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Plus de 600 millions d’habitants

n’ont pas accès à l’eau potable Atlas mondial


de l’eau

D. Blanchon
dans le monde.

L’eau est la ressource la plus précieuse sur la Terre. Irremplaçable


pour l’homme, l’eau est pourtant menacée, parfois mal gérée, Défendre et protéger notre bien commun
souvent inaccessible. Comment donner un accès à l’eau pour tous ?
Cet atlas propose un tour d’horizon autour de divers aspects :
David Blanchon
• L’eau, ressource vitale, abondante mais mal répartie, qui révèle
des inégalités sociales et de genre.
• L’eau, bien commun menacé par la surexploitation, les pollutions
agricoles, industrielles et urbaines.
• Préserver les ressources en eau et leur qualité : un défi sanitaire
et social, économique et environnemental, mais aussi et surtout
un choix politique.

Atlas mondial de l’eau


Cette nouvelle édition, grâce aux plus de 100 cartes et schémas mis
à jour, dresse un tableau complet des défis auxquels le monde est
aujourd’hui confronté pour une meilleure gestion de l’eau.


David Blanchon est géographe. Il enseigne à l’université Paris-Ouest Nanterre après avoir
passé deux ans au sein de l’IRL iGlobes (CNRS-université d’Arizona) à Tucson, Arizona.
Aurélie Boissière est cartographe indépendante.

Prix France : 24 


ISSN : 1272-0151 ISBN : 978-2-7467-6301-2

www.autrement.com
Illustration de couverture :
© Justinreznick / iStock
9:HSMHOG=\[XUVW: QUATRIÈME ÉDITION

9782746763012_AtlasMondialDeLeau_Couv.indd Toutes les pages 15/12/2021 11:27


Atlas mondial de l’eau

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Auteurs
David Blanchon. Géographe, il enseigne à l’université Paris-Ouest
Nanterre après avoir passé deux ans au sein de l’IRL iGlobes (CNRS-
université d’Arizona) à Tucson, Arizona. En 2004, sa thèse, soutenue à
l’université Paris X sous la direction de Jean-Paul Bravard et d’Alain
Dubresson, a obtenu le prix de thèse de géographie décerné par le
Comité national français de géographie. Elle est parue en 2009 aux
éditions Karthala, sous le titre L’Espace hydraulique sud-africain. Le
partage des eaux. Il a été membre du comité éditorial de l’Atlas de
l’Anthropocène (CNRS éditions, 2019) et l’auteur de Géopolitique de
l’eau : entre conflits et coopérations (Le Cavalier Bleu, 2019).

Cartographe
Aurélie Boissière est géographe-cartographe indépendante (http://
boiteacartes.fr/). Elle a réalisé de nombreux atlas dans la collection
« Atlas Autrement », notamment l’Atlas de l’Amérique précolombienne
(2022). Elle a également collaboré à plusieurs collections sur l’histoire de
France et l’histoire ancienne chez d’autres éditeurs.

Maquette : Twapimoa
Coordination éditoriale : Marion Chatizel, Anne Lacambre pour cette édition
Fabrication : Margot Jourdan

ISBN : 978-2-0802-7468-7

© Autrement, un département de Flammarion, 2022.


87, quai Panhard et Levassor, 75647 Paris Cedex 13
www.autrement.com

Dépôt légal : février 2022


Dépôt légal des éditions précédentes : © Éditions Autrement 2009, 2013,
2017.

Imprimé et relié en janvier 2022 par l’imprimerie Pollina, France

Tous droits réservés. Aucun élément de cet ouvrage ne peut être reproduit,
sous quelque forme que ce soit, sans l’autorisation expresse de l’éditeur et
du propriétaire, les Éditions Autrement.

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Atlas mondial de l’eau
Défendre et protéger notre bien commun

David Blanchon

Cartographie d’Aurélie Boissière

Quatrième édition

Autrement
Collection Atlas Monde

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4

Atlas mondial
de l’eau

6 Introduction 34 Prélèvements et consommation (I) :


données générales
36 Prélèvements et consommation (II) :
9 Une ressource irremplaçable
le secteur agricole
10 Une ressource abondante, 38 Prélèvements et consommation (III) :
mais inégalement répartie le secteur industriel
12 Le cycle hydrologique de la planète 40 Prélèvements et consommation (IV) :
14 Les grands bassins versants l’eau domestique
16 Les eaux souterraines
18 Hautes et basses eaux
20 Sécheresses et inondations 43 Une ressource menacée
22 Des milieux riches et variés
44 Les effets des grands barrages
46 Des zones humides en danger
25 Mobiliser et utiliser l’eau 48 La surexploitation des ressources
souterraines
26 Des États inégalement dotés
50 Les pollutions d’origine agricole
28 Des capacités de mobilisation
très différentes 52 Les pollutions industrielles et urbaines
30 Une mise en valeur ancienne 54 Les risques liés à l’eau
32 Les techniques modernes 56 Les catastrophes régionales

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SOMMAIRE • 5

59 De l’eau pour tous ? 91 Conclusion générale


60 Une valeur inestimable
Annexes
62 Une ressource disputée
92 Glossaire
64 Les concurrences régionales
93 Bibliographie sélective et sites Web
66 L’accès à l’eau, un enjeu mondial
94 Sources
68 L’eau : un révélateur des inégalités
sociales et de genre
70 Le « marché mondial » de l’eau
72 Le prix de l’eau potable

75 Quels défis pour le xxie siècle ?


76 Des régions à risque
78 Les grands projets de collaboration
entre États
80 Vers la gestion de la demande ?
82 La révolution bleue
84 L’eau virtuelle
86 Les solutions innovantes dans les villes
88 Quels scénarios pour 2030 ?

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6

Introduction

L
e problème de l’eau se pose en termes simples : actuellement les États n’est pas tant leur ressource brute
plus de 600 millions d’habitants n’ont pas accès à calculée par habitant que leur capacité à mobiliser cette
l’eau potable dans le monde ; 40 % de la production ressource. Au niveau mondial, l’agriculture reste le principal
agricole mondiale dépend de l’agriculture irriguée  ; les poste de prélèvement et de consommation d’eau, utilisant
écosystèmes aquatiques jouent un rôle indispensable près de trois quarts des ressources, mais la consommation
dans les processus naturels, mais sont aussi parmi les des villes, surtout dans les pays du Sud, croît rapidement.
plus fragiles. Au cours des prochaines décennies, il faudra La concurrence entre régions et entre villes et campagnes
donc à la fois apporter de l’eau potable à tous et accroître s’exacerbe partout dans le monde. Avec la multiplication
la production agricole en zones irriguées pour répondre à des grands barrages et des transferts d’eau à grande
la double augmentation de la population et du niveau de distance, l’eau semble « couler » désormais vers l’argent
vie, tout en préservant les milieux naturels. C’est ce triple et le pouvoir.
défi économique, social et environnemental qui devra être
relevé, avec une urgence particulière dans les pays du Sud Une ressource menacée
et faire face à la perspective de changements climatiques. Les prouesses techniques pour apporter l’eau là où on
en a besoin, quand on en a besoin, ne suffisent pas, les
Une ressource irremplaçable activités humaines entraînant souvent des désastres
L’eau est l’élément le plus précieux, le « signe distinctif » environnementaux. Ce ne sont pas la pénurie et le
de notre planète : façonnant le relief terrestre et régulant manque d’eau qui posent le plus grand défi en ce début
le climat (la vapeur d’eau est le principal gaz à effet de de xxie siècle, mais plutôt la dégradation incontrôlée de la
serre), elle a permis le développement de la vie. Elle y est qualité de la ressource, au Nord comme au Sud. Partout, les
abondante : il n’y a pas de pénurie d’eau douce au niveau ressources en eau sont menacées. Sans atteindre le niveau
mondial. Les problèmes liés à cette ressource viennent de la catastrophe de la mer d’Aral, de nombreux périmètres
de son inégale répartition spatiale et temporelle. La irrigués connaissent des problèmes de salinité inquiétants,
variabilité climatique crée une succession de sécheresses ce qui réduit fortement leur production. Au Sud, les rejets
et d’inondations, révélant le manque d’adaptation des des grandes villes ne sont que sommairement traités,
sociétés à ces phénomènes. Mais il n’existe pas de tout comme les effluents industriels. Au Nord, même si
problèmes d’accès à l’eau qui ne soient potentiellement des investissements lourds ont été effectués pour traiter
solubles techniquement aujourd’hui, même si cela les pollutions industrielles et urbaines, les écosystèmes
occasionne un coût environnemental et social important. aquatiques souffrent à la fois de pollutions diffuses liées à
l’agriculture intensive (nitrates, phosphates et pesticides)
Des capacités différentes à mobiliser et de pollutions héritées, comme les PCB dans le Rhône
la ressource et dans les autres fleuves européens. Et, en retour, ces
Les techniques, après des millénaires d’amélioration, pollutions menacent la santé de millions d’êtres humains.
permettent aujourd’hui de construire d’immenses barrages
pour réguler les fleuves, de transférer l’eau sur des De l’eau pour tous ?
centaines de kilomètres, de dessaler l’eau de mer à un coût Les aménagements hydrauliques, construits pour produire,
désormais plus abordable. C’est pourquoi ce qui distingue distribuer et traiter les eaux, demandent généralement

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INTRODUCTION • 7

des investissements importants. Ces coûts accroissent persistance d’une « pauvreté hydraulique » dans les pays
fortement les inégalités liées à l’eau entre villes et du Sud, l’incapacité à atteindre les Objectifs du millénaire,
campagnes, et dans les villes. Celles-ci soulignent les pourtant limités. L’optimiste montre les constantes
différences sociales (les centaines de millions d’habitants innovations techniques dans l’irrigation, le traitement et le
qui n’ont pas un accès minimal à l’eau potable et/ou à recyclage des eaux usées, les nouveaux modes de gestion
l’assainissement sont aussi les plus pauvres) ainsi que les plus efficaces, reposant sur la réduction de la demande
inégalités de genre (ce sont généralement les femmes et les et permettant de réduire aussi les impacts écologiques.
filles qui doivent passer de longues heures à aller chercher Tout dépendra des choix politiques, fondés sur la solidarité
l’eau) et les aggravent. Ainsi, dans les grandes métropoles nationale et internationale  : 100  milliards de dollars par
du Sud, les pauvres paient l’eau bien plus cher que les plus an, soit l’équivalent de 10  % des dépenses militaires
aisés, qui ont accès au réseau de type européen. mondiales, seraient nécessaires pour apporter l’eau à
Ces inégalités ne sont pas liées à la quantité d’eau tous. Mais ces financements ne donneront les résultats
disponible (l’usage de l’eau domestique est très faible escomptés que s’ils sont associés à une nouvelle culture
par rapport aux besoins agricoles), mais au manque de l’eau, plus économe, plus égalitaire et plus adaptée aux
d’investissement et à la non-prise en compte des besoins besoins réels des populations concernées. La résolution
des populations défavorisées. Le problème du financement des crises régionales de l’eau, qui ont chacune une
de l’eau pour tous est crucial pour les quelques années à histoire différente, viendra sans doute principalement de
venir : qui doit financer les coûts des nouveaux réseaux l’émergence de solutions innovantes locales, aidées et non
(États, municipalités, entreprises privées, consommateurs imposées : c’est la clé pour que l’eau pour tous devienne
finaux) ? Et quel prix doit-on faire payer ? Des solutions réalité au xxie siècle.
innovantes ont été mises en place dans certains pays
comme l’Afrique du Sud pour fournir un minimum d’eau
gratuitement à toute la population et pour que le droit
proclamé dans la Constitution d’un accès à l’eau universel
devienne réalité. Mais la question de la marchandisation
d’un bien à nul autre pareil, comme le montre sa valeur
symbolique et culturelle à travers le monde, reste posée.

Quelles perspectives ?
Le géographe et hydrologue A.  Allan écrivant de façon
paradoxale que «  les hydrologues pessimistes ont tort,
mais leur pessimisme est un outil politique puissant qui
permet d’avoir des financements et promouvoir des
innovations  ; les optimistes ont raison, mais ils sont
dangereux car ils permettent aux politiques de traiter l’eau
comme un domaine secondaire ». Le pessimiste souligne
la dégradation continue de la qualité de la ressource, la

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Une ressource
irremplaçable
L’eau est plus qu’abondante sur notre planète. Même si
97,5 % de l’eau présente sur Terre est salée, les stocks d’eau
douce restent considérables : plus de 40 millions de km3.
Cependant, seuls les flux, beaucoup plus restreints,
déterminent la ressource en eau renouvelable réellement
disponible à la fois pour le fonctionnement des écosystèmes
et les besoins humains. Ils sont très inégalement répartis
sur la surface du globe et très variables à toutes les échelles
de temps. Tous les cours d’eau sont ainsi affectés par la
variabilité climatique à des degrés divers, entre saisons
sèches et humides, et d’une année à l’autre. Mais c’est dans
les régions tropicales que les différences sont généralement
les plus marquées. Sur une plus longue durée s’y dessinent
des cycles de longues périodes sèches et humides,
dont les causes et le rythme restent mal connus.
La variabilité temporelle et spatiale des précipitations
et des débits explique la diversité, la richesse mais aussi
la fragilité des milieux aquatiques.

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10 •
N om de l ’ auteur

Une ressource abondante,


mais inégalement répartie
97,5 % de l’eau de la planète bleue est salée. Les 2,5 % restants sont, pour l’essentiel, piégés
dans deux inlandsis (Antarctique et Groenland). L’eau douce accessible facilement (rivières,
nappes souterraines) ne représente donc qu’environ 0,7 % du stock d’eau mondial, et sa part
renouvelée annuellement est encore plus faible (0,02 %). Cela équivaut tout de même à plus de
40 000 km3 (soit 5 000 m3/hab./an), une quantité suffisante pour couvrir tous les besoins humains.

Une ressource négligeables. grands lacs africains et américains,


difficilement accessible Le nombre total de lacs est incertain : le sont de véritables mers intérieures,
La majeure partie de l’eau douce est Canada, à lui seul, compterait plus de suffisamment vastes pour influen-
concentrée dans les inlandsis de l’An- 30 000 lacs de plus de 3 km2. Certains, cer le climat des régions alentour. On
tarctique (l’équivalent de 28  millions comme le lac Baïkal en Russie ou les compte également plus de 40 000 lacs
de km3 d’eau douce) et du Groenland
(2,6  millions de km3). Au vu des
Un monde salé
connaissances scientifiques et des
techniques, ces réserves ne peuvent Stocks mondiaux Eau douce
être exploitées. Restent donc les eaux
souterraines et les eaux superficielles.
Eau douce
Les premières, représentant approxi- Eau salée 2,5 %
97,5 % Eaux
mativement 10,5  millions de km3,
souterraines*
sont relativement bien réparties entre 30,8 %
les continents, mais souvent difficiles Glaciers
et couverture
d’accès. Les différences concernant neigeuse
les stocks d’eau superficielle sont permanente
68,9 %
surtout dues à la présence ou non de
très grands lacs. L’Amérique du Nord
doit ainsi son stock dix fois supé-
rieur à celui de l’Amérique du Sud Lacs et réservoirs
0,3 %
aux Grands Lacs situés à la frontière Sources : ONU, 2006 ;
Shiklomanov et Rodda, 2003. * dont humidité du sol, eau marécageuse et pergélisol.
entre les États-Unis et le Canada. Ces
eaux superficielles sont les plus faci-
lement exploitables, car rapidement Les stocks d’eau douce dans le monde
renouvelées.
Dans la gestion de l’eau, ce ne sont Antarctique 30
pas les stocks qui importent (même s’il
faut avoir en tête les ordres de gran- Groenland
deur) que les flux. Le problème de Amérique
l’eau sur notre planète n’est pas tant du Nord
Amérique
celui de la quantité globale disponible du Sud
que de son inégale répartition spatiale Europe
et temporelle.
Asie
Les lacs, les plus grands
Afrique
réservoirs superficiels
d’eau douce Océanie
Millions de km3
L’essentiel de l’eau douce superficielle
est stocké dans les lacs (123 000 km3), 0 1 2 3 4 5 6 7 8
Glaciers et Eaux souterraines Zones humides, lacs,
le volume présent à chaque ins- calottes polaires réservoirs et fleuves
tant dans les fleuves (1  300  km3), Sources : ONU, 2006 ; Shiklomanov et Rodda, 2003 ; Académie des sciences, 2006 ;
UNEP, 1995 ; International Lake Environment Commitee, 2008.
l’atmosphère et la biosphère étant

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UNE RESSOURCE IRREMPLAÇABLE • 11

Les précipitations dans le monde

Précipitations annuelles par zones


(mm par an)
Pas de données
0 100 200 500 1 000 2 500 Source : Global Precipitation Climatology Centre (GPCC), Offenbach, 2007.

artificiels situés derrière des barrages comparés au Groenland et à l’An- ainsi que dans le sud de l’océan Indien,
de plus de 15  mètres et un nombre tarctique, ceux des Alpes occupent la mer Rouge et le golfe Persique.
bien plus important de plans d’eau 3 000 km2 et soutiennent le débit estival Les régions continentales «  bénéfi-
artificiels plus petits qui ont un impact de fleuves majeurs comme le Rhône, le ciaires » se situent principalement dans
important sur le cycle de l’eau. Rhin ou le Pô. les régions équatoriales, puis entre
Enfin, dans les régions sèches, sans La neige, qui couvre 20 % des conti- 20° et 40° de latitude sur la façade
exutoire, les eaux chargées en sels nents pendant près de six mois, et un est des continents (Chine, États-Unis)
minéraux, sous l’effet de l’évaporation, tiers pendant trois mois (essentielle- et plus au nord (entre 40° et 60°) sur
forment des lacs salés comme la mer ment tout le nord de l’Eurasie et une leur façade ouest (Europe occidentale,
Morte, le grand lac salé de l’Utah ou grande partie de l’Amérique du Nord), Canada).
encore les chotts du Sahara. joue également un rôle majeur dans le Les régions les plus arrosées du globe
cycle de l’eau. se trouvent sans surprise là où des flux
Neiges et glaces Enfin, dernier élément de la cryosphère, venant des océans «  sources  » ren-
La cryosphère joue un rôle essentiel une partie importante de l’eau souter- contrent des obstacles montagneux.
dans le cycle de l’eau. Son extension raine est stockée sous forme glacée C’est le cas par exemple de Cherrapunji
est variable au cours des ères géolo- dans le sous-sol des régions arctiques, (en Inde), où l’air chaud et humide de
giques et influe sur le niveau des mers. notamment en Sibérie, au Canada et l’océan Indien bute sur les contreforts
Vers la fin de la dernière glaciation, il y également sous les hauts plateaux de l’Himalaya. Cette station reçoit ainsi
a environ 18 000 ans, deux immenses tibétains. Ce pergélisol est présent sur 12 mètres de précipitations par an.
inlandsis, centrés respectivement sur le 20 % de la surface des continents, sur À l’inverse, les régions arides, où il
Canada et la Scandinavie, stockaient une épaisseur pouvant aller jusqu’à tombe moins de 200  millimètres de
entre 30 et 34 millions de km3 d’eau, 500 mètres. précipitations, se situent soit dans
ce qui a abaissé le niveau des mers des régions situées à l’intérieur des
de 120 mètres. Leur fonte a provoqué Géographie du cycle de l’eau continents (déserts d’Asie centrale),
un relèvement rapide du niveau des La répartition géographique des préci- soit dans des zones qui sont toujours
mers en quelques milliers d’années. pitations est liée à la circulation géné- soumises à des anticyclones (déserts
Aujourd’hui, la fonte du seul inlandsis rale de l’atmosphère. À l’échelle du du Sahara et d’Australie). Les régions
du Groenland provoquerait une hausse globe, les grands espaces exportateurs les plus sèches du globe se trouvent le
de 7 m du niveau des mers. d’eau, où l’évaporation est bien plus long des côtes longées par des cou-
À plus petite échelle, les glaciers forte que les précipitations, s’étendent rants marins froids, comme le désert
de montagne jouent également un autour de 20° de latitude nord et sud d’Atacama au Chili, où il ne pleut
rôle régulateur. S’ils sont modestes sur les océans Pacifique et Atlantique, presque jamais.

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12 •
N om de l ’ auteur

Le cycle hydrologique
de la planète
Deux données sont essentielles pour comprendre les étapes du cycle de l’eau : l’intensité des flux
et le temps de résidence. Dans les glaces de l’Antarctique, l’eau, sous forme de glace, peut être
stockée des centaines de milliers d’années, alors que, sur les océans, le cycle évaporation
précipitation peut ne prendre que quelques heures. L’intensité des flux, en chaque point du cycle,
varie à toutes les échelles de temps considérées.

Un cycle vital environ sont transférés sous forme de Cette eau « verte » est indispensable
L’énergie solaire est le moteur du vapeur d’eau sur les continents, où, à au fonctionnement d’écosystèmes
cycle de l’eau. L’évaporation sur les des conditions de température et de aussi divers que les zones humides
océans, le transport dans l’atmos- pression données, ils se condensent ou les forêts. Elle est également utili-
phère, puis les précipitations et et précipitent (pluie ou neige). sée in situ par l’agriculture pluviale et
l’écoulement sur les continents en Environ 60  % de ces précipitations pour l’élevage.
sont les éléments essentiels. retournent rapidement dans l’atmos- Les 40  % d’eau précipitée restants
Chaque année, 502  800  km3 d’eau phère, par l’effet de l’évaporation sur rejoignent rapidement les rivières
s’évaporent sur les océans sous l’ef- les nappes d’eau libre (fleuves et lacs) avec un temps de résidence de
fet de l’énergie solaire. La plus grande ou de la transpiration des plantes et quelques jours. Seule une faible par-
partie retombe sous forme de préci- des animaux – d’où l’importance de tie s’infiltre plus profondément et
pitations sur les océans, mais 10 % cycles secondaires sur les continents. atteint les nappes souterraines, mais

Le cycle hydrologique de la planète

Transfert de la vapeur d’eau

Précipitations
Précipitations 110 000 km3 Précipitations
9 000 km3
458 000 km3
Évapotranspiration
65 200 km3 Évaporation
Évaporation
Absorption 502 800 km3
9 000 km3
par la
tion végétation
l t ra
Infi
Ruissellement de surface
Zones 42 600 km3
endoréiques

MERS ET OCÉANS
Circulation souterraine
12 000 km3

Précipitations* Évaporation*

* L’épaisseur des flèches est proportionnelle aux volumes d’eau


qu’elles représentent. Sources : ONU, 2006 ; Académie des sciences, 2006.
Infographie reproduite avec l’aimable autorisation de Philippe Rekacewicz.

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UNE RESSOURCE IRREMPLAÇABLE • 13
Le rôle de la végétation
Huang He (contre 85 pour la Seine),
Pluie interceptée ce qui lui vaut d’ailleurs le nom de
fleuve Jaune. Les fleuves descendant
de l’Himalaya ont également une
charge en suspension importante
(plus de 1 000 mg/l pour le Gange et
l’Indus), ce qui témoigne de la vigueur
Évaporation
Transpiration de l’érosion dans les hauts bassins.
foliaire En revanche, cette charge est faible
dans les bassins de l’Amazone (186)
ou du Congo (32)  : non que l’eau
Pluie n’y joue pas un rôle important – elle
directe dissout dans ces régions chaudes
Captation
et humides les roches sur plusieurs
mètres –, mais la forêt protège le sol
des précipitations et retient les sédi-
Égouttement Évaporation ments meubles.
La corrélation entre le cycle hydro-
logique et le cycle sédimentaire
SOL Rui explique pourquoi l’action de l’homme
ss elle
Percolation m ent a souvent des effets plus spectacu-
laires sur ce dernier que sur le cycle
de l’eau lui-même, en l’accélérant ou
en le ralentissant  : la déforestation
entraîne ainsi une érosion accélérée
S U BS T R AT UM
des versants alors que les barrages
Absorption retiennent les sédiments.
racinaire Infiltration

Source : Tabeaud, 1998.


Le temps de résidence

Eau de 1 semaine
le temps de résidence étant beau- l’évapotranspiration. la biosphère
coup plus long, le volume stocké Le couple sol/végétation forme des
est bien plus important. On désigne « terroirs hydrologiques », fondés sur Eau
atmosphérique 1,5 semaine
sous le nom d’eaux «  bleues  » les des systèmes d’interactions com-
eaux précipitées qui ne s’évaporent plexes. Ils sont souvent en équilibre
pas, ruissellent et rejoignent les cours fragile. On comprend dès lors que les Canaux fluviaux 2 semaines
d’eau ou s’infiltrent dans les nappes modifications sur le couvert végétal
souterraines. (défrichement des forêts, change- Humidité des sols
2 semaines
ment du type de cultures…) peuvent à 1 an
Le rôle de la végétation modifier fortement le cycle de l’eau de
et des sols régions entières. Marécages 1 à 10 ans
La vision globale ne donne qu’un
L’eau façonne la terre Quelques
aperçu trop simplifié du cycle de Lacs et réservoirs semaines
l’eau, car celui-ci est en réalité com- L’eau tient un rôle majeur dans la à 15 ans
posé d’une multitude de circuits formation du relief terrestre, comme
Glaciers
100 à
locaux, qui dépendent des particula- agent d’érosion, de transport et de 1 000 ans
rités de chaque bassin versant. sédimentation. Tous les paysages ter-
Comme le montre la figure ci-dessus, restres sont marqués par son action.
Mers et océans 2 500 ans
la végétation et les sols jouent un rôle Le gel et l’érosion fluvio-glaciaire
majeur au niveau local. La végétation façonnent les hautes montagnes. Les
intercepte d’abord les précipitations fleuves transportent chaque année de Eaux souterraines
2 semaines
à 10 000 ans
et ralentit le ruissellement, en favori- 15 à 30 milliards de tonnes de sédi-
sant l’infiltration dans les sols. L’eau ments vers la mer. Là où l’érosion est 1 000 à
Calottes polaires
stockée est ensuite captée par les la plus forte, la charge solide en sus- 700 000 ans
racines et renvoyée dans l’atmos- pension peut atteindre des valeurs
phère, c’est ce que l’on appelle très importantes : 26 000 mg/l pour le Sources : Shiklomanov et Rodda, 2003 ; Vigneau, 1996.

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14 •
N om de l ’ auteur

Les grands bassins versants


Le bassin versant (BV) est l’unité de base du cycle de l’eau sur les continents, mais aussi pour
l’étude scientifique des cours d’eau et, de plus en plus, pour leur gestion. Le BV d’un fleuve est
divisé en sous-bassins emboîtés pour chaque affluent, puis sous-affluent, jusqu’aux unités
élémentaires. Il existe toute taille de BV, les plus grands pouvant mesurer, comme l’Amazone,
plusieurs millions de kilomètres carrés.

Le bassin versant : celles des écoulements superficiels. connaître les ressources en eau dis-
unité de base pour comprendre On distingue généralement les bassins ponibles. Les diverses combinaisons
le cycle de l’eau endoréiques, sans écoulement vers la possibles font qu’il y a autant de « ter-
On définit généralement le bassin ver- mer, qui couvrent 11  % des terres roirs hydrologiques » que de bassins
sant comme la surface topographique émergées, des bassins exoréiques. versants. Chaque BV (et sous bassin
(impluvium) où les précipitations La forme du bassin versant, sa posi- même) est donc unique.
s’écoulent vers un exutoire commun. tion par rapport aux flux de précipi-
Le BV est limité par la ligne de par- tations, sa couverture végétale et Les principaux bassins
tage des eaux. Il comprend également sa géologie, qui détermine la pré- versants dans le monde
les écoulements souterrains dont les sence de nappes phréatiques, sont Trois critères sont généralement
limites peuvent parfois différer de autant d’éléments déterminants pour utilisés pour comparer les bassins

Les principaux bassins versants du monde


Iana
Indiguirka
Petchora
Dvina
Yukon Kolyma
MacKenzie 7 Ienisseï Lena
Volga Ob
Fraser Nelson 5 8
2 34 6 Amour
Columbia St-Laurent
1 Syr Daria Huang
Colorado Mississippi Océan Tigre et Tarim He
Euphrate Indus
Atlantique
Gange 9 Yangzi Jiang
Rio Grande Orénoque Sénégal
Niger Irrawady
Essequibo Narmada Océan
Nil Mékong
Krishna Godavari Pacifique
Magdalena Volta
Ogooué Congo
Amazone Parnaíba

São Francisco Zambèze Océan

Océan La Plata Indien


Orange
Pacifique Murray

Bassin versant
Débit spécifique moyen Débit moyen à l’embouchure
(litre/seconde/km 2) (m 3/seconde)
200 000 1. Èbre
De 25 à 42 2. Loire
40 000 3. Rhône
De 15 à 24,9 4. Rhin-Meuse
10 000
De 8 à 14,9 4 000 5. Elbe
1 000 6. Danube
De 5 à 7,9 7. Neva
Sources : UNEP, 1995 ; Shiklomanov et Rodda, Les cercles proportionnels sont situés 8. Dniepr
2003 ; WRI, Earth Trends.
De 0 à 4,9 à l’embouchure des fleuves concernés. 9. Brahmapoutre

01-96-Atlas mondial de l'Eau-NE-Maq4-BAT.indd 14 14/12/2021 10:58


UNE RESSOURCE IRREMPLAÇABLE • 15

Les bassins versants en Europe


Une mosaïque de BV
En Europe, il n’existe
Petchora pas de zone aréique,
mais la partie orientale
O c é a n A r c t i q u e du continent est
concernée par
l’endoréisme puisque la
Dvina Volga se jette dans la
mer Caspienne. Les
fleuves qui prennent
Neva naissance dans les
Alpes, comme le Rhône
Mer ou le Pô, présentent le
Volga plus fort débit
du spécifique, supérieur à
Nord 15 l/s/km2. Les fleuves
océaniques, comme la
Tamise ou la Seine, ont
Tamise par comparaison un
Océan débit spécifique plus
Oder Vistule Dniepr Don faible, compris entre 5
Atlantique Elbe et 7 l/s/km2. De par la
Rhin
Seine taille de leur BV, les
deux fleuves les plus
Loire importants sont la Volga
(8 000 m3/s à
Danube
Garonne l’embouchure) et le
Douro Danube (7 000 m3/s). La
Mer Noire particularité des fleuves
Pô européens, si l’on
Tage Rhône Tibre excepte la Dvina ou la
Èbre Petchora, est qu’ils sont
aménagés depuis
Débit spécifique moyen Débit moyen à l’embouchure longtemps et qu’ils
(litre/seconde/km 2) (m 3/seconde) représentent souvent
8 000 des axes de
De 15 à 21
communication majeurs.
De 8 à 14,9 3 000 Les cercles proportionnels Les plus grandes cités
500 km
1 000 sont situés à l’embouchure européennes se
Sources : UNEP, 1995 ; Shiklomanov
De 5 à 7,9 300 des fleuves concernés. trouvent sur leurs rives.
et Rodda, 2003 ; Transboundary Freshwater De 0 à 4,9
Dispute Database, 2000.

versants  : le débit brut ou module, La charge sédimentaire. Les bassins la Seine à Paris a une charge sédi-
exprimé en km 3/an ou en m 3/ versants se différencient également mentaire en suspension inférieure à
seconde  ; la superficie  ; et enfin le en fonction de la charge sédimentaire 0,2  kg par mètre cube. L’Amazone
débit spécifique (DS), obtenu en transportée par les cours d’eau, en transporte entre 0,5 (période d’étiage)
divisant le débit par la superficie et solution, en suspension (c’est cette et 1,5 kg (période de crue) par mètre
exprimé en l/s/km2. charge composée de sables et de cube.
Le débit spécifique. Ce dernier limons qui est le plus souvent respon- Le bassin versant  : une unité de
paramètre permet de comparer des sable de la turbidité des eaux), ou en gestion commode. Ces flux d’eau et
fleuves dont les bassins versants ont roulement pour les matériaux les plus de matière dans les bassins versants
des tailles différentes. Ainsi, le Nil grossiers (galets ou graviers). Ainsi le expliquent l’importance de la conti-
a un bassin versant immense mais, Huang He (appelé aussi fleuve Jaune) nuité écologique pour le maintien de
traversant des régions peu arrosées, en Chine doit sa très forte turbidité la biodiversité des bassins versants.
un débit à l’embouchure relativement au lœss qu’il arrache aux plateaux Cela explique également pourquoi le
faible (2 830 m3/s à l’entrée du delta) de son cours moyen. Avec 34  kg bassin versant est aujourd’hui consi-
et un débit spécifique peu important. de charge en suspension par mètre déré comme l’unité «  naturelle  » la
Les fleuves géants sont ceux qui com- cube d’eau, sa charge sédimentaire plus adaptée pour la gestion des
binent bassin versant étendu et débit représente trois fois celle du Colorado cours d’eau. Les organismes de
spécifique important, comme l’Ama- et plus de vingt fois celle du Nil. De bassin, sur le modèle des Agences
zone (209 000 m3/s à l’embouchure), façon générale, les cours d’eau en de l’eau en France (créées en 1964)
le Congo (42  000), le Yangzi Jiang région aride et semi-aride ont une se sont multipliés depuis une ving-
(34 000) ou encore le Gange (16 000). charge sédimentaire en suspension taine d’années, y compris pour les
Ces deux derniers sont des artères très importante, alors qu’elle est très grands fleuves transfrontaliers. Le
vitales pour des centaines de millions faible dans les régions équatoriales Réseau international des organismes
d’habitants, alors que les deux pre- et dans les régions tempérées, sauf de bassin (Riob) compte à ce jour
miers sont des « fleuves du vide ». dans les zones de montagne. Ainsi 134 membres venant de 51 pays.

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16 •
N om de l ’ auteur

Les eaux souterraines


Les eaux souterraines sont bien moins connues que celles des eaux de surface et leur estimation
précise est difficile. Elles forment la partie « invisible » du cycle de l’eau et représentent au moins
10 millions de km3. Selon les Nations unies, un quart de la population mondiale dépend des eaux
souterraines pour son approvisionnement quotidien. Ce sont des ressources au débit naturellement
stable, mais qui sont menacées par les pollutions et le surpompage.

De l’eau des sols une autre peut s’infiltrer plus pro- perméable est en contact avec la sur-
aux grands aquifères fondément et rejoindre les nappes face, et captive lorsque des couches
Les précipitations ne ruisselant pas phréatiques. imperméables recouvrent la roche per-
transitent d’abord dans le sol. On Dans ces dernières, l’eau est conte- méable. La contenance d’une nappe
appelle capacité au champ le volume nue dans les pores de la roche dite dépend de la porosité de la roche
maximal d’eau que peut retenir le sol. perméable. L’infiltration se poursuit et de l’étendue des couches géolo-
Ce stock est utilisé par le système verticalement jusqu’à ce que l’eau giques. Elle peut aller de quelques
racinaire des végétaux (réserve utile) : rencontre une roche imperméable, mètres cubes à plusieurs milliers de
une partie rejoint donc l’atmosphère qui constitue le plancher de la nappe. kilomètres cubes  : en Amérique du
par la transpiration des plantes, mais La nappe est dite libre quand la roche Sud, l’aquifère du Guarani s’étend

Les ressources mondiales par nappe aquifère

Océan
Atlantique
Océan
Pacifique

Océan
Indien
Océan
Pacifique

Sources : Whymap, 2006 ; Salomon, 2006 ; Margat, 2007.

01-96-Atlas mondial de l'Eau-NE-Maq4-BAT.indd 16 14/12/2021 10:58


UNE RESSOURCE IRREMPLAÇABLE • 17

sur quatre États (Brésil, Paraguay, La circulation karstique


Uruguay, Argentine) et contiendrait
près de 40 000 km3, pour une superfi- Amont cristallin
cie de 1,2 million de km2.
L’exploitation des eaux souterraines Vallée sèche Ouvala
Lapiés
dépend de deux facteurs majeurs  : Aven
la complexité des structures géo- Terra Rossa d’effondrement
logiques et la vitesse de recharge, Aven Perte
exprimée généralement en milli- Canyon
Doline Grotte
mètres par an. Dans les grands bas-
sins sédimentaires, comme le Bassin Ghour Source
parisien ou le Bassin aquitain, où les de trop-
plein
couches sédimentaires sont empilées
Stalagtite
de façon assez simple, les aquifères Relief
Colonne ruiniforme
peuvent être très importants et facile- stalagmitique
ment exploités. La ville de Bordeaux, Lac
souterrain Siphon Travertin
par exemple, puise la majeure partie
de son eau potable (150  millions de Stalagmite Éboulis
m3 par an) dans quatre nappes pro- Source

le
Fai l
fondes : on y boit ainsi l’eau de pluie s
aire
tombée sur le Périgord il y a plusieurs Calc nes
r
milliers d’années et qui a circulé dans Ma
les aquifères pour atteindre la Gironde. Cascade
souterraine
En revanche, l’exploitation des aqui-
fères complexes ou à recharge faible
peut se révéler vite problématique. Rivière
souterraine
Conception et réalisation : T. Auly.

Une ressource fragile : exemple de Fontaine-de-Vaucluse.


les karsts Ce phénomène affecte de nombreux
Bassin aquifère majeur Lorsque les pluies tombent sur des cours d’eau en milieu karstique : c’est
Recharge importante roches carbonatées (calcaire, craie, parfois en détectant une contamina-
(plus de 150 mm/an) dolomie, etc.), les eaux peuvent tion dans une résurgence et en iden-
Recharge moyenne sculpter des reliefs impressionnants tifiant sa présence qu’il a été possible
(de 15 à 150 mm/an) en surface et forment par disso- de compléter la cartographie d’un
Recharge faible lution des réseaux souterrains qui réseau karstique. C’est ainsi que le lien
(moins de 15 mm/an) s’étendent parfois sur plusieurs entre le Doubs et la Loue a été établi
centaines de kilomètres. Ce modelé en 1901, après l’incendie des usines
Bassin aquifère complexe karstique (du nom d’une région Pernod de Pontarlier situées sur le
(structure hydrogéologique) de Slovénie) se retrouve dans de Doubs, lorsque l’on retrouva, dans
Recharge importante nombreuses régions du monde, du ce qu’on croyait être une source, des
(plus de 150 mm/an) Périgord, où se situent les célèbres effluents de colorants et d’absinthe.
Recharge moyenne grottes de Lascaux, à la baie d’Along Les ressources karstiques se
(de 15 à 150 mm/an) au Viêt Nam, karst à tourelle, typique montrent aussi fragiles que les eaux
Recharge faible des climats tropicaux, ensuite ennoyé superficielles et souvent plus difficiles
(moins de 15 mm/an) par la remontée du niveau des mers. à traiter, car les sources de pollution
En surface, le réseau hydrographique sont parfois lointaines, diffuses et mal
n’est plus apparent, car les eaux connues. C’est le cas, par exemple,
Zone à bassins aquifères
locaux et superficiels s’infiltrent rapidement. Elles circulent de la nappe de la Craie en Normandie
alors dans les roches carbonatées et et en Picardie, polluée par des rejets
Grand fleuve forment de véritables réseaux hydro- industriels et urbains anciens, mais
graphiques souterrains. Ces eaux dont les effets sont encore percep-
Principaux lacs ressortent au contact de couches tibles aujourd’hui, et contaminée
imperméables et forment ainsi des par les pesticides et les engrais uti-
sources karstiques (exsurgences lisés actuellement par l’agriculture
ou résurgences)  : c’est le cas par intensive.

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18 •
N om de l ’ auteur

Hautes et basses eaux


Les ressources en eau d’un pays ou d’un bassin versant sont souvent exprimées
en moyennes annuelles, mais cela a, en fait, peu de sens pour la gestion réelle des cours
d’eau. Ce qui importe, c’est l’eau disponible à un moment donné. Ce débit instantané
est égal à la différence entre précipitation et évapotranspiration, pondérée par la
variation des réserves (nappes et lacs principalement).

Les types de régimes catastrophiques en automne et au montagne dans les Alpes.


Chaque cours d’eau suit un rythme printemps. Dans les deux cas, la dif- Bien entendu, il existe de nombreux
particulier déterminé par le rythme férence entre les hautes et les basses cas particuliers qui font varier ces
des précipitations et le fonctionne- eaux est forte. types selon la configuration du bas-
ment de son « terroir » hydrologique, Les cours d’eau en zone équatoriale sin versant, la possibilité de stockage
notamment des « réserves ». sont bien plus pondérés : pour l’Ama- dans un lac, ou encore la présence
Cependant, à l’échelle des grandes zone, la différence de régime entre d’aquifères qui peuvent soutenir le
zones climatiques, le premier fac- les deux mois extrêmes n’est que débit. Enfin, le coefficient mensuel de
teur est déterminant et permet de de 1 à 2, pour l’Ogoué à Lambaréné débit (CMD) ne peut suffire à montrer
définir des grands types de régime (au Gabon) de 1 à 3. De même, la toute la réalité hydrologique. Pour
hydrologique. pondération d’une rivière de climat calculer la pondération, on peut aussi
Ainsi, le régime tropical est marqué océanique, comme la Somme ou utiliser un calcul fondé sur le rapport
par les fortes pluies d’été et un étiage la Seine, est bien plus forte compa- entre les basses eaux (les dix jours les
très fort pendant l’hiver. C’est le cas rée aux cours d’eau méditerranéens plus « secs ») et les hautes eaux (débit
du Chari et du Brahmapoutre, que l’on comme le Guadalquivir. Le régime de dépassé en moyenne dix jours par
retrouve dans tous les cours d’eau de la Kolyma en Sibérie, et plus généra- an). Dans ce cas, la différence entre
la zone sahélienne, dont le Nil et ses lement des cours d’eau des hautes les cours d’eau de types océanique
affluents. Le régime méditerranéen latitudes, est influencé également et méditerranéen apparaît beaucoup
montre au contraire un creux mar- par les températures  : pendant les plus nettement : il est de 1 à 10 pour
qué pendant l’été, et deux périodes mois d’hiver, de novembre à avril, le les premiers (Seine à Paris), mais peut
de hautes eaux au printemps et en débit est quasiment nul à cause de la atteindre de 1 à 100 pour les seconds.
automne. Le cas du Guadalquivir rétention nivale et glaciaire, et devient Plus les réserves sont importantes,
est exemplaire, mais l’on retrouve très fort brutalement lors du dégel qui plus la différence entre les hautes
ce rythme dans tous les cours d’eau intervient en mai ou juin. On retrou- et basses eaux sera faible et plus le
du pourtour de la Méditerranée., vera le même type de fonctionnement régime d’un cours sera pondéré : sa
qui peuvent être sujets à des crues dans les petits cours d’eau de haute gestion sera a priori plus aisée.

Les grands types de régimes fluviaux


Continental-Hautes latitudes Océanique Méditerranéen
Kolyma à Srednekolymsk (Russie) Somme à Abbeville (France) Guadalquivir (Espagne)
5 CMD* 5 CMD* 5 CMD*
Débit moyen Débit moyen Débit moyen
4 2 242 m3/s 4 312 m3/s 4 435 m3/s

3 3 3

2 2 2

1 1 1

0 0 0
J F M A M J J A S O N D J F M A M J J A S O N D J F M A M J J A S O N D
* CMD : coefficient mensuel de débit : correspond au rapport entre le débit mensuel et le débit moyen annuel.

01-96-Atlas mondial de l'Eau-NE-Maq4-BAT.indd 18 14/12/2021 10:58


UNE RESSOURCE IRREMPLAÇABLE • 19
Le régime du Nil
Les crues du Nil
Le régime hydrologique
Damiette du Nil a laissé perplexes
Edfina de nombreux savants
Delta de l’Antiquité. Ils ne
Canal de
Le Caire la Paix comprenaient pas
Zifta 30 pourquoi la crue
survenait à la fin de
É GY P T E 25 l’été, alors que les
20 autres cours d’eau du
Assiout
bassin méditerranéen
L I BY E 15 étaient à leur niveau le
Naga Hammadi
Esna plus bas. Cela vient du
10 fait que le régime du Nil
Assouan
5 au Caire est lié au
Canal rythme des
de Touchka Lac 0 précipitations qui
J FMAMJ J A S ON D
(en construction) Nasser s’abattent sur les hautes
terres éthiopiennes de
ARABIE juin à octobre. C’est le
SAOUDITE

Me
25 Nil Bleu qui fournit
l
Ni Rumela et l’essentiel de la crue du

r R
20 Kajbar
Burdana Nil. Le Nil Blanc, dont le

o
régime est beaucoup
ug
15
At plus pondéré, soutient
10 Méroé b e le débit du fleuve

Sources : Mutin, 2000 ; Initiative du bassin du Nil ; FAONile ; Hydropower along the Nile, Geneva Water Hub.
ara

ÉRYTHRÉE pendant les mois d’hiver


5 Khartoum et de printemps. Sans
Kashm el-Girba
Nil

0 Jebel el-Aulia lui, le débit du Nil en


Ble

J FMAMJ J A S ON D Tekeze YÉMEN Égypte après sa


u

SOUDAN traversée du désert du


Sennar
Nil Blanc

Beles Sahara serait très faible.


Bassin versant du Nil Lac Tana Le Nil est un exemple
TCHAD Tis Abay Zone irriguée (Égypte)
de régime complexe,
Bah Région marécageuse avec des influences
r el-Gh Roseires Chemoga venant de climats
aza Yeda
l Grande ren. Canal différents. Il en est de
éthiopienne même pour de
RCA Finchaa Capacité des barrages (MW)
Canal de Jonglei nombreux autres grands
SUDD (en construction) 1 000 à 74 000 fleuves : ainsi, dans le
10 bassin du Rhône, le
ÉTHIOPIE régime alpin de l’Isère,
5 SOUDAN DU SUD 250 à 1 000
avec un maximum de
0 100 à 250 printemps, se combine
J FMAMJ J A S ON D
Lac Moins de 100 avec le rythme
OUGANDA Turkana Inconnue océanique de la Saône
RÉP. DÉM. DU CONGO Ayago Karuma Falls (maximum d’hiver) et
Lac Albert Barrage existant celui des affluents
Bujagali méditerranéens
Owen Falls Barrage planifié ou (maximum d’automne)
10 K E N YA en construction
pour donner un régime
5 Lac
Victoria Débit du Nil particulièrement
0 complexe et pondéré
RW. Lieu de mesure
J FMAMJ J A S ON D lorsque le fleuve se jette
Débit mensuel dans la Méditerranée.
400 km BU. (milliards de m3)

Tropical Tropical à mousson Équatorial


Chari à N’Djamena (Tchad) Brahmapoutre à Bahadurabad (Bangladesh) Amazone à Obidos (Brésil)
5 CMD* 5 CMD* 5 CMD*
Débit moyen Débit moyen Débit moyen
4 1 197 m3/s 4 19 331 m3/s 4 161 099 m3/s

3 3 3

2 2 2

1 1 1

0 0 0
J F M A M J J A S O N D J F M A M J J A S O N D J F M A M J J A S O N D
Sources : SHI et Unesco, 1999 ; WRI, Earth Trends.

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20 •
N om de l ’ auteur

Sécheresses et inondations
Plus encore que la différence entre hautes et basses eaux, l’alternance entre sécheresses et crues
est le facteur déterminant pour l’aménagement des cours d’eau, et généralement, plus la ressource
est faible, plus elle est variable. C’est pour lutter contre la variabilité qu’on a construit des grands
barrages, capables de stocker assez d’eau pour faire face à plusieurs années déficitaires
ou capables d’arrêter des crues centennales.

Les cycles d’hydraulicité : Congo, Niger et Murray


Crues, sécheresses et cycles
Le CONGO à Kinshasa Crues et sécheresses sont des phéno-
2 000 Débit annuel (km /an) 3

1 800 mènes exceptionnels à distinguer des


1 600 hautes et basses eaux, dont la récur-
1 400 rence est plus prévisible.
1 200
Les crues sont des gonflements occa-
sionnels du débit d’un cours d’eau,
1 000
caractérisées par leur période de
800
retour  : une crue dite décennale se
600
produira dix fois en cent ans. Une crue
400
centennale se représentera statisti-
200 quement dix fois en mille ans. Elle peut
0
1920 1930 1940 1950 1960 1970 1980 1990 2000 ainsi se produire deux ans de suite ou
pas du tout pendant deux cents ans.
Le NIGER à Koulikoro Ainsi, le Rhône a connu deux crues
70 Débit annuel
65 (km /an)
3 majeures en 1840 et 1856, pendant les-
60 quelles le débit à Beaucaire a dépassé
55 11 300 m3 par seconde – soit le débit
50 de pointe pour une crue centennale –,
45
40 alors que son débit moyen annuel n’est
35 que de 1 700 m3 par seconde. Et ce
30 n’est qu’en 2003 que ce débit a de
25
nouveau été atteint, avec, comme dans
20
15 les deux grandes crues précédentes,
10 des conséquences catastrophiques.
5 Dans tous les cas, c’est le débit de
0
1910 1920 1930 1940 1950 1960 1970 1980 1990 2000 pointe, exprimé en m3/s et traduit en
hauteur d’eau à un point précis, qui est
4,5 Débit annuel (km3/an) La MURRAY à Morgan le facteur déterminant.
Les sécheresses connaissent aussi des
4 périodes de retour dont la caractérisa-
3,5 tion est plus complexe. La sécheresse
peut être définie comme le manque
3
d’eau, pour une quantité donnée face
2,5 à des besoins précis dans l’espace
2 et dans le temps. On parle ainsi de
sécheresse pédologique quand la
1,5
réserve utile des sols est épuisée, de
1 sécheresse phréatique lorsque les
0,5 nappes s’épuisent et n’alimentent
0
plus les sources et les puits, et enfin
1900 1910 1920 1930 1940 1950 1960 1970 1980 1990 2000 2010 de sécheresse potamologique quand
Sources : SHI ; Unesco, 1999 ; Murray Darling Bassin Authority. le débit des cours d’eau tend lui aussi

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UNE RESSOURCE IRREMPLAÇABLE • 21

vers zéro. Les grands barrages, digues précipitations dans la région sahé- de rendre compte de la cause de ces
et autres aménagements hydrauliques lienne. Un épisode particulièrement fluctuations. Cela rend difficile l’inter-
sont généralement conçus pour résis- sec d’une trentaine d’années, de 1968 prétation des évolutions actuelles du
ter à des épisodes qui ont une période à 1994, a été précédé par une période lac, où les facteurs anthropiques et
de retour de quelques décennies. Ils plus humide, de durée équivalente. Il naturels sont mêlés.
sont souvent pris en défaut par des est encore trop tôt pour savoir si la Mais cette incertitude doit égale-
épisodes qui ont une période de retour reprise récente des précipitations ment nous inciter à la plus grande
supérieure. depuis quelques années marque le prudence dans l’aménagement des
retour d’une nouvelle période humide. cours d’eau. L’exemple du Colorado,
Des cycles plus complexes De façon générale, nos connaissances aux États-Unis, le montre : les eaux
que d’autres sur les cycles d’hydraulicité restent du fleuve ont été partagées entre les
Les grands cours d’eau, notam- encore parcellaires. Par exemple, s’il États du sud-ouest en 1922, après
ment dans les régions tropicales, a été possible de reconstituer l’évo- une période particulièrement humide,
connaissent des fluctuations bien lution du lac Tchad, avec l’alternance en se basant sur des estimations trop
marquées, dont les causes et le de phases d’expansion et de périodes optimistes. Aujourd’hui, alors que le
rythme restent mal connus. Le cycle où le lac avait presque complètement débit est bien plus faible, cela génère
du Niger reflète ainsi les cycles de disparu, aucune explication ne permet de nombreux conflits.

Le phénomène El Niño et ses effets


El Niño
Situation Le phénomène El Niño
« normale » est la plus célèbre
Courant jet polaire des oscillations
climatiques entraînant
Océan Océan un changement brutal
des conditions
Pacifique Atlantique météorologiques.
Tropique du Cancer Ce phénomène, qui
apparaît autour de
Courant jet subtropical Noël (d’où son nom
en espagnol,
l’« Enfant-Jésus »),
est une perturbation
Équateur Eau chaude de la circulation
générale des courants.
Normalement, le
Océan Eau courant froid venu du
froide sud, dit de Humboldt,
Indien
accompagné de
Tropique du Capricorne remontées d’eaux
Fort courant profondes très froides,
de Humboldt l’upwelling, longe
la côte péruvienne
et poursuit ensuite
Courant chaud Courant froid sa route vers l’ouest,
Région plus chaude où il se réchauffe.
« El Niño » que la normale Exceptionnellement,
une à deux fois par
décennie en moyenne,
les courants
s’inversent et ce sont
Eau Océan
chaude des eaux chaudes
Atlantique venant de l’est du
Région plus humide Pacifique qui arrivent
que la normale sur le littoral de
Tropique
du Cancer l’Amérique du Sud,
causant des
Océan Pacifique
inondations
catastrophiques.
Cette inversion
Eau Équateur provoque des
chaude changements
climatiques brutaux
dans tout le Pacifique
Région plus et plus largement
sèche que la normale Tropique dans tout l’hémisphère
Courant du Capricorne austral.
Océan de Humboldt
Indien faible

Sources : Diercke Weltatlas, 2008 ; Cousteau et Vallette, 2007 ; CNES, 2000.

01-96-Atlas mondial de l'Eau-NE-Maq4-BAT.indd 21 14/12/2021 10:58


22 •
N om de l ’ auteur

Des milieux riches et variés


Les milieux aquatiques et amphibies sont d’une grande richesse biologique. La diversité
des styles fluviaux (à méandre, en tresse, en anastomose), des substrats (sable, gravier, roches),
du type de végétation et la variation du niveau des eaux donnent naissance à une véritable
mosaïque de milieux, juxtaposés dans un espace restreint et porteurs d’une très forte biodiversité.
Ces écosystèmes sont généralement très productifs.

Un fort endémisme, le Rhône et le Rhin), mais le retour de ainsi le lac Tonlé Sap (Cambodge),
une ressource importante certaines espèces emblématiques qui sert de déversoir au Mékong,
La séparation naturelle entre les dif- comme le saumon est un bon mar- fournit jusqu’à 200  000  tonnes de
férents bassins versants favorise queur de l’amélioration de la qualité poisson par an, soit 80  % de l’ap-
l’endémisme. L’Amazone comporte des eaux. port en protéines, aux 14 millions de
plus de 3 000 espèces de poissons, La pêche dans les lacs et les cours Cambodgiens.
dont 1  800 endémiques  ; le Congo, d’eau constitue une ressource de
700 espèces dont 500 endémiques. protéines vitale pour les populations L’hydrosystème
Les rivières européennes sont compa- riveraines dans les pays du Sud. La Les cours d’eau forment un milieu
rativement moins riches (43 espèces productivité des eaux continentales complexe où des éléments (plantes,
pour la Loire et une soixantaine pour en poisson peut s’y révéler forte  : poissons, animaux aquatiques,

Diversité des espèces de poissons

Amour
Danube
Mississippi Huang He
Colorado
Indus
Chang Jiang
Gange
Rio Grande Sénégal
Mékong
Niger
Orénoque
Brahmapoutre
Magdalena Amazone
Volta

Congo
Zambèze
La Plata

Nombre d’espèces de poissons


par bassin versant
De 700 à 3 000
De 500 à 699
De 250 à 499
De 100 à 249
Moins de 100 Pas de données
Sources : WRI, Earth Trends, 2005.

01-96-Atlas mondial de l'Eau-NE-Maq4-BAT.indd 22 14/12/2021 10:58


UNE RESSOURCE IRREMPLAÇABLE • 23
SCHÉMA D’UN BASSIN VERSANT
Un bassin versant

Ligne de partage des eaux


et limite du bassin versant
Stock
neigeux
Sous-bassin versant Précipitations

Sous-bassin
versant C o u r s d ’ eau t r ibu
t ai
re

s
Sous-bassin Zones
versant
agricoles Sous-bassin
versant
Lac

i pa
p r i nc
Zone ripisylve Ville
rs
u

Infiltrations
Co
Nappe
phréatique
Source
Infiltrations
Zone
humide

Mer
Nappe
phréatique

22-23_BassinVersant
roches et eau) de différentes tailles parties de l’hydrosystème. La diver- fonctionnent comme les « reins » du
sont étroitement reliés par des pro- sité des milieux et leurs interactions cycle hydrologique, ralentit la conta-
cessus physiques, chimiques et bio- forment une « mosaïque fluviale » qui mination des milieux et leur permet
logiques. Ces éléments s’emboîtent explique la forte biodiversité. de « récupérer » après une pollution.
à différentes échelles, du microha- Au contraire, dans les zones arides
bitat de quelques mètres carrés (un Vulnérabilité, endoréiques, la résistance et la rési-
système racinaire) au secteur de plu- résistance, résilience lience sont faibles  : la dilution des
sieurs milliers de kilomètres carrés Les hydrosystèmes sont à la fois polluants est difficile et les perturba-
(une plaine à méandre). vulnérables, résistants et résilients. tions s’accumulent dans l’exutoire où
Le terme d’hydrosystème désigne Leur vulnérabilité est due à leur com- ils ne sont pas dispersés, processus
cet ensemble d’interactions qui se plexité : une modification d’un élément qui expliquent en partie la tragédie
déploient dans quatre dimensions. La entraîne des perturbations en cascade, de la mer d’Aral. Mais, dans tous les
première, la plus évidente, est le lien avec des effets en retour pour tous les cas, lorsque des seuils sont franchis
entre l’amont et l’aval, avec un rapport autres, que l’on appelle boucles de (trop de barrages, trop de pollutions),
de dépendance marqué. La seconde rétroaction. La résistance et la rési- les capacités de résistance et de rési-
est transversale, avec le passage pro- lience sont liées à la fois à leur taille et lience peuvent être annihilées : le fonc-
gressif entre les milieux secs et les à leur capacité d’auto-épuration. tionnement des hydrosystèmes, dans
milieux humides. La troisième renvoie Ainsi un grand lac ou des nappes toutes ses dimensions, est alors altéré,
à la superposition verticale des éco- profondes seront moins rapidement avec des conséquences néfastes sou-
systèmes de surface et souterrains. atteints par des polluants qu’un petit vent imprévues (le fonctionnement
Et enfin, la dimension temporelle cours d’eau superficiel. De même, des boucles de rétroaction reste peu
rappelle l’évolution différenciée des la présence de zones humides, qui connu) et irréversibles.

01-96-Atlas mondial de l'Eau-NE-Maq4-BAT.indd 23 14/12/2021 10:58


24

EN
ENCONCLUSION
CONCLUSION
Une
Uneressource
ressource
irremplaçable
irremplaçable
Une ressource unique
Une ressource
Principal constituant unique
des êtres vivants (le
corps humainconstituant
Principal est composé desaux deux
êtres tiers (le
vivants
d’eau),
corps l’eau,
humain ressource
est composé fragileaux et deux
vitaletiers
pourd’eau),
les écosystèmes
l’eau, ressource terrestres, possède
fragile et vitale
des pour caractéristiques
les écosystèmes remarquables. Ses
terrestres, possède
propriétés chimiques en font
des caractéristiques un support Ses
remarquables.
indispensable
propriétésàchimiquesla vie. Son rôle en fontmajeurun dans
support
les processus
indispensable d’érosion,
à la vie chimique et méca-
et, couplées à son
nique, lui donnent
action mécanique, un rôle prééminent
lui donnent un dans
rôle pré-
le façonnement
éminent dans des le paysages
façonnement terrestres.
des paysages
terrestres.
Une ressource à protéger
Il estUne ressource
possible à protéger
de substituer le charbon par le
pétrole,
Il estlepossible
pétrole de parsubstituer
le gaz oulel’électricité,
charbon par le
maispétrole,
rien nelepeut remplacer
pétrole par le l’eau.
gaz ouSil’électricité,
la res-
sourcemais estrien ne peut
polluée, remplacer
rendue impropre l’eau.
pourSi les
la res-
usagessource humains
est polluée,
ou toxiques
rendue pourimpropre
les éco-
pour les
systèmes,
usagesil humains
faut investir ou des sommes
toxiques pourconsi-
les éco-
dérables
systèmes,et attendre parfoisdes
il faut investir dessommes
décennies consi-
pourdérables
en profiter à nouveau,
et attendre sans des
parfois être décennies
même
sûr d’y
pour parvenir.
en profiter Même si les hydrosystèmes
à nouveau, sans être même
ont une
sûr d’ycapacité
parvenir.d’auto-épuration et de rési-
Même si les hydrosystèmes
lienceontquiuneleur permetd’auto-épuration
capacité de résister jusqu’à et deunrési-
certain
liencepointqui aux
leur pollutions,
permet de leur protection
résister jusqu’à un
est devenue
certain point un enjeu majeur desleur
aux pollutions, politiques
protection
publiques
est devenuealors que les pressions
un enjeu majeur des sur lapolitiques
res-
source s’accentuent.
publiques alors que les pressions sur la res-
source s’accentuent.

01-96-Atlas mondial de l'Eau-NE-Maq4-BAT.indd 24 14/12/2021 10:58


25

Mobiliser
et utiliser l’eau
Il est relativement aisé de calculer le volume d’eau disponible
par habitant pour tous les pays du globe. Mais il est
beaucoup plus difficile de mesurer la capacité des États
à mobiliser la ressource. Pour amener l’eau là où on
en a besoin, quand on en a besoin, il faut posséder des
savoir-faire techniques et des capacités financières
suffisantes, mais aussi faire preuve d’une réelle volonté
politique. C’est cette capacité à mobiliser la ressource
qui est déterminante pour comprendre les grands enjeux
actuels liés à l’eau. Certains pays très « pauvres en eau »,
comme Israël, Malte ou Singapour, réussissent à pourvoir
aux besoins en eau potable de toute leur population et
connaissent un développement économique rapide. D’autres,
qui possèdent pourtant des ressources très abondantes, sont
dans des situations difficiles. Au Mozambique par exemple,
où les ressources par habitant sont trois fois supérieures à
celles de la France, à peine plus de la moitié de la population
dispose d’un accès minimal à l’eau potable.

01-96-Atlas mondial de l'Eau-NE-Maq4-BAT.indd 25 14/12/2021 10:58


26 •
N om de l ’ auteur

Des États inégalement dotés


Pour apprécier les ressources renouvelables dans un endroit donné, un premier indicateur simple
consiste à diviser le volume d’eau par le nombre d’habitants, en prenant comme base des unités
administratives ou des bassins versants. Pour identifier des zones à risque, des seuils de
vulnérabilité, de stress et de pénurie ont été fixés arbitrairement par l’hydrologue suédoise
Malin Falkenmark à respectivement 2 500, 1 700 et 1 000 m3/hab./an.

Un indice parlant, Maldives (58) ou Malte (115). d’autres où la situation est plus difficile
mais discutable Une ceinture de la pénurie se des- (Danemark 1 043 ; République tchèque
Au niveau mondial, quelques États sine du Maroc au Pakistan, avec une 1 232).
disposent de ressources extrêmement extension qui descend le long de la Certaines situations peuvent paraître
abondantes : le Brésil (41 300 m3/hab./ façade orientale du continent africain. paradoxales. Elles s’expliquent souvent
an), la Russie (31  000) et le Canada En revanche, les Amériques appa- par la maille spatiale. Ainsi, la Namibie,
(78 000). À l’inverse, certains pays ont raissent relativement bien dotées, tout largement désertique, a une disponi-
des ressources quasi nulles : c’est le comme les États qui bordent le golfe bilité élevée (16 300) grâce à l’impor-
cas du Koweït (5) et, plus largement, de Guinée. En Europe, la situation est tance des fleuves frontaliers que sont
de tous les États de la péninsule ara- contrastée entre des États richement l’Orange, la Cunene et l’Okavango,
bique, de certaines îles comme les dotés (Norvège 73 600 m3/hab./an) et qui coulent respectivement sur ses

La ressource en eau douce dans le monde


Source : FAO, Aquastat, 2020.

Ressource en eau douce par État en 2018


(m 3/habitant/an)

1 000 1 700 4 000 10 000 40 000

Pénurie Stress Pas de données

01-96-Atlas mondial de l'Eau-NE-Maq4-BAT.indd 26 14/12/2021 10:58


MOBILISER ET UTILISER L’EAU • 27

frontières sud, nord et est. De même, la rive nord ont globalement des res-
L’indice de Falkenmark en Afrique
l’Australie présente officiellement des sources abondantes (18 400 m3/hab./
ressources abondantes (19  760  m3/ an pour la Serbie, plus de 6 500 pour
hab./an), mais celles-ci sont concen- la Grèce), alors que les pays de la rive
trées essentiellement dans l’extrême sud sont tous en dessous du seuil de
nord et la frange orientale de l’île-conti- stress, avec des situations critiques en
nent. Les mêmes disparités internes Libye (104), Algérie (276) ou Tunisie
affectent les États-Unis, la Chine et (399). Il n’est dès lors pas étonnant
même le Brésil. La ressource en France que les projets de coopération entre
est estimée à environ 3 250 m3/hab./ les deux rives insistent sur l’impor-
an, mais atteint 5 400 dans le bassin tance de la gestion des ressources en
versant du Rhône contre 1 400 dans eau. Mais, comme partout, ces chiffres
celui du Rhin. bruts peuvent cacher des situations
Enfin, il n’y a aucun lien entre le niveau très différentes et doivent être inter-
de développement et la disponibilité en prétés avec précaution. Indice de Falkenmark
eau : on trouve des pays développés et Il en est ainsi pour l’Afrique, où les + 1 Plus de 10 000 m3/hab./an :
des pays pauvres dans les situations situations les plus difficiles ne se ressources insuffisantes
potentielles de pénurie (Singapour situent pas forcément là où le laisse 2 De 1 700 à 10 000 m3/hab./an :
présence de problèmes
et le Burkina Faso) comme dans les entendre la simple vision de l’indice en saison sèche
situations d’abondance (la Nouvelle- proposé par Malin Falkenmark. Ainsi
3 De 1 000 à 1 700 m3/hab./an :
Zélande et le Laos). les pays du Sahel apparaissent selon Situation de stress hydrique
cet indice en relativement bonne posi-
4 De 500 à 1 000 m3/hab./an :
La situation en Méditerranée tion, alors que les ressources sont très état de déficit absolu
et en Afrique inégalement réparties sur le territoire et
– 5 Moins de 500 m3/hab./an :
Autour de la Méditerranée, l’opposition qu’elles sont marquées par une forte « Water Barrier », aucune
nord/sud est très marquée : les pays de variabilité. possibilité de développement
Source : FAO Aquastat, 2012.

La ressource en eau douce dans le bassin méditerranéen

CROATIE
FRANCE SLOVÉNIE BOSNIE-
HERZÉGOVINE

N o i r e
e r
M Limite du bassin
SERBIE
méditerranéen
ESPAGNE ITALIE
TURQUIE

GRÈCE
ALBANIE
SYRIE

CHYPRE LIBAN

MALTE ISRAËL
r r a n é e
MAROC r M é d i t e Territoires
ALGÉRIE TUNISIE M e palestiniens

LIBYE
Source : FAO, Aquastat, 2020.

Ressource en eau douce par État en 2018 Stock d’eau par État en 2018
ÉGYPTE
(m 3/habitant/an) (km 3)
211
100
1 000 1 700 4 000 15 000 24 000 50
10
Pénurie Stress Absence de données 1 300 km

01-96-Atlas mondial de l'Eau-NE-Maq4-BAT.indd 27 14/12/2021 10:58


28 •
N om de l ’ auteur

Des capacités de mobilisation


très différentes
Les chiffres bruts de disponibilité en eau par habitant ne donnent qu’une vision schématique des
problèmes potentiels liés à l’eau. Ils doivent être pondérés par la faculté d’adaptation des différents
États à leur situation hydrologique naturelle. Cette capacité à « produire » de l’eau utilisable par les
consommateurs là où ils en ont besoin et quand ils en ont besoin est plus difficile à appréhender.

L’indice de pauvreté en eau (IPE) (Royaume-Uni) ont proposé un nouvel notamment pour les usages domes-
Il est difficile d’estimer la capacité indicateur en 2002 : le Water Poverty tiques, mais aussi pour les possibilités
des États à construire des ouvrages Index (indice de pauvreté en eau, IPE), d’irrigation ou d’accès à l’eau «  vir-
hydrauliques ou à fournir une eau qu’ils ont affiné les années suivantes. tuelle » ; l’utilisation, sa répartition par
de qualité à toute leur population. Certes imparfait, il permet cependant domaine et son efficacité ; la capacité
Cela dépend de la richesse du pays, de mettre en lumière la diversité des d’adaptation, comprenant la dépense
mais aussi de l’état de la ressource, situations lorsque l’on parle de pénu- des ménages, le PIB par habitant, la
des choix politiques, des structures rie d’eau. mortalité infantile, les investissements
sociales. La Banque mondiale utilise L’IPE varie de 0 à 100, prenant en dans le domaine de l’eau ou encore
en première approximation le PIB. considération cinq facteurs  : l’état l’existence de lois et d’institutions
Les chercheurs du Centre for Ecology de toutes les ressources, en tenant appropriées  ; l’environnement, les
and Hydrology de Wallingford compte de la variabilité ; l’accessibilité, besoins en eau pour la sauvegarde des

L’indice de pauvreté en eau dans le monde


Sources : Center for Ecology and Hydrology, Natural Environment Research Council.

Indice de pauvreté en eau par État


68 à 78 Faible (situation bonne) L’Indice de pauvreté en eau
est construit à partir de cinq faisceaux
62 à 67,9 Moyen à faible (situation satisfaisante) d’indicateurs :
56 à 61,9 Moyen (situation moyenne) - présence et qualité de l’eau ;
48 à 55,9 Important (situation difficile) - accessibilité ;
- types de gestion ;
35 à 47,9 Critique (situation critique) - types d’utilisation ;
Données manquantes - respect de l’environnement.

01-96-Atlas mondial de l'Eau-NE-Maq4-BAT.indd 28 14/12/2021 10:58


MOBILISER ET UTILISER L’EAU • 29
L’indice de pauvreté en eau
Comment calcule-t-on l’IPE Des situations
contrastées
Ressources L’intérêt de l’IPE est qu’il
Critères Chaque critère est évalué
de l’indicateur 20 par une note sur 20. permet de distinguer des
La somme de ces cinq notes pays ayant des indices
donne l’Indice de pauvreté globaux semblables.
15 en eau (sur 100) Ainsi, le cas d’Israël et
celui du Cameroun sont
opposés, alors que leur
t

IPE global est presque


en

10

Ac c e
nem

similaire. Seule
d’en Qualit é

l’indigence des

ssib
Finlande
viron
20

20
ressources d’Israël

ilit é
5
15

15
explique que son IPE
10

10
se situe bien en deçà de
Israël
celui des autres pays
5

5
développés ;
5 l’accessibilité et la
5 Niger
capacité d’adaptation
y sont du même ordre.
10 En revanche, les
10 Cameroun
ressources du Cameroun
sont relativement
15
15 élevées, mais la capacité
de ce pays à les
20 mobiliser est faible.
Ut 20
ilis cit é n Deux autres cas de
ati pa tio
on Ca ap t a figure se présentent.
d Sources : Center for Ecology and Hydrology, Le premier est celui
d’a Natural Environment Research Council. de la Finlande, où tous
les indicateurs sont
L’IPE en Afrique du Sud positifs et qui a donc
R l’IPE le plus élevé (78).
20 À l’opposé, le Niger
cumule à la fois des
ressources faibles et
15 des difficultés techniques
et financières pour
10 Wembezi Quartier formel urbain les mobiliser.
IPE : 63,2 L’IPE peut aussi être
E A calculé à des échelles
5
plus fines. Ainsi, comme
Wembezi Quartier informel urbain
le montre l’exemple
IPE : 40,1 sud-africain, il peut varier
fortement, dans une
Ethembedi Village rural même région, entre
IPE : 43,1 zones urbaines et
rurales, et également
selon le niveau de
KwaLatha Village rural développement, entre
IPE : 26,5 quartiers formels et
informels.
U C Source : Sullivan et Meigh, 2007.

habitats, la pollution de l’eau, l’érosion compensent par une capacité d’adap- la volonté politique de produire de
des sols et le risque de crue. Chaque tation forte. l’eau, au prix parfois de désastres
critère se voit attribuer une note de 0 Ainsi l’ouest des États-Unis est la environnementaux.
à 20. Le total est donné sur 100. Plus preuve qu’avec des ressources très En revanche, l’IPE fait ressortir la
l’indice est bas, plus la situation est faibles, mais des investissements situation difficile des pays africains,
critique. financiers importants et l’utilisation qui est liée tout autant au manque
Certes imparfait, l’IPE permet cepen- des techniques les plus modernes, de ressource qu’à la difficulté à la
dant de mettre en lumière la diversité la pénurie d’eau peut être artificielle- mobiliser. Seuls les pays du Sud où
des situations lorsque l’on parle de ment « résolue ». Les pelouses de Los les ressources sont particulièrement
pénurie d’eau. Angeles ou les fontaines de Las Vegas importantes, notamment en Amérique
en sont le symbole le plus marquant. latine, parviennent à avoir un IPE élevé.
Des inégalités marquées De même, les pistes de ski construites Cela ne signifie pas pour autant qu’ils
Sur le planisphère de l’IPE, les pays dans les émirats du Golfe, où la res- ne connaissent pas de problèmes liés
développés apparaissent dans une source est presque nulle, illustrent à à l’eau, mais plutôt qu’avec des inves-
situation plus favorable que selon l’extrême que la pénurie d’eau ne se tissements suffisants et des politiques
l’indice de Falkenmark. Même ceux conçoit que relativement à la capa- adaptées, leurs problèmes sont poten-
qui ont des ressources brutes limitées cité technique et économique et à tiellement résolubles.

01-96-Atlas mondial de l'Eau-NE-Maq4-BAT.indd 29 14/12/2021 10:58


30 •
N om de l ’ auteur

Une mise en valeur ancienne


La maîtrise de l’eau est un souci très ancien. Les premiers puits datent d’au moins 8 000 ans avant
notre ère, les premières traces d’agriculture irriguée du cinquième millénaire avant notre ère en
Mésopotamie, et du troisième millénaire dans les Andes et dans la vallée de l’Indus. Ces innovations
sont souvent nées dans des régions où les ressources en eau étaient peu abondantes et où les
précipitations pouvaient faire défaut, puis progressivement diffusées à l’ensemble du globe.

La diffusion des innovations de conquêtes militaires, et enfin l’ap- Chine est toujours utilisé, les aque-
Les grandes civilisations de l’Anti- propriation et l’amélioration dans des ducs romains encore partiellement
quité, de l’Égypte à la Chine, jusqu’à foyers secondaires, avec parfois un debout, la continuité de l’irrigation
la Rome antique, se fondaient sou- retour au point d’origine. dans la vallée du Nil, même si les
vent sur une maîtrise poussée des Dans l’Antiquité, la technique de techniques ont changé, s’étend sur
ressources en eau, pour l’agriculture, l’aqueduc, très ancienne et perfec- plus de cinq mille ans. Cet exemple de
le creusement de canaux à voca- tionnée dans les cités grecques, se développement durable sera-t-il égalé
tion commerciale (le Grand Canal diffuse ainsi au rythme des armées par les ouvrages contemporains ?
en Chine) ou la construction d’aque- romaines  ; conservée dans l’est de
ducs pour alimenter les populations la Méditerranéenne, elle est reve- Les qanats
urbaines (les aqueducs romains). nue en Espagne avec la conquête La technique des qanats (ou galeries
Il existe au moins sept grands foyers musulmane. À la Renaissance, les drainantes, appelées aussi karez en
d’innovation –  le bassin méditer- barrages modernes, à partir des Asie centrale, khettara ou foggara au
ranéen, l’Asie centrale, la foyers ibériques et perses, se sont Maghreb) est probablement née dans
Mésopotamie, l’Inde et le Sri Lanka, répandus d’abord dans tout le bassin l’Empire perse il y a au moins 3 000 ans.
la Chine, les Andes et l’Amérique méditerranéen, puis dans les grands Le système repose sur un tunnel qui
centrale  – qui ont ensuite diffusé empires coloniaux. Les ingénieurs capte les eaux d’une nappe phréa-
leurs techniques. Toutes les grandes hydrauliciens britanniques faisaient tique en amont (dans les sédiments
découvertes hydrauliques ont connu ainsi le tour de l’Empire, appliquant meubles des piémonts des chaînes
trois phases : l’invention proprement en Afrique du Sud ou en Australie de montagne) et les conduit jusqu’aux
dite, l’adoption par une «  grande ce qu’ils avaient vu en Égypte ou en oasis situées dans les zones déser-
civilisation  » qui la diffuse dans son Inde. tiques de plaine. La pente du tunnel
aire de rayonnement, à la faveur Ces constructions anciennes sont d’un diamètre d’environ un mètre est
d’échanges commerciaux mais aussi remarquables  : le Grand Canal en calculée pour que les eaux s’écoulent
suffisamment rapidement, mais sans
Les qanats, galeries drainantes fragiliser les parois. Des regards sont
placés à intervalles réguliers pour
Coupe transversale
accéder au tunnel  : c’est la seule
Puits Puits secondaires marque visible en surface du qanat.
principal pour l’excavation
et la maintenance Village Depuis l’Iran (où il en existe encore
Champs 21  000), la technique s’est diffusée
Débouché
du canal dans toute l’Asie centrale, l’Arabie et
en Afrique du Nord. Les plus grands
mesurent 50 km et sont profonds de
Canal
Toit de Terrains alluviaux près de 300  m. Ces ouvrages sont
la nappe
p hré atique conçus pour ne pas surexploiter la
Socle rocheux nappe phréatique et ils ont permis
le développement d’oasis, notam-
Vue de haut ment le long de la route de la Soie,
pendant des millénaires. Ils sont
aujourd’hui remplacés par des pom-
pages qui pourraient épuiser très vite
la ressource.
Source : La documentation photographique, n°8078.

01-96-Atlas mondial de l'Eau-NE-Maq4-BAT.indd 30 14/12/2021 10:58


MOBILISER ET UTILISER L’EAU • 31
Les grandes civilisations hydrauliques
Antiquité
Ouzbékistan

Océan

Me
A t l a n t i qu e
Arménie

rC
Mer Noire
Ier-Ve

asp
Constantinople

i en
Rome Ier s. IIIe-VIe Hittites

ne
XIIIe av. J.-C. Ourartou
VIIIe-VIIe av. J-C
Mycènes
XIIIe av. J.-C.
Assyrie
VIIIe-VIIe av. J-C
Mérida
Ier-IIIe IIe s.
Mer Méditerranée
Babyloniens Suse
XXIe-VIe av. J.-C.

Nabatéens
IIIe av. J.-C.-Ier s.

Foyers technologiques
Technologie de la dérivation Nabatéens et Juifs

Me
Hydraulique grecque Foyer sassanide Hydraulique romaine

rR
oug
Barrages Pré-romain Romain Sassanide

e
500 km
Diffusion Romaine Nabatéenne et juive Byzantine

Moyen Âge et époque moderne 500 km


Suède
XVIe-XVIIIe Russie
XVIIe-XVIIIe
Mer
du Nord Mer
Baltique

Angleterre
XVIIe-XIXe
Harz
XVIe-XVIIIe

Slovaquie
Ouzbékistan
Océan XIXe XVIIIe XVIe-XVIIIe
Atlantique Roumanie XVIIIe
XVe
Me

XVIIe XVIIe-XVIIIe
Mer Noire
rC
asp
i en
ne

XIIIe

Levant
XIVe-XVIIIe
Technologie
islamique
Mer Méditerranée VIIe-XIIIe

Delta du Nil

Foyers technologiques
Technologie islamique Foyer hispanique chrétien Foyer nord-méditerranéen Foyers proto-industriels européens
Barrages XIII e
- XIX siècles
e
XVI e
- XIX siècles
e

Diffusion
Technologie islamique Technologie européenne Influences intra-européennes Source : Bravard, 2002.

01-96-Atlas mondial de l'Eau-NE-Maq4-BAT.indd 31 14/12/2021 10:58


32 •
N om de l ’ auteur
Churchill Falls

Les techniques
Caniapiscau

Jenpeg
Bennett
La Grande

modernes Kenney
Mica
Fort Peck
Garrison
Ear Falls

Lake Oahe

La révolution industrielle a introduit un changement d’échelle Glen Manicouagan


dans les techniques hydrauliques : ce sont toujours des barrages, Canyon Daniel-Johnson
des canaux, des aqueducs, mais leur taille, leur longueur n’ont plus Hoover
rien de comparable avec les plus imposants ouvrages des grandes
civilisations hydrauliques antiques : il est possible de retenir l’équivalent
de trois crues du Nil ou de détourner des fleuves sur des centaines
de kilomètres en franchissant des montagnes. Guri
Brokop
T
Les très grands barrages multiples » servent pour l’agriculture,
Les premiers très grands barrages l’hydroélectricité, la régulation des
datent des années 1930  : Hoover sécheresses et des crues ou l’alimen-
Dam sur le Colorado (1935, 35 km3) tation des villes).
et Rybinsk sur la Volga (1935-1947, Dans les années 1950 à 1970, une
25 km3). Ces ouvrages dits « à buts deuxième génération de grands
Planicie Banderita
Le dessalement Piedra Del Aguila

Source : Aquastat, 2014, 2020.


El Chocón
Bassin méditerranéen 600 km

Italie

Espagne barrages apparaît dans les pays


Grèce Turquie du Sud, notamment en Afrique  :
l’exemple type est celui d’Assouan
Liban
(1970, 162  km3), mais Akosombo
Malte
Maroc Tunisie Chypre (1965, 148  km3) ou Kariba (1959,
160 km3) ne sont pas moins impres-
Algérie
Israël sionnants. Objet de nombreuses cri-
tiques, moins de grands barrages ont
Libye Égypte été construits dans les années 1990 et
2000. Mais ils retrouvent aujourd’hui
Péninsule Arabique Usine de dessalement la faveur de pays en développement,
Eau dessalée produite par an, grâce à la production hydroélec-
Irak Iran par pays en 2018 trique, comme le montre le barrage
Jordanie (millions de m3) de Grande Renaissance en Éthiopie.
Koweït
Bahreïn 2 000
Qatar La « mission hydraulique »
É-A-U 600 La mise en œuvre d’un grand projet
200 d’aménagement hydraulique est le fruit
Arabie 50
saoudite de la rencontre entre un savoir-faire
10
technique, une volonté politique et des
capacités d’investissement.
Oman Au début du xxe siècle, ces trois élé-
ments étaient réunis en Europe et
Sources : « Sustainable Water for the Future: Water
aux États-Unis. La Tennessee Valley
Recycling versus Desalination », Sustainability Authority (TVA), créée le 18 mai 1933,
Science and Engineering Volume 2, 2010 ;
750 km FAO, Aquastat, 2020. en constitue le parfait exemple. Premier

01-96-Atlas mondial de l'Eau-NE-Maq4-BAT.indd 32 14/12/2021 10:58


MOBILISER ET UTILISER L’EAU • 33

hill Falls Les grands barrages


scau Ust-Khantaika
Vilyui
Verkhne-Svirskaya Kouïbychev Krasnoïarsk
Rybinsk Ust-Ilim Zeïa
S.-Shushenskaya Bratsk
Volgograd
Boukhtarma Irkoustk
Kakhovla Tsimliansk Kapchagay
Keban
Longyangxia Shuifeng
Ataturk
uagan Danjiangkou
Johnson Wadi-Tharthar
Trois-Gorges
Razzaza Xin´anjiang
Assouan Xinfengjiang
Longtan

Guri Dasin Hausa B. de la Renaissance


Brokopondo Gilgel Gibe III
Tucuruí Lac de Kossou
Sobradinho Akosombo Rusumo Falls

Serra da Mesa
Três Marias Kariba
Furnas Cahora Bassa
Porto Primavera
Itaipu
erita Castro Alves,
a 14 De Julho Capacité de stockage Les très grands barrages :
des barrages par habitant volume de retenue
En m3/hab. En km3
169
Plus de 5 000 100
De 1 000 à 5 000 50
20
De 500 à 999
Seuls les barrages dont la capacité
Moins de 500 Pas de données est supérieure à 10 km3 sont représentés

aménagement complet d’une grande résoudrait définitivement tous les pro- construction de grands barrages ; la
rivière, avec 29  grands barrages, la blèmes de pénurie. disponibilité est illimitée ; et cela per-
TVA symbolise la volonté de maîtriser Développées depuis une quarantaine met de réserver les eaux douces conti-
un fleuve réputé indomptable, mais d’années, des techniques économi- nentales à l’agriculture. Cependant, le
aussi de promouvoir le bien-être des quement abordables sont utilisées problème principal est le coût éner-
populations riveraines, voire de façon- aujourd’hui pour alimenter plusieurs gétique, même s’il a baissé de 12 à
ner un « homme nouveau ». grandes villes du monde et à grande 2 kWh/m3 entre 1970 et 2015.
Le modèle de la TVA sera repris dans échelle dans la péninsule Arabique : Le prix total de l’eau dessalée,
de nombreux pays, notamment en on compte 18  500  usines dans le indexé sur celui de l’énergie, reste
URSS (aménagement de la Volga puis monde réparties dans 120 pays, qui au moins deux à trois fois plus cher
des fleuves sibériens), et dans tous les apportent de l’eau à 300 millions de que celui des ressources classiques.
pays du Sud après leur indépendance. personnes. Deux techniques existent : Ce n’est pas un problème dans les
Le but est de modifier profondément la distillation et l’osmose inverse. La États pétroliers, mais le dessalement
la géographie de régions entières, de distillation consiste à porter l’eau de demeure inabordable pour la plupart
détourner des fleuves sur des cen- mer à ébullition pour évaporer l’eau des ménages des villes africaines et
taines de kilomètres, de faire « fleurir douce qui y est contenue. Celle-ci est sud-américaines. Cela reste donc une
le désert ». On assiste alors à une véri- ensuite condensée puis reminéralisée. solution limitée aux villes riches et, en
table «  mystique des grands travaux Avec l’osmose inverse, on applique à tout état de cause, qui ne peut subve-
» qui se poursuit dans les pays émer- de l’eau de mer préalablement traitée nir aux besoins de l’agriculture.
gents, comme le montre la construction une pression suffisante pour la faire Un autre enjeu actuel est de « décar-
du barrage des Trois Gorges en Chine. passer à travers une membrane que boner  » le dessalement, notamment
seules les molécules d’eau peuvent en le couplant à des centrales solaires.
Le dessalement : traverser. Mais cela reste difficile et limité.
solution miracle ou utopie ? Le dessalement est présenté comme
97,5 % de l’eau sur terre sont salés : une solution alternative, notam-
rendre douce cette masse d’eau ment pour les villes du Sud. Il évite la

01-96-Atlas mondial de l'Eau-NE-Maq4-BAT.indd 33 14/12/2021 10:58


34 •
N om de l ’ auteur

Prélèvements et consommation (I) :


données générales
Le rapport entre prélèvements et ressource brute est un bon indicateur de la pression sur les
ressources en eau dans un pays donné. Les États où les prélèvements dépassent, en moyenne,
50 % de la ressource rencontrent des problèmes aigus lors de périodes de sécheresse prolongée.
Ils sont donc potentiellement très vulnérables aux aléas du climat, même si leur capacité
d’adaptation est importante.

Des prélèvements utilisation (égouts non ou mal traités population mondiale, mais aussi l’ur-
à la consommation : des villes, pollutions agricoles, modifi- banisation et la hausse du niveau de
quantité et qualité cation de la température de l’eau pour vie, notamment dans les pays du Sud.
Une distinction très importante doit les centrales nucléaires) .C’est pour- Ces chiffres globaux masquent
être faite entre prélèvements et quoi les deux données sont étudiées. une grande diversité régionale.
consommation. Les prélèvements L’agriculture représente plus de
désignent le volume d’eau captée Le poids des 80 % des prélèvements en Asie et en
dans les cours d’eau ou les nappes prélèvements agricoles Afrique, et près de 71 % en Amérique
phréatiques pour un usage agricole, Le volume total prélevé au niveau latine. Pour la consommation, le
industriel ou domestique. L’eau de mondial est, en 2021 de 4  300  km3 poids de l’agriculture y est tout aussi
pluie utilisée directement par les selon la FAO, soit 535 m3/hab./an, ou
cultures n’est pas comptabilisée. Une 10 % des ressources renouvelables.
partie de l’eau prélevée est rendue au L’essentiel des prélèvements est des- Les prélèvements par pays
milieu. Cette proportion peut aller de tiné à l’agriculture (69 %), le reste se
97 % pour l’eau utilisée pour le refroi- partageant entre les usages indus-
dissement des centrales nucléaires à triels (19 %) et domestiques (12 %).
quelques pour cent seulement dans Historiquement, les prélèvements
l’agriculture irriguée moderne, où ont été multipliés par 8 depuis 1900,
presque toute l’eau est utilisée par avec une forte accélération après la
les plantes. Seconde Guerre mondiale. Mais ils
Seule l’eau non rapidement restituée ont tendance à se stabiliser depuis
(le plus souvent évaporée ou incluse 30 ans, avec une augmentation moins
dans le produit final) est considérée rapide que celle de la population mon- États-Unis
comme consommée. Il est donc ten- diale. Depuis les années 2000, ce sont
tant de ne considérer que la consom- les prélèvements pour la consom-
mation. Mais l’eau prélevée et rendue mation domestique qui augmentent
au milieu y retourne parfois avec une le plus rapidement, ce qui reflète
qualité très dégradée à cause de son non seulement la croissance de la
Guyana
Suriname
Consommation et prélèvements du secteur
5 000 en km3 Prélèvements
Agricoles
Shiklomanov et Rodda, 2003 ; FAO, Aquastat, 2008.

4 000 Écart entre Industriels


prélèvements et
consommation Domestiques
3 000 Évaporation sur Chili
les réservoirs
Uruguay
2 000 Consommation
Sources : ONU, 2006 ;

Agricole
1 000
Industrielle

0 Domestique
1900 1925 1950 1975 2000 2025

01-96-Atlas mondial de l'Eau-NE-Maq4-BAT2.indd 34 14/12/2021 12:30


MOBILISER ET UTILISER L’EAU • 35

important. Dans les pays développés, Au-delà du renouvelable Exploiter


les ressources
en revanche, les prélèvements indus- fossiles
triels dominent (54 % pour l’Europe et Turkménistan Certains pays utilisent
53 % pour l’Amérique du Nord) et les Ouzbékistan plus d’eau que la part
naturellement
usages domestiques y sont aussi rela- Syrie renouvelable grâce
tivement importants (respectivement Jordanie à l’exploitation minière
Malte Israël de ressources dites
213 % et 15 %). Tunisie Iran
Koweït Pakistan « fossiles », souvent
La carte des prélèvements par habi- Algérie de vastes aquifères
tant reflète également le poids de formés pendant les
St-Kitts-et-Nevis Libye
l’agriculture irriguée. On voit ainsi périodes plus humides.
Barbade Égypte Oman Les Libyens exploitent
apparaître les républiques d’Asie Soudan Émirats ainsi le système
centrale (plus de 2 000 m3/hab./an), arabes unis aquifère du Sahara
Arabie saoudite Qatar
Yémen septentrional qui
l’Australie ou encore les pays méditer- Bahreïn contient plus de
ranéens. Un facteur secondaire de fort Utilisation de la ressource 300 km3 d’eau avec
prélèvement est lié à l’importance des renouvelable en eau la « Grande Rivière
Singapour artificielle » qui traverse
dérivations pour l’hydroélectricité  : Supérieure à 50 % 2 000 km de désert
cela explique la position du Canada. Supérieure à 100 % pour apporter de l’eau
Le cas des États-Unis est particulier, (utilisation de 2 000 km à la côte.
puisqu’il combine à la fois une agri- ressources fossiles) Source : FAO, Aquastat, 2020.

culture irriguée importante, notam-


ment dans l’Ouest et le Midwest, une
utilisation industrielle encore forte et France, avec plus de 500  m3/hab./ distingue par l’importance des pré-
des prélèvements pour les usages an prélevés, tous usages confondus, lèvements industriels (plus de 75 %)
domestiques plus importants que se situe dans la moyenne des pays destinés principalement au refroidis-
dans d’autres pays développés. La de l’Europe du Nord-Ouest, mais se sement des centrales nucléaires.

Prélèvements d’eau
par pays en 2018
(en m3 par personne et par an)
De 1 000 à 5 000
De 600 à 999
Estonie Turkménistan
Ouzbékistan De 300 à 599
Azerbaïdjan Kazakhstan
De 100 à 299
Kirghizstan Moins de 100
Tadjikistan
Iran Pas de données

Laos Prélèvements d’eau


par pays en 2018
(en km3)
761
e 500

100
50
10
5
Seuls les prélèvements supérieurs
à 1 km3 sont représentés.

uay
Nouvelle-
Zélande

Source : FAO, Aquastat, 2020.

01-96-Atlas mondial de l'Eau-NE-Maq4-BAT.indd 35 14/12/2021 10:58


36 •
N om de l ’ auteur

Prélèvements et consommation (II) :


le secteur agricole
Les terres équipées pour l’irrigation couvrent 340 millions d’hectares, soit 20 % des terres
cultivées. Mais elles fournissent 40 % de la production agricole mondiale. C’est dire l’importance
de l’agriculture irriguée dans le bilan agricole mondial : la croissance de la production ne pourra se
faire sans l’aide de l’irrigation. On assiste d’ailleurs à une augmentation continue des surfaces
irriguées, de 196 à 340 millions d’hectares équipés de 1973 à 2020.

Le développement apparus au xxe siècle : l’Ouest amé- quelques grands fleuves au Moyen-
de l’irrigation ricain, l’Australie ou encore l’Afrique Orient et en Afrique du Nord (Tigre,
Sur le planisphère de l’irrigation du Sud. Euphrate, Nil).
par États, quelques régions res- Une carte plus détaillée montrerait Autrefois concentrée dans quelques
sortent clairement. Certains sont très que l’essentiel des zones irriguées régions et limitée à quelques cultures
anciens : l’Asie orientale et le monde ne concerne en fait que des espaces spécifiques (riz en Asie, agrumes au
indien et ses espaces de riziculture très restreints : les plaines de l’Indus bord de la Méditerranée), l’agriculture
irriguée ; l’Asie centrale et ses oasis ; et du Gange, l’Asie du Sud-Est et de irriguée se répand aujourd’hui hors de
les grands périmètres irrigués du l’Est, avec une concentration particu- ses zones traditionnelles : la superficie
bassin méditerranéen. D’autres sont lière dans les grands deltas, le long de équipée pour l’irrigation au Danemark

Périmètres irrigués dans le sud de l’Andalousie


Une culture irriguée
intensive
3 km
Le campo de Dalias est
a d e G a d o r une petite plaine côtière
Dalias S i e r r qui se trouve à environ
30 km d’Almería, dans
le sud-est de l’Espagne.
Jouissant d’un climat
très ensoleillé et très
sec, abritée des vents
du nord par la Sierra de
Gador, cette région
D a l i a s Vers Almería autrefois très pauvre
o d e
El Ejido C a m p a connu un
Roquetas développement rapide
del Mar depuis une cinquantaine
d’années, qui a été
accéléré par l’entrée de
Vers Málaga l’Espagne dans la CEE
ESPAGNE en 1986. Il est fondé
sur la culture irriguée
Balerma intensive de fruits et
ANDALOUSIE légumes de
contre-saison destinés
Source : Diercke Weltatlas, 2008.

aux marchés de
Salines l’Europe du Nord.
L’eau est pompée
Almerimar dans les aquifères pour
alimenter près de
al ns
ée
u s tio

20 000 hectares de
ea ra

M e r serres où travaille
d’ filt

M é d i t e
r r a une nombreuse
In

n é main-d’œuvre
e
immigrée.
Superficie couverte Irrigation Aujourd’hui, cette
par les serres Canal ou drain Usine de désalinisation région souffre
(en construction) de problèmes
En 1985 Conduite environnementaux
En 2006 Bassin de rétention Zone urbanisée et de la concurrence
des pays du Maghreb.

01-96-Atlas mondial de l'Eau-NE-Maq4-BAT.indd 36 14/12/2021 10:58


MOBILISER ET UTILISER L’EAU • 37

Quel volume pour produire Eau et agriculture


des aliments ?
LES PRÉLÈVEMENTS AGRICOLES (2018)
Fruits et Boissons Produits
légumes transformés

Une tomate 13 l
Une orange 50 l
Une pomme 70 l
Une tartine
Un verre de vin beurrée
120 l 90 l
Un café
140 l Un œuf
Un jus de fruit sur le plat
170 l 135 l Source : FAO, Aquastat, 2020.

Un verre Une bière


de lait 190 l
200 l Part des prélèvements agricoles dans le total
des prélèvements (en %)
Sources : Waterwise, 2007 ; ONU, 2006.

Un blanc de poulet (300 g)


1 170 l 0 25 50 75 100
Un hamburger
2 400 l L’UTILISATION DE LA RESSOURCE PAR L’AGRICULTURE (2018)
Du fromage (500 g)
2 500 l
Un filet de bœuf (500 g)
4 500 l

a ainsi été multipliée par 3,5 et 2019


pour atteindre 350  000  hectares.
L’irrigation est utilisée pour de nom-
breuses cultures, pour augmenter
et stabiliser les rendements d’une
année sur l’autre. De plus, de nom-
Source : FAO, Aquastat, 2020.

breux périmètres irrigués plus anciens


se modernisent et change de culture.
Utilisation de la ressource en eau
On trouve ainsi de la vigne irriguée par les prélèvements agricoles (en %)
en Afrique du Sud, des cultures de
bananes au Maroc, des amandiers ou
0 5 40 100
des noix de pécan en Californie, des
roses en culture hors-sol au Kenya. L’IRRIGATION (2018)
L’agriculture irriguée est sans doute
celle qui est la plus intégrée aux mar-
chés mondiaux.
En France, la superficie irrigable est
ainsi passée de 1,8 à 2,8  millions
d’hectares de 1988 à 2013 (+ 55 %).
Le taux de progression maximal ne
concerne pas les régions méditerra-
néennes ou le Bassin aquitain, mais le
sud du Bassin parisien, et plus parti-
culièrement la Beauce : plus de 30 %
Source : FAO, Aquastat, 2020.

de la surface agricole utile sont irri-


gués dans le Loiret.
Part des terres irriguées dans le total
des terres cultivées (en %)

0 10 30 70

01-96-Atlas mondial de l'Eau-NE-Maq4-BAT.indd 37 14/12/2021 10:58


38 •
N om de l ’ auteur

Prélèvements et consommation (III) :


le secteur industriel
L’eau a été indispensable à la révolution industrielle : pour l’énergie, avec l’équipement
en centrales des torrents de montagne puis, au xxe siècle, la construction de barrages
hydroélectriques ; pour la production de vapeur et le refroidissement des machines ; enfin,
comme solvant dans nombre de processus chimiques. Avec le développement économique, les
prélèvements d’eau pour l’industrie sont aujourd’hui en rapide expansion dans les pays du Sud.

Des situations variées l’eau qui s’évapore dans les circuits adéquat n’est pas effectué.
Dans le secteur industriel, le rapport de refroidissement, soit moins de 5 % Avec les progrès techniques, il est
entre prélèvements et consomma- de l’eau prélevée. possible de réduire les prélèvements
tion peut très fortement varier. Dans En revanche, dans certaines indus- et la consommation, tout en amélio-
la production d’électricité, les prélè- tries comme les papeteries, le volume rant la qualité de l’eau rejetée : ainsi,
vements sont très importants, mais d’eau consommé par rapport au pré- selon le procédé de fabrication mis en
la consommation reste généralement lèvement peut être plus important, œuvre, le volume d’eau nécessaire à
faible  : la seule partie consommée et la qualité de l’eau restituée au la fabrication de certains objets peut
dans les centrales nucléaires est milieu très dégradée si un traitement varier de 1 à 10.

L’hydroélectricité au Québec
Une volonté politique
À partir de 1950,
300 km
Hydro-Québec se lança
dans la construction de
grands projets sur les
affluents du Saint-
Laurent. Ces projets
avaient un but
économique − répondre
à l’explosion de la
TERRE-NEUVE- demande en énergie
ET-L ABRADOR électrique d’une
Shefferville économie en forte
Riv. Churchill croissance −, mais aussi
hydroélectriques du Québec : le renouveau des grands projets”, Géocarrefour, vol. 84/1-2, 2009.

politique. Ainsi, Jacques


Lesage, Premier ministre
libéral du Québec,
Sources : La documentation photographique, n°8078 ; F. Lasserre, “Les aménagements

déclara novembre 1962 :


Riv. La Grande
QUÉBEC « Il faut rendre au peuple
Puissance des centrales du Québec ce qui
hydroélectriques appartient au peuple du
Riv. Manivouagan Québec ; son plus riche
(en MW) patrimoine, celui de
Riv. aux 5 000
Outardes l’électricité. C’est
Riv. Eastmain 2 500 maintenant ou jamais
1 000 que nous serons
Riv. Betsiamites 500
200 maîtres chez nous ».
Les années 1970 virent
Centrale en construction un développement
Riv. Saguenay
Centrale en projet encore plus
Propriétaires des centrales spectaculaire avec le
projet de la Baie James,
Riv. St-M hydroélectriques
C A N A D A au qui s’articule autour
Québec
Hydro-Québec de la rivière La Grande.
ric e

Il comprend la
Riv. des Outaouais Trois-Rivière Labrador Corp.* construction de huit
centrales, le
Montréal Privé détournement de
ONTARIO
Riv. Gatineau * La production électrique est achetée plusieurs cours d’eau,
à prix avantageux par Hydro-Québec sur un territoire de près
Ottawa ÉTATS-UNIS et distribuée au Québec. de 350 000 km2.

01-96-Atlas mondial de l'Eau-NE-Maq4-BAT.indd 38 14/12/2021 10:58


MOBILISER ET UTILISER L’EAU • 39

C’est donc un secteur où des éco- Les prélèvements industriels et la production hydroélectrique
nomies d’eau importantes peuvent
LES PRÉLÈVEMENTS INDUSTRIELS (2018)
être réalisées rapidement à un coût
acceptable : dans les pays du Nord, à
production constante, l’eau prélevée
et consommée par l’industrie a dimi-
nué depuis 1970.

Un contraste
Nord/Sud marqué
Au niveau mondial, les prélèvements
industriels représentent 768 km3/an,
soit 19 % des prélèvements totaux.
60  % des prélèvements industriels
sont concentrés en Europe et en
Amérique du Nord –  les États-Unis
Source : FAO, Aquastat, 2020.

prélevant à eux seuls 248 km3/an. Le


poids de l’Asie augmente rapidement,
Part des prélèvements industriels dans le total
notamment celui de la Chine, qui pré- des prélèvements (en %)
lève déjà 190  km3 en 2020, contre
seulement 45 en 1980 et 92 en 1993.
0 10 25 50 96
L’Inde (50 km3/an) suit un rythme de
progression similaire. Contrairement à
l’Europe et à l’Amérique du Nord, la LA PRODUCTION HYDROÉLECTRIQUE (2020)
part de l’industrie dans ces deux pays
reste minoritaire eu égard au poids de
l’agriculture irriguée.
Une mention spéciale doit être faite
à l’hydroélectricité, énergie renou-
velable, qui couvre presque la tota-
lité des besoins de pays comme la
Norvège ou la Nouvelle-Zélande. La
puissance hydroélectrique instal-
lée dans le monde était estimée à
1  330  gigawatts (GW), soit environ
Source : International Hydropower Association, 2021.

16 % de l’énergie électrique produite.


Les pays européens comme la France
(12e producteur mondial, 25 GW ins-
tallés) sont presque entièrement équi-
pés, mais il reste de nombreux sites
potentiellement exploitables dans les
Production hydroélectrique par pays (en térawattheure*)
quatre principaux pays producteurs
que sont la Chine (370 GW installés), De 1 à 9 De 10 De 50 De 200
à 49 à 199 à 1 350
les États-Unis (102), le Brésil (109)
et le Canada (82).Toutefois, si cette * 1 térawattheure correspond à 1 milliard de kilowattheure
énergie est renouvelable, ses impacts
écologiques sur les cours d’eau sont Quel volume d’eau pour produire des objets ?
souvent massifs, ce qui explique les
fortes résistances face à la construc- Un kilo d’acier
Matériaux

Un kilo de papier
tion de nouvelles centrales. 95 l 324 l
Sources : Waterwise, 2007 ; ONU, 2006.

Un kilo de plastique
185 l

Un litre d’essence Un jean


manufacturés

10 l 10 900 l
Produits

Une
Une puce électronique voiture
Une paire de chaussures 400 000 l
(2g) 32 l en cuir 8000 l

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40 •
N om de l ’ auteur

Prélèvements et consommation (IV) :


l’eau domestique
Le poids des prélèvements destinés à l’eau potable reste marginal au niveau mondial. Il connaît
deux évolutions radicalement opposées. Dans les pays développés, où l’accès à l’eau potable est
généralisé, la consommation urbaine tend à se stabiliser, voire à décroître. En revanche, dans le
reste du monde, les prélèvements augmentent rapidement, poussés par la croissance de la
population et, dans certains cas, par l’amélioration du niveau de vie.

Un accès inégal qu’à partir de 100 litres par personne l’eau potable, les pays du Nord dis-
L’eau domestique ne représente et par jour. Tous les pays dévelop- posent d’un accès universel, géné-
qu’un dixième des prélèvements pés se situent au-dessus de cette ralement garanti par la loi, avec un
au niveau mondial. Ce taux varie de limite. Les plus sobres n’utilisent en service continu et de bonne qualité.
quelques pour cent dans les pays les moyenne qu’à peine plus (Belgique : À l’opposé, les taux d’accès sont très
plus pauvres à généralement 10-20 % 112), les plus dispendieux allant faibles dans les pays les plus pauvres,
dans les pays développés. jusqu’à plus de 200 (Canada : 326 ; avec un service souvent discontinu
Les besoins quotidiens minimaux, États-Unis : 295 ; Japon : 278). (l’eau n’est disponible qu’à certaines
pour la cuisine et l’hygiène, sont esti- La carte mondiale de l’accès à heures et peut être coupée pendant
més à 25  litres par jour et par per- l’eau reflète assez fidèlement les plusieurs jours) et de qualité variable,
sonne. Un réel confort n’est atteint niveaux de développement. Pour le plus souvent non potable.

Le réseau d’adduction d’eau domestique de la ville de Paris

Dérivation de la Dhuis
se
Sei

Pontoise Oi (hors d’usage) Château-Thierry


e n

Évreux
ne

Aubergenville
ar
M

Meaux
Dérivation de l’Avre Saint-Germain Les Lilas Sources
de la Dhuis
PARIS
Sources Versailles Ménilmontant Grand Morin
du Breuil Montsouris
Vert-en- Saint-Cloud
Drouais
Avre Montreuil- Joinville
sur-Eure L'Haÿ-les-Roses Aube
Orly tin
Dreux
Eu Rambouillet Se Sources du Dragon Sources du Durteint
Sources
re

ine

de la Vigne Dérivation du Loing Dérivation Sources de


Melun
et du Lunain de la Voulzie la Voulzie
Provins
Chartres Fontainebleau Nogent-sur-Seine
Étampes
Seine
Montigny-sur-Loing Vals de Seine
Aqueduc
Esson

Vals d’Yonne
Source
ne

Sources du
Lunain Sens
Zone de captage Sources
du Loing Dérivation Sources
Réservoir Sources
Loing

de la Vanne
Yonn

basses hautes
Usine de traitement
e

d’eau potable Sources de Cochepies


Agglomération parisienne
20 km Source : Eau de Paris, 2013.

01-96-Atlas mondial de l'Eau-NE-Maq4-BAT.indd 40 14/12/2021 10:58


MOBILISER ET UTILISER L’EAU • 41

Les eaux de Paris L’accès à l’eau potable et l’utilisation domestique dans le monde
Paris est dans une situation relati-
ACCÈS À L’EAU POTABLE (2018)
vement favorable, puisque la région
dispose de cours d’eau importants et
de ressources souterraines. Pourtant,
jusqu’au xixe siècle, l’adduction d’eau
fut un problème majeur, tant pour la
quantité que pour la qualité. Avec
l’augmentation de la population,
les systèmes traditionnels (porteurs
d’eau, fontaines publiques) ne furent
plus en mesure de maintenir une
hygiène minimale dans la capitale. Ce
sont d’ailleurs les épidémies de cho-
léra qui vont convaincre les pouvoirs
publics d’apporter une solution à ce
Source : FAO, Aquastat, 2020.

problème récurrent.
Du milieu du xixe  siècle aux années
1920, les efforts sont centrés sur Population ayant accès à l’eau potable (en %)
l’adduction d’eau, avec la captation
des eaux sources lointaines (Avre, 22 50 75 90 99 100
Vanne, Loing et Dhuis notamment),
acheminées par de longs aqueducs
jusqu’aux principaux réservoirs. UTILISATION DOMESTIQUE (2018)
Ces sources représentent encore
près de la moitié de l’eau consom-
mée aujourd’hui à Paris intra-muros.
L’autre moitié provient d’usines de
traitement situées juste en amont, à
Ivry sur la Seine et à Joinville sur la
Marne, construites respectivement
en 1890 et 1893. L’usine d’Orly,
mise en service en 1969, complète le
dispositif.
À partir de 1930, l’investissement
s’est concentré sur le traitement des
eaux usées, avec la construction de
l’usine d’assainissement d’Achères
(1940), une des plus grandes du
Sources : FAO, Aquastat, 2020.

monde, sans cesse modernisée et


agrandie au fur et à mesure que les Quantité d’eau utilisée pour la consommation
standards de dépollution des eaux domestique (m 3 par personne et par an)
augmentent.
Depuis une trentaine d’année, comme 0 10 50 100
dans toutes les villes européennes, 1 m3 = 1 000 litres
la consommation totale de la ville
diminue, grâce aux améliorations
Combien d’eau consommons-nous pour…
techniques des réseaux comme des
appareils ménagers et à la sensibili-
corporelle
Hygiène

sation des consommateurs. Certains Utilisation Un bain


des WC Une douche
Source : Waterwise, 2007 ; ONU, 2006.

60 à 100 l 150 à 200 l


aqueducs vétustes, comme celui de 4 à 10 l
la Dhuis, ne sont plus remplacés.

Lavage de voiture
Lave-vaisselle 100 à 300 l
Entretien de
la maison

20 à 50 l
Lave-linge Arrosage du jardin
60 à 120 l 150 à 200 l par m2

01-96-Atlas mondial de l'Eau-NE-Maq4-BAT.indd 41 14/12/2021 10:58


42

EN CONCLUSION
Mobiliser
et utiliser l’eau
Des progrès techniques considérables
Inventées depuis la plus Haute Antiquité,
les grandes techniques de maîtrise de
l’eau –  l’agriculture irriguée, les barrages,
la construction d’aqueducs  – ont été sans
cesse perfectionnées. Depuis la révolution
industrielle, elles ont changé d’échelle  :
actuellement, les seules limites imposées aux
prouesses techniques des ingénieurs sont
les coûts financiers et les impacts négatifs
sur l’environnement. Ces grands barrages et
gigantesques transferts d’eau permettent de
répondre à une demande sans cesse crois-
sante au niveau mondial.

Consommer et prélever
Les progrès techniques ont permis un déve-
loppement rapide des prélèvements d’eau
dans les fleuves et nappes phréatiques.
Aujourd’hui, si l’utilisation directe d’eau
représente en moyenne une centaine de litres
par jour dans les pays développés, on estime
qu’il faut prélever près de 5 000 litres d’eau
pour produire notre ration alimentaire quo-
tidienne, sans compter l’eau prélevée pour
la production d’objets de consommation
courante, le refroidissement des centrales
nucléaires ou la production hydroélectrique.
La majeure partie de cette eau prélevée est
certes rendue aux cours d’eau, mais avec
une qualité souvent dégradée qui demande
des traitements coûteux.

01-96-Atlas mondial de l'Eau-NE-Maq4-BAT.indd 42 14/12/2021 10:58


43

Une ressource
menacée
Des catastrophes, comme l’incendie de l’usine Sandoz
à Bâle en 1986, qui provoqua une pollution sans précédent
du Rhin jusqu’à la frontière néerlandaise, ont accéléré la mise
en place de mesures de protection des ressources face
aux risques industriels et aux pollutions urbaines dans les
pays du Nord depuis une trentaine d’années.
À l’opposé, les pays les moins développés subissent des
formes de pollution « classiques » causées par le manque
d’assainissement, source des maladies. Les pays émergents
comme la Chine ou l’Inde connaissent pour leur part toutes
les formes de dégradation : pollutions organiques liées
aux rejets directs d’égouts dans les cours d’eau, pollutions
industrielles localisées déversées par les mines ou les usines,
pollutions agricoles diffuses avec l’augmentation de
l’utilisation d’engrais et de pesticides, destruction des zones
humides pour la construction d’infrastructures de transport
et l’urbanisation.

01-96-Atlas mondial de l'Eau-NE-Maq4-BAT.indd 43 14/12/2021 10:58


44 •
N om de l ’ auteur

Les effets des grands barrages


Considérés comme le nec plus ultra du savoir-faire hydraulique jusque dans les années 1970, les
grands barrages dits « à buts multiples » sont aujourd’hui très largement critiqués, non seulement à
cause des très fortes perturbations environnementales qu’ils ont engendrées, mais aussi pour
l’échec économique des grands projets d’irrigation associés et pour les bouleversements sociaux
(déplacements de population, différenciation sociale) qu’ils ont entraînés.

« Small is beautiful » ? barrages : peu coûteux, ils sécurisent Des flux hydriques
Si les grands barrages sont les ressources en eau, permettent bouleversés
aujourd’hui très critiqués, il ne faut l’extension de l’agriculture irriguée et Les cours d’eau subissent deux types
cependant pas négliger les effets des créent des zones humides favorables de perturbations liées aux grands
petits ouvrages qui ont été construits à l’installation d’une faune et d’une barrages. D’une part, ils réduisent,
en très grand nombre depuis les flore variées. Ils facilitent également par l’évaporation sur le réservoir, le
années 1970 pour créer des petits la recharge des nappes phréatiques. volume d’eau total disponible. D’autre
lacs artificiels dans les dépressions et Mais les effets à long terme de leur part, ils modifient le rythme hydrolo-
les bas-fonds, surtout dans les zones multiplication restent encore peu gique, en « lissant » le débit pour que
tropicales ou méditerranéennes. Ils connus ; ces petits lacs peuvent par de l’eau soit disponible en perma-
sont présentés comme une alternative exemple devenir des foyers de mala- nence pour les utilisateurs en aval.
efficace à la construction de grands dies liées à l’eau. Or, la plupart des espèces vivantes

La fragmentation des fleuves

Yukon
Ienissei
Nelson Volga Ob
Amour
Columbia St-Laurent
Danube Amou-
Darya
Colorado Mississippi
Indus
Tigre et Gange
Euphrate
Niger Mékong
Sénégal
Nil Irrawady
Orénoque
Volta Congo
Amazone

Zambèze
La Plata

Impact de la fragmentation sur le cours des fleuves


Très important Pas de données
ou hors étude
Important
Modéré
Faible
Très faible
Source : Transboundary Waters Assessment Programme, 2021.

01-96-Atlas mondial de l'Eau-NE-Maq4-BAT.indd 44 14/12/2021 10:58


UNE RESSOURCE MENACÉE • 45

Le delta du Nil et l’élévation du niveau de la mer Les effets d’un barrage


sur le débit d’un fleuve
Aujourd’hui
Débit moyen à Lee Ferry (Arizona)
(en m3/s)
1 600 1964
Rosette Mise en service
Damiette du barrage
1 400 de Glen Canyon
Port-Saïd
Alexandrie 1 200

1 000
1921-1963
800
Canal 600
de Suez
1964-2015
400

200
Côte Lagune, étang côtier
0
J F M A M J J A S O N D
Si le niveau de la mer 3,8 millions de personnes touchées Source : A. Tecle, «Downstream Effects of Damming
1 800 km2 de terres arables submergées the Colorado River », International Journal
s’élève de 50 cm of Lakes and Rivers, 2017.

Rosette
Damiette
Port-Saïd pas à rétablir la continuité des éco-
Alexandrie systèmes  : ainsi les très grands
barrages sont souvent un obstacle
insurmontable à la migration des
poissons. À l’exception notable de
l’Amazone, la plupart des cours d’eau
au niveau mondial sont aujourd’hui
«  fragmentés  » en plusieurs unités
hydrologiques qui ne communiquent
plus entre elles.
Si le niveau de la mer 6,1 millions de personnes touchées
s’élève de 1 mètre 4 500 km2 de terres arables submergées La perturbation des flux
sédimentaires : le cas du Nil
Rosette Les cours d’eau, en plus de leur
Damiette
Port-Saïd charge liquide, transportent des sédi-
Alexandrie
ments : plus de 900 millions de tonnes
par an pour les plus chargés comme
le Huang He (fleuve Jaune) en Chine.
Les grands barrages arrêtent ces
flux sédimentaires qui contribuent à
30 km
les combler progressivement. Ceci
explique d’ailleurs la durée de vie
limitée des barrages, de quelques
Sources : Google-Imagerie Côte Zone submergée
et TerraMetrics, 2008 et UNEP, 2006. années, pour ceux qui sont dans des
zones où l’érosion est très active, à
plusieurs siècles.
sont adaptées au rythme naturel du gestionnaires des barrages mettent C’est dans le bassin du Nil que ces
cours d’eau. Pour les zones humides en place plusieurs stratégies. La perturbations sont les plus visibles : le
notamment, seule la montée et la des- plupart des cours d’eau bénéficient barrage d’Assouan arrête les fameux
cente des eaux permettent un bon aujourd’hui d’un «  débit réservé  » limons du Nil, arrachés aux hautes
fonctionnement des écosystèmes, en aval des barrages, permettant un terres d’Éthiopie, qui fertilisaient
qui ne supportent pas une inondation maintien minimal des écosystèmes. naturellement les champs. Plus en
ou un assèchement permanent. Ces Certains vont même plus loin : sur le aval, le manque d’apports sédimen-
modifications ont donc des impacts Colorado, des lâchers d’eau excep- taires contribue au recul du delta du
très importants sur la faune et la flore tionnels, sous haute surveillance, Nil. Combiné à la hausse du niveau
des cours d’eau. « miment » les crues qui avaient lieu marin, ce phénomène pourrait affec-
Pour pallier les inconvénients liés avant la construction de grands bar- ter à terme plus de six millions de
à la régularisation du débit, les rages. Mais ces actions ne suffisent personnes.

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46 •
N om de l ’ auteur

Des zones humides en danger


Marais, marécages, bas-fonds : les zones humides ont eu longtemps mauvaise réputation,
repaires de brigands, infestées par les maladies… Le mot « paludisme » est dérivé de palus,
marais en latin, que l’on retrouve aussi souvent dans la toponymie française. L’utilité et la valeur
des zones humides n’ont été redécouvertes que récemment, trop tard pour ainsi dire.
Aujourd’hui une politique de protection est mise en place, mais elle reste encore limitée.

Fonctionnement d’une zone humide


Circulation des animaux (alimentation, reproduction...) terres. Les zones humides couvrent
environ 600 millions d’hectares dans le
monde. Certaines s’étendent sur des
Apports de matière organique, milliers d’hectares, comme le delta de
de graines et de plantules
l’Okavango (au Botswana), mais la plu-
Corridor part ont une taille très modeste.
biologique Chutes de
végétaux Ruissellement Les zones humides filtrent les pol-
(poissons, oiseaux)
Crues luants, retiennent les sédiments et les
engrais phytosanitaires. Cette fonction
Rivière Bras mort Zone humide est d’ailleurs utilisée dans les tech-
Annexes biologique Production et niques modernes de traitement des
(frayère...) sédimentation de
matière organique eaux. Aires naturelles d’expansion
des crues, elles jouent un rôle impor-
Échanges Sédimentation de Échanges tant dans la régulation des rythmes
avec la nappe la matière organique avec la nappe hydrologiques en ralentissant nota-
(invertébrés) (invertébrés)
blement la montée des eaux. Grâce
à leur forte productivité biologique,
Nappe phréatique les zones humides fournissent éga-
lement des ressources alimentaires
Source : zones-humides.org.
très importantes, notamment pour les
pays pauvres. Enfin, par la diversité
Évolution du nombre de sites Ramsar des milieux qu’elles offrent, elles pré-
sentent une très forte biodiversité. En
Désignations par an Désignations cumulées France, 50 % des espèces d’oiseaux
180 2 400
et 30 % des espèces végétales mena-
2 000
cées en dépendent. Elles sont indis-
150
pensables pour le cycle reproductif
120 1 600 de nombreux poissons. Des études
récentes ont estimé les «  services  »
90 1 200 rendus par ces terres autrefois délais-
sées à plus de 1 400 dollars par hec-
60 800
tare et par an.
30 400
Les menaces
0 0 sur les zones humides
Si, au Moyen Âge, les zones humides
75

00

05

10

15

20
8

20
20
19

19

19

19

19

20

20

20

Source :
Nombre de désignations par an Nombre de désignations totales étaient intégrées aux systèmes
Ramsar, 2021.
agropastoraux, l’époque moderne
a été caractérisée, pour des rai-
Un patrimoine inestimable végétale associée. Elle apparaît là où sons hygiénistes et économiques,
Une zone humide est une région où la nappe phréatique arrive près de la par leur disparition rapide puisque,
l’eau est le principal facteur qui contrôle surface ou affleure, ou bien là où des une fois drainées, elles offrent des
le milieu naturel et la vie animale et eaux peu profondes recouvrent les terrains plats, proches des axes de

01-96-Atlas mondial de l'Eau-NE-Maq4-BAT.indd 46 14/12/2021 10:58


UNE RESSOURCE MENACÉE • 47

Les zones Ramsar en Europe et au Maghreb Protéger les


zones humides
FINLANDE
Les mesures de
NORVÈGE protection des zones
SUÈDE humides ont été
ESTONIE tardives. Le traité
intergouvernemental de
1971, dit convention
LETTONIE
Ramsar (du nom d’une

ue
DANEMARK ville d’Iran), rassemble

ltiq
Mer du Nord LITUANIE 163 pays signataires et

Ba
protège actuellement

er
M 197 millions d’hectares
PAYS-BAS
IRLANDE BIÉLO. de zones humides
(répartis sur 2 065
ROYAUME- sites). En France,
POLOGNE on trouve 42 zones
UNI
Ramsar pour une
BEL. ALLEMAGNE UKRAINE superficie de
RÉP. 3,5 millions d’hectares.
LUX. TCHÈQUE Peu contraignante,
Océan
SLO. la convention Ramsar
Atlantique AUTRICHE ne prône qu’une
HONGRIE ROUMANIE « utilisation rationnelle
SUISSE
des zones humides »,
SLOVÉNIE définie ainsi en
FRANCE
des termes flous :
CROATIE B.-H. SERBIE « le maintien de leurs
caractéristiques
ITALIE BULG.
MO. écologiques obtenu
PORTUGAL
MAC. par la mise en œuvre
ALBANIE d’approches par
ESPAGNE écosystème dans le
contexte du
développement
GRÈCE
durable ».
Mer Méditerranée C’est pourquoi la simple
inscription dans le cadre
de la convention
Ramsar doit être
complétée par d’autres
MAROC mesures. En Europe par
exemple, la protection
ALGÉRIE des zones humides se
TUNISIE fait essentiellement à
travers le programme
Sites Ramsar Natura 2000, dont une
(zones humides grande partie concerne
500 km les zones humides.
Source : Ramsar, 2021. d’importance internationale)

communication majeurs. Dans les en grande partie la baisse générali- actions est de restaurer certains pro-
pays développés notamment, une sée du nombre d’espèces piscicoles cessus qui améliorent le fonctionne-
grande partie des zones humides a et avicoles dans les écosystèmes ment d’un cours d’eau – notamment
disparu, par effet direct (drainage, aquatiques. ses capacités d’autoépuration –, per-
construction d’infrastructures de mettent le retour d’espèces animales
transport) ou indirect (régulation des La restauration écologique disparues et augmentent sa valeur
cours d’eau). des milieux aquatiques esthétique.
En France, près de la moitié des zones Dès les années 1970, la prise de Mais la « restauration écologique » ne
humides ont disparu entre 1950 et conscience de la dégradation des va pas sans poser de problèmes. La
1990. Les marais sont parfois détruits milieux aquatiques a conduit la plupart destruction des aménagements anté-
volontairement lors d’entreprises de des pays européens à se doter de lois rieurs, parfois très anciens, fait naître
bonification, par endiguement ou et de réglementations pour les proté- chez les riverains la crainte du retour
encore par l’extraction de matériaux ger. Depuis une vingtaine d’années, des inondations et cause des pertes
de construction (sable, granulats, gra- lorsque cela est possible, des pro- financières qu’il faut compenser. De
viers en bord de rivière). grammes de restauration des milieux plus, il est souvent difficile de définir
Mais les zones humides souffrent aquatiques sont mis en place. Il s’agit l’état naturel du cours d’eau, tant il a
également d’impacts plus distants : la alors de recréer artificiellement des été modifié. Toute action de restau-
régulation des cours d’eau et le déver- zones humides ou encore de redes- ration doit donc être menée avec la
sement de polluants en amont. Ces siner le tracé des cours d’eau en res- plus extrême prudence pour que le
dégradations expliquent à leur tour taurant des méandres. Le but de ces remède ne soit pas pire que le mal.

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48 •
N om de l ’ auteur

La surexploitation des
ressources souterraines
Les ressources souterraines sont encore peu connues et semblaient inépuisables, d’où leur
exploitation intensive. Celle-ci peut être durable lorsque le pompage n’excède pas le
renouvellement annuel. Mais, souvent, il s’agit d’usages non durables, épuisant la ressource,
notamment dans les nouveaux périmètres irrigués des zones arides, où l’on parle parfois, comme
en Arabie saoudite, d’exploitation « minière » des ressources en eau.

Une ressource surexploitée mètres en cinquante ans, déstabili- d’Afrique du Nord et d’Asie occiden-
Si une nappe souterraine ne s’as- sant de nombreux bâtiments. Dans la tale qui dépendent le plus de cette
sèche pas comme un cours d’eau, grande nappe aquifère de l’Ogallala ressource. Localement, comme dans
partout dans le monde, les signes (aux États-Unis), l’abaissement atteint la plaine de Chine du Nord, l’épuise-
d’une surexploitation des nappes se près de 30 mètres par endroits. ment est si rapide que tous les usages
multiplient  : leur «  toit  » baisse et il Lorsqu’une nappe s’épuise, les de l’eau, notamment pour l’agriculture
faut pomper de plus en plus profon- sources qui en dépendent tarissent et, traditionnelle, sont remis en cause.
dément. Les conséquences en sont en bord de mer, un « coin salé » s’in- En outre, la surexploitation des
parfois désastreuses  : à Mexico, la filtre, rendant les forages impropres à nappes s’accompagne souvent de
nappe s’est abaissée de plusieurs la consommation. Ce sont les États pollution. Ce lent phénomène est
un problème majeur qui sera diffi-
cile, long et coûteux à régler pour les
Le système d’irrigation en Arabie saoudite générations futures.

L’eau du Sahara :
une solution durable ?
Pivot d’irrigation
désaffecté La zone désertique qui s’étend de
l’Algérie à l’Arabie saoudite a connu
un développement agricole specta-
Pivot d’irrigation culaire depuis la découverte d’abon-
Ferme en activité dantes ressources souterraines
fossiles. Partout ont fleuri des péri-
mètres irrigués modernes, reconnais-
sables à leur forme de disque. Ces
Rampe d’arrosage
pivotante ressources, créées à un moment où
le Sahara était bien plus arrosé, se
Forage
renouvellent pratiquement pas. C’est
Pivot d’irrigation
en préparation le cas du système aquifère du Sahara
septentrional qui s’étend sur plus
d’un million de kilomètres carrés et
contient plus de 30 000 milliards de
m3 d’eau
Là où les ressources sont moins
Serres ARABIE SAOUDITE importantes, comme en Arabie saou-
dite, il semble que l’exploitation des
eaux fossiles pour l’agriculture ait
atteint ses limites, à cause de l’épui-
Verger sement physique de la ressource et
du coût économique croissant : plus il
faut pomper profondément, plus cela
est cher.
2 km Cette agriculture «  minière  » crée
Source : 2008, DigitalGlobe.
de graves problèmes sociaux là où

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UNE RESSOURCE MENACÉE • 49

L’utilisation des ressources souterraines dans le monde

Russie

Turquie

États-Unis
Iran Chine

Mexique Pakistan
Arabie
saoudite Inde

Bangladesh
Brésil
Indonésie

Argentine

Prélèvements
dans les nappes 250
souterraines
en 2018
Source : Aquastat, 2021.

100
(km 3 par an)
50

10
1
Moins de 0,05 0,1

L’impact humain sur les nappes phréatiques

APPROVISIONNEMENT REJET S

Utilisation Évacuation Réutilisation


Retraitement

Toit de la nappe
A Q U I F È R E

Pompages Pompages Eaux usées, Eaux usées Irrigation


agricoles urbains rejets industriels domestiques (eau en excédent)

Source : Morris, 2001.

existait une agriculture traditionnelle creuser plus profondément sont alors


d’oasis. Le surpompage dans les obligés de cesser leur activité et sou-
grandes exploitations assèche les vent de migrer vers les villes ou vers
sources et les puits traditionnels : les d’autres pays.
paysans qui n’ont pas les moyens de

01-96-Atlas mondial de l'Eau-NE-Maq4-BAT.indd 49 14/12/2021 10:58


50 •
N om de l ’ auteur

Les pollutions
d’origine agricole
Le développement de l’agriculture intensive entraîne de nombreuses pollutions. Nitrates et
phosphates sont à l’origine du phénomène d’eutrophisation qui induit la croissance incontrôlée
d’algues vertes par exemple ; les pesticides peuvent contaminer l’ensemble de la chaîne
alimentaire. Ces pollutions diffuses, issues de milliers de points de contamination, sont massives
dans les pays du Nord et en forte augmentation dans les pays du Sud.

La pollution par les pesticides des rivières en France

ARTOIS-PICARDIE

SEINE-
NORMANDIE
RHIN-MEUSE
Seine

ne
ô
L o i re Sa

LOIRE-
BRETAGNE
Rhône
Ga

RHÔNE-
nn ADOUR-
ro

Les six agences e MÉDITERRANÉE


de l’eau GARONNE

Concentration
en pesticides par
point de mesure
en 2013
En microgrammes
par litre
Plus de 20
De 10 à 20
De 6 à 9
De 3 à 5
Moins de 3
Sources : Agences et offices de l’eau, SOeS.

01-96-Atlas mondial de l'Eau-NE-Maq4-BAT.indd 50 14/12/2021 10:59


UNE RESSOURCE MENACÉE • 51

Trop de sel et, généralement, dans les régions de Les sources de pollution en Europe
La salinisation est le fléau de l’agricul- grande culture.
ture irriguée. Lorsque l’apport d’eau est Les pesticides. Les effets des pes- Herbicides
trop important et mal maîtrisé ou que le ticides utilisés pour traiter les orga- Utilisation 1 000 km
moyenne
système de drainage est mal conçu, le nismes nuisibles sont encore mal en kg/ha
bilan hydrique des sols est altéré et les connus, étant donné leur grande diver-
sels minéraux s’accumulent. Dans les sité et le manque d’études épidémio-
régions arides et semi-arides, où l’éva- logiques à long terme. On utilise en
poration est particulièrement forte, ce France environ 300 substances actives
processus entraîne une baisse rapide (molécules) qui entrent dans la compo-
des rendements et rend à terme les sition de plus de 8 000 produits. Ces
terres impropres à toute culture. pesticides se retrouvent dans 91  %
On pense que la salinisation a été à des captages de surface et 55 % des
l’origine du déclin des premières civi- points de mesure des nappes souter-
lisations agricoles de Mésopotamie. raines. On retrouve également, plu- 0 0,5 1 1,5
Elle touche encore aujourd’hui près sieurs années après leur épandage,
de 8  % des superficies irriguées au des composés « dégradés » appelés
niveau mondial, et près du quart des « métabolites ». Pour 10 % des cap- Insecticides
Utilisation
terres irriguées au Pakistan et dans les tages superficiels, la teneur est telle moyenne
républiques d’Asie centrale. Il existe que l’eau est impropre à la production en kg/ha
des techniques onéreuses pour pré- d’eau potable, et 26 % ont une qua-
venir ou corriger la salinisation, par lité moyenne ou médiocre. Les deux
l’amélioration des systèmes d’irriga- composants responsables du déclas-
tion ou par la construction d’un sys- sement des captages sont le glypho-
tème de drainage efficace. Seuls les sate (substance active du désherbant
moyens manquent. Roundup de Monsanto), l’atrazine (un
herbicide), le diuron (interdit depuis
Trop d’engrais, 2007) ou encore le chlordécone (insec-
trop de pesticides ticide utilisé pour traiter les bananes 0 0,2 0,4 0,8
Deux principaux types de substance dans les Antilles, interdit en 1993 en
sont à l’origine des pollutions agri- France et dès 1975 aux États-Unis). Fongicides
coles : les engrais (nitrates, composés Les principales zones touchées sont Utilisation
d’azote, et phosphates, composés de les régions de grande culture (Bassin moyenne
phosphore), sources du phénomène parisien et Bassin aquitain), mais aussi en kg/ha
d’eutrophisation, et les pesticides (fon- les cultures spécialisées de la vallée
gicides, herbicides et insecticides). du Rhône et du Languedoc (fruits et
Les nitrates et les phosphates sont vignoble) ou encore les Antilles. Seuls
des éléments nutritifs essentiels à la les massifs montagneux semblent
croissance des plantes : leur absence exempts de contamination.
limite fortement les rendements agri- La lutte contre les pollutions diffuses
coles. Utilisés en trop fortes doses, ils demande un travail de longue haleine,
contaminent les nappes phréatiques car les polluants que l’on retrouve
0 1 2 3
et se retrouvent dans les cours d’eau, actuellement ont parfois été dispersés
où cet excès de nutriments favorise il y a plusieurs dizaines d’années. Il faut
la prolifération de la végétation aqua- agir à la fois sur les pratiques agricoles Nitrates
tique. La respiration des plantes et leur (avec une meilleure utilisation des fer- Surplus dans
les rivières
décomposition entraînent une baisse tilisants et des pesticides), la restau-
Source : Agence européenne de l'environnement, 2012.

en kg/ha
de l’oxygène dissous et la mort d’es- ration des zones humides (qui jouent
pèces animales. Des « zones mortes » le rôle de filtres naturels), la plantation
peuvent ainsi se former, empêchant de haies… Ces actions peu spectacu-
toute activité piscicole ou touris- laires s’inscrivent sur le temps long et
tique comme dans le cas du golfe du ne commencent à porter leurs fruits
Mexique. De nombreux captages que plusieurs années après leur mise
souterrains en France présentent des en œuvre, comme c’est le cas actuel-
taux de nitrates supérieurs à la norme lement en Europe. Leur traitement
de 50  mg/l, notamment en Bretagne nécessite des investissements coû-
(du fait des effluents des élevages teux, voire des changements radicaux 0 20 40
industriels de volailles et de porcs) des modes de production.

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52 •
N om de l ’ auteur

Les pollutions
industrielles et urbaines
Les pollutions dites industrielles sont anciennes : l’eau qui sortait des tanneries était d’une qualité
exécrable, et les orfèvreries ont occasionné de nombreuses intoxications au mercure. Ces
contaminations ont pris une nouvelle dimension avec la révolution industrielle, causant parfois
de graves accidents. Dans les pays du Nord cependant, des mesures ont été prises pour traiter
d’abord les rejets industriels localisés puis les effluents urbains.

Les pluies acides en Chine ces pollutions dites «  émergentes  »


Une pollution grave
est difficile et coûteux, et il demande
Acidité des pluies Les pluies acides ont
souvent des actions « en amont » par
en 2010 pour origine la pollution un changement des modes de vie des
pH de l’air par les oxydes consommateurs (moindre consom-
Plus de soufre et d’azote
4,5 acide au-dessus des grands mation de médicaments, recyclage
5,0 bassins industriels. des plastiques…).
Ces éléments réagissent Un autre problème est lié au poids
5,6 avec les gouttelettes
Moins d’eau pour former des héritages de décennies de rejets
acide
des pluies acides sans précaution qui pèse lourde-
(pH descendant parfois
jusqu’à 4).
ment. Un des cas les plus marquants
Pékin est celui des PCB (polychlorobiphé-
Ces précipitations,
poussées par les vents nyles), commercialisés en France sous
dominants, ont des effets
sur les arbres et sur les le nom de pyralène, utilisés massive-
lacs. Lorsque le pH ment dans l’industrie (transformateurs,
C H I N E descend en dessous de condensateurs, lubrifiants) et dissémi-
5, la survie de la plupart
des poissons n’est plus nés largement dans l’environnement
possible. De vastes jusqu’aux années 1970. Interdits à la
Shanghai zones situées « sous
le vent » des centres
vente en France depuis 1987, ces élé-
Chongqing d’émission ne ments classés comme perturbateurs
contiennent plus que des endocriniens et probablement can-
lacs « morts » au milieu
de forêts malades. cérigènes sont encore très présents
Après les graves crises dans les sédiments des cours d’eau
des années 1980, des (notamment dans l’estuaire de la Seine
Guangzhou mesures efficaces ont
été prises en Occident, et les cours d’eau du Nord et du bassin
avec des effets probants, du Rhône). En se concentrant dans la
mais le phénomène
Mer de Chine pourrait prendre une
chaîne alimentaire, ils rendent les pois-
méridionale ampleur très importante sons impropres à la consommation.
500 km en Chine et en Inde. Le coût du traitement des sédiments
est tel (environ 100 €/m3) que les pou-
voirs publics se contentent d’intensi-
Des progrès limités par Avec le développement des tech- fier les mesures d’interdiction de rejet
les pollutions émérgentes et niques de traitement, la situation est et d’accroître la surveillance. Le traite-
le poids des pollutions héritées en cours d’amélioration en Europe, ment de cette pollution restera donc à
Les États de l’Union européenne ont avec le retour d’espèces de pois- la charge des générations futures pen-
fourni un important effort en matière sons disparues. Mais de nouvelles dant plusieurs décennies.
de traitement des effluents industriels formes de pollution apparaissent,
et urbains. Le taux de traitement comme les résidus médicamen- Les plus pauvres, premières
des eaux usées est ainsi supérieur à teux présents dans les eaux usées, victimes des pollutions urbaines
75  % dans les pays d’Europe occi- ou encore les micro-plastiques. De L’accès à l’assainissement dans le
dentale. En France, il est passé de nombreux efforts doivent être faits monde est un indicateur approxima-
près de 50 % en 1980 à plus de 90 % pour retrouver une qualité optimale tif de la qualité des eaux usées des
aujourd’hui. des eaux rejetées. Le traitement de grandes villes  : l’absence d’accès

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UNE RESSOURCE MENACÉE • 53

L’accès à l’assainissement dans le monde

Part de population ayant accès à l’assainissement en 2020


(en %)
Données
manquantes
0 25 50 75 95 100 Source : OMS, 2021.
à l’assainissement indique que les
effluents sont directement rejetés dans
le milieu, sans aucun traitement.
Les eaux usées contiennent non seu-
lement des déchets organiques, mais Le raccordement aux stations d’épuration en Europe
aussi, mélangés aux effluents indus-
triels, des produits toxiques et des Part de la population
raccordée
métaux lourds. Dans certains pays du
aux systèmes
Sud, la proportion d’habitants ayant
d’épuration collectifs
accès à l’assainissement est inférieure (en %)
à 30  % pour les urbains, et encore De 90 à 100
bien plus faible pour les ruraux. Dans
De 80 à 89
les quartiers déshérités des grandes
villes du Sud, ce sont donc des mil- De 60 à 79
lions d’habitants qui n’ont pas accès à De 40 à 59
l’assainissement. Néanmoins, pour leur
De 10 à 39
usage quotidien en eau, ces mêmes
personnes sont souvent contraintes
de s’approvisionner dans les eaux
usées qui s’accumulent dans les bas-
fonds. Les plus pauvres sont donc les
premières victimes de ces désastres
écologiques, cas flagrant d’injustice
environnementale.
Malgré des progrès récents, le manque
d’accès à l’assainissement est l’un des
problèmes environnementaux, sani-
taires et sociaux les plus aigus dans
les pays du Sud : 2,5 milliards d’habi-
tants, soit plus d’un tiers de la popu-
lation mondiale, n’ont pas accès à un 500 km
Source : Agence européenne pour l'environnement, 2021.
système d’assainissement de base.

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54 •
N om de l ’ auteur

Les risques liés à l’eau


L’eau est une ressource menacée, mais son manque, ses crues et sa mauvaise qualité sont
également une menace pour la vie de millions d’hommes. Plus que les facteurs naturels, c’est
souvent la mauvaise gestion de la ressource qui est la cause des catastrophes. On estime ainsi
qu’au moins 1 million de personnes meurent chaque année de maladies liées à la mauvaise qualité
de l’eau potable ; 90 % d’entre elles sont des enfants de moins de cinq ans.

Des catastrophes meurtrières surtout comme un révélateur de dys- Ainsi, les inondations meurtrières
L’Afrique est un des continents où, fonctionnements antérieurs. De mau- en ville sont l’effet du développe-
proportionnellement à la population, vais choix en termes d’aménagement ment urbain anarchique et de la
les sécheresses et les inondations des cours d’eau ou de stratégie agri- construction dans les bas-fonds.
sont les plus meurtrières. Les évé- cole aggravent ainsi considérable- Dans les zones rurales, comme au
nements météorologiques liés à la ment inondations et sécheresses ; et Mozambique, des études ont montré
variabilité climatique sont évidem- les pollutions agricoles, industrielles que les barrages construits à l’époque
ment l’événement déclencheur de ces et urbaines accroissent la prévalence coloniale ont donné un faux sentiment
catastrophes, mais ils apparaissent des maladies liées à l’eau. de sécurité en arrêtant les petites

Le choléra dans le monde

Fédération de Russie

Ukraine

Afghanistan Chine
Irak
Népal
Maroc Iran
Algérie Bangladesh
Mexique
Haïti Mauritanie Pakistan Myanmar
Mali Soudan Laos
1 Rép. dominicaine Sénégal Niger Tchad
Guatemala Cap-Vert Yémen Inde Thaïlande Vietnam
4 11
Guinée-Bissau 3 6 5 Nigeria 10 Cambodge
Salvador 2 12 Somalie Philippines
Panamá Venezuela Sierra Leone 7 Cameroun Sri Lanka Malaisie
Colombie Liberia 13
8 9 14
Équateur Côte d’Ivoire Kenya
Congo RDC 15
Tanzanie
Brésil Comores Indonésie
Pérou Angola 16
17 Mozambique Papouasie-
Bolivie Zimbabwe Nlle-Guinée
Madagascar
Namibie
Swaziland
1. Honduras Afrique du Sud
2. Nicaragua Argentine
3. Guinée
4. Burkina Faso
5. Bénin Nombre de cas de choléra par pays Date du pic épidémique
6. Ghana de 1990 à 2015 1990 à 1994
7. Togo
750 000
8. Guinée équatoriale 500 000 1995 à 1999
9. São Tomé-et-Príncipe
10. Soudan du Sud 200 000 2000 à 2004
11. Érythrée 100 000
50 000 2005 à 2009
Source : OMS, 2016.

12. Éthiopie 10 000 1 000


13. Ouganda 2010 à 2015
14. Rwanda Seuls les effectifs supérieurs à 1 000 cas sont représentés
15. Burundi
16. Malawi État dans lequel le cumul de décès dépasse les 5 000 au cours de la période
17. Zambie

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UNE RESSOURCE MENACÉE • 55

Sécheresse et famine en Afrique de l’Est

ARABIE SAOUDITE

OMAN
TCHAD

SOUDAN ÉRYTHRÉE YÉMEN

DJIBOUTI

Dégré d’insécurité
alimentaire par région
en 2017
RÉP. CENTRAFRICAINE SOUDAN 5 : Famine
ÉTHIOPIE
DU SUD 4 : Urgence
3 : Crise
SOMALIE 2 : Stress
1 : Minime
RÉPUBLIQUE OUGANDA KENYA
DÉMOCRATIQUE Nombre de personnes en situation
DU CONGO d’insécurité alimentaire
sévère (niveau 3)
5 millions
RWANDA 3 millions
BURUNDI 1 million
500 km
TANZANIE Source : OCHA, 2017.

crues et conduit les populations à Le choléra est également apparu au dans le cas d’une crue équivalente à
s’installer dans des zones dange- début des années 2000 en Afrique du celle de 1910.
reuses. Quant aux famines liées aux Sud (100 000 malades), chez les popu- Une crue centennale est donc tou-
sécheresses, elles surviennent lorsque lations pauvres des grandes métro- jours possible avec des conditions
les pénuries alimentaires, souvent pré- poles qui n’avaient plus les moyens de hydrologiques identiques. Le bilan
visibles, n’ont pas été correctement se raccorder au réseau d’eau potable humain serait sans doute faible mais
gérées, ou ont même été instrumen- et qui s’approvisionnaient dans les les dommages conséquents : plus de
talisées à des fins politiques. cours d’eau recevant les eaux usées. 850  000  personnes seraient expo-
Le même lien entre vulnérabilité aux sées au risque d’inondation, 2 millions
Les maladies liées à l’eau maladies et pauvreté se retrouve dans seraient affectées par des coupures
Parmi les maladies liées à l’eau, le cho- les autres maladies liées à l’eau  : la d’électricité et 2,7  millions par les
léra est sans doute la plus connue. S’il typhoïde (17  millions de personnes coupures d’eau potable. La crue
est aujourd’hui éradiqué dans les pays infectées chaque année), le trachome occasionnerait près de 12  milliards
du Nord, c’est loin d’être le cas au Sud, et l’onchocercose (cécités causées par d’euros de dommages, avec l’inter-
où il sévit de façon endémique, avec de une bactérie et un parasite, respecti- ruption du trafic RER et RATP, l’arrêt
temps à autre des épidémies localisées vement 6 et 18 millions de personnes de très nombreuses entreprises…
pouvant infecter des centaines de mil- infectées), la schistosomiase ou bilhar- Seules des actions de prévention ont
liers de personnes. ziose (200 millions de personnes infec- été effectuées pour limiter la vulnéra-
Ce fut le cas en 1991 au Pérou, avec tées) ou encore les nombreuses formes bilité des réseaux et organiser l’éva-
un million de malades et 10 000 décès, de diarrhées, de parasites intestinaux cuation des sites les plus sensibles,
à cause de la contamination de l’eau et autres hépatites. avec la mise en place de plans de pré-
par des matières fécales, les autori- vention du risque inondation (PPRI).
tés ayant décidé d’arrêter la chlora- Et si la crue de 1910 Mais le Paris des années 2010, plus
tion (désinfection) de l’eau. Les pertes se reproduisait à Paris ? riche et plus sophistiqué que celui de
économiques occasionnées par l’épi- Le risque d’inondation n’est pas 1910, résisterait sans doute beau-
démie ont représenté trois fois le coût écarté dans le bassin de la Seine. coup plus difficilement à la privation,
des investissements effectués dans les Les quatre lacs-réservoirs construits pendant un mois de janvier entier,
dix années précédentes dans l’amélio- entre  1950 et  1990 n’abaisseraient d’électricité, de chauffage et de trans-
ration des réseaux d’eau potable. que de 70 cm la hauteur d’eau à Paris port, et au rationnement en eau.

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56 •
N om de l ’ auteur

Les catastrophes régionales


Dans certaines régions, on assiste à la convergence de multiples crises de l’eau : variabilité
climatique entraînant sécheresses et inondations, construction d’ouvrages pharaoniques
perturbateurs pour l’environnement, destruction d’écosystèmes, pollutions agricoles, industrielles
et urbaines, et enfin, en retour, problèmes sanitaires et sociaux graves. Parmi ces catastrophes
qui touchent des régions entières, le désastre de la mer d’Aral est le plus connu.

La mer d’Aral rapidement baissé : de 1960 à 20015, sanitaire. La région entière, balayée
La catastrophe de la mer d’Aral est la mer d’Aral a perdu 92  % de son par des vents qui transportent les sels
un cas exemplaire de convergence volume, et sa salinité est passée de laissés à découvert par le retrait de
de multiples crises de l’eau. Exutoire 1 à 100  g/l (l’eau de mer contient la mer, connaît un des plus forts taux
naturel de deux grands fleuves, 35  g/l). En amont, le bilan est tout de cancer au monde et une très forte
l’Amou-Daria et le Syr-Daria, la mer aussi catastrophique, car l’irrigation a mortalité infantile.
d’Aral a été victime de la volonté des été très mal maîtrisée : l’accumulation Les efforts réalisés pour sauver l’Aral
autorités soviétiques de faire de l’Asie de sels stérilise les terres agricoles et restent très insuffisants. Seule la
centrale la principale région coton- le taux de pesticides dans les eaux « petite Aral » au nord, alimentée par
nière de l’URSS. résiduelles est extrêmement élevé. le Syr-Daria et barrée par une digue,
À cause de l’augmentation des pré- La catastrophe écologique (toutes pourra peut-être échapper à la trans-
lèvements pour l’agriculture irriguée, les espèces de poisson endémiques formation en désert salé et toxique
les apports des deux fleuves ont ont disparu) se double d’un désastre qu’est devenue la « grande Aral ».

La mer d’Aral
1960 2014
Mer d’Aral
Barrage Kok-Aral du Nord Aral
Aralsk (2006)

KAZAKHSTAN KAZAKHSTAN
Novokazalinsk Zhangaqazaly
Djousaly Mer d’Aral Zhosaly
du Sud
Kazalinsk Qazaly
Centre d’essai MER Syr-Daria
d’armes biologiques
– 67 Syr-Daria – 45
D ’A R A L MER Extension de la mer d’Aral
en 1998
D’ARAL
Extension de la mer d’Aral
en 1960
U R S S Muinak
Mouynak
Source : Diercke Weltatlas, 2008.

Koungrad Qongirot
OUZBÉKISTAN
Noukous OUZBÉKISTAN Noukous
Amou-Daria Amou-Daria
– 45 Tachaouz – 24 Dachogouz
Lac Sarykamych Ourguentch Ourguentch
Lac Sarykamych
TURKMÉNISTAN 100 km 100 km
TURKMÉNISTAN

La mer d’Aral Occupation du sol Activités


Eau à teneur Port de pêche Site nucléaire
moyenne en sel Delta Salinisation des terres
(5 g/l) Industrie Réhabilitation des
Zones irriguées Bandes forestières agroalimentaire ports de pêche
Eau à forte (coton et/ou riz) de protection (arbres
teneur en sel résistants au sel) Industrie textile Salines
(70 g/l)

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UNE RESSOURCE MENACÉE • 57

Le Colorado, Le Colorado et le « plumbing system »


un Aral américain ?
Rivière Bassin versant du Colorado
Long de 2  330  km, le Colorado, le
plus grand fleuve de l’ouest des Canal,
Rivière dérivation Bassin versant du Colorado
États-Unis, a été un modèle d’amé- Zone
Canal,irriguée
dérivation NEVADA
UTAH
nagement intégral d’un bassin ver- Barrage CALIF. NEVADA COL.
Zone irriguée
UTAH
sant. Les États-Unis y ont construit de 1. Imperial Dam
Barrage CALIF. COL.
très grands barrages, dont le Hoover 2. Laguna Dam
1. Morelos
3. ImperialDam
Dam Lac Powell
Dam et le Glen Canyon Dam, et ont 2. Laguna Dam Lac Mead
ARIZ. Lac Powell
détourné ses eaux vers la Californie 3. Morelos Dam N.-M.
Lac Mead
et le Nouveau-Mexique. 120  m3/s ARIZ.
N.-M.
d’eau du Colorado partent aujourd’hui
vers les villes de Los Angeles et de
San Diego. Une partie des eaux est
également détournée juste avant la Salton Sea
ÉTATS-UNIS
frontière mexicaine vers les grands Salton Sea

Ea

o ra d o d o
ÉTATS-UNIS

s t H Eas t

C o l C o lo ra
périmètres irrigués de l’Imperial Im

i g h Hi g r e r
ARIZONA
Valley, à l’extrême sud de la Californie. CALIFORNIE

l in hl in i a i

Co C l al V a V a
p
We W

eC e
Im

ac ac
ARIZONA
stsi est

Le Mexique, où se trouve l’embou-

a n Ca n l
CALIFORNIE

he he
e
de side

lla lla
o
chure du Colorado dans le golfe de
Ma M

Ca C
Brawley
in ain

na a na
Californie, a signé en 1944 un traité
Ca C

l
nal ana

a
avec les États-Unis qui lui réservait Brawley
1
l
Central Canal All American

l
ll l
35  m3/s d’eau, sans en préciser la Canal
l

1
e le
qualité qui allait en se dégradant  : Central Canal All American

y y
El Centro Canal 2
la salinité atteignait ainsi 1 500 ppm,
El Centro
Calexico 2
contre seulement 50 «  naturelle-
Yuma
ment ». L’eau était impropre à l’irriga- Calexico Alamo Canal 3
Mexicali Yuma

a d o ra d o
tion et à la consommation humaine, Alam
et transformait le delta du Colorado, M E X I Q U E o Canal
Mexicali 3

lo
20 km

Co
porteur d’une riche biodiversité, en MEXIQUE
lor
20 km Co
vaste marécage saumâtre. Un effort
a cependant été réalisé afin d’amé- Le raccordement aux stations d’épuration en Europe
Le Colorado est un des
liorer les méthodes d’irrigation et de Imperial Dam (1)
CanalCanal

fleuves les plus aménagés


baisser la salinité de l’eau à 240 ppm Le Colorado est un des
Imperial Dam (1) du monde, avec de multiples
fleuves les plus aménagés
Main Main

grâce à la construction d’une usine de Laguna Dam (2) grands barrages


du monde, avec de multiples
désalinisation juste avant la frontière tronçonnant son cours et un
Gila Gravity

Laguna Dam (2) grands barrages


mexicaine. Tous les problèmes ne réseau de transferts d’eau
CanalCanal

tronçonnant son cours et un


Gila Gravity

sont pas résolus pour autant : la divi- sillonnant son bassin versant.
réseau de transferts d’eau
COLORADO

À tel point que les auteurs


All American

sion des eaux entre les États fédérés GILA sillonnant son bassin versant.
américains parlent à son
COLORADO

américains, réglée par un arbitrage en RIVER À tel point que les auteurs
All American

GILA propos de « plumping


1922, est peu adaptée à une région en américains parlent à son
RIVER system », un système de
propos de « plumping
forte croissance démographique, et la canalisation totalement
Yuma Main Canal system », un système de
pollution par les engrais et les pesti- artificialisé, dont le schéma
canalisation totalement
cides reste préoccupante. Yuma Main Canal ci-contre ne donne
artificialisé, dont le schéma
qu’un aperçu simplifié.
Le Colorado aurait pu connaître une ci-contre ne donne
CanalCanal

évolution potentiellement similaire à qu’un aperçu simplifié.


Main Main

l’Aral, mais la prise en compte rela-


Rivière
tivement précoce des problèmes et
West West

des investissements massifs ont per- Alamo Canal Rivièreou dérivation


Canal
mis de stabiliser puis d’améliorer pro- (principal et secondaire)
CanalCanal

Alamo
Morelos Canal
Dam (3) Canal ou dérivation
visoirement et localement la situation. ÉTATS-UNIS (principal et secondaire)
Canal de retour
East Main

Morelos Dam (3)


MEXIQUE
La perspective d’une baisse globale ÉTATS-UNIS Station
Canal de retour
de la ressource dans les prochaines
East Main

MEXIQUE (surveillance, entretien,


décennies fait peser de lourdes Station
qualité des eaux...)
N (surveillance, entretien,
menaces sur les habitants du bassin
qualité des eaux...)
et laisse peu d’espoir pour la restau- N Sources : Mutin, 2000 ; Bethemont, 1999 ;
US Bureau of Reclamation, Lower Colorado.
ration future du delta du fleuve. Sources : Mutin, 2000 ; Bethemont, 1999 ;
US Bureau of Reclamation, Lower Colorado.

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58

EN CONCLUSION
Une ressource
menacée
Une ressource mise en danger
Même lorsque les prélèvements sont faibles
par rapport à des ressources qui semblent
abondantes, ils peuvent entraîner des modi-
fications importantes de la qualité des eaux.
Souvent, les dégradations les plus dan-
gereuses, tant pour les écosystèmes que
pour la santé humaine, ne sont pas les plus
spectaculaires. Ainsi, les effets négatifs des
grands barrages qui détruisent des écosys-
tèmes entiers et modifient l’hydrologie et les
flux sédimentaires des fleuves sur des cen-
taines de kilomètres sont très médiatisés.
Mais la multiplication de petites digues, la
destruction de zones humides, l’utilisation
d’intrants agricoles par des milliers de pay-
sans, et par endroits, le pompage excessif
des ressources souterraines qui entraîne un
abaissement rapide des nappes phréatiques,
peuvent tout aussi bien provoquer des dom-
mages irréparables aux ressources en eau.

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59

De l’eau
pour tous ?
Ce n’est que le 28 juillet 2010 que l’Assemblée générale
des Nations unies a reconnu « le droit à une eau potable
salubre et propre comme un droit fondamental, essentiel
au plein exercice du droit à la vie et de tous les droits
de l’homme », par 122 voix pour, 0 contre et 41 abstentions,
dont les États-Unis, le Canada et la Turquie.
On ne peut que s’étonner de la date tardive de cette
reconnaissance et des réticences manifestées à l’égard
de cette résolution pourtant non contraignante.
Mais c’est oublier que l’eau est l’objet de nombreux conflits
dans le monde, de l’échelle locale au niveau mondial.
Le droit à l’eau « pour tous » est loin d’être effectif,
notamment pour les plus démunis.
L’eau est en effet un excellent révélateur des inégalités
sociales : plus on est pauvre, moins on a accès à
l’assainissement, plus on la paye cher et plus on est exposé
à des maladies liées à l’eau. Le rapport sur le développement
humain 2006 du Programme des Nations unies pour
le développement (PNUD) souligne ainsi que « la crise
de l’eau trouve son origine dans la pauvreté, l’inégalité
et des relations de forces inéquitables ».

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60 •
N om de l ’ auteur

Une valeur inestimable


De nombreux scientifiques essaient d’évaluer le prix des services rendus par les fleuves et les
zones humides, la meilleure façon de rentabiliser la ressource ou de tarifier l’eau potable. Ces
discussions nécessaires négligent cependant souvent la valeur symbolique de l’eau, par définition
inestimable. L’eau tient une grande place dans toutes les grandes religions, dans les mythes et les
légendes, mais aussi dans les paysages, qu’ils soient urbains ou ruraux.

L’eau et la spiritualité L’eau, traditionnellement considérée essai sur l’imagination de la matière,


Il faudrait des ouvrages entiers pour comme un des éléments fondamen- publié en 1942, l’importance de l’élé-
rappeler l’importance de l’eau dans taux avec l’air, la terre et le feu, appa- ment liquide dans l’imaginaire occi-
les grandes religions monothéistes : raît également dans d’innombrables dental. Il écrit ainsi que «  l’eau est
le jardin d’Éden est irrigué par un récits cosmogoniques, des Kanaks de l’objet d’une des plus grandes valo-
fleuve divisé en quatre bras ; Moïse, Nouvelle-Calédonie aux Amérindiens, risations de la pensée humaine  : la
«  sauvé des eaux  », fait jaillir l’eau en passant par les mythes gréco- valorisation de la pureté. Que serait
du rocher  ; Jésus est baptisé dans romains. Plus récemment, le philo- l’idée de la pureté sans l’image d’une
le Jourdain  ; et seule la purification sophe Gaston Bachelard (1884-1962) eau limpide et claire, sans ce beau
rituelle autorise la prière dans l’islam. a montré dans L’eau et les rêves  : pléonasme qui nous parle d’eau
pure ? »
Cette valeur symbolique largement
Bénarès Un fleuve sacré partagée explique pourquoi, dans
La principale ville de très nombreuses cultures, l’eau
sainte de l’hindouisme, ne peut être considérée comme une
Va r u n a Bénarès (Varanasi),
voit chaque année des
simple marchandise.
millions de pèlerins
venir pour prier. Plus L’eau et la ville
Gare de 80 ghats, escaliers
de pierre descendant La plupart des grandes villes mon-
vers le Gange, bordent diales sont construites près de l’eau,
Gare Gare le fleuve sacré et soit au bord de la mer, soit le long de
permettent aux
Hindous de faire des grands fleuves ou de lacs. L’eau tient
Mosquée ablutions. Ces derniers
d’Alamgir donc un rôle considérable dans la vie
Bharat Mata peuvent également
être incinérés sur les
urbaine, traditionnellement pour le
e
ng commerce (importance des ports
Vishwanath Ga rives du fleuve, ce qui
Mosquée de Gyaripavi permet de se libérer fluviaux) et pour les activités artisa-
du cycle des
Saint-Thomas réincarnations. Un peu nales (tannerie, utilisation de l’éner-
en retrait, le temple gie hydraulique dans les fabriques).
Principaux temples Vishvanāth dédié à Elle a pris dans certaines cités un
hindous Shiva fut plusieurs fois
VA R AN A S I détruit et remplacé par rôle central dans le déploiement de la
Ghats (marches de une mosquée. L’édifice magnificence du pouvoir : le long des
( B é na r è s ) pierre descendant actuel, construit en
vers le Gange) 1780, appelé aussi
rives de la Seine, l’Église, la royauté
« temple d’or », est le puis la République affichent les plus
Durga Mosquée, sanctuaire
plus célèbre des beaux symboles de leur puissance,
musulman
Tulsi Manas 23 000 temples
hindous de la ville, de Notre-Dame au Louvre en passant
Église
qui compte également par l’Assemblée nationale.
de nombreuses D’autres villes sont bâties littérale-
Source : Cadène, 2008.

mosquées.
Ga

Bénarès, qui aurait été ment sur l’eau, traversées de canaux.


nge

fondée selon la C’est le cas de Suzhou, fondée il


légende il y a plus de
5 000 ans par le dieu
y a plus de 2  500  ans en Chine,
Shiva, compte mais aussi de l’antique Tenochtitlán
New aujourd’hui près de
Vishwanath (actuelle Mexico), construite sur le
1 500 m 1,5 million d’habitants.
lac Texcoco et entourée de jardins

01-96-Atlas mondial de l'Eau-NE-Maq4-BAT.indd 60 14/12/2021 10:59


DE L’EAU POUR TOUS ? • 61

flottants, les chinampas. Une partie Tenochtitlán (l’actuelle Mexico)


de ces jardins, toujours cultivée de
Chaussée Tepeyac
nos jours et classée au patrimoine
mondial de l’Unesco, est l’une des Tlatelolco
(marché)

o
coc
attractions touristiques de la ville et le

Te x
poumon vert de cette agglomération
de près de 20  millions d’habitants.

Lac
En Europe, Bruges, Amsterdam,
Stockholm et, plus au nord, Saint-

Lac
Pétersbourg, avec leur lacis de ponts CUEPOPÁN TEOPÁN

Te x
et de canaux, prétendent au titre de

coc
« Venise du Nord ».

o
Ce rapport esthétique entre la ville et
l’eau, après la révolution industrielle
qui a vu l’installation d’infrastructures Chaussée
Tacuba ENCEINTE
polluantes sur les rives des fleuves et SACRÉE
canaux, a été réactivé récemment. ATZAC ALCO
Les friches industrielles ont été recon-
quises et les fronts de rivière et de MOYOTL ÁN
lac, les abords des canaux qu’il était
autrefois question de recouvrir pour Teotihuacán
y faire passer des autoroutes, ont
été réhabilités. L’exemple est venu
d’Angleterre (East End à Londres) et Lac
Texcoco
d’Amérique du Nord, mais cette mode
s’est rapidement répandue dans le Tenochtitlán
monde : Shanghai et son Bund réha- Chaussée Iztapalapa
bilité, la gentrification des canaux
Source : http://www.ancientmexico.com

Amsterdam
à Paris, le Waterfront du Cap sont
autant d’exemples de la reconquête
de leurs espaces aquatiques par les
villes.
Ha
ar
L’eau et les paysages
H

lem T
E

er IJ
S tr
t a at C’est probablement en Chine que
Grach
U nden
G ra a c h t )

l’attention au paysage en tant que


Gare
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Grac
e iz sen G

valeur esthétique est apparue pour


Gra

er
West
t)
ac h

la première fois. En chinois, «  pay-


in
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Pie t H
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al

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de sage » se dit shanshui, ce qui signifie


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Bourse mot à mot « montagne, eau ». À partir


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Canal des P

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Da

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He Oosterdok
Nieuwezud

du viie siècle, shanshui a pris aussi le


Canal de l’Empe
Canal des Seigne

Westerkerk QUARTIER
Dam ROUGE nd
r ik
k ad sens de «  peinture de paysage  » et
Palais Dam Waag e
Royal stra sera désormais utilisé comme tel dans
at at
JORDAAN VIEILLE la littérature chinoise puis japonaise.
tr a
e rs
Rokin

VILLE r g
bu Les peintures de paysages classiques
Va lken
représentent toujours un cours d’eau.
Ca Hôtel de ville En Europe, l’apparition du paysage
na Pla
ld REMBRANTPLEIN nta
Ca es ge
Mid comme sujet pictural est plus tardive,
na
ld Seign ra c h t ) den mais l’eau y tient un rôle tout aussi
e urs H e re n G
Wee

e ( lan
l ’ Em p
LEIDESEPLEIN ereur c ht) important : que l’on pense aux vedute
( Ke i z e r s G r a
spe rs t r

nal d de Canaletto pour les paysages


Ca

es Pr i traat
ra c h t )
a at

nces hatis
(Pr insen G Sar p urbains, aux Nymphéas de Monet, ou
OOST encore aux innombrables peintures
Weteringscha marines de la période moderne (ce
Rijksmuseum ns
K a de s t ad h o u 500 m genre étant curieusement totalement
PIIP d e rs
absent de la tradition chinoise).

01-96-Atlas mondial de l'Eau-NE-Maq4-BAT.indd 61 14/12/2021 10:59


62 •
N om de l ’ auteur

Une ressource disputée


Les frontières des États suivent parfois les cours d’eau et découpent les bassins versants : on
compte aujourd’hui 263 bassins transfrontaliers majeurs, représentant 60 % des ressources en eau
mondiales. Ce partage des eaux est une source potentielle de conflits : les mots « riverain » et
« rival » partagent d’ailleurs la même racine (rivus, « ruisseau »). Mais il y a loin du conflit potentiel à
sa matérialisation.

La question des guerres est beaucoup moins cher et moins Les difficiles relations
de l’eau risqué politiquement), il n’empêche amont-aval
Les prévisions catastrophiques sur que la question de l’eau peut être Dans les régions où l’eau est rare,
les futures guerres de l’eau sont utilisée dans les négociations inter- les conflits entre États partageant un
contestées. L’eau est plus un révé- nationales, généralement comme bassin versant peuvent s’exacerber.
lateur de tensions qu’un facteur moyen d’échange contre d’autres Lorsque l’amont montagneux où ces
déclenchant  : elle envenime les avantages. De fait, les conflits les fleuves prennent leur source et l’aval
conflits préexistants et peut par- plus difficiles à résoudre autour de plus sec n’appartiennent pas au
fois au contraire accélérer, par la l’eau n’auront pas lieu militairement même pays, des situations de dépen-
construction de projets communs, entre États mais sur les plans poli- dance apparaissent.
les réconciliations. tique et économique entre régions Le cas exemplaire est celui de
S’il semble exclu que des guerres (comme en Espagne), entre villes et l’Égypte (taux de dépendance de
«  classiques  » aient lieu pour l’eau campagnes, et entre groupes sociaux 97  %, l’essentiel des eaux du Nil
(mobiliser des ressources alternatives autour de l’accès et du prix de l’eau. venant d’Éthiopie et d’Ouganda).

Les États en dépendance hydrique

Part des ressources en eau provenant


d’un autre État en 2018 (en %)
De 90 à 100
Source : FAO, Aquastat, 2021.

De 60 à 89,9
De 30 à 59,9
De 10 à 29,9
Donnée
De 0,1 à 9,9 indisponible
0

01-96-Atlas mondial de l'Eau-NE-Maq4-BAT.indd 62 14/12/2021 10:59


DE L’EAU POUR TOUS ? • 63

Le système du Jourdain

LIBAN Évaporation du Une mer qui se vide


lac de Tibériade L’essentiel de l’eau du
Jourdain supérieur
Jourdain provient des
1 hautes terres du sud
SYRIE du Liban et du plateau
ée du Golan, occupé par
Périmètres Plateau Israël depuis 1967 (1).
du Golan
an

irrigués Ces eaux alimentent


du Nord le Lac de Tibériade (2)
rr

2 et s’écoulaient
ite

naturellement vers la
éd

Conduite nationale Lac de mer Morte. Mais elles


r M

(vers le sud d’Israël) Tibériade Yarmouk Rivière sont en grande partie


Yarmouk détournées
Me

5 artificiellement pour
Triangle alimenter les grandes
du Yarmouk villes côtières
3 israéliennes, dont
Bassin du Tel-Aviv. Construit
4 à partir de la fin des
IRBID Yarmouk
années 1950, le
1,1 million d’hab. National Water Carrier
Ghor (3), ou conduite
nationale d’eau, long
de 130 km, est la
Jourdain

colonne vertébrale
ISRAËL de tout le réseau
d’adduction d’eau
CISJORDANIE en Israël.
Le Jourdain inférieur
J O R DA N I E (4) n’est plus alimenté
Débit annuel (millions de m3) actuellement que par
son affluent le Yarmouk
850 (5), qui marque la
450 Ghor frontière entre la Syrie
AMMAN-ZARQA
300 et la Jordanie. Comme
2,7 millions d’hab. ses eaux sont
200 6 également détournées
150 JÉRUSALEM vers Amman et les
100 périmètres irrigués
Source : Molle et al., IWMI, 2007. jordaniens, le volume
50 d’eau qui atteint la mer
20 Morte (6) ne cesse de
10 décroître, ce qui
Mer explique la baisse de
Circulation de l’eau Morte son niveau, de -390 m
sous le niveau de la
Périmètre irrigué 20 km mer en 1960 à -430 m
Principales agglomérations aujourd’hui...
X Les numéros font référence au commentaire

L’Irak (dépendance de 53 %), qui est l’Éthiopie). Si l’État d’amont est en Utilisation de l’eau en Israël
à la merci de la Turquie où se trouvent mesure de le faire, il pourra utiliser et en Palestine
les sources du Tigre et de l’Euphrate, l’eau comme moyen de pression sur Millions de m3
ou encore le Pakistan (dépendance les États d’aval (la Turquie face à la 800
de 76  %, les sources de l’Indus se Syrie et à l’Irak). Les « risques hydro- 700
trouvant dans la région disputée du politiques » dans les grands bassins 600
Cachemire indien) sont dans des envi- internationaux se «  cristallisent  » le
500
Source : Alatout, 2000.

ronnements similaires. plus souvent autour de grands amé-


400
Ces situations potentielles de conflits nagements : c’est le cas par exemple
sont aggravées lorsqu’il existe une du barrage de la Grande Renaissance 300
différence de puissance entre les en Éthiopie autour duquel se noue le 200
États d’amont et d’aval. Si l’État conflit entre ce pays et l’Égypte. 100
d’aval est plus puissant, il sera tenté Cela ne veut pas dire que le conflit est 0
de s’approprier la ressource (comme certain. Les questions « techniques » A q. tal ntal ord ôtier aza dain
i den rie q. n A q. c G our
l’Afrique du Sud au Lesotho) ou de de gestion commune de grands occ A q. o A J Aq. :
Aquifère
menacer les États d’amont en cas fleuves peuvent être, au contraire,
d’aménagements non conformes l’occasion de coopération entre pays Israël Colonies Palestine
à ses intérêts (l’Égypte face à ennemis, comme l’Inde et le Pakistan.

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64 •
N om de l ’ auteur

Les concurrences régionales


Les tensions entre riverains apparaissent aussi au sein même des États : on peut citer l’exemple
des États fédéraux du bassin du Colorado aux États-Unis, mais aussi ceux de l’Espagne ou de
l’Inde. Avec l’accent mis récemment sur la valorisation économique optimale de l’eau, de nouvelles
tensions apparaissent entre les villes et les périmètres irrigués, les premières affirmant qu’elles
produisent plus de richesses et d’emplois par mètre cube d’eau consommé.

Des villes du Sud assoiffées La valeur ajoutée de l’eau par secteur d’activité
La croissance urbaine et le développe-
Valeur ajoutée pour un million de m3 d’eau consommés (euros)
ment économique dans les pays émer- 45 000
gents ont fait croître exponentiellement 40 000
une demande industrielle et urbaine 35 000

Source : Australian Bureau of Statistics, 2004.


jusque-là négligeable. Dans les pays où 30 000
la ressource est abondante et l’agricul- 25 000
ture irriguée peu importante (Brésil), la 20 000
demande croissante des villes peut être 15 000
plus facilement satisfaite. Mais dans 10 000
de nombreuses autres régions (Inde
5 000
du Nord, Chine du Nord ou Afrique du
0
Sud), la soif des villes demande une Mines Industrie Exploitation Électricité Fourniture Agriculture
forestière et gaz d’eau
réorientation importante de la gestion et pêche
de l’eau : la priorité donnée aux grands
aménagements agricoles est revue en Outre des discussions sur la précision d’hectares) et industriel (à partir de
faveur de l’approvisionnement urbain. du mode de calcul, des critiques sont l’hydroélectricité), une région histo-
Or, pour ce faire, il faut parfois aller formulées face à ces raisonnements. riquement déshéritée. Il s’appuie sur
chercher de l’eau très loin : à 500 km Premièrement, dans les pays à forte de nombreux grands barrages, dont
dans les montagnes du Lesotho pour agriculture irriguée, l’eau est le prin- le plus important (48 km3 de retenue)
Johannesburg, à plus de 1  000  km cipal facteur limitant de la production est symboliquement nommé Atatürk,
dans le Yangzi Jiang pour Pékin. agricole. Elle est de fait largement indi- du nom du fondateur de la République
Cette évolution ne se fait pas sans rectement utilisée par les urbains sous turque. Mais ce projet répond éga-
résistance ; des agriculteurs se voient forme de denrées alimentaires. Séparer lement à des objectifs géopolitiques
contester des droits très anciens et des rural et urbain n’a pas beaucoup de nationaux et internationaux.
régions entières sont parfois privées de sens si l’on tient compte du circuit Il vise à rééquilibrer le territoire natio-
leurs ressources. complet des produits. Deuxièmement, nal, mais surtout à intégrer les popu-
Ces nouvelles politiques de gestion avant de capter l’eau au loin, des lations kurdes (dont le nom n’est pas
s’appuient sur des arguments écono- efforts de sobriété peuvent être réali- mentionné) qui peuplent la majeure
miques reposant essentiellement sur sés dans les villes (réduction des fuites partie de la zone touchée par le pro-
la meilleure valorisation de l’eau, en des réseaux, recyclage partiel, etc.), ce jet. Au niveau international, l’utilisation
termes de PIB et d’emplois, par les qui permettrait d’amoindrir les volumes effective de l’eau en Turquie permet
utilisations urbaines. Les quelques nécessaires à leur approvisionnement. de justifier les « droits » du pays face
exemples calculés en Australie Mais la consommation des villes du aux demandes futures de la Syrie et
montrent que l’utilisation agricole est Sud, amenée à se développer, devien- de l’Irak.
toujours moins rentable que d’autres dra une source de conflits futurs.
activités, comme les mines ou l’indus- La gestion de l’eau :
trie. Une preuve supplémentaire avan- La Turquie : le grand projet une question politique
cée est que, contrairement aux urbains, anatolien et la question kurde Dans les régions qui connaissent un
les agriculteurs paient rarement le prix Le projet du Sud-Ouest anatolien (en climat marqué par une longue séche-
total de l’approvisionnement en eau, turc Güneydogu Anadolu Projesi ou resse estivale, la gestion de l’eau a
sinon leurs productions ne seraient GAP) prévoit de mettre en valeur, par toujours été une question politique de
plus rentables. le développement agricole (1,8 million premier plan pour régler les conflits

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DE L’EAU POUR TOUS ? • 65

Les transferts d’eau en Chine


Une Chine
Shenyang coupée en deux
Sur le plan hydrologique,
la Chine est coupée en
deux. Au sud du Chang
Huang He Jiang (ou Yangzi Jiang)
Pékin
(1), le pays est bien
Tianjin Golfe arrosé, alors que le
de Bohai nord connaît des
précipitations moins
abondantes et une
He pénurie croissante
a ng
Hu liée à la croissance
économique rapide.
Lanzhou 2 Mer Jaune C’est pour pallier ce
5 déséquilibre que le
gouvernement chinois
Xi’an construit un gigantesque
système de transferts
d’eau du sud vers les
4 grandes villes du nord
Source : Diercke Weltatlas, 2008.

CHINE 3 Nanjing
avec trois « routes » :
Shanghai à l’est, le long de
Barrage des

g
Ji

an
l’ancien « Grand Canal »
Trois-Gorges zi
ng (2), au centre à partir
Ya
du barrage des
Trois-Gorges (3) et
Chongqing à l’ouest (4). Mais ces
1 travaux et les nombreux
300 km
lacs de barrages
n’empêchent pas le
Risques d’inondation Gestion de l’eau
Huang He (5), le grand
Zone où l’eau manque Canal
Plaine inondable X Les numéros fleuve du Nord, de
du fait des actions humaines Transfert font référence s’assécher régulièrement
Rivière endiguée Barrage-réservoir d’eau au commentaire avant de rejoindre la mer.

entre les différents acteurs et les rivali- construits par l’État fédéral, l’État de un jeu complexe, avec une multitude
tés entre villes et entre régions. Californie et les services des eaux d’acteurs et autant d’arguments (envi-
L’Espagne  : l’eau de la nation ou locaux. Ce système correspond à des ronnementaux, économiques, poli-
des régions  ? L’histoire de l’eau en priorités parfois contradictoires : pour tiques), des luttes parfois très violentes
Espagne est liée aux évolutions poli- l’État de Californie, l’irrigation de la impliquant des personnages devenus
tiques du pays. Ainsi, la première Grande Vallée  ; pour la municipalité mythiques, comme W.  Mulholland,
vague de construction de barrages et de Los Angeles, l’approvisionnement ingénieur des eaux de la ville de
la planification des transferts massifs a d’une ville en forte croissance ; pour Los Angeles  : comment s’en éton-
été impulsée par de jeunes ingénieurs l’État fédéral, la fourniture en eau de ner lorsqu’il s’agit d’apporter l’eau à
traumatisés par la défaite de 1898 l’une des principales implantations Hollywood, qui, sans ces aqueducs, ne
face aux États-Unis, dans la perspec- du complexe militaro-industriel. C’est serait qu’une bourgade poussiéreuse ?
tive du Regeneracionismo. Mais la
grande impulsion « hydraulique » est La Turquie et le GAP
venue sous Franco (surnommé « Paco
Barrage 75 km
Rana » ou « Franco la grenouille », tant
Aire couverte
il inaugura de barrages), avec notam- par le GAP TURQUIE
ment les transferts du Tage vers la Irrigation (en service Keban
Méditerranée. Le lien entre les grands ou en construction)
Elazig
projets hydrauliques et le régime fran- Principaux canaux
Tunnel d’Urfa Lac
quiste explique pourquoi le plan hydro- de Van
logique national, visant notamment à
te

transférer l’eau de l’Èbre vers le sud,


ra

Diyarbakir
ph

est contesté pour des raisons environ-


Eu

nementales, mais aussi politiques. Les Atatürk


Mardin Ilisu Cizre
régions autonomes veulent conser-
ver « leur eau » face aux politiques de Gaziantep Birecik

redistribution de l’État central.


SYRIE re
T ig

La Californie : irriguer le rêve amé-


IRAK
ricain. Le réseau de transfert d’eau en Sources : De Tapia, 2003 ; Mutin, 2002 ; GAP ; M. Buzin, S. de Tapia «Le Projet de l’Anatolie du Sud-Est
Californie s’appuie sur des aqueducs (GAP) dans son contexte national turc et régional moyen-oriental », Bulletin de l’Association de géographes français, 2015.

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66 •
N om de l ’ auteur

L’accès à l’eau,
un enjeu mondial
Le 6e Objectif de développement durable (ODD), défini en 2015 pour l’horizon 2030, vise à
« garantir l’accès de tous à l’eau et à l’assainissement et assurer une gestion durable des
ressources en eau ». Mais en 2022, 600 millions de personnes n’ont pas un accès minimal à l’eau
potable et plus de 1,2 milliard à l’assainissement. C’est un objectif très ambitieux, sachant que les
pays du Nord ont mis près d’un siècle pour fournir l’accès universel à l’eau à leurs populations.

La diversité des modes d’accès que l’on retrouve dans les quartiers Qui fournit l’eau la moins chère ?
dans les villes du Sud aisés des grandes villes) et ceux
Prix par m3 d’eau, en dollars
Dans les pays du Sud, il existe un gra- qui n’ont pas du tout accès à l’eau 5
dient entre les « branchés », ceux qui potable.

Source : PNUD, Rapport mondial sur le développement humain, 2006.


ont accès à l’eau potable en perma- Proches des premiers, on trouve les 4
nence à domicile (standard occidental habitants connectés certes, mais à
un réseau défectueux, tant en ce qui
3
Prix de l’eau dans de grandes concerne la quantité d’eau (coupures
villes d’Afrique fréquentes, pression insuffisante) que
1 2
1 sa qualité (eau non potable). Ils sont
Ouagadougou
Ouagadougou obligés d’acheter de l’eau en bouteille
1
2 ou de s’approvisionner aux bornes-
2
Addis fontaines, souvent gérées de façon
Addis Abeba
Abeba 0
collective. Celles-ci permettent un

ivé x

rs

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bl es

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pu rvic
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accès relativement aisé à l’eau. Mais, se

ci i
nd

r
po

Se

Ca
3
3 Kigali lorsque leur réseau est trop lâche, les
Kigali
habitants doivent faire appel à des col- Données concernant 47 pays
porteurs d’eau, petits entrepreneurs et 93 lieux géographiques.
4 Dakar
4 Dakar privés, utilisant des camions-citernes
pour la vente en gros, puis d’autres l’accès est universel, et les autres,
5 Lusaka moyens de transport pour les petits où le taux n’est que de 80  % pour
5 Lusaka
volumes (âne, vélo, charrette à bras). l’eau potable et seulement 50 % pour
Enfin, les plus mal lotis se contentent l’assainissement.
0 0,5 1 1,5 2
0 0,5 1 1,5 2 de sources non sécurisées (rivières, En Afrique subsaharienne, ces taux
Dollars par m33
Dollars par m
puits rudimentaires peu profonds ne sont respectivement que de 68 %
Fournisseur
Fournisseur officiel
officiel souvent contaminés par les eaux et 30 %. La différence Nord-Sud est
Fournisseur
Fournisseur informel
informel usées), sans garantie sur la quantité encore plus marquée lorsqu’on exa-
ou la qualité. Contrairement à d’autres mine les connexions à l’eau potable
produits, il n’y a pas de lien entre la à domicile : les taux sont proches de
qualité du service et le prix payé : au 100 % dans les pays du Nord, mais
contraire, plus le service est irrégulier tombent à 44 % dans les PVD et 16 %
SÉNÉGAL
et plus il y a d’intermédiaires, plus le seulement en Afrique subsaharienne.
4 SÉNÉGAL
4 1 BURKINA prix est élevé. En outre, si entre 1990 et 2004 le taux
BURKINA
1 FASO
FASO 2 d’accès à l’eau améliorée a progressé
2
ÉTHIOPIE
ÉTHIOPIE Un contraste Nord-Sud (de 71 à 83 %) dans les pays du Sud,
3
3 RWANDA
RWANDA
toujours marqué le taux de raccordement à domicile
ZAMBIE
Selon l’OMS et l’Unicef, 91  % de évolue moins vite. En Afrique sub-
ZAMBIE
5 la population mondiale utilise des saharienne, il a stagné à 16  % tout
5
sources d’eau de boisson de bonne comme en Asie du Sud. Seule la Chine
qualité. Pour l’assainissement, cette a vu une progression rapide du taux
proportion tombe à 68  %. Cette de raccordement à domicile (passant
moyenne couvre une forte dispa- de 48 à 95 %).
Source : Banque mondiale.
Source : Banque mondiale.
rité entre les pays développés, où Partout ailleurs, l’accès à l’eau se fait

01-96-Atlas mondial de l'Eau-NE-Maq4-BAT.indd 66 14/12/2021 10:59


DE L’EAU POUR TOUS ? • 67
Usages de l’eau : les différences Nord-Sud
Avoir un « accès à l’eau » (improved
Nord : Paris, FRANCE Sud : Khartoum, SOUDAN water access) signifie, pour un quart
de l’humanité, accéder seulement aux
standards minimaux, généralement
définis comme 25 litres par personne
et par jour à moins de 200 mètres du
TOTAL lieu d’habitation. En d’autres termes,
120 litres il suffit qu’une fontaine distribue
par jour
de l’eau traitée, a minima quelques
heures par jour, dans un rayon de 200
TOTAL mètres pour que l’on considère qu’il y
30 litres par jour a un « accès à l’eau ».
En réalité, seul un tiers de l’huma-
nité tout au plus a accès à ce que
Nettoyage de la vaisselle Hygiène personnelle Usages divers l’on considère en France comme la
Préparation de la nourriture Sanitaires norme : une eau potable disponible en
Lavage du linge Boisson permanence, sans restriction de débit
Sources : Montginoul, 2002 ; Cairncross et Kinnear, 1992 ; Eau de Paris. et avec une pression suffisante.
De même pour l’assainissement : on
par le développement des systèmes 1990 et 20016. Ce chiffre donne à lui définit comme accès «  amélioré  »
d’accès collectifs. Peut-on cepen- seul l’ampleur de l’effort demandé aux tout système meilleur que les latrines
dant parler d’échec global  ? Cela pays du Sud. en plein air sans système d’aération
serait oublier qu’une stagnation des ou de collecte. À l’échelle mondiale,
taux, à cause de l’augmentation de la Qu’est-ce qu’avoir plus du tiers de l’humanité ne dispose
population, représente tout de même « accès à l’eau » ? même pas de ces améliorations mini-
des millions de personnes nouvel- Le chiffre de 650 millions d’hommes males, un tiers s’en contente et moins
lement servies : 100 millions environ n’ayant pas accès à l’eau potable ne d’un tiers a accès aux standards
chaque année dans le monde entre dévoile qu’une partie des inégalités. occidentaux.

Le non-accès à l’eau Mongolie


Europe
Afgha..
Chine
Pakistan
Maroc Soudan Népal
Amérique du Nord
1 Niger
Tchad

Haïti Yémen
2 BF Bangladesh
Guatemala Rép. Nigeria Éthiopie
dom. 3
Nicaragua
Venezuela Inde Laos
Ouganda

Sierra Philippines
un

Leone 4 Cambodge
ero

Équateur
Liberia
Cam

Myanmar
Rwanda Kenya
Pérou Brésil Rép. dém.
Burundi Sri Indonésie PNG
Ghana du Congo Somalie
Tanzanie Lanka
Togo
Bénin Angola
Ma

Zambie Océanie
law
i

Zimbabwe Madagascar
Afrique du Sud

Nombre de personnes n’ayant pas accès Pourcentage de la population n’ayant


Norme OMS d’accès
à l’eau par pays, en 2020 pas accès à l’eau par pays, en 2020 à l’eau courante =
(selon la norme OMS*) point d’eau potable
De 50 à 60
La surface des pays est déformée à moins de 200 mètres.
proportionnellement à la valeur De 30 à 49,9
100 millions De 20 à 29,9
50 millions De 10 à 19,9
1. Mali
De 0 à 9,9 2. Sénégal
10 millions 3. Guinée
5 millions 4. Côte d’Ivoire
1 million Source : Washdata.org

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68 •
N om de l ’ auteur

L’eau : un révélateur des


inégalités sociales et de genre
L’accès à l’eau est très fortement lié à la position sociale : elle était un excellent révélateur des
inégalités dans les pays du Nord jusqu’à la généralisation du service universel, elle l’est encore très
largement hors du monde développé. Les statistiques d’accès à l’eau (et plus encore celles de
l’assainissement) montrent ainsi une opposition entre les mondes rural et urbain, mais aussi entre
les différents quartiers des métropoles du Sud.

Le retard des zones rurales l’assainissement, les taux sont res- sembler à l’écart, il faut nuancer ce
Les moyennes mondiales des taux pectivement de 73 % et 33 %. constat par la résistance des solu-
d’accès à l’eau potable et à l’assainis- La majorité des ruraux sont dépen- tions traditionnelles, qui permettent
sement cachent de fortes différences dants de sanitaires collectifs : 25 % parfois un accès à l’eau correct, et,
entre les mondes rural et urbain  : de connexions à domicile seule- inversement, l’inadaptation des solu-
dans les pays du Sud, en moyenne, ment en moyenne, 4  % en Afrique tions copiées sur le modèle occiden-
le taux d’accès à l’eau potable est de subsaharienne. Si, par rapport aux tal. On ne peut envisager, à court
82 % pour les zones urbaines, contre grandes villes concentrant les inves- terme, de construire dans les cam-
70 % pour les régions rurales ; pour tissements, les zones rurales peuvent pagnes africaines des réseaux sem-
blables à ceux des pays européens.
De même, toute solution trop « tech-
Les différences rural-urbain en Afrique nique » et coûteuse risque de ne pas
être durable faute de moyens finan-
ACCÈS À DES INSTALLATIONS ciers pour l’entretenir.
ACCÈS À L’EAU POTABLE D’ASSAINISSEMENT De grandes disparités peuvent exis-
ter aussi à l’intérieur d’une même
région  : un village au puits bétonné
AFRIQUE URBAINE

ou disposant d’un forage profond


peut connaître une situation sanitaire
très satisfaisante, alors que, tout près,
une bourgade victime du surpompage
des nappes phréatiques peut subir
une crise catastrophique obligeant
En % En %
90 à 100 90 à 100 les femmes à aller chercher une eau
75 à 89,9 75 à 89,9 de mauvaise qualité à plusieurs kilo-
mètres et entraînant une forte préva-
50 à 74,9 50 à 74,9
25 à 49,9
lence des maladies liées à l’eau.
0 à 49,9
L’accès à l’eau dans les zones rurales
est un défi majeur des prochaines
années : il sera particulièrement diffi-
AFRIQUE RURALE

cile à relever car les investissements


seront beaucoup plus durs à rentabili-
ser que dans les zones urbaines.

Plus on est pauvre,


moins l’accès est facile,
plus l’eau est chère
En % En % Cet axiome, valable dans tous les
90 à 100 75 à 100 pays du Sud, était particulière-
75 à 89,9 50 à 74,9 ment vrai en Afrique du Sud à la
50 à 74,9 25 à 49,9 fin de l’apartheid, au début des
25 à 49,9 0 à 24,9 années 1990. Au niveau national,
Source : OMS, Unicef, Washdata, 2021. on constate le très fort retard des

01-96-Atlas mondial de l'Eau-NE-Maq4-BAT.indd 68 14/12/2021 10:59


DE L’EAU POUR TOUS ? • 69
L’inégal partage des responsabilités liées à l’eau entre hommes et femmes
Personnes responsables de la collecte d’eau dans les zones rurales*, selon le genre
(En % du total des personnes du même genre)
HOMMES FEMMES
Soudan du Sud
Mozambique
Malawi
Burkina Faso
Burundi
RCA
Éthiopie
RDC
Guinée Bissau
Tchad
Zambie
Madagascar
Liberia
Sierra Leone

AF R I Q UE
AF R I Q UE

Niger
Somalie
Togo
Lesotho
Mali
São Tomé-et-Princípe
Bénin
Zimbabwe
Gambie
Kenya
Ghana
Cameroun
Côte d’Ivoire
Nigeria
Mauritanie
Sénégal
Swaziland
Namibie
Djibouti
Népal
Myanmar
Tadjikistan
Timor-Leste
Inde
Vanuatu

A SIE
A SIE

Afghanistan
Laos
Mongolie
Ouzbékistan
Indonésie
Kazakhstan
Pérou
AMÉRIQUE Honduras AMÉRIQUE
LATINE Jamaïque LATINE
Cuba
Yémen
MOYEN-ORIENT Syrie MOYEN-ORIENT
Azerbaïdjan
Moldavie
EUROPE Géorgie EUROPE
Albanie
100 90 80 70 60 50 40 30 20 10 0 0 10 20 30 40 50 60 70 80 90 100
* Dans les pays où au moins 1 foyer sur 10 n’a pas de point d’eau à domicile. Sources : OMS ; UNICEF.

anciens bantoustans du Transkei et populations noires et métisses, les Soudan, a montré que la consomma-
du Kwazulu sur la côte orientale, vic- raccordements non individuels sont tion de l’eau ne descend pas, même
times d’un sous-investissement chro- encore très importants. Les cartes de si le prix augmente, et que les plus
nique : parfois moins de la moitié de l’accès à l’eau reflètent encore assez pauvres dépensent parfois plus de la
la population, majoritairement rurale, fidèlement les découpages spa- moitié de leur faible revenu pour l’eau.
a accès à l’eau potable, contre près tiaux imposés par le régime raciste On comprend dès lors pourquoi l’ac-
de 80  % dans les grandes métro- d’apartheid. cès à l’eau des plus pauvres, qui est
poles. Mais, là encore, il y a de très L’inégalité dans l’accès se double de un des Objectifs de développement
fortes différences : dans les quartiers celle du prix payé  : si aucune tarifi- durable, est au cœur des probléma-
riches autrefois réservés aux Blancs cation ou aide spéciale n’est mise en tiques de justice sociale dans les pays
(Sandton ou les Northern Suburbs), place, les pauvres paient l’eau plus du Sud et pourquoi cette question est
le taux de raccordement à domicile cher que les personnes aisées. La aussi sensible politiquement.
est proche de 100 % et la consom- consommation d’eau n’est pas « élas- Seul l’accès universel à l’eau et à l’as-
mation d’eau par foyer peut atteindre tique » : tout le monde est obligé de sainissement, qui ne sera pas atteint
400 litres par jour ; en revanche, dans consommer un minimum d’eau pour la avant au moins le milieu de ce siècle,
les townships pauvres (Soweto ou boisson et la toilette. Une étude menée permettra de combler les injustices
Alexandra), autrefois réservées aux dans les faubourgs de Khartoum, au liées à ce bien irremplaçable.

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70 •
N om de l ’ auteur

Le « marché mondial » de l’eau


Les investissements nécessaires à la réalisation des Objectifs de développement durable sont
considérables. Pour y parvenir, les capacités de financement des municipalités étant limitées,
l’appel au secteur privé a été encouragé par les bailleurs de fonds internationaux. Cela s’est traduit
par la mise en place de partenariats entre les pouvoirs publics, responsables de l’adduction d’eau
potable, et de grandes entreprises spécialisées dans la gestion des services d’eau.

Les partenariats public-privé de délégation de service, de durée entreprises privées ont le capital et les
Ce que l’on peut appeler le « marché variable  : de la privatisation com- savoir-faire nécessaires pour atteindre
mondial » de l’eau est d’un type parti- plète des réseaux au Chili à la simple les objectifs ambitieux fixés par les
culier : il ne s’agit pas d’échanger de aide technique pour la facturation pouvoirs publics. Si ceux-ci sont en
l’eau entre pays ou régions, mais de ou le repérage des fuites. Dans le effet atteints dans des grandes villes
répondre aux appels d’offres interna- monde, les PPP se multiplient mais du Sud, comme Tanger, les PPP ren-
tionaux de municipalités créant des restent très minoritaires : 90 % de la contrent parfois de fortes résistances
partenariats public-privé (PPP) pour gestion de l’eau demeure publique. populaires (critiques de la hausse du
la gestion de l’eau. Pour les secteurs délégués, les lea- prix de l’eau, de l’opacité de certains
Un PPP est un contrat signé entre ders mondiaux sont Veolia Eau, Suez contrats), qui participent au retrait
une autorité publique et une entre- Environnement, RWE Thames Water d’entreprises privées de villes du Sud,
prise privée pour différents services et la Saur. comme à Cochabamba (en Bolivie) ou
liés à l’eau (construction du réseau, La délégation de service public, à Buenos Aires (en Argentine). Si tous
entretien, facturation, etc.). Il existe appuyée par les bailleurs de fonds, reconnaissent le savoir-faire tech-
de fait de très nombreuses formes repose sur l’idée que seules les nique de ces dernières, le principe

Les services d’eau et d’assainissement en Europe


FOURNITURE D’EAU ASSAINISSEMENT LEADERS* L’Europe entre
(Compagnies privées) public et privé
Berliner Wasserbetriebe En Europe, la situation est
Allemagne Eurawasser très contrastée entre les
Gelsenwasser, OEWA États, selon les traditions.
Certains services sont
Agbar totalement publics
Espagne Aguas de Valencia (Pays-Bas, Suisse), alors
Aqualia que l’Angleterre a choisi
la privatisation. Les autres
SAUR pays se trouvent dans
France Suez Environnement une situation
Veolia Eau intermédiaire, sans que
cela ait une incidence
notable sur le prix de
Pays-Bas l’eau ou la qualité du
service. En France, Veolia
Environnement
Pologne SAUR (ex-Compagnie générale
United Utilities des eaux, créée en 1853)
et Suez Environnement
(ex-Société lyonnaise des
Italie eaux, fondée en 1867)
sont impliquées dans la
gestion de l’eau de la
Severn Trent plupart des grandes villes.
Royaume-Uni Thames Water Avec la Saur, elles gèrent
United Utilities 72 % du marché français
pour l’eau potable et
En % 0 20 40 60 80 100 0 20 40 60 80 100 En % 55 % de celui de
*Certaines sont l’assainissement, avec
Intervenant Intervenant Partenariat
public privé public-privé des filiales des contrats d’une durée
d’autres moyenne de douze ans.
compagnies
Source : The European Federation of National Associations of Water Services, Europe’s water in figures, 2017.

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DE L’EAU POUR TOUS ? • 71

L’implantation des multinationales de l’eau françaises

Europe (hors France)

Asie, Pacifique, Moyen-Orient


France
Source : Pinsent Masons Water Yearbook 2010-2011.

Moyen-Orient
Amérique

35 millions
Afrique

30 millions

25 millions

20 millions
Fourniture
15 millions d’eau
Présence des opérateurs
Nombre de personnes 10 millions Assainissement
Pays où Suez Environnement est présent
desservies par zone Fournisseur : Suez
Pays où Veolia Eau est présent
géographique 5 millions Environnement
Pays où les deux opérateurs sont présents et par opérateur 0 Fournisseur : Veolia Eau

même de la délégation du service La consommation d’eau en bouteille


public est parfois remis en cause.
110 Milliards de litres consommés par an
Tant en nombre qu’en montants 2010 2018
100
investis, les PPP ont ainsi subi un
90
reflux depuis le début des années
80
2000 dans les pays en développe-
ment, notamment en Afrique et en 70
Amérique latine, ce qui laisse donc 60
en suspens la question du finance- 50
ment des réseaux d’adduction d’eau 40
et d’assainissement. 30
20
Le marché de l’eau 10
en bouteille 0
Le marché mondial de l’eau en bou-
e

sie

il

de

ne

lie

ce
ni

és

nd
in

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It a
ag
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s-U
Ch

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ex

Fr

teille fonctionne de façon beaucoup


lem
do


at

Th
In
Ét

Al

plus classique que celui de l’eau Source : www.bottledwater.org

du robinet, puisque l’eau est ven-


due comme n’importe quelle autre plusieurs litres et commercialisée par Émirats arabes unis ou l’Arabie saou-
marchandise. Il connaît un dévelop- des grands groupes agroalimentaires dite. Cette eau, cent à mille fois plus
pement rapide, tant pour la forme tra- (Coca-Cola, Nestlé, Danone). chère que l’eau du robinet, est parfois
ditionnelle des eaux minérales ayant La consommation est très forte en malheureusement la seule disponible
des propriétés particulières que pour Europe, marché traditionnel, et se dans les pays du Sud. Dans les pays
les eaux de source et enfin de l’eau développe rapidement dans certains du Nord, son coût économique et
« purifiée », vendue en bonbonnes de pays du Sud comme le Mexique, les écologique est critiqué.

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72 •
N om de l ’ auteur

Le prix de l’eau potable


La production et la distribution d’eau potable à un coût, mais qui doit payer ? En Europe,
l’extension des réseaux a été largement financée par l’impôt. Cependant, la tendance actuelle est
de faire porter tous les coûts par le consommateur final : c’est le sens de la formule « l’eau paye
l’eau ». Mais, pour les plus pauvres, non solvables, ce système n’est pas viable sans aides directes
et paraît injuste sans systèmes de péréquation tarifaire.

Le prix de l’eau en France de la moyenne européenne. Les varia- de l’eau, la tendance actuelle est d’es-
Les factures d’eau comportent trois tions s’expliquent principalement par sayer de s’approcher le plus possible
grands éléments  : la distribution de l’origine de la ressource (1,20  euro du recouvrement des coûts par les
l’eau (45 %), la collecte et le traitement en moyenne pour l’eau souterraine  ; consommateurs finaux. La pratique
des eaux usées (39 %) et les taxes et 1,60  euro pour l’eau de surface), sa du ring-fencing (séparation entre le
redevances (16  %). Le prix de l’eau qualité (mauvaise en Bretagne par service d’eau et le reste du budget
potable comme de l’assainissement exemple) et la configuration du réseau municipal) interdit de fait la subvention
comprend une partie fixe (l’abonne- (répartition et densité de la population). de l’eau par l’impôt.
ment) et une partie variable calculée S’y ajoutent des disparités entre villes Que faire alors pour que le prix de l’eau
en fonction des volumes consommés, et campagnes, et dans le mode de ne pèse pas de façon disproportion-
à laquelle il faut ajouter les redevances gestion. née sur les plus pauvres  ? Plusieurs
perçues par les agences de l’eau (au Selon l’Ifen, les prix sont plus élevés systèmes sont testés, s’articulant
titre du prélèvement de l’eau dans le quand l’organisation se fait au niveau généralement autour d’une tarification
milieu naturel et au titre de la pollution), des groupements de communes, ce progressive  : les premiers litres sont
celles des voies navigables de France, qui est souvent le cas lorsque la ges- peu chers, puis le tarif par mètre cube
ainsi que les taxes locales et la TVA sur tion est déléguée −  mais selon une consommé augmente graduellement,
l’eau potable et sur l’assainissement. étude du Boston Consulting Group, ce qui est censé favoriser les écono-
D’après l’Institut français de l’environ- le retour en régie n’entraîne que rare- mies d’eau. Le prix, au-delà d’un cer-
nement (Ifen), les prix moyens dépar- ment la baisse du prix de l’eau. Entre tain seuil fixé généralement entre 30 et
tementaux payés en 2014 varient 1994 et 2014, les tarifs de l’eau ont 40 m3 par mois et par foyer, doit être
du simple au double : de 3,02 euros augmenté en moyenne de 50  %, assez élevé pour décourager la sur-
le mètre cube (Hautes-Alpes) à avec une progression très forte dans consommation. L’Afrique du Sud est
5,55  (Lot-et-Garonne), la moyenne les années 1990, liée à la mise aux allée plus loin en rendant gratuits les
nationale s’établissant à 3,92  euros normes des services d’assainisse- six premiers mètres cubes consom-
le mètre cube, soit 10 % en dessous ment. Depuis 1999, la hausse suit le més, soit l’équivalent d’une consom-
rythme de l’inflation générale. La fac- mation de 50 l/j/hab. pour une famille
La tarification sociale de l’eau ture d’eau représente en moyenne de quatre personnes.
à Johannesburg 0,8  % du budget des ménages L’idée est que les plus riches consom-
(contre 2,4  % par exemple pour les mateurs paient pour les plus pauvres.
Prix du m3 d’eau 49,66 télécommunications). Malgré les contreparties (introduction
50 en rands en 2020 46,62
un rand = 0,067 euros de compteurs prépayés, restrictions
De l’eau pour tous : et pénalités plus fortes en cas de
40
36,51 à quel prix ? consommation impayée), cette mesure
32,95
L’accès à l’eau pour les plus pauvres permet une gestion sociale de l’eau
30 est un but officiel de tous les opéra- qui corrige les effets du recouvrement
23,99 teurs en charge de la distribution de total des coûts. Cela rejoint et dépasse
20 l’eau, qu’ils soient publics ou privés. La même les recommandations du Panel
16,49
difficulté est de mettre en pratique ces mondial sur le financement des infras-
10 9,66 déclarations d’intention tout en main- tructures de l’eau (rapport Camdessus)
Quantité d’eau tenant la viabilité financière du service. qui indique « qu’un prix abordable de
consommée par mois
0 (en milliers de litres) Dans le cadre général de la conver- l’eau devra être assuré à chacun en
0
gence entre pratiques «  déléguées  » mettant en place des structures tari-
0 6 10 15 20 30 40 50
Source : City of Johannesburg, 2020. et « publiques » en matière de gestion faires appropriées ».

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DE L’EAU POUR TOUS ? • 73

Les prix de l’eau en France

PRIX DU M 3 D'EAU PAR DÉPARTEMENT

Guadeloupe
Martinique
Guyane
Réunion
Mayotte
Prix moyen du m3 d’eau
par département en 2016
(euros)
4,50 à 5,60
4,00 à 4,50
3,50 à 4,00
2,25 à 3,50

Sources : SISPEA; DDT ; Insee.


Données
indisponibles

ÉVOLUTION DES COMPOSANTES


DU PRIX DU M 3 D'EAU
Base 100 (100 = 1998)
150
140 Eau potable
130 Assainissement
120 Taxes et redevances
110
Indice des prix
100 à la consommation
90
Source : SOeS – SSP, Enquêtes Eau
1998 2001 2004 2008 1998, 2001, 2004, 2008 et Insee.

Quels financements nouvelles infrastructures ? situations locales ou faute de pouvoir


pour apporter l’eau à tous ? Au début des années 1990, les grandes compter sur des profits suffisants. Et,
Alors que dans les pays dévelop- entreprises multinationales semblaient de fait, la part des entreprises multi-
pés, l’essentiel des financements être les seules capables d’appor- nationales dans les financements des
pour donner accès à l’eau potable ter les financements nécessaires. De projets d’accès à l’eau potable dimi-
et à l’assainissement ont été réalisés grands projets d’investissements, fon- nue, après une forte progression dans
par les municipalités sur une longue dés sur des partenariats public-privé, les années 1990, passant de 13 % en
période, dans les pays du Sud, les ont donc vu le jour dans de grandes 1995 à 7 % en 2012.
efforts demandés dans des villes en métropoles comme Buenos Aires ou La question du financement néces-
forte croissance dépassent largement Johannesburg. Aujourd’hui, si l’on saire pour donner accès à l’eau à tous
les capacités des finances locales, excepte le cas particulier de la Chine, reste donc entièrement posée. Les
notamment en Afrique sub-saha- les grandes multinationales de l’eau pouvoirs publics (60 %) et les acteurs
rienne. Comment, dès lors, finan- semblent se retirer des pays les plus privés (15 %) locaux se partagent déjà
cer la construction et l’entretien de pauvres, devant la complexité des 75 % des investissements.

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74

EN CONCLUSION
De l’eau
pour tous ?
Une question de moyens
Apporter de l’eau à tous demandera un très
important effort financier. Pour faire face à
ces besoins, plusieurs modes de finance-
ment existent. On évoque souvent le rôle
des organisations internationales comme
la Banque mondiale et les actions de soli-
darité au niveau mondial ; mais celles-ci ne
représentent que 18 % des investissements,
contre 60 % de financements publics locaux,
le reste se partageant entre les acteurs privés
locaux (15 %) dont la part augmente, et les
entreprises multinationales, comme Suez ou
Veolia.

Le rôle des multinationales


À partir des années 1990, de grands projets
d’investissements, fondés sur des partena-
riats public-privé associant multinationales
de l’eau et collectivités locales, se sont
multipliés dans des villes comme Manille,
Buenos Aires ou Johannesburg. Toutefois,
on assiste depuis quelques années au retrait
des grandes multinationales de l’eau des
pays les plus pauvres. Les coûts cachés de
la construction, de l’entretien et de la ges-
tion des réseaux d’eau dans des métro-
poles où les inégalités sociales sont très
marquées font que les perspectives de pro-
fits s’éloignent rapidement. De plus, ces
formes de « privatisation » ont rencontré de
fortes résistances populaires, notamment en
Amérique latine.

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75

Quels défis pour


le xxie siècle ?
Trois défis majeurs se dessinent pour les prochaines
décennies : nourrir une population qui continue à augmenter,
répondre à la demande croissante des villes, tout en
préservant l’environnement. La perception d’une « crise
de l’eau » est ancienne, comme le montre le nombre
de conférences internationales depuis les années 1970.
Ces réunions ont contribué à forger un « modèle » mondial
de gestion de l’eau, dont les principes fondamentaux
sont la gestion intégrée des ressources en eau (GIRE)
et le passage d’une gestion de l’offre à une gestion
de la demande. Cela consiste à limiter la construction
de nouvelles infrastructures et à privilégier une action
sur les utilisations actuelles, en favorisant les économies
d’eau et, au besoin, en redirigeant la ressource vers
des secteurs plus productifs.
La mise en place de la GIRE à l’échelle internationale
s’est traduite par la multiplication des agences de bassin
et des associations d’usagers ainsi que par l’application
de politiques tarifaires encourageant l’économie
de la ressource, selon deux principes clés : « l’eau paye
l’eau » et « le pollueur est le payeur ».

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76 •
N om de l ’ auteur

Des régions à risque


Avec l’augmentation combinée de la population et du niveau de vie, la situation déjà critique dans
de nombreux bassins versants risque de s’aggraver. En 2030, plus de trente bassins versants,
totalisant près de la moitié de la population mondiale, seront sous le seuil de stress hydrique.
Mais les futures crises de l’eau seront, comme aujourd’hui, le fruit de la combinaison de facteurs
environnementaux, économiques, politiques et sociaux.

Du risque hydrologique bassins versants entre États et l’oppo- « Petite Aral » située sur son territoire,
au risque « hydropolitique » sition marquée entre un ou plusieurs ce qui condamne d’autant plus rapide-
Un risque hydrologique est souvent acteurs. Les bassins les plus sujets ment la « Grande Aral » située majori-
défini par la combinaison d’un aléa au risque hydropolitique sont le Nil, le tairement en Ouzbékistan.
climatique naturel (crue, sécheresse) Jourdain, le Tigre et l’Euphrate, ainsi
et de la vulnérabilité des populations. que le Syr-Daria et l’Amou-Daria, qui Le barrage des
En combinant ces deux facteurs, on se jettent dans la mer d’Aral. Même si Trois-Gorges en Chine
peut identifier les régions potentiel- les guerres de l’eau sont improbables, ou la maîtrise totale des eaux
lement soumises aux risques hydro- les tensions hydropolitiques réduisent Mis en service en 2009, le barrage des
logiques et hydropolitiques. La carte considérablement les perspectives de Trois-Gorges en Chine est la pièce
ci-contre montre les principaux défis traitement des risques hydrologiques. maîtresse d’une politique nationale
selon les régions considérées dans les Ainsi, dans le bassin de la mer d’Aral, de contrôle total des ressources en
prochaines décennies, certains pays le Kazakhstan a entrepris de sauver la eau. Haut de 150 m, avec un réservoir
comme la Chine et l’Inde devant faire
face à plusieurs types de menaces.
Les situations les plus tendues sont La situation hydrique en 2050
encore largement déterminées par les
facteurs climatiques : les régions arides
et semi-arides, où la variabilité des
précipitations est la plus forte. Mais
les sécheresses et les inondations ne
prendront un caractère catastrophique Océan
que là où la capacité d’adaptation des Pacifique
populations est limitée. La vulnérabi-
lité est ainsi plus forte dans les pays
pauvres  : la bande soudano-sahé- Océan

lienne, qui va du Sénégal au Soudan, Atlantique


et l’Asie occidentale (hormis les pays
du Golfe) semblent les plus exposées
Problème prédominant
aux futurs aléas hydrologiques.
Forte pression sur la ressource
Dans les pays développés et émer- (utilisation de plus de 35 %
gents, les aléas sont aussi présents, des ressources renouvelables)
mais des moyens sont mobilisés pour Faible capacité d'adaptation
(indice de pauvreté élevé)
réduire la vulnérabilité : multiplication
des politiques de prévention (plan de Accès limité à l'eau potable et à l'assainissement
prévention du risque inondation en Pollutions industrielles actuelles ou héritées
France), de mitigation (construction
Combinaison de plusieurs facteurs
de barrages ou d’aqueducs pour faire
face aux sécheresses) et d’intervention Facteur aggravant
rapide lors d’événements graves.
Variabilité des précipitations
L’apparition d’un «  risque hydro-
politique  » tient également à deux Dépendance élevée vis-à-vis
des pays étrangers (plus de 50 %)
autres facteurs : la fragmentation des

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QUELS DÉFIS POUR LE XXIe SIÈCLE ? • 77
Le barrage des Trois-Gorges

B A S H A N
D A

C H I N E Dachang
Kaixian Jiangkou
Dachang Gorge de Wu Xingshan
Xiakou
Kaixian Fengjie Wushan Transfert d’eau
Fengjie Temple Wushan Badong vers Pékin
Baidicheng Zigui Temple
Yunyang Yunyang Ya n g z i J i a n g Badong de Qu Yuan
Wanxian
Tiancheng Temple de Zhang Fei
Temple de Zhang Fei Gorge de Qutang Zigui
Wuqiao Gorge Sandouping
A N de Xiling
H
Wanxian S
U Jianshi Yichang
O Langping
D P r o v i n c e
G Barrage des Trois-Gorges
N d u H U B E I 18 000 MW
A
F
Enshi
Barrage de Gezhouba
2 700 MW

Aménagement de la vallée Sites existants (épargnés ou reconstruits) Sites détruits


Réseau hydrographique Ville de plus de 100 000 hab.
Ville
Chemin de fer Ville de moins de 100 000 hab.
Barrage Pont Temple Curiosité touristique Temple 30 km
Zone de réinstallation (pour Sources : Diercke Weltatlas, 2008 ;
environ 1,3 million de personnes déplacées) Sanjuan, 2007.

de près de 140 km3, il barre le Chang


Jiang (ou Yangzi), le plus grand fleuve
de Chine (et le quatrième du monde
par son débit). L’usine hydroélectrique
associée devrait produire à terme
10  % de la production électrique
chinoise.
Les impacts environnementaux
et humains sont à la mesure de
l’ouvrage  : près de 1,3  million de
personnes ont été déplacées, des cen-
Océan
Pacifique taines de sites historiques et archéolo-
giques ont été engloutis, et les impacts
environnementaux, mal anticipés,
pourraient encore se multiplier. Cet
ouvrage pharaonique s’inscrit dans
la lignée des grands travaux hydrau-
Océan liques initiés, selon la mythologie
Indien chinoise, par l’empereur Yu le Grand
(en 2000 avant J.-C.). C’est un pari ris-
qué de maîtrise totale des eaux, face
aux inondations et aux sécheresses
catastrophiques qui ravagent le pays.
Ces grands barrages peuvent, à long
terme, exacerber les concurrences
régionales et nationales pour l’ac-
cès aux eaux stockées dans leurs
Sources : FAO Aquastat ; Lawrence, Meigh et Sullivan, 2002. immenses réservoirs.

01-96-Atlas mondial de l'Eau-NE-Maq4-BAT.indd 77 14/12/2021 10:59


78 •
N om de l ’ auteur

Les grands projets


de collaboration entre États
C’est la navigation fluviale qui a poussé les États à mettre en place des organismes de coopération
internationale pour gérer en commun les cours d’eau : la Commission centrale pour la navigation
du Rhin a été instituée dès 1815 par le congrès de Vienne. Mais il a fallu attendre le xxe siècle pour
que les coopérations internationales s’élargissent aux autres usages de l’eau, et voire la
généralisation des organismes multinationaux de gestion des bassins versants.

La vallée du Danube

150 km
POLOGNE
UKRAINE
RÉPUBLIQUE
TCHÈQUE
SLOVAQUIE
ALLEMAGNE MOLDAVIE
Dunaj
Bratislava Tis
e za
n u b Munich
Da Vienne Gabcikovo HONGRIE
Donau Donau
Budapest
AUTRICHE Duna
ROUMANIE
SUISSE
Ljubljana
Zagreb
SLOVÉNIE CROATIE Bucarest
Sa Portes de Fer
ve Belgrade
ITALIE

ire
Dunarea

Mer No
BOSNIE-
Dunav
HERZÉGOVINE Danube
SERBIE
Sofia BULGARIE
LA POLLUTION DU DANUBE
AU CYANURE (2000) MONTÉNÉGRO
KOSOVO
za

Budapest Départ MACÉDOINE


T is

mine d’Aurul DU NORD


30 janvier 2000 ALBANIE Source : International Commission
HONGRIE 10 février for the Protection of the Danube River.

Niveau de pollution Bassin versant du Danube


ROUMANIE
(mg/l)
Installation hydroélectrique, barrage
Dan

18,00 à 19,60
SERBIE
7,80 à 13,50
ub

17 février Centre industriel Parc ou réserve


e

2,20 à 3,90
0,080 à 1,50 Dunav Nom du Danube dans les différents
Belgrade pays qu’il traverse
100 km 0,029 à 0,035

Des principes d’Helsinki 103  voix pour, 27  abstentions (dont générale de coopération (art. 8). Elle
aux organismes de coopération l’Inde, le Pakistan, la France et l’Éthio- reprend les principes énoncés dès
internationale pie) et 3 contre (la Chine, la Turquie 1966 à Helsinki. Mais, davantage
Pour résoudre pacifiquement les et le Burundi). Cette convention réaf- que les déclarations faites à l’ONU,
conflits liés à l’eau, l’Assemblée firme le concept d’utilisation équitable la multiplication de grands orga-
générale de l’ONU a adopté en 1997 et raisonnable de la ressource (art. 5), nismes de bassins internationaux est
une convention sur le droit relatif aux l’obligation de ne pas causer de dom- le signe le plus évident de la coopé-
usages des cours d’eau internationaux mages significatifs aux autres États ration entre États. Aujourd’hui, la plu-
à des fins autres que la navigation, par riverains (art. 7) et enfin une obligation part des grands bassins mondiaux ont

01-96-Atlas mondial de l'Eau-NE-Maq4-BAT.indd 78 14/12/2021 10:59


QUELS DÉFIS POUR LE XXIe SIÈCLE ? • 79

des commissions permanentes pour Les événements politiques liés à l’eau


coordonner leurs politiques, comme Nombre et type d’événements politiques liés aux rivières transfrontalières
l’Initiative du bassin du Nil, fondée en de 1948 à 2008
1999. Ces différentes agences sont 1 888
soutenues par les organismes interna-
tionaux comme l’Unesco qui ont des
programmes spécialisés dans l’aide à
la résolution des conflits liés à l’eau.
Aujourd’hui, la recension réalisée par
1 148
le géographe Aaron Wolf, de l’uni-
versité de l’Oregon, sur 6 792 événe-
906
ments liés à l’eau entre 1948 et 2008
montre que, souvent, la coopération 720 737
(5  225) l’emporte largement sur les
conflits (1  295). Et ces derniers se
506
limitent le plus souvent à de simples 362
272
déclarations hostiles officieuses et
120
modérées (720) ou officielles plus 30 42 40
4 17 0
fortes (362). Les seuls actes de guerre

Acc

sur
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les
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étant liés à des conflits dépassant lar-

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gement la question de l’eau, comme


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dans les guerres israelo-arabes.


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des organismes de bassin

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Hos
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nom

Long de 2 875 km, avec un bassin ver-


tilit é

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ions

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Act

Hos
éco

,
sant de 800 000 km2 et partagé entre

ue,
Act

indu
ions

treize États, le Danube a été déclaré


Act

s tr ie
fleuve international pour la navigation

l
par le congrès de Vienne en 1815. Source : Transboundary Freshwater Dispute Database.

Il a été coupé par le Rideau de fer


après la Seconde Guerre mondiale, Conflits et coopération
et c’est sans concertation qu’ont été
effectués les aménagements tant à Syr-Daria
l’Ouest qu’à l’Est, avec la construc-
tion du barrage des Portes de Fer et
le projet de détournement du fleuve Tigre/Euphrate
de Gabcikovo-Nagymaros, à la fron- Sénégal
Colorado Jourdain
tière entre la Hongrie et la Slovaquie.
Ce dernier projet, qui a des consé- Nil
Sources : Wolf, 2002 ; Lasserre et Descroix, 2002.

quences écologiques importantes sur Gange/


Brahmapoutre
une des dernières zones peu aména-
Orange
gées du fleuve, a été remis en cause
par la Hongrie lors de l’éclatement du
bloc communiste.
Pour résoudre ces conflits et appor-
ter des solutions globales aux pro- Nombre de traités de coopération par bassin versant
blèmes du fleuve (pollutions héritées
de la période communiste, accidents 20 15 10 5 2 1 0
industriels graves comme la pollu-
Principaux conflits liés aux ressources hydrographiques
tion de la Tisza au cyanure en 2000),
les treize États riverains ont signé en
1994 une convention pour la protec- discussion permanent pour un mini- Commission (1995) ou l’Okavango
tion du Danube. Depuis 1998, une mum de coordination. River Basin Water Commission
commission permanente est chargée Le cas du Danube n’est pas isolé. (1994), et le renforcement d’organisa-
de la sensibilisation du public et de Les années 1990 ont vu la multipli- tions plus anciennes, comme l’Office
la coordination de programmes de cation de ces commissions interna- de mise en valeur du fleuve Sénégal
recherche. Elle établit un forum de tionales, telles que la Mekong River (1972).

01-96-Atlas mondial de l'Eau-NE-Maq4-BAT.indd 79 14/12/2021 10:59


80 •
N om de l ’ auteur
Les principales conférences mondiales

Vers la gestion
de la demande ?
Dans les années 1970, la combinaison de l’échec économique
des grands aménagements, des crises écologiques qui leur
sont liées et de la faillite financière de nombreux opérateurs
municipaux dans les pays du Sud ont conduit les spécialistes
de la gestion de l’eau à proposer de nouvelles politiques.
La conférence de l’ONU sur l’eau à Mar del Plata, en 1977, fut
la première d’une longue série qui se poursuit actuellement. 2006 Mexico
4e forum mondial de l’eau
Gouvernance - financement

La « communauté mondiale particulière. Préparant le Sommet de


de l’eau » la Terre de Rio, quatre principes fon- 1992 et 2012 Rio de Janeiro
La transposition de principes géné- damentaux y ont été formulés. Les Sommet de la Terre, Rio +20
Développement durable - Agenda 21
raux en actions politiques est menée trois premiers sont très consensuels.
par des organismes internationaux Le premier affirme que l’eau est une 2018 Brasilia
8e forum mondial de l’eau
traitant des diverses facettes des ressource vulnérable qui doit être
politiques de l’eau. Certains sont gérée de façon globale au niveau du
des institutions internationales, bassin versant : c’est la gestion inté-
comme la Banque mondiale, qui grée des ressources en eau (GIRE). Le 1977 Mar del Plata
Conférence des Nations unies
finance les projets hydrauliques, ou deuxième insiste sur la participation sur l’eau
le Programme hydrologique inter- nécessaire de tous les acteurs, avec Plan d’action - évaluation des
ressources
national de l’Unesco. D’autres sont la création d’associations d’usagers
des organisations mixtes, comme de l’eau. Le troisième souligne plus
le Partenariat mondial de l’eau ou particulièrement le rôle des femmes
la World Commission on Dams, qui dans la gestion de l’eau et leur impli-
s’intéresse en particulier à la question cation indispensable dans les nou-
des grands barrages. Les grandes velles politiques.
entreprises privées collaborent aussi
à ces organisations et à la préparation Le modèle général de Turton
des forums mondiaux de l’eau, qui ont MODÈLE D’ÉVOLUTION DE LA GESTION DES RESSOURCES EN EAU
lieu tous les trois ans depuis celui de D’APRÈS ANTHONY TURTON
Marrakech en 1997 à Dakar en 2021.
Demande d’une population partageant
Ces diverses institutions ont contri- une ressource hydraulique
bué à créer une «  communauté
Déficit
mondiale de l’eau  », composée de structurel
scientifiques, de chefs d’entreprise, Gestion de la
demande et
d’élus, d’ingénieurs et d’ONG qui dif- réallocation
fusent les principes d’une « nouvelle
Gestion de l’offre
culture » de l’eau. « Mission n
Des organismes alternatifs, opérant hydraulique » io
m at
aussi au niveau mondial (International Volume disponible
om
o ns avec augmentation
River Network ou Transparency
ec de l’offre
International), s’intéressent également ed
u rb
à la question de l’eau, amenant par- Co
fois les grandes institutions à revoir
leurs pratiques. Surplus initial
Volume
Les principes de Dublin disponible
Parmi les grandes conférences mon- « naturellement »
diales sur l’eau, celle qui s’est tenue Phase 1 Phase 2 Phase 3
à Dublin en 1992 tient une place
Sources : Turton et Meissner, 2002.

01-96-Atlas mondial de l'Eau-NE-Maq4-BAT.indd 80 14/12/2021 10:59


QUELS DÉFIS POUR LE XXIe SIÈCLE ? • 81

les
1992 Dublin
Conférence sur l’eau
Eau indispensable à la vie - gestion associée -
rôle essentiel des femmes - eau bien économique
1972 Stockholm
Conférence des Nations unies sur l’environnement
2015 Daegu-Gyeongbuk
1995 Copenhague 7e forum mondial de l’eau
Sommet mondial pour le développement
2003 Kyoto
3e forum mondial de l’eau
2009 Istanbul Gouvernance - financement
5e forum mondial
de l’eau
1990 New Delhi
1997 Marrakech Consultation mondiale sur
Premier forum l’approvisionnement et l’assainissement
mondial de l’eau «Un peu pour tous vaut mieux que beaucoup
Utilisation efficace 1994 Le Caire pour peu»
de l’eau Conférence des
Nations unies
sur la population
2022 Dakar et le développement
9e forum mondial de l’eau 1994 Noordwijk
Conférence sur l’eau
2000 La Haye potable et l’assainissement
2e forum mondial de l’eau
L’eau affaire de tous
1998 Paris 2001 Bonn
Conférence sur l’eau et Conférence internationale
2002 Johannesburg le développement durable sur l’eau douce
Sommet mondial sur le Améliorer les connaissances Gouvernance - finances - connaissances
développement durable
Élimination de la pauvreté -
assainissement - accès 2012 Marseille
6e forum mondial de l’eau
Le temps des solutions
1996 Rome
Sommet mondial
de l’alimentation

Le quatrième principe a donné lieu à SDAGE et loi sur l’eau de 2006) s’en On entre alors dans une nouvelle
de plus amples discussions. Il affirme inspirent largement, tout comme la ère, celle de l’intervention de l’État,
ainsi que «  Pour tous ses différents directive-cadre européenne, adoptée des ingénieurs tout-puissants et de
usages, souvent concurrents, l’eau a en 2000. Celle-ci vise à atteindre en la mystique des grands travaux. Des
une valeur économique et, à ce titre, 2015 un «  bon état écologique des travaux considérables et très coûteux,
devrait être reconnue comme un bien eaux » européennes, fixant des objec- gérés le plus souvent au niveau natio-
économique », ce qui va à l’encontre tifs précis et un calendrier contrai- nal, sont réalisés pour domestiquer
de traditions religieuses (l’eau comme gnant, en utilisant des instruments les eaux. La gestion de l’offre permet,
don de Dieu) ou philosophiques qui économiques comme outils d’aide à grâce à la construction de grands bar-
considèrent l’eau comme un bien la décision. rages, de répondre à l’augmentation
avant tout social. rapide des prélèvements.
La traduction de ces principes De la gestion de l’offre La rupture qui met fin à cette période,
dans les législations nationales a été à la gestion de la demande parfois liée à un changement poli-
relativement rapide, car elle était la Développé à partir des cas particuliers tique, est dans la plupart des cas dou-
condition de financement de projets de Johannesburg et d’Israël, le modèle loureuse et correspond souvent à des
hydrauliques. Elle s’est faite dans d’Anthony Turton montre l’évolution à catastrophes écologiques majeures.
des pays aussi variés que l’Afrique la fois des ressources disponibles et On entre alors dans une phase de
du Sud ou la République islamique des politiques de gestion. La situation gestion de la demande et d’une dif-
d’Iran. En effet, comme le concept de initiale est celle de ressources abon- ficile réallocation des ressources dis-
développement durable, les principes dantes par rapport à la demande. ponibles. Ce processus ne peut se
de Dublin restaient assez vagues L’eau est disponible sans efforts. faire que grâce à des mécanismes
pour pouvoir être admis par tous les Cette phase perdure jusqu’à ce que transparents de gestion de l’eau et
gouvernements. Les instruments de les ressources disponibles « naturelle- à la participation des populations
gestion de l’eau en France (SAGE, ment » deviennent insuffisantes. concernées.

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82 •
N om de l ’ auteur

La révolution bleue
L’agriculture étant la principale consommatrice d’eau au niveau mondial, il est normal que des
efforts très importants aient été tentés pour améliorer les rendements dans les périmètres irrigués
et résoudre les problèmes écologiques qui s’y posent. Depuis une trentaine d’années, les avancées
sont réelles et vont en s’accélérant : de nouvelles techniques toujours moins coûteuses se
diffusent, au point qu’on peut parler d’une véritable « révolution bleue ».

More crop per drop : types de techniques permettent de amélioration rapide des rendements
le développement réduire ces pertes  : la première est pour les agriculteurs. Mais les béné-
de nouvelles techniques l’aspersion, qui reproduit artificiel- fices sont plus difficiles à mesurer
L’introduction de nouvelles tech- lement la pluie  ; la seconde est la quand on considère un bassin versant
niques a deux buts principaux  : micro-irrigation, qui apporte l’eau au dans son ensemble, car l’eau qui était
augmenter le rendement à quantité pied de la plante, grâce à des tuyaux considérée comme « perdue » sur une
d’eau égale (more crop per drop) et en plastique. Ces améliorations sont parcelle se retrouvait de fait dans les
permettre de résoudre les problèmes accompagnées d’actions en amont nappes phréatiques.
environnementaux liés à l’irriga- (bétonnage des canaux d’adduction,
tion. Avec la méthode traditionnelle pour éviter les pertes par infiltration) De la révolution verte
d’inondation par gravité d’un champ, et en aval (amélioration du système de à la révolution bleue
une grande partie de l’eau est perdue drainage pour empêcher la salinisa- L’Inde est célèbre pour sa « révolu-
par évaporation ou infiltration. Deux tion des terres). Elles permettent une tion verte » qui a permis une hausse
rapide des rendements agricoles.
Un des piliers de cette révolution a
été le développement de l’irrigation,
Comment fonctionne l’irrigation moderne ?
les variétés à haut rendement ne
STATION DE FILTRATION montrant toutes leurs potentialités
Filtre hydrocyclone qu’avec un apport d’eau adéquat. Or
Filtre à sable Débimètre ce développement s’est accompagné
venturi Régulateur de pression de gaspillages (45 % de l’eau perdue
par infiltration), de surutilisation des
nappes phréatiques et de problèmes
Pompe écologiques graves  : les systèmes
de drainage parfois mal entretenus
Filtre à tamis
ont causé salinisation et engorge-
Puits / Source ment des terres. Si l’on ajoute l’accu-
Régulateur mulation de pesticides et la fin de la
de pression hausse des rendements, la révolu-
Goutteur
tion verte a donc atteint ses limites.
Depuis les années 1990, les appels à
une « révolution doublement verte »
(économiquement rentable, socia-
lement équitable et écologiquement
durable) se multiplient, révolution qui
pourrait devenir dans le domaine de
l’eau une « révolution bleue ». Toutes
les techniques modernes sont utili-
sées et on a réhabilité les systèmes
Porte-rampe
Rampe en Dispositif locaux de gestion, les réservoirs tra-
polyéthylène de purge ditionnels (tanks), notamment en Inde
du Sud.
Source : http://www.jains.com

01-96-Atlas mondial de l'Eau-NE-Maq4-BAT.indd 82 14/12/2021 10:59


QUELS DÉFIS POUR LE XXIe SIÈCLE ? • 83
L’irrigation moderne dans le monde

Finlande
Estonie
Lituanie
Biélorussie
Allemagne
France Serbie
Espagne
Slovénie
Jordanie
Israël

Émirats arabes unis

Seychelles
Malawi

Maurice

Zimbabwe
Afrique du Sud
Botswana
Source : FAO, Aquastat, 2020.

Pourcentage de zones irriguées de façon moderne par pays en 2018


(en % du total des zones irriguées)
Pas de
données
0 0,1 10 25 50 75 99 100

More cash per drop : introduire de nouvelles cultures. On entraîne en retour de fortes différen-
une transformation coûteuse remplace ainsi le blé ou les céréales ciations sociales entre les agriculteurs
L’introduction de nouveaux systèmes par les agrumes ou d’autres produits pouvant s’adapter et ceux qui sont
d’irrigation induit une augmentation plus inhabituels dans les périmètres contraints de revenir à l’agriculture
des coûts de production, même s’il y a irrigués, mais à forte valeur ajoutée : sèche ou de migrer vers les villes, ce
des subventions. Pour rentabiliser les raisin de table ou noix de pécan en qui modifie profondément les struc-
investissements consentis (accom- Afrique du Sud, bananes au Maroc… tures agraires des pays concernés et
pagnés parfois d’une hausse du prix Il s’agit d’avoir plus de revenus pour la met en cause les équilibres sociaux
de l’eau), les agriculteurs doivent même quantité d’eau. Ce phénomène et économiques de régions entières.

Quels gains de rendement pour quelles économies d’eau ?


ACCROISSEMENT DU RENDEMENT (en %) ÉCONOMIE D’EAU (en %)
Banane Rendement
par ha
Chou
Rendement
Coton par m3
d’eau utilisé
Raisin de table

Pomme de terre

Sucre de canne

Patate douce

Tomate

0 20 40 60 80 100 120 140 160 180 200 220 240 0 10 20 30 40 50 60


Source : Postel et al., 2001.

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84 •
N om de l ’ auteur

L’eau virtuelle
Si l’eau a une valeur économique, elle peut potentiellement prendre part à la mondialisation
des échanges. Mais un marché d’eau « réelle » global serait très difficile techniquement à mettre
en œuvre et se heurterait à des résistances culturelles très fortes. En revanche, des volumes
très importants d’eau sont échangés chaque jour sous forme « virtuelle », incorporés
dans des biens de consommation.

Qu’est-ce que l’eau Les pays importateurs et exportateurs d’eau virtuelle


« virtuelle » ?
Le concept d’eau virtuelle a été intro-
duit en 1993 par John Anthony Allan.
Il renouvelle l’approche des questions
liées à l’eau. La production des biens
agricoles ou industriels consomme un
certain volume d’eau, de 250 litres par
kilo pour les pommes de terre à plus
de 15  000  litres pour 1  kg de bœuf.
Une partie de cette eau « réelle » est
perdue pour tout autre usage dans le
bassin versant de production. Mais
elle est consommée ailleurs. Le cli-
vage eau virtuelle/eau réelle dépend
du point de vue et de l’échelle d’ana-
lyse : on appelle « eau virtuelle » l’eau
Flux d’eau virtuelle liés aux produits agricoles de 1997 à 2001(km 3 / an)
utilisée pour produire dans un endroit
des biens exportables et consommée
« virtuellement » dans un autre espace. –10 -1 1 10
Au niveau mondial, si les États
Déficit : pays importateur Peu d'échanges Excédent : pays exportateur
n’échangent que très peu d’eau Source : La documentation photographique, n°8078.
« réelle », les transferts d’eau virtuelle
sont massifs : ils représenteraient près
de 1  300  km3/an et sont en rapide pallier leur manque relatif d’eau en s’en dollar par mètre cube.
augmentation. Comme l’eau virtuelle procurant « virtuellement » par l’impor- Dans certains pays, des marchés
concerne surtout les produits alimen- tation de produits agricoles. locaux de l’eau ont été mis en place :
taires, les principaux pays exporta- ils permettent à ceux qui en ont les
teurs d’eau virtuelle sont aussi les De l’eau à l’argent moyens de se lancer dans des produc-
« greniers » du monde : les États-Unis, Dans le calcul de rentabilité de l’eau tions spéculatives à fort rendement,
le Canada, l’Australie et la France. À virtuelle, le facteur principal n’est pas d’acheter leurs droits aux agriculteurs
l’opposé, les principaux importateurs la production en kilo par mètre cube, qui ne le peuvent pas et ainsi de mieux
sont les États du Proche et du Moyen- ni même la valeur nutritive, mais valoriser « globalement » l’eau du pays.
Orient et la Chine, déficitaires en pro- bien le prix sur le marché mondial. Il
duits agricoles. L’Égypte «  importe s’agit d’obtenir la meilleure valorisa- Les limites d’une conception
virtuellement  » sous forme de blé tion (more cash per drop), en jouant strictement économique de l’eau
l’équivalent de 3,5 km3 d’eau, principa- sur des avantages comparatifs  : les La prise en compte de l’eau virtuelle
lement en provenance des États-Unis pays pauvres en eau sont souvent a été présentée comme une solu-
et de l’Australie, alors que la Thaïlande les plus ensoleillés et bénéficient de tion aux problèmes de raréfaction de
« exporte » de l’eau sous forme de riz. coûts de main-d’œuvre très faibles. l’eau, notamment en Asie occidentale
Le concept d’eau virtuelle est à manier Théoriquement, en substituant au et en Afrique du Nord.
avec précaution, mais il explique com- blé des agrumes, un agriculteur d’un En théorie, ces pays aux ressources
ment les pays déficitaires peuvent pays peu arrosé peut gagner près d’un limitées devraient exporter des

01-96-Atlas mondial de l'Eau-NE-Maq4-BAT.indd 84 14/12/2021 10:59


QUELS DÉFIS POUR LE XXIe SIÈCLE ? • 85

denrées alimentaires à faible teneur


La valeur de l’eau dans les produits agricoles
en eau mais chers, et importer des
produits peu chers mais incorporant Prix moyen
beaucoup d’eau. Entre les deux rives Eau sur le marché Valorisation
incorporée mondial en 2007 de l’eau
de la Méditerranée, l’échange idéal Produit (dollars/tonne)
(m /tonne)
3
(dollars/m3)
impliquerait des céréales cultivées au
Nord et des agrumes venus du Sud. Blé 1 100 150 0,14
Dans la pratique, c’est l’équivalent
d’un second Nil qui s’écoule vers les
pays d’Afrique du Nord et d’Asie occi- Riz 2 100 270 0,13
dentale sous forme d’eau virtuelle.
Cette perspective permettrait théori- Citron 800 900 1,12
quement de mieux valoriser l’eau et
de préserver l’environnement, en ne
construisant pas de coûteux aména- Raisin de table 1 200 750 0,62
gements hydrauliques. Source : FAO, 2008.
Cependant, l’eau virtuelle est loin
d’être une solution miracle aux pro- celle qui a eu lieu entre 2006 et 2008, fortement les exportations. Les pays
blèmes de l’eau dans ces régions. rend la substitution de culture bien ayant fait le choix de l’eau virtuelle
En effet, le marché des produits agri- moins intéressante. Enfin, l’abandon se trouveraient en très grande diffi-
coles n’est pas un marché parfait : il de la culture des céréales met en péril culté et connaîtraient des « émeutes
existe des barrières tarifaires et non la souveraineté et la sécurité alimen- de la faim ». Ces exemples montrent
tarifaires (normes de qualité) qui taire des États. Si une pénurie géné- les limites d’une vision strictement
empêchent les pays du Sud d’expor- ralisée de céréales au niveau global se économique de l’eau : par son carac-
ter leur production. De plus, les cours produisait, il est évident que les pays tère irremplaçable et vital, l’eau a une
mondiaux fluctuent  : une hausse producteurs privilégieraient d’abord valeur qui dépasse largement sa valo-
rapide du prix des céréales, comme leur consommation interne en taxant risation monétaire.

Les exportations/importations d’eau virtuelle de la Thaïlande et de l’Égypte

CANADA
FRANCE
ÉTATS-UNIS TURQUIE
Chine
IRAN
Égypte
Importateur
d’eau virtuelle
SÉNÉGAL Thaïlande
NIGERIA Exportateur d’eau virtuelle

MALAISIE

INDONÉSIE

AUSTRALIE

ARGENTINE

Autres Autres
(12 577)
Flux d’eau virtuelle liés aux produits agricoles Types de flux
(km3/an) Importations
Exportations
Source : A.K. Chapagain, A.Y. Hoekstra, H. H. G. Savenije,
3 500 2 000 1 000 500 100 Hydrology and Earth System Sciences, 2006.

01-96-Atlas mondial de l'Eau-NE-Maq4-BAT.indd 85 14/12/2021 10:59


86 •
N om de l ’ auteur

Les solutions innovantes


dans les villes
Dans les pays développés et les pays émergents, il semble que les progrès technologiques,
combinés avec l’éducation des consommateurs, permettront de réduire « l’empreinte
hydrologique » des grandes villes. Dans les pays plus pauvres, les solutions aux problèmes
de l’eau ne peuvent se limiter aux améliorations techniques, mais passent surtout par la création
de modes de gestion novateurs associant étroitement les populations concernées.

Une solution d’avenir : mis en place. Mais les eaux usées trai- de réutilisation pour combler ses
la réutilisation des eaux usées tées sont de plus en plus employées, ressources déficientes, évitant ainsi
Techniquement, l’eau sortant des hors de leur usage traditionnel qu’est d’autres solutions coûteuses comme
usines d’assainissement les plus l’irrigation. le dessalement ou le transfert d’eau à
modernes pourrait être utilisée pour À Berlin, après un parcours en rivière, longue distance, avec un impact éco-
les usages domestiques  : une ville elles sont réinfiltrées dans les nappes logique bien moindre. Les nouveaux
pourrait ainsi fonctionner presque en phréatiques où la ville puise l’essentiel «  écoquartiers  », en Chine ou en
circuit fermé. À notre connaissance, de son eau potable. Barcelone envi- Europe, utilisent largement ces sys-
de tels systèmes n’ont pas encore été sage de développer les techniques tèmes de recyclage des eaux usées,
associés à la récupération des eaux
de pluie. À l’intérieur des bâtiments,
Évolution de la consommation d’eau en Allemagne et à Paris
les eaux « grises » (issues des lava-
PRONOSTICS ET ÉVOLUTION EFFECTIVE DE LA CONSOMMATION EN ALLEMAGNE bos, douches et baignoires), mélan-
PRONOSTICS ET ÉVOLUTION EFFECTIVE DE LA CONSOMMATION EN ALLEMAGNE
gées à l’eau de pluie, pourraient aussi
Consommation des ménages
220 Consommation desetménages être remployées.
220 (litres par habitant par jour)
(litres par habitant et par jour) Prévisions en1972 À l’échelle des États, l’eau recyclée
200 Prévisions en1972
200 peut être une solution pour les pays
Prévisions en 1976 soumis au stress hydrique : Israël réu-
180 Prévisions en 1976
180 tilise 80 % de ses eaux usées, ce qui
160 Prévisions en 1980 couvre déjà 25  % de ses besoins  ;
160 Prévisions en 1980
l’Espagne et l’Australie ont lancé de
140 Données annuelles vastes programmes pour atteindre un
140 Données
de la BDEW annuelles
120 de la BDEW
(association des taux de recyclage de 50 %.
120 (association des
industries allemandes
industries allemandes
de l’énergie et de l’eau) La réduction
100 de l’énergie et de l’eau)
100
1975 1980 1985 1990 1995 2000 2005 de la consommation
1975 1980 1985 1990 Source1995 2000 2005
: Bundesverband der Energie und Wasserwirtschaft, 2008.
Source : Bundesverband der Energie und Wasserwirtschaft, 2008. Contrairement aux idées reçues, la
ÉVOLUTION DE LA CONSOMMATION D’EAU À PARIS consommation par habitant se stabi-
ÉVOLUTION DE LA CONSOMMATION D’EAU À PARIS
240 Millions de m33 lise, voire diminue dans la plupart des
240 Millions de m
villes des pays du Nord. La réduction
230 est de 10 % à Barcelone en dix ans,
230
de 15 % à Los Angeles ou à Berlin et
220
220 atteint 50 % à Budapest entre 1990
et  2010. Cette évolution vient des
210
210 progrès techniques et de l’éducation
200 des consommateurs. Cette « décrois-
200 sance  » rapide, si elle se poursuit,
190 pourrait mettre en danger la stabi-
190
lité financière des opérateurs publics
180 comme privés (leur revenu reposant
180
1996 1998 2000 2002 2004 2006 2008 2010 2012 2014 2016 2018 sur la consommation), alors même
1996 1998 2000 2002 2004 2006 2008 2010 2012 2014 2016 2018
Source : Eau de Paris, Rapports annuels, 2011 et 2020.
Source : Eau de Paris, Rapports annuels, 2011 et 2020. qu’ils introduisent des techniques

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QUELS DÉFIS POUR LE XXIe SIÈCLE ? • 87
Les infrastructures vertes, grises et hybrides de traitement de l’eau
MODÈLE « VERT » Pluie
Évapotranspiration

Évaporation

Ruissellement

Toit de la nappe phréatique Infiltrations Recharge de la


nappe phréatique Zone humide

MODÈLE « GRIS »
Pluie
Augmentation
du ruissellement
(volume et fréquence)
Surface imperméable

Eaux pluviales canalisées Bassin de


Toit de la nappe phréatique (plus bas) stockage en béton

MODÈLE « HYBRIDE » Pluie Zone riparienne


Toits végétalisés Ruissellement tampon
réduit
Chaussée
poreuse
Jardin pluvial
Noue
Drain
Toit de la nappe Zone humide pour
phréatique (maintenu) Recharge de la nappe Infiltrations traitement de l'eau

Source : Y. Depietri, T. McPhearson « Integrating the Grey, Green, and Blue in Cities: Nature-Based Solutions for Climate Change Adaptation and Risk Reduction », 2017.

nouvelles et coûteuses pour amé- service. Ces expériences ont conduit


Comment se contenter de 50 l/j :
liorer les systèmes de traitement et à la remise en cause du modèle de l’exemple de la crise de l’eau
d’assainissement comme la filtration service d’eau centralisé à l’occiden- à Cape Town
par membrane et la désinfection par tale, avec un réseau uniforme pour
ultraviolets. tous. Pendant la crise de l’eau au Cap (Afrique
On assiste ainsi à la multiplication du Sud), les habitants étaient encouragés
Les progrès à économiser l’eau.
de micro-opérateurs privés des-
dans les villes du Sud servant un quartier à partir de puits Sans lavage des
Dans les villes du Sud, le problème ou de bornes-fontaines, voire à la 10 L = douche cheveux = 5 litres
Douche rapide Lavage à
n’est pas uniquement technique, il construction de petits réseaux locaux, l’éponge = 3 litres
est surtout financier et sociopoli- véritables circuits alternatifs de distri-
= une machine Lessive
tique. Le rôle grandissant des ONG et bution. La solution à la question de 10 L de 70 litres à la main
Lessive par semaine = 9 litres
le développement de la coopération l’eau pour tous dans les villes du Sud
décentralisée entre services d’eau passera sans doute par cette « flexi-
permettent d’apporter des solutions bilité », avec tous les risques que pré- 9L
Chasse = seulement quand
à des problèmes locaux. Cependant, sente la fragmentation des espaces d’eau c’est nécessaire
pour éviter l’échec des investisse- urbains. Elle passe également par le
ments massifs réalisés pendant la renforcement des solidarités exis- 9L = une fois par jour à la main
décennie mondiale de l’eau (1980- tantes et l’idée d’un recouvrement Vaisselle ou à la machine
tous les trois jours
1990), ceux-ci doivent tenir compte « durable » des coûts.
Ménage Utiliser des
des spécificités des villes du Sud. Malheureusement, il arrive que la 5L = un jour
sur deux produits sans eau
Une première solution est de favoriser réduction d’eau soit « forcée » par une
la participation des populations, en «  crise  ». Ainsi, dans la municipalité 3L Boisson
faisant de « l’usager-client » un « usa- du Cap en Afrique du Sud, pour éviter Nettoyage
Lavage
ger-partenaire  ». Cela peut prendre le « jour zéro » et l’effondrement du 2L des mains des mains
et des dents avec un savon
diverses formes, de simples forums système d’adduction d’eau en 2018 sans eau
d’information à la modification en pro- à cause d’une sécheresse prolongée, 1L Cuisine
fondeur des systèmes de gestion, par les habitants ont dû réduire précipi- 1L Animaux
l’association des habitants à la plani- tamment leur consommation de 150
fication du réseau et à la gestion du à 50 litres par jour.

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88 •
N om de l ’ auteur

Quels scénarios pour 2030 ?


Les deux défis majeurs des prochaines années seront d’améliorer la productivité de l’agriculture
irriguée, pour nourrir une population mondiale qui pourrait atteindre 9 milliards d’habitants en 2050,
et de faire face à la demande grandissante des villes en répondant aux aspirations au progrès
du niveau de vie dans les pays du Sud. Relever ces défis demandera de prendre en compte
la quantité d’eau disponible, mais aussi sa qualité et enfin sa juste distribution.

Les différents scénarios L’eau : un droit pour tous ? pression sur l’environnement n’aug-
Marchandise, bien public, bien collec- menteraient alors que très peu. On
SCENARIO 1 BUSINESS AS USUAL
tif, bien premier : les théories sont nom- aurait un accès quasi universel à l’eau
5SCENARIO
000 km 3 1 BUSINESS AS USUAL breuses pour définir le statut de l’eau. et une production agricole suffisante
5 000 km 3 1 BUSINESS AS USUAL
4SCENARIO En effet, si l’on peut estimer le prix de grâce à l’agriculture irriguée.
ux
ota la distribution d’eau potable et de l’as- Enfin, on ne peut bien sûr écarter une
5
3 000
000 km 3 ts t
4 en x sainissement, si l’on peut valoriser les « crise de l’eau » qui combinerait, faute
e m au
lèv ts tot services environnementaux rendus par d’investissements, une augmentation
4
2 000
3 000 Pré e n x
em tau les zones humides, l’eau possède aussi des pollutions et une baisse de ren-
lèv ts to
3 Pré e n
1 000
2 000 em une valeur patrimoniale et symbolique dement d’une agriculture irriguée mal
lèv
2 Pré incommensurable. gérée. Les conséquences seraient glo-
1 000
0
000
La vision de l’eau comme un bien vital a bales, avec une déstabilisation durable
1945 1995 2010 2025
1 000
0 conduit à l’inscription d’un droit à l’eau, du marché agricole, la multiplication
SCENARIO
1945 2 SCENARIO
1995« 2010
ROSE2025
» patrimoine commun de la nation, dans des famines et le développement de
0
5SCENARIO
000 1945
km 3 2 SCENARIO
1995« 2010 de nombreuses Constitutions (Afrique troubles sociaux dans les villes.
ROSE2025
»
du Sud, Éthiopie ou Équateur). Mais À l’horizon 2030, il est encore difficile
5 000 km 3 2 SCENARIO « ROSE »
4SCENARIO
x u il reste un gouffre entre le droit et sa de trancher entre ces scénarios, mais
ota
5
3 000
4 000 km 3 n ts t mise en application. Et, même quand les principales évolutions seront sans
eme au
x
c’est le cas (Afrique du Sud), la ten- doute très différentes selon les pays.
lèv ts tot
4
2 000
3 000 Pré e n x dance actuelle est de considérer l’eau, Dans les pays du Nord, qui ont fixé
em tau
ré lèv ts to au-delà du minimum nécessaire à la des objectifs ambitieux de dépollu-
3
1 000
2 000 P en
em survie des populations, comme une tion, se posera surtout la question du
ré lèv
2
1 000
0
000
P ressource économique à valoriser au traitement coûteux des pollutions agri-
1945 1995 2010 2025 mieux. Les débats sur le statut de l’eau coles diffuses et industrielles héritées.
1 000
0
SCENARIO sont donc loin d’être éteints. Les pays émergents mettront en place
1945 3 SCENARIO
1995« 2010
CRISE2025
»
0 des solutions techniques pour faire
km 3
5SCENARIO
000 1945 3 SCENARIO
1995« 2010
CRISE2025
» Les scénarios possibles face aux pénuries, apporter de l’eau à
km 3 3 SCENARIO « CRISE » Au niveau global, plusieurs instituts se tous et augmenter leur production agri-
4SCENARIO
5 000
x
au sont risqués à établir des prévisions cole, mais probablement au prix d’une
5 000
km 3
t s tot
4
3 000 e n x pour 2030, retenant généralement trois dégradation de la qualité des eaux.
em
lèv tau o
Pré ts t hypothèses. Enfin, dans les pays les plus pauvres,
4
2 000
3 000 en x
em au La première poursuit les tendances où la capacité à maîtriser l’eau reste
lèv ts tot
3 Pré en
1 000
2 000 em actuelles, avec pour conséquence une insuffisante, on peut craindre la persis-
lèv
2 Pré aggravation des problèmes dans les tance des problèmes actuels, et même
1 000
0
000
pays du Sud et une situation particu- leur aggravation car la pression sur la
1945 1995 2010 2025
1 000
0 lièrement difficile dans certains bassins ressource augmentera parallèlement à
Consommations
1945 1995 Industrielle
2010 2025 versants (Nil, Niger ou Indus). la croissance de la population.
0 Agricole
Consommations
Domestique Un autre scénario serait la mise en
1945 1995 Totale
2010 2025
Agricole Industrielle
Source : Rosengrant, Cai et Cline, 2002. œuvre réussie des techniques inno- La question du
Consommations
Domestique Totale vantes, tant dans l’agriculture irriguée réchauffement climatique
Agricole Industrielle
Source : Rosengrant, Cai et Cline, 2002.
Domestique Totale que dans les villes du Nord et du Sud. Les effets du réchauffement climatique
Source : Rosengrant, Cai et Cline, 2002. Consommation en eau globale et sur le cycle de l’eau sont mieux connus,

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QUELS DÉFIS POUR LE XXIe SIÈCLE ? • 89

mais la modélisation de la vapeur d’eau pluies plus abondantes, alors que le Si les conséquences du réchauffement
reste très partielle. Le sixième rapport bassin méditerranéen connaîtrait des climatique restent peu prévisibles dans
du GIEC indique que l’on verra pro- sécheresses plus longues. Il y a de l’état actuel des connaissances, on
bablement, au niveau mondial, une plus une divergence d’échelle entre peut regretter que l’attention portée
« accélération » du cycle de l’eau, avec les mailles des modèles, encore très à cette question masque parfois des
des pluies encore plus abondantes larges, et la réalité très locale de la ges- problèmes réels et bien documentés
dans les régions déjà fortement arro- tion de l’eau, déterminée par la forme qui affectent le cycle de l’eau : érosion
sées. Dans les zones semi-arides, les des bassins versants, la présence de des sols, disparition de nombreux éco-
situations seraient contrastées  : les nappes souterraines ou de lacs, les systèmes fragiles, pollution des nappes
pays sahéliens verront peut-être des types d’usages… phréatiques.

Les objectifs du développement durable


Objectif : D’ici à 2030, assurer l’accès universel et équitable à l’eau potable, à un coût abordable

Situation des pays vis-à-vis des objectifs fixés (en 2020)


Plus de 50 % de la population n'a pas un bon accès à l'eau
De 25 à 50 % de la population n'a pas un bon accès à l'eau
De 10 à 24,9 % de la population n'a pas un bon accès à l'eau

Source : ONU, OMS, Unicef.


Pas de données

Eau et changement climatique

Évolution des précipitations annuelles en 2041-2060 par rapport à 1961-1990 (en %)


Incertitude des modèles
- 10 0 + 10 + 20 + 30 + 40 + 50 Source : GIEC, 2021.

01-96-Atlas mondial de l'Eau-NE-Maq4-BAT.indd 89 14/12/2021 10:59


90

EN CONCLUSION
Quels défis pour
le xxie siècle ?
Des progrès techniques, facteurs d’espoir
Les progrès techniques ont permis d’amé-
liorer le traitement des eaux usées et de
considérablement baisser le coût énergé-
tique (donc le prix) de l’eau potable issue du
dessalement d’eau de mer. De même, le sys-
tème du goutte à goutte a réduit le volume
d’eau nécessaire pour la production agricole
irriguée.

Des carences politiques dramatiques


Cependant, les principaux obstacles à la
résolution des problèmes liés à l’eau ne sont
pas d’ordre technique. Ils proviennent essen-
tiellement de modes de gestion inadaptés et
recoupent les inégalités spatiales préexis-
tantes. Plus de trois milliards de personnes
n’ont pas un accès satisfaisant à l’eau
potable, ce n’est pas à cause d’une pénurie
d’eau ou de difficultés techniques, mais bien
parce qu’il y a de graves carences politiques,
tant au niveau local (municipalités) qu’au
niveau global, où l’eau est loin d’être une
priorité, malgré les nombreuses déclarations
de principe. Lorsque l’on considère le coût
humain de ce manque de considération, on
comprend mal qu’il ait fallu plus de 60 ans à
l’Assemblée générale de l’ONU pour déclarer
« le droit à une eau potable salubre et propre
comme un droit fondamental, essentiel au
plein exercice du droit à la vie ». Et qu’il y ait
eu 41 abstentions…

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CONCLUSION • 91

Conclusion générale

L
es Nations unies soulignent depuis plus de 40 ans Progressivité
l’importance de l’eau, « essentielle pour le dévelop- Les nouveaux modes de gestion, comme les infrastruc-
pement durable, l’intégrité de l’environnement et tures, doivent être introduits progressivement. L’échec
l’élimination de la pauvreté et de la faim, est indispensable relatif de la « Décennie internationale de l’eau potable et
à la santé et au bien-être des hommes». de l’assainissement (1980-1990) » lancée par les Nations
Quelles que soient les évolutions futures, des solutions ne unies a montré que la construction « clé en main » d’un
seront apportées aux problèmes de l’eau qu’à travers la réseau semblable à celui des pays développés n’est pas
mise en place de politiques innovantes fondées sur trois une solution viable à long terme. En revanche, l’avancée
principes : la diversité, la progressivité et la solidarité. progressive des réseaux peut permettre une amélioration
durable de l’accès à l’eau. La « transition hydraulique » vers
Diversité l’accès universel se fait alors par étapes, en passant par les
La prise en compte de la diversité des situations, à la bornes-fontaines, les micro-réseaux puis le raccordement
fois des ressources – quantité et qualité de l’eau dispo- au réseau principal, avec chaque fois la participation des
nible –, mais aussi de l’histoire et des configurations socio- populations concernées.
spatiales est indispensable. Il n’y aura pas un modèle
unique pour tous, calqué sur l’expérience des pays déve- Solidarité
loppés. Il faut ainsi adapter le service aux besoins réels des Enfin, la solution à la « crise de l’eau » ne pourra se faire
citadins, et penser en termes de gradient de service, de sans reposer sur des formes de solidarité. Cela concerne
la borne-fontaine à l’accès complet (robinet dans le foyer évidemment la solidarité internationale, tant les besoins
et système d’assainissement), en adoptant des modes de de financements sont importants. Mais cela implique sur-
gestion adaptés aux configurations territoriales des villes tout des formes d’entraide qui existent très souvent dans
et à leur histoire institutionnelle pour obtenir des systèmes de multiples pays. Dans les pays de tradition musulmane,
de régulation efficaces. Il en va de même pour les modes tout comme chez de nombreuses populations d’Amérique
de gestion  : le principe de délégation de service public latine ou d’Asie, il reste impensable de ne pas partager son
rencontre de fortes résistances dans des États d’Amé- eau avec ceux qui en sont privés. Ces formes tradition-
rique latine comme la Bolivie, alors qu’il peut être mieux nelles de solidarité peuvent être intégrées dans les sys-
accepté ailleurs. Il serait d’ailleurs paradoxal d’instituer tèmes de tarification actuels. Aujourd’hui, près de soixante
un modèle unique mondial, alors qu’en Europe même les pays ont adopté ce genre d’aide au paiement de la facture
situations sont extrêmement diverses, entre les Pays-Bas d’eau pour les populations défavorisées, avec des formules
où la gestion est publique à 100 %, l’Angleterre où elle est diverses, soit en délivrant un quota d’eau gratuit, soit en
déléguée à 100 %, et la France qui est dans une situation fournissant des aides financières directes aux ménages ne
intermédiaire. pouvant payer leur facture.
Là encore, solidarité, progressivité et diversité, combinées,
peuvent apporter des solutions durables.

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92

Annexes
GLOSSAIRE
Anastomose Débit Lit mineur
Forme d’un cours d’eau où les différents Volume d’eau écoulé pendant une période Chenal le plus bas au sein d’une vallée
chenaux dessinent un réseau complexe qui, vu donnée, exprimé généralement en litres contenant l’écoulement permanent
en plan, peut faire penser à une tresse. par seconde, en mètres cubes par seconde, des eaux d’un cours d’eau.
ou encore en kilomètres cubes par an.
Aquifère Module
Formation perméable d’un point de vue Débit réservé Débit moyen d’un cours d’eau calculé
lithologique où s’accumule l’eau et qui peut Débit minimal qui doit être maintenu sur une longue période (généralement
contenir celle-ci en quantité exploitable. pour la sauvegarde des écosystèmes, trente ans).
généralement défini pour les cours d’eau
Aréique en aval de grands barrages. Nappe phréatique
Se dit d’une région aride où l’on n’observe Nappe d’eau imprégnant les roches,
aucune trace d’écoulement superficiel. Endémisme formée par l’infiltration des eaux de pluie
Caractéristique des espèces dont l’aire de et alimentant les sources et les puits.
Bassin versant répartition est limitée à un seul espace donné.
Espace géographique alimentant un cours Percolation
d’eau et drainé par lui. Le bassin versant a pour Endoréique • exoréique Passage lent d’un liquide se glissant
axe le cours d’eau et pour limites la ligne de On appelle endoréique une région où à travers les interstices du sol.
partage des eaux le séparant des bassins l’écoulement s’effectue vers des dépressions
versants adjacents. Synonyme : bassin fermées intérieures, sans lien avec les océans. Pergélisol
hydrographique. Les bassins versants débouchant dans l’océan
Sol ou couche rocheuse des régions
sont dits au contraire exoréiques.
polaires gelé en permanence.
Capacité au champ,
Synonyme : permafrost.
capacité de rétention Évapotranspiration
Quantité d’eau contenue dans la microporosité Ensemble de phénomènes comprenant à la fois
Réserve utile
d’un sol. l’évaporation sur les surfaces d’eau libre
Quantité d’eau du sol dont la végétation
(par exemple, les lacs) et la transpiration
Charge solide biologique, essentiellement des végétaux. peut disposer pour assurer sa croissance.
Quantité de matériaux solides transportés en
solution, en suspension ou en charge de fond Exsurgence Résurgence
par un cours d’eau. Apparition à l’air libre, sous forme de source, Réapparition à l’air libre d’une rivière
d’un écoulement souterrain. souterraine.
Coefficient mensuel de débit
Correspond au rapport entre le débit mensuel Inlandsis Rétroaction
et le débit moyen annuel. Calottes de glace des régions polaires, qui (boucles de rétroaction)
recouvrent le Groenland et l’Antarctique. On appelle rétroaction l’action en retour
Crue de l’effet sur la cause qui lui a donné
Augmentation aléatoire et brutale du débit Karst naissance. Les boucles de rétroaction sont
d’un cours d’eau, qui se traduit par une Formes de relief développées dans des roches dites positives quand l’effet renforce la
augmentation de son niveau et, par solubles (calcaire, gypse, dolomie, etc.) par cause et négatives quand il la ralentit.
conséquent, des débordements dissolution, précipitation et érosion.
dans le lit majeur. Ripisylve
Lit majeur ou lit d’inondation Bordure boisée d’un cours d’eau.
Cryosphère Partie d’une vallée occupée lors des crues.
Zone caractérisée par la présence de neige, La limite externe du lit majeur correspond Résilience
de glace ou de sols gelés en raison de basses au niveau de la plus grande crue Capacité d’un écosystème à revenir
températures en haute latitude ou altitude. historique enregistrée. à un état antérieur après une perturbation.

N.B. : ce glossaire a été réalisé à l’aide du Dictionnaire multilingue et multimédia de l’environnement et des sciences de la terre,
Iasi (Roumanie), Azimuth, 2005.

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ANNEXES • 93

BIBLIOGRAPHIE SÉLECTIVE ET SITES WEB


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Derniers titres parus dans la collection « Atlas »

Atlas des immigrations Atlas de l’Océanie Atlas du climat Atlas de l’Europe


en France Fabrice Argounès Face au défi Un continent dans
Sarah Mohamed-Gaillard du réchauffement tous ses états
Pascal Blanchard Luc Vacher
Hadrien Dubucs François-Marie Bréon Frank Tétart
Yvan Gastaud Gilles Luneau Pierre-Alexandre Mounier

Atlas des frontières Atlas historique Atlas des premières Atlas de la Shoah
Retour des fronts, des États-Unis colonisations La mise à mort
essor des murs Lauric Henneton XVe-début XIXe siècle : des Juifs d’Europe,
des conquistadores 1939-1945
Hugo Billard
Frédéric Encel aux libérateurs Georges Bensoussan
Marcel Dorigny

Atlas des énergies Atlas historique Atlas de la Première Atlas des


mondiales de Rome Guerre mondiale migrations
Vers un monde plus vert ? IXe siècle avant J.-C. La chute des empires De nouvelles solidarités
- XXIe siècle européens à construire
Bernadette Mérenne-
Schoumaker Collectif Yves Buffetaut Catherine Wihtol de Wenden
Bertrand Barré

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Plus de 600 millions d’habitants
n’ont pas accès à l’eau potable Atlas mondial
de l’eau

D. Blanchon
dans le monde.

L’eau est la ressource la plus précieuse sur la Terre. Irremplaçable


pour l’homme, l’eau est pourtant menacée, parfois mal gérée, Défendre et protéger notre bien commun
souvent inaccessible. Comment donner un accès à l’eau pour tous ?
Cet atlas propose un tour d’horizon autour de divers aspects :
David Blanchon
• L’eau, ressource vitale, abondante mais mal répartie, qui révèle
des inégalités sociales et de genre.
• L’eau, bien commun menacé par la surexploitation, les pollutions
agricoles, industrielles et urbaines.
• Préserver les ressources en eau et leur qualité : un défi sanitaire
et social, économique et environnemental, mais aussi et surtout
un choix politique.

Atlas mondial de l’eau


Cette nouvelle édition, grâce aux plus de 100 cartes et schémas mis
à jour, dresse un tableau complet des défis auxquels le monde est
aujourd’hui confronté pour une meilleure gestion de l’eau.


David Blanchon est géographe. Il enseigne à l’université Paris-Ouest Nanterre après avoir
passé deux ans au sein de l’IRL iGlobes (CNRS-université d’Arizona) à Tucson, Arizona.
Aurélie Boissière est cartographe indépendante.

ISSN : 1272-0151

Illustration de couverture :
www.autrement.com © Justinreznick / iStock QUATRIÈME ÉDITION

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