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demeure de l'or et de l'argent, présents du magnanime Aiolos
Hippotade. Et ils se disaient entre eux :
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– Mes mauvais compagnons m'ont perdu, et, avant eux, le
sommeil funeste. Mais venez à mon aide, amis, car vous en avez le
pouvoir.
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Et ils partirent, prenant un large chemin par où les chars
portaient à la ville le bois des hautes montagnes. Et ils
rencontrèrent devant la ville, allant chercher de l'eau, une jeune
vierge, fille du robuste Laistrygôn Antiphatès. Et elle descendait à
la fontaine limpide d'Artakiè. Et c'est là qu'on puisait de l'eau
pour la ville. S'approchant d'elle, ils lui demandèrent quel était le
roi qui commandait à ces peuples ; et elle leur montra aussitôt la
haute demeure de son père. Étant entrés dans l'illustre demeure,
ils y trouvèrent une femme haute comme une montagne, et ils en
furent épouvantés. Mais elle appela aussitôt de l'agora l'illustre
Antiphatès son mari, qui leur prépara une lugubre destinée, car il
saisit un de mes compagnons pour le dévorer. Et les deux autres,
précipitant leur fuite, revinrent aux nefs.
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jours, l'âme accablée de fatigue et de douleur. Mais quand Éôs
aux beaux cheveux amena le troisième jour, prenant ma lance et
mon épée aiguë, je quittai la nef et je montai sur une hauteur d'où
je pusse voir des hommes et entendre leurs voix. Et, du sommet
escarpé où j'étais monté, je vis s'élever de la terre large, à travers
une forêt de chênes épais, la fumée des demeures de Kirkè. Puis,
je délibérai, dans mon esprit et dans mon coeur, si je partirais
pour reconnaître la fumée que je voyais. Et il me parut plus sage
de regagner ma nef rapide et le rivage de la mer, de faire prendre
le repas à mes compagnons et d'envoyer reconnaître le pays.
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endormîmes sur le rivage de la mer. Et quand Éôs aux doigts
rosés, née au matin, apparut, alors, ayant convoqué l'agora, je
parlai ainsi :
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déesses. Alors Polytès, chef des hommes, le plus cher de mes
compagnons, et que j'honorais le plus, parla le premier :
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imprudemment, et, moi seul, je restai, ayant soupçonné une
embûche. Et tous les autres disparurent à la fois, et aucun n'a
reparu, bien que je les aie longtemps épiés et attendus.
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l'excellent remède que je te donnerai ne le permettra pas. Je vais
te dire le reste. Quand Kirkè t'aura frappé de sa longue baguette,
jette-toi sur elle, comme si tu voulais la tuer. Alors, pleine de
crainte, elle t'invitera à coucher avec elle. Ne refuse point le lit
d'une déesse, afin qu’elle délivre tes compagnons et qu'elle te
traite toi-même avec bienveillance. Mais ordonne-lui de jurer par
le grand serment des dieux heureux, afin qu'elle ne te tende
aucune autre embûche, et que, t'ayant mis nu, elle ne t'enlève
point ta virilité.
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– Qui es-tu parmi les hommes ? Où est ta ville ? Où sont tes
parents ? Je suis stupéfaite qu'ayant bu ces poisons tu ne sois pas
transformé. Jamais aucun homme, pour les avoir seulement fait
passer entre ses dents, n'y a résisté. Tu as un esprit indomptable
dans ta poitrine, ou tu es le subtil Odysseus qui devait arriver ici,
à son retour de Troiè, sur sa nef noire et rapide, ainsi que
Herméias à la baguette d'or me l'avait toujours prédit. Mais,
remets ton épée dans sa gaine, et couchons-nous tous deux sur
mon lit, afin que nous nous unissions, et que nous nous confiions
l'un à l'autre.
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travaillé, et j'avais un escabeau sous mes pieds. Une servante
versa, d'une belle aiguière d'or dans un bassin d'argent, de l'eau
pour les mains, et dressa devant moi une table polie. Et la
vénérable intendante, bienveillante pour tous, apporta du pain
qu'elle plaça sur la table ainsi que beaucoup de mets. Et Kirkè
m'invita à manger, mais cela ne plut point à mon âme.
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– Divin Laertiade, subtil Odysseus, va maintenant vers ta nef
rapide et le rivage de la mer. Fais tirer, avant tout, ta nef sur le
sable. Cachez ensuite vos richesses et vos armes dans une
caverne, et revenez aussitôt, toi-même et tes chers compagnons.
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garderons de force la demeure ? Elle fera comme le kyklops,
quand nos compagnons vinrent dans sa caverne, conduits par
l'audacieux Odysseus. Et ils y ont péri par sa démence.
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les longs jours se furent écoulés, alors, mes chers compagnons
m'appelèrent et me dirent :
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Je parlai ainsi, et la noble déesse me répondit aussitôt :
Elle parla ainsi, et aussitôt Éôs s'assit sur son thrône d'or. Et
Kirkè me revêtit d'une tunique et d'un manteau. Elle-même se
couvrit d'une longue robe blanche, légère et gracieuse, ceignit ses
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reins d'une belle ceinture et mit sur sa tête un voile couleur de
feu. Et j'allai par la demeure, excitant mes compagnons, et je dis à
chacun d'eux ces douces paroles :
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troupeaux. Puis, ayant prié les générations des morts, j'égorgeai
les victimes sur la fosse, et le sang noir y coulait. Et les âmes des
morts qui ne sont plus sortaient en foule de l'Érébos. Les
nouvelles épouses, les jeunes hommes, les vieillards qui ont subi
beaucoup de maux, les tendres vierges ayant un deuil dans l'âme,
et les guerriers aux armes sanglantes, blessés par les lances
d'airain, tous s'amassaient de toutes parts sur les bords de la
fosse, avec un frémissement immense. Et la terreur pâle me saisit.
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demande de te souvenir de moi, et de ne point partir, me laissant
non pleuré et non enseveli, de peur que je ne te cause la colère des
dieux ; mais de me brûler avec toutes mes armes. Élève sur le
bord de la mer écumeuse le tombeau de ton compagnon
malheureux. Accomplis ces choses, afin qu'on se souvienne de
moi dans l'avenir, et plante sur mon tombeau l'aviron dont je me
servais quand j'étais avec mes compagnons.
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l'île Thrinakiè, où vous échapperez à la sombre mer, vous
trouverez là, paissant, les boeufs et les gras troupeaux de Hèlios
qui voit et entend tout. Si vous les laissez sains et saufs, si tu te
souviens de ton retour, vous parviendrez tous dans Ithakè, après
avoir beaucoup souffert ; mais, si tu les blesses, je te prédis la
perte de ta nef et de tes compagnons. Tu échapperas seul, et tu
reviendras misérablement, ayant perdu ta nef et tes compagnons,
sur une nef étrangère. Et tu trouveras le malheur dans ta demeure
et des hommes orgueilleux qui consumeront tes richesses,
recherchant ta femme et lui offrant des présents. Mais, certes, tu
te vengeras de leurs outrages en arrivant. Et, après que tu auras
tué les prétendants dans ta demeure, soit par ruse, soit
ouvertement avec l'airain aigu, tu partiras de nouveau, et tu iras,
portant un aviron léger, jusqu'à ce que tu rencontres des hommes
qui ne connaissent point la mer et qui ne salent point ce qu'ils
mangent, et qui ignorent les nefs aux proues rouges et les avirons
qui sont les ailes des nefs. Et je te dirai un signe manifeste qui ne
t'échappera pas. Quand tu rencontreras un autre voyageur qui
croira voir un fléau sur ta brillante épaule, alors, plante l'aviron
en terre et fais de saintes offrandes au roi Poseidaôn, un bélier,
un taureau et un verrat. Et tu retourneras dans ta demeure, et tu
feras, selon leur rang, de saintes hécatombes à tous les dieux
immortels qui habitent le large Ouranos. Et la douce mort te
viendra de la mer et te tuera consumé d'une heureuse vieillesse,
tandis qu'autour de toi les peuples seront heureux. Et je t'ai dit,
certes, des choses vraies.
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– Je t'expliquerai ceci aisément. Garde mes paroles dans ton
esprit. Tous ceux des morts qui ne sont plus, à qui tu laisseras
boire le sang, te diront des choses vraies ; celui à qui tu refuseras
cela s'éloignera de toi.
Ayant ainsi parlé, l'âme du roi Teirésias, après avoir rendu ses
oracles, rentra dans la demeure d'Aidès ; mais je restai sans
bouger jusqu'à ce que ma mère fût venue et eût bu le sang noir. Et
aussitôt elle me reconnut, et elle me dit, en gémissant, ces paroles
ailées :
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Je parlai ainsi, et, aussitôt, ma mère vénérable me répondit :
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nerfs ne soutiennent plus les chairs et les os, et la force du feu
ardent les consume aussitôt que la vie abandonne les os blancs, et
l'âme vole comme un songe. Mais retourne promptement à la
lumière des vivants, et souviens-toi de toutes ces choses, afin de
les redire à Pènélopéia.
Et je vis d'abord Tyrô, née d'un noble père, car elle me dit
qu'elle était la fille de l'irréprochable Salmoneus et la femme de
Krètheus Aioliade. Et elle aimait le divin fleuve Énipeus, qui est le
plus beau des fleuves qui coulent sur la terre ; et elle se promenait
le long des belles eaux de l'Énipeus. Sous la figure de ce dernier,
celui qui entoure la terre et qui la secoue sortit des bouches du
fleuve tourbillonnant ; et une lame bleue, égale en hauteur à une
montagne, enveloppa, en se recourbant, le dieu et la femme
mortelle. Et il dénoua sa ceinture de vierge, et il répandit sur elle
le sommeil. Puis, ayant accompli le travail amoureux, il prit la
main de Tyrô et lui dit :
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et Nèleus la sablonneuse Pylos. Puis, la reine des femmes conçut
de son mari, Aisôn, Phérès et le dompteur de chevaux
Hamythaôr.
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jours et les mois se furent écoulés, et que, l'année achevée, les
saisons recommencèrent, alors la force Iphikléenne délivra
l'irréprochable divinateur, et le dessein de Zeus s'accomplit.
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compagnons, soit ici ; car c'est aux dieux et à vous de prendre
soin de mon départ.
Et Alkinoos dit :
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plus aimé et plus honoré de tous ceux qui me verraient de retour
dans Ithakè.
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qui animait ses membres souples. Et je pleurai en le voyant, plein
de pitié dans mon coeur, et je lui dis ces paroles ailées :
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autres femmes futures, et même celles qui auront la sagesse en
partage.
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Et nous échangions ainsi de tristes paroles, affligés et
répandant des larmes. Et l'âme du Pèlèiade Akhilleus survint,
celle de Patroklos, et celle de l'irréprochable Antilokhos, et celle
d'Aias qui était le plus grand et le plus beau de tous les Akhaiens,
après l'irréprochable Pèléiôn. Et l'âme du rapide Aiakide me
reconnut, et, en gémissant, il me dit ces paroles ailées :
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combattant pour les Akhaiens. Si j'apparaissais ainsi, un instant,
dans la demeure de mon père, certes, je dompterais de ma force
et de mes mains inévitables ceux qui l'outragent ou qui lui
enlèvent ses honneurs.
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joyeuse, parce que je lui avais dit que son fils était illustre par son
courage.
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montagnes sauvages, en portant dans ses mains la massue
d'airain qui ne se brisait jamais.
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homme qui va lancer un trait. Un effrayant baudrier d'or
entourait sa poitrine, et des images admirables y étaient
sculptées, des ours, des sangliers sauvages et des lions terribles,
des batailles, des mêlées et des combats tueurs d'hommes, car un
très habile ouvrier avait fait ce baudrier. Et, m'ayant vu, il me
reconnut aussitôt, et il me dit en gémissant ces paroles ailées :
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