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Kolik

de Rainald GOETZ
Traduction Ina SEGHEZZI

Mise en scène Alain FRANÇON


Avec Antoine MATHIEU

« La cohérence plutôt que le sens c'est ce qui me reste après la lecture.


La cohérence comme ce qui fait tenir ensemble tout le réel.
L’écriture de Goetz ressort de la cohérence. »
A. Françon

VERSION 1 JANVIER 2021


Personnage
Homme

« Rigor. Kontradiktio, Sthenie »

Chambre

Cri strident. Eclair d'éclair de lumière. Chaise de bureau. Corps masculin en état de
decomposition. Odeur de mort. Obscurité. Prestissimo volando. 17 secondes. Chant.

2
KOLIK

« Le temps il court »

HOMME :

Cerveau
Crasse
Là silence
Chose Merde
Cerveau Chien Crasse

(Il boit)

Va-t'en
Cerveau Crasseux
Sale Chien
Temps de Merde
Humain
Homme
Vite vite
Plus vite plus vite
Du calme là
Là allez fonce dehors
Ici hors de là ici
Temps de Trou du Cul
Ferme ça là
Crasse Trou
Ta gueule la ferme
Silence
Là toi

(il boit)

3
2

HOMME

Renversement
Renversement renversement
Toujours et encore toujours
Encore renversement renversement
Rupture
Tout est rupture
Inter-
rompre
Tout tout
Rupture rupture rompu
p.227
Recommencer au début se tromper
Erreur tout est erreur
Renverser renversement
Toujours et encore toujours
Encore renversement gémir renversement
Et ne rien savoir ne servir à rien
Ne pas savoir comment on se trompe en tout
Vouloir recommencer rupture

Il boit

Devoir continuer
Toujours continuer toujours
Continuer à devoir continuer
Toujours et encore répéter
Continuer continuer
Devoir continuer et
Etc. etc.
Et des voix consentent
Ne consentent pas

Continuer
Toujours et encore
Devoir continuer devoir
Tout renverser tout rompre
Fondamentalement à nouveau depuis le fond
Renversement rupture
Malediction malediction
Etre là
Avoir des doutes
Croire aux erreurs
Approfondir les fondements
Recommencer

il boit

Tout est faux


A été faux
A été faux manifestement
De faux fondements de faux principes sans fin
Insondables sans début indubitables incroyables

4
Des choses vieilles et fausses
Tout ce qui est vieux et faux est vieux et faux
Renversement rupture recommencement toujours et encore par principe
Dès le début
Renversement
Renversement renversement
Toujours et encore toujours
Encore renversement renversement
p.232

5
3

HOMME

Force/ force du corps/ force des sens


Force/ force des sens/ Force universelle / Force du Je / Je
Acte du Je
Autoconstruction fondée sur la force du corps
Tout début est un acte de la force du corps/ Je
Toujours et encore la force par la force du corps
La force d'autoconstruction basée sur la force du corps toujours et encore

il boit

Construction du Je/ création du Je/ épuisement du Je


Force du Je par la force de la force répulsive
Construction création épuisement par la force de la force
Etre là matériellement par la force de la force
Le Je est être là comme matière dans l'espace vide
A force de force

Le Je est impénétrable par la force de la force répulsive


Par la force du corps la force répulsive devient résistance comme force du Je
Par la force de sa résistance le Je devient Je
Absolument impénétrable

Le je est je
Par la force de la force

Il boit

Substance du sujet
Matière du Je / les sens corporels / le sens
Acte de création du monde par la force de l'action de la force des sens corporels
Séparation
La séparation est un acte de création du monde
Par la force de la division des sens corporels
Acte de création de la lumière par la force de la vision
Acte de création du bruit audition
La force de l'odorat crée la puanteur
Et la peau la démangeaison
Les papilles de la langue l'amertume
Etc. etc.
Etc. et ainsi de suite de suite
Les sens corporels créent le monde
Création du monde sans discontinuer
Par la force de l'action forcée de la force du corps
Tout est vision et bruit
Puanteur démangeaison amertume

Il boit

La loi du Je est la loi de la force


Par la force de la division
L'impénétrabilité engendre le contact
Construction du Je / création du Je / épuisement du Je
L'Action du Je

6
Crée la frontière la frontière crée le contact
Force créatrice de frontières
Le Je est unique et seul

La frontière est commune au Je et à autre chose


L'acte de création de la frontière est un acte d'épuisement du Je qui s'épuise
L'épuisement de frontière est un épuisement fondamental
Acte du Je Acte de création de la frontière Epuisement

Force
Epuisement
Epuisement de la force
Force par la force de l'épuisement
Etc. etc.
Etc. et ainsi de suite de suite
Action de la force de construction du Je sans discontinuer/ Je
Action du Je Je
Action de la force
Force

7
4

HOMME

Rigueur
Question stricte
Lui question stricte
Moi mais pourquoi pourquoi
Lui question stricte Moi mais pourquoi
Moi pourquoi question stricte Lui
Et cela se poursuit
Lui ha ha une rime
Moi une quoi
Lui une rime Moi pourquoi
Lui quoi pourquoi pourquoi
Moi quoi quoi pourquoi
Lui rien pourquoi rien
Moi pourquoi rien pourquoi
Lui encore une fois du début
Moi pourquoi encore une fois depuis le début
Lui alors alors
Moi alors quoi
Lui alors question stricte dureté haine
Moi pourquoi haine pourquoi haine
Lui rigueur ordre discipline
Moi mais pourquoi
Lui encore rien pourquoi quoi pourquoi
Moi encore mais si pourquoi mais si pourquoi
Lui c'est bon
Moi quoi c'est bon

Il boit

Moi encore pourquoi


Lui encore rien pourquoi
Je demande Je n'en peux plus
Lui répond c'est impossible
Je demande qu'est-ce qui est impossible
Lui répond rien n'est impossible
Moi à nouveau je n'en peux plus
Lui à nouveau c'est impossible
Moi je n'en peux plus
Lui rigueur ordre discipline
Moi je n'en peux plus encore une fois
Lui encore une fois encore une fois du début
Moi je n'en peux plus
Moi aîe aîe
Lui silence
Moi s'il te plaît
Lui tais-toi

Il boit

Je demande pourquoi haine


Lui répond tais-toi
Je demande à nouveau pourquoi

8
Lui ne répond rien
Je demande
Lui rien
Je demande
Pas de réponse
Moi aïe aïe aïe
Silence il dit
Moi s'il te plaît
Lui dit tais-toi
Je ne demande plus pourquoi
Je dis c'est bon

Il boit

Lui
Répond
Rien
Je répète dureté
Lui ne répond rien
Je répète discipline
Il ne répond rien
Je répète haine
Pas de réponse
Moi haine haine
Rien
Aïe aïe
Rien rien Moi douleur

Il boit

Lui c'est un test


Je demande pourquoi
Lui dit test strict d'endurance
Je demande pourquoi douleur
Lui répond rien n'est douloureux
Je réponds la douleur est douloureuse
Lui encore une fois on reprend tout du début p.240
Moi non s'il te plaît
Moi encore une fois non
Je n'en peux plus
Lui dit test d'endurance le plus strict haine
Je répète ordre discipline
Je ne dis pas je n'en peux plus
Je ne demande pas mais pourquoi
Je ne dis plus douleur
Je répète rigueur dureté haine
Il répond c'est bon
Je demande quoi c'est bon
Lui le matériau
Lui répond test de mise en ordre du matériau mot
Moi ah d’accord

Il boit

Je dis haine
Haine haine

9
Il boit

Je
Mot
Crasse
Je dis
Mot est crasse
Je dis mot
Je dis
Je dis crasse boue morve
Rien Je dis Je dis mot crasse boue
Morve boue crasse Je dis Je dis mot crasse

Silence
Ici
Quoi
Pourquoi
Du début
Réponse Douleur
Mot de réponse discipline
Ne demande pas pourquoi
Ne demande pas
Pourquoi
Question rigueur dureté haine
Rigueur la plus stricte
Rigueur

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5

HOMME

Musique
Musique ah mon Dieu
La musique est ma vie
Soudain j’étais réveillé
Je me levais et je regardais autour de moi
Partout de la musique partout il y avait de la musique
C'était tôt le matin j’étais réveillé
Et tout l'espace était rempli de sons
Et les sons résonnaient et il y en avait certains
En mouvement mus par la musique
Quelqu'un a toujours dirigé il y avait toujours des parties du corps
En mouvement toujours
Et toujours j'étais enfin réveillé

Il boit

J'ai levé les yeux et mes yeux sont entrés dans la musique
D'un coup la loi était en moi
Soudain tout était tangible
Enfin j'avais toute ma raison
Je voyais les parties du corps mettre la musique en mouvement
Je voyais les corps mus par la musique
Alors j'ai vu l'équation p.243
C'était tôt le matin j’étais juste réveillé
La loi fut c'est la fin
La musique s'était tue et les corps étaient calmes
Il y avait le silence le calme la glace soudaine
L’angoisse en moi et rien
Et plus jamais une seule question
Moi rien qu’une équation
C'est la fin
Les corps à l'instant en mouvement s'étaient tus
Muette la musique
Mort le bruit des sons
Et j'étais heureux car je m'appartenais
Il n'y avait personne d'autre que moi

Il boit

Moi avec toute ma raison

Moi le mathématicien
Contemplation et équation équation et loi
Tôt le matin j’étais réveillé et je regardais autour de moi
Et j'ai reconnu le silence la rigidité
Personne ne vient en aide rien ne vient en aide de rien
L’angoisse ma chance on m'a laissé seul
Très tôt dès le début tout était fini
L'équation se révélait dans la contradiction
Et je me suis dit parle-moi d'autrefois
Je n’attendais plus rien de l'extérieur
Je n’interrogeais que moi-même

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Je me suis souvenu de moi-même
On n'a traversé que de la crasse
Sans secours depuis le début on n'est qu'un cri
Le cri je veux y retourner
Et personne n’entend on demande tout rien ne répond
Il n'y a que moi l'équation moi le mathématicien p.244
Avec toute ma raison moi seul dans le silence rien
Rien d'autre que l’angoisse le bonheur je suis
Seul je me souviens de moi
C'était tôt le matin soudain j'étais là
En vie avec toute ma raison
C'est la fin

Il boit

Musique ah mon Dieu p.245


Ainsi est la musique elle passe

Je
Revenais
Au début
A nouveau j'étais la crasse
Comme au tout début
Mais j’étais réveillé
Et j'ai regardé autour de moi
Autour de moi il y avait le silence
Et soudain du bruit autour de moi
La musique autour de moi n'était plus muette
Les sons résonnaient et il y en avait beaucoup
Tout l'espace autour de moi en était rempli
Les parties du corps étaient en mouvement
Soudain autour de moi la musique p.246
Les corps à nouveau ont dirigé les sons
Enfin j’étais réveillé
Tôt le matin tout était rempli de musique
Partout des corps le bruit des sons
J’étais réveillé enfin je me levais
Je regardais autour de moi
J'ai vu la loi
La raison
Moi
J'étais là
Je me suis levé
De moi-même réveillé je me suis vu
Autour de moi et j'ai vu la loi
La musique était partout
Partout de la musique
La musique a fait danser les corps la vie partout
La musique est ma vie
Ah mon Dieu musique
Musique

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6

HOMME

Lumière
Lumière venue d'en haut
Lumière lumière venue d'en haut / Lumière
D'en haut de face de dos
Soudain il y avait de la lumière partout
J'ai sursauté lumière
J'ai sauté en arrière lumière
Je me suis tourné lumière
Je me suis retourné lumière
La lumière m'a fait tourner
Partout de la lumière / soudain de la lumière
Hors de là maintenant tout de suite hors de là
Tout semblait infiniment visible
Chaque objet était absolument
Eclairé méticulosité volonté
D'attirer le regard p.247
Immédiatement
Et de le garder longtemps captif sans mesure précis par principe

Il boit

Spéculation
Des choses à la lumière
Tant de choses lumineuses me sont apparues
Aveuglé par la pureté immédiatement reconnaissable
De l'énergie nucléaire de la dernière poussière de crasse
La tension claire évidente et seule raisonnable
De toute la force mentale dont dispose l'intellect
Le fondement de tout

Il boit

Entrer alors dans le monde


Vraiment et systématiquement en toute autonomie
Au moment juste et le plus tôt possible
Pour entreprendre soi-même l'étude
Des choses du monde embrasées de l'intérieur
En toute pratique et en toute logique
Avec l’enthousiasme et l'abstraction la plus parfaite
Au lieu de reprendre les énoncés
Et bavardages sur tout ce qui a été prétendument déjà pensé
Avec la fureur et la haine du début
Je me suis mis
Au travail
A l'heure
Fondamentalement assuré de triompher j'ai foncé au centre
De la conjonction des faits qui concourent à la lumière
Pour examiner leur différence de manière définitive
Et élaborer le constat des règles qui régissent l'univers
L'étude totale était à l'ordre du jour
p.248

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Il boit

Tables
Tableaux
Barèmes
Listes calculs
Répétitions
Infiniment répétées
De signes précisément les plus simples de préférence afin de m'entraîner
A l'acte d'écrire écriture
Hiéroglyphes lignes droites angles et courbes
Et toujours et encore des cercles et des cercles

Académies
Pour la formation
De processus discursifs
La fréquentation de sujets assoiffés de savoir
Avec des sujets assoiffés de savoir est utile à la dispute
Qui rompt avec l'ignorance et amène à la méthode
D’un langage
A caractère universel c'est à dire
Un code

Il boit

Tous
Les objets
De la pensée
Et de la recherche humaine sont p.250
Descriptibles en détail et méritent absolument
D'être racontés sous forme de récits
Qui rapportent des faits ou sous forme de descriptions d'images
Utiles à la description d’une image
D’épopées
Qui racontent le vécu de manière effectivement vivante
De résumés qui résument
De traductions qui traduisent des phrases
Nous pensons et les listes listent
Des choses
Soif démesurée de l'esprit

Célébration
Dans des cases
Idéalement ordonnées
En proportions qui correspondent exactement
A la capacité de concentration du cerveau humain
Temps vérifié mesuré à trois quarts d'heure
C'est l'apprentissage des choses connues
Mais aussi l'apprentissage de l'ambition extrême
De la force de cognition humaine pour
Découvrir certaines relations qui lient
Des personnages ou même
Des nombres purs
Phrases idéales
De nature arithmétique algébrique et géométrique

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Par exemple trois par cinq font la moitié de trente
Ou neuf est le milieu et centre de dix-sept
Ou le carré de l'hypoténuse est égal
Au carré des deux autres côtés
Vérité absolument abstraite
De la plus belle certitude
D'une évidence qui vaut de l'or

Il boit

Divin
Lumière divine

Malheureusement
Même la meilleure
Mécanique peut arrêter
De fonctionner
Se casse
Par exemple
Des trous se forment
Sur des corps en chair
De manière inattendue
Quelque chose fuit
Tout d’un coup
D’une certaine manière
Quelque part
Comme ça
Ça coule
Se vide
Ainsi

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7

HOMME

La science
Produit l’activité
La science pousse à l’action
La science pousse scientifiquement à l’acte
Ça commence
Laissé au repos
Comme une méditation scientifique
Et mène dans une suite logique dans l’espace chaud et humide
De l’exercice scientifique poussé par la pulsation

Il boit

La libération
De micro-organismes abstraits
Une menace qui menace est pensable au départ
Et soudain survient
La révolution

L’historiographie
Est en tant qu’historiographie de l’esprit
Logiquement forcément historiographie de révolution
Logiquement automatiquement scientifiquement
Pulsation
Poussée dans l’absolu
En conséquence logiquement le danger menace
Même dans le plus infime / L’esprit
Peut se tromper absolument
Des suites fatales
Peuvent en résulter souvent
Mais les derniers objets d’importance
Sont souvent plus importants surtout pour l’homme jeune
D’une importance centrale
À force de jeunesse

Il boit

L’insolence
Est logique
Non pas de la vertu mais de la biologie
L’éducation sexuelle
S’auto éduque
Surtout ce qui est sombre bas pulsation
En tant qu’auto éducation au-delà de son propre objet
L’amour
Est là aussi
La pulsation médicale
De toucher des corps humains et de
Disséquer et de regarder dedans
Et de couper en morceaux et de jeter
Ce qui est à l’intérieur
Et comment

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Et pourquoi
Tout cela existe

Excitation
Qui naît quelque part
Surtout en regardant
Certaines choses inconnues
Un tremblement de l’oscillation de l’onde de lumière
Lors du croisement de l’instant avec l’instant
Conflits
Ce qui se passe
Conflits
Eclosion
De choses sous forme de discours forts et furieux
Des cris aussi
Et homicide
Scientifiquement raisonnable et nécessaire
Correctement exécuté par les hommes
Sur d’autres hommes

Il boit

Des démonstrations
De souffrance et de pitié
Ont été démenties scientifiquement
Comme étant de l’arrogance il a été prouvé qu’il faut penser originellement à la stupidité
Lors de l’apparition d’une bonté librement flottante
La haine
Pulse
Raisonnablement
La haine raisonnable
La haine est la seule pulsation raisonnable et abstraite

L’exécution
De connaissances
Peut exiger l’exécution d’êtres vivants
Même des corps humains doivent
Parfois être transformés en gros sacs morts
La compassion est obscure
Et une pleurnicherie
De la créature
Et une tentation obscure justement envers le plus clair
La compassion chagrine beaucoup l’esprit scientifique pur

Il boit

Qu’est ce qui
Perturbe
La perturbation
Est un principe
Dans l’espace ouvert
La présence de corps
Qui se meuvent souvent avec vitesse
Et ramassent et stockent de l’énergie de destruction
Et la déchargent par conséquent sur d’autres corps

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Qui incarnent par principe puissamment le pouvoir
Leur destruction en est la conséquence

La dictature
Des dirigeants
En est la conséquence la plus difficile
La résistance
Par excellence
L’épine
Logique la plus inplacable
Centre de la perspective de la raison
Effort le plus extrême
Problème central de l’historiographie de la révolution
Rigueur la plus stricte
Sans cesse
Contradiction
Opposition
Absolue
Voir plus loin

Il boit

La pure
Logique ici aussi des chiffres
D’après laquelle seulement à la neuvième décennie de chaque siècle
Chaque siècle s’accouche entièrement
Rien que pour se décomposer à grande vitesse dans une paralysie rapide et progressive
Pendant la 10e décennie
Se suicider
Loi
Sans pitié pour les progrès de la vie progressante
Un principe qui ne peut agir contre lui-même Page 256
La vie
Fait pousser de la vie
D’une vitalité convulsive jusqu’à la mort
L’acte du suicide est fondamentalement minable stupide et mensonger
C’est l’acte d’un siècle faible infirme
Pitoyablement débile
Répugnant moisi
Bandant pour les états humains les plus bas
Les plus hostiles à l’esprit
Ceux des discours confortables de l’hystérie

Il boit

Le massacre
Résulte de
Ces gestes las et doux
De l’abandon de soi
Le suicide est dans la logique historique par conséquent un massacre
Le massacre
Est scientifiquement prouvé
Au moyen de montagne de corps
Exécution
De l’aujourd’hui

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Maintenant

La clinique
Est le lieu et le principe
Des études du changement

Qu’est ce qui guérit


Qu’est ce qui périme

Établissement d’un constat


Toujours et encore la science
La reine de toutes les sciences
Est l’observation clinique pure
Science d’ inspection clinique
Science des aspects
Science de science
Science

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8

HOMME

Le doute
C’est douter
Le doute est le doute
Douter
Douter c’est poser des signes
D’égalité de doute
Douter c’est la pose de signes d’égalité
Poser des signes d’égalité c’est calculer
Calculer c’est douter
Le doute c’est un calcul
Calculer c’est penser
Penser c’est douter
Douter c’est penser

I
Wish
You
All
Came
Home
Hurray
Dear

Il boit

La pensée est déchirée en deux coupée de


La vie vécue
C’est la contradiction
Ce qui est douloureux dans la vie
Tempête dans la pensée
Virus
Purulent

Le paradoxe
A raison
Dans la vie car
La vie mène la guerre contre la vie
En tant que mort et vit pourtant encore de manière vivante dans la mort
Voir décomposition de cadavres
Voir bonheur
La vie vit en tant que mort de masse à cause du massacre
Le massacre est le résultat de la raison qui progresse
La vie ne vit pas est soudain une phrase de pensée
Non pas une phrase de vie une phrase de pensée
Pas stupide non réelle
Correcte abstraite
Désespérée

Mais mes chers les années se sont écoulées dans le pays


Le temps a passé
Le deuil était présent dans la vie malgré la vie

20
Le Non dans le Oui

Il boit
Page 260
La vérité
Est très périssable
Se périme dans le temps
Est alors cassée
Cassée la vérité est un mensonge
Le mensonge est jeté dans la vie
Il vit là utilisable sous forme de mensonge de vie indispensable
Et le temps a érigé à nouveau raisonnablement les vieilles frontières
La vie était à nouveau la vie le bonheur le bonheur coupé de
La pensée

Il boit

La mort
Pense la pensée
La pensée ne pense rien
La pensée ne pense rien que la mort
Mort
Mort
Mort
Mort

La pensée doit penser la pensée ne pense rien que la mort


Mais celui qui pense est en vie
Ici est la faille
La rupture
Centrale

Il boit

Mais qu’est-ce
Qu’être

Constamment on trébuche et on tombe


Trébuche et tombe
On ne peut que se relever soi-même
Et essayer à nouveau de continuer à marcher
Et on trébuche et on tombe toujours à nouveau

On se relève
Doutant des doutes
Douter c’est
Le doute

21
9

HOMME

Travail
Travail monde
Travailler le monde
Travailler le travail
Former des formules
Travail de travailler le monde de former des formules du monde
Murmurer
Des murmures

Il boit

Tout bas
Tout bas
Vite
Vite
Plus bas plus bas
Plus vite plus vite
Page 263
Il boit

Délirium
Délirium
Délirium délirium
Délirium délirium délirium délirium

Il boit

Je
N’entends
Rien
Stop
Allô allô
Stop stop stop stop
Il y a tellement de bruit ici
Avec tout ce bruit
Je n’entends rien
Il se passe quelque chose
Allô allô
Stop stop
Rien
Quoi

Il boit

Il y a quelque chose

Quoi
C’est quoi
C’est quoi c’est quoi
C’est quoi c’est quoi c’est là
Quoi quoi

22
Quoi

Il boit

Murmure murmure
Murmure de quoi murmure du monde
Murmure du silence murmures de fin
Murmure d’arrêter murmure de renversement
Murmure de tout-est-faux murmure de il-faut-continuer
Murmure de continue-continue continuer de murmurer
Page 264
Continuer continuer continuer continuer
Ah la la Oh la la

Il boit

La force en tant que principe abstrait règne sur le monde


Loin de là loin de là
L’abstraction
Est là
Dans le monde
Mais pas la pensée
Dans le monde
Le monde est là en tant que force
Et la pensée pense en pensant
Doit penser / Penser l’abstraction infernalement Page 265
Quand la pensée n’est pas là dans le monde
Il n’y a que
L’enfer à vie

Il boit

Murmure murmure
Plus bas plus bas
Tout bas tout bas
Vite
Vite

Il boit

Soif
Je dessèche
Je n’entends rien
Je ne contredis pas
Je ne suis quand meme pas fou
Je ne suis quand meme pas
Fou
Je ne suis quand même
Pas fou
Je ne
Suis quand meme pas fou
Je
Ne suis quand meme pas fou
Arrête de me torturer écoute arrête écoute arrête écoute arrête

23
Il boit

Rien
Ne répond
En fait
Quoi qu’on
Demande rien ne répond
Se tait
Rien ne répond en fait Page 266
Ce que l’on tait
Mais pourquoi
Pourquoi

Il boit

Haine
Travail
Ordre
Discipline
Je dis aïe aïe
Je demande pourquoi pourquoi
Rien ne répond rigueur dureté haine
Moi je ne comprends pas un mot
Moi je répète
Haine haine haine haine
Aie aie

Il boit

Mais je n’étais pas écrasé


En fait j’étais toujours là
Mais cassé
Mais là
Je n’étais pas pas pas écrasé là
Je n’étais pas pas cassé là
Je n’étais pas pas là
J’étais là J’étais
Je suis

Rien d’autre
Que moi

Il boit

Murmure murmure
Murmure de l’être murmure du Je murmure de maintenant
Vite vite tout bas tout bas
Tout bas tout bas tout bas tout bas
Délirium délirium
Délirium
Délirium
Page 267
Il boit

Musique et corps et mouvement

24
J’étais j’étais Je toujours heureux
Mouvement corps et musique somnolence
Je m’étais réveillé j’étais je suis
Réveillé désespéré silence rien une pensée
Car je pense
Je suis
Je suis
Rien
Si je suis rien
C’est le silence
Le silence c’est la fin
Si c’est la fin c’est le désespoir c’est
Le désespoir c’est moi
Réveillé sans mouvement sans musique sans corps sans j’étais

Il boit
Page 268
La lumière est
Le monde
Des choses
La lumière illumine
Se réfléchissant

C’est le début
De toute
Philosophie
La stupidité
Langage
Lieu de pourriture
De la pensée du monde

Il boit

Pourriture centrale
De la chose
Le nom
Destructeur de choses
Abstrait
Échoue en formant des formules du monde
Échouer échouer
Mais comment s’il vous plaît
Faire un inventaire correct
Sans nom
Pur
Chiffré mathématiquement
Chiffres des faits
Listes du matériel
Énumération des choses
Tableaux du monde
Monde monde monde monde
Mais

Il boit

Quelle science

25
Quelle pulsation
Quelle action
Quel acte
La révolution est un renversement
Comme chacun sait
Souillée
De culpabilité
La raison s’exécute dans l’acte

Il boit

Exécuter l’exécution
Gémissements
De la créature
Exécution
Du devoir historique
Exécuter
L’exécution

Qui juge
Qui règle le droit
Qui agit logiquement
Qui dicte la dictature du temps
La logique de l’action
La règle du droit
Le bilan
Page 270
Il boit

Travailler le monde le temps du temps


Murmurer des murmures de bilan du temps
Murmurer murmurer
Plus bas tout bas
Temps temps
Plus vite-vite vite-vite

Il boit

Mais la faille
Horrible
Existe
Penser
La vie
Absolue
Hachée

Il boit

Sans doute on vit sans penser la vie


Raisonnablement
On trébuche on tombe on se relève constamment
Mais qu’est-ce que
Être

26
Il boit ?
Page 271
Privation
Du monde
Des choses oui
Frémissements tremblements secouements murmures
De la sobriété
Du silence
Rien
Ne répond
Rien

Il boit

Contrôlé en silence
Des systèmes abstraits contrôlent à fond
Créés pour eux-même par eux-mêmes
Magnifiquement autoritaires et généraux
Systématiquement tout le monde
Muets et menaçants
Bavardages caquetages verbiages produisent ce qu’il y a de plus stupide
Chez le faible on nomme communication la non-philosophie
Des philosophes de bavardage mentalement handicapés philosophent
Non pas une philosophie mais une philosophie de bec-de-lièvre
Va

Il boit

Rien d’autre
Le silence règne
Là où la pensée pense
L’idiotie parle la parole
Rien
D’autre
Murmure
Monde du monde monde du monde
Travail travail
Murmure de murmure
Travailler le monde
Travailler le monde
Les murmures se taisent
Muetmuet muet muet
Travail de travail
Travail

27
10
HOMME

Désespoir

Il boit

Aïeaïeaïe aïeaïeaïe aïeaïeaïe


Aïe aïe aïe aïe aïe aïe aïe aïe aïe aïe aïe aïe aïe aïe aïe aïe aïe aïe
Mal mal mal mal mal mal mal mal mal

Désespoir

Il boit

Éléments
Choses liquides
Arrêter
Contractions de douleur
Crasse
Puant
Merde
Être là

Il boit

Aïeaïeaïe aïeaïeaïe aïeaïeaïe


Dehors
Dehors
Dehors
Dehors
Dehors
Dehors
Dehors
Dehors
Dehors
Hors d’ici d’ici
Hors d’ici
Hors d’ici Page 273
Hors d’ici
Hors d’ici
Hors d’ici
Hors d’ici
Hors d’ici
Hors d’ici

Le Je
Fait
Douleur
Aïeaïeaïe
Moi moi moi
Mal mal mal
Douleur
Nuit

28
Moi
Je tombe
M’en fous
Me relève
Tombe à nouveau
Je m’en fous
Me relève moi à nouveau
Je

Il boit

Crasse de chien Humain


Féconder faire merde
Pulsation Chair Enfant
Être

Parterre
Faire
Des choses
Pour rien

Si la merde est là
Ça ne va pas
La crasse là
La cellule continue à pousser
Devient plus de crasse
Ça sort déjà
Mais va où
Hors d’ici c’est la fin
Être crasse maintenant

Il boit

Je
Suis

Dois
Je
Être
Je ne
Veux
Pas

Il boit

Tout est loin


Désaxé de moi
Il y a quelque chose là d’étrange
Implantée en moi issu de discours
Lointains qui m’est loin quelque chose en moi s’est désaxé

Ou alors quelque chose


Est opprimé
Désespoir

29
Il boit

Trop de Je
Je dois opprimer la stupidité en moi
Me démêler faire de
L’ordre refaire le calme
Contre des sentimentalités stupides
Je veux me hacher
Examiner tous les morceaux sous toutes les coutures
Supprimer les sentiments crasseux

Nettoyer
Enlever tout le Je
Frapper jusqu’à ce que tout ce qui est mou devienne dur
Me fouetter fermement
Me torturer totalement et proprement
M’entraîner à l’oppression
Me purger de ma crasse

Mais
Qui est quoi
Dans ce merdier de chair
Qui veut quoi
Qu’est-ce qui est assis là
Est-ce moi qui suis assis là
Qui frappe quoi
Est-ce que je me frappe
Est-ce que je me rends meilleur
Je me le fais rentrer dans le cerveau
Je fais sortir la crasse
Du chien de chair

Il boit

En bas une chose


Pendouillage de crasse
Saucisse ratatinée
Qui bave
Je me tire moi-même vers le haut
J’arrache
La chose sombre
J’étrangle la truie
Le chien

Il boit

Qu’est-ce que ça fait mal


Je suis le
Fouet je me frappe
Crassement propre je me casse au milieu
Une incisive brille
Fourrée toute blanche en haut
Dans le blanc de l’œil
Ça fait proprement mal
Enfin

30
Je suis
Suis
Je
Oppressé
Je suis
Adulte
Je suis adulte je suis enfin-moi
Je
Oppressé désespéré
Désespoir

31
11

HOMME

Croyance
Je crois
J’ai cru je crois
Chaque mot
Depuis que je puisse me souvenir

J’ai cru chaque mot


Je me souviens
Je crois
Chaque mot

Il boit

Est ce cela le bien

La stupidité
Tout croire
Premier éducateur
La croyance

Sans issue
Soumis d’autant plus sans issue
Devoir croire la croyance
Et en plus se consacrer à la lutte
Contre ça

Il boit

Vie de défaite
Devoir vivre
Soumis à la mort dès la naissance
Devoir penser une pensée débilitante
L’abrutissement est un non-sens comme l’intelligence
Piège du matin
L’espoir
La prison du futur
Mensonge de mensonge
L’amour
Escroc d’escroquerie centrale escroquerie de soi
De croire qu’il y ait quelqu’un en dehors de moi
Escroquerie de la croyance
Demain viendra
Le temps des lendemains

Il boit

J’étais
Je me souviens
Réveillé depuis longtemps dans l’Histoire
Et malgré tout évidemment irrémédiablement

32
Fixé vers un idéal

Mot par mot


Je me suis étudié
Et j’ai tout rayé
Sauf moi

J’ai débattu
Des débats en moi contre moi
Je n’ai même pas rien résolu
Je me suis seulement empêtré en moi
Toujours plus embrouillé

Il boit

Dominé
Par des pressentiments obscures
De ce que font les gens avec les gens
Dans le noir avec leur chose
Là en bas
Rien
Je l’ai regardé avec panique
Ayant peur de mes propres yeux
S’ils voyaient
Ce qui se passe

Il boit

Ordre du haut
Je dois toujours seulement regarder en moi-même
Envie de suicide évidemment
Aspiré par l’aspiration de la mort
Maligne et divine cette distance à la vie juvénile
Languir d’espoir

Déraison crasseuse
Introspection
Fascination de suicide
Idiotie d’agonie

Obscurité qui détruit les pulsations


Depuis que je me souvienne je crois je
Crois chaque mot
Mais rien ne se passe
Soumis seulement à soi-même
Mais en crainte devant soi-même

J’ai appris des tas de déraison paradoxale


De crasse de croyance je crois
J’ai cru chaque mot je crois
Croyance

33
12

HOMME

Obscurité
L’obscurité règne
Obscure dans l’obscurité
On est assis là à l’étroit
C’est une chambre
On est là avec quelqu’un
On tâte
Mais il fait sombre
On est à l’étroit
Quelqu’un est là
On ne voit rien
On écoute

Ça parle
Qui
Ça écoute
On tâte une chose
Quelqu’un est là
Rien ne répond

On parle
Il fait sombre
On répond
On entend rien
On écoute
Quelque chose répond

Rien
On est à deux
Le bonheur

On tâte
On tâte une chose
Une chair
On est à l’étroit
On est là avec quelqu’un

Il fait sombre
Est ce cela
La vie
Enfin
Il y a quelqu’un
On écoute

Il boit

On parle
Quelque chose répond
La chambre
L’étroitesse
Tâtonnements

34
Paroles
Ce qui est là
Une chose étrangère
On parle
Le bonheur
Crie
Son bonheur

Quelque chose fait mal


À la longue
L’obscurité est-elle
Trop obscure
La chair
Une chose
Pour quelque chose
Qui est trop étroit
La parole est un bavardage
L’écoute une douleur
On est assis à l’étroit
Ça fait mal

Il boit

On se lève
Ça suffit
On marche
On titube
On tâte
Rien d’autre

On ne trouve pas la sortie


On trouve la sortie
Dehors
L’obscurité est obscure
On parle répond écoute
Personne n’est là, rien à voir, étroitesse

Mettre de l’ordre
On commence par quelque chose
Un travail mais comment comment
À la fin on est
Adulte tout d’un coup
Déjà
Un autre
Est-ce que le temps ou quelque chose
A passé est-ce que quelque chose s’est passé
Quoi

Soudain on a
Vécu quelque chose une vie
Ce que c’est
Ça recommence à nouveau
On est assis là on est assis là à l’étroit
Dehors l’obscurité toujours rien
Ça parle ce que ça parle ce que ça répond

35
On tâte comme un débile
Ce qu’on est devenu tout d’un coup
On a vécu la vie
On est maintenant

Adulte cassé débile


Que faire
Rien on se tâte soi-même
Alors que faire travailler
Ordonner mais comment comment
Sans rien

Il boit

On est seul
Le bonheur
Au moins ça

Il boit

Mais comment quoi travailler


Quoi ordonner comment
Avec sans rien
Du passé
On est enfoncé dans le maintenant
On vit trop la vie
Qui est sombre
Qui est coupée
De soi qui est rien
On titube
On répond on écoute
On ne s’entend pas

Vivre la vie
Ça se venge
A la longue

On est coupé
Le maintenant dans lequel on est enfoncé
Va quelque part
Vers où on titube
On va
Boire quelque chose
En cas de soif
On boit quelque chose
Ça se venge

Au moins
On vit
Seul le bonheur
On est la
Dans l’obscurité on parle
Ça se répète

36
Il boit

On est assis là
Ça fait mal mais Ça va
Là où ça va ça va
C’est étroit une chambre
Personne n’est là
Ce qui se répète l’obscurité
L’obscurité règne obscure obscure
Obscurité

37
13

HOMME

Mot
Mot mot
Inversé inversé
Dans le vacarme vacarme inversé
Mot mot musique mot

Qui se décompose
Qui sauve et ment
Qui dit quelque chose constamment constamment
Quoi quoi

Il boit

Ça torture
La consolation sauve
Quelque chose se décompose
C’est moi
Oh je suis transformé par magie
Tu es entré en silence
Je me suis retourné
Était-ce toi mon
Ami

Ça murmure
Sans cesse quelque chose murmure quelque chose
Dans un coin quelque chose murmure pour soi
Ça reste là
Ça chante aussi
Page 289
Il boit

On s’abandonne à la fuite
Ce qui fuit fuit
Le temps le temps il court
Il murmure
En avant en avant
Moi en arrière
En arrière

Ce qui brouille
La mesure
Le mesurage
Ce qui est
N’est pas ce qui
Fonce à l’intérieur de moi

Du calme
Lui dit : j’ai le temps
Moi (agité) : pas moi
Lui (calme) : c’est bon c’est bon

38
Moi : c’est l’enfer

Pas un mot
Ce qui tombe
Seulement moi moi
Ce qui tombe en moi
Mot par mot

Ce qui s’arrête
Se décompose
Les choses du corps disparaissent
Les voix
Parties sans être entendues

Il boit

Écoulé
Moi : quoi quelle heure est-il
Lui : c’est l’heure
Moi : je viens à peine de me réveiller
N’était-il pas à l’instant très tôt le matin
Quoi comment panique comment pourquoi
Lui : le temps est arrivé
Le temps est parti
Périmé
Moi : mais moi moi

Il boit

Catastrophe
L’homme une catastrophe
J’étais une imbécillité dès le début
Si je suis mot je suis
Le silence règne
Sans être entendu
Le vacarme commence
Je m’effondre
Catastrophe chaque mot
Le salut est un mensonge
Chaque mot un vacarme
Effondrement

Ce qui torture
Est resté
L’imperméabilité de la peau
De sous laquelle
Quelque chose doit sortir
Moi

Qui se décompose gravement


Contre quoi on se bat
Ce qui torture :
Désir ardent sentiment tout
Crasse, Crasse du Je, Crasse

39
Une faiblesse étrange qui grandit

Recalculer
Ce qui était quand et comment
Le garcon, c’est moi, silencieux
Qui crie en moi avec panique
C’est la fin
Fini fini non en arrière en arrière
Ce qui chante disparaît incalculable

Il boit

Quelque chose est entré


Et s’est fait remarquer comment aucune idée
On a du être jeune très jeune
Promis solennellement qu’à soi-même
Je suis une étoile qui n’implore pas
Et me suis retourné pourquoi on ne sait pas
Était-ce toi
Mon ami

Lui : j’ai le temps


Moi : pas moi
C’est l’enfer
Vacarme vacarme
Dans le coin retourné
Quelqu’un murmure
Ça chante un mot mot
Mot

40
14

HOMME

Douleur
La douleur est douloureuse
Les douleurs sont douloureuses
Événement rhapsodique

Il boit

L’émoi et le torrent accélèrent


La prolifération des cellules intérieures
En périphérie une extrémité palpite
Pulsation de la chimie la plus basique

C’est universel
Ce que je sais
S’effondre à l’intérieur
Le purin
Des cavités profondes des vieilles peaux
Une chambre éclate
Ça erre en un filet pourri toujours plus vers le bas
Pulsation infâme

Il boit

Je suis rassuré que ce soit comme ça


Je me trompe on se trompe n’est-ce pas
Des tortures abstraites et précises sont à l’ordre
Toujours le fouet les questions
Le silence et depuis bien longtemps plus de force
Pour châtier les parties qui puent

La longueur et largeur
Et profondeur de l’enfer
Sont inimaginables

Surgissement de liquide des glandes


Par à-coups par à-coups
Écoulement mouillé poisseux
Élan violent
Sans cesse continuellement incontrôlable
Convulsions traumatiques
Tout ce qui était solidité
Est parti depuis longtemps bien longtemps

L’âge que j’ai


Analyse des répétitions
Combien de fois s’est répété combien de fois
D’autres calculent en éones
Moi en soleils
Terriblement calculable
Combien de fois il a vraiment brillé

41
Beaucoup de fois
Pour moi clair et souvent
Si infinies les mathématiques
Si épouvantablement définitivement déterminé le chiffre qui m’est determiné

Il boit

Des voix des voix


Dont je me souviens au loin
Je ne me souviens pas
Je n’arrive pas à me souvenir
Des questions des questions étrangement strictes
Pourquoi est-ce qu’on me torture
Je me souviens
On a abusé de moi
J’étais dans ma cinquième année
Abusé par quelqu’un
Qui s’est tu
Pourquoi pourquoi
Quelqu’un me torture
Arrête

Il boit

Le garçon que j’étais


Le corps démesurément immortel
L’esprit intrépidement incorruptible
Ornement de l’enfance

Il boit

On se trouve là tremblotant
Devenu adulte sans consolation
Piétiné par la vie
Devant l’enfant
Qu’on était
Dont on ose à peine se souvenir
Le verdict qu’il dit
Anéantissant la vie piétinée par la vie

Il boit

Pus stocké
Bouillie de souvenirs
Pulsation crasseuse
Purin
Rhapsodie de douleur

Il boit ?

Mais des preuves


Ne seront plus fournies
Dans cet état
De décomposition

42
De l’expérience
Du sol solide
De la réalité
Crasse de crasse

Il boit

Un sentiment de plénitude
Des montagnes de cadavres
Durs à digérer
Un sentiment de plénitude qui dérange
La pensée
Des montagnes de cadavres
Des membres désordonnés des organes Page 297
Suicide du bilan

Il boit

Auquel personne n’a le droit

Il boit

Ça s’accélère
Gorgée par gorgée
Plus de silence
S’il vous plaît
Il est quelle heure
Ça s’immobilise
Toujours plus vite
Pardon ?

Quoi quoi
Est-ce comme ça
Mais comment
Mais à qui cela apporte quelque chose
Et quelqu’un comme moi
Pourriture dans l’espace interdigital
Il manquait plus que ça
Étudie n’importe quelle crasse

Il boit

Ce qui sert à quelque chose


Rarement on en fait le constat
Correctement
Que rien ne sert à rien
Malgré tout
À tout moment
Le débile suivant
Tombe
En plus avec un cri d’espoir

Ridicule
Ça dérange évidemment
Il y a aussi l’envie de vomir

43
Ou d’autres constantes vitales
Des dogmes fondamentaux
Par exemple il peut y avoir la compassion
Inattendu de préférence
Face à la créature

L’homme est
Ce qui est étonnant
Ce que chacun sait évidemment
Étonnamment aimable
Impliqué solidement dans tout avec bonté
D’où la haine extrémités chiens tressaillants
Bouillie d’événements les douleurs la douleur
Douleur

44
15

HOMME

Faible
Faible
Faiblesse
Faiblissant
Faiblir

Annihilation
Jusqu’à la moelle
Si l’univers a été un corps
Il ne reste plus rien
Qui grandit

Blessures
Et sens et pulsations
Ne faiblissent nullement
Ce qui faiblit : volonté et esprit
Ce qui faiblit : la force

On est jeté dans un feu


Ça ne brille pas ne brûle pas ne luit pas
Asséchée
La flaque d’eau qu’on est
Soif qui disparaît

Sous le larynx
Du fil de fer
Va t’en
Sensation de beauté
Piège de la séduction

Un bruit blanc
Dans lequel disparaît le point
Le reste de soi
Qui frissonne
Le sable tourbillonne vers le haut
La trace s’efface

Est-ce que les secondes peuvent s’accélérer


S’arrêter
Pendant que la voix casse
Ou est ce que dans l’atome
Le temps fait un saut

Le désordre règne
Vivre encore
Particule de faible puissance
À peine un milliardième d’un milliardième de seconde
Invisiblement petit

Mais les produits de désintégration


Sont visibles

45
Volent de préférence vers l’avant
L’univers aussi vieux de
Plus de 15 milliards d’années
Grandit à chaque seconde
D’un volume aussi grand
Que la taille de la galaxie de la Voie lactée
Mais même le proton
Se décompose probablement

Selon toute prévisibilité


Après expiration d’en moyenne
Un million de trillions de trillions d’années
Ce qu’on attend maintenant
En un muon et un kaon

On a observé
Un événement unique
De ce genre une seule fois
Au plus profond du Mont-Blanc
Sur les 100 millions de trillions de trillions de protons
D’une masse de 15 décatonnes de fer

Effectivement
On ne sait pas
Où cela mène
Ce que cela veut dire

Que la matière se décompose

Comme chacun sait


Le temps peut s’envoler
D’un coup comme une flèche
On est assis là
Sénescent en silence
Condamné à l’attente

Il faut boire
Il faut boire

Il boit

Sombrer
Sans raison dans le sans fond
Sans appui en cherchant l’appui toujours à fond

Devoir
Sombrer dans le sans fond

Il boit

Finalement
Boire c’est penser
Boire à fond c’est penser à fond
Le monde du buveur est le monde
De la conséquence la plus fondamentale

46
Il boit

Examiner ce
Que produit la faiblesse
Annihilation
De tout

Il boit

Je vais me taire maintenant on ferme


Ou pas

Il boit

La respiration
Respire plus faiblement
Plus faible faiblesse
Faible

47
16

HOMME

Stop
Stop stop
Reste stop stop
Arrête
Reste
Qu’est-ce qu’il y a

On frappe
Il y a eu quelque chose
On a frappé

Dehors les vents ont frappé


Des cieux verts pâles
Voulaient être vieux et roses
Devant : des trous de balles noires
Des petites feuilles déchirées au bord
Propulsion diachronique ombres tiraillements

Des flocons de sommeils


M’ont traversé

Un vieux était entré


Se traînant figé

En même temps des particules de temps


Ont bougé comme des flèches en moi
De plus en plus profond
Chauffés follement
Accélérées à la vitesse de la lumière

Des choses réelles qui me cassent


À l’intérieur
Cellule par cellule cellules par cellule
Me cassent

Ça a crié
En moi
Encore encore
Le vent a frappé
En douceur et calmes les paupières se sont levées
Le ciel était tapissé de velours comme avant comme depuis toujours

Mais qu’est-ce que ça veut dire


Ainsi disparaît la personne
Et qu’est-ce que c’est et qu’est-ce qui reste

Mais maintenant
Était maintenant maintenant
Réellement purement pensable maintenant

48
Boire
Boire
Boire

Il boit

Avant coulait la morve


Du nez
Et des larmes
Salées
Dans l’oreille
On était couché au lit

Il faisait toujours sombre


Le visage toujours de la boue
Toujours abandonné pour toujours

Il boit

Il y avait une odeur


Il y avait du chant
Mais ils sont partis
Gémissements pour pouvoir partir avec eux
On ne peut jamais partir
Alors on est là

Il boit

Évidemment
Tout était
Faux
Dès le début

Il boit

Cruauté inhumaine
De la vie oui
Pour la vie

Il boit

Désintégration de la chair
Constance de la désintégration de la chair
Dès le début
Odeur d’excréments
Vomissement
Océan cyanose

Soif
Constante vitale
Soif

Il boit

Est-ce que le ciel a un bord

49
Suis-je infini
Avec harmonie
Un firmament
Se voûte
Dans mon âme
Dorée d’étoiles

Il boit

Finalement
On est
Un atome
Indivisiblement cosmique
Mué de manière ordonnée
Maintenant
Arrête reste
Stop stop
Stop

50
17

HOMME

Meurs
En silence

Début de vol de nuit


Un ouvrier tape contre un rocher

Le matériel est prêt


Pour la surveillance
De chaque mouvement

Juste la dernière
Seconde
Se fragmente
Beaucoup

Déchirée
En morceaux
On peut l’observer
On peut se demander si l’innocence avait jamais un foyer

C’est tout
Et nulle part
Et jamais
Se plaindre

Il boit

On est fondamentalement singulièrement


Seul avec soi
On est fait de manière optimale et à fond
Interdit à l’accès

Pour les vivants


Extraterrestre

Il boit

Comme chacun sait


C’est gênant
Dans la vie
La mort s’accumule sous forme de montagne de cadavres

Il boit

On boit
On vomit
On laisse sous soi
Des excréments et de l’eau

L’homme

51
Pue
Afin d’alarmer

On boit
On vomit
Je laisse sous moi
Je bois
Voilà la situation
On ne peut pas se retenir
Ça coule
On fuit

Il boit

Impassibles les continents se déplacent


Entrent en collision se dressent en montagne Page 311
Ainsi s’est créé l’Himalaya

Des fissures de surface


S’ouvrent
Et la braise intérieure rejette
La terre hors d’elle-même

C’est triste pour l’homme mais seulement pour lui

Il boit

Des catastrophes surgissent


Là où les pointes de la raison
Se trouvent nues et sans cœur
Est-ce difficile
De voir non pas ce qu’on sait
Mais de voir
Ce qu’on a vraiment sous les yeux et qu’on voit réellement

Mais la brillance n’est jamais noire


Et comment gagner la certitude
Contre le silence
Là où le cœur est cacheté
On peine beaucoup
En vain
Et on est triste

Trop
Et trop tard
Bégaiements

Arrêter
De boire
Chien de trou
Sale aspiration

Qu’est-ce que ça veut dire


On érige là un nouvel échafaudage
Pour qui et pour quoi

52
Je
Ne
Vois
Plus rien

Il boit

Rien
Compris
Rien
Je bois
Je bois
Rien d’autre
Sa coule sous moi ça coule sous moi c’est tout

L’homme a échoué
Il meurt
Et
Alors

Mais
Ça dure
Foutrement longtemps
Est-ce qu’il y a une raison à ça et laquelle Page 313
Qu’on s’enferme
Et devienne vide d’amour
Et muet

Il boit

Comment
Est pensé
Le monde

Il boit

Je
Bois
Pue
Suis

Il boit

La
On râle
On n’a pas encore
Crèvé
On vomit
Excréments
On vit

Il boit

Il y a encore

53
Du temps
Maintenant

Il boit ?

Une fois
Encore une fois
Une dernière fois
Inspirer maintenant et
Ex ex pirant
Ça respre moi
Fini

Il boit

Comment les sens et tout


Passent ça reste ouvert
Voilé

Cela s’éclaire pour moi et


Je
En silence
En silence
Il meurt

OBSCURITÉ

54

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