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l’expansion de la Tidjaniya
Après avoir assimilé les enseignements et les secrets des grands maîtres
qu’il connut, il atteignit les degrés spirituels escomptés, notamment celui
du grand Cheikh et Pôle de son temps.
C’est sous cet arbre devenu sacré pour avoir abrité cet entretien qui
marqua fort la vie de Thierno Mamadou Siradji que Thierno Saïdou
Hammath et son fils Mamadou Saïdou se concertèrent pour la dernière fois.
Comme ce fut le cas avec Thierno Yéro, Thierno Hammet Baaba ne tarda
pas à éprouver une affection sans limites pour le nouvel élève, Mamadou
Seydou. Thierno Hammet finit par confier la gestion de sa boutique à son
élève, Mamadou Seydou. Thierno Hammet Baaba fit de Mamadou Siradji
son fidèle compagnon. Il s’accompagnait toujours de lui pour aller à la
mosquée y effectuer les prières canoniques. Le jour, l’élève Mamadou
Siradji se consacrait exclusivement à la boutique. Le soir, Thierno Hammet
lui faisait des cours, en l’absence de tout autre disciple.
Thierno Hammet Baaba n’a jamais voulu que Thierno Mamadou Seydou
s’absente, un seul instant, de la maison. Thierno Hammet lui vouait une
confiance et une affection extraordinaires que traduisait l’anecdote ci-
après : «En compagnie de son élève Thierno Hamady Cissokho de
Niamanary (Vélingara), Thierno Hammet allait à Sinthiou Bamambé. Ils
firent escale dans un village où ils passèrent la nuit. Thierno se leva tard
dans la nuit et se mit à prier. Il réveilla son compagnon afin que ce dernier
fasse autant. Le compagnon lui répondit : <<Je ne compte point sur mes
prières, mais sur toi>>. Et Thierno Hammet de rétorquer à Hamady
Cissokho, son compagnon : <<Je n’ai point le grade auquel tu fais allusion.
C’est mon cher Thierno Mamadou Seydou qui est élevé à ce grade. Est
sauvée de l’enfer toute personne qui aura prié derrière Thierno Mamadou
Seydou …D’ailleurs, toi de la Casamance lointaine et lui du Fouta Toro, vous
serez des voisins…»
Thierno Siradji revint à Hooré Foondé. Thierno Aly Dia lui offrit un terrain à
usage d’habitation. Il y construisit un bâtiment, y creusa un puits et se mit à
enseigner. Très vite, il gagna l’estime et la confiance de Thierno Bocar
Alpha qui, malgré son âge avancé et son autorité, rendait des visites de
courtoisie au jeune Thierno Mamadou Seydou. En dépit de l’opposition des
habitants de Hooré Foondé et des malaises dont souffrait le jeune
Mamadou Seydou, Thierno Bocar Alpha ne cessait de demander à Thierno
Mamadou Siradji de diriger les prières effectuées à la mosquée. A ceux qui
contestaient la désignation de Thierno Mamadou Seydou pour diriger les
prières, Thierno Bocar Alpha rétorquait : «Si vous saviez ce qu’il y a en lui,
vous le solliciteriez pour diriger toutes vos prières. Allah exauce toutes les
prières que préside Thierno Mamadou Seydou.»
Bien que ne figurant pas sur la liste des débiteurs de Thierno Amadou
Tidiane Wone, Thierno Mamadou Seydou décida, sur la base des
informations reçues de Thierno Oumar Touré de Kolda, de passage au
Fouta, d’aller à Kolda pour y cultiver de l’arachide afin de pouvoir
rembourser le reliquat provenant du vol des marchandises qu’il gérait pour
Thierno Amadou Tidiane Wone.
Il partit, en 1927, de Hooré Foondé avec sept de ses disciples que sont
Thierno Mamadou Oumar Kane de Dabiya, Ahmadou Oumar Bah de Boggel,
Thierno Daouda Oumar Atoumani de Diowol, Hamidou Ngaydo de Diowol,
Thierno Djibirirou de Diowol, Thierno Aqibou du Fouta Djalon et Thierno
Nasrou Bah de Néré. Le convoi passa la première nuit à Perlel. Arrivés à
Diourbel, Thierno et ses compagnons logèrent chez Ousmane Bah. Ils y
restèrent trois mois avant de continuer sur Kaolack. A Kaolack, Thierno et
sa suite logèrent chez Thierno Bara Alpha Tall. Le convoi fit escale à Nioro
du Rip avant d’arriver à Kolda.
Deux ans après sa naissance, sa mère, Youma Ly, alla trouver ses frères
restés à Nioro du Sahel après la fin de la guerre sainte menée par El haji
Oumar Tall au Mali. Ayant atteint l’âge d’aller à l’école coranique, le jeune
Mamoudou Baro fut envoyé au Fouta Toro par ses oncles qui tenaient ainsi
à respecter la dernière volonté de son père, Ahmadou Elimane qui mourut
avant la naissance de son fils. En peu de temps, le jeune Mamoudou
mémorisa le Coran. Il fut envoyé à Hawdou, en Mauritanie. Il y obtint alors
le Lizaasi, le diplôme le plus élevé en matière de lecture et d’écriture du
Coran. Ses oncles l’envoyèrent auprès de Chérif Mouhammad El Moctaar
de Kayes pour son initiation à la voie Tijjaaniya.
Une nuit de dimanche de l’année 1927, Cheikh Oumar et son fils Ahmadou
rendirent visite à Thierno Ahmadou Baro et lui demandèrent d’effectuer des
voyages pour le compte de l’islam en général et de la confrérie Tijjaaniya en
particulier. Ils lui signifièrent d’aller à leur rencontre en Côte-d’Ivoire ; ils le
chargèrent d’une mission auprès d’un certain Mamadou Seydou. Ils lui
indiquèrent des éléments et des signes précis permettant de reconnaître le
destinataire de la mission. Cette mission consistait à transmettre à Thierno
Mamadou Seydou un Nom (secret) de Dieu à évoquer et l’ordre d’égrener
chaque nuit 12000 fois le Salatul Fatih. Il s’agit d’un nom recelant les
mystères de la Tijjaaniya et révélé au Qutb. La manifestation d’un Qutb
(Pôle) est annoncée aux grands maîtres de l’Ordre par une connaissance
ésotérique propre à la Voie. Trois jours après la visite de Cheikh Oumar et
de son fils, Thierno Ahmadou fut visité par feu El hadji Malick Sy, son
maître qui lui dit : «Pourquoi refusez-vous d’exécuter la mission que vous
ont confiée Cheikh Oumar et son fils Ahmadou ? Faites cette mission. Vous
n’avez plus rien à attendre.»
Le jeune Ali fut éduqué par son oncle. Il excella dans la lutte qui était à
l’époque le jeu favori des jeunes ruraux après les travaux champêtres.
Subitement, le jeune Ali décida de renoncer à jamais à la lutte pour
apprendre le Coran et pour se consacrer à l’Islam.
Thierno Aliou Boun Ismaila faisait 1000 rakkas toutes les 24 heures. Il
récitait chaque nuit 12 000 fois Salatul Fatihi et 800 fois le sayfiyu.
Libéré par son maître spirituel Aliou Boun Ismaila, Thierno Seydi Ali alla
s’installer en Guinée Bissau pour y fonder sa communauté religieuse en
1910. Il pratiquait l’Islam basé sur la Sunna et la charia. Dans le souci de
mettre le maximum d’informations à la portée des prosélytes, Thierno
Seydi Ali faisait certaines prières à voix haute. C’est le cas de :
Après la ziara de Sobouldé, Thierno Seydi Aly rentra à Madina Seydi Aly, via
Kolda. Thierno Mamadou Seydou se rendit alors à Madina Seydi Aly pour
répondre à l’invitation et pour exécuter les consignes de Thierno Amadou
Barro. A son arrivée, Thierno Seydi Aly convoqua ses proches
collaborateurs. Thierno Seydi Aly s’adressa publiquement à Thierno
Mamadou Seydou en ces termes : «Depuis 8 ans, je t’attends. J’ai fait
publiquement des prières et des sacrifices aux fins de connaître mon
successeur. Le présent Dental t’appartient. Tu es mon remplaçant. En effet,
j’ai eu à faire un rêve il y a 8 ans de cela. Le lendemain, j’ai relaté mon rêve
à mes collaborateurs ici présents. J’avais rêvé d’avoir déposé une charge
très lourde que je portais. J’ai demandé à ceux qui étaient avec moi de
venir un à un soulever et porter cette charge. Personne n’a pu le faire. Il y a
eu un jeune garçon, mince et beau qui est venu soulever et porter cette
charge. Cela fait huit ans que le rêve a eu lieu. Après ce rêve, j’ai fait des
prières et des sacrifices pour demander au Bon Dieu de me faire connaître
mon successeur».
S’adressant à l’assistance, Thierno Seydi Aly dit ceci : «C’est celui-là que
j’avais vu en rêve.» Il souhaita la bienvenue à Thierno Mamadou Seydou en
ces termes : «Nous te souhaitons la bienvenue non seulement dans nos
chambres, mais aussi et surtout dans nos cœurs.»
Thierno Seydi Aly reçut Thierno Mamadou Seydou avec beaucoup d’égards,
d’enthousiasme, de plaisir et de joie. Il chargea Thierno Mamadou
Seydou de diriger les prières et d’enseigner les élèves. El hadji Aly exprima
à Thierno Siradji son désir de voir ce dernier rester pour de bon à Madina
Seydi Aly. Thierno Mamadou Seydou demanda à son hôte et nouveau
maître l’autorisation d’aller à Thilogne recueillir l’avis de son maître Thierno
Hammet Baaba sur la proposition que Thierno Aly venait de lui soumettre.
Thierno Mamadou Seydou intégra le milieu. El Hadji Seydi Aly lui confia sa
progéniture et ses disciples. Il lui transmit la gestion du Dental :
enseignement, causeries religieuses, prières, conversion à l’Islam, initiation
à la confrérie Tijjaani, etc. Thierno Seydi Aly allait avec lui aux cérémonies
officielles qui se déroulaient à Kolda et auxquelles il était invité. Il ne
manquait jamais l’occasion de présenter Thierno Mamadou Seydou aux
autorités administratives. A l’occasion d’une cérémonie organisée à Kolda,
il fit la présentation entre Thierno Mamadou Seydou et son ami Yéro
Djeïnaba, le chef de Canton de Cantora, une province du Fouladou situé
dans le département de Vélingara. Il les confia l’un à l’autre.
Thierno Seydi Aly transmit ainsi à Thierno Mamadou Seydou tout ce qu’il
détenait en science, secret et lumière. Il lui confia l’initiation, l’éducation et
la formation de sa progéniture et de ses disciples.
Thierno Seydi Aly Thiam fut rappelé à Dieu le 12 avril 1935.
Quarante jours après la mort de El hadji Seydi Aly et comme s’y attendait,
du reste, Thierno Seydi Aly, certains dignitaires du Dental aux esprits ruinés
par la proclamation du dernier venu manifestèrent leur déception et mirent
en cause le choix porté sur Thierno Mamadou Seydou. Une crise de
succession conduisit à l’éclatement du village et à la dispersion des
disciples et marabouts qui avaient rejoint El hadji Seydi Aly. Des disciples
et marabouts influents partirent avec leurs partisans créer leurs propres
villages.
Pendant son séjour forcé à Kolda, il perdit son garçon Mamadou Lamine. Il
ne voulut pas l’enterrer dans les cimetières de Kolda par ce que ceux-ci
servaient aussi bien aux musulmans qu’aux non musulmans. Il l’enterra à
Guiro Yéro Bocar après le refus des dignitaires de Madina El Hadji de
recevoir le corps chez eux, à Médina El Hadji. Le refus de Thierno
Mamadou Seydou d’enterrer son fils à Kolda aiguisa davantage l’hostilité
des populations de Kolda à son égard.
Thierno Mamadou Seydou adressa à Thierno Barro une lettre dans laquelle
il écrit : «Les autorités administratives de Kolda veulent me chasser de leur
territoire. Je souhaite que Serigne Ababacar Sy intercède en ma faveur
auprès des autorités administratives du Sénégal. Je ne souhaite pas
quitter la région de Kolda. Je veux y habiter.» Thierno Barro présenta la
lettre à Serigne Ababacar Sy. Après avoir lu la lettre, Serigne Ababacar Sy
dit à Thierno Barro ceci : «Allah a décidé que Mamadou Saïdou s’installe
dans le territoire de Kolda. La volonté de Dieu est irréversible. Thierno
Mamadou Seydou n’a besoin de l’intervention d’aucun être humain pour
rester là-bas. Il y restera. Telle est la volonté de Dieu.»
Thierno Siradji expliqua à son hôte son aventure et son intention de créer
un village. Yéro Dieynaba l’invita, avec insistance, à s’installer dans sa
province au prix de son pouvoir. Il lui dit toute sa disponibilité à être à ses
services en qualité de disciple. En raison de l’engagement sans réserve de
Yéro Dieynaba, Thierno Mamadou Seydou finit par accepter l’invitation de
son hôte. Yéro Dieynaba mit alors à sa disposition un guide, du nom de
Samba Bâ, pour l’aider à trouver dans son canton un endroit de son choix.
Deux à trois jours après leur installation dans leur nouveau hameau,
Boubabar Maana Baldé arriva de Kolda et annonça la naissance de Thierno
Ahmadou Tijjaani, l’actuel Khalif.