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Son objectif est de provoquer une sorte d'attendrissement en portant à son extrême l'expression
des sentiments. C'est le ton sur lequel on décrit des souffrances ou des luttes humaines dans des
situations difficiles. L'exaltation y est fréquente ainsi que les changements de rythme pour mieux
bouleverser le lecteur.
Exemple : Bernardin de Saint-Pierre (voir ci-dessos) emploie des termes très forts : « éternel », «
terrible », « effroyable » ; et il n'hésite pas à faire intervenir les cris des spectateurs.
Le ton tragique
En général, l'émotion qu'il suscite naît de la conviction intime qu'il n'y a plus d'issue, que le destin
s'acharne inéluctablement sur l'homme voué au désespoir et à la mort. Il agit plus par la gravité
que par l'exaltation ; le débit du discours est assez égal, mais toujours avec une certaine
ampleur.
Exemple : L'extrait d'Hernani (voir ci-dessous), avec l'ampleur de l'alexandrin, annonce
l'inévitable arrivée de la mort.
Le ton lyrique
Parlant de lui-même, l'auteur cherche à créer avec son lecteur une sorte de communauté d'âme,
parce qu'il évoque, de façon exaltée ou méditative, des sentiments intimes communs à tous les
hommes. Le « je » y est donc tout-puissant, mais il est parfois relayé par le « on » ou le « nous
» rappelant le caractère universel de l'expérience personnelle. Cela se fait en jouant aussi sur la
musicalité de la langue, ce qui explique que le lyrisme apparaisse surtout en poésie.
Le ton épique
Sa caractéristique principale est de donner aux êtres et aux événements une dimension qui les
dépasse : ils représentent symboliquement les valeurs d'une société et l'aventure de tout un
groupe. Les grandes forces collectives et cosmiques s'y expriment, avec éventuellement
l'intervention du merveilleux.
Le ton absurde
Raymond Devos, artiste comique contemporain, fonde très souvent ses sketches sur une
fantaisie verbale qui peut mener à l’absurde.
« Je connaissais un sportif qui prétendait avoir plus de ressort que sa montre.
Pour le prouver, il a fait la course contre sa montre.
II a remonté sa montre, il s’est mis à marcher en même temps qu’elle.
Lorsque le ressort de la montre est arrivé en bout de course, la montre s’est arrêtée.
Lui a continué,
et il a prétendu avoir gagné en dernier ressort ! »
Raymond Devos, Sens dessus dessous, 1976. Éd. Stock
Le ton pathétique
Paul et Virginie se sont aimés dès l’enfance. Paul, sans pouvoir la secourir, voit sous ses yeux
mourir Virginie dans le naufrage, d’où le récit pathétique suivant.
i « On vit alors un objet digne d’une éternelle pitié : une jeune demoiselle parut dans la galerie
de la poupe du Saint-Géran, tendant les bras vers celui qui faisait tant d’efforts pour la joindre.
C’était Virginie. Elle avait reconnu son amant à son intrépidité. La vue de cette aimable personne,
exposée à un si terrible danger, nous remplit de douleur et de désespoir. Pour Virginie, d’un port
noble et assuré, elle nous faisait signe de la main, comme nous disant un éternel adieu. Tous les
matelots s’étaient jetés à la mer. Il n’en restait plus qu’un sur le pont, qui était tout nu et
nerveux comme Hercule. Il s’approcha de Virginie avec respect : nous le vîmes se jeter à ses
genoux, et s’efforcer même de lui ôter ses habits ; mais elle, le repoussant avec dignité, détourna
de lui sa vue. On entendit aussitôt les cris redoublés des spectateurs : « Sauvez-la, sauvez-la ; ne
la quittez pas ! » Mais dans ce moment une montagne d’eau d’une effroyable grandeur
s’engouffra entre l’île d’Ambre et la côte, et s’avança en rugissant vers le vaisseau, qu’elle
menaçait de ses flancs noirs et de ses sommets écumants. A cette terrible vue le matelot s’élança
seul à la mer ; et Virginie, voyant la mort inévitable, posa une main sur ses habits, l’autre sur son
cœur, et levant en haut ses yeux sereins, parut un ange qui prend son vol vers les deux.
»
Bernardin de Saint-Pierre, Paul et Virginie, 1788
Le ton tragique
Hernani, le héros de Victor Hugo, va mourir. Il voudrait ne pas entraîner celle qu’il aime, Doña
Sol, dans cette mort inéluctable, et il exprime le tragique de sa destinée.
« Détrompe-toi. Je suis une force qui va !
Agent aveugle et sourd de mystères funèbres !
Une âme de malheur faite avec des ténèbres !
Où vais-je ? je ne sais. Mais je me sens poussé
D'un souffle impétueux, d’un destin insensé.
Je descends, je descends, et jamais ne m’arrête.
Si, parfois, haletant, j’ose tourner la tête,
Une voix me dit : Marche ! et l’abîme est profond,
Et de flamme ou de sang je le vois rouge au fond !
Cependant, à l’entour de ma course farouche,
Tout se brise, tout meurt. Malheur à qui me touche !
Oh ! fuis ! détourne-toi de mon chemin fatal !
Hélas ! sans le vouloir je te ferais du mal ! »
Victor Hugo, Hemani, 1830
LE TON D'UN TEXTE : EXERCICES