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Département de Sociologie
SO 00201 V
Initiation à l'enquête de terrain en sociologie
ENTRETIEN
Année 2019-2020
Auteures du cours :
Sandrine Barrey (responsable) barrey@univ-tlse2.fr
Valentine Hélardot helardot@univ-tlse2.fr
Anita Meidani meidani@univ-tlse2.fr
Descriptif du cours
Nombre de crédits ECTS : 8
Période d'enseignement : 2e semestre
Nombre d'heures : 50 heures
Méthodes d'enseignement : TD (4 heures / semaine)
Objectifs :
Faire l'expérience d'un premier contact avec l'enquête de terrain en sociologie et se familiariser avec les
principales méthodes d'enquête.
Bibliographie de base :
Arborio A-M., Fournier P., 2008, L’enquête et ses méthodes : l’observation directe, Paris, Armand Colin.
Beaud S., Weber F., 1997, Guide de l'enquête de terrain, Paris, La Découverte.
Berthier N., Les techniques d'enquête. Méthode et exercices corrigés, Paris, Armand Colin, 1998.
De Singly F., 2016, Le questionnaire, 4e éd., Paris, Armand Colin.
Eyraud C., 2008, Les données chiffrées en sciences sociales. Du matériau brut à la connaissance des
phénomènes sociaux, Paris, Armand Colin.
Kaufmann J.C., 1996, L'entretien compréhensif, Paris, Nathan.
Quivy R., Van Campenhoudt, Manuel de recherche en sciences sociales, 4e édition, Paris, Dunod, 2011.
Modalités de contrôle :
Contrôle continu, première session : 4 évaluations (25% chacune).
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Table des matières
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Trop ou pas assez de directivité ?................................................................................................................................129
Les interventions de l'enquêteur..................................................................................................................................130
Analyser la relation enquêteur-enquêté......................................................................................................................130
3. EXERCICE DE COMMENTAIRE CRITIQUE D'EXTRAITS D'ENTRETIENS (1H)...................................................................................131
4. EXERCICE : LES SPÉCIFICITÉS DE L'ENTRETIEN SOCIOLOGIQUE (30 MN)....................................................................................135
5. TRAVAIL EN GROUPE SUR LES ENTRETIENS (1H).................................................................................................................136
TRAVAIL POUR LA SÉANCE SUIVANTE : RÉALISATION DE L'ENTRETIEN + TRAVAIL SUR L'ENTRETIEN À RENDRE..................................136
4
L'enquête par entretiens
L'entretien sociologique s'est développé sur la base d'une quadruple filiation : l'enquête
ethnologique et ses prolongements au sein de l'Ecole de Chicago ; les enquêtes sociales du XIX e
siècle (notamment autour de F. Le Play) ; l'entretien en psychologie clinique (notamment autour de
J. Piaget) ; les enquêtes sociologiques d'E. Mayo au sein des ateliers Hawthorne dans les années
1930.
L'usage de l'entretien est fondé sur le constat des limites de l'interrogatoire standardisé
(questionnaire) ; sur la recherche d'une parole plus authentique de la part des enquêtés ; sur une
conception plus égalitaire des relations enquêté-enquêteur ; et sur l'idée qu'à travers leur discours,
on peut avoir accès au monde social des enquêtés.
1
Ces points seront développés dans la séance 8 du cours SO 202. Ils sont présentés en TD à la séance 7 pour
introduire le début du travail sur les entretiens.
5
Dans un entretien, tous les éléments d'ordre descriptif sont recueillis à travers le filtre d'un point de vue
particulier, celui de l'enquêté. Ceci constitue précisément la richesse de l'entretien : pouvoir analyser le
contenu et la construction de ces points de vue.
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« Toute expérience de vie comporte une dimension sociale » (Alfred Schü tz, cité in
Bertaux, 1997, p. 45).
Dès lors, analyser sociologiquement des cas singuliers consiste à rechercher dans chacune de ces
configurations particulières tout ce qui relève de processus sociaux, c'est-à-dire tout ce qui, au sein de
chaque individu, révèle la présence et les effets de déterminants sociaux. Cela consiste également, en
partant des cas individuels étudiés en profondeur, à voir comment le social qui produit les individus est
également, en retour, produit par ces individus à travers leurs actions.
2
Cf. les enquêtes sur la haute bourgeoisie menées par Michel Pinçon et Monique Pinçon-Charlot.
7
2.3. Préparer des entretiens
8
se déplacer dans divers lieux liés au sujet de l'enquête et recruter des volontaires par contact
direct.
Dans tous les cas, il faudra être attentif à l'effet de sélection induit par le mode de recrutement privilégié.
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Il faut donc être attentif à présenter l'entretien pour ce qu'il est, c'est-à-dire une conversation non
formatée dans laquelle l'enquêté sera amené à parler, à (se) raconter, à exposer son point de vue,
et non pas à répondre à des questions
l'anonymat dans l'utilisation des propos recueillis est un point essentiel à préciser aux enquêtés.
bien entendu, il est nécessaire de prévenir de l'enregistrement de l'entretien. L'argument à utiliser
ici est simple, il consiste à dire la vérité : vous ne voulez pas risquer d'oublier ou de passer à côté
d'une partie des propos de la personne, vous avez donc besoin de l'enregistrer pour pouvoir
transcrire ensuite ses paroles le plus fidèlement possible. Le plus souvent les enquêtés
comprennent tout à fait cette nécessité, et même cela les rassure : on ne déformera pas leurs
propos, leur parole sera respectée dans son intégralité… Il est utile de préciser que l'entretien ne
sera pas écouté par quelqu'un d'autre que vous-même. Et bien sûr, le matériel d'enregistrement
devra être prêt, et son utilisation maîtrisée…
c/ Le guide d'entretien
Tout entretien nécessite en amont un travail préalable de la part de l'enquêteur, principalement à travers
l'élaboration du guide d'entretien (parfois appelé "grille d'entretien"). Celui-ci est une trame constituée de
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thèmes (parfois subdivisés en sous-thèmes) qui retracent les sujets que le sociologue souhaite voire
abordés par l'enquêté au cours de l'entretien.
Il est essentiel de noter que le guide ne sera pas utilisé de façon rigide, comme un questionnaire, au cours
de l'entretien. Il sera adapté en fonction du déroulement de l'entretien :
- les thèmes et questions qui y figurent ne seront pas nécessairement (voire même rarement)
abordés dans l'ordre du guide
- ils seront parfois formulés différemment de ce qui figure dans le guide
- ils seront complétés en cours d'entretien par d'autres questions qui sembleront appropriées sur
le moment
Comparé à d'autres méthodes d'enquête (et en particulier au questionnaire), l'entretien présente une
caractéristique de souplesse qui en fait son grand intérêt : en effet il est toujours possible au cours d'un
entretien de revenir en arrière sur un thème déjà abordé, de demander des précisions, des
développements, des compléments, ou même de quitter pendant un temps le thème principal de
l'entretien pour y revenir par la suite. Parce qu'il s'inscrit dans la durée, et parce que la parole y est libre,
l'entretien permet donc d'aller aussi loin que possible (selon l'habileté de l'enquêteur et la volonté de
l'enquêté) dans l'approfondissement du discours recueilli. Le guide est là pour accompagner ce travail
d'approfondissement, sans le formater ni le contraindre.
L'essentiel est que tout ce qui figure dans le guide soit abordé à un moment ou à un autre pendant
l'entretien.
Le guide d'entretien pourra aussi être adapté à chaque enquêté (par exemple, pour des entretiens auprès
de personnels d'une association caritative, il pourra être judicieux de préparer des variantes du guide : une
pour le directeur de l'association, une autre pour les salariés).
Le guide d'entretien a deux fonctions principales :
avant l'entretien, l'élaboration du guide est une opération de recherche à part entière, puisqu'elle
oblige le chercheur à formuler ses questions, à les hiérarchiser (questions centrales/secondaires), à
les regrouper par thèmes... Bref, à préciser et mettre au clair l'objet de sa recherche
pendant l'entretien, le guide a deux utilités :
- d'une part, il sert d'aide-mémoire, et permet à l'enquêteur de vérifier qu'il n'a rien oublié dans
l'ensemble des questions à poser à l'enquêté, ou dans l'ensemble des thèmes à aborder avec lui
- d'autre part, le guide sert à recentrer ou à relancer l'entretien si nécessaire : si la personne sort
du sujet et si le chercheur se sent "entraîné" dans ce discours, ou bien si l'enquêté s'arrête de
parler et attend que l'enquêteur le relance, les questions du guide seront là pour permettre à
l'enquêteur de recadrer l'entretien ou de faire repartir la dynamique de l'échange.
Concrètement, un guide d'entretien est une feuille (de préférence un recto seul) sur laquelle le sociologue
note les principales questions à poser à l'enquêté. Il peut le faire sous forme d'une liste de thèmes et sous-
thèmes à aborder, mais nous recommandons aux sociologues débutants de formuler de vraies questions,
de façon à ne pas avoir à trouver des formulations en cours d'entretien (et cela même si, pendant
l'entretien, la question sera peut-être formulée d'une façon différente, parce que cela semblera plus
"naturel" et plus pertinent). Ces questions seront des questions ouvertes, qui invitent l'enquêté à répondre
librement et à développer ses propos.
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La longueur n'est pas une qualité pour un guide d'entretien. Le chercheur doit l'avoir sous les yeux, ou à
proximité, pendant l'entretien, et doit pouvoir facilement s'y retrouver. Mais surtout, il doit le connaître par
cœur pour avoir le moins possible besoin de le consulter.
Pour construire un guide, il faut procéder par étapes : d'abord noter "en vrac" toutes les questions que l'on
souhaiterait poser à l'enquêté, puis conserver les plus importantes, les regrouper par thèmes et les
ordonner logiquement.
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A la suite de la formulation de la consigne, le guide d'entretien doit faire figurer une série de thèmes et de
questions ordonnés de façon structurée (même si, nous le rappelons encore une fois, l'entretien ne suivra
probablement pas l'ordre chronologique tel qu'il est prévu dans le guide). Rappelons que les questions
figurant dans un guide d'entretien sont très différentes de celles figurant dans un questionnaire :
ouvertes et non fermées, ne proposant aucune réponse prédéfinie de façon à laisser l'enquêté s'exprimer
librement avec ses propres mots.
Chaque guide d'entretien étant spécifique à la question de recherche posée, il est impossible de donner ici
un "modèle" de guide d'entretien. Nous pouvons simplement en donner le schéma général à titre
purement indicatif :
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Schéma indicatif d'un guide d'entretien
NB : le nombre de thèmes, de sous-thèmes est de relances est variable, à adapter à chaque guide
d'entretien.
Nous soulignerons en outre quelques points transversaux valables pour la rédaction de tout guide
d'entretien.
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dimension concrète de la pratique (la fréquence, le choix des ouvrages, les lieux d'approvisionnement, etc.)
et sur sa dimension plus subjective (ce qu'apporte la lecture aux enquêtés, pourquoi est-ce important pour
eux, etc.).
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négatives et coupables qu'aurait entraînées la question "Pourquoi fumez-vous du shit ?", qui
aurait pu laisser supposer que je les accusais de quelque chose.
Pourquoi "Comment ?" fonctionne-t-il beaucoup mieux que "Pourquoi ?" en interview ? Même
les personnes coopératives, les personnes qui n'étaient pas sur la défensive, fournissaient des
réponses brèves à la question "Pourquoi ?". Ils comprenaient cette question comme la
recherche d'une cause ou peut-être de plusieurs, mais en tout cas de quelque chose qui
puisse se résumer en peu de mots. Et il ne s'agissait en outre pas de n'importe quelle cause,
mais de la cause présente dans les intentions de la victime. Si vous avez fait ça, c'est qu'il y a
une raison. Alors dites-moi quelle est cette raison. De plus, "Pourquoi ?" leur semblait
appeler une "bonne" réponse, une réponse sensée et défendable. Une réponse qui ne
souffre d'aucune faille ou incohérence logique. (…) Mes "Comment ?" donnaient plus de
marge aux personnes interrogées ; ils étaient moins contraignants, plus ouverts ; ils
leur permettaient de répondre exactement comme elles voulaient, et de raconter une
histoire incluant tout ce qu'elles estimaient qu'elle dû t inclure pour être compréhensible. Ils
n'appelaient aucune "bonne" réponse, n'avaient pas l'air de chercher à trouver le
coupable de telle ou telle mauvaise action ou de tel ou tel résultat regrettable. (…) Mes
"Comment ?" ne "téléphonaient" pas le type de réponse attendu (dans le cas du "Pourquoi ?",
une raison justifiée par une intention). En conséquence de quoi ils invitaient les gens à
inclure dans leur réponse ce qu'ils estimaient être important pour l'histoire » (Becker,
2002, p. 105-106).
Clore l'entretien
Il est souvent très utile et productif de demander à l'enquêté, avant de clore l'entretien, s'il a quelque
chose à ajouter, s'il pense que l'essentiel a été abordé ou s'il souhaite compléter ses propos. On constate
que fréquemment, l'enquêté ajoute encore quelque chose à tout ce qu'il vient de dire, et que ce "quelque
chose" est particulièrement riche et intéressant dans la mesure où il s'agit d'un propos, d'une idée qui lui
tient vraiment à cœur, qu'il considère comme essentiel. Autant se donner les moyens de ne pas oublier
cette ultime étape en faisant figurer cette dernière question dans le guide d'entretien.
Il peut aussi être judicieux de demander à la personne si elle accepterait d'être recontactée ultérieurement
(par téléphone) pour quelques questions et informations complémentaires. Il n'est pas rare en effet qu'au
moment de la transcription ou de l'analyse, le chercheur se rende compte qu'il a oublié de poser une
question à l'enquêté, ou qu'il a besoin d'explications supplémentaires sur une partie des propos recueillis. Il
arrive même que l'on convienne d'un autre rendez-vous, pour une deuxième séance d'entretien. Si
l'enquêté est prévenu en amont de cette éventualité et qu'il a déjà donné son accord, cette phase de
complément sera plus facile à mettre en œuvre.
Enfin, parce que la personne a accepté de vous accorder de son temps et qu’une situation d’entretien est
aussi un échange social, vous pouvez lui demander si elle souhaiterait avoir les principaux résultats
(exploratoires dans le cadre de ce cours) de votre étude. Cette restitution peut se faire de façon
synthétique en résumant sur une à quatre pages maximum vos principaux résultats, ou bien encore par
voie orale.
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Le test du guide d'entretien
Il est conseillé, en particulier aux étudiants en situation d'apprentissage de l'enquête par entretien, de
procéder à un "entraînement" à l'entretien avant de faire leur premier "vrai" entretien de recherche. Il
s'agit alors de mener un entretien "test" (sur le même principe que celui qui guide la mise en œuvre des
questionnaires-tests), afin de se mettre en situation, de faire une première expérience du dispositif
d'entretien, et de tester le guide d'entretien (on s'aperçoit souvent que certaines questions sont mal
formulées, peu claires, trop vagues ou au contraire trop fermées…).
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Séance 8 – L'enquête par entretiens 2
Auteure : V. Hélardot
NB : le nombre de thèmes, de sous-thèmes est de relances est variable, à adapter à chaque guide
d'entretien.
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1. Voici un exemple d'introduction (à adapter à chaque situation).
« Bonjour, je suis étudiant à... et dans le cadre de mes études, je réalise une recherche à propos de la vie
dans le quartier. Acceptez-vous que nous ayons un entretien ? Cela m'aiderait dans mon étude, je
m'intéresse à ce que peuvent penser des personnes de ce quartier. L'avis de personnes diverses, choisies au
hasard de mes rencontres, est important pour moi ».
Après acceptation de l'idée d'entretien : « Pouvons-nous nous entretenir chez vous ? Nous aurons besoin
d'un certain temps pour approfondir la discussion, j'ignore la durée réelle de l'entretien mais il faudrait que
nous puissions disposer d'une heure de tranquillité. L'entretien est anonyme et confidentiel 3 et vous pouvez
vous interrompre si vous le désirez. Pour m'aider à me souvenir de notre discussion, l'entretien sera
enregistré, je n'ai pas de questions précises à vous poser, je vous proposerais un thème et nous
approfondirons ensemble le sujet, vous m'expliquerez simplement votre point de vue. Avez-vous des
questions à poser avant de commencer ? Est-ce que tout est clair pour vous ? »
2. Voici des exemples, mais d'autres sont encore possibles :
- A champ large et impersonnelle : « J'aimerais que nous parlions de la vie dans le quartier » (mais le sujet
risque de rester dans les généralités et de ne pas parler de ses relations avec les voisins. L'intérêt sera de
voir si l'enquêté inclut les relations de voisinage dans la vie de quartier).
On pourrait personnaliser en disant « votre vie ».
- Directe et personnalisée : « J'aimerais que nous parlions de vos relations avec vos voisins » (mais cela peut
gêner surtout si les relations ne sont pas bonnes).
- Directe et impersonnelle : « J'aimerais que nous parlions des relations entre voisins dans ce quartier »
(mais l'enquêté s'impliquera-t-il ?)
3
On peut souligner que cette précision mériterait d'être apportée plus précocément, par exemple à la fin du premier
paragraphe.
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Exemple 2 : La recomposition du réseau amical des jeunes adultes après l'entrée
en couple
D'après De Singly & al.¸ Nouveau manuel de sociologie, Armand Colin, 2013, p. 47-48.
- Les relations amoureuses qui ont précédé la relation actuelle
- Les différents amis de l'enquêté
- Les parents de l'enquêté
- Le/a petit/e ami/e
- La rencontre avec le/a petit/e ami/e actuel/le
- Les premières semaines du couple et les réactions des amis
- Les rencontres entre les amis et le/a petit/e ami/e
- La rencontre avec ou les confidences faites aux parents
- Les études ou l'activité professionnelle de l'enquêté et de son/sa partenaire et les discussions sur
ces sujets
- Les moments à deux
- Les confidences en couple ou avec les amis
- Les projets et les discussions en couple ou avec les amis sur ces projets
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Séance 9 – L'enquête par entretien 3
Auteure : V. Hélardot
Principaux points du chapitre 9 du CM SO 202
b/ Les relances
L'enquêteur pose des questions déjà prévues dans le guide, mais il utilise aussi des "relances", c'est-à-dire
des formulations adaptées à ce que l'enquêté a exprimé, et qui l'invitent à apporter des précisions, à
développer ou expliciter ses propos.
Il existe plusieurs formes de relances. Nous en distinguerons 3 principales (d'après Blanchet & Gotman,
1992), en prenant pour point de départ la phrase suivante prononcée par une enquêtée : "Les mères
porteuses sont courageuses… mais je pense qu'elles sont inconscientes". L'enquêteur peut rebondir sur une
telle phrase :
par une réitération, c'est-à-dire en répétant le point de vue énoncé par l'enquêté : "elles sont
courageuses ?", ou : "elles sont inconscientes ?", ou encore : "vous pensez qu'elles sont
courageuses/inconscientes ?"
par une déclaration, consistant à soumettre à l'enquêté une proposition en lien avec ce qu'il vient
de dire : "elles se créent des problèmes…", ou : "et aussi dévouées…"
par une interrogation : "dans quel cas ?", ou : "c'est ce que vous pensez ?", ou encore :
"courageuses/inconscientes, dans quel sens selon vous ?"
Les relances sont donc autant de façons d'encourager l'enquêté à poursuivre et développer ses propos.
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Ajoutons que les relances peuvent être décalées dans le temps par rapport au passage de l'entretien
auquel elles se réfèrent : il est tout à fait possible de revenir un peu plus tard sur un propos que l'enquêté a
tenu auparavant dans l'entretien, et sur lequel l'enquêteur n'a pas relancé immédiatement soit pour ne pas
interrompre l'enquêté, soit parce qu'il n'y a pas pensé sur le moment. Dans notre exemple, la relance
pourrait prendre la forme suivante : "Vous m'avez dit tout à l'heure que vous trouvez les mères porteuses
courageuses/inconscientes. Vous pouvez m'expliquer ce que vous voulez dire ?".
Enfin, signalons que la meilleure relance, en tout cas celle qu'il faut employer en premier lieu, est sans
doute le silence : en effet, la capacité de l'enquêteur à gérer des silences en situation d'entretien constitue
un atout indispensable. Le sociologue débutant sera souvent dérouté par les silences, et se réfugiera
rapidement dans une relance ou dans son guide d'entretien... Pourtant, les silences sont nécessaires et il ne
faut pas en avoir peur (Kaufmann, 1996). Encore faut-il arriver à distinguer les silences "pleins", qui sont
des moments de réflexion pour l'enquêté, et qui doivent être respectés pour ne pas perturber le
déroulement de sa pensée, et les silences "vides" qui sont des moments où l'enquêté a le sentiment de
n'avoir "plus rien à dire". C'est alors à l'enquêteur de relancer la dynamique de l'échange.
c/ Les anecdotes
Parmi la diversité des types de discours recueillis en entretien, il en est un qui se révèle souvent
particulièrement riche et productif pour l'analyse, et qu'il ne faut pas hésiter à solliciter activement : ce
sont les anecdotes. Pourquoi l'anecdote est-elle si intéressante ?
« D'une part, c'est un récit plus ou moins court d'une situation sociale vécue qui permet de
placer immédiatement l'entretien du côté des pratiques sociales en vigueur dans le
milieu enquêté, en faisant revivre une scène sociale où se donne à voir, souvent en détail, un
certain nombre de ces pratiques (…). D'autre part, par son apparente banalité et son
caractère sans importance ("vous savez, ce n'est qu'une anecdote"), l'anecdote autorise
l'enquêté à évoquer des phénomènes au contenu profondément sociologique, sans
crainte d'enfreindre la bienséance sociale, et donc à dire en toute simplicité, voire en toute
ingénuité, des choses que la censure sociale ordinaire interdit. À ce titre l'anecdote est un
formidable révélateur et analyseur de situations sociales et l'art de l'enquêteur est de
savoir les susciter abondamment, au bon moment et dans le droit fil du discours de
l'interviewé.
L'anecdote possède une autre vertu non négligeable du point de vue de la conduite de
l'entretien. Elle permet à l'enquêteur de comprendre rapidement les tenants et
aboutissants d'une situation sociale, de le lancer sur des pistes en cours d'entretien. Le
récit ainsi obtenu incite fréquemment l'enquêteur à faire préciser des éléments de la scène
racontée (les acteurs, le lieu, l'ambiance, les paroles prononcées, les attitudes des
participants, etc.) ; elle est source de nouvelles questions-hypothèses et permet une
meilleure relance » (Beaud, 1996, p. 242-243).
En leur demandant de raconter des anecdotes, le sociologue se donne un moyen de lutter contre "la
tendance des enquêtés à vouloir prendre de la hauteur, à livrer un 'témoignage' à portée générale,
d'un 'bon niveau', en s'ajustant ainsi à ce qu'ils perçoivent être les attentes de l'enquêteur" (Beaud,
1996, p. 242).
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d/ Construire la relation enquêteur-enquêté
Établir la confiance
Une condition essentielle à la réussite d'un entretien est que l'enquêté se sente en confiance, qu'il soit
convaincu de l'intérêt bienveillant de l'enquêteur à son égard. Il "doit sentir que ce qu'il dit est parole d'or
pour l'enquêteur, que celui-ci le suit avec sincérité" (Kaufmann, 1996, p. 48). L'enquêteur devient alors
pour l'enquêté à la fois "un étranger, un anonyme, à qui on peut tout dire puisqu'on ne le reverra plus",
et "aussi proche qu'un familier, quelqu'un que l'on connaît ou croit connaître intimement, à qui on
peut tout dire puisqu'il est devenu un intime" (Kaufmann, 1996, p. 53).
Un entretien évolue au cours de son déroulement, passant par différentes phases. Au départ, il n'est pas
rare que l'enquêté, encore sur sa réserve, se contente de réponses "de surface", ou se cantonne au "rô le
de bon élève", "s'appliquant pour bien répondre à chacune des questions" (Kaufmann, 1996, p. 62) à
travers un langage répondant à des normes scolaires. Mais au fur et à mesure que l'entretien avance, il
prend confiance et ne craint plus d'être évalué, jugé sur ses propos.
4
Il semble que Bourdieu ne pensait cette violence symbolique que dans un sens : de la part des enquêteurs à l'égard
des enquêtés. Cette violence est pour lui inscrite dans le dispositif d'entretien lui-même, nécessairement dissymétrique
(l'entretien est conçu, voulu et dirigé par et pour l'enquêteur), et cette dissymétrie peut être redoublée "toutes les fois que
l'enquêteur occupe une position supérieure à l'enquêté dans la hiérarchie des différentes espèces de capital, du capital
culturel notamment" (1993, p. 905). Il ne dit rien sur les situations inverses – celles où l'enquêteur est socialement et
culturellement moins doté que l'enquêté, mais nous attirons votre attention sur la fréquence de ces cas, en particulier
lorsque les enquêteurs sont des étudiants de première année en sociologie…
23
l'enquêteur s'engage dans cette relation et ne reste pas en retrait au nom d'une prétendue neutralité (cf.
l'expérience des enquêteurs sociaux du XIX e siècle).
Face à cette conception de l'entretien standardisé, l'entretien compréhensif suppose au contraire
l'engagement personnel de l'enquêteur dans l'échange avec l'enquêté. "C'est l'exact opposé de la
neutralité et de la distance qui convient : la présence, forte bien que discrète, personnalisée"
(Kaufmann, 1996, p. 52). En effet, si l'on souhaite que l'enquêté s'engage et approfondisse son discours, il
faut que l'enquêteur "joue le jeu" aussi de son côté : qu'il "sorte de sa tour d'ivoire, qu'il quitte son rô le
froid de strict poseur de questions, qu'il se manifeste en tant que personne humaine ayant des avis et
des sentiments" (Kaufmann, 1996, p. 53). Sans en faire trop (les propos de l'enquêté doivent toujours
rester au premier plan).
24
- juger à tout moment si les écarts par rapport au guide d'entretien sont bienvenus et pertinents, ou
si l'entretien s'engage dans du "hors sujet"
- ne pas oublier un axe thématique du guide d'entretien
- réfléchir en direct à ce qui lui est dit et décider à tout instant de la bonne question, de la bonne
relance
- être attentif à ce que dit l'enquêté, mais aussi à ce qu'il ne dit pas, à ce qu'il résiste à dire (cf. les
conclusions de l'équipe d'Elton Mayo lors des enquêtes Hawthorne), et trouver comment
contourner ces résistances
- s'impliquer dans l'entretien par des interventions personnalisées qui maintiennent le lien
d'échange avec l'enquêté
- analyser à chaud les propos de l'enquêté pour discerner de nouvelles pistes d'analyse qu'il pourrait
être intéressant de développer
- suivre le fil (parfois confus) des récits livrés par l'enquêté, et se repérer dans les lieux, dates,
personnes que ces récits mettent en scène
- faire attention aux expressions non verbales (mimiques, regards, sourires, gestes…) qui peuvent
être significatives
- ne pas se laisser submerger par les émotions parfois fortes suscitées par les propos de l'enquêté
(qu'il s'agisse, par exemple, d'un sentiment d'hostilité ou de réprobation lorsque les propos de
l'enquêté choquent l'enquêteur et heurtent ses convictions personnelles ; ou bien de sentiments de
compassion, de tristesse ou d'accablement lorsque l'histoire de l'enquêté est particulièrement
douloureuse et marquée par des formes de souffrance)
- surveiller l'heure pour être sûr de pouvoir aborder tous les sujets prévus dans le temps imparti
- etc.
25
2.2. Vers l'analyse des entretiens5
j'ai inversé les points a et b pour commencer avec la transcription (plus raccord avec le timing du TD)
a/ Principes de transcription
Cette étape est cruciale et doit être réalisée avec le plus grand soin, car la transcription va constituer les
données elles-mêmes : en effet c'est à partir du document écrit que, le plus souvent, l'analyse est menée.
26
exemple "je vais…", "quelque chose", ou "je ne sais pas" (ou à la rigueur : "je sais pas"), là où le locuteur
aura prononcé "j'vais", "kekchose" ou "chépas". Le langage purement phonétique/SMS est illisible une fois
sorti de son contexte oral…
De même, il n'est pas nécessaire de transcrire systématiquement tous les "heu…", les "quoi", les "donc" et
autres tics de langage des enquêtés. Ils ne doivent apparaître dans la transcription que s'ils sont significatifs
sur le fond.
27
- et le cas échéant, des éléments liés aux conditions extérieures (interruptions, lieu bruyant,
présence de tierces personnes…)
Pseudonyme et anonymat
Il a été assuré aux enquêtés que l'utilisation de leurs propos serait menée de façon complètement
anonyme : il faut bien évidemment respecter cette promesse. Ceci implique de trouver des pseudonymes
aux enquêtés, mais également de gommer tous les éléments susceptibles de permettre l'identification de
la personne (par exemple, parler de "Madame X, directrice de l'association Act Up Toulouse" est une fausse
anonymisation : certes le nom réel est effacé, mais par la fonction de la personne il est très facile de
retrouver son identité réelle... Dans ce cas il faut également anonymiser l'association, en indiquant par
exemple "directrice d'une association de lutte contre le sida dans une grande ville française").
Le choix des pseudonymes à attribuer aux enquêtés est moins facile qu'il n'y paraît, surtout si l'on tente de
trouver un pseudonyme "signifiant" (donc pas de chiffres ou de simples lettres, ni de pseudonymes choisis
au hasard parmi des noms de rue, de fleurs ou de grands écrivains…). Un pseudonyme "signifiant" permet
de conserver une partie des informations importantes dont le nom de l'enquêté est porteur. Ou,
préférentiellement, son prénom, qui est notamment un indicateur du genre de la personne, mais qui
connote également bien d'autres choses (l'âge par exemple : on comprendra qu'il serait maladroit et peu
pertinent d'attribuer à une enquêtée de 80 ans prénommée Antoinette ou Léonie un pseudonyme tel que
Jessica ou Anaïs, qui connotent une tout autre génération). Pour aider au choix des pseudonymes à donner
aux enquêtés, nous vous renvoyons aux travaux de Baptiste Coulmont sur les prénoms comme marqueurs
d'appartenance sociale (Coulmont, 2014, et http://coulmont.com/index.php?s=pseudonymes).
Une autre stratégie consiste à laisser les enquêtés choisir eux-mêmes leur pseudonyme, ce qui donne accès
à un autre type d'information et de signification.
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osé reprendre la main au cours de l'entretien ? Un entretien mal (ou pas) dirigé est tout aussi "raté" qu'un
entretien trop directif… Il faut être capable de repérer ses erreurs pour s'améliorer par la suite.
L'auto-analyse (ou analyse croisée au sein des groupes) de la conduite de l'entretien apporte de multiples
bénéfices :
elle permet d'apprendre de ses erreurs et de s'améliorer pour la suite de l'enquête (adapter le
guide, reformuler les questions, ajuster son comportement en entretien, etc.)
éventuellement, elle est l'occasion de faire la liste des points sur lesquels revenir avec l'enquêté si
un entretien complémentaire est possible
elle révèle des paramètres importants de l'entretien qui ont pu orienter son contenu et dont il
faudra tenir compte lors de l'analyse proprement dite
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enfin, elle amène le chercheur à s'imprégner de l'entretien, à "circuler" dans la transcription, et à se
familiariser avec le travail d'analyse de contenu.
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