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Lycée Louis-Le-Grand, Paris Samedi 26/11/2022

MP2I – Mathématiques
A. Troesch

Devoir Surveillé no 3 (4h)

La présentation, la lisibilité, l’orthographe, la qualité de la rédaction, la clarté, la précision et la concision des raison-
nements entreront pour une part importante dans l’appréciation des copies.
Les candidats sont invités à encadrer dans la mesure du possible les résultats de leurs calculs.
L’usage de tout document et de tout matériel électronique est interdit. Notamment, les téléphones portables doivent
être éteints et rangés.

Problème 1 – (Fonctions absolument, complètement, et totalement monotones, extrait et adapté de


Centrale 1998)

Soit a et b deux éléments de R tels que ´8 ď a ă b ď `8, et f une fonction de sa, br dans R, de classe C 8 sur sa, br.
On dit que :
‚ f est absolument monotone (en abrégé AM) si :

@n P N, @x Psa, br, f pnq pxq ě 0;

‚ f est complètement monotone (en abrégé CM) si :

@n P N, @x Psa, br, p´1qn f pnq pxq ě 0.

Les parties II, III, IV et V sont indépendantes entre elles.

Partie I – Propriétés de stabilité

1. (a) Soit f et g deux fonctions AM. Montrer que f 1 , f ` g et f g sont aussi AM.
(b) Qu’en est-il pour les fonctions CM ?
2. Soit f une fonction AM sur sa, br, à valeurs dans un intervalle sc, dr. En procédant par récurrence, montrer que
pour tout n P N, et toute application g :sc, drÑ R, AM sur sc, dr, pg ˝ f qpnq ě 0. Qu’en déduisez-vous pour g ˝ f ?
3. Soit f définie sur sa, br, et g définie sur s ´ b, ´ar, telles que pour tout x Ps ´ b, ´ar, gpxq “ f p´xq. Montrer
que f est AM si et seulement si g est CM.

Partie II – Exemples

1. Que pouvez-vous dire de l’absolue ou la complète monotonie de exp sur R, et de ´ ln sur s0, 1r ?
2. Montrer que pour tout α ă 0, f1 : x ÞÑ xα est CM sur R˚` .
3. Montrer que pour tout α ă 0, f2 : x ÞÑ p1 ´ xqα est AM sur s0, 1r.
4. Montrer que f3 : x ÞÑ ? 1 est AM sur s0, 1r.
1´x2
5. Montrer que f4 “ tan est AM sur s0, π2 r.

Partie III – Prolongement d’une fonction AM


On se donne dans cette partie une fonction AM sur sa, br, et on suppose a P R.
1. Montrer que pour tout n P N, f pnq minorée, croissante et convexe.
2. Montrer que f se prolonge en une fonction de classe C 8 sur ra, br.
3. Peut-on de même prolonger f en une fonction de classe C 8 en b (en supposant b P R) ?

1
Partie IV – Applications totalement monotones
On donne dans cette partie une caractérisation des applications AM sur s0, `8r, basés sur la méthode des différences
finies (permettant d’apprécier les variations sans exprimer de dérivée).
Soit f une application de s0, `8r dans R. On définit, pour tout h ą 0, l’application ∆h pf q par :

@x Ps0, `8r, ∆h pf qpxq “ f px ` hq ´ f pxq.

On note alors, pour tout n P N, ∆nh pf q l’application obtenue en itérant n fois ce procédé. Ainsi, on peut définir ∆nh pf q
par récurrence, en posant :

∆0h pf q “ f, et @n P N, ∆n`1
h pf q “ ∆h p∆nh pf qq.

On dit que f (définie sur s0, `8r) est totalement monotone (en abrégé TM) si :

@h ą 0, @n P N, @x Ps0, `8r, ∆nh pf qpxq ě 0.

1. Soit f de classe C 8 sur s0, `8r, et h ą 0. Comparer ∆h pf 1 q et r∆h pf qs1 .


2. Soit f une application de classe C 8 sur s0, `8r. Montrer que f 1 ě 0 si et seulement si pour tout h ą 0,
∆h pf q ě 0.
3. Soit f une application AM sur s0, `8r, et h ą 0.
(a) Montrer que ∆h pf q est AM sur s0, `8r.
(b) Montrer que f est TM
4. Soit f une application TM
(a) Montrer que f 1 est encore une application TM
Indication : on pourra montrer que l’hypothèse de positivité est préservée en composant des ∆hi tels que
les hi soient des multiples entiers d’un même réel h, puis étudier le taux d’accroissement de ∆n´1
h pf q.
(b) En déduire que si f est TM, alors elle est AM.
On peut montrer que réciproquement, si f est TM, alors elle est AM, mais cela nécessite des outils dont vous ne
disposez pas encore (formule de Taylor-Young).

Partie V – Une famille d’applications CM


On suppose dans cette partie que 0 ď a ă b ă `8.
On termine ce problème en donnant une façon de construire des applications CM à partir de formes linéaires sur
l’espace C 0 pra, bsq des fonctions définies et continues sur ra, bs, à valeurs réelles. On dit que µ : C 0 pra, bsq Ñ R est une
forme linéaire, si elle vérifie :
@pf, gq P C 0 pra, bsq2 , @pα, βq P R2 , µpαf ` βgq “ αµpf q ` βµpgq.

On remarquera que µ est nécessairement à valeurs réelles. On dit que µ est une forme linéaire positive, si de plus,
pour tout f P C 0 pra, bsq telle que f ě 0 (i.e. pour tout x P ra, bs, f pxq ě 0), on a µpf q ě 0.
On note, pour tout x P R, ex l’application de ra, bs dans R définie par ex ptq “ e´xt .
1. Donner un exemple d’une forme linéaire positive non nulle sur C 0 pra, bsq.
2. Montrer que µ est croissante, c’est-à-dire que si f et g sont deux applications de C 0 pra, bsq vérifiant f ď g, alors
µpf q ď µpgq.
3. Soit f P C 0 pra, bsq. Montrer que |µpf q| ď µp|f |q.
4. Montrer que pour tout f P C 0 pra, bsq, µp|f |q ď µpf0 q}f }, où f0 est l’application constante de valeur 1, et
}f } “ sup |f pxq|.
xPra,bs
5. Montrer que µ̃ est positive, décroissante et continue sur R.
6. Soit, pour tout n P N, et tout x P R, en,x l’application définie sur ra, bs par en,x ptq “ tn e´xt . Montrer que
l’application ϕn définie par ϕn pxq “ µpen,x q est dérivable sur ra, bs et que pour tout x P R,
ϕ1n pxq “ ´ϕn`1 pxq.

7. En déduire que µ̃ est CM sur R.

2
Problème 2 – (Séries de Fourier exponentielles)
Soit f une fonction de classe C 2 de R dans C, et 2π-périodique. Le but de ce problème est de démontrer l’existence
d’une famille pcn qnPZ de nombres complexes tels que
`8
ÿ
@x P R, f pxq “ cn ei nx ,
n“´8

c’est-à-dire tels que N


ÿ
@x P R, f pxq “ lim lim cn ei nx .
MÑ´8 N Ñ`8
n“M

On admet les points suivants :


‚ Théorème fondamental de l’analyse dans le cas complexe : si g est une application continue de ra, bs dans C,
alors elle admet une primitive, et si G est une primitive quelconque de g, alors
żb
gptq dt “ Gpbq ´ Gpaq.
a

‚ Inégalité triangulaire intégrale dans C : Si g est une application continue de ra, bs dans C, alors elle est intégrable,
ainsi que |g| et ˇż ˇ ż
ˇ b ˇ b
ˇ gptq dtˇ ď |gptq| dt.
ˇ ˇ
ˇ a ˇ a

‚ Théorème de compacité : Si g est une application continue sur un intervalle fermé borné ra, bs, alors elle est
bornée. Autrement dit, il existe A P R˚` tel que pour tout x P ra, bs, |gpxq| ď A.
‚ Formule d’intégration par parties : Si f et g sont deux applications de classe C 1 sur ra, bs, à valeurs dans C,
alors żb ” ıb ż b
f 1 ptqgptq dt “ f ptqgptq ´ f ptqg 1 ptq dt.
a a a
‚ Intégrale d’une fonction périodique : Si g est une fonction continue sur R et 2π-périodique, alors pour tout
A P R, ż 2π ż 2π
gpxq dx “ gpx ` Aq dx.
0 0

Partie I – Expression intégrale des coefficients


Pour avoir une idée de la façon de définir les coefficients cn , on va dans un premier temps (et uniquement dans cette
partie) supposer que f s’écrit sous forme d’une somme finie
N
ÿ
@t P R, f ptq “ cn ei nt ,
n“M

afin d’obtenir une expression de cn en fonction de f .


żπ
1. Montrer que pour tout n P Z˚ , ei nt dt “ 0.
´π
Que vaut cette intégrale lorsque n “ 0 ?
żπ
1
2. En déduire que pour tout k P vM, N w, ck “ f ptqe´ i kt dt.
2π ´π

Partie II – Lemme de Riemann-Lebesgue


Soit g une application de classe C 1 sur un intervalle ra, bs.
1 b 1
ż
1. Montrer que lim g ptqei nt dt “ 0.
nÑ`8 n a
Indication : on pourra majorer le module de l’intégrale.
żb
2. En déduire que lim gptqei nt dt “ 0
nÑ`8 a

3
Partie III – Développement en série de Fourier
Soit f une application de classe C 2 sur R, et 2π-périodique. On pose, pour tout n P Z,

1 π
ż
cn “ f ptqe´ i nt dt.
2π ´π

Pour M et N deux entiers relatifs vérifiant M ă N , et x P R, on pose :


N
ÿ
SM,N pxq “ cn ei nx .
n“M

1. Soit M ă N deux entiers relatifs. Montrer que pour tout x P R,


$ ´ i Mt
żπ &e ´ e´ ipN `1qt
1 si t ‰ 0
SM,N pxq “ f px ` tq ¨ ϕptq dt, où @t P r´π, πs, ϕptq “ 1 ´ e´ i t
2π ´π N ´M `1 si t “ 0.
%

2. En appliquant ce résultat à une application f0 bien choisie, montrer que pour tous entiers M ă 0 ă N t

1 π
ż
ϕptq dt “ 1.
2π ´π

3. En déduire que pour tous entiers M ă N et tout x P R :

1 ˇˇ π f px ` tq ´ f pxq ´ i Mt ˇˇ 1 ˇˇ π f px ` tq ´ f pxq ´ ipN `1qt ˇˇ


ˇż ˇ ˇż ˇ
|SM,N pxq ´ f pxq| ď e dt ` e dt ˇ.
2π ˇ ´π 1 ´ e´ i t ˇ 2π ˇ
´π 1 ´ e´ i t

On justifiera au passage que ces intégrales sont bien définies, notamment en justifiant que les fonctions intégrées
peuvent être prolongée par continuité en 0.
4. Soit g et h deux applications de classe C 0 sur un intervalle ra, bs, à valeurs réelles, dérivables sur sa, br et telles
que hpaq ‰ hpbq.
(a) En appliquant le théorème des accroissements finis (ou directement le lemme de Rolle si vous le connaissez)
à l’application α : x ÞÑ pgpbq ´ gpaqqhpxq ´ phpbq ´ hpaqqgpxq, montrer qu’il existe c P ra, bs tel que

gpbq ´ gpaq g 1 pcq


“ 1 (théorème des accroissements finis généralisés)
hpbq ´ hpaq h pcq

(b) En déduire que si g et h sont deux applications à valeurs réelles, dérivables au voisinage de 0, telles que
1
hptq ´ hp0q ne s’annule qu’en t “ 0 au voisinage de 0 et telles que hg 1 admet une limite en 0, on a :

gptq ´ gp0q g 1 ptq


lim “ lim 1 (règle de L’Hospital, probablement due à Jean Bernoulli)
tÑ0 hptq ´ hp0q tÑ0 h ptq

(c) Justifier que cela reste vrai si g est supposée à valeurs complexes.
f px ` tq ´ f pxq
5. Soit x P R. Montrer que la fonction g : t ÞÑ se prolonge en 0 en une fonction de classe C 1 sur
sin 2t
` ˘

r´π, πs.
6. En déduire que lim lim |SN,M pxq ´ f pxq| “ 0, et conclure.
MÑ´8 N Ñ`8

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