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Annales Médico-Psychologiques 173 (2015) 643–648

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Mémoire

« Névrose » et « Psychose » : quelles définitions pour la psychiatrie


contemporaine ?
‘‘Neurosis’’ and ‘‘psychosis’’: What definitions for contemporary psychiatry?

Yann Auxéméry
Service médical de psychologie, clinique appliquée à l’aéronautique, hôpital d’instruction des Armées Percy, 101, avenue Henri-Barbusse, 92140 Clamart,
France

I N F O A R T I C L E R É S U M É

Historique de l’article : Les noms communs de « psychose » et de « névrose » ont été transmis par des générations de praticiens
Reçu le 22 août 2014 pour rester d’un usage habituel dans les services de psychiatrie clinique. Mais comment ces mots dont le
Accepté le 4 décembre 2014 signifié moderne débute avec Freud auraient-ils pu rester concordants jusqu’à notre clinique
Disponible sur Internet le 18 avril 2015
contemporaine ? Quels sont les arguments pour ou contre la pérennité de ces appellations ? Après
un bref historique resituant les origines de ces termes de « névrose » et de « psychose », nous détaillons
Mots clés : l’analyse syntaxique et lexicale de leurs définitions rapportées par quatre ouvrages célèbres de notre
Définition
psychiatrie francophone (H. Ey, T. Lempérière et J. Guelfi, P. Juillet). La réflexion du psychiatre par rapport
Épistémologie
Freud Sigmund
à l’interrogation définitoire des « névroses » et des « psychoses » est concordante à la critique
Historique phénoménologique du diagnostic psychiatrique : ce que l’on appelle « névrose » et « psychose » traduit une
Névrose intuition clinique globale dont la caractérisation définitionnelle signifiée est difficile. Dans notre clinique
Nosologie: Psychose contemporaine, les termes de « névrose » et de « psychose » sont employés par des praticiens d’horizons et
de pratiques divers qui partagent, ou non, les mêmes a priori conceptuels : ce que le clinicien appelle
couramment « névrose » comme « psychose » est plutôt de l’ordre de la typologie diagnostique que du
modèle ou du concept.
ß 2015 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

A B S T R A C T

Keywords: Background. – We seek to establish whether there is a consensus definition of the terms ‘‘neurosis’’ and
Definition ‘‘psychosis’’ among contemporary writers of French language. How words whose modern meaning
Epistemology begins with Freud might have remained consistent to our contemporary clinic?
Freud Sigmund
Method. – A research methodology like critical review of the literature was not possible because of a too
Historic
small number of papers referenced with the keywords of ‘‘neurosis’’ or ‘‘psychosis’’, papers which offered
Neurosis
Nosology still more rarely explicit definition or implied terms neurosis and psychosis. We therefore opted for a
Psychosis methodology of analysis of lexical and syntactic definitions fields recorded within four famous works:
The Manuals by Henri Ey, Thérèse Lempérière and Julien Guelfi, and the Dictionary of Psychiatry by Pierre
Juillet.
Results. – Theoretical benchmarks used are not directly explained even if the lexical analysis discovers a
multitude of implicit conceptual bases. Parsing found that the terms ‘‘neurosis’’ and ‘‘psychosis’’ on the
one hand, and different conceptual or more generically the various notions bases referred to by the
authors on the other hand, are not connected by logical links explicit characterizing relations
involvement, cause or consequence, but remain joined or juxtaposed. In addition, the nature of the
relationship between the definition of ‘‘neurosis’’ and the ‘‘psychosis’’ is not obvious: the separators
served most consistent result from the subjectivity of the interview.
Discussions. – The reflection of the psychiatrist in relation to the definitional question of ‘‘neuroses’’ and
‘‘psychoses’’ is consistent with the phenomenological critique of psychiatric diagnosis: what is called

Adresse e-mail : yann.auxemery@hotmail.fr

http://dx.doi.org/10.1016/j.amp.2014.12.015
0003-4487/ß 2015 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
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‘‘neurosis’’ and ‘‘psychosis’’ reflects a clinical intuition whose definitional characterization is difficult. The
reference to the symptom, syndrome or disease, so diagnosis may be here surpassed by ‘‘category’’, ‘‘type’’
or ‘‘structure’’.
Conclusions. – While definitions of what is called ‘‘neurosis’’ and ‘‘psychosis’’ in the future could change
depending on the societal context in which they are expressed, it should be noted that since Freud clinical
impression of what the essence of ‘‘neurosis’’ or ‘‘psychosis’’ is passed from one generation to another
practitioner rather independently of these definitional possibilities. In our contemporary clinical terms
‘‘neurosis’’ and ‘‘psychosis’’ are used by practitioners of various backgrounds and practices that share or
not the same conceptual a priori: what the clinician commonly called ‘‘neurosis’’ as ‘‘psychosis’’ is more
an intuitive prototype than a model or a concept.
ß 2015 Elsevier Masson SAS. All rights reserved.

1. Introduction synthétique ou au contraire plus développée, mais très argumen-


tée. Peut-être ne peut-on tout simplement pas résumer en
Les noms communs de « psychose » et de « névrose » ont été quelques lignes des notions d’une telle complexité ? S’assujettir
transmis par des générations de praticiens pour rester d’un usage à proposer une définition synthétique de termes appelant des
habituel dans les services de psychiatrie clinique. Mais comment notions aussi complexes obligerait nécessairement à ne retenir que
ces mots dont le signifié moderne débute avec Freud auraient-ils des propositions génériques et/ou parcellaires, mais une telle
pu rester concordants jusqu’à notre clinique contemporaine ? définition, fût-elle réductrice, est souvent tout simplement
Quels sont les arguments pour ou contre la pérennité de ces absente, même implicitement. Pour dépasser ce silence éditorial,
appellations ? Après un bref historique resituant les origines de ces nous n’avons eu d’autre choix que de discuter les quelques
termes de « névrose » et de « psychose », nous détaillons l’analyse définitions consignées dans les manuels et dictionnaires de
syntaxique et lexicale de leurs définitions rapportées par quatre psychiatrie dont nous analyserons les champs lexicaux et
ouvrages célèbres de notre psychiatrie francophone. Puis nous syntaxiques avant de proposer une discussion transversale.
discuterons les bases conceptuelles définitoires implicites et
explicites qui permettraient peut-être de retenir à l’avenir des
définitions fiables et valides de ces notions de « névrose » et de 3. Exposés et critiques des définitions retenues par les manuels
« psychose ». de psychiatrie francophones contemporains

Nous évoquerons le point de vue de trois manuels de référence


2. L’histoire des mots de « névrose » et de « psychose » francophones abordés chronologiquement en fonction de l’ancien-
neté de leurs auteurs (Henri Ey, Thérèse Lempérière et Julien
Depuis leur naissance dans les lexiques anglophones (neurosis Guelfi) [2,5,7], avant de terminer par le Dictionnaire de Psychiatrie
1785 [15]) puis germanophones (psychose 1845 [3]), les termes de de Pierre Juillet [9].
« névrose » et de « psychose » ont été employés par une généalogie
d’auteurs dans des sens très génériques et très variés au point qu’il 3.1. Le « Manuel de Psychiatrie » des Docteurs H. Ey, P. Bernard et C.
paraı̂t impossible d’en systématiser les origines définitionnelles de Brisset
manière exhaustive. Si les mots de « psychose » et de « névrose »
étaient diversement usités par ses précurseurs et contemporains, Dans son célèbre ouvrage, Henri Ey organise le référencement
Freud affirmera le premier une ambition définitoire en fonction des « maladies mentales » en fonction de leur temporalité aiguë ou
d’une théorisation psychopathologique, même si une relecture chronique [2]. Au sein des premières sont référencées « les
attentive de l’œuvre freudienne découvre en fait l’absence de ‘réactions névrotiques aiguës’ (psychonévroses émotionnelles) »
définition simple, explicite et précise de ces termes [5]. Malgré définies dans le corps du texte comme des « réactions anxieuses
tout, les représentations de « névrose » et de « psychose » ont été déclenchées par un choc émotionnel ». Sans être vraiment
portées jusqu’aux cliniciens contemporains par plusieurs généra- conceptualisées, ces « réactions » sont ici dénommées
tions de psychiatres et de psychologues. Comment ces notions « psychoses », « névroses » et même « syndromes psycho-
réécrites par Freud ont-elles pu connaı̂tre un tel succès au point de somatiques », tous ces termes étant employés dans des sens
franchir le siècle d’existence pour rester employées par la apparemment très génériques sans réelles définitions de leurs
psychiatrie contemporaine ? Des définitions affirmées plus contours. En revanche, dans la partie de l’ouvrage s’intéressant aux
récentes ont-elles été proposées pour se situer dans notre « maladies mentales » chroniques, un chapitre intitulé « Les
modernité ? Si nous étions persuadés que cette question définitoire névroses (la personnalité névrotique) » est consacré aux généra-
était de nos jours largement écrite, ou plus modestement débattue, lités de ces « névroses » dont la définition est présentée comme
nous avons été étonnés devant le peu de travaux francophones opposée à celle des « psychoses », les deux étant réunies dans le
récents s’y étant intéressés spécifiquement et explicitement. champ médical sous la terminologie de « maladie » mais
Même si beaucoup d’ouvrages et d’auteurs font encore référence, différenciées par des références au « système de la réalité », à
globalement, à l’œuvre freudienne et à ses qualificatifs de l’inscription sociale et à l’intensité des troubles en termes de
« névrotique » et de « psychotique », les publications francophones déstructuration. Henri Ey définit les « névroses » d’après deux axes
des revues psychiatriques, psychanalytiques et psychologiques ne dynamiques que sont d’une part les « symptômes névrotiques »
référencent au cours de la dernière décennie qu’une vingtaine de rattachés à un mécanisme de défense contre l’angoisse avec la
textes par les mots-clefs de « névrose » ou de « psychose ». Une construction de bénéfices secondaires, et d’autre part le « caractère
méthodologie de recherche de type revue critique de la littérature névrotique du Moi » entendu comme la relation du sujet à autrui et
n’a donc pas été possible du fait d’un trop petit nombre d’articles à son « équilibre intérieur ». Si le diagnostic positif des névroses
référencés, articles qui n’offraient qu’encore plus rarement une (encore appelées « réactions névropathiques ») résulte de
définition explicite affirmée, définition que l’on aurait voulu l’« analyse sémiologique », leur diagnostic différentiel est en lien
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avec une « limite supérieure » et une « limite inférieure » : la de cette définition par la « signification » et la « compréhensibilité »
première n’est toutefois pas imperméable avec la normalité et la que le clinicien apporte au symptôme grâce à une logique
seconde apparaı̂t floue car l’auteur concède que le différentiel avec névrotique partagée avec le patient. Ce dernier critère est
la « psychose [est] parfois très difficile ». Si de telles continuités discutable car le passage à l’acte d’un patient délirant ou dissocié
sont envisageables, comment retenir la possibilité d’un diagnostic est souvent compréhensible, également, par l’analyse du processus
positif et différentiel précis, d’autant qu’aucun chapitre du manuel psychopathologique psychotique. Lempérière et Féline retiennent
ne traite de généralités sur les psychoses, psychoses reléguées aux une étiopathogénie multifactorielle qui intègre des facteurs
deux titres « délires chroniques » et « schizophrénie » où les biologiques, écologiques et psychodynamiques pour construire
signifiants « psychotique » et « psychose » n’apparaissent peu ou les tableaux cliniques des névroses d’angoisse, phobiques,
plus au profit de celui de « délire » ? hystériques et obsessionnelles où l’angoisse est respectivement
Les concepts explicitement utilisés par Henri Ey appartiennent flottante, déplacée sur un objet, le corps ou les contenus
à la tradition séméiologique française, à la notion de réaction et de psychiques. Sans qu’elle soit argumentée ou précisée, une
structuration, et à l’interprétation analytique : « Il est très difficile différence est établie entre des réactions transitoires se traduisant
dans cette description des ‘névroses en général’ de séparer en symptômes névrotiques passagers et les névroses structurées.
clairement le plan de la clinique usuelle et le plan des Enfin, le référencement des troubles psychotiques est divisé
interprétations analytiques car ces deux plans interfèrent d’emblée en sous-chapitres (psychose maniaco-dépressive, bouf-
constamment dans la compréhension sémiologique. » La « clinique fées délirantes, syndromes schizophréniques et syndromes déli-
usuelle » dont parle Henri Ey nous semble correspondre au ressenti rants chroniques), ce qui ne permet pas d’opposer strictement
phénoménologique qui convoque « l’existence pathologique », « névroses » et « psychoses » par des critères généraux.
tandis que les conceptions psychanalytiques sont reléguées non pas
au rang de vérités ou de causalités mais d’« interprétations » 3.3. La « Psychiatrie » des Docteurs J. Guelfi, P. Boyer, S. Consoli et
nécessaires au clinicien après son repérage clinique. Élément R. Olivier-Martin
notable à souligner, la référence typologique apparaı̂t par la
caractérisation des psychoses et des névroses comme « deux La définition du Manuel de psychiatrie de Guelfi est riche et
grandes formes pathologiques ». Enfin, cette définition n’est pas hiérarchisée, « il est de règle de définir les troubles névrotiques
simplement celle d’Henri Ey mais se veut le témoignage de l’usage comme : (i) des troubles mentaux (que leur expression soit
de son temps : « Telle est la définition un peu compliquée que l’on psychique, somatique ou comportementale) ; (ii) ne comportant
peut donner actuellement de la névrose en général après les aucune étiologie organique démontrable, dans l’état actuel de nos
vicissitudes historiques qu’a subies ce concept. » connaissances (ce qui n’exclut pas que des facteurs biologiques
divers puissent participer à leur genèse) ; (iii) ressentis par le sujet
3.2. Le manuel de « Psychiatrie de l’adulte » des docteurs T. Lempérière comme des phénomènes indésirables ou inacceptables, lui étant
et A. Féline étrangers et ne faisant pas partie intégrante de sa personnalité (de
tels troubles sont dits égo-dystoniques) ; (iv) ne perturbant pas ou
Le chapitre « Généralités sur les névroses » de l’ouvrage de perturbant modérément l’expérience de la réalité et n’altérant pas
Lempérière et de Féline retient que le terme de « névrose désigne fondamentalement le sentiment de l’identité » [7]. Pour les
aujourd’hui [des] maladies de la personnalité [qui] n’altèrent pas le auteurs, « une telle définition permet de distinguer les troubles
système de réalité, ce qui les différencie des psychoses [. . .] névrotiques des manifestations psychiatriques des affections
s’expriment par des symptômes reconnus par le patient comme organiques, des troubles de la personnalité et des troubles
pathologiques et motivant souvent une demande d’aide médicale psychotiques » lesquels « se distinguent schématiquement des
même si leur signification psychologique n’est pas toujours troubles névrotiques par l’existence d’une altération diffuse ou en
appréhendée [. . ., et] déterminent des troubles des conduites secteur du sens de la réalité et d’une perturbation variable du
sociales qui restent en général mineurs. » [12]. Les auteurs ajoutent sentiment de l’identité ».
que « les névroses se manifestent par des symptômes Débutant par un cadre conceptuel que l’on peut rattacher aux
‘compréhensibles’ : on peut les comprendre en fonction de habitudes praticiennes (« il est de règle de définir »), l’analyse
l’histoire du sujet et des évènements qui l’ont marquée ; ils lexicale permet de cerner l’ambition des auteurs qui proposent une
représentent un mode de défense contre l’angoisse liée à des définition associant des éléments étiopathogéniques et phéno-
conflits inconscients et réalisent une sorte de compromis ménologiques. Guelfi distingue à la manière d’un « schéma » quatre
(signification symbolique des symptômes) tendant à neutraliser grands cadres nosographiques (les troubles organiques, les
cette angoisse ». L’analyse lexicale établit que le cadre conceptuel troubles de la personnalité, la « névrose » et la « psychose »). Les
se réfère implicitement à une organisation structurelle nommée troubles « névrotiques » sont caractérisés d’après les quatre axes
« personnalité » dont le « système de réalité » permet de différencier définitionnels que sont une étiologie prédominante organique ou
« névrose » et « psychose » en fonction de sa préservation dans l’un, psychique, le niveau de preuve de ce choix en fonction de la
et de son altération dans l’autre. Le caractère définitoire égo- sensibilité des examens biologiques de routine, la conscience du
dystonique de la « névrose » est nuancé par le fait que les trouble par le sujet, et les notions d’identité intérieure et de réalité
symptômes entendus par le patient comme tels peuvent être du monde extérieur (symptômes éventuels de déréalisation et de
cependant déniés en tant qu’origine psychogène, et alors que dépersonnalisation). De tels choix définitoires sont bien sûr
l’inscription sociale reste correcte. Les auteurs avancent secon- critiquables car ramenés à la simplification d’un modèle dualiste
dairement une définition psychopathologique en affirmant que les corps/âme (ou cerveau/appareil psychique) avec pour censeurs les
symptômes sont compréhensibles d’après des références freu- examens paracliniques alors que les recherches biologiques et de
diennes convoquant l’« histoire du sujet », les « conflits neuroimagerie rendent plus ténue chaque jour cette césure. Les
inconscients » et un « compromis [entre désir(s) et défense(s)] » déterminants étiologiques sont présents par cette notion de
permettant la diminution de l’« angoisse ». Le symptôme négativité d’étiologie organique démontrable, notion temporelle
névrotique est non pas une conséquence de la « névrose », mais laissant entrevoir la possibilité d’une future définition intégrant
plus simplement une « manifestation » qui non pas est ou doit, mais des déterminants neurobiologiques. Par contre, absence notoire, il
« peut » être comprise comme une « représentation » d’un « mode est fait silence de conceptions psychopathologiques. D’autre part,
de défense contre l’angoisse ». L’interprétation est partie intégrante s’il est vrai que la conscience du trouble ou l’anosognosie est une
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donnée importante, celle-ci n’est ni pathognomonique ni man- emprunts aux lexiques de la mesure et du relatif méritent d’être
ichéenne de la « névrose » ou de la « psychose », les croyances listés : « formes les plus typiques [. . .] moins graves [. . .]
partielles des délires schizophréniques les plus bizarres ou les relativement [. . .] une certaine [. . .] plus [. . .] moins accentuées
critiques les plus négligées des troubles « névrotiques » les plus [. . .] volontiers [. . .] davantage [. . .] fréquente [. . .] plus ou moins
invalidants étant le quotidien de la consultation. Enfin, les importante. » Le vocabulaire traduit les éléments cliniques
symptômes de déréalisation et de dépersonnalisation sont présents inconstants, variables et d’intensité diverse qui peuvent être
autant dans la schizophrénie qu’à l’acmé des angoisses émaillant tout retrouvés dans les « névroses », caractérisant leur présentation
trouble anxieux « névrotique », même si leurs caractéristiques en sont « plastique » et « réversible ». Élément très original de cette
différentes. Le différentiel entre « psychose » et « névrose » est rapporté définition, la référence à la primauté de la psychothérapie sur la
aux termes de « réalité » et d’« identité » sans définition plus précise, pharmacopée est retenue, alors que paradoxalement aucune
plus argumentée et plus positive, ou même plus générale, de la notion mention psychopathologique n’est évoquée. Les termes lexicaux
de « psychose ». Les « troubles névrotiques » et « psychotiques » sont « vécu » en référence au patient « névrotique » ou « psychotique » de
globalement opposés d’après les notions phénoménologiques de même que les signifiants « contact » et « impression générale »
« phénomènes », d’« expérience de la réalité » et de « sentiment de intégrés dans la définition des « psychoses » sont empruntés au
l’identité », même si les signifiants utilisés, « schématiquement », vocabulaire phénoménologique. Enfin le différentiel des
« modérément », « pas fondamentalement », « diffuse » et « variable » « névroses » et des « psychoses » apparaı̂t essentiellement basé
confinent à la mesure et traduisent finalement toute la difficulté sur l’analyse ou la perception de l’intensité des symptômes, de leur
d’une délinéation stricte des notions de « névrose » et de caractère égosyntonique ou dystonique, de leur réversibilité ou de
« psychose », au plan lexical tout du moins. leur constance, et de leur retentissement sur l’inscription sociale.

3.4. Le Dictionnaire de Psychiatrie de P. Juillet 4. Discussion des possibilités définitoires des termes de
« névrose » et de « psychose » dans la psychiatrie contemporaine
Le Dictionnaire de psychiatrie de Pierre Juillet offre deux
définitions très nuancées de la « névrose » et de la « psychose », 4.1. Des bases conceptuelles définitoires implicites diverses et
témoignant de la clinique de terrain : « Essentiellement par rapport associées
aux psychoses, les névroses comportent, dans leurs formes les plus
typiques : des symptômes répétitifs mais moins ‘graves’, relative- Comment tenter de comprendre les présupposés ou implicites
ment superficiels et plastiques ; une certaine conscience de l’état conceptuels qui ont fait naı̂tre les définitions analysées dans ce
morbide, vécu comme une enclave au moins gênante, contre travail, les débats scientifiques auxquels elles s’indexent, les
laquelle le sujet tend à lutter sans résultat ; l’absence de convictions éthiques qui les alimentent, voire les idées politiques
désorganisation de la personnalité, avec des attitudes plus qu’elles servent ? Comment mettre en évidence leurs liens, leurs
pragmatiques, une adaptation sociale relativement bonne sauf oppositions, interroger leurs distances, leurs rapprochements,
dans les formes majeures et invalidantes, ainsi que des altérations leurs antinomies, leur constance, leurs logiques de construction,
du comportement moins accentuées mais s’accompagnant volon- voire leurs silences ? Il nous est apparu bien difficile de répondre
tiers de doute et d’indécision ; une évolution davantage réversible, avec certitude tellement les a priori conceptuels restent implicites,
facilitée par une fréquente demande de recours médical ; une voire absents de ces cadres définitoires, nous obligeant à une
réponse plus ou moins importante aux thérapeutiques non modeste analyse lexicale. Les définitions que nous avons étudiées
médicamenteuses, en particulier psychothérapiques [. . .] malgré ici ne nous paraissent pas directement opposables par des
les limites de tels critères, ce sont bien eux qui sont utilisés par la présupposés théoriques car elles sont établies d’après diverses
grande majorité des psychiatres » [9]. Le champ des psychoses est bases conceptuelles implicites souvent associées entre elles et
différent : « Formant une opposition pertinente, au sens des intéressant les notions générales d’étiopathogénie [7], de noso-
linguistes, avec les névroses, les aspects typiques des psychoses graphie [7], de typologie [9], de structure [2,12], de séméiologie [2],
comportent : une symptomatologie majeure, caractéristique s’il de réaction [12], de clinique [9,12], de phénoménologie [2,7] et
s’agit par exemple d’idées délirantes ou d’hallucinations ; une d’anthropologie [7,9,12]. Si aucune référence aux théories cogni-
altération du contact avec ce qu’il est convenu d’appeler la réalité ; tives et comportementales n’est présente, soulignons que ni Guelfi
une diminution ou une absence de conscience et de critique vis-à- ni Juillet n’évoquent de notion psychopathologique alors que Ey et
vis du vécu pathologique, avec croyance à son égard ; d’impor- Lempérière font clairement état de référentiels psychanalytiques
tantes altérations de la personne, fréquemment accompagnées de freudiens. L’analyse syntaxique retrouve que les termes de
perturbations de la relation au monde extérieur, en particulier des « névrose » et de « psychose », d’une part, et les différentes bases
conduites, avec parfois isolement ; une impression générale conceptuelles implicites ou plus génériquement les diverses
d’étrangeté des troubles ; une évolution le plus souvent notions auxquelles se réfèrent les auteurs, d’autre part, ne sont
réservée. » Juillet ajoute finalement que « certes, de tels critères pas associés par des liens logiques explicites caractérisant des
sont inconstants, voire controversés. Mais dans la pratique relations d’implication, de cause, de conséquence ou d’équiva-
quotidienne, ce sont bien à ces caractéristiques cliniques que fait lence. L’enchaı̂nement de propositions simplement corrélées laisse
appel la majorité des psychiatres ». Cette définition revêt penser qu’entre le terme à définir et les éléments potentiellement
directement un intérêt anthropologique car rendant compte des définitoires juxtaposés s’établit une relation tautologique. De
habitudes de son époque, sans autre volonté affichée de théorisa- surcroı̂t, la nature des liens entre la définition de la « névrose » et
tion. Juillet ne retient donc pas une définition purement théorique celle de la « psychose » n’est pas affirmée : si une différence se
qui aurait pu intégrer des déterminants étiopathogéniques, mais dévoile entre le cadre général des « névroses » qui sont
témoigne des termes de « névrose » et de « psychose » comme ils subordonnées à un socle commun et le champ des
sont utilisés quotidiennement en psychiatrie clinique, avec toutes « psychoses », lesquelles se déclinent d’emblée en entités
les nuances, et peut-être corrélativement les imprécisions qui y distinctes, la définition générale des « névroses » est souvent
sont attachées. Juillet définit d’emblée les « névroses » comme les présentée comme « opposée » à celle des « psychoses », sans que
« psychoses » par leur opposition mutuelle d’après leur caractère cette dernière soit en fait explicitée. Les éléments séparateurs
« typique » et une séparation linguistique que l’on suppose référée signifiés les plus constants d’une définition à l’autre résultent de la
au structuralisme. Pour la définition des « névroses », les multiples subjectivité de l’entretien clinique et associent le caractère
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égosynto- ou égo-dystonique, le lien à la réalité préservé ou altéré, pervers ou présentant une pathomimie, ne bénéficient pourtant
et la qualité de l’adaptation sociale. que de ce seul signifiant d’« inauthenticité ». Le même signifiant
Si elles ne sont pas superposables du fait d’éléments séméiologique correspond ici à plusieurs signifiés cliniques.
manquants, ou excédants, lorsque l’on prend l’une ou l’autre La référence au symptôme, au syndrome ou à la maladie, et
comme référentiel pour critiquer ses semblables, les citations donc au diagnostic, peut être dépassée par celle de « catégorie », de
discutées dans ce travail nous paraissent malgré tout présenter « type », voire de « structure », dont les signifiants caractérisent une
une cohérence d’ensemble : cette concordance globale explici- organisation ou expression globale d’« être au monde » par le
terait une existence typologique de ce que nous appelons patient ou d’« être au monde du patient » perçue par le clinicien.
« névrose » et « psychose ». Une autre caractéristique essentielle Lantéri-Laura a réalisé une synthèse critique de cette notion de
de ces définitions est leur référencement à l’actualité sociétale « structure », structure définissable selon Hjelmslev par « une entité
car les auteurs cités, au lieu de construire une définition autonome de dépendances internes » et selon Laborit comme
personnelle, préfèrent rester les rapporteurs de la clinique « l’ensemble des relations entre les éléments d’un ensemble » où le
de leur temps. Nous aborderons successivement ces deux tout ne se réduit pas à l’addition des éléments constitutifs
développements. [10]. Différentes écoles de pensées peuvent être qualifiées de
« structuralistes » comme l’École de Berlin qui développa la théorie
de la forme (Gestalttheorie), la linguistique structurale initiée par
4.2. Une typologie de la « névrose » et de la « psychose » selon un point Saussure, la neurologie globaliste et l’anthropologie sociale
de vue phénoménologique [11]. Au sein de la clinique psychiatrique, le concept de « structure
psychopathologique » s’est construit entre les deux guerres pour se
La terminologie phénoménologique s’applique à convoquer bipolariser ensuite entre la phénoménologie structurale référencée
l’« essence », l’« accès au vécu », l’« apparition du type », l’« ordre », à Minkowski et la psychanalyse structurelle développée par Lacan.
ou encore l’« être » dit « névrotique » ou « psychotique ». Mais les Les notions de « névrose » et de « psychose » échappent au relevé
théorisations de la « névrose » et de la « psychose » échappent à la séméiologique pour gagner d’emblée une forme globale : la
réduction phénoménologique : si des notions ou des méthodes « névrose » comme la « psychose » nous semblent être des
issues d’auteurs se référençant à la phénoménologie sont utiles typologies au sens de Minkowski [13]. Sans être le même signifié, le
pour éclairer leurs définitions, le clinicien phénoménologue ne se signifiant de « structure » a été commun à la phénoménologie et la
positionne pas selon ces présupposés standards. La réflexion du psychanalyse, rapprochant ces deux champs épistémologiques qui
psychiatre phénoménologue par rapport à l’interrogation défini- proposaient une dichotomie de base entre le continuum de la
toire théorique et clinique des « névroses » et des « psychoses » est normalité à la névrose d’une part, et la psychose d’autre part, tout
celle de sa critique générale du diagnostic psychiatrique [1]. Rümke en affirmant d’un côté comme de l’autre la possibilité des pluriels
et Minkowski avaient les premiers reconnu la pose du diagnostic ainsi formulés par Lantéri-Laura : « (normalité. . . structures
psychiatrique comme intuition rapide envisageant d’emblée le névrotiques) vs (structures psychotiques) » [10,11]. Offrant une
contexte clinique global du patient [14,16]. Cette impression très voix divergente ou adjacente, ou encore complémentaire, certains
difficile à traduire en mots a été communiquée par des expressions auteurs comme Follin, Chazaud et Pilon avaient réhabilité le terme
telles que le Praecox-Gefühl de Rümke ou l’Hysterie-Gefühl de Hass de « psychose hystérique » par la description de plusieurs cas
[8,17]. Comme l’avait pressentie les premiers cliniciens phéno- cliniques leur faisant conclure que « l’expérience clinique, loin de
ménologues avant que plusieurs études scientifiques ne valident nous obliger au dilemme hystérie ou psychose (schizophrénie),
cette hypothèse [6,18], la précocité quasi instantanée de certains nous a en effet plutôt conduits à nous poser la question d’une
diagnostics psychiatriques entraı̂ne, secondairement, la qualifica- troisième voie qui est celle de la reconnaissance d’états psycho-
tion de symptômes relevés subséquemment à l’intuition de départ. tiques hystériques, et qu’il est difficile de décrire autrement – au
Ce que l’on appelle diagnostic clinique en psychiatrie n’est parfois moins au niveau des phénomènes mêmes – que comme
qu’une tautologie en ce sens où ce diagnostic ne renvoie à rien psychotiques et hystériques » [4]. Si l’on avait pu s’attendre à
d’autre qu’à lui-même, à l’opposé d’un sens caché qui lui donnerait une théorisation continuiste argumentée soutenant la possibilité
une valeur étiopathogénique [20]. Si l’on croyait que la démarche de ces « psychoses hystériques », une telle hypothèse est éludée au
diagnostique psychiatrique était calquée sur le modèle médical profit d’une typologie clinique [4]. Nous constatons que ces notions
somaticien en s’établissant par inférence d’après le recueil typologiques de « névrose », de « psychose » et de « psychose
systématique de signes et de symptômes, lesquels seraient hystérique » n’ont pas été établies précisément d’après des
comparés aux entités nosologiques thésaurisées dans la mémoire caractéristiques séméiologiques ou étiopathogéniques, ce qui
du praticien, en réalité, les symptômes entendus comme une interroge, sans pour autant nier d’emblée, leur possible validité.
déviation quantitative d’une normale ne sont qu’une infime partie
des informations perçues par le clinicien au cours de l’entretien, 4.3. Vers une définition possible de la « névrose » et de la « psychose »
faisant dire à Tatossian : « C’est souvent le reste qui apporte les en termes chers à la psychiatrie contemporaine : fiabilité et validité
données les plus décisives, quoique pas toujours aisément diagnostiques
verbalisables dans les termes de la séméiologie » [19]. Ces
découvertes phénoménologiques sur la nature de la pose du Les références aux noms communs de « névrose » et de
diagnostic en psychiatrie sont paradigmatiques de la probléma- « psychose » comme les adjectifs « névrotiques » et « psychotiques »
tique définitoire de ce que l’on appelle « névrose » et « psychose », sont toujours largement utilisées par la psychiatrie clinique
termes qui traduisent une intuition clinique globale dont la contemporaine. Si nous sommes en accord avec les définitions
définition signifiante est difficile. Un praticien ne caractérisera-t-il de la « névrose » et de la « psychose » que nous avons discutées dans
pas tel élément clinique de « délirium » ou de « théâtralisme » car il ce travail et si nous partageons les points de vue des auteurs
avait déjà perçu une organisation « névrotique » alors qu’une phénoménologues cités, nous constatons que leurs conclusions ne
supposition « psychotique » aurait fait émerger les termes de sont que peu étayées par des études scientifiques et restent de
« délire » et de « maniérisme » ? Le signifié clinique apparaı̂t ici l’ordre de l’intuition, du ressenti, de l’expérience clinique. C’est
avant le signifiant théorique. Différemment, d’autres signifiés et peut-être là, dans, par, et finalement à cause de cette impression
impressions cliniques comme l’inauthenticité du contact, bien peu démontrée, voire peu démontrable en fonction des possibilités
différente que l’on ait à faire à un sujet histrionique, schizophrène, d’investigations neuroscientifiques actuelles, que les termes de
648 Y. Auxéméry / Annales Médico-Psychologiques 173 (2015) 643–648

« névrose » et de « psychose » ont souffert dans la nosographie « psychose » est davantage de l’ordre de la typologie diagnostique
psychiatrique anglo-saxonne contemporaine, laquelle a suivi les que du modèle ou du concept.
présupposés sociétaux de son époque qui prônent la nécessité du
précisable, du démontrable et du quantifiable. Les termes de
Déclaration d’intérêts
« névrose » et de « psychose » ont ainsi disparu des ouvrages de
psychiatrie anglo-saxons récents. Le clinicien peut légitimement
L’auteur déclare ne pas avoir de conflits d’intérêts en relation
s’interroger s’il est utile, voire s’il est possible, de définir
avec cet article.
précisément par des déterminants fiables et valides les intuitions
cliniques de « névrose » et de « psychose ». Si l’intérêt clinique d’une
telle volonté n’est pas évident, en revanche, dans un monde Références
marqué par la nécessité du chiffrage, du quantifiable et de la
[1] Azorin JM. Position du psychiatre phénoménologue par rapport aux névroses
formalisation, peut-être que la recherche clinique en psychiatrie et aux psychoses. Confrontations Psychiatriques 1996;37:197–218.
gagnerait à œuvrer dans le sens de définitions consensuelles. Des [2] Ey H, Bernard P, Brisset C. Manuel de psychiatrie. Paris: Masson; 2010 [Préface
éléments intuitifs qualifiables de « subjectifs » pourraient-ils faire J. Garrabé ; Avant-Propos J.D. Guelfi ; 1ère édition en 1960, 6e édition, 2010].
[3] Feuchtersleben E von. Lehrbuch der ärtzlichen Seelenkunde. Wi: Gerold; 1845.
partie de futurs critères utilisés afin de définir et de référencer [4] Follin S, Chazaud J, Pilon L. Cas cliniques de psychoses hystériques. Evol Psy
certains cadres ou entités nosographiques ? Le ressenti subjectif 1961;26:257–86.
peut être supposé supérieur aux théories que le clinicien donnera [5] Freud S. Œuvres complètes. Paris: PUF; 2009.
[6] Gauron EF, Dickinson JK. Diagnostic decision making in psychiatry: informa-
secondairement de son raisonnement logique ou plus simplement tion usage. Arch Gen Psychiatry 1966;14:629–40.
de ses réflexions. La fidélité et la validité de l’expérience clinique [7] Guelfi JD, Boyer P, Consoli S, Olivier-Martin R. Psychiatrie. Paris: PUF fonda-
subjective sont parfois meilleures que celles d’outils psychomé- mental; 2007[Préface P. Pichot ; 1re éd 1987, 8e éd 2002, 3e tirage 2007, 932 p].
[8] Haas JP. Bemerkungen zum sogenannten ‘‘Hysterie-Gefühl’’. Nervenartz
triques qui n’effacent pas les subjectivités individuelles, voire 1987;59:92–8.
majorent les interférences sociétales. Par exemple, dépassant [9] Juillet P. Dictionnaire de psychiatrie. Paris: PUF; 2000 [415 p].
largement le taux de psychoses constituées, un nombre très élevé [10] Lantéri-Laura G. Généalogie du structuralisme. Evol Psy 2000;65:477–97.
[11] Lantéri-Laura G. La notion de structure en psychiatrie. Ann Med Psychol
d’« expériences » psychotiques est quantifiable en population
2002;160:43–53.
générale par les échelles psychométriques. Faudrait-il voir ici une [12] Lempérière T, Féline A, Gutmann A, Adès J, Pilate C. Psychiatrie de l’adulte.
nouvelle épidémie de troubles psychiques ? Il convient d’y Paris: Masson; 1993 [1977, 12e tirage, 430 p].
[13] Minkowski E. Phénoménologie et analyse existentielle en psychopathologie.
apercevoir les impacts de nouvelles valeurs sociétales développant
Evol Psy 1949;14:382–405.
des outils qui se disent scientifiques, afin de recréer une clinique [14] Minkowski E. Voie d’accès aux analyses phénoménologiques et existentielles.
que l’on redouterait trop « subjective », pour finalement s’assurer, Ann Med Psychol 1957;113(II):833–44.
par la méthode scientifique, de la validité de cette dernière aux [15] Pichot P. Un siècle de psychiatrie. Paris: Dacosta Edit; 1983.
[16] Rümke HC. Die Bedeutung von Phänomenologie und Beschreibung in der
dépens des premiers. La fidélité et la validité d’une impression Psychiatrie. Z Psychother Med Psychol 1962;12:94–102.
clinique de forme sont sans doute supérieures à la somme de [17] Rümke HC. Die klinische Differenzierung innerhalb der Gruppe der
symptômes recueillis de manière inférentielle. En revanche, même Schizophrenien. In: Rümke HC, editor. Ein blühende Psychiatrie in Gefahr.
Berlin: Springer; 1967. p. 203–11.
si aucun travail scientifique ne permet à notre connaissance de le [18] Sandifer MG, Hordern A, Green LM. The psychiatric interview: the impact of
démontrer à l’heure actuelle, la validité de la reconnaissance d’un the first three minutes. Am J Psychiatry 1970;126:968–73.
mécanisme physiopathologique pourrait devenir supérieure à la [19] Tatossian A. Phénoménologie des psychoses. Paris: Masson; 1979.
[20] Tatossian A. La subjectivité. In: Widlöcher D, editor. Traité de psychopatho-
validité de la clinique subjective. Alors que la reconnaissance logie. Paris: PUF; 1998. p. 253–318.
clinique d’une impression de « névrose » ou de « psychose » ne
devrait pas globalement changer, la caractérisation par l’imagerie
Pour en savoir plus
cérébrale d’un processus schizophrénique ou d’un accident
conversif pourrait permettre d’objectiver la justesse de ce ressenti
Auxéméry Y. Discussion de l’association signifiante de psychose hystérique
clinique, de le préciser, voire de le corriger. comme problématisation de la terminologie psychiatrique classique de la
« névrose » et de la « psychose ». Ann Med Psychol 2014, sous presse.
5. Conclusions Auxéméry Y. Vers une possible évolution fiable et valide de la nosographie
psychiatrique moderne ? Analyse critique des origines du DSM-III aux hypothèses
actuelles. L’Evolution Psychiatrique 2014;79:79-94.
Si les définitions de ce que l’on appelle « névrose » et « psychose » Auxéméry Y. De la subjectivité sociétale d’un déni de la subjectivité individuelle
pourraient à l’avenir se modifier en fonction du cadre sociétal dans à la perception subjective des diagnostics en pratique clinique : la possibilité
lequel elles s’expriment, il convient de remarquer que depuis Freud partielle d’un diagnostic standardisé de cette perception. L’Evolution
Psychiatrique, Sous presse pour 2015.
l’impression clinique de ce qu’est l’essence de la « névrose » ou de la
Auxéméry Y. Vers une nouvelle définition de la conversion hystérique. Ann Med
« psychose » s’est transmise d’une génération de praticien à l’autre Psychol 2014,172:468-73.
assez indépendamment de ces possibilités définitoires. Dans notre Auxéméry Y. Différencier les expériences psychotiques non pathologiques de
clinique contemporaine, les termes de « névrose » et de « psychose » prodromes psychotiques schizophréniques. Un enjeu clinique et thérapeutique.
Ann Med Psychol 2011;169:564-9.
sont employés par des praticiens d’horizons et de pratiques
Widakowich C, Van Wettere L, Jurysta F, Linkowski P, Hubain P. L’approche
diverses qui partagent, ou non, les mêmes a priori conceptuels : ce dimensionnelle versus l’approche catégorielle dans le diagnostic psychiatrique :
que le clinicien appelle couramment « névrose » comme aspects historiques et épistémologiques. Ann Med Psychol 2013;171:300-5.

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