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Acupuncture Balancée : un nouvel outil de traitement basé sur l'interaction

des méridiens

Article · January 2018

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Benoit Bataille
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2018, 17 (2) 207

Benoît Bataille

Acupuncture Balancée : un nouvel outil de traitement basé sur

l’interaction des méridiens
Résumé : L’association des points d’acupuncture nécessite la réalisation de combinaisons synergiques afin d’être le plus efficace
possible tout en évitant d’éventuelles aggravations. A cette fin, l’acupuncture balancée basée sur les 6 systèmes de Richard Tan issus des
connaissances traditionnelles (1er grand méridien, 2e couche, 3e intérieur - extérieur, 4e midi-minuit, 5e cycle nycthéméral, 6e méridien
lésé) ou l’horloge chinoise (Sven Schroeder) représente un outil mnémotechnique utile en pratique clinique. Intégrée à l’outil des zang fu
et aux points détente musculaire, elle permet une approche complète de la pathologie. Un cas clinique utilisant l’acupuncture balancée
en analgésie thoracique est aussi présenté. Mots clefs: Acupuncture balancée - méridiens - jingluo - analgésie thoracique.

Sumary: The combination of acupuncture points requires the realization of synergistic combinations in order to be as effective as
possible while avoiding possible aggravations. To this end, balanced acupuncture based on the 6 systems of Richard Tan derived
from traditional knowledge (1rst chinese meridian name, 2nd branching meridians, 3rd interior - exterior pairs, 4th opposite clock, 5th
neighbouring channels, 6th affected meridian) or the Chinese clock (Sven Schroeder) represents an useful mnemonic tool in clinical
practice. Integrated into the zang fu tool and trigger points, it allows a complete approach in pathology. A clinical case using balanced
acupuncture in thoracic analgesia is also presented. Keywords: Balanced acupuncture - meridian - jingluo - thoracic analgesia.

Introduction à une étude randomisée contrôlée en double aveugle

En médecine chinoise, la maladie est considérée comme
une perte de l’équilibre dynamique entre les énergies
yin et yang, bien qu’un déséquilibre relatif puisse être
présent de manière non pathologique en lien avec
les capacités d’adaptation de l’organisme (homéosta-
sie). Par conséquent, équilibrer le yin et le yang est le
concept clef de la thérapie en médecine chinoise [1].
Les grands méridiens sont classifiés en méridiens yin
(taiyin, shaoyin, jueyin) et en méridiens yang (taiyang,
shaoyang, yangming). Le rythme nycthéméral fait passer
successivement l’énergie de la face antérieure du corps
(taiyin – yangming) à la face dorsale (shaoyin – taiyang)
pour se poursuivre au niveau latéral (jueyin – shaoyang)
avant de recommencer son cycle [2]. Il existe peu de
publications en français à ce jour expliquant les tech-
niques d’harmonisation yin – yang par acupuncture
balancée, Richard Tan étant l’un des premiers à avoir
synthétisé les 6 systèmes traditionnels pour en facili-
ter l’utilisation pratique [3]. En 2017, Sven Schroeder,
utilisant une variante des 6 systèmes basée sur l’hor-
loge chinoise, en démontre l’efficacité clinique immé-
diate dans le traitement de la capsulite rétractile grâce
[4]. Plus que créer un nouveau mode d’interaction des
méridiens, l’intérêt des travaux de Richard Tan est de
synthétiser des systèmes de couplage des méridiens
venant d’un ensemble de procédés traditionnels d’acu-
puncture :
- Le 1er et le 6e système sont issus de la théorie des jin-
gluo et jingbie ;
- Le 2e système vient de la théorie des 6 niveaux éner-
gétiques ;
- Le 3e système est un élargissement du traitement des
vaisseaux luo dans le couplage biaoli ;
- Le 4e système est basé sur la règle midi-minuit ;
- Le 5e système se déduit de l’horloge chinoise.
Pourquoi s’intéresser à l’acupuncture
balancée ?
Les indications de l’acupuncture actuellement recon-
nues en France (antalgique en association à d’autres
traitements, nausées et vomissements en alternative
thérapeutique, syndrome anxio-dépressif, en associa-
tion avec un programme de prise en charge globale ou
aide au sevrage alcoolique et tabagique) semblent loin
des motifs pour lesquels l’acupuncture s’est développée
208 Benoît Bataille Acupuncture & Moxibustion

à ses origines [5]. De plus, la prise en charge en Occi- piquer de manière controlatérale à la symptomatologie
dent se réalise généralement tardivement dans l’histoire si celle-ci est latéralisée, les systèmes de numéro paire
de la maladie du patient. Par ailleurs, l’acupuncture en (n° 2, 4 et 6) pouvant être piqués indifféremment à
Occident est souvent perçue comme une relaxation droite ou à gauche en fonction des indications révélées
pour personnes stressées, comparable à un placébo op- à la palpation (tableau 1) [3- 4, 19].
timisé, probablement du fait des résurgences des études Tableau I. Interaction des méridiens selon les 6 systèmes (le 6e
cliniques négatives ne montrant pas de modification correspond au traitement du méridien atteint, colonne 1). Il est
d’efficacité quels que soient les points choisis [6, 7]. conseillé de traiter de manière controlatérale pour les systèmes
impairs 1, 3, 5. Les systèmes pairs 2, 4, 6 peuvent être traités indif-
A contrario, l’essence de l’application traditionnelle de féremment de manière homolatérale ou controlatérale.
l’acupuncture correspond au traitement de la douleur,
Méri- Système Système Système Système Système
dont l’efficacité nécessite d’être la plus rapide et du- dien 1 2 3 4 5
rable possible [4] : c’est donc dans l’optique de traiter PO RA VE GI VE FO
des douleurs effectives d’origine non-psychogènes que GI ES FO PO RE EE
l’acupuncture balancée trouve toute sa place [5]. L’acu- ES GI MC RA MC GI
puncture balancée permet aussi de traiter les patholo- RA PO IG ES TR CO
gies internes [8], bien qu’il n’y ait aucune preuve à ce CO RE VB IG VB RA
jour de sa supériorité par rapport à une approche plus IG VE RA CO FO VE
classique basée sur le concept des zang fu [9, 10]. De VE IG PO RE PO IG
plus, la validité de l’approche diagnostique en méde- RE CO TR VE GI MC
cine traditionnelle chinoise a été remise en question MC FO ES TR ES RE
de par sa faible reproductibilité inter-individuelle [11,
TR VB RE MC RA VB
12], tant dans le diagnostic que le choix des points [6].
VB TR CO FO CO TR
Cette approche basée sur les zang fu, bien qu’essentielle
FO MC GI VB IG PO
à la compréhension de la médecine chinoise, dérive
grandement de la forte influence occidentale des livres Système 1
de Macciocia [13], qui n’est pourtant qu’un des mul- Le premier système utilise le méridien couplé de même
tiples outils de l’acupuncture [2, 5, 6, 14, 15]. nom, mais de manière controlatérale à la localisation
Les différents systèmes d’interaction des de la douleur. Par exemple, une douleur d’épaule sur
méridiens [2-3, 16] le trajet du méridien shouyangming (GI) peut être sou-
La première étape dans le traitement de la douleur lagée par une piqûre controlatérale du point tiaokou
consiste à demander au patient de montrer avec son (ES38) sur le méridien zuyangming. La comparaison et
doigt où se trouve sa douleur. Un traitement distal sera l’étude par IRM fonctionnelle de l’efficacité de l’acu-
effectué grâce aux méridiens couplés dans l’un des dif- puncture homolatérale versus controlatérale dans cette
férents systèmes (tableau I) en fonction des indications indication est en faveur d’une piqûre controlatérale
données par l’interrogatoire, les pouls, la langue et la avec cependant des mécanismes d’action différents
palpation des méridiens [15]. Cela permet ainsi de trai- [20]. L’étude de Zhang et coll. montre que le cortex
ter directement la zone atteinte par massage et mobili- cingulaire antérieur joue un rôle direct dans la régu-
sation, et finir éventuellement par un traitement local lation du cerveau par l’acupuncture controlatérale sur
en cas de contracture persistante [17], seulement s’il ES38 chez les patients souffrant de douleur à l’épaule.
n’y a pas d’inflammation aiguë majeure risquant d’ag- Au contraire, la voie tronc cérébral - thalamus - cortex
graver le patient [3-5, 15, 18]. Pour les systèmes avec est impliquée dans l’action de l’acupuncture au niveau
un numéro impair (n° 1, 3 et 5), il est conseillé de les du point ES38 ipsilatéral.
2018, 17 (2)
Système 2
Le second système correspond aux méridiens couplés
dans leur dénomination chinoise et dans une relation
haut (shou) - bas (zu). Taiyang et couplé avec taiyin dans
une relation shou - zu (VE couplé avec PO, IG couplé
avec RA) ; shaoyang est couplé avec shaoyin (TR–RE,
VB–CO) ; yangming est couplé avec jueyin (GI–FO,
ES–MC). A noter que dans cette classification le méri-
dien jueyin est considéré plus profond que le méridien
shaoyin, ce dernier se retrouvant en position charnière
entre taiyin et jueyin. Ce système se réfère aux 6 niveaux
énergétiques abordés dans le Suwen, chapitre 6, ainsi que
dans le Lingshu, chapitre 5 : taiyang, shaoyang, yangming,
taiyin, shaoyin et jueyin. Cette description semble plus
pertinente en pratique clinique que celle alternative ba-
sée sur la dialectique yin-yang et le rapport biao-li du cha-
pitre 24 du Suwen plaçant jueyin entre taiyin et shaoyin
[2, 15]. L’association 4 barrières (si guan) hegu (GI4)
avec taichong (FO3) relève de cette relation, utilisée pour
traiter une stagnation du Qi du foie par exemple. L’asso-
ciation zhigou (TR6) - zhaohai (RE6) dans le traitement
de la constipation en est un autre exemple.
Système 3
Le méridien couplé dans la relation intérieure–exté-
rieure (biao-li) est utilisé pour soigner une sympto-
matologie controlatérale sur le méridien couplé. On
retrouve ce principe en couplant un point de commu-
nication (luo) avec un point source (yuan) : l’association
lieque (PO7) avec hegu (GI4) utilisée dans l’atteinte
des voies respiratoires supérieures en est un exemple.
On peut aussi classer dans ce système le couplage yin
–yang entre renmai et dumai [3]. A la différence de la
technique luo–yuan [21], tout point ashi du méridien
controlatéral couplé dans la relation biao-li peut être
utilisé pour traiter le méridien douloureux.
Système 4
Ce système correspond à la règle midi-minuit où un
méridien est traité grâce au méridien opposé sur l’hor-
loge biologique. Ce système se recoupe avec le système
2 pour shoutaiyin (PO)–zutaiyang (VE), shoujueyin
(MC)–zuyangming (ES), shoushaoyin (CO)–zushaoyang
Benoît Bataille 209
(VB). L’utilisation du point neiguan (MC6) pour trai-
ter les vomissements (atteinte du méridien zuyangming,
opposé au méridien shoujueyin) est classique [22].
Système 5
Le méridien yin de main est adjacent à un méridien
de même polarité du membre inférieur dans l’horloge
chinoise. De même pour les méridiens yang, bien que
pour ceux-ci ce système se recoupe avec le n°1. Shou-
taiyin (PO) s’équilibre avec zujueyin (FO) controla-
téral, zutaiyin (RA) avec shoushaoyin (CO), zushaoyin
(RE) avec shoujueyin (MC).
Système 6
Ce système est probablement le plus connu, donc le
plus utilisé, car il consiste à traiter le méridien directe-
ment atteint de manière homolatérale ou controlaté-
rale (« technique étrange ») [15]. La particularité de ce
système est d’éviter de piquer directement la zone lésée
en utilisant le principe du miroir (piquer par exemple
l’épaule controlatérale à celle douloureuse) ou de la pro-
jection image (piquer sanjian GI3, image de l’épaule
sur le métacarpe, opposé à lingku plus proximal en cas
de douleur lombaire). Dans la périarthrite scapulo-
humérale, Feng a comparé l’efficacité d’un traitement
distal utilisant sanjian (GI3) controlatéral couplé à lin-
gxia (2 cun sous VB34) homolatéral avec un traitement
local par électroacupuncture des points jianyu (GI15),
jianliao (TR14), jianzhen (IG9), binao (GI14), tian-
zong (IG11) and jianjing (VB21) [23]. L’étude montre
une amélioration significativement plus nette en utili-
sant le traitement distal (75% de guérison) par rapport
au traitement local (42% de guérison, p<0,01).
Un autre exemple d’utilisation de la théorie des mé-
ridiens se rapprochant du système 6 est illustré par
l’étude de Zhao et coll. [24] : les auteurs ont traité les
migraines sans aura par l’utilisation de points d’acu-
puncture piqués unilatéralement, de façon alternée
aux cours des séances, en fonction de la localisation
de la douleur. Les points utilisés étaient les suivants :
waiguan (TR5) et yanglingquan (VB34) si la migraine
était localisée sur shaoyang (latérale), houxi (IG3) et
kunlun (VE60) pour taiyang (impliquant l’occiput),
210 Benoît Bataille
hegu (GI4) et neiting (ES44) pour yangming (frontale),
taichong (FO3) and qiuxu (VB40) pour jueyin (impli-
quant le vertex). De plus, l’électroacupuncture sur
shuaigu VB8 et fengchi VB20 était faite systématique-
ment (traitement local – distal). Aucun autre point n’a
été utilisé dans l’étude. L’étude conclut à une réduction
significative des crises migraineuses dans le groupe acu-
puncture réelle comparée à l’acupuncture factice sur de
faux points ou comparée aux patients en liste d’attente.
L’étude de Zhao utilise le système 6 dans la mesure où
les points sont piqués unilatéralement sur le méridien
atteint, de manière alternée chaque séance (ipsi ou
controlatérale). L’action thérapeutique est optimisée en
y associant le traitement local par électroacupuncture,
d’ailleurs parfois utilisé dans les cas cliniques rapportés
par Richard Tan [5] ou les études récentes s’appuyant
sur la méthode balancée [25]. Des alternatives théra-
peutiques s’appuyant sur la théorie des jingbie ont déjà
été développées par Jean-Marc Stéphan dans Acupunc-
ture & Moxibustion [26,27].
Autres Systèmes
Les précédents systèmes sont ceux synthétisés par Ri-
chard Tan [3]. Cependant une analyse historique et
mathématique rigoureuse réalisée par Sven Schroeder
révèle d’autres alternatives pour associer de manière
équilibrée chaque méridien [1,2].
Couplage intérieur-extérieur dans la relation haut-bas
Dans ce couplage, shoutaiyin (PO) est utilisé pour trai-
ter zuyangming (ES), et de même zutaiyin (RA) pour
traiter shouyangming (GI). De façon similaire shaoyang
s’équilibre avec jueyin, taiyang avec shaoyin dans une
relation haut – bas. L’association hegu (GI4) – sanyin-
jiao (RA6) dans l’induction de l’accouchement fait par-
tie de ce type de couplage [28]. Un exemple couplant
jueyin – shaoyang est donné dans le cas clinique pré-
senté en fin d’article.
Couplage selon les merveilleux vaisseaux
Les points clefs des merveilleux vaisseaux font appa-
raître des couplages non présentés dans les systèmes
précédents, en particulier neiguan (MC6), point de
Acupuncture & Moxibustion
clef de yinweimai couplé à gongsun (RA4), point clef de
chongmai, et lieque (PO7), point clef de renmai couplé
à zhaohai (RE6), point clef de yinqiaomai. A noter que
le trajet de yinweimai, inclue les méridiens zushaoyin
(RE), lié au MC par le système 5, zutaiyin (RA) relié au
MC par le système de merveilleux vaisseaux, zujueyin
(FO) relié au MC par le système 1 [29].
Synthèse
D’après Sven Schroeder [1, 2], synthétisant les asso-
ciations de 4 méridiens les mieux équilibrées grâce à
l’horloge chinoise, 4 méridiens se suivant consécutive-
ment dans le cycle nycthéméral s’équilibrent d’office
entre eux par combinaison des différents systèmes (par
exemple GI-ES-RA-CO, ou RE-MC-TR-VB), for-
mant 12 combinaisons possibles. Par ailleurs, les méri-
diens en carré (tous espacés de 90°, c’est-à-dire 3h sur
l’horloge chinoise) s’équilibrent entre eux (par exemple
PO-RA-VE-TR, GI-CO-RE-VB ou ES-IG-MC-FO)
formant 3 autres combinaisons, l’ensemble étant com-
posé de 15 schémas optimums auxquels il faut ajouter
les combinaisons des merveilleux vaisseaux.
Aspects pratiques : traitement de la douleur
Palpation
Dans le traitement de la douleur, l’approche par acu-
puncture balancée est bien codifiée [3, 4] :
1. Demander au patient de montrer avec le doigt où se
trouve la douleur principale, identifier ainsi le ou les
méridiens en souffrance, mobiliser si nécessaire l’arti-
culation,
2. Palper les méridiens couplés dans l’un des systèmes
sur un membre sain à la recherche de points sensibles
(ashi), c’est-à-dire douloureux seulement à la palpation
mais non spontanément, puis piquer le point,
3. Faire une mobilisation douce active ou passive de la
zone atteinte, puis demander si l’intensité de la douleur
a diminué ou si la douleur s’est déplacée,
4. Poursuivre si nécessaire en équilibrant chaque méri-
dien dans une relation yin–yang. Piquer unilatéralement
chaque méridien permet ainsi de limiter le nombre
d’aiguille en traitant plusieurs méridiens [3, 15].
2018, 17 (2)
5. Pour agir sur la composante anxieuse de la douleur,
il peut être utile de rajouter yintang (Ex2) – anmian
(Ex22) – shenmen auriculaire.
La palpation à la recherche de points ashi dans le
traitement de la douleur représente donc une phase
essentielle permettant ainsi de prendre en compte les
variations anatomiques inter et intra-individuelles de
localisation des points d’acupuncture [2,30].
Prise des pouls selon les 5 éléments
Il arrive parfois que l’organisme ne réagisse pas à la pal-
pation des méridiens distaux par rapport à la zone lésée
[15]. Dans ce cas il peut être utile d’utiliser les points
source (yuan) des méridiens vides à la palpation, ou uti-
liser une approche basée sur la prise des pouls radiaux
[31] :
1. Pouls Bois en corde, tendu, ou sans élasticité : envi-
sager de traiter FO/VB ou parfois MC/TR,
2. Pouls Feu bondissant, grand à toutes les positions,
comme sortant hors du poignet : CO/IG,
3. Pouls Terre glissant, filant, lent, sans vrai contour :
RA/ES,
4. Pouls Métal flottant, fort en surface, faible en pro-
fondeur : PO/GI,
5. Pouls Eau profond, faible en surface, fort en profon-
deur : RE/VE.
Évidemment, ce n’est qu’une approche générale sug-
gérant où aller chercher, le choix des points des méri-
diens étant aidé par la palpation classique des 12 pouls
radiaux. De plus, l’examen de la langue peut être elle
aussi d’une aide précieuse [32,33].
Équilibre global par acupuncture balancée et
générale
L’une des limites d’une approche basée uniquement sur
les différents systèmes de l’acupuncture balancée est le
nombre important de séances à réaliser pour entrete-
nir un résultat satisfaisant. Les études de cas rapportent
parfois 20 à 60 séances d’acupuncture, espacées cha-
cune de 2 ou 3 jours, pour obtenir un résultat satis-
faisant et durable [8,19,34]. C’est dans une optique
d’efficacité qu’il semble intéressant de coupler une ap-
proche générale fondée sur les zang fu à celle fondée sur
Benoît Bataille 211
l’équilibre dynamique entre les méridiens, éventuel-
lement associée à l’action locorégionale sur les points
détente musculaires (figure 1) [17,35].
Figure 1. Traitement global intégrant l’outil des zang fu, des jin-
gluo, et des points détente musculaire
Équilibre général en utilisant l’outil des zang fu
Le rôle des points de transport du dos (beishu) est pro-
bablement essentiel pour prolonger l’effet du traite-
ment et espérer ainsi diminuer le nombre de séances
nécessaire à l’obtention d’un résultat satisfaisant [36].
A noter que contrairement au méridien dont le nom
chinois traditionnel n’a quasiment aucun lien avec
l’organe en relation (par exemple taiyin signifie « grand
yin », dans un sens énergétique de niveau maximum de
yin, notion fort éloignée de l’organe rate par lequel on
a traduit le nom du méridien car sa branche profonde
passe effectivement par l’organe), les noms chinois des
points beishu font effectivement allusion à l’organe di-
rectement en relation d’un point de vue métamérique
(xinshu VE15 signifie point de transport du cœur,
de même pour pishu VE20, point de transport de la
rate). Le diagnostic selon les zang fu semble donc ici le
plus appropriée pour éventuellement piquer les points
beishu correspondants.
Massage – tuina [37] et piqûre des points détente
musculaire [17]
L’acupuncture balancée est généralement décrite
comme utilisant des points distaux sans aucune utilisa-
tion de points locaux [3,4]. Une application trop rigide
de ce principe risquerait de faire oublier les points dé-
212 Benoît Bataille
tentes musculaires [17] et l’acupuncture locale. Hors,
les cas cliniques présentés par Richard Tan dans ses pre-
miers livres montrent qu’il utilise parfois les traitements
locaux, éventuellement couplés à l’électroacupuncture
[5,18] : un traitement local peut donc être nécessaire
s’il ne gêne pas la mobilisation et si la zone n’est pas
trop inflammatoire en contexte de douleur aiguë [15].
De plus, un traitement distal pur facilite le traitement
par tuina [37] en libérant l’accès à la zone concernée.
Équilibre global par l’acupuncture balancée
Figure 2. Représentation graphique des 5 schémas d’équilibre
yin – yang du méridien zushaoyang VB.
La diversité des combinaisons possible par les 6 sys-
tèmes (tableau I) ou l’horloge chinoise (figure 2) pose
le problème du meilleur choix de combinaison pour
un patient donné. En dehors de l’analyse des pouls
et de la langue [33], l’un des moyens les plus direct
est de demander au patient ses 3 symptômes priori-
taires. Ceux-ci guideront souvent vers les méridiens
à traiter en priorité [29]. Par exemple, en contexte de
vomissement (méridien zuyangming ES), fatigue (vide
de Qi de RA), frustration (stagnation de Qi du foie
avec attaque transverse opportuniste) [15] une com-
binaison équilibrée pourrait être zusanli ES36 droit
– taibai RA3 gauche – neiguan MC6 droit – zhigou
TR6 gauche (relation midi-minuit de MC6 avec
Acupuncture & Moxibustion
ES36 et RA3 avec TR6, relation biao li entre ES36
– RA3 et MC6 – TR6), correspondant à l’utilisation
du cycle d’engendrement sheng feu (MC/TR) – terre
(RA/ES) [29]. Dans le cas d’une pathologie interne
tel que les bouffées de chaleur de la ménopause (excès
relatif de feu), prise de poids (yangming), irritabilité
(jueyin), une possibilité de traitement est constituée
par l’association neiguan MC6 droit – quchi GI11
gauche – taichong FO3 gauche – neiting ES44 droit
(relation selon le système 2 entre yangming et jueyin)
[11]. Dans la même indication de bouffées de chaleur
avec prise de poids (yangming) mais sans l’irritabilité
(jueyin), une alternative aurait été d’utiliser la combi-
naison classique du shaoyinyinxi CO6 droit avec fuliu
RE7 gauche [6], éventuellement complété d’un point
de VB à droite pour équilibrer selon la structure mi-
di-minuit en carré (GI-RE-CO-VB) (figure 2). Des
techniques alternatives dérivées du Yijing ont égale-
ment été décrites [16].
Cas clinique
Mme H, 44 ans, est hospitalisée en réanimation poly-
valente (CH Narbonne) en contexte de traumatisme
thoracique avec fractures multiples de côtes unilatérales
droites de K3 à K7. Le scanner thoracique montrait
un pneumothorax minime ne nécessitant qu’une sur-
veillance simple. Pendant les 24 première heures, une
analgésie multimodale par paracétamol (1gr x 4/j) –
néfopam (100 mg/J PSE) - profénid (200 mg/J) – PCA
morphine s’avère insuffisante, la patiente estimant son
EVA à 8/10 le matin de l’examen en service de réani-
mation (à 24h de la prise en charge). Devant la dou-
leur réfractaire au traitement analgésique intraveineux,
un bloc paravertébral [38] est programmé seulement
en cas d’échec de traitement complémentaire par acu-
puncture balancée. Le pouls est en corde en contexte
douloureux aiguë. Le choix des points s’est effectué
comme suit :
1°) Quel est le méridien principalement lésé ?
Le méridien directement concerné dans le contexte de
traumatisme thoracique est zushaoyang (VB) à droite.
2018, 17 (2)
2°) Quels méridiens vont permettre de traiter le
méridien atteint ?
On peut se référer indifféremment au tableau I, basé
sur les différents systèmes de Richard Tan, ou à la figure
2 schématisant l’équilibre selon l’analyse mathématique
de Sven Schroeder. C’est cette dernière qui fut utilisée.
Les possibilités d’associations sont les suivantes :
Cercle externe (rouge) : TR – VB – FO – PO ;
Cercle médian (bleu) : MC – TR – VB – FO ;
Cercle interne (noir) : RE – MC – TR– VB (sens anti-
horaire) ou VB – FO – PO – GI (sens horaire) ;
Carré central : VB – CO – RE – GI.
L’étude des publications réalisées en analgésie thora-
cique par acupuncture oriente vers l’axe MC – TR –
VB – FO [39,40], de plus le pouls est en corde, d’où
le choix jueyin – shaoyang (figure 3). Cette association
de méridiens constitue aussi une relation mère-fils dans
le cycle sheng d’engendrement des 5 mouvements où le
bois (FO/VB) nourrit le feu (MC/TR) [29].
Figure 3. Points d’acupuncture distaux utilisés dans l’analgésie
thoracique (5 aiguilles au total).
3°) Quels points choisir ?
Le choix s’est fait d’une part par les indications géné-
rales des points (jianshi MC5 – sanyangluo TR8 pour
l’analgésie thoracique [40]), d’autre part par la palpa-
tion des méridiens du membre inférieur en zone distale
par rapport au genou. Une séance le matin a été réalisée
sur les points suivants (figure 3) : taichong FO3 ashi à
Benoît Bataille 213
gauche (controlatéral), zulinqi VB41 ashi à droite (ho-
molatéral), sanyangluo TR8 à gauche (controlatéral),
jianshi MC5 à droite relié à sanyangluo TR8 à droite
pour réalisation d’une électrostimulation complémen-
taire (1Hz, 10 mA, 0,2 ms, cathode sur MC5 et anode
sur TR8). Les aiguilles utilisées étaient en argent, 0,26
x 25 mm. L’insertion était perpendiculaire, sauf pour
jianshi MC5 piqué tangentiellement en direction de xi-
men MC4. La profondeur d’insertion était de 2 à 3 mm
sans manipulation, sauf pour sanyangluo TR8 piqué
perpendiculairement à une profondeur d’un cm avec
manipulation en rotation douce (moins d’une minute)
jusqu’à obtention du deqi. La séance a duré 1 heure, fai-
sant passer l’EVA de 8/10 à 5/10 en fin de séance puis
progressivement à 3/10 dans l’heure suivant la séance.
A la demande de la patiente, une seconde séance a été
réalisée le soir, avec pour seule modification yangfu
VB38 ashi au lieu de zulinqi VB41. La seconde séance
a été complétée par yintang et shenmen auriculaire pour
faciliter la relaxation et le sommeil. Le lendemain la pa-
tiente a été sevrée de l’ensemble de ses antalgiques et a
souhaité absolument sortir contre décharge, malgré in-
formation sur les risques de survenue de pneumothorax
tardif. Malheureusement, sa sortie s’est soldée par une
ré-hospitalisation le lendemain en contexte de pneu-
mothorax nécessitant un drainage thoracique. A noter
que l’absence d’utilisation de points locaux d’acupunc-
ture ou du bloc paravertébral initialement programmé
a permis de lever toute suspicion de iatrogénie.
Conclusion
L’importance de traiter le yin par le yang, le haut par le
bas, la droite par la gauche avait été fortement mise en
avant par George Soulié de Morant dans le 2e tome de
son traité L’acupuncture chinoise [14]. Les travaux de syn-
thèse réalisés grâce à Richard Tan, avec ses 6 systèmes,
et Sven Schroeder, avec l’horloge chinoise, représentent
des moyens mnémotechniques dont l’efficacité clinique
semble très prometteuse au vu du succès des dernières
études cliniques randomisées [4, 24]. Intégrée à une
approche traditionnelle basée sur les zang fu et les points
détente musculaire locorégionaux, l’acupuncture balan-
214 Benoît Bataille
cée, issus des connaissances traditionnelles (1er grand
méridien, 2e couche, 3e intérieur – extérieur, 4e midi-
minuit, 5e cycle nycthéméral, 6e méridien lésé), offre de
nouvelles perspectives thérapeutiques.
Dr Benoît Bataille
33 Quai Victor Hugo,
11100 Narbonne
 06 86 36 91 00
 b_bataille@yahoo.fr
Conflit d’intérêt : aucun
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