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MORNEX
Le problème majeur est que les recommandations changent tout le temps (très évolutif), notamment
concernant les outils de sevrage (la position vis-à-vis de la cigarette électronique est modifiée tous les 6
mois…), conseil minimal au patient, etc…
Piece annexe Lutte contre le tabagisme - Ministère de la Santé et de la Prévention (sante.gouv.fr)
I) Introduction
Le tabac est responsable de nombreux décès dans le monde. On estime qu’au XXème siècle, 100 millions de
décès seraient dus au tabac, et 1 milliard au XXIème siècle. Voici une comparaison avec différentes causes de décès
dans le monde en millions de morts par siècle :
➢ Que risque-t-elle ?
Elle risque de mourir. En effet, des études comparant l’espérance de vie entre des populations fumeuses
et non fumeuses montrent qu’il existe une différence d’EDV de 11 ans pour les femmes et 12 ans pour les
hommes entre ces deux populations. Les graphiques suivants comparent les probabilités de survie d’hommes et
de femmes fumeurs à celles d’hommes et de femmes n’ayant jamais fumé.
La plupart des patients fument 1 paquet/jour.
On perd 11 min de notre vie par cigarettes que l’on fume.
➢ Pourquoi fume-t-elle ?
Tout se passe dans le cerveau. La nicotine
arrive au niveau d’une zone appelée l’habenula (au-
dessus du tronc cérébral). Ensuite, au niveau du
nucleus accumbens où se situent les synapses des
neurones de l’habenula, des récepteurs
acétylcholinergiques (à la nicotine) permettent la
libération de dopamine dans la synapse. Cette
dopamine active alors le circuit de la récompense. Le
cerveau est bien quand il baigne dans la dopamine.
C’est un phénomène extrêmement utile pour la
cohésion sociale, mis en jeu par plusieurs procédés.
On a besoin de ce circuit de la récompense et on a
besoin de l’entretenir. Le circuit de récompense
utilisé est le même pour les opioïdes, le cannabis, les
amphétamines et la cocaïne : toutes ces substances Cependant les différentes substances ont un
mode de fonctionnement différents vis-à-vis de la
induisent la libération de dopamine dans la synapse.
synapse.
Beaucoup de recherches sont effectuées à ce niveau, si bien qu’un jour, on arrivera sûrement à produire des
médicaments contre l’addiction à la cocaïne ou au cannabis qui seront également efficaces contre la cigarette.
Une fois que le circuit de la récompense est activé, l’individu devient dépendant à la nicotine. Ensuite, cela
se modifie : la dépendance à la nicotine devient une dépendance à la cigarette. Suite au renforcement positif de
l’activation du circuit de la récompense et du renforcement négatif du syndrome de sevrage (qui rend l’individu
nerveux, agressif…), on a un phénomène comportemental d’anticipation qui s’établit, qui transfert la dépendance
de la nicotine à la cigarette : depuis le moment ou l’individu commence à ouvrir son paquet, le circuit de la
récompense est fortement activé. Cette activation se poursuit jusqu’au moment où il allume sa cigarette : le circuit
de la récompense est alors suractivé. En réalité le circuit de la récompense est activé des dizaines de fois avant la
première bouffée. On appelle cela la dépendance comportementale par anticipation.
Chez la souris, dès la première bouffée de cigarette, il y a une dépendance à la nicotine qui commence. De même
chez l’homme, dès la première cigarette, le circuit de la récompense surmonte les effets désagréables de la fumée.
Dépendance nicotine (renforcement positif et renforcement négatif) + comportementale = dépendance
à la cigarette.
La dépendance à la nicotine représente seulement 10% des malades qui devraient arrêter de fumer, tandis
que la part comportementale représente 90%.
Ex : le circuit de la dépendance s’active dès que la personne rentre dans un tabac, allume son briquet…
2) Prise en charge
➢ Que devez-vous faire ?
On demande si elle a déjà envisagé d’arrêter de fumer, si elle veut qu’on prenne le temps d’en parler :
• Si elle dit non : on lui délivre un conseil d’arrêt (=conseil minimal), des informations sur les traitements,
on lui dit qu’on est disponible. On peut également proposer une réduction de la consommation dans un
objectif d’arrêt. Le professeur recommande de mentionner sur l’ordonnance « arrêtez de fumer » même
si tous les professionnels de santé ne sont pas d’accord. Il est possible de mettre sur une ordonnance des
règles hygiéno-diététiques.
Conseil d’arrêt : Tous les professionnels de santé doivent conseiller à chaque fumeur d’arrêter de fumer,
quelle que soit la forme du tabac utilisé, et lui proposer des conseils et une assistance pour arrêter.
Le coût est un élément important : il recommande de faire faire le calcul au malade pour lui faire prendre
conscience du prix.
Le score obtenu permet de déterminer une valeur pronostique du sevrage (une personne ayant un score
de 4 aura plus de difficulté à arrêter de fumer qu’une personne avec un score de 1, une personne à 6 n’arrivera
pas à arrêter), et de calculer la taille des patchs (substituts nicotiniques) : plus une personne et dépendante, plus
les patchs doivent être grands.
On peut avoir des facteurs de comorbidité, la dépression et les co-dépendances comme l’alcool, ou le
cannabis. Il est important de les identifier. Il est rare qu’une personne soit mono-dépendante. Il est également
rare de n’être dépendant à rien du tout. ¼ des fumeurs sont consommateurs de cannabis.
On doit demander ce que la personne attend de l’arrêt du tabac, quelles sont ses motivations, ses
craintes (prendre du poids par exemple). On essaye d’évaluer son degré de motivation pour voir l’effort à mettre
dans son arrêt du tabac. Il y a une interaction entre le soignant et le patient. On essaye de trouver des leviers/
outils pour renforcer sa volonté d’arrêter de fumer, appuyer sur les intérêts que cela va engendrer, notamment
sur le plan financier : on peut par exemple demander au patient de calculer le coût de sa consommation de tabac
par an, puis lui proposer de mettre l’argent qu’il dépense habituellement en tabac dans une tirelire pour pouvoir
ensuite le dépenser autrement. Cela peut permettre de contrecarrer le circuit de la récompense.
• Les substituts nicotiniques : sous forme transdermique (patchs), sublinguale (petits comprimés qu’on fait
fondre sous la gencive), gommes à mâcher, inhalation (l’avantage c’est que les effets ressemblent à la
cigarette électronique), spray buccal.
La forme transdermique n’est cependant adaptée qu’aux patients pouvant se contenter d’une
concentration de nicotine stable dans la journée, elle n’est donc pas efficace pour les patients ayant une
consommation élevée.
Cependant tous les substituts ne sont pas remboursés ce qui peut être un frein pour le patient
• L’activité physique : elle réduit notamment le craving (= besoin impérieux) chez les femmes enceintes.
Craving : terme de dépendance (concerne surtout l’héroïne) où le besoin est tellement fort qu’on est prêt
à faire n’importe-quoi. Cependant ce n’est pas un phénomène fréquent pour le tabac.
• La vaccination n’est pour le moment pas possible, cela viendra un jour, des études sont en cours sur la
vaccination contre la dépendance à l’héroïne en désactivant les récepteurs acétylcholinergiques.
• Incentives : lorsque les patients sont récompensés, ils sont encouragés à arrêter de fumer. Mettre de
l’argent dans une tirelire à chaque fois et s’acheter quelque chose ensuite (jouets pour les enfants, voyage,
bijoux). Insister auprès d’eux pour qu’ils aillent s’acheter leur récompense lorsqu’ils ont assez d’argent.
Cela active le circuit de la récompense d’une autre façon qu’avec la cigarette. Il faut vaincre l’acalculie
sélective des fumeurs.
• Tel counseling : qui s’est avéré efficace
• Applications pour voir l’argent gagné, le nombre d’années de vie gagnées.
On peut aussi bien conseiller aux patients d’arrêter brutalement que d’arrêter progressivement. Il faut surtout
être d’accord avec le patient.
Technique pas recommandée : l’aversion (même si elle est efficace). On enferme le patient avec 2 paquets de
cigarettes et on lui dit de fumer tout ça, il ne refume pas après en général.
3) Formes apparentées
• Le cannabis : sa fumée a une toxicité bronchopulmonaire identique à la cigarette. Mode d’utilisation
différente. On considère qu’1 joint = 2,5 cigarettes en termes de toxicité.
• La chicha (hooka) : 1 séance correspond à 10 cigarettes (consommation extraordinaire)
• Le snus (tabac à chiquer) : absorption buccale de nicotine, peu utilisé en France grande dépendance,
donne des cancers du maxillaire qui donnent souvent des métastases.
• Tabac chauffé : le tabac est cependant mal brulé, ce qui est aussi dangereux que la cigarette.
Etudes parues dans Cochrane : plutôt favorables à l’utilisation de la cigarette électronique pour le sevrage de
la cigarette.
Etudes dans le Lancet : plutôt contre la cigarette électronique.
La cigarette électronique peut donc être une aide à l’arrêt ou à la réduction de la consommation de tabac,
cependant. Des études ont démontré que le risque relatif d’arrêter la consommation du tabac est 2 fois plus
important avec l’utilisation des cigarettes électroniques par rapport aux substituts classiques.
Il faut considérer l’usage d’une cigarette électronique comme une aide pour arrêter de fumer. Il faut
indiquer au patient que l’objectif final est d’arrêter l’usage de la cigarette électronique à la fin du sevrage.
Ceux qui vapotent et fument en plus n’aide pas pour le sevrage. La cigarette électronique reste le meilleur
outil de sevrage.
Avec la cigarette électronique, l’absorption de la nicotine est buccale, il faut 15 minutes pour faire
augmenter la quantité de nicotine dans le sang, et ils n’atteignent pas au bout d’une heure la même
concentration qu’une cigarette.
Le problème de la cigarette électronique c’est que c’est attractif pour les jeunes, qui peuvent commencer
par la cigarette électronique et finir par consommer des cigarettes.
On assiste aujourd’hui à la production de nouveaux produits de cigarette électronique apparus aux Etats-
Unis : Ploom, Vaze, Juul (racheté par Altria un cigarettier), ou bien sels de nicotine contenu dans des pods (1
pods = 200 bouffées = 1 paquet de cigarettes).
cigarette (impact laryngé= throat hit). Il faut essayer plusieurs gouts pour trouver celui qui est satisfaisant. Le
parfum de tabac ne marche presque pas pour le sevrage.
Il faut recommander d’aller l’acheter chez un spécialiste en cigarettes électroniques, et moins chez le
buraliste ou pharmacien.
Cependant la cigarette électronique induit vraisemblablement une dépendance, et il est possible que cela
favorise le risque de récidive. Surtout si sa consommation est couplée avec la cigarette. Elle n’est pas vendue
comme un produit de sevrage. L’objectif de l’industrie de la cigarette électronique est de vendre et donc
d’entrainer une addiction. Ils veulent faire passer les gens d’une cigarette normale à une cigarette
électronique. Ils ont pour objectif de démocratiser le vapotage dans le monde. Il va avoir un transfert de
dépendance : d’une dépendance à la cigarette on passe à une dépendance à la cigarette électronique.
L’avantage est que c’est un investissement beaucoup moins cher qu’une consommation de cigarettes
classiques, et que ça ne peut vraisemblablement pas être plus dangereux.
Les effets secondaires possibles sont l’irritabilité due au sevrage, la prise de poids +++(4 – 10kg) et elle est
de perte quasiment impossible (plus de prise de poids chez les femmes), qui peut entraîner un diabète de type 2.
Mais malgré cela, l’effet du gain de survie induit par l’arrêt est conservé.
La prise de poids a deux inconvénients : elle est rarement perdue et elle aggrave le diabète.
➔ Revenons à notre patiente. Avec votre aide elle arrête de fumer. Un mois après, elle a fumé deux
cigarettes un soir.
Les avis sont partagés au sujet de l’arrêt brutal ou non, avec une date fixe ou non. Beaucoup de
pharmacologues considèrent que le mieux est de faire une alliance avec le malade : on fixe une date d’arrêt
total. D’autres estiment qu’il est mieux de laisser le malade arrêter progressivement en réduisant les doses.
III) Conclusion
FGSM2 Lyon-Est Item 73 : Addiction au tabac Page 9 sur 11
UE 10 – Item ECN – J-F. MORNEX
Le tabagisme ou dépendance à la cigarette est une maladie chronique, avec des rechutes, de mécanismes
complexes, peu curable, fréquente et répandue. C’est une maladie grave puisqu’elle impacte l’EDV. Elle est
responsable de 70 000 décès par ans en France, et de handicaps. Elle est entretenue par des intérêts
financiers. C’est une maladie peu curable mais qu’il faut soigner.