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Séance 1– Année universitaire 2021/22

PST002 Introduction à la psychologie clinique

Séance 1
Présentation de la psychologie clinique

Présentation de la psychologie clinique :


a. Définitions
• La psychologie
• La psychologie clinique
b. Emergence de la psychologie clinique
c. L’objet d’étude de la psychologie clinique
d. Psychologie clinique et psychiatrie
e. Psychologie clinique et psychothérapie
f. Psychologie clinique et psychopathologie
g. Psychologie clinique et psychanalyse
h. Le psychanalyste et la psychanalyse

a. Définitions
La psychologie c’est le langage (logos) de l’esprit (psyché). Elle cherche à comprendre et à connaître
l'être humain, à expliquer le pourquoi et le comment de ses comportements, individuels ou en
groupe.
Daniel Lagache définit trois formes de psychologies :
• La relation JE/MOI-MEME : j'explore ma propre vie, j'essaye de me comprendre. Cette
psychologie est qualifiée « en première personne ».
• La relation JE/TU : je dialogue avec l'autre. Cette psychologie « en deuxième personne » est
la psychologie clinique.
• La relation JE/IL : psychologie expérimentale, « en troisième personne », qui consiste en
l'observation du comportement du sujet, sans relation interpersonnelle
On peut distinguer plusieurs spécificités qui étudient chacune un domaine précis :
• La psychologie génétique étudie l’individu dans son développement
• La psychologie différentielle étudie les différences entre les individus
• La psychologie expérimentale étudie le comportement en situation standardisée
en laboratoire
• La psychologie cognitive étudie les grandes fonctions du développement : la mémoire,
le langage, le raisonnement, les aptitudes intellectuelles …

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• La psychologie sociale étudie l’individu au sein des groupes (perspective sociologique).
• La psychologie clinique a pour objet l’individu en situation

La psychologie clinique
Le mot clinique vient du grec « Klinikos » qui veut dire qui visite les malades au lit. C’est une méthode
qui s'adresse d'abord à l'homme malade et d'abord malade dans son corps puis par extension à tout
individu dans une demande de soin et de compréhension.
Définition de Lagache (1949) :
La psychologie clinique est une discipline psychologique ayant pour but la connaissance approfondie
des cas individuels.
C'est Daniel Lagache qui en a donné la première définition en 1949 que nous trouvons dans le
vocabulaire de la psychologie d’Henri Piéron :
« Science de la conduite humaine fondée principalement sur l'observation et l'analyse approfondie
des cas individuels, aussi bien normaux que pathologiques et pouvant s'étendre à celle des groupes.
Concrète dans sa base, et complétant les méthodes expérimentales d’investigation, elle est
susceptible de fonder des généralisations valables. Une conception plus étroite la limite à une
psychologie appliquée au domaine médical. »

« Dans toutes les méthodes utilisées par la psychologie, cette méthode clinique est sans doute la plus
difficile à cerner. Les autres méthodes sont plus scientifiques comme la méthode expérimentale ou
encore celle des tests, dans ce cas l'objet est délimité, reproductible et généralisable. Par exemple, si
on veut étudier une technique d'apprentissage le protocole d'expérimentation sera reproduit autant
de fois qu’il est nécessaire pour maîtriser parfaitement la technique. Cette délimitation de l'objet est
impossible dans la méthode clinique puisqu'un trouble psychologique est toujours le résultat de
nombreuses variables imbriquées les unes dans les autres : la fragilité psychologique, l'histoire
psychologique, l'environnement pathogène et les facteurs qui déclenchent la pathologie.
L'expérimentation comme la reproduction est impossible avec la souffrance humaine puisque se pose
immédiatement des problèmes d'éthique, on ne créera jamais un trouble mental pour en cerner les
variables. »
Il s'agit d'une situation clinique, c'est-à-dire de la saisie singulière d'un individu « en situation » par
un autre individu. Chaque sujet est unique et aucun vécu n'est réductible à un autre.
« De la médecine, elle hérite une méthode - la clinique - et un objectif : diagnostiquer et guérir » (D.
Lagache). Mais là où le médecin palpait, auscultait, percutait et écoutait, le psychologue conduit des
entretiens à visée diagnostique et/ou thérapeutique, et pratique des tests, le cas échéant.
C'est le suisse Edouard Claparède qui le premier a utilisé le terme de psychologie clinique, qui devait
selon lui permettre de "transporter les ressources de la psychologie expérimentale au lit du malade
".
Cette psychologie clinique, avant de devenir une discipline autonome, s'est constituée très lentement
et surtout elle a trouvé ses racines dans un certain nombre de disciplines annexes.

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Jusque dans les années 60, les études de psychologie étaient communes à celle de philosophie et par
conséquent elles correspondaient davantage à une réflexion sur les grandes fonctions psychologiques
plutôt qu'à une formation professionnelle. Autrement dit, les thérapeutes étaient soit des psychiatres
soit des médecins spécialisés, et la psychanalyse était la seule véritable formation psychologique en
dehors de l'université. La psychologie clinique oscillait entre le médecin psychiatrique d'une part et
la philosophie d'autre part.
• La première de ces sources et surtout la plus fondamentale est la psychiatrie. Le père de la
psychiatrie française, Philippe Pinel est à l'origine de l'évolution des mentalités.
L'humanisation dans la psychiatrie s'est accompagnée d'une méthodologie différente et
surtout plus vigoureuse. On a commencé à faire des histoires de cas, à établir des dossiers
précis pour chaque malade et on a tenté également de faire des diagnostics de plus en plus
sophistiqués et d'établir une nosographie. L'attitude relationnelle se teinte de
compréhension et d'une bienveillance que l'on trouve aujourd'hui légitime à l'égard d'un être
qui souffre. Ces idées de Pinel vont trouver un prolongement théorique dans certains travaux
de la seconde moitié du XIX et en particulier de la psychanalyse naissante avec Charcot à la
ème

Salpêtrière, Bernheim à Nancy et Freud à Vienne


• La deuxième source est la psychologie générale et expérimentale : la méthode expérimentale
a permis à la psychologie de sortir de la tutelle psychologique et bien que cette méthode
expérimentale ne convienne pas à l'objet clinique, elle a obligé le clinicien à forger sa propre
méthode en affirmant son identité méthodologique. Face à la démarche expérimentale qui
décompose l'homme en variables et qui instaure la loi du général ou du reproductible, la
psychologie clinique va quant à elle privilégier le singulier, le subjectif et l'individuel, se
souciant dans un deuxième temps seulement de la généralisation. C'est une méthode qui va
approcher un homme total en situation concrète et va donc s’intéresser au vécu de cette
personne.
• La troisième source est la psychologie différentielle avec la méthode des tests. Elle constitue
également une aide pour le clinicien, par exemple pour apprécier les capacités intellectuelles
d'un sujet ou pour obtenir des éléments précis sur la personnalité. La rigueur méthodologique
de la méthode des tests renforce la validité du diagnostic.
La psychologie clinique va de ce fait privilégier le singulier, le subjectif et l'individuel.

b. Emergence de la psychologie clinique


Cette expression de psychologie clinique est utilisée pour la première fois en 1896 par Witmer
Lightner (1867-1956) psychologue américain.
Cette psychologie clinique était consacrée à l'éducation et surtout à la rééducation des retardés et
des anormaux. En 1907, Witmer présenta son journal « The psychological Clinic », dans lequel il publia
son article marquant « Clinical Psychology » qui se voulait un survol des opérations de sa clinique et
proposa une nouvelle profession indépendante de la médecine et de l’éducation qui s’appellerait
psychologie clinique.
En France, le terme est employé en 1897 par Valentin et Hartenberg qui fondent la « Revue de
psychologie clinique et thérapeutique » qui paraît jusqu’en 1901. Ces médecins à l’hôpital Sainte-
Anne à Paris se réclament de l’École de Nancy et, à ce titre, revendiquent leur filiation avec Bernheim
par opposition à Charcot et au courant de la Salpetrière. Alors que ces derniers considèrent que seuls

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les hystériques peuvent être hypnotisés, pour Bernheim la suggestion est un phénomène non
pathologique, « phénomène par lequel une idée pénètre dans le cerveau », qui relève de fonctions
normales, même si c'est une technique que l'on peut utiliser avec les malades. C'est dans cette lignée
que se situent Valentin et Hartenberg lorsqu’ils militent en faveur de la constitution d’une «
psychologie clinique du normal », estimant qu’elle doit s’intéresser autant au comportement normal
qu’à la pathologie.
La dimension thérapeutique est soulignée par le titre de la revue et révèle que Valentin et Hartenberg
ont une conception de la psychologie clinique, c’est-à-dire dans une relation thérapeute-patient,
comme l’indique l’étymologie du mot « clinique » d'une observation faite au lit du malade, dont la
finalité est de soulager la personne qui souffre. Elle s’oppose en cela au laboratoire. La psychologie
clinique est définie par Valentin et Hartenberg comme « l’étude de la singularité et de la totalité de
la personnalité considérée dans un contexte synthétique qui prend en compte l'histoire et l'entourage
de l'individu. »
On peut noter que les auteurs ne prennent pas du tout en compte les rapports de cette personnalité
avec le psychologue.
La psychologie clinique connaît un déclin rapide à partir de 1901 principalement dû à l’engouement
pour une science récente et prometteuse, la neurologie. La « Revue de psychologie clinique et
thérapeutique » cesse de paraître en 1901. S'ouvre alors une ère particulièrement stérile pour la
psychologie clinique en France, durant laquelle Pierre Janet demeure à peu près le seul à défendre la
clinique, jusqu’à la Seconde Guerre Mondiale et aux travaux de Daniel Lagache.
La psychologie clinique est attachée aux noms d’Edouard Claparède, Daniel Lagache et Juliette
Favez-Boutonnier (1903-1994), tous trois médecins, psychologues et philosophes, les deux derniers
étant aussi psychanalystes. Juliette Favez Boutonier crée le premier laboratoire de psychologie
clinique en France. En 1935, elle est nommée professeur de philosophie à Paris, où elle rencontre
Daniel Lagache. Tout comme lui, elle s'inscrit dans une perspective humaniste de la psychologie.
Elle met en évidence la dimension intersubjective de la relation entre le psychologue et son patient
et la dimension d'implication des deux interlocuteurs dans cette relation intersubjective. Elle préside
l'Association Française de Criminologie de sa création, en 1965, jusqu'en 1968.Elle fait de la
psychologie clinique une des sous disciplines de la psychologie. En 1968, elle créera le premier
certificat de maîtrise de psychologie clinique à la Sorbonne.

c. L’objet d’étude de la psychologie clinique


Le but de la psychologie clinique est de faire apparaître ce qu'il y a de plus typique chez un sujet
étudié et de le considérer comme une totalité en train de se conduire, en débat avec lui-même, avec
les autres et avec l'environnement. Autrement dit, la psychologie clinique va s'intéresser aux conflits
et à la manière dont il essaie de les résoudre, étudier son histoire et ses aspirations, ses projets, ses
aptitudes et ses capacités de changement. On peut dire que Lagache représente le jalon le plus
important dans l'évolution de la méthode clinique en France. Il était agrégé de philosophie et de
psychanalyse. C'est lui qui a enseigné pour la première fois la psychanalyse à la Sorbonne.

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Selon cet auteur, « L’objet clinique est complexe parce qu'il est global et unique. La méthode adaptée
à cet objet devra avant tout sauvegarder l'intégrité de la personne humaine. C’est cette personne
humaine qui est l’objet d’étude de la psychologie clinique. »
Le clinicien sort délibérément de la généralisation pour pénétrer dans la compréhension de la
situation concrète c'est-à-dire telle qu'elle est vécue par le sujet. Donc, le plus important n'est pas la
technique mais l'attitude du psychologue.
Attitude clinicienne :
Cette exploration va s'appuyer sur une attitude particulière, l'attitude clinique que Lagache définit
très précisément : « Avoir une attitude clinique c'est envisager la conduite dans sa perspective
propre, relever aussi fidèlement que possible la manière d'être et d'agir d'un être humain concret et
complet aux prises avec une situation, chercher à en établir le sens, la structure et la genèse, déceler
les conflits qui la motive et les démarches qui tendent à résoudre ces conflits. »
• Elle tend à limiter l'emploi des techniques normalisées qui ne fournissent que des résultats
quantitatifs. Pour les cliniciens, un individu ne se résumé pas en quelques chiffres ou en
quelques courbes ni même à un diagnostic de plus en plus sophistiqué
• Souci de sauvegarder l'unité de la personne humaine : pour comprendre un conflit actuel, il
faut tenir compte de toutes les souffrances que le sujet a déjà vécues en même temps qu'il
faut apprécier ses capacités de compréhension intellectuelle mais également ses ressources
émotives et affectives.

d. Psychologie clinique et psychiatrie


La psychiatrie est une spécialité médicale traitant de la maladie mentale ou des maladies mentales.
L'étymologie du mot psychiatrie provient du mot grec « psyche » qui signifie âme ou esprit, et
« iatros » qui signifie médecin (littéralement médecine de l'âme). Le mot "psychiatrie"a été inventé
en 1803 par Johann Christian Reil.
Le champ de la psychiatrie s'étend du diagnostic au traitement, en passant par la prévention des
troubles mentaux, incluant les divers troubles cognitifs, comportementaux et affectifs. Pratiquée
ordinairement par un psychiatre, la discipline est connexe à la pédopsychiatrie, qui concerne les
enfants, à la psychogériatrie, destinée aux personnes âgées, ou encore à la neuropsychiatrie.
L'histoire de la psychiatrie est relativement brève. C'est une discipline jeune. En 1656, Louis XIV
décréta l'ouverture des hôpitaux de France, dans le but d'enfermer toute personne qui n'est pas en
ligne avec la société de l’époque : des "débauchés", des pères dépensiers, des fils prodigues, des
blasphémateurs, etc... Ceci marqua le début de "l'emprisonnement à grande échelle des fous".
Ces hôpitaux n'étaient enclins à aucune thérapie. Les conditions qui y régnaient faisaient leur
réputation. Les détenus sont enchaînés, mal traités, et y sont flagellés. Ces détenus vivaient dans des
conditions insalubres. C'est dans ces conditions que les gardiens de ces hôpitaux développaient leur
"expertise en psychiatrie".
Bien que travailler dans les asiles ne soit pas le plus valorisant, ces gardiens se positionnaient comme
porteurs exclusifs et légitimes d’une discipline médicale nouvellement créée. Selon eux, c'était un art
et une science aussi complexes que la chimie.

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Emil Kraepelin en 1918 a défini le psychiatre « comme un chef qui pourrait intervenir sans pitié dans
les conditions de vie des gens et obtiendra sûrement la diminution de la folie. »
C'est après la Révolution française que la psychiatrie s'est érigée en discipline médicale et que le
statut de malade a remplacé celui de « fou ». Dans l'esprit de rupture de la Révolution, ce n'est plus
l'État qui décide de l'internement mais le préfet (dans l'intérêt général) et le médecin (dans l'intérêt
du malade). La folie ne pouvant être un crime, un statut médical est créé ainsi que des hôpitaux
correspondants qui sont en fait souvent des établissements privés. Cette nouvelle perception de la
folie et les lois qui en découlent sont imputables au mouvement dit des "aliénistes" parmi lesquels
on peut notamment citer Pinel ou Esquirol. La loi du 30 juin 1838 peut se résumer à une législation
qui doit veiller à ce que les maux d'un homme souffrant et malheureux soient adoucis, et sa guérison
obtenue si possible, et en même temps prendre des mesures qui ôtent à un être dangereux pour les
autres ou pour lui-même les moyens de faire le mal ». À cette époque, les malades mentaux étaient
considérés comme aliénés, c'est-à-dire non soumis à la raison et en quelque sorte esclaves de leur
déraison.
Les résultats thérapeutiques étaient relativement isolés, la pharmacopée était peu développée. En
« plagiant » Michel Foucault, on pourrait dire que le rôle des psychiatres, des asiles puis des hôpitaux
psychiatriques (HP) était de surveiller, isoler, classifier et ramener à la raison les malades. Leur
condition de vie était souvent déplorable, les progrès dans l'hébergement ou dans la prise en charge
se sont faits par paliers. Les grands ensembles hospitaliers, éloignés des villes, vivant en autarcie
étaient souvent la règle. Ce n'est que dans la deuxième partie du XXe siècle que certains hôpitaux
seront construits en ville dans le but affirmé de désenclaver la folie.
L'apparition de traitements psychotropes efficaces date des années 1950, et leur diffusion s'étend
jusqu'aux années 1960 voire 1970. Certains psychiatres comme Henri Baruk, Henri Ey s’opposaient à
leur utilisation, les considérant comme une camisole chimique et disant que l'on ne peut se limiter à
la prescription sans traiter les symptômes. L'introduction des premiers neuroleptiques a été une
véritable révolution dans les services de psychiatrie et dans la prise en charge des malades
psychotiques. Ces nouveaux médicaments permettaient de calmer les malades agités, délirants,
hallucinés et ainsi permettre d'envisager et de généraliser des traitements psychiques dans des
conditions plus réalistes ou encore, lorsque c'était possible, d'envisager un retour au domicile ou dans
des structures intermédiaires.
En France, le scandale de l'abandon des malades pendant la guerre, le renouveau démocratique et
l'engouement pour les idéaux humanitaires d'égalité, de solidarité a donné naissance à des
expériences de structures thérapeutiques très originales, dans et hors des murs de l'hôpital.
La question du « malade mental » est complètement repensée. Alors que jusque-là prévalaient
surtout les dogmes d'internement ou d'enfermement des malades, un processus d'externalisation et
de désinstitutionalisations a été entrepris. Ce processus aboutira en France notamment à la création
du système dit de psychiatrie de secteur avec l'adoption d'une circulaire en 1960, avec des services
dotés de beaucoup moins de lits, mais de davantage de structures alternatives, intermédiaires
(hôpitaux de jour, etc.) à l'hospitalisation. Le rôle des patients est aussi devenu plus actif par le biais
d'associations ou encore de clubs de sociothérapie.
Le mouvement se poursuit dans les années 1970, en partie du fait de l'avènement des
psychothérapies notamment psychanalytiques et des courants de l'antipsychiatrie et du mouvement
désaliéniste. Les praticiens font face à la prise en compte de détresses sociales croissantes qui

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semblent davantage résulter de la situation économique, à des interventions lors de catastrophes,
des deuils, des migrations, ou encore à la prévention, au dépistage précoce, au « traitement » de
l'échec scolaire, à l'excitation psychomotrices, l'apathie, les dépressions, la fatigue professionnelle.
La demande de soins augmente, à l'instar d'une baisse de la démographie médicale. Les grandes villes
de France, de Suisse et de Belgique sont actuellement parmi les plus psychiatrisées d'Europe. En
France par exemple, on compte 12 000 praticiens, (1 pour 5 000 habitants, soit bien plus que chez
nombre de ses voisins européens). Par ailleurs, la fermeture de lits de psychiatrie a été telle
qu'actuellement, notamment en Suisse, ou encore en Italie où tous les hôpitaux ont été fermés (la loi
Franco Basaglia), il devient parfois difficile d'hospitaliser les patients qui en auraient besoin. Les
durées d'hospitalisation tiennent aujourd'hui compte d'une rationalisation financière, déterminée
entre institutions hospitalières et assurances sociales ou maladie. Christian Müller écrivait en 1982 :
« quels que soient le temps et les modes, ce sont toujours les malades psychiques graves qui font les
frais des idéologies, des mesures d'économies et autres décisions qui finissent par constituer des
discriminations. »
Depuis la naissance de la psychiatrie, on différencie les maladies mentales afin de proposer une
classification "unifiée", cohérente, scientifique (DSM) et internationales (CIM). Cette volonté de
répertorier toutes les maladies mentales est largement contestée par les psychiatres eux-
mêmes. Cette classification peut en effet apparaître comme réductrice.
Deux grandes classifications des maladies mentales sont :
• La CIM-10 (Classification internationale des maladies) de l'OMS ;
• Le DSM, acronyme anglais de Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux,
proposé par l'Association américaine de psychiatrie.
La méthode pour définir une maladie mentale est l'expérience clinique : différents psychiatres réunis
pour la création du DSM analysent statistiquement les symptômes communs à des situations
cliniques qu'ils reconnaissent proches. Ces classifications sont sujettes à révision régulièrement.
Un psychiatre peut être également psychothérapeute et /ou psychanalyste.

e. Psychologie clinique et psychothérapie


Si l’on observe l’histoire de la psychothérapie, son origine se trouve dans les pratiques animistes,
encore répandues, y compris dans les pays développés. Elles ont survécu jusqu'ici sous différentes
formes qui coexistent avec d'autres plus récentes. À partir du XVII siècle et jusqu'en 1893, c'est le
ème

développement des traitements par la suggestion. L'intérêt pour les traitements psychiques des
enfants apparaît à la fin de cette période.
De 1886 à 1925, Pierre Janet met en place sa méthode psychothérapeutique, l'analyse psychologique,
basée sur la notion d'automatisme psychique existant à des niveaux plus ou moins profonds du
psychisme.
En 1925, Sigmund Freud a conceptualisé et systématisé l'inconscient et la sexualité infantile, notions
fondamentales de la psychanalyse. Les conflits inconscients — résultant d'une dualité pulsionnelle —
ne sont pas accessibles à la cure et doivent être mis à jour et élaborés durant le traitement
psychanalytique. C'est une des premières fois dans l'histoire qu'on utilise scientifiquement la parole

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comme vecteur thérapeutique de manière aussi codifiée. Cet axe Paris - Vienne alors créé est très
fécond à l'époque. En France, c'est entre autres sous l'impulsion de René Diatkine, de Serge Lebovici
et de Françoise Dolto que la psychanalyse des enfants est devenue réalité.
La psychothérapie désigne le traitement ou l'accompagnement par un individu formé à cela, d'une
ou plusieurs personnes souffrant de problèmes psychologiques, parfois en complément d'autres
types d'interventions à visée thérapeutique (médicaments, neurostimulation, etc.). Suivant les
patients (enfant ou adulte), le type et la sévérité du trouble, et le contexte de l'intervention, il existe
de nombreuses formes de psychothérapies qui s'appuient sur autant de pratiques différentes
reposant elles-mêmes sur des approches théoriques selon les écoles.
La plupart reposent néanmoins sur l'établissement d'une relation interpersonnelle entre le patient et
le thérapeute dans le cadre d'un contrat explicite de soin. Elle se distingue en cela des pratiques
d'accompagnement de l'individu sain (coaching, développement personnel).
En France, plus particulièrement depuis les années 1990, la règlementation de l'exercice des
psychothérapeutes a fait l'objet d'intenses débats mettant aux prises les praticiens se réclamant des
principales approches que sont les psychothérapies d'inspiration psychanalytique, systémique ou
cognitivo-comportementale.
Les « psychothérapies » signifiant littéralement : « thérapies par la psyché »), trouvent leur origine
dans différentes pratiques dont « l'analyse psychologique » de Pierre Janet, la « cure par la parole »
de Joseph Breuer, l'hypnose puis la psychanalyse.
C’est le psychiatre anglais Walter Cooper Dendy qui introduit le terme de « psychotherapeia » en
1853. Le terme définitif de « psychothérapie » aurait été inventé par Hippolyte Bernheim chef de file
de l'École de Nancy « qui publia en 1891 un ouvrage intitulé Hypnotisme, suggestion,
psychothérapie ».
Les psychothérapies ont pour vocation de « soigner par l'esprit » des souffrances tant psychiques que
somatiques dans le cadre d'une relation à un psychothérapeute. « La psychothérapie est souvent
considérée comme un soin de l'esprit ». Le champ de la psychothérapie est très vaste ; elle peut
intervenir utilement dans toutes les maladies qui s'inscrivent dans une dynamique
psychosomatique.
Les approches sont nombreuses et correspondent à de nombreux modèles théoriques différents
voire contradictoires. La psychothérapie est distincte du counseling ou du coaching en vogue dans les
pays anglo-saxons et qui ne présupposent ni formation universitaire ni formation à la
psychopathologie, bien que ces activités soient parfois exercées par des psychologues et/ou des
psychiatres de formation.

f. Psychologie clinique et psychopathologie


La psychopathologie (des mots grecs : « psukhê » âme et « pathos » maladie) est l'étude raisonnée
des troubles mentaux ou psychologiques et des troubles comportementaux. Le terme est plus
communément utilisé dans le domaine de la psychiatrie dans laquelle la pathologie réfère un trouble
ou une maladie mentale. Il ne doit pas être confondu avec le terme de psychopathie, un sous-type
génétique du trouble de la personnalité antisociale.

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Georges Canguilhem propose de substituer la notion de normativité à celle de norme et la notion
d’ordre à celle de valeur. Cet auteur « biologise » la notion de norme et considère que ce n'est pas à
la science de juger du normal car c’est avant tout la vie qui en fait un concept de valeur. On ne peut
pas non plus poser le problème de la normalité ou de l’anormalité sans tenir compte des normes
sociales ou individuelles.
La psychopathologie identifie ainsi trois types de normalité : la normalité comme norme sociale, la
normalité comme idéal, la normalité comme absence de maladie.
Canguilhem propose encore le concept « d’anomalie » qui se définirait comme « ce qui se laisse voir
en se dégageant de l’ensemble lisse et uni qui l’entoure ». Elle est observable. La psychopathologie
s’intéresserait alors plus à l’anomalie qu’à l’anormalité.
Nous reviendrons sur cette notion de normalité qui est primordiale en psychologie dans le prochain
cours.
Daniel Widlöcher déclare que juger d’une conduite en termes de normalité ou d’anormalité renvoie
obligatoirement à un jugement normatif. Cependant, la notion de norme se réfère à celle de
moyenne. Or, cette dernière est sujette à caution. Pour Widlöcher, le propre de la psychopathologie
est l'étude de ces conduites marquées que sont les anomalies, d'en repérer la genèse, d'en définir la
fonction et d'en préciser le mécanisme.
La définition suivante permet de relativiser cette notion de norme : « La psychopathologie peut être
définie comme une approche visant une compréhension raisonnée de la souffrance psychique. »

g. Psychologie clinique et psychanalyse


La psychanalyse ne doit pas être confondue avec la psychologie clinique, c’est une discipline distincte.
Sur le plan historique, l’invention de la psychanalyse est à l’origine de nombreuses ruptures
épistémologiques qui ont contribué à l’avènement de la psychopathologie et de la psychologie
clinique contemporaine.
La psychanalyse a ainsi contribué à donner naissance à un nouveau paradigme de la psychologie
clinique. Certaines conceptions de la psychologie clinique comme de la psychopathologie empruntent
pour une part la conception théorique psychanalytique, non pas les méthodes d’investigation, de
traitement, mais le modèle théorique mis à disposition pour interpréter.
Elles exploitent ce que Freud a découvert, autrement dit l’existence d’un ordre de causalité
psychique, et ce qu’il a mis en œuvre dans sa pratique : l’efficacité du traitement par la parole.
La psychanalyse constitue un cadre de référence majeur à la disposition des psychologues quel que
soit leur orientation. Le problème de la psychanalyse c’est que lorsqu’elle est utilisée, on perd le
versant scientifique du discours. La psychanalyse ne relève pas du paradigme de la science moderne
c'est-à-dire son discours se différencie fondamentalement du discours scientifique par rapport à la
preuve et les possibilités de généralisation. Ces expériences, observations ne sont pas vérifiables ni
reproductibles. L’ambiguïté vient de la localisation de la science.
La psychanalyse a proposé un ensemble de théories, un modèle, des concepts, et s’inscrit dans une
démarche de rigueur, la seule différence est que dans la pratique, il n’existe pas un mode de prise en

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charge. Il existe cependant un mode de production du savoir spécifique à la démarche freudienne.
On peut utiliser le corpus théorique sans utiliser la méthode analytique.
La psychanalyse impose de rompre avec une démarche prédictive et avec le modèle explicatif
classiquement envisagé en sciences humaines (le modèle expérimental), c'est-à-dire qu’on ne va pas
chercher à reproduire et comparer des symptômes.
La psychanalyse a contribué à montrer que nous traversons une période de modification de la
conception de l’humain, celle-ci se manifeste par l’abandon du cas particulier, qui va se manifester
aussi par un oubli du sujet de l’inconscient, la causalité psychique liée à l’histoire de l’individu, et par
le rejet de la valeur de solution du symptôme (comprendre, ce qui ne va pas). La psychanalyse
considère le symptôme comme le résultat d’une fonction normale, donnant une satisfaction au sujet
d’une façon ou d’une autre.
La grande question de l'époque est de définir si les troubles somatiques hystériques ont une base
physique réelle ou s'ils ne sont que le fruit qu'une comédie, d'une simulation excellente, d'une
manipulation.
Freud retient l'authenticité des symptômes et postule que si aucune origine somatique n'est trouvée,
il faut chercher l'explication à ces symptômes ailleurs. Ces paralysies sont sensibles à la suggestion
hypnotique, puisqu'ils cèdent ou surviennent par suggestion. Freud va considérer à partir de cette
observation que si les lésions supposées à l'origine des comportements hystériques ne sont pas
visibles, il faudra les expliquer autrement, tout en considérant l'organisme comme sain.
De retour à viennes en 1886, Freud ouvre son cabinet et en collaboration avec Breuer, il travaille avec
la patiente Anna O. Au cours de son travail, il accorde de plus en plus d'importance à la parole, venant
à la conclusion que ses patients souffrent de souvenirs, de réminiscences et renonce à chercher des
preuves anatomiques et cherche une causalité psychique. Freud remarque aussi que parler,
verbaliser, va avoir un effet sur le symptôme.

h. Le psychanalyste et la psychanalyse
Un psychanalyste est un professionnel, qui a été en analyse et est en plus formé sur le plan pratique
et théorique à diriger des cures psychanalytiques « Quiconque a reconnu que le transfert et la
résistance constituent le pivot du traitement appartient sans retour à notre horde sauvage ».
La formation du psychanalyste s'effectue dans le cadre d'associations psychanalytiques. En France,
du fait de clivages historiques, théoriques ou de questions d'affinité de travail, il existe de nombreuses
associations psychanalytiques. Certains psychanalystes appartiennent ou participent aux travaux de
plusieurs d'entre elles. La Société psychanalytique de Paris, l'École de la cause freudienne ou
l'Association Lacanienne Internationale, sont par exemple trois associations françaises importantes,
les seules à avoir demandé et obtenu la reconnaissance d'utilité publique.
Afin de devenir psychanalyste, il convient d'avoir effectué une cure psychanalytique approfondie.
Cette distinction entre analyse didactique et cure psychanalytique date du temps de Freud et a été
formalisée à l'Institut psychanalytique de Berlin mais assez rapidement, des analystes se sont rendu
compte que c'était bien la cure psychanalytique qui était requise pour devenir analyste et qu'elle ne
devait varier en rien de celle d'un analysant "tout venant". Le terme analyse didactique est donc de
moins en moins utilisé et on parle ainsi et maintenant plus volontiers de la cure psychanalytique

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PST002 Introduction à la psychologie clinique
personnelle comme de l'une des conditions à laquelle le candidat doit se prêter pour devenir
psychanalyste.
Le psychanalyste a pour fonction d'écouter de manière dite « égale », c'est-à-dire toujours avec la
même attention neutre, les associations libres de l'analysant qu'il reçoit, selon les termes consacrés,
avec « neutralité » et « bienveillance ». Ses interventions se font sous la forme d'interprétations qui
révèlent le contenu latent (inconscient) à partir du discours manifeste du patient incluant les récits
de rêves. Il interprète aussi en fonction de la dynamique du transfert qui a été décrite par Freud
comme la « pierre angulaire » du traitement et de ses progrès et celle du contre-transfert.
Le fait que les psychothérapies psychanalytiques s'adressent plutôt à des personnes souffrant de
symptômes et les cures types plutôt réservée à des personnes "bien portantes" est une idée reçue.
Souvent le dispositif de la cure classique est nécessaire pour des personnes très symptomatiques pour
les aider à surmonter les mécanismes latents.
Quel que soit le cadre proposé, la garantie du caractère psychanalytique d'une pratique repose en
dernière analyse sur la qualité de psychanalyste de celui qui la met en œuvre, ce qui pose le problème
de sa formation. En effet, si l'on peut dire que l'analyste est le produit de sa propre psychanalyse il
faut aussi affirmer qu'une cure analytique est la cure proposée et pratiquée par un psychanalyste.
Psychanalyse et psychanalyste sont ainsi deux termes qui se définissent mutuellement et renvoient
nécessairement l'un à l'autre.

Pour résumer :
La psychologie clinique : au carrefour de plusieurs disciplines
Evolution du concept de la folie du XIXème à nos jours
La médicalisation de la folie (Pinel, aliénation mentale. Esquirol, aliénation mentale = une maladie
particulière)
1890 : premières apparitions du terme de Psychologie clinique en Europe et aux USA
Witmer est le fondateur de la psychologie clinique.
1901-1918 (début du XXe) : le grand boom des tests et du psycho diagnostic
Les tests permettent d’isoler et mesurer des processus psychiques ou facultés, servent à établir la
variabilité intra-individuelle et inter-individuelle.
La méthode expérimentale (isole et dissocie, conditions prévues d’avance) aide la psychologie
clinique à avoir une vue d’ensemble sur les réactions naturelles et spontanées du sujet.
Test issu d’un besoin social : Binet et Simon 1899
L’ère moderne 1900-1919 les débuts de la psychologie appliquée à grande échelle.
1914-1918 1ère guerre mondiale : Premiers pas vers le « testing » de groupes pour dépistage,
recrutement et sélection des soldats.
1920-1939 L’entre-deux guerres : Tests utilisés à des fins diagnostiques, test d’intelligence, de
personnalité, épreuves projectives, …

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PST002 Introduction à la psychologie clinique
1930-1945 Elargissement du champ
La psychologie clinique s’oriente vers le psychodiagnostic et cherche à classifier les caractères.
On passe de l’enfant à l’adulte, des aptitudes à la personnalité, du diagnostic à la thérapie.
Watson, Pavlov, Piaget, Rey
1949 : naissance d’une nouvelle conception de la Psychologie Clinique (un tournant dans la définition
de la profession).
Discours fondateur de Lagache 1949, fait de la psychologie clinique une discipline autonome en
théorie et en pratique.
Définit l’objet d’étude de la psychologie clinique et son statut scientifique.
1960-1980 : évolution vers un statut de profession autonome.
Favez-Boutonnier, pose la question de l’identité professionnelle, démédicalise la psychologie
clinique, prône une articulation entre clinique et recherche.
Dès 1970 : affirmation du statut de discipline scientifique aux USA

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