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Lycée Louis-Le-Grand, Paris Samedi 25/09/2021

MPSI 4 – Mathématiques
A. Troesch

Devoir Surveillé no 1 (3h)

La présentation, la lisibilité, l’orthographe, la qualité de la rédaction, la clarté, la précision et la concision des raison-
nements entreront pour une part importante dans l’appréciation des copies.
Les candidats sont invités à encadrer dans la mesure du possible les résultats de leurs calculs.
L’usage de tout document et de tout matériel électronique est interdit. Notamment, les téléphones portables doivent
être éteints et rangés.

Exercice 1 –
1. Résoudre dans R l’équation cosp2xq “ sinp3xq
2. Résoudre dans R l’équation cosp3xq ` cospxq “ sinp4xq ` sinp2xq (on se ramènera à l’équation précédente)

Problème 1 – Estimation de la complexité du tri fusion

Rappels et notations
‚ La partie entière d’un réel x est l’unique entier, noté txu, tel que

txu ď x ă txu ` 1.

Ainsi, c’est le plus grand des entiers inférieurs ou égaux à x.


‚ La partie entière par excès de x est l’unique entier, noté rxs, tel que

rxs ´ 1 ă x ď rxs.

Ainsi, c’est le plus petit des entiers supérieurs ou égaux à x.


‚ Lorsque b ą 0, et c P R, la puissance bc est définie par bc “ ec lnpbq . On admettra sans preuve que les règles
usuelles bien connues sur les puissances restent valides pour des exposants réels quelconques. On admettra
également que cette définition coïncide avec la définition usuelle par itération du produit de b par lui-même
lorsque c est un entier.
‚ Pour réel b ą 1, on définit le logarithme en base b par :
lnpxq
@x P R˚` , logb pxq “ .
lnpbq

‚ Soit pun q et´ pvn¯q deux suites strictement positives. On dit que pun q est dominée par pvn q, et on note un “ Opvn q,
un
si la suite vn est majorée, donc s’il existe un réel M ą 0 tel que

@n P N, un ď M vn .

Si pun q n’est définie qu’à partir d’un certain rang n0 , l’inégalité précédente n’est bien entendu requise qu’à partir
de ce rang.

Problématique
Un algorithme de type « diviser pour régner » est un algorithme récursif ramenant la résolution d’un problème de taille
n à la résolution d’un ou plusieurs problèmes de taille nb (à ˘1 près pour avoir un entier). Ainsi, la complexité d’un
tel algorithme (i.e. une quantité proportionnelle au temps d’exécution) vérifiera une relation du type :
´Y n ]¯ ´Q n U¯
@n ě 2, T pnq “ αT ` βT ` un , (1)
b b
initialisée par la donnée de T p0q et T p1q, vérifiant T p0q ą 0 et T p1q ą 0, et pour tout n ě 2, un ą 0. Dans cette
formule, b est un certain entier supérieur ou égal à 2, et α et β sont des entiers naturels tels que α ` β ě 1. Le
problème initial a été ramené à α ` β problèmes de taille peu près nb (plus précisément les deux entiers entourant cette
valeur, ou la valeur précise de nb lorsque celle-ci est entière). Ainsi, on doit compter le temps d’exécution de chacun

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de ces sous-problèmes, ainsi que le temps du traitement qui permet de reconstituer la solution du problème de taille n
à partir des solutions des sous-problèmes (c’est le rôle de la suite pun q).
Dans tout le problème, on se donne une suite T vérifiant les conditions ci-dessus.
Le but du problème est d’étudier le comportement asymptotique de T , c’est-à-dire d’estimer l’ordre de grandeur de T
(ou au moins d’en trouber un majorant). Cette étude permet notamment de prévoir l’effet sur T de l’augmentation de
la taille données. Par exemple, si T pnq a le même ordre de grandeur que n (on dit que T est linéaire), doubler n aura
pour effet de doubler T pnq. Si T a le même ordre de grandeur que n2 (on dit que T est quadratique), doubler n aura
pour effet de multiplier T par 4.
Dans la situation décrite, le comportement dépend fortement de l’ordre de grandeur de un . On se placera dans tout le
problème dans une situation particulière qu’on explicite ci-dessous. Le même type de techniques permet d’obtenir un
résultat plus général que celui qu’on montrera, distinguant trois grands cas pour les conditions à poser sur pun q. C’est
un résultat classique d’informatique théorique.

On note dans tout le problème a “ α ` β et γ “ logb paq. Par ailleurs, on note, pour tout n P N, ℓpnq “ rlogb pnqs.
On suppose dans tout le problème que un “ Opnγ q

Questions préliminaires

1. Montrer que pour tout x P R˚` , blogb pxq “ x.


Ainsi, on a en particulier bγ “ a.
2. Montrer que pour tout n P N, T pnq ą 0.

Partie I – Majoration de T pnq


D’après l’hypothèse faire sur pun q, on peut se donner, dans toute la suite du problème, un réel strictement positif M
tel que
@n ě 2, un ď M nγ .
ℓpnq
1. Montrer lim “ 1.
nÑ`8 logb pnq
2. Montrer que si n est un entier strictement positif,
QnU n´1
ď1` .
b b
´Q n U¯
3. Montrer que pour tout n ě b, ℓ “ ℓpnq ´ 1
b
4. On note, pour tout k P N,
k ˆ ˙
ź b´1
P pkq “ 1` i .
i“1
b
(a) Montrer que pour tout x P R˚` , lnp1 ` xq ď x.
k
ÿ b´1
(b) En déduire que pour tout k P N, lnpP pkqq ď , puis en déduire que pP pkqq est majorée.
i“1
bi
5. On note, pour n P N˚ , Qn “ P pℓpnq ´ 1q.
ˆ ˙
b´1
Montrer que pour tout n ě b, 1 ` Qr n s ď Qn .
n b
ˆ ˙
T pnq
6. On définit K “ max γ ´ M pℓpnq ´ 1q . En raisonnant par récurrence forte, montrer que pour tout
nPv1,b´1w nγ Qn
n P N˚ ,
T pnq
ď Qγn pK ` M pℓpnq ´ 1qq

On fera attention à bien comprendre quelles valeurs de n il est important de faire entrer dans l’initialisation.
7. En déduire que T pnq “ Opnγ logb pnqq puis T pnq “ Opnγ lnpnqq.
Avec des hypothèses un peu plus fortes sur un , on peut avoir des résultats plus précis (obtenir également une mino-
ration). Les techniques sont sensiblement les mêmes, et il ne serait pas d’un grand intérêt de les développer ici. Nous
nous contenterons donc de cette majoration.

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Partie II – Exemples

1. L’algorithme d’exponentiation rapide.


Cet algorithme a pour but de calculer de façon efficace xn , pour un réel x fixé, et un entier n P N. Il se déroule
de la façon suivante :
‚ si n “ 0, l’algorithme retourne 1
‚ Si n ą 0, on ramène le calcul de xn au calcul de p “ xt 2 u (i.e. on relance l’algorithme avec cette nouvelle
n

valeur de l’exposant). On retrouve alors le résultat attendu en remarquant que xn “ p2 si n est pair, et
xn “ p2 ˆ x si n est impair.
(a) Montrer que cet algorithme permet de calculer xn pour toute valeur de n P N.
(b) En supposant que T pnq compte le nombre d’opérations nécessaires pour calculer xn (on compte une affec-
tation et un test de comparaison comme une opération), montrer que pour tout n P N
´Y n ]¯
T pnq “ T ` un ,
2
où pun q est une suite majorée (suivant la façon d’écrire les instructions, on peut aboutir à des expressions
différentes de un , donc à un majorant différent).
(c) En déduire que T pnq “ Oplnpnqq.
(d) Comparer, pour des grandes valeurs de n, cet algorithme à l’algorithme naïf consistant à multiplier n fois
successivement par x une variable initialisée à 1.
2. Le tri fusion
Le tri fusion est un algorithme permettant de trier une liste L de réels (ou tous autres objets qu’on sait comparer
entre eux). Il se déroule de la façon suivante :
‚ Si L est de longueur 1, elle est toute triée, et on ne fait rien.
‚ Si L est de longueur n ě 2, on coupe L en deux sous-listes de longueur n2 et n2 . On relance l’algorithme
X \ P T

sur ces sous-listes. En supposant qu’il aboutisse (c’est le cas car la longueur des listes traitées diminue
strictement au fil des appels récursifs), on dispose donc de deux sous-listes triées.
‚ On fusionne ces deux listes triées de sorte à obtenir la liste initiale triée.
Montrer qu’en effectuant la fusion des deux sous-listes de façon convenable (qu’on expliquera), le nombre T pnq
d’opérations nécessaires pour trier une liste de longueur n par le tri fusion vérifie :

T pnq “ Opn lnpnqq.

Problème 2 – Existence de nombres transcendants

Le but de ce problème est de montrer l’existence de nombres transcendants, et même d’un grand nombre de nombres
transcendants, par des considérations sur les cardinaux.

Définitions et rappels
‚ Soit x P R. On dit que x est un nombre algébrique s’il existe un polynôme P non nul, à coefficients entiers tel
que P pxq “ 0 (i.e. x est racine de P ). On note A l’ensemble des nombres algébriques.
‚ On dit qu’un réel x est transcendant s’il n’est pas algébrique.
‚ On dit que deux ensembles A et B ont même cardinal s’il existe une bijection f : A Ñ B.
‚ On dit qu’en ensemble A est dénombrable s’il est de même cardinal que N.
‚ On dit qu’un ensemble A est au plus dénombrable s’il est fini ou dénombrable.
‚ On admettra qu’un polynôme de degré n admet au plus n racines. C’est un résultat élémentaire qu’on aura
l’occasion de démontrer en cours ultérieurement.
‚ On pourra utiliser sans le redémontrer que N2 est dénombrable (nous avons en effet exhibé lors d’un exemple
du cours une bijection entre N et N2 ).
‚ On rappelle la propriété fondamentale de N : tout sous-ensemble non vide et majoré de N admet un plus grand
élément. De façon équivalente, tout sous-ensemble non vide de N (qui est alors nécessairement minoré) admet
un plus petit élément.
‚ On admet une propriété déjà évoquée en cours : tout réel x admet un unique développement décimal propre,
c’est-à-dire ne terminant pas par une succession infinie de 9.
‚ À aucun moment on ne se posera de question relative à l’axiome du choix.

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Partie I – Ensembles au plus dénombrables

1. Soit A un ensemble. On suppose qu’il existe une fonction injective f : A Ñ N. On suppose de plus que A n’est
pas un ensemble fini.
(a) Montrer que le sous-ensemble f pAq de N n’est pas borné.
(b) On définit g : N Ñ f pAq par récurrence forte :
‚ gp0q “ minpf pAqq
‚ pour n P N, si gp0q, . . . , gpnq sont construits,

gpn ` 1q “ minpf pAqzgpv0, nwq.

Justifier la bonne définition de g (i.e. que cette construction permet de définir gpnq pour toute valeur de n).
(c) Montrer que g est injective.
(d) Montrer que g est une bijection de N sur f pAq.
(e) En déduire que A est dénombrable.
2. Montrer que si A ‰ ∅, A est au plus dénombrable si et seulement s’il existe une surjection f : N Ñ A.
3. Montrer que si A et B sont au plus dénombrables, alors A ˆ B est au plus dénombrable.
Indication : on pourra dans un premier temps construire une surjection de N2 sur A ˆ B ; on justifiera soigneu-
sement la surjectivité.
ď au plus dénombrable, et pAi qiPI une famille d’ensembles eux-mêmes au plus
4. Soit I un ensemble d’indices
dénombrables. Montrer que Ai est au plus dénombrable.
iPI
ď
Indication : on pourra construire une surjection de I ˆ N dans Ai . Là encore, on justifiera soigneusement la
iPI
surectivité de l’application ainsi construite.

Partie II – L’ensemble des réels n’est pas dénombrable


Nous montrons dans cette partie la propriété annoncée dans son titre. On raisonne par l’absurde, en supposant que R
est dénombrable. On dispose donc d’une bijection f : N Ñ R.
1. Montrer qu’on peut construire un nombre réel x tel que pour tout n P N, le n ` 1-ième chiffre après la virgule
de x dans son développement propre est distinct de celui de f pnq.
2. En déduire que x R f pNq.
3. En déduire que R n’est pas dénombrable.

Partie III – Il existe beaucoup de nombres transcendants

1. Montrer que les nombres rationnels sont algébriques.


?
2. Pour n P N, n est-il algébrique ?
3. On montre dans cette question que A (l’ensemble des nombres algébriques) est dénombrable. On note Zrxs
l’ensemble des fonctions polynomiales à coefficients entiers, et Zn rxs l’ensemble des fonctions polynomiales de
degré inférieur ou égal à n, à coefficients entiers, et pour un polynôme P , on note RacpP q l’ensemble de ses
racines.
(a) Montrer que pour tout n P N, Zn rxs est dénombrable.
(b) En déduire que Zrxs est dénombrable, puis que A est dénombrable.
4. Montrer qu’il existe au moins un nombre transcendant.
˚
5. Montrer que l’ensemble T des nombres transcendants a le même cardinal que R.
Liouville est le premier à avoir montré l’existence d’un nombre transcendant (avant les travaux de Cantor liés aux
cardinaux), en en construisant un explicitement. Peu après, Hermite montre la transcendance de e, puis Lindemann
montre celle de π (comme cas particulier d’un résultat plus général). Ce dernier résultat résout un problème plus que
millénaire, en montrant l’impossibilité de la quadrature du cercle. Le théorème de Gelfond-Schneider
?
(1934) permet de
construire explicitement un grand nombre de nombres transcendants (par exemple 2 2 , appelé constante de Gelfond-
Schneider).

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