs13 vont même jusqu’à les qualifier de mensonges du succès,
exprimant ainsi que, comme toute croyance, elles sont des illusions, des
créations de l’esprit, mais qu’elles peuvent, plus que d’autres, nous mettre
sur la voie du succès.

1. Quoi qu’il arrive, j’en assume la responsabilité


Voilà probablement une des croyances parmi les plus difficiles à
développer. Il est tellement plus aisé, en effet, de blâmer quelqu’un ou
quelque chose en dehors de soi pour les piètres résultats que nous obtenons.
Mais en procédant ainsi, nous nous enlevons du pouvoir et nous risquons de
verser dans le syndrome de la victime. La victime croit que si quelque
chose va mal, si rien ne change, que c’est la faute des autres, de la société,
de la conjoncture économique, du conjoint, du patron, des parents, même de
la température. Les personnes qui ont du succès croient plutôt que, pour que
les choses changent, elles doivent d’abord se changer elles-mêmes.
Par exemple, chez les meilleurs communicateurs, nous retrouvons
fréquemment la croyance suivante : Je suis responsable du résultat de ma
communication. Elle est intéressante puisqu’elle leur redonne le pouvoir, en
sous-entendant que s’ils veulent obtenir de meilleurs résultats, ils peuvent
modifier leurs façons de faire, plutôt que d’être à la remorque des
changements qui pourraient venir des autres. Prenez donc l’habitude
d’assumer la responsabilité de ce qui vous arrive et de ce que vous
ressentez. Quand il fait mauvais temps et que vous ne vous sentez pas bien,
vous êtes responsable de votre état d’esprit. Quand une personne n’est pas
aimable, vous êtes responsable de vous sentir rejeté et coupable.

2. Les choses n’arrivent pas pour rien et renferment un


enseignement qui peut me servir
Qui peut donner un sens à sa vie peut tout supporter, disait Nietzsche. Il
est très constructif en effet de donner un sens aux situations que nous
rencontrons et de leur trouver une signification positive par rapport à nous.
Nous pourrions formuler cela autrement en disant  : Peu importe ce qui
arrive, il y a quelque chose de bon à en tirer, il y a une occasion à saisir.
Tous ceux qui partagent cette croyance profonde vont plus rapidement que
les autres passer activement à travers les difficultés. Bien sûr, cela ne veut
pas dire qu’ils ne souffriront pas lors d’une épreuve, ou qu’ils
n’éprouveront pas de frustration ou de tristesse. Mais le sens qu’ils finissent
par donner aux embûches leur permet d’être plus fort, d’en sortir plus riche
d’un précieux enseignement, et parfois même de survivre. C’est le cas du
psychiatre autrichien Victor Frankl, qui a survécu aux camps de
concentration pendant la Seconde Guerre mondiale. Dans un de ses livres14,
il raconte comment lui et d’autres victimes de l’holocauste parvenaient,
malgré l’horreur, à donner un sens à leur vie. Selon lui, la recherche de sens
est l’une des motivations fondamentales de l’être humain.
3. Il n’y a pas d’échec, il n’y a que des routes
Que voilà une croyance capitale à donner à ses enfants pour qu’ils
apprennent très tôt à relativiser les résultats négatifs qu’ils obtiennent et
n’en viennent pas à croire, par généralisation, qu’ils sont eux-mêmes des
échecs. Une personne qui réalise un rêve n’y arrive pas à ses toutes
premières tentatives. Si ses actions ne produisent pas les résultats
escomptés, elle ne considérera pas cela comme un fiasco, car elle aura ainsi
appris ce qu’il ne fallait pas faire. On raconte qu’Edison a dû faire
10  000  essais infructueux avant de mettre au point la première ampoule
électrique. Après chacun de ses échecs, il cherchait à savoir pourquoi cela
ne fonctionnait pas et il tentait de trouver une solution à ce problème. Il
prenait la responsabilité du chemin choisi, ne s’en faisait pas le reproche
inutilement et en tirait l’enseignement qui lui permettrait d’emprunter une
autre voie et, finalement, de connaître le succès.

4. Si ce que tu fais ne fonctionne pas, fais autre chose


Cette croyance est le corollaire de la précédente et réfère à la flexibilité
nécessaire pour modifier notre action quand celle-ci ne donne pas les
résultats escomptés. Plusieurs personnes croient, à tort, qu’il n’y a qu’une
seule façon de procéder, qu’une seule manière de se rendre là où elles le
désirent. Quand elles n’obtiennent pas les résultats espérés, elles persistent
et refont les mêmes choses de la même façon, juste au cas où cela
fonctionnerait cette fois-ci. Or, plus nous faisons quelque chose qui ne
fonctionne pas, moins cela fonctionne. La folie, disait Einstein, c’est de se
comporter de la même manière et de s’attendre à un résultat différent. Plutôt
que de nous acharner, il vaut mille fois mieux essayer autre chose. Cela
implique, bien sûr, de laisser tomber la sécurité et le confort de nos
habitudes et de nous mettre à la recherche active de nouvelles façons de
faire.

5. Il n’est pas nécessaire de tout comprendre et de tout


savoir avant d’agir
Cette croyance est particulièrement intéressante parce qu’elle sous-entend
que nous pouvons passer à l’action avec les moyens dont nous disposons,
plutôt que de croire que nous devons être parfaits et nous trouver dans la
situation idéale avant de poser les gestes qui nous rapprocheront de nos
rêves. Le perfectionnisme est, plus souvent qu’autrement, source de
paralysie et de procrastination.

6. Si les autres le peuvent, je le peux moi aussi


Cette croyance réfère au pouvoir que nous nous attribuons et fait obstacle
aux croyances Je ne suis pas capable et Si les autres le peuvent, c’est qu’ils
ont du talent. Ce qui est sous-entendu derrière cette affirmation, c’est que si
quelqu’un, quelque part, a réussi à accomplir ce que nous rêvons de faire,
c’est qu’il y a des stratégies pour y parvenir, que nous pouvons apprendre et
appliquer. Il est certain qu’il faudra y mettre le temps et payer le prix pour y
arriver, mais l’imitation des modèles est l’un des plus importants raccourcis
que nous pouvons emprunter pour avancer. Non seulement ces modèles
nous indiquent les moyens qu’ils ont adoptés et les routes qu’ils ont suivies,
mais ils nous évitent de réinventer la roue.

7. Il n’y a pas de réussite durable si je ne m’engage pas,


chaque jour, à améliorer la qualité de ma vie
Il y a un prix à payer, n’en doutons pas, pour réaliser la vie que nous
souhaitons. Ce prix, ce sont les efforts constants et l’énergie que nous
mettons sans relâche pour atteindre nos objectifs dans l’un ou l’autre
domaine important de notre vie. S’engager à travailler sans cesse à
améliorer sa vie est un bien petit prix à payer à côté des regrets de ne pas
avoir réalisé ses rêves.
9. R. Rosenthal, L. Jacobson, Pygmalion in the Classroom, New York, Holt, Rinehart & Winston, 1968.
10. Rapporté par Deepak Chopra, Esprit éternel et corps sans âge. L’alternative quantique à la vieillesse, Montréal, Stanké, 1996.
11. Ibid., p. 112.
12. Loretta Laroche, Relax: You May Only Have a Few Minutes Left, New York, Villard Books, 1998.
13. Anthony Robbins, Pouvoir illimité, Paris, Robert Laffont, 1989.
14. Victor Frankl, Découvrir un sens à sa vie, Montréal, De l’homme, 2006.
5

Apprendre

à se motiver
Je conçois qu’il faille éviter les plaisirs

qui entraînent de grandes douleurs et convoiter

les douleurs qui débouchent sur de grands plaisirs.

Michel Eyquem de Montaigne

Vous avez, jusqu’à maintenant, décidé des changements que vous voulez
apporter à votre existence et qui vous permettront d’être plus heureux, plus
épanoui, et de vous rapprocher de la vie dont vous rêvez dans différents
domaines.
Vous avez également fait l’inventaire de ces croyances paralysantes que
vous traînez avec vous, depuis toujours peut-être, et qui viennent
compromettre votre démarche avant même que vous ne preniez la route.
Vous avez aussi appris comment affaiblir ces automatismes et leur enlever
progressivement du pouvoir sur vous.
Par ailleurs, vous avez aussi identifié les croyances qui vous aident déjà et,
sans doute avez-vous choisi de nouvelles croyances pour développer
davantage votre propre allié.
Dans ce chapitre, nous allons vous présenter les moyens de faire en sorte
que vos rêves ne restent pas simplement à l’état de vœux pieux. Si vous
appliquez les outils présentés ici, vous considérerez les changements à venir
comme des nécessités et ressentirez l’urgence d’agir.

La motivation
Vous est-il déjà arrivé de savoir exactement ce que vous deviez faire,
d’être animé par un objectif précis et même passionnant, de détenir toutes
les connaissances requises pour y parvenir et, malgré tout cela, de ne pas
agir  ? En résumé, vous est-il déjà arrivé de manquer de motivation  ?
Souvent, sans doute, comme tout le monde.
Or, si vous voulez introduire des changements dans votre vie, vous devez
développer au moins deux qualités que partagent les personnes qui réalisent
leurs rêves. D’abord, apprendre à vous affranchir de cette zone de confort
qui vous retient captif et inhibe votre aptitude à aller de l’avant. Ensuite,
apprendre à passer à l’action même lorsque les conditions ne sont pas
idéales. Pour y arriver, il est très éclairant de connaître votre façon
habituelle de vous motiver. Pour illustrer notre propos, voici deux courts
épisodes de la vie quotidienne.

Première scène de lit


Vous êtes profondément endormi. Un tintamarre de cloches électroniques
déchire soudainement le silence, suivi de la voix numérique de votre
réveille-matin qui lance : Il est six heures trente minutes !
Sans même réfléchir, vous vous retournez sur vous-même, tel un
contorsionniste du Cirque du Soleil, libérant le bras emprisonné sous votre
oreiller. Vous lancez dans l’air froid du matin une main décidée qui s’abat,
avec une précision de tireur d’élite, sur le bouton d’arrêt du réveil. Temps
écoulé : 0,8 seconde.
Après avoir cloué le bec à cet empêcheur de dormir en rond, le cœur
battant à tout rompre, vous retombez dans votre lit, maudissant
intérieurement celui qui vous a offert ce réveil parlant qui vous sort du
sommeil tous les jours de bureau…
Le bureau… Vous yeux s’ouvrent et fixent le plafond… Les images et les
sensations se bousculent dans votre tête : le plancher glacé, les banquettes
de voiture raidies par le froid, la circulation à pas de tortue, la montagne de
dossiers sur votre table de travail, la mine patibulaire de votre patron…
Bof ! Un petit dix minutes de plus et je serai prêt ! pensez-vous en appuyant
sur le rappel d’alarme, puis en refermant les yeux.
Jamais dix minutes n’auront passé si rapidement. Il est six heures
quarante  ! lâche sans indulgence la voix sèche, juste avant que vous ne
l’interrompiez brutalement. Incapable de vous motiver à sortir du lit, vous
vous dites que, de toute façon, vous n’avez pas faim le matin, que vous
avalerez un café à dix heures, que… que… et vous vous retournez, en paix
avec vous-même, réussissant même à retrouver par moments les brumes du
sommeil. De délai en délai, votre pensée vagabonde et se porte sur la
journée qui vient…
Telle une bombe qui vous éclate dans la tête, se rappelle subitement à
votre esprit la réunion avec un important client que votre patron a
convoquée pour huit heures et à laquelle tout le bureau doit assister. En
moins de temps qu’il n’en faut pour l’écrire, des images plus grandes et
plus effrayantes que nature défilent sur votre écran mental : votre arrivée en
retard à la réunion, le regard réprobateur du patron, les sourires moqueurs
des collègues… Aïe  ! Trois secondes plus tard, gonflé d’adrénaline, vous
voilà dans votre pantalon. Et comme si ce n’était pas suffisant, vous
entendez derrière vous : Il est sept heures trente ! Dans votre tête, plus forte
encore, une autre voix, la vôtre, retentit  : Grouille-toi imbécile  ! Mais ce
n’était pas nécessaire, vous voilà motivé à entreprendre la journée. Plus rien
ne vous arrête maintenant.

Deuxième scène de lit


Vous êtes allongée sur le dos, mais ne dormez plus. En sautant du lit, votre
chatte Mimine, qui dormait à vos pieds, vous a réveillée et vous n’arrivez
plus à refermer les yeux. Vous jetez un regard vers le cadran lumineux sur
la table de chevet  : trois heures dix-sept. Encore 133  minutes avant la
sonnerie du réveil… c’est interminable !
À peine étonnée de la rapidité avec laquelle votre cerveau a effectué ce
calcul mental, lui qui d’habitude ne fonctionne à peu près normalement
qu’après un troisième café, vous vous mettez à penser à votre amie… Elle
est à votre porte, le visage souriant… Votre valise à la main, vous lancez un
joyeux : Je suis prête… en route ! Puis c’est l’embarquement dans l’avion,
votre installation confortable dans votre siège réservé, le décollage… Vous
imaginez la mer bleue, la chaude sensation du soleil sur votre peau, le bruit
du vent dans la voile et le visage bronzé de Pedro, le chef de bord
mexicain…
Mimine, attirée par vos mouvements, remonte sur le lit et interrompt votre
rêverie. Trois heures vingt et une… je ne serai jamais capable de me
rendormir, vous dites-vous intérieurement. Et si je me levais tout de suite ?
Et vous voilà déjà debout, prête… et motivée.

L’orientation de la motivation
De ces deux exemples amusants, nous pouvons retenir au moins deux
choses. La première, c’est qu’il est bien plus agréable de se lever pour partir
en voyage que pour aller travailler. La deuxième, c’est que l’on peut être
très motivé à agir quand on veut éviter un désagrément ou une menace, ou
quand on anticipe une récompense, un plaisir. Et cela ne s’applique pas
seulement au lever matinal  ! Il en va également de même quand il s’agit
d’entreprendre un travail, de préparer une réunion, de rencontrer un client,
d’effectuer une réparation qui s’impose, de s’occuper des enfants, ou…
d’amorcer un changement important dans sa vie. C’est ce qu’illustre bien
l’image populaire de la carotte ou du bâton, par allusion à l’âne qu’on ne
réussit à faire avancer qu’en lui faisant miroiter une récompense ou en le
menaçant d’une punition.
Tous les êtres humains partagent cette tendance profonde à rechercher le
plaisir et à éviter la souffrance, de sorte que ces deux orientations de la
motivation coexistent en chacun de nous, à des degrés différents. La plupart
du temps cependant, l’une prend le pas sur l’autre et agit comme une
programmation mentale qui vient influencer nos actions et nos décisions.
L’exercice qui suit devrait vous permettre d’identifier laquelle prime chez-
vous.
Pour certains, c’est la tendance à l’évitement qui est la plus forte. Quand
ils passent à l’action, c’est pour s’éviter un malaise, un inconfort, pour
échapper à un sentiment désagréable, pour se prémunir contre le jugement
des autres, pour éviter d’être blessé, pour fuir un conflit, pour ne pas perdre
un avantage, un statut, un être aimé. Par exemple, ils seront plus enclins à
chercher un emploi tranquille qui leur offre la sécurité, de bonnes
conditions de travail, dans lequel il n’y a pas trop de changements, de
compétition, de conflits. En bref, un emploi dans lequel ils ont la paix.
Ils choisiront une maison exigeant le moins d’entretien possible, préférant
même rester en appartement pour éviter la responsabilité des réparations.
S’ils font de l’exercice ou modifient leurs habitudes alimentaires, c’est que
leur condition physique est telle qu’ils s’y sentent forcés, sous peine de voir
leur santé se détériorer davantage. S’ils abandonnent la cigarette, c’est
qu’ils s’essoufflent au moindre effort, ou qu’ils ne veulent pas que leurs
enfants respirent leur fumée, ou encore parce qu’un examen a révélé une
anomalie pulmonaire qui leur fait craindre le pire.
Pour d’autres, par contre, la stratégie d’évitement ne suffit pas. Pour
stimuler leur motivation, parlez-leur de la possibilité d’atteindre un objectif
attrayant, de relever un défi, d’obtenir un avantage tangible, ou même
intangible comme la reconnaissance, l’épanouissement, la réalisation de soi,
l’avancement, le statut social, le pouvoir ou le simple plaisir d’être bien
dans sa peau. Ainsi, ils voudront d’un emploi dans lequel ils se sentiront
utiles, qui leur permettra d’aider les autres, de contribuer à faire avancer les
choses. Ils rechercheront un travail qui mettra à profit leurs aptitudes
personnelles, leur créativité par exemple, ou dans lequel ils pourront faire
de nouvelles rencontres et éprouver du plaisir avec leurs collègues. Certains
choisiront même leur profession en fonction des idéaux auxquels ils
souscrivent. Plusieurs employeurs recherchent ce type de personne qui aime
se fixer des objectifs et qui se motive par elle-même à les atteindre.
Ils achèteront peut-être une vieille maison pour le plaisir de la rénover
avec des amis, de la décorer, de la transformer. S’ils font de l’exercice ou
s’ils s’alimentent correctement, c’est qu’ils apprécient de bien se sentir,
qu’ils savourent l’énergie que procurent de bonnes habitudes et qu’ils
veulent tirer le meilleur parti de ce que la vie a à leur offrir.
Les réponses que vous avez données plus haut vous permettent sans doute
de voir un peu plus clairement votre stratégie habituelle de motivation et,
probablement, d’entrevoir déjà les conditions qu’il vous faut mettre en
place pour passer à l’action.

Exercice
Quelle stratégie de motivation privilégiez-
vous ?
Prenez quelques instants pour identifier votre stratégie de
motivation en répondant par écrit aux questions suivantes.
Donnez le plus de réponses possible.

1. Que recherchez-vous dans un travail  ? Qu’est-ce qui est


important pour vous dans un emploi ?
2. Vous voulez acheter une maison. Quelles caractéristiques
souhaitez-vous y retrouver ?
3. Vous avez cessé de fumer. Quelles étaient vos raisons
majeures pour arrêter ?
4. Vous faites de l’exercice régulièrement. Pourquoi ?

Après avoir répondu de votre mieux, choisissez, pour chaque


question, les deux raisons les plus importantes pour vous.

Différents seuils
Que l’on soit davantage motivé par l’évitement du malaise ou par la
recherche du plaisir, il est intéressant aussi d’apprendre à reconnaître où se
situe ce point critique qui, une fois atteint, déclenche en soi la motivation et
amorce l’action. Ce seuil peut être bas pour certains, et beaucoup plus élevé
pour d’autres.
Parmi les personnes qui fonctionnent par évitement, certaines ne tolèrent
pas longtemps l’inconfort, de sorte qu’elles sont souvent en action. En fait,
il serait plus approprié de dire qu’elles sont en réaction. D’autres ont un
seuil du malaise très élevé et tolèrent longuement l’inconfort avant de
réagir, attendant même parfois que le désastre soit imminent. Pensons à ce
couple qui bat de l’aile, dont seul un des partenaires ressent le malaise et est
motivé à agir pour éviter que la situation se dégrade davantage, alors que
l’autre ne prend conscience du problème que le jour où le premier lui fait
part de sa décision de rompre. D’un seul coup, motivé par cette menace, il
mettra tout en œuvre pour corriger la situation, parfois trop tard
malheureusement.
Pensons aussi à l’étudiant qui, la veille ou le matin même de l’examen, se
jette corps et âme dans l’étude, alors qu’un autre s’est préparé plusieurs
jours à l’avance. Les deux peuvent être motivés par l’évitement de l’échec,
mais le seuil du malaise du second, beaucoup plus bas, l’a motivé à passer à
l’action plus rapidement. C’est la même chose pour ces personnes qui
attendent presque d’être à l’article de la mort avant de consulter un
médecin, ignorant les signes avant-coureurs de la maladie, alors que
d’autres iront se faire rassurer dès l’apparition d’un symptôme anormal.
Dans le domaine du travail, nous observons que certains sont allergiques
aux problèmes et réagissent rapidement pour les résoudre, ou même pour
les prévenir, alors que d’autres ne s’y mettent que lorsque la situation est
devenue invivable ou que la perspective de perdre leur emploi pointe à
l’horizon.
Il y a également des seuils chez ceux qui sont plus motivés par la
perspective d’une récompense, d’un gain, d’un plaisir. Pour certains, la
simple perspective d’être récompensé d’un merci ou d’un sourire les
motivera à poser un geste, alors que d’autres auront besoin de gratifications
beaucoup plus grandes et plus tangibles. Pour s’accomplir, certains vont se
satisfaire d’activités simples, alors qu’à l’autre bout du continuum, d’autres
auront besoin d’entreprendre de grandes choses, de réaliser de grands
projets, de changer le monde, même. Certains trouveront tout leur plaisir
dans des loisirs aisément accessibles, alors que d’autres auront besoin de
s’adonner à des sports extrêmes. Dans l’une de ses conférences,
l’explorateur et alpiniste québécois Bernard Voyer racontait que, au moment
même d’atteindre le sommet de l’Everest, il pensait déjà à son prochain
défi. Voilà certainement quelqu’un qui a un seuil de motivation très élevé.

Avantages et inconvénients de chaque


stratégie
Si les deux manières de se motiver ont leurs avantages, notons toutefois
que les inconvénients sont un peu plus nombreux du côté de la stratégie de
l’évitement. Lorsqu’une personne ne réagit que pour éviter un sentiment
désagréable, une conséquence négative ou une perte potentielle, elle risque
de retomber dans la passivité aussitôt que l’inconvénient aura disparu,
souvent avant même que le problème ne soit vraiment réglé. Quand ce
dernier refera surface, le malaise renaîtra et déclenchera à nouveau la
réaction. Il est facile d’imaginer toutes les conséquences de ces cycles
répétitifs sur le bien-être et la santé physique et psychologique d’une telle
personne. À long terme, ce sont les maux de tête, les ulcères et les
problèmes liés à une pression artérielle élevée qui l’attendent.
Mais l’inconvénient majeur que doivent vivre ceux qui sont animés par
l’évitement, c’est qu’ils savent plus ce qu’ils ne veulent pas que ce qu’ils
veulent vraiment, ce qui est probablement la meilleure façon d’aller nulle
part, comme nous l’avons vu au chapitre 3 avec la métaphore de l’agence
de voyages. Leur attention est en effet plus orientée sur les moyens de ne
pas être malheureux que sur les moyens d’être heureux. Toutefois, comme
nous le verrons plus bas, cette stratégie de l’évitement peut être très utile
quand on sait s’en servir.

L’imagination au service de la motivation


Plutôt que d’attendre qu’un désastre soit imminent ou qu’il bouleverse
déjà notre vie, nous pouvons utiliser la motivation par l’évitement pour
nous aider à avancer vers nos objectifs. Comment  ? En souffrant à
l’avance !
Beau programme, direz-vous, que cette invitation à la douleur. Et pourtant,
si vous vous servez de votre imagination, votre cerveau n’y verra que du
feu, puisqu’il ne fait pas la différence entre une situation réelle et la même
situation clairement représentée dans votre esprit.
Cette constatation est confirmée par les résultats de plusieurs études. Dans
l’une d’elles15, on demandait à des comédiens professionnels de se
remémorer l’événement le plus joyeux et le plus triste de leur vie et de
tenter d’éprouver les sentiments qu’ils avaient alors ressentis. Pour localiser
les régions cérébrales qui étaient activées lors de l’expérience, on utilisait la
technique d’imagerie par résonance magnétique.
Or, on s’est aperçu que les régions du cerveau qui s’animaient lorsqu’ils
imaginaient ou revivaient ces événements étaient les mêmes que celles qui
s’activaient lorsqu’on induisait chez eux des émotions par le biais d’extraits
de films ou d’images chargées affectivement.
Vous n’êtes probablement pas comédien, mais vous avez vos propres
pensées, et toutes vos expériences sont enregistrées ou codées en quelque
sorte dans votre cerveau sous forme d’images, de sons et de sensations.
Aussitôt que vous repensez à une expérience significative que vous avez
vécue, vous reproduisez dans votre esprit le film de cette expérience, son
code si vous préférez, et vous revivez alors les émotions et l’état
physiologique qui l’accompagnaient.
Pour le vérifier, fermez les yeux et remémorez-vous une expérience qui
vous a été pénible à vivre. Imaginez la scène dans votre esprit, comme si
elle se déroulait actuellement. Que se passe-t-il lors de cet événement ? Que
voyez-vous ? Y a-t-il des gens autour de vous ? Si oui, que disent-ils ? Que
vous dites-vous à vous-même ? Qu’y a-t-il de pénible dans cette scène ?
Si vous prenez vraiment le temps de reprendre contact avec la
représentation mentale de cette expérience, vous vous apercevrez que vous
ressentez à nouveau les émotions qui y sont intimement reliées, comme si
vous la reviviez réellement. En fait, pour votre cerveau, c’est ce qui se
passe. La seule représentation mentale de cette situation passée le fait réagir
comme si vous vous y retrouviez vraiment. En clair, vous venez de vous
faire souffrir tout à fait gratuitement.
Le même mécanisme opère lorsque vous pensez à une situation future que
vous appréhendez et imaginez plus effrayante que nature, comme un
rendez-vous chez le dentiste ou une présentation en public. Même si la
situation n’est pas encore présente, sa représentation mentale provoque déjà
en vous des émotions très fortes. Le cerveau, nous le répétons, ne fait pas la
différence entre une situation réelle et une autre clairement imaginée. Nous
aurons d’ailleurs l’occasion, au chapitre 9, de voir comment on peut utiliser
ce processus mental quand on travaille sur ses émotions.
Neuf étapes pour se motiver à agir
Nous vous proposons maintenant une démarche en neuf étapes qui vous
aidera à passer plus rapidement à l’action et à réaliser vos aspirations. Elle
s’effectue en deux temps et exploite, l’une après l’autre, les grandes forces
de la motivation que nous venons d’expliquer. L’évitement de la souffrance
et la recherche du plaisir vont se rejoindre pour provoquer l’urgence d’agir.

Étape 1 : Commencez par lire la démarche au complet pour bien la


comprendre. Si vous connaissez une personne de confiance, vous
pouvez lui demander de vous guider dans votre réflexion. Trouvez un
coin tranquille où vous ne serez pas dérangé et prenez le cahier dans
lequel vous avez soigneusement noté les domaines de votre vie que
vous avez décidé de privilégier lors de l’exercice du chapitre  3.
Relisez les aspirations que vous avez formulées en regard de chacun
de ces domaines, puis choisissez celle sur laquelle vous allez d’abord
vous concentrer au cours de la présente démarche.
Étape 2  : Fermez les yeux et transportez-vous maintenant dans le
futur, dans un an par exemple. Imaginez le plus clairement possible
ce que vous aurez perdu en n’agissant pas dans le sens de cette
première aspiration. Voyez les conséquences négatives que votre
inaction aura eues sur votre santé physique, sur votre moral, sur votre
estime de soi, en somme sur votre vie en général. Prenez le temps de
bien ressentir les émotions associées à cette projection.
Étape 3  : Projetez-vous maintenant dans deux ans, puis dans cinq
ans, dans dix ans, et demandez-vous ce qui va se passer si vous ne
prenez pas la décision d’agir maintenant. Quelles conséquences
négatives aura votre inaction sur votre état d’esprit, sur vos relations
importantes, sur votre conjoint et vos enfants, sur vos amis, sur votre
situation financière ? Quel type de personne le miroir reflétera-t-il ?
Aimerez-vous ce que vous y verrez  ? Ici encore, associez-vous le
plus possible aux émotions que ces images ne manqueront pas de
faire monter en vous. Allez encore plus avant et imaginez-vous à la
fin de votre vie, jetant derrière vous un regard rempli d’amertume, de
regrets, et répétant sans cesse  : J’aurais dû  ! Le secret, pour tirer
profit de cette démarche, c’est d’imaginer clairement le pire scénario
qui pourrait arriver si vous ne réalisez pas votre rêve. D’où
l’importance de construire des images précises et détaillées, de
rendre les scènes plus claires, plus colorées, plus réelles et plus
dramatiques que nature. Si, comme c’est le cas pour certains, vous
éprouvez de la difficulté à imaginer sous forme d’images,
concentrez-vous sur les sentiments que vous éprouvez à l’idée de tels
scénarios.
Étape 4 : Il est certain qu’un tel exercice ne manquera pas de faire
monter l’anxiété, donc de vous faire souffrir. Rappelez-vous que le
but visé, c’est de provoquer la nécessité d’agir pour éviter cette
souffrance. Quand vous sentez monter l’émotion, faites parler votre
voix intérieure qui vous commande, d’une manière péremptoire,
d’agir tout de suite.
Étape 5 : Pour conclure cette première étape de la démarche, écrivez
dans votre cahier quelques phrases décrivant le sombre avenir qui
vous attend si vous n’agissez pas maintenant. Faites ensuite
l’énumération la plus complète possible de tout ce que vous allez
perdre si vous ne donnez pas suite au désir de changement que vous
avez exprimé. Et pendant que vous vous adonnez à cet exercice,
soyez bien à l’écoute des sentiments pénibles qui vous habitent.
Voyez-y un appel pressant à poser des gestes concrets pour empêcher
que ce mauvais rêve ne se réalise.

Si votre seuil du malaise est élevé, vous devrez peut-être répéter


l’expérience jusqu’à vraiment sentir l’anxiété vous envahir. Il s’agit de
trouver votre point sensible, cette perspective que vous ne voulez
absolument pas vivre et qui menace peut-être même vos valeurs. Voici
d’ailleurs un exemple qui illustre bien comment l’anticipation de
conséquences néfastes peut activer le processus cérébral qui déclenche
l’action.
À la suite du décès de son fils dans un accident, une femme a sombré dans
la dépression, au point de devoir laisser son emploi pour un temps
indéterminé. Plus rien ne l’intéressait. Elle se négligeait, passait ses
journées en robe de chambre et se désintéressait de son conjoint, de son
autre fils adolescent et de ses amis. Quelques mois plus tard, alors qu’elle se
traînait hors du lit, elle surprit une conversation entre son autre fils et son
mari. Ils échangeaient sur leur chagrin de la voir dans un tel état et sur leur
impuissance à l’aider. Elle entendit son fils avouer à son père qu’il n’en
pouvait plus de vivre dans un tel climat et que, s’il le pouvait, il quitterait la
maison familiale. Ce à quoi le père ajoutait qu’il y songeait parfois lui aussi,
désespérant de voir s’améliorer cette situation invivable pour tout le monde.
À demi-mot, il laissait aussi entendre qu’il était fatigué de tenir le fort tout
seul, sans même pouvoir exprimer sa propre souffrance.
Entendant cet échange, la dame se projeta instantanément dans l’avenir.
Elle eut une vision de ce que serait sa vie si elle devait perdre les deux
personnes qu’elle aimait le plus au monde. Bien sûr, la perte de son premier
enfant lui procurait une peine indicible. Mais elle raconta plus tard que, à la
perspective de perdre aussi ce qui lui restait de plus précieux, elle décida, à
cet instant même, de se prendre en main et de poser les gestes qu’il fallait
pour conjurer cette fatalité. Involontairement, son fils et son conjoint, en
partageant leurs sentiments, lui avaient permis de vivre à l’avance une
épreuve encore plus douloureuse que celle qu’elle traversait depuis
quelques mois. Ce scénario était imaginaire, bien sûr, et ne se serait peut-
être jamais réalisé. Mais la douleur anticipée, elle, était bien réelle et bien
présente. C’est en elle que cette personne trouva la motivation dont elle
avait besoin pour sortir de l’impasse où elle se trouvait. Elle avait atteint en
quelque sorte son point de bascule.

Étape 6  : Pour donner plus de force à cette démarche et décupler


votre motivation, nous allons maintenant y ajouter la force
d’attraction que peut exercer la perspective d’un grand plaisir. Pour
changer, il ne suffit pas que le malaise soit important. Il faut aussi
être certain que le changement est possible. Rien de mieux pour
développer cette croyance que d’imaginer ce que vous réserve
l’avenir si vous agissez maintenant et de façon constante en direction
de votre rêve. C’est à cette visualisation que vous êtes convié dans
les quatre dernières étapes du présent exercice. Appliquez-vous-y
soigneusement car elles sont essentielles. Et pour commencer du bon
pied, relisez attentivement l’aspiration que vous avez choisi de
privilégier à la toute première étape de cette démarche, de façon à
reprendre contact avec toute l’énergie qui s’y trouve.
Étape 7 : Fermez à nouveau les yeux, et transportez-vous une fois de
plus dans un an. Imaginez le plus nettement possible ce que vous
aurez gagné en réalisant les changements souhaités. Constatez-en les
effets positifs sur votre santé, sur votre moral, sur votre estime de
soi, sur votre vie en général. Attardez-vous sur ces images pour les
rendre plus claires, plus précises, plus colorées. Rapprochez la scène
de vous, imaginez que vous en faites partie, non comme un
observateur extérieur, mais comme un acteur qui ressent l’excitation
d’y jouer un rôle actif.
Étape 8  : Projetez-vous maintenant dans deux ans, puis dans cinq
ans, dans dix ans, en essayant à chaque fois d’imaginer ce qui va se
passer si vous prenez la décision d’agir maintenant. Quels effets
positifs la réalisation de votre rêve aura-t-elle eus sur votre humeur,
sur vos relations importantes, sur votre conjoint et vos enfants, sur
vos amis, sur votre situation financière  ? Quel genre de personne
verrez-vous dans votre miroir quand vous vous le regarderez, cette
fois avec fierté  ? Imaginez-vous même à la fin de votre vie, jetant
derrière vous un regard de satisfaction, heureux d’avoir réalisé vos
aspirations profondes.
Étape 9  : Complétez la démarche en écrivant dans votre cahier
quelques phrases sur les belles histoires que vous aurez imaginées.
Puis faites une liste de tout ce que vous allez gagner en passant à
l’action dès aujourd’hui dans ce domaine précis.

Conclusion
Vous savez maintenant comment mettre votre imagination au service de
votre motivation et créer suffisamment d’inconfort et d’excitation pour vous
donner le goût d’avancer, tout de suite, un pas après l’autre, sur le chemin
de vos rêves. Votre réflexion n’a cependant porté jusqu’ici que sur une seule
de vos aspirations, celle que vous aviez décidé de privilégier au début de
l’exercice. Vous pouvez maintenant appliquer la même démarche à chacun
des domaines de votre vie où vous avez exprimé un désir de changement.
La motivation, nous l’avons dit, c’est la capacité d’agir, non seulement
lorsque la situation est propice et que les astres sont bien alignés, mais aussi
lorsque les conditions sont défavorables. Voilà pourquoi il est important
d’identifier d’abord la stratégie de motivation qui nous anime
habituellement : l’évitement de la souffrance ou la recherche du plaisir. Puis
il faut savoir comment en tirer profit et, plus encore, comment combiner
cette énergie avec celle de la stratégie opposée. Notre élan vers l’action en
sera alors accru d’autant.
Se décider à changer est un geste de foi en l’avenir et en soi-même, de
fidélité à ses aspirations les plus profondes. Voilà pourquoi, pour mener à
terme nos projets, il est essentiel de nous respecter nous-même, de prendre
en compte les idéaux auxquelles nous adhérons. Vivre en harmonie avec
nos valeurs profondes est, en effet, une des plus importantes sources de
gratification qu’on puisse trouver. D’où la nécessité de bien connaître nos
valeurs personnelles pour mieux y harmoniser nos rêves. C’est ce à quoi
nous nous intéresserons dans le prochain chapitre.
15. M.  Pelletier, A.  Bouthillier, S.  Carrier, C.  Breault, J.  Lévesque, P.  Bourgouin, M.  Beauregard, Brain Activity During Self-
Induced Sadness and Happiness in Professional Actors, 31e colloque annuel de la Society for Neuroscience, 2001.
6

L’impact des valeurs

sur vos choix et vos décisions


Tous les jours, nous prenons des dizaines, voire des centaines de décisions.
Si la plupart d’entre elles ne nécessitent pas un grand questionnement et
sont presque des automatismes, d’autres, par contre, sont marquées par
l’hésitation ou le doute. C’est le cas des décisions que nous avons à prendre
quand nous souhaitons introduire des changements significatifs dans notre
vie. Devant les alternatives qui se présentent alors à nous, il peut même
nous arriver de vivre un véritable déchirement intérieur.
Voilà pourquoi il est si important, avant même de commencer à vous
orienter dans une nouvelle direction, d’asseoir solidement les décisions que
vous vous apprêtez à prendre. Vous avez déjà fait un grand pas dans cette
direction quand, au chapitre  3, vous avez formulé votre propre vision
d’avenir et précisé les objectifs que vous rêvez d’atteindre. Il s’agit
maintenant de vous assurer que votre rêve s’harmonise bien avec les valeurs
auxquelles vous adhérez.
Les valeurs, ce sont ces grandes forces, parfois inconscientes, qui nous
poussent à agir. Comme elles jouent un rôle essentiel dans les décisions que
nous prenons, il est capital de bien les identifier si l’on ne veut pas que nos
choix nous mettent en contradiction avec nous-mêmes. En outre, si nos
décisions impliquent d’autres personnes, comme c’est le cas bien souvent, il
faut aussi prendre en compte leurs valeurs propres. Autant, en effet, des
valeurs communes créent des liens très forts entre des personnes, autant les
conflits de valeurs peuvent venir à bout des relations les plus solides.
Dans ce chapitre, nous vous convions donc à réfléchir sur l’origine de vos
propres valeurs, sur leur unicité et sur la hiérarchie que vous établissez entre
elles. Nous verrons aussi que, s’il n’est pas toujours possible, ni même
souhaitable, de changer nos valeurs personnelles pour les ajuster à nos
projets, il peut être opportun d’en réviser la hiérarchie, ou encore de
redéfinir les critères qui nous permettent de vérifier si elles sont ou non
respectées.
Au terme de cette réflexion, vous serez bien outillé pour évaluer les plans
d’avenir que vous avez commencé à esquisser. Non seulement vous serez
ainsi en mesure de faire de meilleurs choix, mais vous serez mieux armé
pour gérer efficacement les conflits internes et externes qui ne manqueront
pas de surgir en cours de route.

Ce que sont les valeurs


Nous pourrions définir très simplement les valeurs comme ce que nous
jugeons personnellement comme étant vrai, beau et bien. C’est à elles que
nous nous référons quand vient le temps de porter un jugement ou de poser
un geste. Elles sont les critères les plus décisifs qui motivent nos choix
importants comme celui d’un conjoint, d’une orientation de carrière et d’un
travail, ou de moindre portée comme celui d’une automobile, de la
décoration de notre salle de bains et d’un endroit pour prendre nos
vacances. Bien sûr, nous ne sommes pas les seuls dépositaires de toutes ces
valeurs, que nous partageons avec d’autres au sein des groupes auxquels
nous appartenons. C’est ainsi qu’on parlera volontiers des valeurs
québécoises, ou nord-américaines, par exemple. Mais chaque personne se
constitue, au fil du temps, un système de valeurs qui lui est propre et qui
influence son comportement. Et en ce sens, on peut légitimement dire qu’il
y a autant de systèmes de valeurs que d’individus.
Si nos valeurs guident nos actions et inspirent nos projets, elles nous
indiquent aussi ce qu’il est capital pour nous de respecter. Ainsi, quand
nous agissons conformément à nos valeurs, nous ressentons une profonde
cohérence interne. À l’inverse, lorsque des comportements – autant les
nôtres que ceux dont nous sommes témoins – trahissent ces convictions,
nous nous sentons en conflit avec nous-même ou avec les autres. Par
exemple, la personne éprise d’honnêteté qui apprend qu’une connaissance a
eu recours à la fraude pour réussir un examen ou obtenir un poste ressentira
tristesse et colère. Et si jamais elle en venait elle-même à recourir à de telles
manœuvres, elle se sentirait mal à l’aise, coupable, voire pitoyable,
sentiments qui viendraient altérer la plénitude de sa réussite.
Les valeurs sont, en fait, des croyances très profondes, souvent
inconscientes. Elles déterminent ce dont nous cherchons à nous rapprocher
pour éprouver du plaisir, de la satisfaction, et ce dont nous voulons à tout
prix nous écarter pour éviter la souffrance, le malaise, l’inconfort
psychologique. Agir en conformité avec nos valeurs nous permet donc de
vivre cohérence, unité et plénitude. Voilà qui explique que, de tous les outils
de motivation, notre système de valeurs est certainement le plus puissant
qui soit.

D’où viennent les valeurs


Tout comme les croyances, les valeurs ont des origines multiples qui se
perdent dans l’histoire de tous les conditionnements appris depuis
l’enfance, et qui ont même parfois traversé plusieurs générations.
L’environnement familial, notamment par le biais du système des
récompenses et des punitions, a contribué à nous façonner un certain code
moral. L’école et la société, avec leurs figures d’autorité et leurs modèles,
ont renforcé ce système et y ont ajouté d’autres valeurs, comme l’ont aussi
fait nos lectures et nos amis. Il en va de même des médias, dont l’influence
est loin d’être négligeable. Il suffit de penser à l’impact de certaines
vedettes ou de certaines idoles sur leurs admirateurs, particulièrement sur
les plus jeunes, aux valeurs qu’elles transmettent et aux comportements
controversés qu’elles peuvent parfois inspirer.
Notre milieu de travail véhicule lui aussi ses propres valeurs, qui peuvent
être très différentes, voire à l’opposé, de celles que nous privilégions à la
maison, d’où certains conflits parfois très douloureux. Pensons par exemple
à l’ambition professionnelle et au prestige dont elle est souvent auréolée par
rapport au temps accordé au conjoint et aux enfants.
Il arrive enfin qu’un système de valeurs bien établi change avec le temps,
que ce soit en fonction d’expériences nouvelles que nous vivons, de notre
évolution dans l’échelle sociale, ou tout simplement parce que nous
avançons en âge. Prenons l’exemple d’une personne qui, parce qu’elle
devait assurer la sécurité de sa jeune famille, accordait une valeur
prépondérante, dans son travail, à une rémunération élevée et à la sécurité
d’emploi. Une fois les enfants partis de la maison et leur avenir
relativement assuré, elle valorisera peut-être davantage un travail qui
contribuera au mieux-être de la collectivité, ou encore qui lui permettra
d’exprimer davantage ses capacités particulières.

Découvrir vos valeurs


Il n’est pas très difficile d’identifier nos valeurs, même si elles ne sont pas
toujours conscientes. En fait, lorsque nous faisons un choix, il est, la plupart
du temps, motivé par notre valeur la plus importante à ce moment précis
dans notre échelle personnelle. Par exemple, deux médecins peuvent
adhérer aux mêmes valeurs d’honnêteté16 et de commisération, mais se
comporter différemment à l’égard d’une personne qui n’en a plus pour
longtemps à vivre. C’est ainsi que le premier pourra, par compassion, taire
la vérité à son patient, alors que le second préférera ne rien lui cacher au
risque de le bouleverser. On aura compris que la hiérarchie de leurs valeurs
est différente et que, devant le choix difficile qu’ils avaient à faire, chacun a
privilégié celle qu’il estimait la plus importante à ce moment précis. On
peut même penser que, si le malade était un proche, le choix de chacun des
médecins pourrait être inversé en raison de la priorité accordée à une
troisième valeur, l’attachement, et de la manière toute personnelle dont il la
définit.
Une démarche de changement, comme celle dans laquelle vous êtes
engagé, oblige aussi à des arbitrages délicats et suscite parfois des conflits
intérieurs. Vous les résoudrez d’autant plus efficacement que vous
connaîtrez les valeurs qui vous animent et l’importance relative qu’elles ont
les unes par rapport aux autres. Supposons, par exemple, que vous rêvez de
créer votre propre entreprise ou de soumettre votre candidature à un nouvel
emploi ou à une promotion. Vous recherchez ainsi un travail plus intéressant
(accomplissement, créativité, ambition) et qui, de surcroît, améliorerait
votre niveau de vie (sécurité, confort, liberté). Or, vous savez que cela
impliquera plus d’heures de travail et moins de temps à consacrer à votre
famille. Si les valeurs familiales (amour, appartenance) sont précisément
parmi celles qui comptent le plus pour vous, vous devrez en tenir compte
sous peine d’être tiraillé, en conflit avec vous-même et, forcément, moins
heureux de votre choix.
De la même façon et pour les mêmes raisons, la communication avec vos
proches – votre conjoint, votre enfant, un parent, un collègue, votre patron –
sera grandement facilitée si vous connaissez leurs valeurs et en tenez
compte. Par exemple, si vous voulez proposer à votre supérieur une façon
différente de fonctionner et que vous savez que ses valeurs principales sont
la productivité et l’économie, vous aurez plus de chances qu’il appuie votre
projet si vous pouvez lui démontrer qu’il améliorera le rendement de
l’entreprise et augmentera les profits.
Illustrons cela autrement. Vous voulez partir en voyage dans une région
peu touristique (liberté, curiosité, aventure) et vous tenez à le faire avec
votre conjoint (amour, complicité). S’il n’en tenait qu’à vous, vous traceriez
vous-même votre itinéraire, puis partiriez avec votre sac à dos. Cependant,
vous savez que votre compagnon de voyage attache une grande importance
à la sécurité, davantage encore qu’à l’esprit d’aventure. Une telle différence
dans la hiérarchie de vos valeurs risque donc de créer une situation
conflictuelle. Peut-être alors la solution sera-t-elle de faire affaire avec une
agence spécialisée dans les voyages alliant aventure et sécurité, ce qui vous
permettra de partir ensemble et de sortir des sentiers battus tout en vous
sentant en confiance.
Retenons que notre satisfaction et notre bien-être sont toujours en rapport
avec le respect de nos valeurs essentielles. En effet, comme nous l’avons vu
au chapitre précédent, nous avons une tendance innée à rechercher le plaisir
et à éviter le malaise. Par exemple, une réussite financière exceptionnelle
pourra faire le malheur de quelqu’un si elle le conduit à vivre en désaccord
avec ses valeurs premières, tout comme un certain dénuement matériel
pourra, chez un autre, se vivre de façon très satisfaisante si ses valeurs
principales sont respectées (stimulation sociale et intellectuelle, don de soi).
Harmoniser nos rêves à nos valeurs est donc essentiel dans une démarche
de changement. On ne peut, en effet, changer un ou des aspects
déterminants de notre vie sans s’assurer que, à terme, nos projets
respecteront nos convictions les plus profondes. Au moment où vous vous
apprêtez à donner plus de consistance à la vision d’avenir que vous avez
déjà esquissée, il est donc capital de bien identifier les valeurs qui vous
animent, de même que leur poids relatif les unes par rapport aux autres. À
cet effet, nous vous proposons, à la fin de ce chapitre, un exercice (voir
l’encadré Exercice 2. La hiérarchie de mes valeurs) qui vous permettra de
mieux vous connaître à cet égard. Probablement découvrirez-vous alors
que, si les valeurs ne sont pas en elles-mêmes bonnes ou mauvaises, celles
que vous privilégiez s’harmonisent difficilement avec certaines aspirations
– les vôtres ou celles de vos proches –, ou sont plus ou moins conformes
aux convictions de la majorité. En être conscient vous permettra de
résoudre plus aisément les conflits intérieurs que vous aurez éventuellement
à affronter.

La précision lorsque l’on parle de valeur


Les mots sont parfois trompeurs. Il ne suffit pas de se réclamer d’une
valeur pour être parfaitement compris de ceux à qui on s’adresse. Encore
faut-il préciser le sens qu’on lui attribue. On peut ainsi prétendre partager
une valeur avec une autre personne, la communication par exemple, mais
n’avoir vraiment rien de commun avec elle quant au sens à accorder à ce
terme. Pour l’un, communiquer pourra signifier échanger en tête à tête sur
des sujets intimes, alors que pour l’autre, cela voudra dire bavarder de tout
et de rien avec des inconnus, sur le réseau Internet par exemple. Pour l’un,
la valeur du plaisir sera satisfaite dans un travail qui permet de relever des
défis, et pour un autre, elle sera comblée par tout ce qui est extérieur au
travail.
De même, deux personnes peuvent imputer à des valeurs différentes des
comportements qui, en fait, tendent exactement vers le même but. L’un
invoquera l’épanouissement personnel pour expliquer son implication
comme bénévole dans un groupe communautaire, alors qu’un autre parlera
plutôt de contribution à la collectivité. Amour peut tout aussi bien signifier,
pour l’un, une rencontre brève mais intense, et pour l’autre, un engagement
de toute une vie. C’est bien connu, les mots ne veulent pas toujours dire la
même chose pour chacun.
On le voit, il faut plus qu’identifier ses valeurs – les nommer – pour
s’assurer qu’on les respecte vraiment. Il importe surtout de prendre
conscience de leurs critères de vérification, c’est-à-dire des règles bien
personnelles qui définissent ce qui doit se passer pour qu’elles soient
respectées.
Pour savoir si vos projets d’avenir s’harmonisent bien avec vos valeurs
fondamentales, il vous faut donc revenir à ces critères, les identifier le plus
clairement possible. L’exercice que nous vous proposons ci-dessous (voir
l’encadré Exercice 1. Mes critères de vérification) vous y aidera. Bien sûr, il
n’est pas nécessaire de soumettre toutes vos valeurs à une telle analyse.
Mais au moment où vous vous apprêtez à introduire des changements
significatifs dans votre vie, il vaut mieux vous assurer qu’ils ne heurteront
pas les valeurs auxquelles vous tenez le plus.

Exercice 1
Mes critères de vérification
1. Sélectionnez une de vos valeurs fondamentales en vous
inspirant, au besoin, de la liste proposée à la toute fin du
chapitre. Pour les besoins de l’exercice, nous illustrerons
nos propos en nous référant à la valeur reconnaissance.
Mais vous pourrez facilement les transposer à la valeur que
vous avez personnellement choisie.
2. Installez-vous confortablement, puis revenez dans le
temps, en esprit, à une occasion où vous ressentiez
vraiment que cette valeur était respectée. Retrouvez une
expérience passée dans laquelle vous aviez vraiment le
sentiment d’être reconnu, apprécié à votre juste valeur.
Revivez ensuite ce souvenir en prenant bien le temps
d’identifier ce qui se passait, les gens qui étaient là, ce
qu’ils disaient, ce que vous vous disiez intérieurement, ce
que vous ressentiez. Puis posez-vous cette question  :
qu’est-ce qui faisait que je me sentais reconnu à ce
moment-là ?
3. Si vous voulez aller encore plus loin, retrouvez une
deuxième et une troisième occasion du même type et
revivez-les, comme si vous y étiez vraiment, en vous
posant la même question.
4. Prenez le temps, ensuite, d’écrire quelques mots sur ces
expériences dans votre cahier. Pour dégager vos critères
de reconnaissance, demandez-vous : de quoi dépend mon
sentiment d’être reconnu ? du regard et des commentaires
des autres sur moi, ou de mon propre jugement interne  ?
des responsabilités que j’ai  ? du fait de posséder quelque
chose (un diplôme, une gratification)  ? de mon savoir  ?
Qu’est-ce qui me donne le plus le sentiment d’être
reconnu ?
5. Si vous le désirez, vous pouvez effectuer le même exercice
avec votre conjoint ou, au travail, avec les collègues de
votre équipe. C’est là une bonne façon de mesurer les
similitudes et les différences de vos critères de vérification
pour une même valeur.

Vos valeurs et celles des autres


S’il est un moment où il convient de sonder nos valeurs, c’est bien celui
où l’on s’engage activement dans une démarche de changement. Pour
prendre plaisir au processus qui conduira à la réalisation de nos objectifs et
de nos rêves, pour être heureux de les mettre en œuvre et pour y consacrer
le meilleur de nous-mêmes, nos projets doivent être en accord avec nos
valeurs les plus importantes. Selon que nous nous sentons, ou non, en
profonde harmonie avec elles, nous y investirons résolument toutes nos
énergies ou, au contraire, nous serons tentés d’abandonner en cours
de route.
Il n’est certes pas nécessaire, et encore moins essentiel, de partager nos
valeurs avec tous les autres. Il est certain cependant que, en période de
changement, une certaine communion de valeurs avec notre entourage
constitue un atout fort précieux. Plus nos valeurs s’harmonisent en effet
avec celles de nos proches, plus le rapport que nous entretenons avec eux
sera étroit, intime, satisfaisant et aidant. À l’opposé, si nos valeurs
respectives sont aux antipodes, il nous sera difficile, voire impossible, de
compter sur ceux qui nous entourent et de les amener à épouser, à admettre
ou simplement à comprendre nos objectifs. Les relations durables et les
unions heureuses, en amour comme en affaires, sont celles où les valeurs
communes servent de base au règlement des inévitables différends. Pour ne
nommer que quelques-unes de ces valeurs qui peuvent renforcer une union
– ou, au contraire, contribuer à la disloquer –, songeons, par exemple, à la
place que chacun attribue à la fidélité, à l’argent (prospérité), à l’ambition
professionnelle, à la place de la famille, à la gestion du temps.
La solidité d’une union repose sur la reconnaissance, par chacun des
partenaires, des valeurs les plus importantes de l’autre. Une relation ne
dure, en effet, que dans la mesure où chacun se sent respecté dans ses
convictions les plus intimes. D’où l’importance d’échanger sur le sujet, de
s’ouvrir sur ses propres aspirations, d’interroger l’autre sur les siennes, de
préciser le sens qu’on attribue, par exemple, aux termes respect, justice,
liberté ou accomplissement, de formuler ses critères de vérification.
Il ne faut surtout pas oublier que, en plus d’agir sur notre niveau de
motivation, sur notre vision du monde et sur notre mission, en plus d’influer
sur les rôles que nous nous attribuons dans la vie et sur les tâches qui en
découlent, les valeurs sont également investies d’une très grande charge
affective. Lorsqu’elles sont partagées par plusieurs personnes, elles créent
des liens assez puissants pour lever une armée de volontaires ou provoquer
d’extraordinaires gestes d’entraide. On en a eu un bel exemple au Québec
en 1998, quand le grand verglas17 a suscité une solidarité exceptionnelle
parmi la population. Mais à l’inverse, des valeurs opposées peuvent
déclencher et nourrir des affrontements acharnés, comme l’illustrent la
virulence et le fanatisme qui marquent souvent les conflits armés, les
querelles idéologiques et les débats sociaux.

Changer ses valeurs


Il arrive que nos valeurs changent avec le temps, inconsciemment parfois.
Nous sommes en effet influencés par les personnes qui entrent dans notre
vie, par un nouvel emploi, par l’arrivée d’un enfant, par notre évolution
dans l’échelle sociale. Le changement se produit généralement petit à petit,
rarement de façon radicale, bien qu’un événement marquant puisse le
provoquer soudainement. Pensons à Christopher Reeve, le célèbre
interprète de Superman au cinéma, devenu tétraplégique à la suite d’une
chute de cheval en 1995. Toute sa vie s’en est trouvée alors radicalement
bouleversée. Faisant résolument face à l’inéluctable, il a su faire les
ajustements nécessaires pour continuer d’avoir une vie remplie de sens,
comme il le raconte avec dignité et sensibilité dans sa biographie18. Il a dû
se décider très vite, se trouver d’autres raisons de vivre, une nouvelle
vision, de nouveaux défis, une nouvelle mission. Si ses valeurs
fondamentales n’ont peut-être pas changé, leurs critères de vérification ont
cependant dû être grandement modifiés.
Une valeur peut aussi apparaître moins pertinente avec le temps. En y
regardant de plus près cependant, on s’aperçoit qu’elle n’a rien perdu de son
importance mais que son processus de vérification est simplement devenu
périmé. C’est le cas, par exemple, d’un parent pour qui la valeur famille se
mesure par le temps passé avec son enfant et par la juste fermeté de son
encadrement. Ces critères de vérification, s’ils sont justifiés lorsque l’enfant
est en bas âge, devront sans doute être appliqués autrement à l’adolescence,
sous peine de provoquer une rébellion tout à fait prévisible et légitime.
Dans un cas comme celui-là, il faut donc avoir la flexibilité nécessaire pour
adapter le processus de vérification de cette valeur à la situation nouvelle.
Il se peut enfin qu’une valeur se transforme ou même disparaisse, mais
que nous ayons gardé, par habitude, le même processus de vérification.
Avec les années et l’expérience, par exemple, un patron pourrait avoir perdu
sa méfiance initiale à l’égard de ses employés, être maintenant convaincu
qu’ils méritent toute sa confiance, mais continuer quand même son contrôle
pointilleux et refuser de leur déléguer des tâches. Il maintient ainsi un
processus de vérification qui n’a plus sa raison d’être, la valeur à laquelle il
était rattaché étant maintenant absente. Les conditionnements sociaux et
culturels conduisent parfois à de telles dissonances. Ainsi, ils nous font
croire à l’importance de certaines valeurs, comme la richesse ou
l’avancement, et nous font poursuivre des buts qui, une fois atteints,
peuvent nous laisser tout à fait insatisfaits. Le stress et l’aliénation qui en
découlent sont directement causés par ce genre de discordance entre valeurs
et comportements.
Croyances et valeurs se combinent pour déterminer notre mission, c’est-à-
dire la tâche que nous nous fixons pour nous réaliser pleinement.
Certes, certains conflits de valeurs sont inévitables, que nous les
rencontrions en nous confrontant à d’autres ou que nous les retrouvions en
nous-mêmes. L’incohérence fait partie, dans une certaine mesure, de notre
nature. La multiplicité des règles, des idéaux, des façons de voir et d’agir
constitue une grande richesse. C’est lorsque nous sommes partagés entre
deux valeurs fondamentales que surgissent la tension et les conflits internes.
Ces nœuds peuvent être dénoués de plusieurs façons, soit en augmentant
le poids relatif de nos valeurs les plus importantes ou en changeant leur
ordre hiérarchique, soit en transformant le processus par lequel nous les
vérifions, bref, en restructurant notre expérience. Il n’est pas toujours
nécessaire de changer la valeur comme telle, car c’est parfois une décision
trop lourde de conséquences. Mais modifier son processus de vérification
pourra peut-être conduire à un compromis acceptable et même intéressant,
car il arrive que l’incohérence que nous ressentons vienne précisément de
ce processus lui-même.
Nous croyons profondément que nous avons le choix de ce que nous
voulons vivre, et que nous pouvons y arriver sans renier l’une ou l’autre de
nos valeurs fondamentales. Il suffit souvent, en effet, de mesurer nos
valeurs autrement. C’est ainsi qu’on peut réussir sur le plan professionnel
sans y sacrifier tout le reste, par exemple en déléguant certaines tâches et en
se réservant ainsi du temps pour sa famille. De la même façon, s’occuper de
sa famille ne requiert pas nécessairement une présence de tous les instants.
Tout comme une valeur spirituelle importante peut coexister avec la
richesse matérielle, même si cela peut sembler incohérent à un entourage
dont les valeurs ou le système de vérification sont différents. Tout est ici
question d’équilibre, et l’équilibre devrait aussi faire partie de nos valeurs.
L’équilibre entre les multiples facettes de la vie est un bon indice pour
prédire le bonheur d’une personne, et même son succès. Être équilibré, c’est
s’épanouir dans toutes les facettes de sa vie et en accord avec ses valeurs.
C’est aussi être capable de composer avec une contrainte majeure, celle du
temps. Il n’y a en effet que 168 heures dans une semaine, ce qui nous force
à faire des choix parfois difficiles. Dans le prochain chapitre, nous nous
intéresserons donc à la façon dont nous gérons notre temps. Ce sera pour
vous l’occasion de vérifier si votre emploi du temps correspond bien à votre
échelle de valeurs. Ce sera surtout un moment privilégié pour raccorder
concrètement vos rêves à l’action.

Exercice 2
La hiérarchie de mes valeurs
Si vous voulez opérer le bon aiguillage et prendre les bonnes
décisions, il est capital de bien connaître votre échelle des
valeurs. Hésiter parce que deux valeurs importantes s’opposent
constitue toujours un problème déchirant. Par contre, comme
nous le disions plus haut, connaître l’importance relative d’une
valeur par rapport aux autres peut vous éviter le sentiment
d’incohérence et vous permettre de justifier vos choix, ne serait-
ce qu’à vos propres yeux.
Voici une liste non exhaustive de valeurs parmi lesquelles vous
pourrez choisir celles qui ont le plus d’importance pour vous dans
un cadre donné, que ce soit votre vie personnelle ou
professionnelle. Il va sans dire qu’il en existe d’autres. À vous de
les ajouter ou de mettre de côté celles qui ne vous concernent
pas. Assurez-vous d’avoir un peu de temps devant vous pour
faire cet exercice qui demande quand même réflexion.
accomplissement
aide
ambition
amitié
amour
apprentissage
attirance
aventure
beauté
camaraderie
commisération
communication
compétence
compétition
congruence (vivre en accord avec soi)
contribution
courage
courtoisie
créativité
curiosité
défi
discipline
don de soi
économie
efficacité
égalité
épanouissement
esthétique
famille
fidélité
générosité
honnêteté
imagination
indépendance
indulgence
intelligence
intimité
joie de vivre
justice
liberté
logique
obéissance
paix
passion
plaisir
politesse
productivité
propreté
prospérité
reconnaissance
respect
sagesse
salut de l’âme
santé
sécurité
séduction
sentiment d’exaltation
sérénité
serviabilité
soutien
spiritualité
stimulation intellectuelle
stimulation sociale
temps
tolérance

1. Commencez par choisir un cadre particulier dans lequel


vous voulez connaître vos valeurs et leur importance
relative. Par exemple, vous pouvez y aller de façon globale
et choisir la sphère de votre vie personnelle ou celle de
votre vie professionnelle. Si vous voulez être plus précis,
choisissez une des catégories importantes de votre vie
personnelle ou de votre vie professionnelle, telles que vous
les avez formulées au chapitre 2.
2. Choisissez parmi la liste qui précède six à huit valeurs qui
ont pour vous le plus d’importance dans le cadre que vous
avez choisi. Transcrivez ces valeurs dans votre cahier, en
les plaçant l’une au-dessus de l’autre. Par exemple, dans le
cadre de sa catégorie Santé physique, une personne
pourrait choisir les valeurs beauté, attirance, discipline,
épanouissement, joie de vivre, santé, séduction. Ou
encore, dans sa catégorie Couple, elle pourrait conserver
les valeurs amitié, amour, communication, créativité,
générosité, passion, plaisir, soutien.
3. Classez-les ensuite intuitivement par ordre d’importance en
les opposant deux à deux. Prenez la première valeur de
votre liste et comparez-la à la seconde en vous demandant
laquelle est plus importante pour vous. Accordez 1 point à
la valeur qui l’emporte sur l’autre et 0 à la seconde. Puis
comparez cette première valeur de votre liste à la
troisième, puis à la quatrième, ainsi de suite jusqu’au bas
de la liste. Vous aurez ainsi donné une cote à cette valeur
en relation avec chacune des autres.
Dans l’exemple plus haut, la personne prendra d’abord la
valeur beauté et l’opposera à sa deuxième valeur, soit
l’attirance, puis écrira 1 à côté de l’une et 0 à côté de
l’autre, selon son évaluation de leur importance relative.
Puis elle reprendra beauté et l’opposera à la troisième
valeur de sa liste qui est la discipline, et ainsi de suite
jusqu’à ce que la valeur beauté ait été évaluée par
rapport à toutes les autres.
4. Faites ensuite la même démarche pour la deuxième valeur
de votre liste que vous comparerez à celles qui suivent.
Accordez encore une fois 1 point à la valeur qui l’emporte
sur la suivante. Dans l’exemple qui nous concerne, notre
individu recommencera le même processus en opposant la
deuxième valeur de sa liste, dans ce cas l’attirance, à
toutes celles qui la suivent.
5. Continuez cette évaluation pour la troisième, la quatrième
et ainsi de suite jusqu’à ce que vous ayez épuisé votre
liste. Parfois, les décisions seront difficiles à prendre. Nous
vous suggérons alors de vous poser des questions par
rapport à des situations réelles ou de vous demander ce
qui arriverait si l’une de ces valeurs devait disparaître.
Laquelle voudriez-vous conserver ?
6. Faites le total du nombre de points de chacune des valeurs
que vous avez retenues pour connaître celles que vous
évaluez comme les plus importantes. Vous venez de
dresser votre hiérarchie des valeurs dans le cadre que
vous avez choisi.
7. Reprenez ensuite le rêve que vous avez formulé dans cette
catégorie (chapitre  3) et voyez s’il s’harmonise avec cette
hiérarchie des valeurs.
8. Vous pouvez ensuite recommencer cet exercice dans un
autre domaine. Nous vous incitons à le faire au moins dans
les domaines où vous souhaitez introduire des
changements plus importants, de façon à vérifier s’ils sont
cohérents avec vos valeurs.

Pour mieux comprendre ce concept de cohérence, reprenons


notre exemple. Notre personne de tout à l’heure a choisi la
catégorie Santé physique, a tiré sept valeurs de la liste et en est
arrivée à la hiérarchie suivante (le chiffre entre parenthèses
indique la pondération de cette valeur comparée aux autres de sa
liste) : santé (6), joie de vivre (5), épanouissement (3), beauté (3),
attirance (2), séduction (1) et discipline (0). Dès le premier coup
d’œil, constatant la position qu’occupe la discipline dans sa
hiérarchie, cette personne peut déjà réaliser qu’il lui sera difficile
de se motiver à faire les efforts soutenus et nécessaires pour
atteindre son objectif. Peut-être devra-t-elle redéfinir ses critères
de vérification de la valeur discipline pour qu’ils soient plus
attrayants ou encore décider de faire grimper cette valeur dans
sa hiérarchie.
En terminant, nous vous rappelons que si vous voulez davantage
connaître votre compagnon ou votre compagne, vous pouvez
faire cet exercice à deux en vous stimulant par des questions,
des mises en situation et en questionnant l’autre sur la façon qu’il
a de vérifier sa valeur.

16. Les mots en italiques dans le texte réfèrent à des valeurs qui font partie de la liste de l’exercice 2.
17. Au début de janvier 1998, trois tempêtes successives de pluie verglaçante, de grésil et de neige ont frappé certaines parties de
l’est de l’Ontario et de l’ouest du Québec. En plein hiver, des millions de personnes se sont retrouvées sans électricité, parfois
pendant plus d’un mois. On a qualifié cet événement de pire désastre naturel de l’histoire du Canada.
18. Christopher Reeve, Still Me, Ballantine Books, New York,1999 (parue en français sous le titre Vivre).
7

Comment s’engager dans l’action


Idéalement nous sommes ce que

nous pensons. Dans la réalité,

nous sommes ce que nous accomplissons.


Ayrton Senna, pilote automobile brésilien

Nous vous avons demandé précédemment ce que vous rêviez de réaliser


dans les domaines importants de votre vie, puis de formuler, pour chacun
d’entre eux, une vision qui vous mobilise. Il est maintenant temps d’y
revenir et de vous mettre résolument en marche, un pas à la fois. Après
avoir fait un détour important sur les éléments fondamentaux du
changement que sont les croyances, les forces de la motivation et les
valeurs, vous allez maintenant pouvoir rattacher vos rêves à l’action, la
seule façon d’en faire une réalité dans votre vie. Mais peut-être vous
demandez-vous par quel bout commencer.
Nous savons tous à quel point nous pouvons nous sentir débordés, écrasés
même par une tâche à accomplir quand nous la regardons dans son
ensemble. Il n’en faut souvent pas plus pour que nous la mettions de côté.
De la même façon, vous êtes peut-être maintenant intimidé devant tout le
chemin qui vous sépare de la destination que vous souhaitez atteindre.
Il existe une stratégie éprouvée pour vaincre ce sentiment d’impuissance
et d’accablement tout en conservant intacts l’énergie et l’enthousiasme que
contient un rêve de changement. Elle comprend trois volets  : se fixer des
étapes faciles à atteindre et rapprochées dans le temps ; décider des actions
à poser  ; et troisièmement, s’engager concrètement dans l’action. Nous
allons donc commencer par reprendre chacun de ces trois éléments, après
quoi nous vous offrirons quelques conseils pour mieux répartir cette denrée
rare qu’est le temps.
Fixer des étapes accessibles
Revenons un instant sur les exemples que nous donnions au chapitre  3
pour illustrer notre propos. Ayant décidé de retenir la Santé physique
comme composante essentielle de sa vie personnelle, une personne
formulait la vision d’avenir suivante : Je vois un corps sain, qui dégage une
grande énergie et dans lequel je me sens bien, confortable. Je me vois en
possession d’un véhicule physique qui me permet d’accomplir facilement
mes journées et qui me supporte dans l’atteinte de mes désirs les plus chers.
Une bonne manière de commencer, pour cette personne, sera de morceler
son projet de façon à se donner des pistes concrètes d’action. Elle pourra
ainsi se demander quels sont les trois ou quatre secteurs de sa santé
physique sur lesquels elle veut travailler pour progresser vers la réalisation
de son rêve. Par exemple, elle pourrait décider de concentrer ses énergies
dans son alimentation, le développement de sa force musculaire et sa
capacité cardio-respiratoire.
Elle se demandera ensuite ce qu’elle veut réaliser d’ici trois ou quatre
mois dans chacun de ces secteurs. Elle formulera alors un objectif
intermédiaire accessible et adapté à sa réalité. Par exemple, elle pourrait
écrire :

Alimentation : d’ici trois mois, je veux apprendre comment cuisiner


des repas équilibrés et apporter des goûters santé au bureau.
Force musculaire : d’ici quatre mois, je veux augmenter ma masse
musculaire de 10 %.
Capacité cardio-respiratoire  : d’ici quatre mois, je veux être
capable de faire une marche rapide de dix minutes sans être à bout
de souffle.

Ces gestes peuvent paraître de bien petits pas, mais il vaut mieux se
donner des objectifs intermédiaires accessibles, réalistes et qui offrent plus
de chances de succès. Par exemple, si cette personne se fixe comme étape
intermédiaire de courir le kilomètre en moins de cinq minutes alors qu’elle
n’est aucunement entraînée et souffre d’un excès de poids, elle s’expose à
vivre du désappointement et même de la culpabilité, émotions qu’elle
voudra probablement éviter en abandonnant son projet et même son rêve,
convaincue qu’il est irréalisable et qu’elle n’a pas les capacités pour le
mener à terme.
De plus, il est important de se donner des objectifs mesurables qui, non
seulement indiqueront plus sûrement les moyens à prendre, mais vont aussi
permettre d’évaluer le chemin parcouru dans quelques mois.
Prenons un autre exemple pour mieux comprendre cette démarche. À
propos de sa Santé émotionnelle, une personne formulait ainsi sa vision : Je
me vois comme un être positif, irradiant la confiance, l’humour, la
détermination, les qualités humaines. Je me vois comme un combattant qui
relève ses manches et qui continue à faire reculer les barrières de la peur,
capable d’affirmer positivement ce qu’il est, sans violence verbale, sans
colère.
Elle choisit trois secteurs et y formule les objectifs à court terme suivants :

Constance et persévérance : je veux avoir complété la construction


de ma serre de jardin, un projet qui me tient à cœur.
Confiance en soi : je veux prendre plus souvent et plus rapidement
des décisions en me fiant davantage à mon jugement personnel.
Positivité  : dans mes conversations, je veux cesser de critiquer les
gens qui sont absents et arrêter de râler sur tout et sur rien.

Prenons enfin un dernier exemple, dans la sphère du travail cette fois. En


ce qui a trait au Marketing, une composante majeure de notre activité
professionnelle, notre vision se formulait ainsi  : Je trouve des idées
extraordinaires pour faire connaître les produits et services de l’entreprise
et ses formateurs. Je m’assure que nos produits et services sont en
constante demande et que notre entreprise est perçue comme un choix
incontournable quand il s’agit de conférences et de séminaires de formation
sur la gestion du stress, le développement de ses habiletés en
communication, l’adaptation réussie au changement et le développement
personnel.
Les trois pistes que nous avions choisi de privilégier pour les quatre mois
à venir étaient les suivantes  : l’image de l’entreprise, l’entretien de notre
réseau de contacts, la visibilité de l’entreprise.

Image de l’entreprise  : mettre à jour régulièrement notre site


Internet www.oserchanger.com et y ajouter du contenu (nouveaux
articles, documents vidéo, blog, émissions podcastées, liens vers
d’autres sites d’intérêt).
Entretien de notre réseau de contacts  : augmenter notre liste de
diffusion, composer et expédier régulièrement notre bulletin virtuel
Oserchanger Info avec de nouveaux articles sur le mieux-être.
Visibilité  : augmenter notre présence dans les médias écrits
(magazines spécialisés) et parlés (émissions radiophoniques,
télévisées).

Il y a deux raisons principales qui motivent le fait de se fixer une échéance


rapprochée dans le temps. D’abord, cela fixe un moment pour faire le point
sur nos progrès et pour ajuster notre tir, s’il y a lieu. Ensuite, cela nous
permet d’atténuer l’effet de la loi de Parkinson19 qui affirme que le travail
s’étale de façon à occuper tout le temps dont on dispose pour le compléter.
Cette loi, surtout appliquée au monde du travail dans l’administration de
projets, trouve aussi son écho au niveau personnel, dans nos activités
courantes. Avez-vous déjà remarqué que, plus vous vous donnez de temps
pour réaliser une tâche, plus elle se complexifie et plus elle vous
décourage ? Rappelez-vous ces travaux scolaires que vous deviez remettre
deux jours plus tard, et dont l’échéance rapprochée mobilisait toute votre
énergie, avec souvent d’excellents résultats. Le court laps de temps dont
vous disposiez vous obligeait à éliminer l’accessoire pour aller au plus
important.
Voilà pourquoi nous vous proposons des étapes intermédiaires d’une durée
de trois à quatre mois. Vous pouvez, si vous le désirez, les rapprocher
encore davantage, tant que vos objectifs sont accessibles, mesurables et
réalistes.

Décider de moyens d’action


Une fois cette étape complétée, il faut aussi arrêter de tergiverser et de
temporiser et passer à l’action, avec les moyens dont on dispose, sans
attendre la situation idéale. Il s’agit maintenant de reprendre chaque objectif
intermédiaire et de dresser une liste d’actions concrètes qu’on peut
accomplir immédiatement et dans les jours et semaines à venir. Dans
l’exemple que nous donnions plus haut sur la Santé physique, la personne
reprendra donc chacune des trois avenues qu’elle a choisies, relira sa
destination, et écrira pour chacune, en vrac, des gestes qu’elle pourrait
poser pour les atteindre, se gardant un moment pour en évaluer la
pertinence plus tard.

Alimentation (apprendre comment cuisiner des repas équilibrés et


apporter des goûters santé au bureau) : consulter une nutritionniste,
diminuer ma consommation de café à une seule tasse par jour,
remplacer mes collations sucrées artificiellement par des fruits frais,
aller à la bibliothèque de mon quartier pour trouver des livres sur
l’alimentation saine, m’informer sur les cours de cuisine santé qui se
donnent près de chez moi, naviguer sur Internet pour dénicher des
recettes simples de lunchs santé…
Force musculaire (augmenter ma masse musculaire de 10  %)  :
consulter mon médecin, téléphoner au centre de conditionnement
pour m’informer des coûts de l’abonnement, rencontrer un entraîneur
pour discuter de mon objectif et élaborer un programme d’exercices
musculaires adapté, trouver une amie pour s’entraîner avec moi et
m’encourager, acheter des vêtements d’exercice, commencer
l’entraînement…
Capacité cardio-respiratoire (être capable de faire une marche
rapide de dix minutes sans être à bout de souffle)  : acheter des
souliers de jogging, marcher activement trois fois par semaine
pendant au moins trente minutes, utiliser les escaliers plutôt que
l’ascenseur, charger de la musique entraînante dans mon baladeur
numérique à écouter lors de mes marches…

À cette étape, il s’agit donc de faire un inventaire complet des moyens


d’action et des ressources dont nous disposons pour passer à l’action. Bien
sûr, nous ne pourrons peut-être pas les utiliser tous. De plus, si nous
dressons de telles listes pour chaque domaine, nous nous retrouverons avec
un éventail plus ou moins important de listes à gérer. Mais ne vous
inquiétez pas  : nous vous indiquerons, un peu plus loin dans ce chapitre,
comment prioriser les moyens d’action qui seront les plus profitables. Pour
l’instant, nous vous invitons à revenir à vos cahiers et à faire pour vous-
même l’exercice de déterminer vos pistes d’action et vos objectifs à court
terme (voir l’encadré Exercice 1. Mes objectifs à court terme).

Exercice 1
Mes objectifs à court terme
Après avoir dressé l’inventaire des principales composantes de
votre vie personnelle et de votre vie professionnelle, vous avez,
au chapitre trois, formulé votre propre vision d’avenir pour chacun
d’entre eux. Il s’agit maintenant de fixer les étapes intermédiaires
qui vous mettront sur la route de leur réalisation.

1. Choisissez une première composante, ou catégorie, et


relisez bien votre vision pour vous imprégner de son
énergie et retrouver l’excitation qui était la vôtre au moment
de sa formulation.
2. Décidez de trois ou quatre secteurs d’activité que vous
voulez privilégier dans cette même catégorie.
3. Formulez pour chacun une cible intermédiaire à atteindre et
fixez une échéance (trois ou quatre mois). Assurez-vous
que vos objectifs sont concrets, réalistes, accessibles,
mesurables et qu’ils marquent un pas dans la bonne
direction.
4. Pour chaque objectif intermédiaire, notez les ressources
dont vous disposez et sur lesquelles vous pourriez vous
appuyer (une habileté personnelle, des ressources de votre
milieu comme la bibliothèque, le centre de conditionnement
du quartier, Internet, des ressources humaines qui gravitent
autour de vous, comme un parent, un ami).
5. Enfin, écrivez en vrac, pour chaque objectif, tous les
moyens d’action que vous pouvez prendre.
6. Reprenez ensuite les étapes  1 à  5 avec les autres
composantes de votre vie.

Comment distribuer son temps


Un jour, en sortant de l’école où elle était allée rencontrer l’enseignante de
son fils, une mère de famille heurte du pied un objet qui, sous l’impact,
roule dans l’herbe à côté du trottoir. Elle jette un coup d’œil et s’aperçoit
qu’il s’agit d’une sorte de bouteille métallique évasée et munie d’un bec. Se
laissant guider par la curiosité, malgré le temps qui la presse, elle se penche,
ramasse le contenant et le frotte un peu pour enlever la poussière. Aussitôt,
une fumée s’en échappe et un génie apparaît.
— Y a pas moyen d’être tranquille une minute ? Très bien ! Faites votre
vœu, qu’on en finisse au plus vite, lance le génie d’un ton grincheux.
Surprise, la jeune femme lui réplique en blaguant :
— J’aimerais bien avoir une autoroute qui irait directement en Martinique
où je pourrais me reposer…
—  Désolé madame  ! lui rétorque le génie d’un ton bourru. Il y a quand
même une limite à ce qu’on peut faire. Autre chose ?
Elle réfléchit un instant, puis dit :
— Moi, vous savez, je cours du matin au soir. Je dois concilier mon travail,
ma famille, mon engagement social. Je sors à peine d’une rencontre avec
l’enseignante de mon fils, et je dois retourner rapidement au boulot où
m’attendent d’autres urgences. Il faut aussi que je m’arrête à la banque,
puis à la poste pour déposer quelques lettres. En sortant du travail, en fin
d’après-midi, je dois m’arrêter au marché, prendre ensuite ma fille à la
garderie, rentrer à la maison pour préparer le repas. Ensuite, je veux aider
mon fils dans ses leçons et compléter le procès-verbal pour la réunion de
parents de demain soir. Il faut aussi que je repasse mes notes pour l’examen
de vendredi dans mon cours de perfectionnement au collège et j’aimerais
bien prendre un peu de temps pour faire mon jogging… C’est comme ça à
tous les jours  ! Alors, ce que je souhaite par-dessus tout, c’est avoir du
temps pour tout faire !
Le génie, décontenancé, la regarde et lui dit :
—  Bon ! C’est d’accord. Combien de voies vous voulez à votre autoroute
pour la Martinique ?
Bien des contraintes nous dictent quelle utilisation nous devons faire de
notre temps, et nous ne sommes pas toujours seuls à pouvoir en décider.
Mais il reste de la place pour des choix personnels et, jusqu’à un certain
point, le contrôle du temps est entre nos mains.
Le temps que nous passons éveillés pendant une journée moyenne peut se
répartir entre trois types d’activités. D’abord, nous devons consacrer
plusieurs heures à gagner notre vie, à la fois pour survivre et pour nous
procurer un peu de confort. Selon l’emploi que nous occupons, à temps
complet ou partiel, nous dépensons entre le quart et la moitié de notre
énergie dans ce type d’activités productives.
Ensuite, nous engageons environ le quart de notre temps dans des activités
de subsistance – manger, nous reposer, nous laver – et d’entretien
domestique – nettoyer, cuisiner, faire les emplettes et autres travaux.
Ce qui reste, c’est du temps personnel, du temps libre que nous pouvons
consacrer à notre développement, pour apprendre, pour créer, pour avancer
vers nos rêves. En somme, notre vie est faite des expériences que nous
retirons de notre temps de travail, des activités de subsistance et d’entretien,
et de tout ce que nous faisons de nos temps libres. D’où l’importance
d’employer ce temps personnel de façon à ce que notre vie ressemble à une
œuvre d’art.
Il y a quelques années, alors que nous préparions une conférence sur la
gestion du temps, la mère de Marc est décédée à l’âge de quatre-vingt-treize
ans. Cela nous a donné l’occasion de réfléchir, entre autres choses, à la
relation que nous entretenons avec le temps. Dans ses dernières années, il
n’était pas rare que nous entendions madame Vachon se désoler de ne pas
avoir le temps de faire autre chose dans sa journée qu’aller au marché, à la
banque ou chez sa coiffeuse. Nous aussi, avec nos quatre enfants et notre
vie professionnelle active, trouvions nos journées remplies, nous demandant
comment étirer le temps pour en faire encore plus. Comme elle, nous avions
l’impression de manquer de temps. Voilà qui illustre bien à quel point la
perception du temps et de sa durée peut être subjective.
Lorsque Marc était enfant, il n’était pas rare que sa mère prenne une pause
dans sa journée pour s’asseoir et lire un bon livre pendant que les enfants
étaient à l’école. Elle se donnait du temps à elle-même. Aujourd’hui, quand
nous abordons la notion d’équilibre dans nos séminaires, nous réalisons que
très peu de gens se donnent au moins une heure de temps personnel par
jour. Pour beaucoup, ce temps personnel, c’est celui qui reste quand ils ont
réussi à tout faire. Pas étonnant qu’autant de personnes rêvent aux vacances
et à leur retraite.
Bien sûr, du temps de madame Vachon, les rôles étaient un peu plus
simples. Infirmière diplômée, elle avait laissé l’emploi qu’elle occupait au
moment de se marier, comme la majorité des femmes de cette époque, pour
remplir ses rôles d’épouse, de mère de quatre enfants et d’éducatrice. La
réalité est bien différente aujourd’hui. Comme l’illustre notre petite fable du
génie, une femme peut, en plus de ses rôles de mère et de conjointe,
travailler pendant la journée, quand ce n’est pas sur des quarts de soir ou de
nuit, suivre à temps partiel des cours de perfectionnement, être membre de
l’équipe d’entraîneurs de football de son fils la fin de semaine,
représentante au comité de parents, joggeuse, militante dans un mouvement
écologique, et plus encore… Et il y a aussi toutes celles qui doivent élever
seules leurs enfants.
Jamais les options qui s’offrent à nous n’ont été plus nombreuses et plus
variées qu’aujourd’hui. Mais malheureusement, les lignes directrices qui
pourraient nous guider dans nos choix sont rarement bien définies. Et le
temps nous manque souvent pour l’essentiel. La technologie, qui devait
nous donner plus de temps, a fait de certains d’entre nous des esclaves.
Ceux qui lui échappent ne le font qu’au prix d’un grand effort de volonté.
Miracles de l’esprit inventif moderne, le téléphone portable, le courrier
électronique et les autres gadgets électroniques font en sorte que le travail
nous rejoigne maintenant directement à la maison, dans la voiture, au
magasin, au restaurant.
Comment, alors, gagner du temps  ? Plusieurs d’entre nous dressent des
listes, mais elles ne nous donnent pas plus de temps  ; tout au plus nous
aident-elles à établir des priorités. Et nous nous retrouvons, plus souvent
qu’autrement, à faire ce qu’il y a de plus urgent, au détriment de choses
moins pressantes mais combien importantes pour notre épanouissement,
comme celles qui nous permettraient de réaliser nos aspirations profondes.
En plus, nous ne venons que rarement à bout d’une liste, surtout que le
lendemain, il y en aura une autre tout aussi remplie, à laquelle s’ajouteront
d’autres demandes urgentes, puis d’autres imprévus.
Comment nous y prendre alors pour préserver notre équilibre et progresser
dans chacun des domaines importants de notre vie  ? Voici quelques
éléments de réflexion qui nous ont grandement aidés à atteindre nos propres
objectifs à long et à plus court terme.

Prendre conscience
Vivez-vous fréquemment de la frustration avec vos proches ou vos
collègues de travail ? Éprouvez-vous souvent de l’impatience, de la tension,
ou vous mettez-vous en colère pour des riens  ? Avez-vous souvent le
sentiment d’être débordé, fatigué, surchargé, stressé  ? Avez-vous parfois
l’impression désagréable de passer à côté de quelque chose d’important ? Si
vous ressentez ce genre d’émotions, c’est que votre psychisme vous signale
que quelque chose ne va pas et qu’il y a un déséquilibre dans votre emploi
du temps. Répartir votre temps de façon plus équilibrée commencera donc
par une prise de conscience de ces états d’esprit négatifs et de ce qui les
provoque.
Il ne s’agit pas seulement de prendre connaissance de ces avertissements,
mais de vraiment prendre conscience de ce que vous vivez et des
conséquences qui en découlent pour vous et votre entourage. Une
métaphore vous permettra de faire la distinction entre ces deux notions.
Certaines personnes donnent parfois l’impression de se promener avec un
serpent venimeux enroulé autour du cou. Vous leur faites remarquer sa
présence, et elles vous disent qu’elles sont au courant, qu’elles sont
informées et bien documentées sur les dangers mortels d’une morsure. Mais
elles ne font rien, parce qu’elles n’ont fait que prendre connaissance de la
situation. Seule la prise de conscience entraîne une action et,
malheureusement, plusieurs attendent la morsure du serpent pour réagir.

Où va votre temps ?
On arrivera plus aisément à une telle prise de conscience si l’on procède à
un examen minutieux de son emploi du temps. À cet effet, convenons de
classer nos activités suivant leur urgence et selon leur importance. En
combinant ces deux critères, nous arrivons ainsi aux quatre catégories
suivantes20 :
a. les activités urgentes et importantes ;
b. les activités urgentes, mais pas importantes ;
c. les activités importantes, mais pas urgentes ;
d. les activités ni importantes, ni urgentes.

a. Urgent et important
C’est la catégorie des demandes pressantes, celles qui viennent de notre
environnement comme de nous-mêmes, au travail et dans notre vie privée.
Dans l’anecdote du génie racontée plus haut, l’emploi du temps de la jeune
femme débordait de demandes de ce type. Si vous n’avez plus le contrôle
de votre agenda, c’est que vous passez la majorité de votre temps dans des
activités de cette catégorie.
Il faut dire que certains individus carburent à l’urgence. C’est le cas
notamment des tempéraments dits de type A21 qui sont plus ambitieux, plus
agressifs et qui fonctionnent habituellement à pleine vapeur. Préoccupés par
le temps qui fuit, ils ont fréquemment le sentiment de devoir lutter ou se
battre et réagissent aux pressions intérieures qu’ils se créent eux-mêmes.
Par comparaison, les tempéraments de type  B se soucient davantage de la
qualité de vie et, paradoxalement, ils maîtrisent leur existence mieux que les
premiers. Ils en contrôlent le rythme, arrivent à se détendre et à jouir du
moment présent beaucoup plus rapidement.
Nous ne pouvons certes pas échapper aux multiples sollicitations qui nous
sont adressées, d’autant plus qu’y répondre nous aide à nous sentir utiles.
Mais quand réagir aux demandes des autres occupe la majeure partie de
notre vie, le stress s’accroît et nos capacités d’adaptation et de récupération
peuvent être menacées. Et il devient alors beaucoup plus difficile de
s’occuper de nous-mêmes et de nos propres aspirations.

b. Urgent, mais pas important


Ce sont les fausses urgences qui, si elles nous paraissent importantes sur le
coup, sont en fait secondaires. Parfois, nous y répondons pour éviter de
faire quelque chose de plus important dont la réalisation nous semble plus
difficile et moins attrayante, ou dont l’échéance est plus éloignée. Les
études démontrent que la plupart des gens n’abordent pas les tâches qu’ils
croient ne pas pouvoir terminer, même si cela les conduisait à poser les
jalons pour introduire dans leur vie un changement souhaité. Ils leur
préfèrent les tâches accessoires qu’ils sont sûrs de mener à terme.
Imaginons une personne qui, dans la sphère de sa vie personnelle, a retenu
comme composante importante une catégorie qu’elle a intitulée Ma maison.
Elle formule ainsi sa vision : Je rêve d’un havre de paix, relaxant, beau, où
j’ai le goût de revenir après la journée pour me ressourcer, refaire le plein
d’énergie. Un de ses objectifs à court terme, c’est de rafraîchir la peinture
des différentes pièces de son intérieur avec des couleurs plus gaies, plus à la
mode. L’action la plus appropriée à poser, celle qui va la rapprocher à coup
sûr de la réalisation de cet objectif, c’est aller choisir ses couleurs au
magasin et se procurer pinceaux et peinture. Elle décide donc de passer à
l’action, mais au moment de partir, elle remarque que son atelier est un peu
à l’envers et elle décide de le ranger. Alors que cette tâche secondaire aurait
très bien pu être remise à plus tard, elle y passe une bonne partie de son
samedi, pour finalement réaliser qu’il ne lui reste plus assez de temps pour
aller choisir ses couleurs. Classique, n’est-ce pas ?
Combien de fois arrive-t-il qu’on s’installe à l’ordinateur pour rédiger une
lettre ou travailler sur un dossier important, et qu’on décide plutôt de ranger
les documents qui traînent sur son bureau, de répondre à ses courriels ou de
s’amuser à un jeu vidéo  ? Dans le fond, l’être humain aime tellement le
sentiment de contentement qu’il éprouve quand il parvient à mener à bien
une tâche, même facile et sans réelle importance, qu’il lui attribuera
volontiers une urgence qu’elle n’a pas. À court terme, en effet, il est
beaucoup plus gratifiant de ranger ses tournevis par ordre de grandeur, ou
ses dossiers électroniques par ordre alphabétique, que d’entreprendre une
action plus exigeante, qu’on voit peut-être comme une montagne, mais qui
est en lien avec les objectifs qu’on s’est donnés. Un bref survol de notre
emploi du temps suffit souvent pour nous faire réaliser que notre vie est
remplie de ces fausses urgences qui nous distraient de l’essentiel.

c. Important, mais pas urgent


C’est la catégorie de l’épanouissement, de tout ce qui nous rapproche de la
réalisation de nos rêves. Ce sont les choses qui comptent vraiment, les
activités par lesquelles nous nous réalisons, qui nous redonnent de l’énergie,
qui nous permettent de grandir et de devenir la personne que nous voulons
être, dans toutes les sphères de notre vie. Sont donc importantes toutes les
actions que nous jugeons nécessaires pour progresser vers nos objectifs à
court terme, mais que nous devons souvent remettre à plus tard pour
répondre aux urgences réelles. Car il y en a.
Pendant nos vacances, nous avions décidé de réserver nos matinées à
l’écriture de ce livre, geste important pour nous parce que menant
directement à la réalisation d’un de nos rêves. Un jour, en plein travail, nous
avons été distraits par le son d’une chute d’eau. Accourant pour comprendre
l’origine de ce bruit incongru, nous avons vu un torrent descendre l’escalier
conduisant à notre bureau. Nous avions omis de remettre le tuyau
d’évacuation de l’eau de la machine à laver dans le drain, provoquant une
petite inondation. Inutile de dire qu’il y avait là une vraie urgence dont nous
nous sommes occupés sans délai, remettant l’écriture à plus tard. Quand ce
genre de choses arrive, la question de l’utilisation de son temps ne se pose
même pas.
Mais il peut arriver aussi que nous remettions à plus tard parce que nous
accordons trop de place aux demandes des autres. Les personnes qui ont
une bonne estime de soi comprennent la nécessité de garnir leur emploi du
temps de choses importantes, mais non urgentes, et se donnent la
permission de poser de tels gestes, chaque jour. D’autres attendent d’être
rendues au bout du rouleau, malades parfois, pour s’autoriser à le faire.
D’autres encore fantasment sur le temps qu’elles auront à la retraite pour
s’occuper de tout cela, ne comprenant pas que c’est un réflexe qui doit se
développer dès maintenant.
Notons que certaines activités que l’on perçoit peut-être comme des
demandes urgentes et importantes peuvent, en fait, être rangées dans la
catégorie de l’épanouissement. À première vue, par exemple, tout ce qui est
requis par la préparation d’une conférence ou d’une formation, qu’il
s’agisse de rencontrer les clients, passer des appels, rédiger des propositions
de services, et même établir la facturation, pourrait être placé dans la
catégorie des sollicitations extérieures. Mais ce sont là des actions qui nous
permettent de faire ce que nous voulons vraiment et qui, dès lors, sont
importantes pour nous. C’est la même chose pour la dame de notre exemple
qui devait aller rencontrer le professeur d’un de ses enfants, se rendre au
marché, préparer le repas et aider son fils dans son travail scolaire. Elle peut
voir ces gestes comme des demandes pressantes, et elles en sont. Mais en
même temps, ce sont des actions qui relèvent d’une des composantes
majeures de sa vie personnelle : sa famille. Une telle façon de recadrer la
réalité aide parfois à redonner un sens aux choses que nous accomplissons.

d. Non urgent, non important


C’est la catégorie du temps perdu, celle des choses inutiles qui nous
distraient temporairement de nos préoccupations. Mais passer trop de temps
dans cette catégorie peut entraîner un sentiment de vide et d’inutilité. Qu’il
suffise de penser à ces adolescents qui jouent pendant des heures et des
heures sur leur console de jeux, pour ensuite surfer sur Internet ou discuter
interminablement avec leurs amis sur Facebook ou d’autres réseaux
sociaux.
Dans notre société, les médias se chargent d’occuper inutilement une
grande partie de notre temps libre. Le nombre d’heures passées à regarder la
télévision et à utiliser Internet en est un bon exemple. Il est fort probable
qu’au moment de mourir, très peu de gens vont se rappeler avec satisfaction
ces longues heures perdues. Ils vont plutôt regretter de ne pas avoir occupé
leur temps à faire des choses épanouissantes.
Nous vous invitons maintenant à faire l’exercice Où va votre temps ? qui
vous permettra, à votre tour, de vérifier à quoi vous employez vos journées
et vos semaines (voir l’encadré Exercice 2. Où va votre temps ?).

Exercice 2
Où va votre temps ?
1. Trouvez un peu de temps personnel pendant lequel vous
ne serez pas dérangé et écrivez en vrac dans votre cahier
tout ce que vous faites pendant une semaine normale, en
partant du lundi matin jusqu’au dimanche suivant. Allez-y à
grands traits, au fur et à mesure que les choses vous
viennent à l’esprit, sans chercher à être exhaustif.
2. Reprenez chaque élément de votre liste et classez-le
rapidement dans une des quatre catégories suivantes :
a) urgent et important ;
b) urgent, mais pas important ;
c) important, mais pas urgent ;
d) ni important ni urgent ;
3. Calculez le pourcentage approximatif de temps que vous
avez passé dans chacune des catégories, la somme des
quatre catégories étant 100 %.

En faisant ce rapide inventaire, vous avez calculé, grosso modo,


le pourcentage de temps que vous consacrez à chaque
catégorie, c’est-à-dire ce à quoi vous accordez votre attention
pendant une semaine régulière. Si, comme la plupart des gens,
vous passez plus de 70 % de votre temps à réagir aux demandes
urgentes et importantes des autres, au travail comme à la
maison, il est temps d’inverser progressivement la vapeur et de
viser à investir votre temps et votre énergie dans votre zone
d’épanouissement. Contrairement à la vaste majorité des gens,
vous avez la chance de savoir de quoi est constituée cette zone
d’épanouissement, puisque vous avez déjà déterminé les
domaines de votre vie personnelle et professionnelle dans
lesquels vous souhaitez vous réaliser.

Quelques règles de base


Régle N°1
Une première règle pour utiliser judicieusement votre temps, c’est de
toujours intégrer, dans vos journées ou vos semaines, des activités de
l’ordre de l’épanouissement, comme celles que vous avez élaborées à
l’exercice 1 (Mes objectifs à court terme), et qui vont vous rapprocher de
l’atteinte de vos objectifs personnels et de vos rêves. Les demandes de
toutes sortes (urgentes et importantes), particulièrement à certaines périodes
de la vie, peuvent être sans fin et vous pouvez aisément passer tout votre
temps à y répondre. S’il est réaliste de penser qu’il peut parfois être difficile
d’y intégrer des activités qui vont dans le sens de votre épanouissement, il
ne faut pas non plus, pour le faire, attendre la crise existentielle, la maladie,
l’épuisement professionnel, la dépression ou même la retraite.
L’objectif n’est évidemment pas d’éliminer toutes les sollicitations
extérieures. De toute façon, nous y arrivons rarement. De plus, elles nous
aident à nous sentir utiles. Un directeur général de collège à la retraite nous
disait que son seul rêve, quand il travaillait 70 à 90  heures par semaine,
c’était de se retrouver sur un terrain de golf. Quand il a pu le faire, il
s’ennuyait tellement et se sentait si inutile qu’après seulement quelques
semaines, il est retourné travailler bénévolement, à temps partiel, comme
consultant pour son ancien employeur. Maintenant, il joue encore au golf,
mais sent aussi qu’il rend service à la communauté.
Si vous dressez des listes de choses à faire, assurez-vous donc d’y inclure
des actions dans chacun des domaines où vous avez décidé d’introduire des
changements. Faites-le chaque semaine, même si c’est peu de chose à la
fois.

Régle N°2
Comme nous l’avons souligné plus haut, il nous arrive à tous de nous
sentir débordés, écrasés par une tâche à accomplir, surtout quand nous la
considérons dans son ensemble. Nous pouvons nous sentir paralysés par le
nombre de détails à retenir, par la quantité de choses à faire, par toutes les
étapes et les ramifications d’un projet. La deuxième règle consiste donc à
regrouper les tâches à faire en fonction des composantes majeures de notre
vie personnelle ou professionnelle. L’exemple qui suit illustre comment
procéder.
Supposons qu’une personne établisse, pour la journée qui vient, une liste
comprenant les items suivants :

faire mon jogging ;


rédiger le procès-verbal de la dernière réunion du comité de parents ;
confirmer le dîner au restaurant avec mon amie Jeannine ;
réserver le restaurant ;
appeler le masseur pour un rendez-vous ;
aider mon fils à faire ses devoirs ;
passer des coups de téléphone pour l’équipe de foot ;
réviser mes notes pour l’examen de vendredi dans mon cours de
perfectionnement ;
acheter des chaussures de jogging ;
acheter un cadeau pour l’anniversaire d’un collègue de bureau ;
rencontrer l’enseignante de ma fille ;
prendre rendez-vous avec le coiffeur ;
préparer la réunion du comité de parents ;
appeler ma mère ;
passer au guichet bancaire pour payer les factures ;
envoyer le procès-verbal par courriel à Jean ;
conduire la voiture au garage pour sa vérification.

Apparemment sans lien entre eux, les éléments de cette liste peuvent
toutefois être regroupés en fonction des grandes composantes de la vie de
cette personne. Par exemple, elle rangera dans la catégorie Santé physique
les éléments suivants  : faire mon jogging, appeler le masseur pour un
rendez-vous, acheter des chaussures de jogging, prendre rendez-vous avec
le coiffeur. Dans la catégorie Engagement dans la communauté, elle
placera  : rédiger le procès-verbal de la dernière réunion du comité de
parents, préparer la prochaine réunion, envoyer le procès-verbal par
courriel à Jean. Dans la catégorie Famille se retrouveront : aider mon fils à
faire ses devoirs, rencontrer l’enseignante de ma fille, passer des coups de
téléphone pour l’équipe de foot, appeler ma mère. Dans la catégorie Santé
financière : passer au guichet bancaire pour payer les factures, conduire la
voiture au garage pour sa vérification. Finalement, la catégorie Amis
comprendra  : confirmer le dîner au restaurant avec mon amie Jeannine,
acheter un cadeau pour l’anniversaire d’un collègue de bureau, réserver le
restaurant. Elle est donc passée de dix-sept éléments disparates (nos listes
en comptent évidemment toujours plus que cela) à cinq regroupements.

Régle N°3
La troisième règle, c’est d’établir des priorités à l’intérieur de chaque
regroupement, en accordant une valeur relative à chacun de ses éléments.
Deux principes doivent vous guider ici. D’une part, la logique pure et
simple. Par exemple, en ce qui concerne sa Santé physique, la personne de
notre exemple devrait logiquement prioriser l’achat de chaussures de sport
par rapport au jogging lui-même. D’autre part, il faut bien comprendre qu’il
n’est pas nécessaire d’effectuer toute une liste d’actions pour progresser
dans un domaine particulier. Il convient d’appliquer à cette liste la loi de
Pareto22, aussi appelée loi des 80-20, qui affirme que 20  % des causes
produisent 80  % des effets. À vous de trouver les actions de votre liste
actuelle qui vous feront le plus sûrement avancer, les plus profitables en
somme, et donc celles dans lesquelles vous devriez vous engager en
premier.
Dans l’exemple qui nous occupe, la personne accorde donc une valeur à
chacune des actions regroupées sous le titre de Santé physique. Après
réflexion, elle les classe dans l’ordre suivant : a) acheter des chaussures de
jogging  ; b)  prendre rendez-vous chez le coiffeur  ; c)  faire mon jogging  ;
d) appeler le masseur pour un rendez-vous. La liste correspondant à l’item
Famille devient pour elle  : a)  aider mon fils à faire ses devoirs  ;
b) rencontrer l’enseignante de ma fille ; c) appeler ma mère ; d) passer des
coups de téléphone pour l’équipe de foot.

Régle N°4
La quatrième règle consiste à accomplir d’abord les actions classées en
tête de liste. Même si vous n’avez pas le temps d’épuiser votre liste, vous
aurez au moins la certitude d’avoir accompli les activités les plus rentables,
celles qui vous rapprochent le plus sûrement de vos objectifs à ce moment
précis.

Régle N°5
La cinquième règle, c’est de prendre du temps pour planifier la semaine
qui vient. Au moment qui vous convient, prenez le temps de relire la vision
que vous avez formulée pour chacune des composantes de votre vie. Puis
revoyez vos objectifs à court terme et les moyens d’action qui s’y
rattachent.
Commencez ensuite votre planification en écrivant sur une liste ce qui doit
absolument être fait au cours de la prochaine semaine (urgent et important).
Choisissez ensuite trois composantes professionnelles et trois composantes
personnelles dans lesquelles vous voulez absolument progresser dans les
prochains jours. Puis écrivez ce que vous devez faire dans les sept jours qui
viennent pour vous rapprocher des objectifs que vous poursuivez dans
chacun de ces domaines. Ce qui reste, reportez-le sur une autre liste que
vous reprendrez la semaine suivante et sur laquelle vous écrirez aussi, à
mesure qu’elles se présenteront, les choses qui vous viendront à l’esprit
d’ici là. C’est une bonne façon de ne pas les oublier et, surtout, de vous en
libérer l’esprit jusqu’à la prochaine fois.
Une fois vos priorités établies, bloquez immédiatement dans votre agenda,
si c’est possible, des périodes, puis inscrivez-y les activités que vous avez
planifiées. Si vous ne le faites pas, soyez assuré que quelqu’un d’autre se
chargera de combler cet espace vacant et, encore une fois, vous serez au
service de votre agenda au lieu d’en être le maître. Si, dans votre catégorie
Famille, vous avez décidé de déjeuner avec un de vos enfants, fixez-en tout
de suite le moment et notez-le dans votre agenda. Si vous avez placé, dans
votre catégorie Santé physique, un rendez-vous chez votre masseur,
appelez-le aussitôt que possible pour décider avec lui d’un créneau horaire.

Régle N°6
Au moment de commencer votre planification de la semaine, sixième
règle, dressez un bilan de la semaine écoulée. Reprenez votre planification
de la dernière semaine, puis évaluez si vous avez bien occupé votre temps
ou si, plutôt, vous l’avez perdu dans des occupations moins importantes.
Bien sûr, des imprévus peuvent et vont survenir, qui vous obligeront à
réévaluer votre planification. C’est à vous de juger s’il vaut la peine de
reporter une activité qui vous aide à avancer vers ce que vous voulez
vraiment dans la vie pour la remplacer par une autre. Si vos valeurs et vos
objectifs sont clairs, vous avez là deux bons critères pour faire un choix et
dire non, le cas échéant, à d’autres sollicitations qui ne manqueront pas de
se présenter.

Régle N°7
Quand c’est possible, apprenez à déléguer ce que vous ne pouvez
accomplir. Quand vous avez complété votre planification, avant même,
donc, de passer à l’action, voyez ce que vous pouvez confier à vos
employés, à vos enfants, à votre conjoint, à la gardienne, à vos collègues.
Ils peuvent peut-être accomplir ces tâches mieux que vous et, parfois, plus
rapidement. Bien sûr, il n’est jamais facile de demander, et la majorité
d’entre nous a désappris très tôt à le faire, sans doute en raison des
innombrables refus essuyés dans notre jeunesse, peut-être également par
crainte de déranger. Mais il est certain que l’on ne progresse jamais vers la
réalisation de ses rêves sans l’aide des autres. Encore faut-il, bien sûr, savoir
comment formuler ses requêtes, ce sur quoi nous reviendrons dans le
chapitre sur la communication.
Les personnes perfectionnistes éprouvent aussi beaucoup de difficulté à
déléguer, convaincues que personne ne peut vraiment les aider, ou croyant à
tort que les choses doivent absolument être faites d’une certaine manière, la
leur évidemment. Mais elles ont trop souvent tendance à oublier que la
perfection est un idéal, très rarement atteint, et qu’en faire le premier critère
d’évaluation de leurs actions ne peut qu’engendrer déception et amertume.
D’où l’utilité d’évaluer les secteurs de sa vie où il est important de tendre
vers la perfection, et ceux où ça l’est moins. Plier un drap ou faire le
ménage devrait, par exemple, exiger moins d’énergie qu’écrire un
curriculum vitae pour un emploi.

Régle N°8
Reconnaissez que vous ne pouvez pas tout faire. Vous aurez fait un grand
pas lorsque vous aurez accepté cette évidence. La journée d’aujourd’hui ne
suffira pas pour réaliser tout ce que vous voulez, et il en sera encore de
même demain. Reportez alors, sur la liste du lendemain ou sur celle de la
semaine prochaine, les activités importantes dont vous n’avez pu vous
acquitter, tout en tenant compte, encore une fois, de vos objectifs
personnels. Peut-être déciderez-vous alors d’en éliminer certaines qui
auront perdu beaucoup de leur importance ou qui ne seront tout simplement
plus nécessaires.

Régle N°9
«  Est bien fou du cerveau qui prétend contenter tout le monde et son
Père », comme le dit si bien le meunier de la fable23. Cessez donc de vouloir
faire plaisir à tous. Bien sûr, nous vivons en société et nous devons
nécessairement renoncer à une certaine liberté pour des gens qui nous sont
chers. Il faut donc dès le départ accepter de leur consacrer du temps, mais
pas tout son temps.
Même si votre marge de manœuvre vous semble bien mince, et elle l’est
parfois, la décision finale vous revient. Vous aurez déjà fait un grand pas
quand vous aurez décidé d’avoir un peu plus de contrôle sur votre vie et de
réserver du temps pour vous. Attendez-vous cependant à ce que les autres
réagissent, surtout si vous les avez habitués à être servis en premier. Par
exemple, si vous voulez, comme parents, exiger plus d’aide des enfants
dans les tâches ménagères, prévoyez qu’ils vont réagir et, surtout, acceptez
qu’il en soit ainsi. On ne peut pas demander à un roi d’être content de
descendre de son trône…

Régle N°10
La dixième règle pourrait se formuler ainsi : ne vous sentez pas coupable
si vous n’arrivez pas à gérer parfaitement votre temps. D’abord, parce que
la culpabilité est inutile. Vous avez fait un choix, et il n’y a plus maintenant
qu’à l’assumer. Rappelez-vous aussi que la gestion du temps n’est qu’un
moyen, pas un but. L’objectif n’est pas de gérer parfaitement votre temps,
mais de tendre à faire ce qui va vous rendre plus heureux. N’oubliez pas
enfin que l’oisiveté est parfois le meilleur usage qu’on peut faire de son
temps. C’est souvent dans ces moments de temps perdu qu’on se retrouve et
qu’on retrouve les autres, que la créativité se manifeste et que de nouvelles
idées viennent. C’est aussi dans ces moments qu’on savoure la vie qui
passe, qu’on apprécie à sa juste valeur la richesse d’avoir du temps libre et
qu’on réalise pleinement que le temps est bien plus important que l’argent.
Le bonheur, c’est parfois juste d’avoir une bonne heure à soi.

Engagez-vous
Johann Wolfgang Von Goethe, poète, romancier et dramaturge allemand,
écrivait  : «  Quelle que soit la chose que vous pouvez faire ou que vous
rêvez de faire, faites-la. L’audace a du génie, de la puissance et de la
magie.  » Vous avez décidé d’actions concrètes pour vous rapprocher de
l’objectif que vous vous êtes fixé ? Passez à l’action ! Cessez de chercher
des excuses ou des raisons expliquant pourquoi vous ne bougez pas. Vous
créez votre propre réalité, alors mettez-vous aux commandes.
Nous vous avons parlé précédemment d’un sondage24 effectué à l’échelle
du Canada, qui révélait qu’une personne sur deux rêve de changer de vie.
Dans ce même sondage, on demandait à ceux qui ont accompli ce
changement ce qui l’a rendu possible. 25 % d’entre eux ont répondu : « On
l’a fait, c’est tout  !  » Un peu comme George Mallory, l’alpiniste
britannique, à qui les journalistes demandaient sans relâche pourquoi il
voulait escalader le mont Everest et qui répondait : « Parce qu’il est là. »
Ceux qui réalisent leurs rêves font ce qui doit être fait avec les moyens
dont ils disposent, sans attendre le moment idéal. Vous savez maintenant
quelles actions spécifiques vous devez accomplir pour avancer
progressivement vers vos propres rêves. Prenez donc maintenant
l’engagement, avec vous-même, de les exécuter sans faute et ne laissez pas
passer une seule journée sans faire un pas dans la bonne direction. Si
minime soit-il, il vous conduira à un autre, puis à un autre encore. Un jour,
vous regarderez derrière vous et réaliserez tout le chemin parcouru. C’est
l’action soutenue qui mène à la réalisation d’un changement que l’on
souhaite.
19. C. Northcote Parkinson, Les Lois de Parkinson, trad. par Jérôme de Villehouverte, Paris, Robert Laffont, 1983.
20. Adapté de Stephen R. Covey (First Things First) et de Anthony Robbins (The Time of Your Life).
21. La classification des tempéraments en types  A et  B a été élaborée à partir des travaux de Friedman et Rosenman et de
Matthews et ses collègues (in Spencer Rathus, Psychologie générale, Montréal, HRW, 1985). Un outil de mesure (voir l’annexe 2)
permet de distinguer les tempéraments de types A et B.
22. La loi de Pareto est une loi empirique inspirée par les observations de l’économiste et sociologue italien Vilfredo Pareto.
23. Jean de La Fontaine, Le Meunier, son Fils et l’Âne.
24. Voir n. 1 (chap. 1).
8

Comment provoquer des états d’esprit


dynamisants
Vous avez peut-être déjà remarqué comment une situation peut, à certains
moments, nous amuser et à d’autres nous énerver au plus haut point. Pensez
à ce collègue toujours en train de blaguer et qui a le don de détendre
l’atmosphère. D’habitude, vous le regardez faire son numéro et vous le
trouvez hilarant. Mais ses facéties vont peut-être vous agacer le matin où
votre garagiste vous aura appris qu’il en coûtera plusieurs milliers de
dollars pour des réparations sur votre automobile. Rappelez-vous encore
cette musique délicieuse que vous écoutez en travaillant et que vous trouvez
tout à coup insupportable lorsque, après avoir essayé sans succès de
replacer le panier supérieur du lave-vaisselle, vous entendez le toc d’une
petite vis qui est tombée puis a glissé doucement dans le trou de l’évier.
Rappelez-vous cette étreinte affectueuse et agréable de votre amoureux qui
passe derrière vous pendant que vous travaillez à l’ordinateur, mais qui
vous dérange au plus haut point lorsqu’un bug vient de figer votre écran et
vous fait perdre deux heures de travail.
Que s’est-il passé  ? Le collègue, la musique et le conjoint n’ont pas
changé, mais votre état d’esprit, en se modifiant, a influencé votre réaction
et votre conduite. Comme quoi nos comportements découlent directement
de nos états d’esprit. Il suffit de penser à cette journée où nous nous levons
du mauvais pied et pendant laquelle tout marche de travers. Certains vont y
voir le signe du destin qui s’acharne sur eux, d’autres diront que les gens
qui les entourent font tout pour les contrarier, d’autres se plaindront de la
température, du manque de sommeil, de la mauvaise qualité de l’air…
Toutes ces explications ne sont peut-être pas sans fondement, mais s’en
remettre à ces seules causes extérieures laisse supposer que l’individu n’est
qu’une victime passive, comme si son état d’esprit ne dépendait pas de lui.
La question qui se pose alors est la suivante : est-il possible de contrôler
nos états d’esprit  ? Jusqu’à un certain point, nous croyons que ça l’est et
qu’il vaut mieux s’exercer à la maîtrise de soi plutôt que de prétendre
contrôler les gens ou les situations qui ne dépendent pas de nous. Est-ce
qu’il suffit, pour y arriver, de le vouloir ou, comme le dit l’expression
anglaise, de penser positif ? Malheureusement, l’être humain ne fonctionne
pas ainsi. Tout changement, qu’il soit désiré ou subi, charrie son lot
d’émotions. Si certaines d’entre elles nous dynamisent, d’autres peuvent
nous paralyser. Et sur la route qui nous conduit à nos aspirations, nous
devons apprendre à dominer les émotions qui nous empêchent de progresser
et à susciter celles qui nous y aident.

Ah ! Ces émotions


On serait peut-être porté à croire que la vie serait plus simple s’il n’y avait
pas d’émotions. Finie alors la frustration qu’on éprouve quand les choses ne
fonctionnent pas à notre goût. Finie aussi la peur ou l’insécurité face à
l’inconnu et l’avenir. Disparue la timidité devant une démarche à faire ou
des liens à créer avec de nouvelles personnes. Évanoui également ce
chagrin accablant qui nous étreint quand on perd des proches. Adieu à la
tristesse causée par les paroles méchantes des autres. Exit le doute, la
culpabilité, le désappointement, l’insatisfaction, la jalousie, la tristesse.
Personne n’aime souffrir, et c’est sans doute pourquoi la tentation est si
forte de se distraire de ses émotions. On peut écouter la télévision pendant
des heures et y vivre sa vie par procuration, surfer sur Internet en passant
d’un site porno à un autre et tenter d’oublier sa difficulté à établir des
rapports avec des personnes réelles. On peut manger ses émotions, comme
le dit l’expression populaire, ou les noyer dans l’alcool. On peut aussi
consommer des médicaments et des drogues pour endormir ou geler son
mal à l’âme, ou dépenser son argent au jeu. Et puis, si cela n’est pas
suffisant, si le mal est trop grand, certains vont recourir à des moyens plus
radicaux et ultimes. E finita la comedia !
On ne peut, bien sûr, blâmer les personnes qui utilisent ces stratégies
pourtant vouées à l’échec, puisque ce sont peut-être les seules qu’elles
connaissent. Mais nous trouvons important de vous présenter des façons
plus saines et plus constructives de canaliser ses émotions. Car fuir ou nier
constamment ses émotions déplaisantes, comme le font parfois certains
adeptes de la pensée positive à tous crins, c’est aussi courir le risque de ne
plus éprouver celles qui sont plus agréables, comme la fierté d’avoir relevé
un défi, le plaisir de rire de bon cœur devant les absurdités de la vie, la joie
devant les réalisations de ses enfants, la compassion devant ceux qui
souffrent, l’amour de ses proches, l’émerveillement devant la beauté de la
nature, le frissonnement à l’écoute d’un morceau de musique… C’est courir
le risque de perdre ce qui donne ses couleurs à la vie, la gratitude,
l’enthousiasme, la passion, l’entrain, la confiance, la sensualité.
De plus, quand on cherche à expulser les émotions négatives de sa vie,
loin de disparaître, elles font leur chemin jusqu’à nous, parfois même de
façon encore plus douloureuse, un peu comme l’enfant que l’on n’écoute
pas ou que l’on feint d’ignorer et qui, au bout d’un moment, attire notre
attention par des moyens détournés et plus drastiques. Sur le plan
biologique, par exemple, un stress soutenu pourra provoquer ou accentuer
les problèmes suivants  : hypertension artérielle, athérosclérose, ulcères
duodénaux et gastriques, tension musculaire extrême, troubles cardiaques,
colites, constipation, diarrhée, asthme, certaines maladies du métabolisme
telles que diabète et hypoglycémie, infections, allergies et problèmes de
peau, cancers, maux de dos, arthrite et prédisposition aux accidents. La liste
est considérable. Et le stress entraîne aussi d’autres difficultés davantage
liées à l’aspect psychologique, comme l’insomnie, l’irritabilité, la fuite et
divers mécanismes de défense. À la limite, on pourra même connaître la
dépression et la maladie mentale.

Accueillir et apprécier ses émotions


Il est important d’apprendre à accueillir et à apprécier ses émotions, même
et surtout si elles sont déplaisantes. Elles sont nos alliées et elles nous
communiquent de précieuses informations sur ce qui se produit en nous. À
tout moment, en effet, le corps nous fournit des indices sur ce qui se passe à
un niveau plus profond de notre être. Il peut s’agir d’une tension, de la
crispation d’un muscle, d’une chaleur intense ou d’un frisson, de battements
accélérés du cœur, d’une nausée, d’une anxiété soudaine ou d’un goût
irrépressible de fuir. Encore faut-il être conscient de ces signaux et en
prendre acte. Encore faut-il surtout reconnaître la pertinence des messages
qu’ils nous envoient. Passer outre ces avertissements, ne pas faire confiance
à nos impressions, à notre intuition, c’est faire fi de cette grande richesse
que nous partageons avec les animaux et qu’on appelle l’instinct. Pourtant,
il y a dans ces réactions spontanées une rationalité que nous aurions tort de
méconnaître. Voie privilégiée pour accéder aux couches plus profondes de
notre personnalité, l’émotion est parfois, en effet, plus juste et plus
authentique que la raison. On ne peut donc renier impunément cette partie
essentielle de notre être sans, tôt ou tard, en payer le prix.
Cultiver l’habitude d’apprécier ses émotions est une habileté qui
s’apprend, comme le bricolage ou la musique. Mais pour créer cette
nouvelle habitude, il faut d’abord prendre conscience de son état
émotionnel et décider de se faire confiance. Cela exige, bien sûr, de prendre
du temps, de se trouver des moments pour se connecter à soi-même, loin
des distractions, de croire que cela vaut le coup et de développer la
croyance qu’il n’y a pas de mauvaise émotion.
Exerçons-nous aussi à identifier avec précision ce que nous ressentons.
L’inventaire des émotions humaines, en effet, est loin d’être épuisé par les
termes génériques colère, joie, stress ou peine. Dans la gamme des
émotions plus déplaisantes, par exemple, on peut ressentir de l’inconfort, du
malaise, de la nervosité, de l’embarras, de l’anxiété, de l’inquiétude, du
doute, de l’insécurité. Il peut aussi arriver qu’on se croie blessé ou insulté,
qu’on éprouve de la déception, de l’impatience, de la frustration, de l’envie,
du désappointement, de la culpabilité, de la honte, qu’on estime ne pas être
à la hauteur ou inadéquat, qu’on se sente débordé, fatigué, surchargé,
accablé, écrasé, déprimé. On peut encore avoir l’impression d’être seul,
isolé ou rejeté, se sentir timide, impuissant, nostalgique, insatisfait,
démotivé, ennuyé, confus, jaloux… Parmi les émotions agréables, on peut
éprouver de l’enthousiasme ou de la fascination, être heureux, attiré,
captivé, séduit, éprouver du désir, de la curiosité, de la gratitude, de
l’émerveillement, de la créativité, de l’assurance, de l’audace, de la
considération, de la compassion, se sentir débordant d’humour, d’affection,
de passion, de détermination, de sensualité, de vitalité, être rempli de
douceur, de confiance, d’estime pour soi… On le voit, les termes ne
manquent pas et chacun apporte une nuance aux émotions de base que sont
la joie, la tristesse, le dégoût, la peur, la colère et la surprise.

L’émotion comme un signal d’action


Il est utile aussi d’essayer de comprendre ce qui provoque une émotion
donnée, surtout si elle est désagréable, car plusieurs choses peuvent
engendrer une même émotion, et l’action à entreprendre sera alors
différente selon le cas.
Pensons à ce travailleur qui ressent de la colère à la suite d’une
réorganisation administrative dans son entreprise. Mais pourquoi au juste
réagit-il ainsi  ? Peut-être parce qu’il estime qu’une de ses valeurs
importantes, la reconnaissance par exemple, n’est pas respectée. Peut-être
se sent-il traité comme un numéro, bousculé, dénigré. Il se peut aussi
qu’une de ses croyances soit remise en question  : Je n’aurais jamais cru
qu’à 50 ans, j’en sois réduit à chercher du travail. Ou qu’une de ses
initiatives n’a pas réussi comme il le souhaitait  : J’ai beau essayer de
m’adapter, je n’arrive pas à prendre le dessus  ! Peut-être encore sent-il
qu’une de ses règles est transgressée  : Ça ne se fait pas de traiter un
employé de cette façon !
En plus de préciser l’état d’esprit que nous éprouvons, nous devons donc
tenter de savoir ce qui en est la source, sans nous attarder à évaluer si nous
avons raison ou non de ressentir cette émotion. Elle est là, tout simplement,
et elle nous informe si tout va bien ou si, au contraire, nous devons modifier
quelque chose dans notre façon d’agir ou dans notre perception de la
situation. Un peu comme l’odorat qui nous avertit que quelque chose brûle,
ou comme le goût qui nous informe qu’un aliment est périmé, l’émotion est
un signal d’action.
La peur, par exemple, peut nous signaler que nous devons mieux nous
préparer à affronter ce qui se profile. La culpabilité peut nous prévenir
qu’un de nos comportements n’est pas à la hauteur de nos standards
personnels. L’impression d’être dépassé nous envoie probablement le
message qu’il est temps de mettre un peu d’ordre dans nos priorités. La
solitude durement ressentie renvoie tout naturellement au besoin d’entrer en
contact avec les autres et nous invite peut-être à renouveler nos façons de
faire à cet égard. La déception est une invitation tacite à réviser nos attentes.
Le sentiment d’incompétence est le signe que certaines habiletés nous
manquent pour être à la hauteur de la situation et qu’il faut nous mettre à la
recherche d’aide, d’information, d’outils, de stratégies et de formation.

Quelques stratégies pour provoquer des états


d’esprit stimulants
Comment font ceux et celles qui semblent réussir à se maintenir dans des
états d’esprit dynamisants, même quand tout a l’air d’aller de travers autour
d’eux  ? Comment font-ils pour aller de l’avant, garder leur enthousiasme,
leur détermination, leur motivation, leur assurance et leur confiance  ?
Comment peuvent-ils continuer à rire, à encourager les autres et à aimer ?
Ont-ils une clé que d’autres n’ont pas, ou sont-ils tout simplement
insouciants ?
Il faut en effet des habiletés personnelles bien précises pour rester
disponible au changement, accepter la nouveauté et accueillir l’inconnu.
Certaines personnes sont sans doute plus douées que d’autres, mais nous
croyons que ces habiletés particulières s’apprennent. Qui que nous soyons,
nous pouvons tirer profit de leur expérience pour nous aider à maîtriser nos
états d’esprit paralysants et en provoquer de plus positifs. Nous allons
maintenant vous présenter quelques-unes de ces stratégies qui, vous le
verrez, font une large place à la perception et à l’attention. Selon le
psychologue américain Martin Seligman, considéré comme le père de la
psychologie positive25, l’optimiste est plus heureux, non pas parce qu’il ne
voit pas la réalité telle qu’elle est, mais parce qu’il porte un regard différent
sur elle.

Diriger son attention vers le résultat souhaité


À chaque seconde, des millions d’informations bombardent nos sens.
Comme nous ne pouvons accorder notre attention à tout en même temps,
nous sélectionnons certaines d’entre elles, mettant ainsi de côté toutes les
autres. Or, notre état d’esprit dépend beaucoup de ce sur quoi nous centrons
notre attention. Les personnes qui ont une attitude positive se caractérisent,
entre autres, par leur capacité à se concentrer sur leur cible, sur le résultat
qu’elles souhaitent obtenir. Pour traverser activement les moments difficiles
et avancer vers leurs objectifs, elles semblent décider consciemment à qui et
à quoi elles veulent faire cadeau de leur attention. Cela ne veut pas dire
qu’elles évitent de penser à ce qui ne va pas, mais si un problème se pose,
elles en prennent acte, puis réorientent leur esprit vers le résultat qu’elles
veulent obtenir.
Pour nous aider à orienter notre attention, il existe un moyen très pratique,
que nous avons d’ailleurs utilisé avec vous jusqu’à présent  : poser des
questions. Vous l’avez en effet remarqué, chacun des exercices que nous
vous proposons commence par une question qui dirige votre attention vers
un aspect particulier de votre réalité. Cette technique n’est pas nouvelle
puisque déjà, dans la Grèce antique, les philosophes l’employaient pour
faire progresser leurs disciples. Ils les amenaient ainsi à réfléchir, leur
permettant de trouver des réponses qu’ils ignoraient connaître et d’exprimer
leurs propres idées.
Il faut donc porter une attention particulière aux questions que nous nous
posons régulièrement, car si certaines nous permettent d’accéder à nos
propres ressources intérieures et de centrer notre attention sur ce qui nous
mobilise et sur ce qui relève de nous, d’autres ont plus de chances de miner
notre confiance et de provoquer des émotions comme l’impuissance,
l’accablement et le sentiment d’être une victime. Dans notre jargon
psychologique, ce processus se nomme le recadrage et il permet non
seulement de modifier notre point de vue sur les choses, les gens et les
situations que nous rencontrons, mais également notre état d’esprit.
Vous pouvez essayer d’imaginer l’état d’esprit que les réponses aux
recadrages suivants risquent de provoquer. Pourquoi ces choses-là
n’arrivent qu’à moi ? Qu’est-ce que j’ai fait pour mériter cela ? Pourquoi
suis-je obligé de faire ce travail-là ? Pourquoi les autres ne font-ils rien ?
Pourquoi serais-je le seul à faire des efforts ? Qu’est-ce qui va arriver si je
m’engage et que ça ne fonctionne pas ?
Comparez maintenant avec ces autres questions. De quoi suis-je fier dans
ma vie  ? Qu’est-ce que j’ai à apprendre de cette situation désagréable  ?
Qu’est-ce qu’il faudrait que je change pour que cela fonctionne mieux  ?
Comment pourrais-je faire ce que j’ai à faire en y prenant plaisir ? Qu’est-
ce que je veux vraiment ? Qu’est-ce que je pourrais faire, aujourd’hui, pour
avancer vers mon objectif  ? Comment pourrais-je rendre ma journée
agréable, avoir du plaisir aujourd’hui  ? Qu’y a-t-il de drôle dans cette
situation  ? De quelle façon pourrais-je faire plaisir à quelqu’un que
j’aime  ? Comment pourrais-je me réaliser dans ce nouveau défi  ? Qui
d’intéressant pourrais-je rencontrer aujourd’hui  ? Qu’est-ce qui a bien
fonctionné aujourd’hui  ? Pour qui je fais tout cela  ? Ces dernières
questions ont le grand mérite, non seulement de centrer notre attention sur
nos possibilités, mais certaines d’entre elles ouvrent la porte à notre
créativité et même à notre humour. Encore faut-il, bien sûr, prendre le temps
d’y répondre.
Exercez-vous à trouver des questions que vous pourriez vous poser de
façon régulière et qui vous aideraient à préserver votre confiance et votre
estime de soi. Faites-en une liste exhaustive et prenez le temps d’y répondre
sincèrement ; vous serez surpris des résultats. Et pour passer de la théorie à
la pratique, nous vous proposons ci-après un exercice qui, s’il ne prend que
cinq minutes, n’en constitue pas moins une application impressionnante du
pouvoir des bonnes questions pour provoquer des états d’esprit qui nous
aident à relever nos nombreux défis.

L’exercice de la gratitude
Nous connaissons tous des personnes qui semblent tout avoir  : une vie
professionnelle riche, une vie personnelle en apparence comblée, des
ressources financières suffisantes… Et pourtant, elles sont tendues,
angoissées, parfois même malheureuses. À l’opposé, nous en connaissons
d’autres qui ont si peu et qui, malgré tout, sont épanouies et heureuses.
Souvent, les premières sont préoccupées par ce qui leur fait défaut, ou par
la peur de manquer de quelque chose, que ce soit de temps, de ressources,
d’argent, de santé, de relations, d’habiletés, d’énergie. Elles peuvent avoir
l’impression de manquer de contrôle, de compétence, de motivation, de
plaisir, de préparation, de support, de maîtrise, de succès, de valorisation, de
confiance, de certitude, de direction, d’amour, de sens, de reconnaissance…
Autant de carences qui meublent une grande partie de leurs pensées et
émaillent leurs conversations.
Se concentrer ainsi sur ses carences peut, il est vrai, déclencher la
motivation à agir. Mais lorsque quelqu’un se sent, à tort ou à raison,
impuissant à remédier à la situation, son organisme réagit par de la tension,
de l’anxiété et du stress.
Dans l’exercice qui suit, qui veut aussi illustrer comment une bonne
question peut provoquer un état d’esprit positif, nous vous proposons plutôt
d’entrer en contact avec les bienfaits et les bénédictions qui parsèment déjà
votre vie. Nous vous invitons à penser à toutes les raisons que vous pouvez
avoir d’éprouver de la gratitude, à vous rappeler toutes ces choses et tous
ces gens que vous appréciez et qui font que vous vous sentez riche à
l’intérieur. La question à laquelle nous vous demandons de répondre est la
suivante : De quoi suis-je reconnaissant dans ma vie ?
Sur la route vers l’atteinte d’un objectif qui nous tient à cœur, il arrive
qu’on soit tellement préoccupé à regarder vers l’avant, concentré sur le but
qu’on s’est fixé, qu’on en oublie de jeter un œil derrière soi pour apprécier
tout le chemin parcouru et tout ce dont on bénéficie déjà. Si vous vous
donnez la peine de regarder les différentes composantes de votre vie, vous
allez dénicher, dans plusieurs d’entre elles, des raisons d’éprouver de la
gratitude. Et ce faisant, vous allez modifier votre état d’esprit pour le mieux
et réduire votre stress et votre anxiété, car il est pratiquement impossible de
penser à l’abondance et d’être en même temps tendu et oppressé.
D’ailleurs, les recherches les plus récentes de nombreux psychologues
appartenant au courant de psychologie positive, dont celles de Robert A.
Emmons (2004), tendent à démontrer que ces exercices de gratitude ont des
effets bénéfiques sur la santé physique et qu’ils peuvent diminuer la douleur
et la fatigue. Sonja Lyubomirsky (2005) a démontré qu’après seulement six
semaines, des sujets à qui l’on demandait de tenir un journal dans lequel ils
notaient, une fois par semaine, des choses pour lesquelles ils éprouvaient de
la reconnaissance, voyaient augmenter significativement leur taux de
satisfaction par rapport à la vie, comparativement à un groupe test.
Ce simple exercice, qui ne prend que quelques minutes, peut se faire
pratiquement n’importe où, que ce soit au lit juste avant de se lever ou avant
de s’endormir, sous la douche, en faisant sa marche quotidienne ou son
entraînement, dans l’autobus, dans le métro ou en voiture, en se rendant au
boulot ou au retour en fin de la journée… L’important, c’est de s’imprégner
de tout ce que l’on apprécie dans sa vie en pensant à tout ce pour quoi l’on
pourrait éprouver de la gratitude et en s’associant aux images qui y sont
reliées. Il y a, bien sûr, des choses qui vont moins bien, et peut-être est-ce
celles qui viendront plus facilement à l’esprit. Mais pendant les quelques
minutes que durera cet exercice, concentrez-vous plutôt sur ce qui comble
votre existence, et non sur ce qui vous manque.
Un peu plus tôt dans ce livre, vous avez dressé la liste des principales
composantes de votre vie. Vous pouvez, si vous voulez, repasser rapidement
chacune d’elles en vous posant la même question. Par exemple, de quoi
êtes-vous reconnaissant quand vous pensez à votre vie familiale, à votre
relation avec votre conjoint, à vos enfants, à vos amis ? De quoi êtes-vous
reconnaissant quand vous pensez à votre santé physique, à vos finances, à
votre engagement personnel, à votre engagement professionnel ?
Pour stimuler votre imagination, voici quelques suggestions.

Commencez en pensant à la chance que vous avez d’être vivant, de


pouvoir respirer, d’être une étincelle de vie et d’avoir encore une
journée devant vous pour profiter de l’existence.
Savourez ensuite le privilège que vous avez de pouvoir jouir de tous
vos sens. De pouvoir regarder les beautés de la nature, les œuvres des
grands peintres, les sourires des gens, de pouvoir sentir les odeurs
des mets et les meilleurs parfums, de pouvoir être touché par le
soleil, le vent, par une autre personne, de pouvoir goûter les aliments,
entendre les musiques que vous préférez, les voix des gens que vous
aimez, le bruit de la rivière, du vent dans les feuilles.
Soyez reconnaissant pour cette santé qui est la vôtre, pour l’énergie
qui vous anime et qui vous permet d’accomplir tout ce que vous
faites, d’entreprendre des projets, de relever des défis.
Pensez aux personnes que vous aimez, qui vous aiment et dont la
présence dans votre vie est une vraie bénédiction : votre conjoint, vos
enfants, leurs conjoints, vos petits-enfants, votre famille, vos amis.
Quand vous pensez à elles, imaginez clairement leur visage en vous
rappelant ce que vous appréciez le plus d’elles, ce pour quoi vous
vous sentez privilégié de les avoir dans votre vie.
Remerciez pour la chance que vous avez de voyager et revoyez les
images des endroits que vous avez beaucoup aimés.
Songez au confort dans lequel vous vivez au quotidien, à votre
maison chaleureuse, lieu d’agréables rencontres avec vos enfants,
vos amis.
Pensez à cette nature qui n’est jamais bien loin et dans laquelle vous
vous promenez à l’occasion.
Considérez à quel point vous êtes fortuné de pouvoir vivre dans un
pays en paix, de pouvoir profiter de connaissances inépuisables et
tellement accessibles qui vous permettent d’apprendre sur tout ce qui
vous intéresse et tout ce qui vous passionne.
Appréciez les facilités incroyables mises à votre service par la
technologie.
Rendez grâce pour cette chance incroyable que vous avez peut-être
de faire un travail que vous aimez et qui vous passionne. Pensez à
tous ces gens qui vous ont donné l’occasion d’avancer
personnellement et professionnellement.
Soyez reconnaissant pour les habiletés et les talents qui sont les
vôtres.
Bénissez tout simplement ce moment présent.

Réel et imaginaire
Essayons maintenant de comprendre comment le fait de visualiser ce que
l’on apprécie profondément et de s’y associer peut avoir un tel effet sur soi.
En fait, nous en avons déjà parlé, notre cerveau ne fait pas toujours la
différence entre ce qui est réel et ce qui est clairement imaginé. Pour mieux
comprendre cette affirmation, voici un exemple qui montre comment nos
pensées se forment et influencent directement nos états d’esprit et notre
comportement.
Un de nos amis, souffrant de maux d’estomac, a dû passer une
gastroscopie, un examen plutôt désagréable pendant lequel on introduit un
tube dans l’œsophage pour prélever un peu du tissu de l’estomac et en faire
l’analyse. Installé sur la table d’examen, il regardait le personnel s’affairer
autour de lui, écoutant les explications qu’on lui donnait tout en jetant un
œil sur le tube en question. Au moment où le gastro-entérologue se
préparait à introduire ce dernier dans sa bouche, il perdit conscience pour ne
se réveiller qu’à la fin de l’examen. Interrogé à son réveil, il dit qu’au
moment de s’évanouir, il avait imaginé une très grosse pince qui descendait
dans son œsophage pour aller creuser un trou et arracher un morceau de son
estomac. Cette image avait provoqué en lui une telle peur qu’il en avait
perdu connaissance.
Que s’est-il passé exactement ? Le point de départ de cette situation, c’est
un examen médical. Avant de trouver sa représentation dans le cerveau de
notre ami sous forme d’images, de sons et de sensations, il a été interprété
par de nombreux filtres de la perception  : ses sens, ses croyances, ses
expériences antérieures, pour ne citer que ceux-là. Son cerveau a alors reçu
cette information interprétée et l’a traitée sous forme de représentations
visuelles, auditives, tactiles, gustatives et olfactives. Dans le cas qui nous
intéresse, notre ami rapporte avoir imaginé, plus grande que nature, une
pince énorme qui allait creuser son estomac. Ne faisant pas la différence
entre cette pince imaginée et une pince réelle, son cerveau a déclenché le
mécanisme de la peur, de la panique même, émotions auxquelles
correspondent des manifestations physiologiques comme l’accélération du
rythme cardiaque, l’augmentation de la pression artérielle et la
transpiration. Pour fuir ce stress, le patient a perdu conscience. Voilà
brièvement comment une pensée se forme et se reflète ensuite dans un
comportement.
Le plus curieux dans l’exemple que nous venons de présenter, c’est
qu’encore aujourd’hui, lorsque notre ami se remémore la situation et revoit
en pensée les images de l’examen, le même malaise s’empare de lui et
pourrait à nouveau le conduire à l’évanouissement s’il n’interrompait pas
volontairement le cours de ses pensées. En d’autres termes, il ne réagit
même plus à l’événement en soi, mais au souvenir de celui-ci. C’est le
même phénomène que nous observons tous quand, par exemple, après une
discussion mouvementée pendant laquelle quelqu’un nous a blessé, nous
repensons à cette situation beaucoup plus tard et revivons la scène,
réentendant constamment les mêmes paroles et revoyant sans cesse le
même visage sur notre écran mental, provoquant ainsi un nouvel accès de
colère ou de chagrin. Certains vont même entretenir inlassablement des
souvenirs désagréables et se repasser sans cesse le même film, spectateurs
passifs devant des reprises vidéo qui suscitent immanquablement le même
état d’esprit. D’autres, plutôt amateurs de films d’anticipation, seront
anxieux avant l’heure, stressés ou même démotivés, et souvent sans motif
valable.
Vous comprenez probablement un peu mieux comment le fait de revivre
en souvenir des moments heureux peut déclencher des émotions
bienfaisantes. Lorsque nous repensons aux situations, aux choses et aux
personnes que nous apprécions le plus, il est difficile de ne pas éprouver le
sentiment d’être des personnes choyées, ce que nous sommes finalement si
nous prenons le temps d’y réfléchir un peu. Se remettre régulièrement en
contact avec ce que l’on apprécie dans son existence n’est qu’une façon,
finalement, de se réapproprier les plus belles couleurs de la vie.

Apprendre à se protéger
Nous mettons beaucoup d’efforts pour nous protéger des microbes, des
bactéries et des micro-organismes de toutes sortes qui pourraient nous
rendre malades. Cependant, les poisons ne sont pas tous dans les aliments
que nous ingérons ou dans l’air que nous respirons. Il en existe d’autres,
tout aussi subtils et invisibles, dont l’effet sur notre moral peut être
dévastateur. Ne sous-estimons pas l’impact, sur notre état émotif, de ce que
nous laissons pénétrer dans notre esprit. Si nous voulons faire les
changements nécessaires pour avancer activement vers la réalisation de nos
rêves, nous devons impérativement apprendre à protéger nos états d’esprit
positifs quand nous les éprouvons.
Prendre une distance, se couper volontairement de certaines expériences,
de certaines lectures ou de certaines personnes ne signifie pas être
inconscient de ce qui se passe autour de soi. En fait, se protéger implique
d’agir sciemment, chaque fois que c’est possible, pour préserver son
environnement psychique quand on le sait menacé, pour prendre soin de
soi, en somme. C’est un art qui s’apprend, surtout quand on se sait
vulnérable.
Cela peut vouloir dire, par exemple, couper court volontairement à une
conversation qui n’aboutit qu’à miner notre motivation, refuser la
compagnie de certaines personnes particulièrement enclines à ne voir que
des problèmes et fréquenter davantage les natures heureuses et positives.
Cela peut aussi signifier éviter les gens qui minent notre estime de soi et
rechercher ceux qui partagent nos valeurs, qui nous écoutent avec intérêt et
nous apprécient inconditionnellement. Cela veut dire aussi, sans doute,
éviter les médias qui distillent la peur et le défaitisme pour consacrer nos
temps libres à des activités plus inspirantes.
Il est certain qu’il y aura toujours des choses que nous ne pourrons ni ne
devrons écarter. Il s’agit plutôt ici de faire la différence entre ce qui relève
de notre zone de pouvoir et d’influence et ce qui lui échappe. Si nous
réalisons que l’écoute des bulletins d’information nous épuise en nous
mettant régulièrement en contact avec notre sentiment d’impuissance, peut-
être est-il préférable de les éliminer de notre quotidien. Une bonne diète des
médias n’a jamais fait de mal à personne et est même parfois souhaitable. Si
ce sont des personnes bien précises qui empoisonnent notre existence avec
leurs conversations ou leurs plaintes répétitives, nous pouvons leur
exprimer ce que nous ressentons et même leur dire clairement que nous
souhaitons parler d’autre chose, ce qui a le grand mérite de leur montrer où
se situent nos limites. Nous pouvons aussi trouver des moyens de changer le
cours de la conversation.
Être capable de dire non est aussi une façon de se protéger et de prendre
soin de soi. Cela n’est pas toujours facile, car on peut craindre d’être jugé
ou critiqué pour avoir exprimé ce que l’on veut vraiment ou ce que l’on ne
veut pas. Il faut alors surmonter la peur d’être rejeté ou désapprouvé, ce
vieux conditionnement qui nous suggère presque que notre survie dépend
du fait de ne pas déplaire.
Certaines personnes semblent aussi avoir le don de nous faire éprouver de
la culpabilité et le sentiment de ne jamais être à la hauteur, alors que
d’autres, au contraire, nous font nous sentir si bien, en nous valorisant, en
nous écoutant avec intérêt et en nous appréciant pour ce que nous sommes.
Alors que les premières nous font douter de nous-mêmes, les secondes nous
procurent du plaisir et nous donnent de l’énergie. Pourquoi ne pas nous
permettre de choisir avec qui nous nous tenons ? Couper les ponts avec les
personnes négatives afin de s’en protéger, surtout quand il s’agit de proches,
demande toutefois un certain courage.
En résumé, apprendre à se protéger est une stratégie qui peut se pratiquer
de multiples façons. Mais cela demande d’abord de prendre conscience de
ses émotions, de ce que les choses, les gens et les situations provoquent en
soi. La question suivante aide grandement à faire l’inventaire de ses propres
sources de « pollution psychique » : Qu’est-ce qui m’enlève de l’énergie ou
mine mon moral autour de moi  ? Par la suite, quand c’est possible
évidemment, il importe de dire les choses, d’exprimer ce que l’on ressent
aux personnes concernées. Sinon, il convient de développer ce que nous
appelons l’art de zapper, comme on le fait avec une télécommande pour
changer de chaîne de télévision. Il faut se demander  : Qu’est-ce que je
pourrais éliminer si je le voulais vraiment  ? Qu’est-ce que je pourrais
zapper volontairement pour préserver mon moral et garder mon énergie ? Il
existe plusieurs moyens de zapper, et l’humour en est, sans conteste, un
excellent. Non seulement il favorise la communication, mais il peut
diminuer l’agressivité, aider à dédramatiser les erreurs et favoriser
l’imagination et la créativité, surtout quand on le centre sur soi et non sur
l’autre, plutôt que de verser dans le sarcasme et l’ironie. Apprendre à bien
s’entourer est également une façon idéale de se protéger et d’entretenir des
états d’esprit positifs. Essayons de fréquenter des gens qui partagent nos
objectifs et nos valeurs, ou encore des gens de plaisir, ceux qui nous font
rire à tous les coups, non pas en se moquant des autres, de leurs travers et
malheurs, mais en faisant ressortir les absurdités de la vie. Cherchons ceux
qui nous permettent de voir l’irrationnel dans ce qui semble rationnel, le
futile dans ce qui semble important. Apprendre à bien s’entourer, c’est aussi
choisir des lectures, des émissions télé et des films qui nous inspirent, nous
animent et suscitent en nous les états d’esprit qui nous permettent de
persévérer dans nos projets.
Connaître ses limites et apprendre à les respecter contribuent grandement
à nous garder en santé et à prévenir la dépression et le burn-out. Et si notre
système de croyances et de valeurs nous invite à aider les autres, à leur faire
plaisir, à les protéger, cela ne devrait jamais être au détriment de notre
intégrité personnelle et de l’estime que nous avons de nous-mêmes. Car ce
n’est pas de l’égoïsme que de s’imposer des limites afin de préserver ses
réserves d’énergie. Bien au contraire. Il faut en effet être sain de corps et
d’esprit pour être en mesure de contribuer correctement au bien-être
d’autrui.
Nous pourrions métaphoriquement comparer notre moi physique, mental,
spirituel et émotionnel à un compte bancaire. Avant de débiter une somme,
il convient de vérifier notre solde. Comme il est avisé également de faire
des dépôts de temps à autre si nous voulons être capables de retirer
certaines sommes d’énergie, que ce soit pour rendre service à autrui ou pour
nous consacrer à nos objectifs. Pour cela, il faut croire aussi en la nécessité
de se ressourcer, d’établir des priorités et de réserver de l’énergie pour soi-
même.
25. Ce courant, dont on retrace les origines modernes avec les psychologues humanistes Abraham Maslow, Erich Fromm et Carl
Rogers, s’intéresse particulièrement aux forces positives qui permettent d’avancer et de passer activement à travers les épreuves et
l’adversité. Parmi ses représentants actuels, mentionnons Albert Bandura, Martin Seligman, Mihaly Csikszentmihalyi.
9

Votre cinéma intérieur et vos émotions


Ton imaginaire n’est pas aussi riche que la réalité,

mais il est souvent plus angoissant.

Martin Winckler

Imaginez que vous êtes au cinéma, bien calé dans votre fauteuil, dégustant
votre pop-corn en attendant le début du film. Puis les lumières s’éteignent,
le silence s’installe, l’écran s’illumine et la projection commence. Pendant
les deux prochaines heures, vous allez passer par toute une gamme
d’émotions. Vous allez rire, pleurer, avoir peur, sursauter et oublier pour un
moment vos soucis, votre propre vie et jusqu’au fait qu’il ne s’agit que
d’images sur un écran géant. La couleur, alternant parfois avec le noir et
blanc, les expressions des visages en gros plan et les paysages en plan
éloigné, la musique douce, précipitée, violente, les bruits ambiants… tout
cela va contribuer à créer une atmosphère bien particulière et à vous faire
vivre au rythme de personnages plus grands que nature.
Dans ce chapitre, vous découvrirez que vous pouvez, si vous y travaillez,
devenir un Spielberg ou un Buñuel, mais cette fois avec votre propre
cinéma intérieur. Tout comme le fait un réalisateur, vous apprendrez l’art de
modifier la manière de voir les choses et de se représenter les situations.
Progressivement, vous pourrez ainsi prendre en charge vos propres
représentations mentales et cesser d’en être la victime passive. Avec un peu
de temps et de pratique, cette habileté vous permettra de contrôler vos états
d’esprit pour diminuer, par exemple, votre anxiété face à une situation à
venir, pour augmenter votre motivation et votre confiance en vous-même ou
pour atténuer les effets d’un souvenir déplaisant. Mais avant toute chose,
apprenons à mieux connaître ce cinéma unique.
Notre carte du monde et ses limites
Au sens propre comme au sens figuré, chacun de nous a une vision de la
réalité différente de celle des autres, un peu comme si nous avions en nous
une carte du monde unique qui nous permet de percevoir et de comprendre
la réalité. On s’entend tous pour dire que la carte de Montréal n’est pas la
ville dans laquelle on marche, avec ses trottoirs, ses arbres, ses couleurs, ses
parfums et son ambiance. Ou que le menu au restaurant n’est pas le repas
que l’on aura dans son assiette. Il en est de même de notre carte du monde :
elle n’est pas la réalité, mais une représentation partielle de celle-ci.
Notre carte du monde est limitée par nos cinq sens qui, non seulement ne
captent pas toute l’étendue du champ perceptuel (pensons aux infrarouges
ou aux ultrasons), mais qui peuvent même le déformer. Pensons à ces deux
rails parallèles qui se rejoignent à l’horizon pour n’en former qu’un, ou au
navire qui diminue de volume en s’éloignant au large. En outre, la quantité
d’expériences humaines et de contacts personnels qu’il nous est possible
d’avoir est très restreinte, de sorte que notre connaissance du monde se fait
souvent de manière indirecte et intellectuelle, plutôt que directe et affective.
Par exemple, c’est par les médias que nous avons appris que l’homme a
marché sur la lune, par les récits des historiens que nous savons ce qui s’est
passé il y a trois siècles ou par les reportages des journalistes que nous
avons connaissance de ce qui se passe à l’autre bout de la planète. Cette
appréhension indirecte du monde n’implique pas nécessairement que nos
connaissances soient inexactes, mais elle peut ouvrir la porte à de
nombreuses interprétations, parfois même contradictoires.
Notre carte du monde est aussi limitée par le fait que, pour bien
fonctionner, notre cerveau doit constamment faire des choix, sélectionnant
certains aspects de notre expérience et en éliminant d’autres. Ainsi, en
laissant vos yeux courir sur les mots de ce chapitre et en vous concentrant
sur leur sens, vous éliminez forcément une grande quantité d’informations
moins pertinentes pour l’instant. Par exemple, vous n’avez pas remarqué la
couleur de la robe de votre collègue qui vient de passer près de vous, ou le
trajet qui défile par la fenêtre de l’autobus, ou les gestes d’impatience de
l’homme assis devant vous dans la salle d’attente.
Ajoutons à cela notre subjectivité et notre affectivité qui nous font réagir
de manière différente à ce qui nous arrive. Notre vécu, notre éducation,
notre histoire personnelle et notre héritage culturel font que nous accordons
une importance différente aux choses, aux situations et aux gens. À cause
de cela, nous valorisons certains aspects de la réalité, certaines qualités,
certaines attitudes, certains comportements, et nous organisons le tout dans
une hiérarchie de valeurs personnelles qui n’est jamais tout à fait la même
que celle de notre voisin, de notre collègue ou de notre conjoint. C’est tout
cela qui nous fait dire que la carte n’est pas le territoire et que l’idée que
nous nous faisons d’une chose ou d’une personne n’est pas vraiment cette
chose ou cette personne. Cela étant entendu, voyons comment s’organisent
nos représentations de la réalité.

Nos systèmes de représentation mentale


Imaginez que vous pénétrez dans un bureau où vous n’avez jamais mis les
pieds. Par quoi votre attention sera-t-elle d’abord attirée ? Par les couleurs,
l’originalité des lieux, la décoration ? Par les bruits de la conversation ou de
la ventilation ? Par la musique ou le silence qui règne dans la pièce ? Par le
confort des meubles, l’ambiance feutrée ou froide ? Quand vous apercevrez
la personne à l’accueil, serez-vous frappé par l’accord des couleurs de ses
vêtements, par l’expression de son visage, la qualité de sa voix ou par la
chaleur humaine qu’elle dégage ? Quand vous quitterez les lieux, que vous
restera-t-il en tête  ? Des images précises du rendez-vous, des bribes de
conversation, l’odeur de la pièce ou un souvenir de l’atmosphère générale ?
Sans doute un mélange de tout cela, direz-vous avec raison. Mais si vous y
réfléchissez, vous constaterez que vous privilégiez certains aspects
sensoriels plus que d’autres.
Depuis quelques années déjà, des chercheurs se sont aperçus que nous
différons tous par notre façon d’organiser mentalement l’information. Ainsi,
en dépit du fait que toute expérience soit d’abord perçue par les sens, elle
mettrait en jeu trois systèmes de représentation mentale dominants  : les
systèmes visuel (V), auditif (A) et kinesthésique (K), ce dernier regroupant
le toucher, l’odorat et le goût26. Et même si nous les combinons sans arrêt,
nous avons tendance à en privilégier un plus que les autres. Très
brièvement, disons que certaines personnes se représentent la réalité de
façon surtout visuelle et qu’elles voient littéralement en esprit les situations
qu’elles imaginent. Chez d’autres, c’est le système auditif qui domine. Elles
ont tendance, par exemple, à se parler à elles-mêmes intérieurement pour
mieux réfléchir. D’autres encore accordent davantage d’importance à leurs
sensations corporelles et aux sentiments qui accompagnent une expérience
donnée.
Toutes nos expériences internes sont enregistrées ou codées dans notre
cerveau sous forme d’images, de sons et de sensations tactiles, gustatives et
olfactives. Ainsi, dès que nous nous remémorons un souvenir, nous
repassons son film dans notre esprit et nous revivons alors les émotions qui
y sont associées. Pour vérifier cette assertion, fermez les yeux un instant et
rappelez-vous un moment heureux vécu lors d’un voyage à l’étranger ou à
l’occasion de l’arrivée d’un enfant, d’un exploit sportif, ou simplement d’un
repas très agréable pris avec des amis. Après quelques instants, des scènes
précises vont venir à votre esprit sous forme d’images, de sons et de
sensations physiques. Si vous restez quelques moments en contact avec ce
souvenir, vous revivrez automatiquement les émotions qui y sont associées.
Ce sera la même chose si vous évoquez un souvenir désagréable ou si vous
pensez à un événement à venir que vous redoutez. Vous avez d’ailleurs déjà
pu vérifier tout cela dans les exercices du chapitre 5.
Comme au cinéma, nous projetons presque sans arrêt sur notre écran
mental des films ou des diaporamas de nos expériences passées ou futures.
Si vous poussez l’observation plus avant, comme vous aurez l’occasion de
l’expérimenter un peu plus loin, vous noterez que ces représentations
visuelles, auditives et kinesthésiques possèdent leurs propres particularités
que l’on nomme sous-modalités. Parmi les sous-modalités visuelles, nous
retrouvons la luminosité, la taille, la couleur, l’éclat, le contraste, la clarté,
la distance et le mouvement. Les sous-modalités auditives comprennent la
hauteur du son, son intensité, son rythme et sa provenance. Les sous-
modalités kinesthésiques comprennent les sensations tactiles comme la
température, la texture, la pression, les sensations corporelles internes, les
émotions et les sentiments.
Même si tout cela peut sembler complexe de prime abord, il n’en demeure
pas moins que la capacité à déchiffrer les sous-modalités d’une expérience
interne est un atout majeur quand on veut susciter des états d’esprit
favorables et diminuer l’effet de ceux qui sont plus paralysants. Pour que
vous compreniez mieux ces notions un peu complexes, nous vous
proposons un exercice (voir l’encadré Exercice  1. Comparaison des sous-
modalités d’une expérience pénible avec celles d’une expérience agréable)
qui vous permettra de réaliser par vous-même comment le cerveau code
différemment la représentation interne de deux expériences différentes.

Exercice 1
Comparaison des sous-modalités d’une
expérience pénible avec celles d’une
expérience agréable
Si possible, nous vous suggérons de faire cet exercice avec une
autre personne. Pendant que vous aurez les yeux clos, elle
pourra diriger l’expérience et vous permettre ainsi de garder le
contact avec vous-même sans interruption. Cette personne
pourra ainsi vous poser tranquillement les quelques questions qui
suivent et vous laisser répondre à votre rythme en prenant note
de vos réponses.

1. Trouvez un endroit calme où vous ne serez pas dérangé.


Installez-vous à votre aise et fermez les yeux. Prenez
quelques inspirations profondes pour vous détendre puis
revenez, en imagination, à une expérience récente ou plus
ancienne modérément désagréable, pénible, ou
simplement ennuyeuse. Reculez dans le temps jusqu’à un
moment précis de ce souvenir et prenez le temps
d’observer ce qui se passe, d’écouter les sons et de bien
ressentir les émotions qui lui sont associées. Quand vous
aurez l’impression d’être vraiment en contact avec votre
souvenir, passez à l’étape suivante.
2. Vérifions d’abord les caractéristiques visuelles de cette
représentation interne. Si, comme certaines personnes,
vous éprouvez de la difficulté à voir des images,
demandez-vous  : Si je pouvais voir la scène de ce
souvenir, qu’est-ce que je verrais  ? Puis répondez aux
questions suivantes. Si l’une d’entre elles n’est pas
pertinente, passez la question.
 Les images que vous voyez sont-elles en couleur ou en
noir et blanc ?
 Si elles sont en couleur, y en a-t-il une qui prédomine ?
 La scène se présente-t-elle comme un film en
mouvement ou sous forme d’images fixes ?
 Regardez-vous la scène en plongée (d’en haut), en
contre-plongée (d’en bas) ou d’un côté en particulier ?
 Les images sont-elles lumineuses, pâles ou sombres ?
 Sont-elles grandeur nature, plus grandes ou plus
petites ?
 La scène se passe-t-elle près de vous ou en êtes-vous
éloigné ?
 Vous observez-vous comme le ferait un observateur
extérieur (dissocié) ou vivez-vous la scène en position
subjective (associé) ?
 La scène est-elle en trois dimensions ou plate comme
une photographie ?
 Y a-t-il un élément visuel en particulier qui attire votre
attention ?
3. Prenez note de vos réponses. Attachons-nous ensuite à
décrire les caractéristiques auditives.
 Si vous entendez des sons, sont-ils forts ou faibles ?
 Vous semblent-ils provenir de près ou de loin ?
 Vous dites-vous quelque chose en vous-même  ?
Qu’est-ce que c’est  ? De quelle manière vous parlez-
vous ?
 S’il y a des gens, que disent-ils  ? Comment le disent-
ils ?
 Certains mots sont-ils appuyés, accentués ?
 Les voix, la vôtre ou celle des autres, ont-elles un
rythme rapide ou lent ?
 Le ton est-il aigu, moyen ou bas ?
 Les sons associés à ce souvenir sont-ils harmonieux
ou cacophoniques, forts ou faibles ?
 Y a-t-il un élément sonore qui attire particulièrement
votre attention ?
4. Prenez note à nouveau de vos réponses, puis concentrez-
vous sur la dimension kinesthésique de votre souvenir.
 Ressentez-vous des sensations ou des pressions dans
votre corps pendant l’évocation de votre souvenir ? Si oui,
à quel endroit plus particulièrement ?
 Diriez-vous que ces sensations sont fortes ou faibles ?
 Plutôt rugueuses ou lisses ?
 Plutôt rigides ou flexibles ?
 Lourdes ou légères ?
 Chaudes ou froides ?
 Votre respiration est-elle profonde, courte et varie-t-elle
pendant l’expérience ?
 Quels sentiments vous habitent ?
Y a-t-il quelque chose qui déclenche une forte émotion ?
5. Après avoir consigné ces dernières réponses, levez-vous
et bougez un peu pour sortir de cette expérience avant
d’entreprendre la suite de l’exercice.
6. Vous allez maintenant explorer une autre facette de ce
cinéma plus vrai que vrai. Fermez les yeux et inspirez
profondément pour vous détendre. Dans votre imagination,
revenez ensuite à un souvenir agréable, heureux ou drôle.
Reculez dans le temps jusqu’à un moment précis puis
commencez vos observations. Reprenez les questions des
étapes 2 à 4.

Quand vous aurez terminé et noté vos réponses, prenez


quelques minutes pour les comparer avec celles du souvenir plus
pénible. Déjà, même si vous n’avez pas répondu à toutes les
questions, vous êtes probablement à même de vérifier ce dont
nous sommes inconscients la majorité du temps : notre cerveau a
une manière bien à lui de se représenter un souvenir
désagréable et un autre plus positif, de la même manière qu’au
cinéma, un réalisateur ne construit pas un film d’amour comme
un mélodrame ou un film d’épouvante.
Chaque personne a donc sa propre carte du monde, ses propres
représentations mentales et ses propres combinaisons de sous-modalités.
Toutefois, certaines caractéristiques semblent revenir plus fréquemment que
d’autres. Par exemple, les images d’une expérience agréable sont plus
souvent colorées, claires et en mouvement, les sons sont nets, plus forts et
le ton des voix est motivant et réconfortant. De l’autre côté, l’expérience
désagréable se présente souvent sous forme d’images sombres, petites, fixes
comme dans un cliché photographique, sans relief et même en noir et blanc.
Les tons de voix et le contenu du discours y sont aussi plus démoralisants.
Peut-être êtes-vous en train de vous interroger sur la pertinence de tous ces
détails. Passons donc maintenant à quelques applications intéressantes27.

Comment modifier l’impact négatif

d’un souvenir
Avec le temps, va, tout s’en va
On oublie le visage et l’on oublie la voix

Léo Ferré

Vous avez peut-être noté qu’en vous remémorant une expérience pénible
dans le dernier exercice, vous avez éprouvé à nouveau les émotions qui s’y
rattachaient. Le simple fait de vous représenter cette situation pourtant
passée a conduit votre cerveau à réagir comme si vous la reviviez. Vous ne
réagissiez plus à l’événement comme tel, mais à son évocation.
Certaines personnes ont d’ailleurs le don d’évoquer encore et encore des
souvenirs malheureux, un peu comme si elles assistaient passivement à de
mauvaises reprises télévisées. D’autres ont celui de construire dans leur
imagination des films d’anticipation qui les rendent anxieuses, tendues, ou
qui les démotivent. Ces souvenirs et ces anticipations renferment sans doute
des enseignements et des avertissements dont il faut tirer parti. Mais quand
la leçon est tirée, il est inutile de revivre continuellement ces émotions
négatives.
Il est sûr que le passé ne peut être changé et que personne ne peut reculer
dans le temps pour le modifier. On peut toujours attendre que le temps fasse
son œuvre et qu’un souvenir s’efface, comme le chante Léo Ferré. Mais on
peut aussi apprendre comment en modifier le code, altérant du même coup
les émotions qui lui sont associées. Voilà où la connaissance des sous-
modalités va s’avérer très utile.
Pour mieux comprendre ce processus, imaginez que vous regardez un film
d’épouvante sur un grand écran et que, pendant une scène particulièrement
effrayante, vous coupez le son et la musique qui montait en crescendo. En
agissant directement sur une sous-modalité cruciale du film, votre peur va
diminuer et même disparaître complètement. Cette même technique va
maintenant vous permettre de modifier la qualité affective d’une
représentation mentale.
Prenons l’exemple d’une personne qui ressasse sans arrêt une critique
acerbe d’un collègue de travail. Elle observe que son souvenir se présente
dans son esprit avec les sous-modalités suivantes : la scène est près d’elle,
elle vit la situation en position subjective et les images sont colorées et
claires. Le ton de voix de son collègue est ironique, sévère, son rythme est
rapide et le son vient d’en haut.
Supposons maintenant qu’elle modifie volontairement certaines de ces
sous-modalités. Au niveau visuel, elle commence par prendre une distance
en imaginant qu’elle assiste au déroulement de la scène bien assise à
l’arrière d’un cinéma. Ce simple recul va probablement déjà diminuer son
sentiment déplaisant. Ensuite, elle transforme son film couleur en film noir
et blanc. Elle fait aussi passer la même scène plusieurs fois à vitesse rapide,
d’abord à l’endroit puis à l’envers. Ne reculant devant rien, notre réalisateur
en herbe imagine son collègue affublé d’une perruque orange et verte et
portant un gros nez de clown…
Au niveau auditif, elle repasse la scène en l’accompagnant d’une trame
sonore amusante, par exemple avec la chanson Acuna Matata du Roi lion.
Puis elle fait descendre progressivement la voix intérieure critique pour
qu’elle provienne de son épaule, puis de son bras, de son pied, et finalement
de son gros orteil. Elle modifie enfin le ton sévère de son collègue en lui
prêtant la voix de la souris Mickey Mouse ou celle d’une vieille sorcière…
Comme au cinéma, les possibilités sont multiples. En modifiant une sous-
modalité à la fois et en vérifiant l’effet de ce changement sur son ressenti,
cette personne pourra trouver celles qui influencent le plus son état émotif.
La clé de la réussite, c’est l’expérimentation répétée. Après tout, Spielberg
n’est pas devenu le réalisateur que l’on connaît du jour au lendemain ! Mais
si vous trouvez trop compliquée cette technique de brouillage, voici un
autre moyen efficace et plus simple pour diminuer l’impact affectif d’une
représentation mentale.

La dissociation
Que se passe-t-il quand vous lisez le mot citron  ? Pas grand-chose,
évidemment. Maintenant, fermez les yeux, détendez-vous et imaginez le
scénario suivant. Vous êtes attablé au restaurant avec, à votre gauche, une
grande fenêtre par laquelle vous apercevez une rue et des piétons sur le
trottoir. Devant vous, sur la nappe blanche, une petite assiette contient des
quartiers de citron. Vous en prenez un dans votre main droite et examinez
attentivement son écorce et sa chair jaune pâle. Vous le pressez
délicatement entre vos doigts et faites couler un peu de jus dans l’assiette.
Puis vous portez le quartier de fruit à votre bouche et, sans hésiter, vous le
mordez énergiquement et sucez sa sève acide…
Il y a fort à parier qu’en évoquant cette scène, vous n’avez pu réprimer
une grimace. Maintenant, imaginez que vous vous dédoublez et que vous
vous retrouvez sur le trottoir de l’autre côté de la rue, face au restaurant. Par
la fenêtre, vous apercevez votre silhouette en train de prendre un quartier de
citron, de le regarder un instant puis de le porter à sa bouche. Ce n’est plus
la même chose, n’est-ce pas ? La portée affective n’est plus du tout la même
parce que vous êtes dissocié de l’expérience.
Plusieurs personnes sont naturellement associées dans leur vie. Elles
ressentent davantage les émotions, vivent intensément leurs joies comme
leurs peines. Quand elles anticipent le futur ou qu’elles repensent à un
événement marquant, elles vivent la situation comme si elles y étaient
vraiment. On dira parfois d’elles qu’elles sont théâtrales, passionnées,
impulsives aussi. Nous connaissons tous des personnes qui racontent vingt
fois la même histoire amusante et qui nous font encore rire parce qu’elles y
mettent tellement de cœur…
D’autres personnes vivent leur quotidien comme si elles se voyaient agir
de l’extérieur, en position d’observatrices. On les dira plus dissociées,
objectives, distantes, voire froides. Cette capacité à se dissocier est
particulièrement utile quand il ne faut pas laisser les émotions affecter son
jugement et son travail. Pensons à des métiers comme chirurgien, policier,
ambulancier…
Retenez qu’en étant associé à une expérience agréable ou pénible, on a
tendance à ressentir les émotions, alors qu’en s’en dissociant, l’intensité
affective diminue. Comme nous l’avons vu dans l’exercice de la gratitude
au chapitre précédent, il est très utile et bienfaisant de s’associer à des
souvenirs agréables dont l’énergie positive continue à nous habiter au
quotidien. Par contre, il est important d’apprendre à se dissocier des
souvenirs plus négatifs qui continuent à nous hanter, même quand on en a
tiré un enseignement.
Imaginons qu’une personne a fait une présentation devant un groupe et
qu’elle a bafouillé à quelques reprises, provoquant le rire de certains
spectateurs. Il est fort probable que cette expérience viendra la hanter lors
d’une prochaine présentation. Elle revivra l’événement passé, imaginera la
répétition du scénario et sa nervosité sera à son paroxysme. Supposons
qu’elle a compris de cette mauvaise expérience qu’elle devrait se préparer
et s’exercer davantage et qu’elle l’a fait. En se dissociant de ce mauvais
souvenir et de la tension importante qu’il provoque en elle, elle accédera
plus aisément à ses ressources et libérera son énergie créatrice pour cette
prochaine occasion.
Voici donc un exercice (voir l’encadré Exercice  2. La dissociation) qui
vous permettra de vérifier par vous-même les effets de la dissociation sur un
souvenir désagréable.

Exercice 2
La dissociation 28

1. Asseyez-vous confortablement sur une chaise droite, en


éloignant le bas de votre dos à quelques centimètres du
dossier. Appuyez vos épaules et étendez vos jambes en
avant, comme si vous vous prépariez à observer avec
détachement le déroulement d’un spectacle. Fermez les
yeux et relâchez vos muscles.
2. Pensez maintenant à une expérience passée modérément
pénible. Imaginez devant vous un téléviseur dans lequel
vous revoyez son déroulement. Éloignez le téléviseur et
assombrissez les images. Si vous éprouvez encore de la
difficulté à vous dissocier, imaginez la scène à travers une
vitre ou un Plexiglas.
3. Répétez la procédure avec d’autres souvenirs modérément
désagréables. Dissociez-vous complètement de chacun
d’eux en devenant un spectateur intéressé, mais détaché.
4. Ouvrez les yeux. Notez votre état d’esprit quand vous
repensez maintenant à ces souvenirs.

Comment mobiliser ses états-ressources


Il nous arrive à tous de désirer un résultat mais d’éprouver de la difficulté
à faire ce qu’il faut pour y parvenir. Nous désirons exceller dans un sport,
mais n’arrivons pas à nous motiver à l’entraînement. Nous voulons perdre
du poids, mais n’arrivons pas à nous mettre à la diète. Nous voulons
améliorer notre situation professionnelle, mais sommes rebutés par les
démarches. Au chapitre 5, nous vous avons présenté une démarche en neuf
étapes pour se motiver à agir et passer à l’action. Cette démarche en deux
temps exploitait la synergie créée par l’union des deux grandes forces de la
motivation que sont l’évitement de la souffrance et la recherche du plaisir.
Nous allons maintenant aller un peu plus loin et vous proposer une autre
manière d’utiliser son cinéma intérieur pour entretenir et même provoquer
des états-ressources, c’est-à-dire des états émotionnels et cognitifs internes
qui favorisent l’accomplissement d’une tâche.
Dans l’exercice qui suit (voir l’encadré Exercice  3. Imprégner une
situation donnée d’un état-ressource), nous allons vous aider à identifier le
code – les sous-modalités  –  d’une tâche pour laquelle vous souhaitez
éprouver un état d’esprit positif. Par exemple, ce pourrait être une démarche
précise qui vous rend mal à l’aise, un rendez-vous important qui vous
intimide, une réunion à animer qui vous rend nerveux, un exposé en public
qui vous stresse29 ou le simple fait de se lever pour aller travailler quand on
a de la difficulté à le faire. Puis vous allez identifier le code – les sous-
modalités – d’une expérience où vous avez éprouvé l’un des états-
ressources suivants, à votre choix  : enthousiasme, entrain, gratitude,
créativité, assurance, audace, passion, détermination, vitalité, confiance,
motivation… Enfin, vous allez vérifier qu’il est possible d’imprégner la
première expérience avec l’état-ressource désiré.

Exercice 3
Imprégner une situation donnée d’un état-
ressource
Commencez par lire la démarche au complet pour bien la
comprendre. Si vous connaissez une personne de confiance,
vous pouvez lui demander de vous guider pour traverser les
étapes et prendre quelques notes.
1. Identification du code d’une expérience pour laquelle vous
voulez éprouver un état-ressource

a. Trouvez un endroit tranquille et pensez à une tâche pour


laquelle vous éprouvez de la difficulté à vous motiver,
même si vous savez pertinemment que cela améliorerait la
qualité de votre vie. Pensez tout d’abord à l’objectif que
vous visez avec cette tâche et aux bénéfices que vous
tirerez de son accomplissement. Qu’avez-vous à gagner en
réalisant cette tâche ?
b. Puis fermez les yeux et imaginez que vous avez devant
vous un écran de télévision dans lequel vous faites
apparaître le déroulement de cette tâche. Que voyez-
vous  ? Qui est là  ? Qu’y a-t-il autour de vous  ?
Qu’entendez-vous  ? Que ressentez-vous  ? Prenez le
temps d’entrer en contact avec la situation comme si vous
y étiez.
c. Vérifiez maintenant les éléments qui composent le mode
visuel de cette représentation mentale. Que voyez-vous sur
l’écran  ? Les images sont-elles en couleur ou en noir et
blanc  ? La scène se présente-t-elle comme un film en
mouvement ou sous forme d’images fixes  ? La scène se
passe-t-elle près de vous ou plus loin  ? Vous voyez-vous
agir de manière associée ou dissociée  ? La scène vous
semble-t-elle en trois dimensions ou plate comme une
photographie ?
d. Attachez-vous ensuite à décrire les éléments auditifs. Les
sons que vous entendez sont-ils forts ou faibles  ? Vous
dites-vous quelque chose en vous-même pendant que se
déroule la scène ? Si oui, qu’est-ce que c’est ? S’il y a des
gens autour de vous, disent-ils quelque chose ? Si oui, que
disent-ils  ? Les sons vous semblent-ils proches ou
lointains  ? Viennent-ils d’en avant, d’en arrière, d’en haut
ou d’en bas  ? Les voix, celles des autres et la vôtre, ont-
elles un rythme rapide ou lent ?
e. Concentrez maintenant votre attention sur les sensations et
les émotions, soit le mode kinesthésique de votre
représentation. Ressentez-vous des sensations ou des
pressions dans votre corps pendant l’évocation de cette
expérience  ? Si oui, à quel endroit plus précisément  ?
Sont-elles fortes ou faibles  ? Diriez-vous que ces
sensations sont plutôt chaudes ou froides  ? légères ou
lourdes ? lisses ou rugueuses ?
Notez les sous-modalités visuelles, auditives et
kinesthésiques de cette situation. Vous savez maintenant
comment votre cerveau encode actuellement votre
représentation de cette tâche.
2. Identification du code d’une expérience-ressource
f. Avant d’entreprendre cette deuxième partie de l’exercice,
assurez-vous de prendre une courte pause pour vous
distraire. Levez-vous, regardez autour de la pièce un
moment, prenez une bonne inspiration et expirez
profondément.
g. Déterminez ensuite l’état-ressource souhaité avec lequel
vous désirez imprégner la tâche à réaliser : enthousiasme,
entrain, gratitude, créativité, assurance, audace, passion,
détermination, vitalité, confiance, motivation… Fermez les
yeux et pensez à une situation récente ou plus ancienne
dans laquelle vous avez ressenti cet état d’esprit. Si vous
avez choisi la motivation, pensez à quelque chose qui vous
mobilisait fortement et dont la réalisation vous a procuré de
grands bénéfices.
h. Imaginez maintenant un second téléviseur à la gauche du
premier dans lequel va se dérouler cette expérience-
ressource. Que voyiez-vous à ce moment  ? Qui était là  ?
Qu’y avait-il autour de vous  ? Qu’entendiez-vous  ? Que
ressentiez-vous  ? Prenez le temps de bien reprendre
contact avec cette expérience.
i. Voyons son code visuel. Les images sont-elles en couleur
ou en noir et blanc ? La scène se présente-t-elle comme un
film en mouvement ou sous forme d’images fixes  ? La
scène se passe-t-elle près de vous ou plus loin  ? Vous
voyez-vous agir de l’extérieur (dissocié) ou participez-vous
à l’action (associé)  ? La scène vous semble-t-elle en trois
dimensions ou plate comme une photographie ?
j. Passons maintenant aux éléments auditifs. Les sons que
vous entendez sont-ils forts ou faibles  ? Vous dites-vous
quelque chose en vous-même pendant que se déroule
l’expérience-ressource ? Si oui, qu’est-ce que c’est ? S’il y
a des gens autour de vous, disent-ils quelque chose  ? Si
oui, que disent-ils ? Les sons vous semblent-ils proches ou
lointains  ? Viennent-ils d’en avant, d’en arrière, d’en haut
ou d’en bas  ? Les voix, celles des autres et la vôtre, ont-
elles un rythme rapide ou lent ?
k. Attardez-vous enfin aux sensations et aux émotions.
Ressentez-vous des sensations ou des pressions dans
votre corps pendant l’évocation de cette expérience-
ressource ? Si oui, à quel endroit plus précisément ? Sont-
elles fortes ou faibles  ? Diriez-vous que ces sensations
sont plutôt chaudes ou froides ? légères ou lourdes ? lisses
ou rugueuses ?
Consignez à nouveau vos réponses dans votre cahier et
comparez ces sous-modalités avec celles de l’expérience
pour laquelle vous souhaitez éprouver cet état-ressource.
3. Transfert de l’état-ressource
Il s’agit maintenant de modifier les sous-modalités de la
tâche à accomplir (1) pour les rendre semblables à celles
de l’expérience-ressource (2). L’exemple qui suit vous
aidera à mieux comprendre la façon de procéder.
Supposons qu’une personne veuille se motiver à
l’entraînement physique et qu’elle se représente le tout de
la façon suivante : une image fixe et toute petite, en noir et
blanc, sombre, dans laquelle elle voit une expression de
découragement sur son visage et entend sa voix intérieure
qui répète sur un ton déprimé et lent  : Ça me lève le
cœur… Pas étonnant qu’elle reste bien au chaud chez elle.
Après avoir décodé une expérience-ressource dans
laquelle elle éprouvait une forte motivation, elle modifiera
sa représentation de l’entraînement physique pour qu’elle
corresponde à celle-ci. Par exemple, elle s’en fera une
représentation colorée, claire, lumineuse, plus grande que
nature. Elle s’imaginera en mouvement, le visage détendu,
écoutant sa voix qui l’encourage avec enthousiasme. Elle
ajoutera peut-être les voix d’un chœur de musique rock ou
celle de Tina Turner hurlant You’re simply the best ! En se
servant du code de motivation qu’elle connaît déjà, elle
rendra l’autre expérience attirante.
l. Fermez les yeux et imaginez devant vous les deux
téléviseurs côte à côte. Remplacez progressivement les
principales sous-modalités de la tâche à accomplir (1) par
celles de l’expérience-ressource (2). Ajustez le tout jusqu’à
ce que vous soyez satisfait du résultat.
m. En terminant la démarche, demandez à votre subconscient
de travailler pour vous et de vous servir automatiquement
ce nouveau déroulement la prochaine fois que vous
penserez à la tâche, à la démarche ou à la rencontre que
vous devez faire.

Conclusion
Nous sommes jusqu’à un certain point condamnés à contrôler nos états
d’esprit, sous peine d’être contrôlés par eux. La motivation, l’enthousiasme,
la confiance en soi, l’optimisme ou la détermination sont des dispositions
d’esprit qu’il faut entretenir sans cesse en créant délibérément les
conditions qui les favorisent. Les outils plus avancés que nous vous avons
proposés dans ce chapitre peuvent s’employer de plusieurs manières, qu’il
s’agisse d’en finir avec des souvenirs qui vous hantent ou de créer des états
d’esprit propices à la réalisation des objectifs qui vous tiennent à cœur.
Comme tous les nouveaux outils, ils requièrent de la pratique pour se
familiariser avec eux.
Dans le prochain chapitre, nous aborderons un autre aspect de la
motivation et nous vous proposerons un moyen pratique et puissant pour se
placer rapidement dans un état d’esprit favorable lorsque la situation
l’exige.
26. Ce sont Richard Wayne Bandler (1991) et John Grinder, cofondateurs de la programmation neuro-linguistique, qui ont
développé les premiers ces systèmes de représentation.
27. Nous référons le lecteur à Richard Bandler, Un cerveau pour changer (2000), dans lequel l’auteur présente plusieurs autres
façons d’utiliser ces connaissances pour modifier nos réactions et nos comportements.
28. Adapté de Steve Andreas et al., NLP: The New Technology of Achievement, New York, William Morrow & Company, 1994.
29. Le trac et la nervosité sont des états d’esprit fréquents et constituent probablement un des pires ennemis à l’établissement d’un
rapport efficace avec un groupe. Nous renvoyons donc les personnes susceptibles de faire des exposés en public, des séminaires de
formation ou de l’enseignement à l’exercice « Le cercle d’excellence » dans Marc Vachon, Réussir ses communications publiques,
2008, http://oserchanger.com/a_articles/ comm_publique.php
10

Comment entrer en scène


Un acteur ne fait jamais semblant. Il est

son personnage tout le temps qu’il est en scène.

Julien Green

On entend souvent parler de motivation, parfois pour reprocher aux autres


d’en manquer ou encore pour déplorer de ne pas en avoir davantage,
comme si c’était une chose qu’on a la chance ou non de posséder et que
l’on pourrait acheter en paquets de dix unités dans les grandes surfaces.
Mais la motivation, c’est d’abord un état d’esprit, comme le sont la
confiance en soi, l’optimisme ou même le bonheur. Être motivé, c’est être
en mouvement, c’est sentir en soi quelque chose qui nous anime et nous
porte à avancer vers nos objectifs.
Il est bien facile d’inviter d’autres personnes à se motiver, qu’il s’agisse
d’employés, de collègues de travail, de vendeurs, d’étudiants ou même de
ses enfants. Mais on leur rendrait un bien plus grand service en leur
expliquant comment on y arrive. Les processus et les programmes mentaux
de la motivation ont été assez bien identifiés par John Grinder et Richard
Bandler, tous deux docteurs en psychologie. En étudiant des personnes qui
excellent dans leurs domaines respectifs, que ce soient des entrepreneurs à
succès, des athlètes de pointe ou des communicateurs hors pair, ils se sont
aperçus qu’elles disposent d’un arsenal de moyens qu’elles utilisent de
manière consciente ou non. Mais surtout, ils ont découvert qu’en
reproduisant ces moyens, nous arrivons aux mêmes résultats.
Dans ce chapitre, nous reviendrons brièvement sur quelques-unes des
conditions qui favorisent la motivation dont nous avons parlé
précédemment. Mais surtout, nous vous présenterons un moyen pratique et
puissant qui permet de se placer rapidement dans un état d’esprit positif
lorsque la situation l’exige. Ce peut être avant de prendre la parole en
public, au moment d’une démarche importante, avant de rencontrer une
nouvelle personne ou tout simplement au moment de se mettre à l’œuvre
sur un projet particulier.

Quelques conditions favorisant la motivation


Nous avons déjà dit qu’une des premières conditions pour être motivé,
c’est de savoir clairement ce que l’on veut et surtout de se donner des buts
stimulants. Aller au travail parce qu’il le faut bien ou avoir pour seul
objectif la fin de la journée ou de la semaine ne suffisent pas à provoquer la
motivation. Il est plus facile de se mettre en mouvement quand on sait que
les gestes qu’on va poser aujourd’hui vont nous rapprocher d’un objectif
qui nous tient à cœur. D’où l’importance, nous l’avons vu au chapitre 3, de
les formuler adéquatement et de les réévaluer périodiquement.
Nous savons aussi à quel point nos croyances peuvent déterminer nos
comportements et nos réactions et que certaines d’entre elles sont
paralysantes et nous empêchent de nous épanouir et d’avancer vers nos
buts. Rappelons simplement l’essentiel : nous interprétons la réalité ou les
événements qui surviennent à travers le filtre de nos croyances. Cette
interprétation crée un état d’esprit donné qui, à son tour, détermine le
comportement que nous allons adopter. Finalement, ce comportement
provoque des résultats qui viendront renforcer notre croyance.
Imaginons par exemple qu’une personne doive assister à une réunion et
que, dans son for intérieur, elle soit convaincue de son inutilité et du
superflu de sa propre présence (croyances). Elle s’y présentera à reculons et
adoptera fort probablement des comportements qui expriment le
désengagement, le désintérêt, le retrait, l’impatience même. Elle aura sans
doute tendance à centrer son attention sur les éléments de la réunion qui
confirment sa croyance, ce qui viendra lui donner plus de force. La boucle
sera ainsi bouclée et le processus se remettra en marche à l’annonce de la
prochaine rencontre. Nous avons expliqué au chapitre 5 comment l’on peut
modifier ses croyances paralysantes et les remplacer par d’autres qui vont
agir comme un antidote.
L’importance du langage non verbal
Comment fait-on pour déduire qu’une personne de notre entourage est
déprimée avant même qu’elle ne dise un mot  ? On remarque les épaules
tombantes et penchées vers l’avant, comme si elles supportaient le poids du
monde, le regard sombre et dirigé vers le bas, la respiration plus
superficielle, les profonds soupirs, le teint plutôt terne, la mine soucieuse, la
démarche et le débit de voix lents et hésitants. Tout son langage corporel
exprime un état d’esprit de tristesse, d’ennui ou d’abattement. À l’inverse,
dans un groupe, nous allons tous facilement reconnaître une personne
enthousiaste  : son corps et ses épaules sont bien droits, sa respiration est
profonde, son débit de parole est rapide, ses yeux sont rieurs et brillants,
son teint est rosé et ses mains et ses bras bougent de façon expressive. Sa
physiologie exprime un niveau élevé d’excitation et d’éveil. Dans ces deux
exemples, l’observation du langage non verbal nous a permis d’inférer leur
état d’esprit.
À chaque émotion correspond un état physiologique donné. C’est ce que
vous avez pu vérifier dans les exercices où vous deviez revenir dans le
passé à une expérience agréable ou pénible. Un observateur extérieur aurait
pu voir que votre mine devenait détendue ou soucieuse, que votre front était
lisse ou plissé, qu’une expression de plaisir ou de malaise flottait sur votre
visage, que vos épaules se relâchaient ou se raidissaient et que votre
respiration était plus profonde ou plus courte.
Cette constatation est d’autant plus intéressante qu’elle démontre non
seulement que notre physiologie s’accorde avec notre état intérieur, mais
que notre cerveau interprète les situations imaginées comme si elles étaient
bien réelles. Dans ces exercices, même si vous étiez bien assis dans votre
fauteuil, votre corps réagissait à la situation imaginée comme si elle se
déroulait ici et maintenant. Corps et esprit sont donc des unités
indissociables d’un même système et non les éléments séparés d’un schéma
classique dans lequel l’un est la cause et l’autre l’effet. Ainsi, ces deux
facettes d’un même phénomène s’influencent mutuellement, comme dans
une boucle rétroactive. Cela signifie qu’en modifiant l’un des deux
éléments du système, on modifie aussi l’autre. Si notre physiologie se
modifie quand on change notre état d’esprit, de même notre état d’esprit se
modifie quand on change notre physiologie.
Cette constatation a des implications importantes et nous aide à
comprendre une des stratégies des personnes que l’on dit positives. Quand
elles veulent provoquer en elles l’enthousiasme, l’entrain, l’assurance, la
détermination, la confiance, la motivation ou un autre état-ressource, elles
se mettent en mouvement et adoptent la physiologie correspondant à l’état
désiré, provoquant ainsi progressivement son apparition.
Trop simple, direz-vous  ! Et pourtant, vous pouvez vérifier ce processus
régulièrement dans votre propre expérience. Imaginons que vous êtes en
plein cœur d’une discussion mouvementée, passionnée, ou même d’une
querelle de ménage. La mauvaise humeur vous sort par les yeux et il semble
que rien ne va empêcher l’explosion fatale. Tout à coup, le téléphone sonne.
Vous marchez à pas lourds, les poings et les dents serrés. Vous prenez le
récepteur et, instantanément, votre voix se radoucit dans un Oui, allô ! plus
calme. Vous conversez maintenant avec humour avec un de vos meilleurs
amis, de grands éclats de rire ponctuant vos interventions… au grand
étonnement de la personne qui, quelques secondes plus tôt, était l’objet de
votre humeur massacrante. Puis vous raccrochez, le sourire aux lèvres et,
reprenant conscience de l’endroit où vous êtes, vous retrouvez votre état
d’esprit initial et reprenez votre discussion avec la même intensité. On peut
penser qu’un extraterrestre assistant à cette scène aurait bien de la difficulté
à comprendre ces extrêmes chez la même personne dans un si court laps de
temps. En fait, vous venez de faire l’expérience de la puissance de la
physiologie sur votre état d’esprit.
Quand Marie-Noëlle, notre fille, était toute petite, elle nous offrait une
belle démonstration de ce pouvoir de la physiologie sur les émotions. La
plus jeune de nos enfants, elle était l’objet des taquineries souvent bien
anodines de ses trois frères. Elle protestait pour la forme, en faisant la
moue. Mais parfois, elle jouait à bouder, puis à ronchonner, à faire comme
si elle était fâchée, jusqu’à ce que, une chose conduisant à la suivante, elle
se mette vraiment en colère. Elle quittait alors la pièce en fulminant,
laissant ses frères étonnés de cette réaction disproportionnée. C’était
comme si elle avait actionné une manivelle et remonté un ressort.
La langue anglaise a une formule bien à elle pour résumer ce processus :
emotion is created by motion (le mouvement crée l’émotion). Voici
d’ailleurs un petit exercice qui vous permettra de vérifier le tout. Levez-
vous et prenez quelques inspirations profondes pour vous détendre.
Maintenant, adoptez la posture d’une personne totalement motivée,
confiante en ses moyens. Redressez vos épaules et respirez comme si vous
étiez tout à fait sûr de vous. Jouez avec les muscles de votre visage et
prenez l’expression que vous auriez si vous aviez une confiance
inébranlable en vous-même. Maintenant, marchez dans la pièce en adoptant
la démarche d’une personne pleine d’aplomb et parfaitement motivée.
Placez dans votre regard l’étincelle de la confiance et regardez droit devant
vous… Très rapidement, vous allez constater que votre état d’esprit
s’accorde avec cette physiologie.
Quand on s’adonne par exemple à l’entraînement physique, à la danse ou à
la marche active, on sait très bien qu’il est impossible d’être déprimé en
même temps, simplement parce que ces activités s’accompagnent d’un
langage corporel dynamique qui augmente les pulsations cardiaques,
provoquant de la chaleur dans les muscles, forçant la personne à respirer
plus rapidement, à se redresser, bref, à s’animer. Ce n’est pas pour rien que
l’on conseille l’activité physique pour réduire le stress.
En résumé donc, si vous désirez provoquer en vous un état-ressource
spécifique, adoptez la physiologie ou le langage corporel qui correspond à
cet état. Modifiez en conséquence l’expression de votre visage, votre façon
de bouger, de respirer, votre posture, votre manière de vous exprimer, le
rythme de votre voix. Avant une conférence, il nous arrive d’éprouver du
stress, de l’anxiété, ou tout simplement de ne pas être dans une forme
idéale. Or, le simple fait d’adopter une démarche confiante, de redresser les
épaules, de sourire, de faire comme si nous étions confiants, sûrs de nous et
disponibles fait en sorte que nous retrouvons rapidement l’état intérieur
dynamisant nécessaire pour bien faire notre travail.
Si vous voulez vous sentir détendu, sûr de vous, motivé, audacieux,
déterminé, joyeux, plein de vitalité ou même amoureux, modifiez votre
langage corporel et entrez en scène. L’effet sera plus immédiat que de vous
répéter inlassablement : Je suis positif, je suis positif, je suis positif… De
même, si vous souhaitez sortir rapidement d’un état d’esprit paralysant, si
vous vous ennuyez, si vous êtes découragé, prenez la décision de sortir de
cet état d’esprit et modifiez votre physiologie.
Faire comme si, et se prendre au jeu ! Voilà un des moyens qu’utilisent les
meilleurs artistes avant un spectacle, les meilleurs communicateurs avant de
rencontrer leur public, les meilleurs professeurs avant d’entrer en classe et
les plus grands athlètes avant une compétition. Un outil que vous pouvez
mettre à profit quand devez affronter une situation avec efficacité ou
simplement pour entreprendre votre journée du bon pied.

Ce n’est pas parce que c’est drôle que l’on rit


Vous comprenez mieux maintenant la valeur de l’exercice physique pour
contrer les effets du stress. Dans le même ordre d’idée, nous terminerons ce
chapitre en vous présentant les vertus du rire sur la santé du corps et de
l’esprit. Si, quand nous étions enfants, nous pouvions rire plusieurs dizaines
de fois par jour, il est très exceptionnel de rire quotidiennement plus de cinq
fois à l’âge adulte. Pourtant, les recherches ne cessent de démontrer les
effets bénéfiques du rire. L’auteur et éditeur américain Norman Cousins30,
souvent décrit comme celui qui s’est guéri par le rire, écrivait : « Le rire a
une valeur thérapeutique en ce qu’il sert en quelque sorte de gilet pare-
balles qui nous protège des ravages causés par les émotions négatives. Le
rire interrompt le cycle de la panique de la maladie, prévenant ainsi la
constriction des vaisseaux sanguins et les changements biochimiques
néfastes. »
Cousins souffrait d’une maladie dégénérative très douloureuse – la
spondylarthrite ankylosante – et il était presque complètement paralysé. Il
raconte comment il avait retrouvé l’usage de ses membres et repris son
travail en prenant des doses élevées de vitamine C et des doses équivalentes
de rire. Une bonne période de rire pouvait lui procurer deux heures de
sommeil sans souffrance.
Le tableau qui suit (voir Tableau 1. Les effets du stress et du rire) présente
quelques-uns des effets d’un bon rire comparés aux effets du stress. Vous
constaterez que ce sont les mêmes que l’exercice physique.
LE STRESS LE RIRE
Accélère le rythme Permet plus d’échanges respiratoires, facilitant l’oxygénation du sang.
respiratoire.
Accélère le rythme Stabilise les battements du cœur et diminue la pression artérielle.
cardiaque et augmente
la pression sanguine.
Les muscles se Les muscles se relâchent. Le visage, le cou, la poitrine, l’abdomen, les bras
tendent et se et les jambes se détendent. On dit qu’un bon fou rire vaut dix minutes de
contractent. relaxation totale. À quand remonte votre dernier fou rire ?
Influe négativement Procure un sommeil de bonne qualité. Chasse les tensions.
sur la qualité du
sommeil.
Provoque le Rire de bon cœur aide à mieux digérer et à éliminer, grâce à la gymnastique
ralentissement de la abdominale et au brassage du tube digestif.
digestion.
Tableau 1 : Les effets du stress et du rire
Le rire augmente la température corporelle et favorise la sécrétion
d’enzymes qui protègent des ulcères d’estomac. Il provoque aussi une
augmentation de la production d’endorphines, communément appelées les
hormones naturelles du plaisir, qui jouent un rôle prépondérant dans le
soulagement de la douleur. Rire harmonise également les deux hémisphères
du cerveau, ce qui fait dire à plusieurs qu’on ne devrait jamais prendre de
décisions importantes avant d’avoir ri un bon coup.
Et c’est sans parler des nombreuses répercussions positives du rire sur la
vie de tous les jours. En effet, le rire est unificateur et il favorise la
communication. Il peut diminuer l’agressivité, aider à dédramatiser les
erreurs et éveiller l’imagination et la créativité.
Prenez donc la résolution de rechercher la compagnie des gens qui vous
font rire, non pas parce qu’ils se moquent des travers et des malheurs des
autres, mais parce qu’ils savent faire ressortir les absurdités de la vie.
Prenez régulièrement une pause humour plutôt qu’une pause pour casser du
sucre sur le dos des autres. Cherchez les personnes qui vous permettent de
voir l’irrationnel dans ce qui semble rationnel, le futile dans ce qui semble
important.
Ce qui nous conduit tout naturellement à une ressource sans laquelle il est
tellement plus difficile d’atteindre les objectifs que vous vous êtes fixés : les
autres.
30. Norman Cousins, Anatomy of an Illness as Perceived by the Patient, New York, Norton, 2005.
11

La magie du contact
L’écoute reste la grande oubliée de notre société

moderne en pleine révolution des communications.

Jean Dion

L’intelligence, la créativité, la bonne gestion de son temps, la motivation


et la confiance en soi sont tous des outils importants à développer pour
réaliser ses rêves. Toutefois, il n’est pas exagéré de dire qu’une des
principales clés qui vous ouvrira les portes de la réussite, ce sont les autres
personnes. Que vous ayez un projet à faire aller de l’avant, une réunion de
collaborateurs à animer, des informations à recueillir auprès de personnes
responsables, un coup de téléphone important à passer ou une demande à
faire, vous aurez toujours à entrer en relation avec les autres.
Avec le temps et l’expérience, chacun de nous a développé son style
personnel pour communiquer et nous disposons tous d’outils qui ont fait
leurs preuves. Mais il arrive que, pour une raison ou pour une autre, la
communication soit plus difficile, d’où l’utilité d’affiner sans cesse ces
outils.
Parmi les compétences relationnelles qui vous seront utiles pour
progresser plus rapidement vers vos objectifs, il en est une qui, selon nous,
a préséance sur toutes les autres  : la capacité à créer des ponts avec les
personnes que vous rencontrez. En effet, toute communication, de la plus
banale à la plus profonde, nécessite l’établissement d’un lien de confiance
entre deux ou plusieurs personnes. Le fait que nous possédions chacun une
carte du monde (voir chapitre  9) et une façon de concevoir la réalité qui
nous sont propres peut rendre la chose plus difficile. Bien souvent, la
différence menace et il est primordial d’apprendre à créer le lien de
confiance qui nous permet de partager d’égal à égal.
Dans cet unique chapitre consacré à la communication, nous avons donc
choisi de vous expliquer comment vous pouvez rapidement entrer en
contact avec les autres et susciter chez eux une attitude de confiance, un
sentiment d’être compris, parfois même un courant de sympathie. Mais
avant toute chose, il importe encore une fois de prendre conscience de
certaines croyances que nous entretenons et qui peuvent agir comme des
freins à la communication.

Quelques croyances des bons communicateurs


Imaginons trois situations différentes. Vous avez l’occasion de prendre la
parole dans un groupe, mais vous croyez être ennuyeux et n’avoir rien
d’intéressant à dire. Vous voulez affirmer vos goûts et vos choix, mais vous
croyez qu’il ne faut déplaire à personne et qu’il faut toujours aimer et
approuver les gens qui sont importants pour vous. Vous voulez vendre votre
idée à une personne, mais vous êtes convaincu qu’influencer, c’est
manipuler. Voilà des idées qui ne sont pas réalistes qui vous renvoient une
image négative de vous-même ou des autres ; elles vont probablement vous
empêcher de bâtir des relations significatives et productives. Comme vous
le savez maintenant, les croyances déterminent directement notre état
interne qui, à son tour, détermine notre comportement.
Nous allons donc nous attarder plus particulièrement à trois croyances
importantes en communication. Prenez le temps d’évaluer si vous êtes en
accord ou en désaccord avec elles.

« Si mon message ne passe pas, c'est à cause


de l'autre. »
Sachez que, si c’est parfois le cas, les bons communicateurs ne croient pas
d’emblée à la mauvaise foi ou au manque de capacités de ceux qui
reçoivent leur message. Ils sont plutôt convaincus que les autres font du
mieux qu’ils peuvent avec ce qu’ils ont. Ils se croient aussi responsables du
résultat de leur communication. Ainsi, quand ils n’obtiennent pas les
résultats attendus, ils modifient leur approche pour obtenir un autre résultat
plutôt que de condamner l’autre ou de se blâmer eux-mêmes. Se croire
responsable du résultat de sa communication redonne du pouvoir personnel
et une marge de manœuvre pour modifier sa démarche et éventuellement
obtenir un meilleur résultat. L’exemple qui suit vous aidera à mieux
comprendre.
Quand nous étions enseignants, nous avions parfois à présenter le même
contenu de cours à plusieurs groupes différents pendant une même semaine.
L’expérience aidant, nous avions développé des méthodes pédagogiques
relativement efficaces que nous réutilisions d’une classe à l’autre. Malgré
tout, il pouvait arriver qu’un groupe ne réagisse pas aussi bien que les
autres. Plutôt que de réévaluer nos façons de faire, il était plus facile de
remettre en question l’intérêt, la motivation ou même l’intelligence d’une
telle classe et d’entretenir la croyance que nous avions affaire à un mauvais
groupe. Vous pouvez aisément imaginer l’état d’esprit qui habite
l’enseignant qui doit rencontrer, semaine après semaine, un mauvais
groupe. Prendre la responsabilité de ce résultat moins positif permettait, par
contre, de travailler sur une approche différente et d’augmenter ainsi nos
chances de toucher ce groupe.
Modifier des procédés qui ont fait leurs preuves et des habitudes demande
toujours des efforts, car nous devons alors combattre la loi du ferré31. Cette
loi stipule que plus une personne est compétente ou ferrée dans un domaine
donné, plus elle résiste à sortir des sentiers battus pour explorer de
nouvelles avenues. Par contre, c’est très certainement la meilleure voie à
emprunter pour améliorer une communication, que ce soit avec des
individus ou, comme dans notre exemple, avec des groupes de personnes.

« Les autres devraient comprendre. »


Lors de séances de thérapie, il arrive que des personnes se plaignent qu’un
conjoint, un ami ou un supérieur ne comprennent pas leurs besoins. Quand
on leur demande si elles en ont parlé avec les personnes concernées, il n’est
pas rare de les entendre dire : Il (elle) devrait comprendre ! Contrairement à
ce que certains peuvent penser, personne n’est capable de lire la pensée des
autres. Les bons communicateurs croient que pour obtenir ce que l’on veut,
il est nécessaire de demander clairement et de vérifier si l’on est bien
compris. Accepter de demander d’abord, ce que plusieurs d’entre nous ont
désappris, par crainte de déranger, par peur d’un refus, par orgueil, timidité
ou paresse. Demander clairement ensuite, d’une manière que notre
interlocuteur peut comprendre et en s’assurant que le message a bien été
compris comme nous le souhaitions.

« Je communique avec les autres comme


j’aime que l’on communique avec moi. »
Cette croyance peut sembler positive à première vue. Par exemple, vous
aimez bien communiquer en expliquant les choses avec force détails et vous
vous attendez à ce que les autres en fassent autant. Or, si vous rejoignez
ainsi tous ceux qui vous ressemblent, vous risquez de vous aliéner ceux qui
préfèrent qu’on abrège, qu’on synthétise. Un bon communicateur entretient
plutôt la croyance suivante  : Je communique avec l’autre comme il aime
que l’on communique avec lui. Il s’intéresse à son vis-à-vis, il l’observe et
l’écoute pour ensuite le rejoindre sur son propre terrain.

Développer son détecteur du rapport


Pour que votre message soit transmis à une autre personne ou à un groupe
et qu’il soit bien compris, il est essentiel de savoir créer un espace où règne
la confiance mutuelle et où vous pourrez partager d’égal à égal. Ce
processus que l’on nomme création d’un rapport permet d’ouvrir un canal
sans lequel la vraie communication est impossible.
Nous nous sommes tous un jour retrouvés pris au piège d’un interlocuteur
qui persistait à nous entretenir d’un sujet alors que nous n’étions pas
disponibles, prêts à partir, pressés par le temps, jetant un regard sur notre
montre tout en enfilant notre imperméable. L’intention de cette personne
était sans doute bonne, mais elle ignorait tous les indices qui lui indiquaient
que le rapport entre nous était faible, sinon absent, et que sa communication
était par conséquent inefficace.
Les meilleurs communicateurs sont très sensibles à la qualité du rapport
qui s’établit entre eux et les autres. Leur sens de l’observation et leur
sensibilité leur permettent de vérifier l’impact de leur message sur leurs vis-
à-vis. Autrement dit, ils ont un excellent détecteur du rapport qui les
informe constamment sur la qualité de la relation. Quand c’est nécessaire,
ils s’ajustent et modifient leur approche pour recréer un lien optimal.
Comment savoir si l’on est en rapport ou pas  ? Si plusieurs personnes
parlent de bien-être ou inversement d’inconfort pour décrire ce qu’elles
ressentent quand le rapport est présent ou absent, c’est à chacun d’identifier
les éléments de son propre détecteur. L’exercice suivant (voir l’encadré
Exercice  1. Mon détecteur du rapport) devrait vous permettre de les
connaître.

Exercice 1
Mon détecteur du rapport
1. Fermez les yeux et revenez en pensée à une occasion
récente où, à l’évidence, vous étiez en confiance avec une
personne ou avec un groupe. Observez ce souvenir en
tentant d’identifier les éléments visuels, auditifs et
kinesthésiques qui vous font dire que le rapport était bien
présent. Que voyez-vous qui vous fait dire que vous étiez
en rapport  ? Qu’entendez-vous  ? Que ressentez-vous  ?
Notez ensuite ces réponses dans votre cahier sous le titre :
Rapport présent.
2. Pensez maintenant à une autre occasion où la
communication était faible ou inexistante. Encore une fois,
identifiez les éléments visuels, auditifs et kinesthésiques.
Que voyez-vous, qu’entendez-vous et que ressentez-vous
quand le rapport est coupé  ? Notez ensuite vos réponses
dans votre cahier sous le titre : Rapport absent.
3. À partir de ces notes, déterminez la composition de votre
propre détecteur du rapport. Plus il comporte d’éléments
d’observation différents (V-A-K), plus il est raffiné.

Comment créer le rapport volontairement


S’il est primordial d’être attentif à l’effet que produit votre message quand
vous êtes en relation avec d’autres, il est tout aussi important de disposer
d’un bon répertoire de moyens pour créer volontairement et dans les
meilleurs délais un courant de sympathie. Par exemple, vous devez passer
un entretien pour présenter votre projet ou pour un emploi et vous voulez
faire bonne impression. Ou encore vous recevez des candidats et vous
désirez les mettre à leur aise pour connaître rapidement leur personnalité et
leurs aptitudes.
Nous ne vous apprendrons rien en vous disant que c’est surtout de manière
non verbale que s’établit l’essentiel du rapport entre deux personnes.
Certains spécialistes avancent même que 90 % de la communication est non
verbale, donc qu’elle se joue à un niveau inconscient, au-delà des mots et de
la logique du discours qui, eux, s’adressent à notre partie consciente. Or,
dans le mot communication, il y a le mot le mot commun. Pour rejoindre
l’autre et faciliter la création d’un climat de confiance, nous devons
partager avec lui quelque chose qui nous est commun, que ce soit
verbalement ou non verbalement. Pour mieux comprendre les notions que
nous allons maintenant vous présenter, nous vous proposons d’abord un
exercice d’observation.
Lors de votre prochain dîner au restaurant, prenez quelques minutes pour
regarder les gens aux tables voisines et exercez-vous à deviner ceux qui
sont en rapport et ceux qui ne le sont pas. Votre attention sera probablement
attirée vers ces deux personnes penchées l’une vers l’autre, appuyées toutes
les deux sur leurs avant-bras et qui se regardent dans les yeux en
échangeant amicalement. Si vous continuez à les observer du coin de l’œil,
vous remarquerez peut-être que si l’une d’elles se recule pour appuyer son
dos sur sa chaise, l’autre fait la même chose quelques secondes plus tard. Si
l’une prend son verre de vin, l’autre l’imite. Vous aurez l’impression
d’assister à une danse synchronisée dont les protagonistes sont eux-mêmes
inconscients. Si vous pouviez entendre leur conversation, vous
remarqueriez même qu’elles se parlent avec la même intensité en adoptant
un même ton de voix et qu’elles emploient les mêmes mots et les mêmes
expressions. Et si vous étiez encore plus près, vous noteriez qu’elles
respirent au même rythme. Ne dirait-on pas qu’elles sont le miroir l’une de
l’autre  ? Vous pouvez être convaincu que ces gens sont en rapport. En
termes de communication, nous dirons qu’ils sont synchrones.
Portez ensuite attention à ces deux autres personnes attablées un peu plus
loin. L’une est assise bien droite, avancée sur le bout de sa chaise, et parle
abondamment, d’une voix convaincante, avec force gestes. Pendant ce
temps, l’autre regarde distraitement autour d’elle, joue avec un ustensile en
faisant occasionnellement un signe de la tête, recule sa chaise et se croise
les bras, regarde furtivement sa montre, marmonne parfois quelques mots
entre deux soupirs. La simple observation de ce langage non verbal vous
permet de savoir, sans l’ombre d’un doute, que le rapport est faible sinon
absent entre elles. En termes de communication, nous dirons que ces deux
personnes sont asynchrones.
Si vous pouviez prendre du recul quand vous êtes vous-même en contact
étroit avec une personne, vous noteriez probablement que vous êtes
synchrones et que vous reflétez mutuellement certains comportements, un
rythme et un timbre de voix, des attitudes corporelles, un vocabulaire.
Apprendre à se synchroniser, c’est apprendre à s’accorder avec une autre
personne pour créer un lien préparatoire qui permet ensuite d’avancer vers
son but. Si cette synchronisation se fait naturellement et de manière
inconsciente entre des personnes qui se connaissent déjà, vous pouvez la
pratiquer volontairement pour créer rapidement le rapport de confiance avec
des étrangers.
La scène suivante illustre bien le pouvoir de la synchronisation. Un parent
s’approche de son enfant qui s’est fait mal en tombant. L’enfant est assis par
terre, son visage est défait, il grimace de douleur ou d’humiliation et il
pleure. Le parent se baisse au niveau de l’enfant et lui dit en grimaçant  :
Ouch ! Tu t’es fait mal ? L’enfant le regarde dans les yeux, fait oui de la tête
et cesse progressivement de pleurer. Le rapport s’est créé instantanément
parce que le parent a rejoint son enfant verbalement et non verbalement sur
son propre terrain. Il a d’abord adopté la posture physique de l’enfant pour
se placer à son niveau, puis il a reflété l’expression de son visage et
finalement il a reflété le ressenti de l’enfant. Se sentant compris dans sa
réalité, l’enfant s’est calmé.
Pour se synchroniser volontairement avec une autre personne, il faut donc
apprendre à observer. Vous devez rencontrer quelqu’un qui pourrait vous
aider à faire avancer votre projet  ? Aussitôt que vous entrez dans son
bureau, vous observez son environnement de travail et remarquez sur les
murs plusieurs œuvres de facture contemporaine. De plus, sur la table de
travail, il y a une photo encadrée de deux enfants en bas âge. Voilà deux
éléments importants de la réalité de votre interlocuteur. Plutôt que d’entrer
illico dans le vif du sujet, vous pouvez engager la conversation en lui
disant : Je vois que vous vous intéressez à l’art moderne ? ou encore : Ce
sont vos enfants ? Quel âge ont-ils ? En rejoignant votre interlocuteur dans
sa réalité, vous créez les conditions pour l’établissement d’un rapport de
confiance.
Vous désirez ensuite lui présenter votre dossier ? Au lieu de rester debout
alors que votre vis-à-vis est assis, vous lui proposez de vous asseoir
directement à côté de lui, si c’est possible, ou en biais sur le côté du bureau,
comme vous le feriez dans votre salon pour regarder un album de
photographies avec quelqu’un d’autre. Votre posture reflétant alors la sienne
et vos regards étant orientés sur vos papiers, vous augmentez la probabilité
d’en arriver à voir les choses de la même manière, d’être sur la même
longueur d’onde. Si vous préférez rester de l’autre côté de la table de
travail, vous pouvez créer un pont en notant par exemple la position bien
droite de votre vis-à-vis ou la légère inclinaison de sa tête et en adoptant
progressivement ces mêmes positions.
Vous pourriez tout aussi bien adopter quelques caractéristiques vocales de
l’autre personne, son rythme d’élocution ou le volume de sa voix. Vous
pourriez également refléter certains éléments de son discours, son
vocabulaire, adopter ses tournures de phrase ou ses expressions
caractéristiques.
Cette synchronisation volontaire doit évidemment se faire discrètement et
sans précipitation. Il ne s’agit pas de pousser le mimétisme trop loin,
particulièrement au niveau des attitudes corporelles. Les autres pourraient
alors penser que vous vous moquez d’eux et le rapport serait
immédiatement brisé. Il va sans dire que vous devez éviter à tout prix de
refléter les tics nerveux de votre interlocuteur.
Quand vous parlez au téléphone, comme vous n’avez pas d’éléments
visuels à observer, vous pouvez vous synchroniser sur le ton et le rythme de
la voix de votre correspondant. Il vous offre plusieurs indices importants
dès qu’il répond à votre appel. Si sa voix est enjouée et que son rythme est
rapide, n’espérez pas établir un rapport avec lui en adoptant une voix lente,
basse et monocorde. En vous mettant progressivement à son niveau, vous
vous ajusterez à la cadence de ses pensées et créerez plus facilement le
rapport de confiance. Pour terminer, sachez qu’il n’est pas nécessaire de
reprendre toute la physiologie d’une autre personne pour créer
volontairement le rapport de confiance avec elle. Il suffit bien souvent
d’adopter progressivement un ou deux éléments, non verbaux ou verbaux,
tout en faisant fonctionner son détecteur pour vérifier la qualité du rapport
qui est en train de se créer.
La synchronisation, rappelez-vous, est un processus qui se développe
naturellement entre deux personnes qui sont en confiance et les
comportements en miroir sont l’indice d’un bon rapport. L’utilisation
volontaire de la synchronisation permet d’accélérer l’établissement d’un
rapport et de rétablir une communication coupée. Comme cela demande une
certaine dextérité, nous vous proposons quelques exercices préalables à
pratiquer dans des situations de vie courante (voir l’encadré Exercice  2.
Entraînement à la synchronisation).

Exercice 2
Entraînement à la synchronisation
1. Position de l’observateur
Pour vérifier l’existence de la synchronisation et vous introduire à
sa pratique, commencez par observer autour de vous des
personnes qui échangent dans des situations de vie courante,
dans la rue, à la cafétéria, au restaurant ou dans un groupe de
travail. Selon vous, sont-elles synchrones ?
Remarquez-vous un certain mimétisme comportemental au
niveau de la posture, des gestes ? Remarquez les éléments non
verbaux et, si possible, verbaux qui vous indiquent si ces
personnes sont synchrones ou asynchrones.

2. Essais réels de synchronisation


Ces essais sont à pratiquer avec prudence. Choisissez bien les
premiers interlocuteurs avec lesquels vous ferez ces essais. Il est
préférable dans les débuts de les tenter avec des personnes qui
n’ont pas d’ascendant sur vous ou qui ne vous sont pas
franchement antipathiques ou hostiles. Comme la majorité des
gens se sentent attirés par les personnes qui leur portent
attention, l’établissement d’un lien profond ne va pas sans laisser
de trace.
Faites quelques expériences de synchronisation volontaire avec
des personnes différentes. Il ne s’agit évidemment pas de vous
accorder à tout le monde. Vous êtes celui qui décide avec qui il
veut établir un rapport de confiance. Choisissez de préférence
des situations de contacts brefs dans des endroits fréquentés, à
la cafétéria, à la pause, dans des réunions ou des déplacements.
Ce peut être avec la caissière au supermarché ou à votre
banque, avec le facteur, le chauffeur d’autobus, une secrétaire au
bureau, une personne dans une file d’attente, votre voisin, ou
même avec l’enfant de vos amis qui s’amuse sur le tapis du
salon… Rappelez-vous d’éviter de singer bêtement l’autre
personne et qu’il suffit de refléter un ou deux éléments du
langage verbal ou non verbal. N’oubliez pas votre détecteur pour
vérifier si vous avez réussi ou non à établir un rapport. Si la
réponse est positive, continuez la relation sans plus vous
préoccuper de synchronisation. Sinon, essayez à nouveau.
Vous pouvez rapporter ces deux essais dans votre cahier et faire
un bilan de votre capacité à vous accorder aux autres.

3. Essai de désynchronisation
Si vous le voulez, tentez l’expérience de vous désaccorder d’une
personne qui vous déplaît ou avec qui vous ne voulez pas
entamer de relation. Ne tentez surtout pas cette expérience avec
des personnes que vous aimez et qui vous aiment sous peine de
les blesser. Par contre, il peut être intéressant d’apprendre à
couper les ponts avec les personnes négatives pour s’en
protéger. Rapportez les résultats de cette désynchronisation et,
s’il y a lieu, les sentiments qui l’ont accompagnée.

L’écoute réceptive : la meilleure façon de créer


des ponts
Communiquer, c’est parler, mais c’est aussi et surtout écouter. Les études
démontrent d’ailleurs que, plus encore que l’écriture et la parole, l’écoute
est l’activité de communication qui occupe le plus notre temps. Si vous
vous sentez mal à l’aise de mettre en pratique les techniques de
synchronisation que nous venons de présenter, sachez que l’écoute
réceptive est probablement un des meilleurs moyens pour créer le rapport.
Carl Rogers, psychologue et psychothérapeute américain renommé pour son
approche centrée sur la personne, nous a d’ailleurs démontré le pouvoir de
cette forme d’écoute pour communiquer à l’autre le sentiment d’être
compris et créer une relation de confiance.
Écouter, c’est recevoir un message et pas seulement des bruits. Comme
nous pouvons mal écrire ou mal parler, nous pouvons aussi mal écouter.
Certaines manières d’écouter peuvent d’ailleurs diminuer ou même couper
le rapport. En voici quelques-unes :

L’apparence d’écoute ou pseudo-écoute. Vous hochez la tête,


regardez l’autre dans les yeux, émettez par intervalle quelques hum !
hum  ! Bref, vous donnez à l’autre plusieurs signes d’une vraie
écoute, mais vos pensées sont ailleurs.
L’écoute défensive. Vous écoutez l’autre en étant sur vos gardes,
défensif, comme si les propos de votre interlocuteur vous
menaçaient, prenant même de banals messages comme des attaques.
Les personnes en situation d’autorité risquent plus souvent que les
autres de tomber dans ce piège.
L’écoute impatiente. Vous interrompez régulièrement votre
interlocuteur pour prendre le contrôle de la conversation et exprimer
vos propres idées. Cette manière, bien humaine par ailleurs, de se
mettre en avant pour prendre la vedette est très fréquente. De plus,
comme notre pensée tourne à 600 mots à la minute, comparativement
à 100 pour la parole, il est très tentant de vouloir compléter les
phrases d’une autre personne, surtout si elle parle lentement.
L’écoute sélective. Vous n’écoutez que ce qui vous intéresse ou ce
qui va dans le sens de vos idées, de vos opinions, éliminant par le fait
même tout le reste du message. C’est parfois l’écoute de votre
adolescent quand il ne veut pas entendre parler du ménage à faire
dans sa chambre. Sa tête fait oui, mais il sera plus tard tout étonné
d’apprendre que vous lui avez demandé dix fois de ranger.
L’écoute piégée. Vous écoutez tout en cherchant à prendre en défaut
votre vis-à-vis. Vous lui posez des questions, lui donnant
l’impression que vous vous intéressez à lui, mais c’est pour mieux
l’attaquer un peu plus tard. Le contact se crée, la personne s’ouvre,
se rend vulnérable, mais elle regrettera amèrement de s’être ainsi
confiée et se refermera instantanément et pour longtemps comme une
huître. Un avocat avait une manière bien à lui pour illustrer ce type
d’écoute amicale mais piégée  : c’est comme passer la main
familièrement dans le dos d’une personne tout en cherchant l’endroit
où planter son poignard, disait-il… À déconseiller fortement, donc, si
vous avez à cœur de créer le rapport, sous peine de provoquer la
méfiance et même le mensonge.
L’écoute diagnostique. On retrouve dans cette catégorie toutes les
personnes qui écoutent pour ensuite porter un jugement, poser un
diagnostic ou interpréter les comportements ou les émotions de
l’autre, comme le ferait un mauvais psychologue.

Comment bien écouter


L’écoute est un art qui s’apprend. Elle exige que notre attention soit
tournée vers l’autre personne, et que l’on soit disponible et non pris par ses
préoccupations personnelles. Elle requiert que l’on passe par-dessus ses
idées toutes faites et, surtout, que l’on ait un réel intérêt pour l’autre et sa
réalité. Les trois formes d’écoute que nous allons maintenant vous proposer
ont fait leurs preuves pour créer le climat de confiance. Vous pourrez dans
les débuts vous sentir maladroit en les mettant en pratique, mais vous aurez
tôt fait d’en mesurer le pouvoir.

Reformuler les pensées de notre interlocuteur


Après avoir bien écouté et fait l’effort de comprendre ce que la personne
vient de dire, il s’agit de reformuler son message avec nos propres mots,
sans rien enlever ou ajouter et sans tomber dans la redite mot à mot de ses
paroles. Cette écoute active convient particulièrement aux conversations en
petits groupes, aux discussions seul à seul avec une autre personne et dans
le cadre d’une relation où l’on veut aider l’autre à résoudre son problème ou
bien comprendre ses besoins. On peut commencer ses phrases par une de
ces formules : Si j’ai bien compris ce que vous dites, vous… ou : Si je vous
suis bien… ou encore : En d’autres termes, tu crois que…

Reformuler les sentiments de notre interlocuteur


Avec cette forme d’écoute, on ne se limite pas simplement à reformuler le
contenu du message, mais on tente de dire à notre interlocuteur ce que l’on
comprend des sentiments avoués ou non qu’il peut éprouver, tout en évitant
de les exagérer ou de les minimiser. Cette forme d’écoute est
particulièrement utile lorsque l’autre personne est en colère, blessée ou
déprimée. La plupart des gens trouvent difficile d’exprimer leurs
sentiments, à moins d’être certains que les autres les accepteront. Ils ont
besoin qu’on leur dise  : Je comprends. Je sais ce que tu ressens  ! Alors
seulement ils se sentent libres de s’expliquer.

Poser des questions


Cette forme d’écoute est utile pour confirmer nos perceptions et obtenir
plus de précisions. Il faut bien sûr éviter les questions indiscrètes ou celles
qui mettent en doute la bonne foi de l’autre personne.
Ces trois formes d’écoute réceptive présentent plusieurs avantages.
D’abord, elles démontrent à l’autre personne que vous vous intéressez à
elle. Le simple fait que quelqu’un fasse un effort pour comprendre l’autre
est en soi très valorisant. Dans un contexte d’écoute non menaçante, où la
personne ne se sent pas analysée ou jugée, les ponts se créent et le rapport
de confiance s’installe. La reformulation du contenu ou des sentiments
permet non seulement de vérifier si l’on a bien compris, mais elle laisse
aussi à notre interlocuteur la possibilité de corriger, de préciser sa pensée et
d’apporter de nouvelles informations. Il peut ainsi mieux se situer, avoir une
idée plus claire, plus objective de ce qu’il veut dire et approfondir sa
pensée.
Bien sûr qu’on ne pratique pas la reformulation inutilement. Si quelqu’un
vous demande l’heure, n’allez pas lui répondre  : Si je comprends bien, tu
n’as pas de montre. Par contre, il y a suffisamment de situations où vous
pourrez faire bon usage de ces formes d’écoute et contribuer, à votre façon,
à resserrer les liens avec les personnes que vous rencontrez.

Vos objectifs et ceux des autres : le piège de la


manipulation
La synchronisation est un outil précieux pour créer un rapport de
confiance. Être synchrone n’est pas un but en soi, mais une étape qui
permet de faire un pas de plus vers ses objectifs. Quand votre détecteur
vous informe que la confiance est établie, c’est le temps de présenter vos
suggestions, d’exprimer votre demande, de poser les jalons qui vous
conduiront à obtenir ce que vous recherchez.
Nous avons déjà dit que le rapport n’est pas un état, mais un processus en
constant changement. Quand vous avancez vers votre objectif, continuez à
observer les comportements de votre interlocuteur et laissez fonctionner
votre détecteur pour évaluer la qualité du rapport et vous adapter quand
c’est nécessaire. C’est ainsi que fonctionnent les meilleurs communicateurs,
que ce soit en thérapie, en enseignement, en situation de négociation, de
vente ou autre.
Par contre, quand d’autres personnes sont en cause, la question de la
manipulation se pose inévitablement. On peut, en effet, utiliser ces
techniques pour modifier le comportement de l’autre sans qu’il s’en
aperçoive et pour obtenir de lui qu’il accomplisse quelque chose qui ne
correspond pas à ses propres objectifs. Or, un véritable contact se fait dans
la confiance et l’intimité entre deux personnes. À l’opposé, la manipulation
se déroule entre une personne qui se retire du contact et une autre qui est
considérée comme une chose à contrôler. Il faut savoir, cependant, que les
manœuvres manipulatrices, quand elles sont mises à jour, coupent souvent
de manière irréversible le rapport de confiance et qu’elles constituent le
moyen parfait pour se mettre des personnes à dos.
Nous avons tous eu l’occasion de rencontrer un vendeur très sympathique
qui nous a convaincus de nous engager dans une transaction amèrement
regrettée quelques jours plus tard. Cette personne nous avait habilement
persuadés d’aller dans le sens de son objectif à elle, sans tenir compte
vraiment de notre propre objectif, d’où le sentiment d’avoir été manipulés.
La majorité des personnes avec qui vous entrez en relation vous aideront à
atteindre vos objectifs personnels si elles peuvent répondre à leur propre
besoin par la même occasion. C’est dans cette mesure que le rapport que
vous établirez avec les autres ne sera pas vécu comme de la manipulation.
Négliger par exemple les objectifs de vos collègues, de vos amis ou de vos
employés pour atteindre les vôtres provoque immanquablement le
ressentiment, les récriminations et le désir de se venger. Assurez-vous de
connaître leurs besoins, vérifiez qu’ils sont compatibles avec les vôtres,
puis rencontrez-les sur leur terrain et progressez ensemble vers vos objectifs
respectifs. Influencer oui, mais avec intégrité : telle est la clé de la réussite.
31. Tiré de Marc-Olivier Vachon, « Relations intergénérationnelles : la tension innovation versus compétence », Travail et santé,
vol. 23, n° 4, décembre 2007.
12

Flexibilité, persévérance et maîtrise


La folie, c’est se comporter de la même

manière et s’attendre à un résultat différent.

Albert Einstein

Dans les chapitres précédents, nous vous avons présenté une démarche et
des outils pour découvrir vos rêves et vous engager sur le chemin de leur
réalisation. Si vous êtes déjà passé à l’action, vous avez sans doute réalisé
que certains gestes, même si vous les accomplissiez avec constance, n’ont
pas donné les résultats escomptés. Or, quand les choses ne fonctionnent pas
comme on le voudrait, il y a deux pièges à éviter : abandonner et s’acharner.
Les personnes qui abandonnent et se découragent vont souvent retourner
leur énergie contre elles-mêmes. Elles se blâment et éprouvent un sentiment
de culpabilité et d’incompétence. Ou encore elles la dirigent vers
l’extérieur, cherchent un coupable et condamnent les autres, la société ou le
destin. Les personnes qui s’acharnent répètent les mêmes stratégies, encore
et encore, même si la réalité leur renvoie clairement le message que ces
méthodes sont inefficaces dans cette situation donnée.
Comme le dit si bien le médecin et psychologue britannique Havelock
Ellis : « Tout l’art de vivre repose sur la fine démarcation entre lâcher prise
et s’accrocher. » C’est là qu’on retrouve une troisième voie beaucoup plus
sûre qui sera l’objet de ce dernier chapitre : la flexibilité.

La résistance au changement
Lâcher prise peut sembler simple à première vue, mais ce n’est pas
toujours le cas. Voici d’ailleurs une petite histoire qui illustre bien la
difficulté que cela peut représenter.
On raconte que, dans la forêt équatoriale, un homme chassait le singe.
Comme il connaissait bien un de ses travers, il pouvait l’attraper vivant et
sans la moindre blessure. Après avoir vidé une courge qu’il remplissait
ensuite de riz, il la fixait solidement à un arbre. Le singe, attiré par la
nourriture, s’approchait et insérait ses doigts par l’ouverture. S’emparant
d’une poignée de riz, il ne pouvait plus retirer sa main pleine maintenant
trop grosse pour passer par l’orifice. Pendant qu’il s’acharnait, le chasseur
s’approchait et attrapait le singe ainsi retenu. Vous pensez sans doute que
l’animal n’avait qu’à abandonner le riz pour retrouver aisément sa liberté.
Bien sûr, mais pour y arriver, il aurait dû renoncer à quelque chose
d’important et même de vital pour lui : sa nourriture.
Cet exemple illustre bien la résistance que nous avons tous à changer. Le
changement oblige à des renoncements et lâcher prise implique parfois de
faire le deuil du confort de nos habitudes et de stratégies inappropriées et
obsolètes. Lâcher prise implique à d’autres moments de renoncer à des
idées ou des désirs irréalistes, comme souhaiter que son conjoint ou son
collègue de travail ait un caractère différent et qu’il change. Ou se défaire
de croyances stériles comme : Il faut que tout soit parfait. Tout doit toujours
fonctionner comme je le veux. Je dois tout faire moi-même. Ou encore
devoir abandonner un objectif parce que son atteinte n’est pas sous notre
contrôle. Certaines personnes, par exemple, auraient tout intérêt à laisser
aller leur passé et les épreuves qu’elles ressassent sans pouvoir rien y
changer, s’empêchant ainsi de profiter du moment présent et de la
possibilité de recréer leur vie, pas comme elle était avant, mais comme elle
pourrait être après. Même les changements que l’on souhaite impliquent des
détachements en obligeant par exemple à laisser derrière soi un
environnement familier, des collègues de travail, une sécurité financière ou
affective. Donc, qu’un changement soit choisi ou subi, positif ou négatif, il
entraîne toujours à sa suite un réajustement et, à des degrés divers, une
forme de résistance.

Le processus du changement
L’auteur William Bridges32 soutient qu’un changement est intégré lorsque
la personne qui le vit est passée par un processus d’ajustement
psychologique en trois étapes. Ce cheminement, plus ou moins lent et
difficile selon les personnes et l’importance du changement, ne s’opère pas
de façon linéaire et il comporte son lot de retours en arrière occasionnels, de
sacrifices et de défis.

1. La rupture
C’est l’étape où l’on doit accepter que ce que l’on a connu dans le passé
ne sera plus là. Le défi à relever, c’est de laisser partir le passé et d’admettre
la perte inévitable qui accompagne cette réalité. Si vous rêvez de changer
d’emploi, de monter votre propre entreprise, de déménager à la campagne
ou de partir autour du monde avec votre famille pendant toute une année,
vous devrez abandonner des comportements, une routine, laisser derrière
vous des proches, oublier votre sécurité financière peut-être, et même
quitter vos repères culturels. Quand le changement est imposé, que ce soit
en raison d’une maladie, du départ d’un être cher, de la retraite, d’un
déménagement ou d’une réaffectation professionnelle, on doit aussi quitter
sa zone de confort et changer des façons de faire que l’on connaît bien. On
devra par exemple renoncer pour un temps à se sentir compétent, reconnu,
accepter peut-être de perdre une partie de son identité, sacrifier son
organisation du temps… Plus le renoncement est important, plus il risque
d’engendrer de la résistance et des émotions paralysantes qu’il faudra
apprendre à canaliser pour traverser activement cette période de
déséquilibre.
Le passage à la retraite est un bon exemple d’un changement qui peut être
à la fois imposé et désiré, et qui oblige la personne concernée et son
entourage immédiat à trouver des moyens nouveaux pour rétablir un
équilibre rompu momentanément. Dans notre société, le travail satisfait, à
des degrés variables, plusieurs besoins d’une personne  : le besoin de
sécurité, bien sûr, mais aussi de contribuer, de se sentir utile aux autres,
d’être significatif et reconnu, de relever des défis, de communiquer, d’avoir
de l’influence et du pouvoir. Ces besoins sont encore présents au moment
de prendre sa retraite, mais il faut alors laisser aller des façons de satisfaire
ces besoins qui étaient liées au travail pour en développer de nouvelles.
Pour mieux comprendre les émotions parfois contradictoires qui vous
habitent sans doute alors que vous en êtes à introduire des changements
dans votre vie, il est bon de répondre à cette question  : À quoi ce
changement m’oblige-t-il à renoncer, qu’est-ce qu’il me force à laisser
aller ?

2. La zone neutre ou le flou


Cette étape demande beaucoup d’énergie, pas seulement parce que l’on a
perdu ses anciens points de repère, mais aussi et surtout parce qu’on n’en a
pas développé de nouveaux. Ce qui était ne reviendra pas, mais ce qui va le
remplacer n’est pas tout à fait connu ou n’inspire pas encore confiance.
Même lors de changements souhaités, il n’est pas rare à cette phase
d’éprouver de l’insécurité et même de l’anxiété. L’ambiguïté et l’incertitude
vont parfois décourager les personnes qui éprouvent plus de difficulté à
tolérer ces états d’esprit, de sorte qu’on assiste souvent à une baisse de la
motivation et à des retours en arrière. C’est un peu comme si l’on était
suspendu dans les airs entre deux trapèzes, un qu’on a lâché et un autre
qu’on attend sans savoir avec certitude d’où il viendra ou en n’ayant pas
tout à fait confiance qu’on va être capable de le saisir. Cette période neutre
est pourtant essentielle, car c’est là que se font les percées les plus
intéressantes et qu’on retrouve la créativité et l’énergie de la transition qui
vont permettre à la transformation de vraiment s’opérer. Le défi, à cette
étape, c’est de bien gérer les émotions négatives et de provoquer en soi des
états d’esprit qui soutiennent et protègent du découragement et de
l’abandon.

3. La réorientation
C’est l’étape de l’acquisition de nouvelles connaissances et du
développement de nouvelles habitudes qui vont s’intégrer à notre identité.
Par exemple, la personne retraitée a réussi à réorienter sa vie. Elle peut
maintenant faire une évaluation plus réaliste des choix qui s’offrent à elle et
explorer de nouvelles activités qui répondent à ses besoins. Elle voit les
avantages d’avoir du temps pour elle-même, pour poursuivre d’autres rêves,
pour se consacrer aux gens qu’elle aime. Elle peut même avoir réorganisé la
hiérarchie de ses valeurs : alors qu’elle valorisait auparavant la productivité,
l’efficacité, l’accomplissement et le statut, ce sont dorénavant le temps, le
développement de la personne et de ses potentialités et le bénévolat qui
occupent la première place chez elle.
De la même manière, dans le cas d’une personne qui a volontairement
laissé un emploi pour aller vers un autre plus épanouissant, le processus de
la transition n’est complété que lorsqu’elle a intégré et consolidé ses
nouvelles compétences, ses nouveaux automatismes et qu’elle a retrouvé
son efficacité et un certain confort.

Lâcher prise : un acte de confiance


Maintenant que vous comprenez mieux le processus d’intégration d’un
changement, revenons au lâcher prise, un concept développé à l’origine par
Guy Finley33 et qui peut s’expliquer et s’appliquer de bien des manières.
Une façon très simple de l’apprivoiser consiste à l’opposer à son contraire :
le contrôle. L’être humain aime bien, à des degrés divers, avoir un certain
contrôle, que ce soit sur son travail ou des parties de celui-ci, sur sa vie
personnelle, sur ses émotions, sur les autres parfois et peut-être même sur
des événements qui, justement, sont hors de son contrôle. Or, il est utile et
sage de bien différencier trois zones différentes dans nos vies (voir
Figure 1. Le modèle du contrôle). Il y a tout d’abord la zone d’impuissance
dans laquelle se retrouve tout ce qui échappe à notre contrôle et à notre
influence  : les accidents de la vie, notre génétique, l’éducation que nos
parents nous ont donnée, le milieu socio-économique dans lequel nous
avons grandi, le temps qu’il a fait hier et qu’il fera demain… L’impuissance
réelle ou imaginaire étant une des plus grandes sources de stress, les
personnes dont l’existence se passe en grande partie dans cette zone se
sentent tendues et oppressées et se croient, à tort et à raison, victimes des
événements et des autres.
Puis, il y a la zone d’influence qui comprend ce sur quoi nous pouvons
agir et avoir un impact. Par exemple, nous pouvons influencer jusqu’à un
certain point le cours des choses, notre avenir, nos enfants, l’opinion que les
gens se font de nous…
Enfin, il y a la zone du pouvoir personnel. Même si nous ne pouvons pas
contrôler les événements qui surviennent ni les gens autour de nous, nous
pouvons décider comment nous voulons les percevoir. En d’autres termes,
nous pouvons contrôler notre point de vue sur les choses, modifier notre
perspective et notre façon de voir la réalité, modifier nos croyances et nos
comportements.

Figure 1 : Le modèle du contrôle


Bien différencier ces trois zones est une étape importante dans le
processus du lâcher prise. Lorsqu’une personne prend conscience qu’elle ne
peut changer les autres et les événements qui surviennent mais seulement sa
façon de les percevoir, elle est dans le lâcher prise. De la même façon,
lorsqu’elle abandonne une stratégie d’action stérile ou une conduite
improductive, elle fait preuve de lâcher prise et de flexibilité.
Est-ce à dire que lâcher prise implique de renoncer à nos buts, à nos
objectifs  ? Pas nécessairement. Dans l’immédiat, lâcher prise peut être
parfaitement compatible avec l’action, mais impliquera parfois une action
différente ou différée. Un exemple aidera à mieux comprendre. Il nous
arrive à tous de chercher un mot que l’on connaît bien, de l’avoir sur le bout
de la langue et de nous acharner en vain à le retrouver. Puis on passe à autre
chose et, au moment où on ne l’attend plus, le mot revient de lui-même sans
effort. N’est-ce pas après avoir mis de côté un mot croisé ou un sudoku
incomplet pour le reprendre un peu plus tard avec un regard neuf que les
mots ou les chiffres manquants nous viennent comme par enchantement  ?
De la même manière, penser de façon obsessive à un problème est la
plupart du temps complètement improductif. S’en détacher provisoirement
permet de laisser émerger certaines solutions et surtout de laisser de la place
à l’originalité et la créativité.
Mais pourquoi est-ce si difficile de laisser aller notre besoin de contrôle ?
Peut-être a-t-on peur de ce qui pourrait arriver en son absence. Certaines
personnes pourront craindre que les autres les dominent ou elles auront peur
de se tromper, de ne pas être adéquates ou de manquer de quelque chose. Ce
qui est certain, c’est que plus on cherche à contrôler, que ce soit ses
collègues, son conjoint, ses enfants, l’opinion des autres ou même son
apparence, moins on lâche prise. Lâcher prise est un acte de confiance qui
nécessite l’acceptation de ses limites, la reconnaissance des autres dans
leurs différences et la capacité de faire avec ce qui est dans le moment
présent. La tentation est grande toutefois de refuser ce qui n’est pas
conforme à nos désirs. Le besoin de contrôle nous fait alors nous acharner
sur ce qui aurait pu être ou ce qui devrait être et oublier la réalité actuelle.

Les questions de flexibilité


Il y a plusieurs façons de développer notre capacité à lâcher prise. La
première et la plus importante, c’est de prendre conscience de nos émotions
face à ce qui arrive et réaliser l’absurdité du contrôle sur ce que l’on ne peut
ni changer ni influencer. C’est de devenir conscient aussi de toute la perte
d’énergie et de bien-être qu’impliquent le perfectionnisme et l’entêtement.
Imaginons qu’une personne parte en voyage avec l’intention bien arrêtée
de s’adonner à la photographie, une de ses passions. Après seulement deux
jours, sa caméra cesse de fonctionner et elle ne peut la faire réparer sur
place ou s’en procurer une autre. Elle est frustrée, dépitée, en colère, et c’est
bien humain. Mais elle pourra bien bouder, s’accabler de reproches ou râler,
rien de tout cela ne corrigera la situation. Si elle ne fait pas le deuil de son
appareil photo, elle risque de gâcher complètement ses vacances. Prendre
conscience de ses émotions et reconnaître le fait qu’elle est devant une
situation hors de son contrôle est le début du lâcher prise. Mais voyons
comment elle peut aller plus loin.
Nous vous avons dit au début de ce chapitre qu’entre l’abandon et
l’acharnement s’ouvre la voie de la flexibilité. Vous connaissez déjà le
pouvoir unique des questions, puisque nous en avons parlé abondamment
au chapitre 8. Nous vous proposons donc quatre questions qui favorisent la
flexibilité34 et qui permettent d’échapper au cycle de l’autoflagellation et de
l’impuissance. Ces questions de résolution de problème ont le grand mérite
d’orienter notre attention vers la zone du pouvoir personnel, là où nous
pourrons trouver d’autres avenues quand celles que nous avons empruntées
sont fermées. Comme d’habitude, nous vous suggérons fortement d’y
répondre par écrit.

1.  Face à une situation qui vient contrecarrer vos plans ou quand un
moyen d’action ne donne pas les résultats escomptés, commencez par vous
demander : Qu’est-ce qui fonctionne à mon goût ? De quoi suis-je content ?
De quoi puis-je être satisfait ? Tout ne va pas mal, alors faites l’effort de
donner le plus de réponses possible. L’objectif, c’est de casser tout de suite
l’état d’esprit paralysant qui est le vôtre à ce moment-ci. Vos réponses
devraient suffire à provoquer un état d’esprit positif plus propice à la
créativité et à la recherche de moyens différents pour progresser vers votre
objectif. Par exemple, dans le cas de la caméra photo qui s’est brisée au tout
début de ses vacances, la personne pourrait répondre à la première question
qu’elle est contente malgré tout d’être en vacances, de pouvoir se reposer
dans un endroit magnifique à une température idéale, qu’elle est heureuse
d’être accompagnée de la personne qu’elle aime…
Revenons en arrière35, à cette personne qui, dans la sphère de sa santé
physique, s’est fixé comme objectif intermédiaire  : D’ici quatre mois, je
veux apprendre comment cuisiner des repas équilibrés et apporter des
goûters santé au bureau. Elle réalise, après cette période, qu’elle ne cuisine
pas encore. Par contre, elle est satisfaite d’avoir consulté une nutritionniste,
d’avoir diminué de façon marquée sa consommation de café, et elle apporte
maintenant des goûters plus sains au bureau. Peut-être n’a-t-elle pas réussi à
marcher activement trois fois par semaine pendant au moins trente minutes,
comme elle le projetait, mais elle est contente d’emprunter les escaliers au
lieu de l’ascenseur.
Dans un autre domaine, imaginons une personne qui désirait convaincre
ses collègues de modifier une procédure. La réunion s’est terminée et elle a
manqué de temps pour bien expliquer son point de vue. En répondant à la
première question de flexibilité, elle réalise qu’elle est tout de même
contente d’avoir réussi à faire en sorte que la question soit étudiée plus en
profondeur lors de la prochaine rencontre.

2. Maintenant que votre état d’esprit est plus positif, vous êtes prêt à bien
cerner le problème en répondant à ces deux questions : Qu’est-ce qui n’est
pas à mon goût  ? Qu’est-ce qui ne fonctionne pas  ? Peut-être la situation
exige-t-elle que vous développiez une approche et des moyens différents.
La personne qui n’a pu marcher trente minutes par semaine comme elle le
souhaitait réalisera par exemple qu’elle comptait trop sur un ami qui devait
l’accompagner et qui n’était pas disponible. Une autre prendra peut-être
conscience qu’avant sa réunion, elle n’a pas pris le temps de créer un
rapport de confiance entre elle et ses collègues et qu’elle ne connaît pas
suffisamment les procédures d’une réunion. Cette seconde question est
essentielle pour comprendre ce qui s’est passé et éviter de répéter les
mêmes erreurs. Quand on refait ce qui ne fonctionne pas, on obtient les
mêmes résultats ; d’où l’importance de comprendre ce qui s’est passé avant
de penser tout de suite aux solutions.

3.  Avec cette troisième question, vous êtes maintenant au cœur de la


flexibilité. Qu’est-ce que je pourrais faire pour que cela fonctionne mieux
la prochaine fois  ? Votre attention peut maintenant se porter vers des
solutions de rechange et votre créativité pourra s’exprimer à loisir. Vos
réponses vont vous permettre de mettre en pratique des moyens différents
pour avancer vers votre objectif. Par exemple, si une personne constate
qu’elle a besoin de compagnie pour marcher régulièrement, elle pourra
décider de se joindre à un club de marche. Une autre dont l’appareil photo
s’est brisé pourra décider de ramasser les brochures, les cartes postales et
les vidéos disponibles pour profiter autrement des belles images qui
s’offrent à elle. Une autre pourra décider qu’avant sa prochaine réunion
avec ses collègues, elle ira consulter quelqu’un qui s’y connaît dans les
procédures.
4.  La quatrième question de flexibilité vous permettra de ne plus répéter
les mêmes erreurs et aussi de formuler vos limites. Qu’est-ce que je ne suis
plus prêt à faire ? L’une ne partira plus en vacances sans avoir un plan B,
par exemple une deuxième caméra ou tout simplement un appareil photo
jetable. L’autre ne se présentera plus à une réunion pour proposer son projet
sans avoir d’abord pris le temps de rencontrer ses collègues informellement
afin de créer le rapport avec eux.

Persévérance et maîtrise
Un souhait ne vous est jamais donné sans que vous

ayez les capacités pour le réaliser. Cependant

vous aurez à travailler pour y arriver.

Richard Bach

Il faut bien reconnaître que nous vivons à l’ère de l’instantané, du presse-


bouton, de la vitesse, des diètes miracles, de la satisfaction immédiate de
nos désirs et de l’illusion de la réussite. La publicité et les médias nous
offrent leurs miroirs aux alouettes et nous laissent croire que la vie est une
succession ininterrompue de moments de joie et de jouissance. On a
l’impression qu’il est possible d’apprendre sans effort, de devenir riche et
célèbre instantanément, de soulager rapidement des symptômes sans agir
sur les causes Tout au long de ce livre, nous vous avons offert une
démarche et un coffre rempli des meilleurs outils que nous connaissons
pour soutenir les changements que vous souhaitez et favoriser votre
développement dans les domaines importants de votre vie. Or, il est une
réalité avec laquelle on ne peut pas tricher : réaliser ses rêves demande des
efforts et de la persévérance. Ce discours n’est pas très populaire dans notre
culture de facilité, mais il faut savoir que le chemin qui conduit à la maîtrise
est long et qu’il comporte son lot de progrès et d’embûches, ses moments
de joie, d’ennui et de découragement. D’où l’importance d’apprendre à
apprécier le processus qui nous y conduit.
La réalisation d’un rêve apporte de grandes satisfactions, beaucoup de joie
et un réel épanouissement. Mais, comme le soulignait en entrevue36 David
Saint-Jacques en parlant de son métier d’astronaute  : «  Je le compare
toujours à celui d’alpiniste. C’est amusant d’être en haut d’une montagne,
mais tu es là dix minutes. Les grimpeurs heureux sont ceux qui aiment
préparer leur mission, rencontrer des gens, regarder des cartes. »
C’est par la pratique que nous avons tous appris à parler et à écrire, que
nous maîtrisons maintenant ce système très complexe de la langue et que
nous réussissons même à déchiffrer le difficile code des émotions et du
langage non verbal. C’est aussi par la pratique et la persévérance que nous
apprendrons de nouveaux comportements, que nous développerons de
nouvelles façons de penser plus positives et que nous progresserons pas à
pas vers nos rêves. Par moments, nous nous sentirons malhabiles, anxieux,
nous connaîtrons des hauts et des bas, des moments de progrès et des
retours en arrière, des percées, puis de longs plateaux pendant lesquels nous
aurons l’impression de faire du sur place. Mais c’est en persistant, en
modifiant notre approche quand c’est nécessaire et en nous exerçant que ces
comportements et ces manières de penser feront un jour partie intégrante de
nous et de notre vie. La maîtrise est à ce prix. Oubliez les personnes et les
livres qui vous promettent d’apprendre une nouvelle langue en trois mois,
de perdre vingt kilos en trois semaines ou de retrouver un corps athlétique
en trois jours. Apprenez la patience et surtout appréciez le processus qui
vous conduit à la maîtrise.
Le maître zen Shunryu Suzuki37 illustrait les mérites de la persévérance en
parlant de quatre sortes de chevaux  : l’excellent, le bon, le faible et le
mauvais. Le meilleur cheval apprend très vite. Avant même d’entrevoir ne
serait-ce que l’ombre de la cravache de son cavalier, il devine ses ordres et
répond immédiatement à sa volonté. Le second obéit juste avant que le
fouet n’atteigne sa peau. Le troisième attend de sentir la douleur sur son
corps. Quant au quatrième, il apprend difficilement et la douleur pénètre
jusqu’à la moelle de ses os avant qu’il n’exécute les commandes de son
conducteur. La majorité des personnes qui entendent cette histoire
souhaitent être comme l’excellent cheval ou, au moins, comme le second.
Mais c’est une erreur. Quand on apprend trop facilement, on est tenté de ne
plus travailler dur et on n’entre jamais au cœur de ce que procure la
pratique. Parfois, le meilleur cheval est le plus mauvais et le pire cheval est
le meilleur.
Retenez qu’il ne sert à rien de s’obstiner à répéter ce qui ne fonctionne
pas. Vous décourager, vous blâmer, trouver des excuses ou condamner
l’univers entier ne vous rapprochera jamais de vos buts. Par contre, prendre
le temps d’identifier le problème en posant les questions de flexibilité,
modifier selon le cas votre objectif, votre stratégie et vos moyens d’action,
accepter avec courage de faire les efforts qu’il faut et persévérer avec
patience sont les ingrédients qui vous permettront de jouir du bonheur de
réaliser votre rêve. Ce sera peut-être dans un an, dans cinq ans ou peut-être
dans dix, mais un jour vous vous retournerez et vous direz avec bonheur :
mission accomplie !
32. William Bridges, Transitions: Making Sense of Life’s Changes, Cambridge, Da Capo Press, 2004.
33. Guy Finley, Lâcher prise, Montréal, De l’homme, 2003.
34. Tirées de Anthony Robbins, Pouvoir illimité, Paris, Robert Laffont, 1998.
35. Voir chapitre 7 : S’engager dans l’action.
36. Lise-Marie Gervais, «  Un décollage parfait  », Le Devoir, 25  mai 2009. Entrevue avec David Saint-Jacques, médecin au
Nunavik, qui a réalisé en mai 2009 son grand rêve d’enfance de devenir astronaute pour l’Agence spatiale canadienne.
37. Tiré de Shunryu Suzuki, 1973.
Conclusion
À ce point de votre lecture, vous aurez sans doute constaté l’énorme
différence entre souhait et décision, comme entre motivation et
persévérance. Faire des changements dans sa vie est difficile et dérangeant,
tant pour soi que pour l’entourage. Nous avons sans doute plus à gagner
qu’à perdre, mais affronter la souffrance nous rebute toujours.
Lorsque j’étais étudiante en psychologie clinique, une petite phrase dans
un bouquin a été pour moi une révélation par rapport à la démarche de
changement qu’entreprend toute personne qui se présente en thérapie. Plus
d’une fois, elle m’a permis d’aider ceux et celles qui entrevoyaient la
démarche du changement thérapeutique comme une montagne inaccessible
et infranchissable : Changer, ce n’est pas devenir quelqu’un de différent ou
une autre personne, c’est devenir de plus en plus la personne que l’on est
fondamentalement.
Bien sûr, le prix à payer pour y arriver ou pour réaliser un rêve peut
apparaître fort élevé, en efforts, en craintes de se tromper, en deuils à faire.
Mais en acceptant de relever le défi du changement, le prix à payer sera
probablement moindre que celui que nous avions escompté. Par contre, que
dire du prix que nous aurons à payer tôt ou tard en passant à côté de notre
vie  ? C’est tout le processus de décision qui est pénible. Passer à l’action
amène souvent un soulagement et la sensation euphorique de se sentir plus
léger.
Que vos rêves soient vraiment les vôtres et non ceux des autres pour vous
ou ceux qu’il faudrait entretenir. Faites la différence entre besoins et désirs
et allez plutôt vers les premiers : ils appellent la nourriture de l’âme. Ayez
de l’ambition pour votre vie : vous n’en avez qu’une et ne connaissez pas sa
durée.
Il faut sans doute de la patience et du temps. Mais il faut aussi parfois un
brin de folie et d’audace. Vient un temps, dans toute vie, où l’avenir, c’est
maintenant et non dans un plus tard indéfini, un jour lointain qui se défile
sans cesse, caché sous de fallacieuses distractions, les tergiversations, le
doute, les sacrifices et les promesses jamais tenues.
Marie Bérubé
Remerciements
Nous tenons à remercier tous ceux et celles qui, à un moment ou l’autre,
nous ont encouragés à terminer ce livre. Nos remerciements vont plus
particulièrement à Pierre Vachon pour son patient travail de correction
linguistique et Anne-Julie Royer pour sa relecture finale.
Bibliographie
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changement imposé, Paris, InterÉditions/Masson, 1996.
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Éditions, 2005.
Winckler Martin, Le Chœur des femmes, Paris, POL, 2009.
Nous renvoyons le lecteur à notre site Internet :
www.oserchanger.com
où il trouvera des articles, des vidéos, des podcasts et le blog de
Marie Bérubé et Marc Vachon.
Sommaire
1. Avant-propos
2. 1
3. 2
4. 3
5. 4
6. 5
7. 6
8. 7
9. 8
10. 9
11. 10
12. 11
13. 12
14. Conclusion
15. Remerciements
16. Bibliographie

Landmarks
1. Cover

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