Vous êtes sur la page 1sur 71

1

COURS DE PSYCHOLOGIE MEDICALE


D1 / UEA
Par Professeur Ordinaire Modeste MUKE ZIHISIRE

Année Académique : 2020 / 2021


2

OBJECTIFS GENERAUX
Le cours de Psychologie médicale a comme objet d’étude « La relation étio-
pathogénique entre la vie psychique (conflits émotionnels),
l’environnement psycho-social et les troubles somatiques fonctionnels,
organiques et même lésionnels. » La psychologie médicale tend à former,
psychologiquement, le médecin, afin qu’il puisse mieux comprendre son
patient, quelles que soient son affection et les considérations étiologiques.
Elle se propose également d’apprendre au futur médecin les mécanismes
de la relation médecin-malade.
OBJECTIFS SPECIFIQUES
Au terme de ce cours, l’étudiant sera capable de:
- définir la psychologie et la psychologie médicale ;
- comprendre les principales méthodes d’étude en psychologie
médicale ;
- ressortir le rapport entre la psychologie médicale et les autres
disciplines scientifiques ;
- faire une différence entre le psychologue, le psychologue clinicien et
le psychiatre ;
- comprendre les réactions et les attitudes du patient, de la famille et
de la société à l’égard d’un être humain malade ;
- connaître les principales caractéristiques de la relation de soin ;
- spécifier les différents modèles de la relation médecin-malade ;
- expliquer et comprendre les caractéristiques de l’alitement, de
l’hospitalisation et de l’invalidation ;
- expliquer les phénomènes déclenchés par la douleur physique de
l’être humain et sa mort ;
- comprendre le sens de la maladie et la manière d’entreprendre la
technique d’entretien avec le patient en vue de la diagnostiquer ;
- connaître les principales réactions du malade à ces effets et
l’influence du médecin sur ces réactions et leurs conséquences ;
- comprendre le sens des médicaments et ses effets secondaires.
3

PLAN DU COURS
0.0. INTRODUCTION
0.1. Définition de la psychologie
0.2. Définition de la psychologie médicale
0.3. Méthodes d’approche de la psychologie médicale
0.4. La psychologie médicale avec les autres disciplines
0.5. La signification de la santé
0.6. Distinction entre le psychologue, le psychologue clinicien et
le psychiatre.
CHAPITRE 1 : LA REACTION A LA MALADIE
1.1. La psychologie de la maladie
1.2. Du côté du patient
1.3. Du côté de la famille et des proches
1.4. Du côté de la société
1.5. Les mécanismes de défense devant la maladie.
CHAPITRE 2 : RELATION MEDECIN-MALADE
2.1. Caractéristiques de la relation médecin-malade
2.2. Différents modèles de la relation médecin-malade
2.3. Alitement, hospitalisation et invalidation
2.4. La douleur
2.5. La mort.
CHAPITRE 3 : LE MALADE ET SA MALADIE
3.1. Notion
3.2. Le premier entretien entre le médecin et le patient
3.3. Les différents secteurs de l’anamnèse psychosociale
3.4. Les facteurs psychosociaux de la maladie
3.5. Les représentations culturelles de la maladie et de la santé
3.6. Les effets psychologiques de la maladie
3.7. Les médicaments.
4

BIBLIOGRAPHIE
1. DEBRAY, Q. et al. (2006), Psychiatrie, syndromes et maladies, Paris,
Masson
2. DENIKER, P. et al. (1990), Précis de psychiatrie clinique de l’adulte, Paris,
Masson
3. GUILLEMO, M et Al. (2008), petit Larousse de la psychologie, Paris,
Larousse
4. HAYNAL, A, Pasini W et Archinard, M. (1997), Médecine
psychosomatique, aspects psychosociaux, 3e éd., Paris, Masson
5. JEAMMET, P. et al. (2001), Psychologie médicale, Paris, Masson (2ème
éd.)
6. LAROUSSE (2007), Petit Larousse de la médecine, Paris, Larousse.
7. LAPLANCHE, J. et PONTALIS, J.B. (1997), Vocabulaire de la psychanalyse,
Paris, P.U.F.
8. LEVY-SOUSSAN, P. (1994), Psychiatrie, Paris, ESTEM.
9. PELT, J.M. (1969), Les médicaments, Paris, Seuil
10. SPENCER A. Rathus (1995), Psychologie générale, 3e éd., Montréal
(Québec), Etudes vivantes
10. SILLAMY, N. (2006), Dictionnaire de la psychologie, Paris, Larousse
(2ème éd.)
11. TAVRIS, C. et WADE, C. (2007), Introduction à la psychologie, Canada,
Ed. du Renouveau pédagogique.
5

0.0. INTRODUCTION
0.1. DEFINITION DE LA PSYCHOLOGIE
Le but des psychologues est d’observer le comportement des
humains et/ou des animaux, et d’expliquer comment ils apprennent, se
souviennent, résolvent des problèmes, perçoivent, réagissent
affectivement et s’entendent avec leurs semblables. Certes, certains
psychologues étudient les troubles mentaux, les comportements
anormaux et les problèmes d’ordre personnel.
La psychologie moderne peut donc être définie comme l’étude
scientifique du comportement et des processus mentaux. Pour la plupart
des psychologues, ces phénomènes sont influencés par les caractéristiques
de l’environnement ainsi que par l’état physique et mental du sujet. Ainsi,
une personne qui commet un acte 1répréhensible n’est pas nécessairement
« mauvaise » pour autant. Son comportement peut avoir été causé par un
dérèglement hormonal ou une réaction émotionnelle dont elle n’a pu
contenir les débordements. Pour mieux cerner la psychologie, vous devrez
étudier ses méthodes, ses découvertes et la façon d’interpréter
l’information qu’elle adopte. Les méthodes et les manières d’aborder un
sujet en psychologie distinguent ce domaine des autres – qu’il s’agisse de
la littérature, de la philosophie ou de l’histoire – Où l’on cherche aussi à
comprendre le comportement. C’est également ce qui distingue la
psychologie des idées populaires, mais non scientifiques, que véhiculent les
médias, p. ex. dans les tribunes téléphoniques peu objectives.
Bref, la psychologie étudie le comportement et les motivations de l’être
humain d’un point de vue aussi bien intérieur qu’extérieur.
Les développements et les applications de la psychologie sont
devenus considérables : celle-ci dépasse aujourd’hui largement la cadre
de la pathologie pour s’étendre à des activités aussi diverses que la
pédagogie, la formation professionnelle, l’art, la publicité ou simplement
le désir de mieux se connaître (psychologie humaniste). La formation
psychologique du médecin est indispensable.

1 Répréhensible : qui mérite d’être blâmé→condamnable


6

Le terme psychologie date du XVIe siècle, mais il est devenu usuel à


partir du XVIIIe grâce à l’allemand C. Wolff, qui l’utilise dans sa psychologia
emperica en 1732 et sa psychologia rationalis (1734).
Le mot psychologie vient du grec psuchè qui signifie l’âme et logos
qui signifie science. Ainsi, étymologiquement la psychologie se définit
comme science de l’âme.
Selon Bloch H. et Al ; l’âme est le principe qui donne vie au corps, mais elle
peut également être définit comme une substance matérielle, de nature
très subtile (qui est difficile à percevoir ou à définir) qui réside dans le corps.
L’âme étant une réalité métaphysique (réflexion abstraite), la psychologie
est donc, dans le sens étymologique du terme, une science philosophique.
Néanmoins, cette définition étymologique est fort vague et imprécise car
le problème de m’existence et de l’âme est un phénomène qui n’est pas
observable directement.
L’âme n’est pas un objet d’observation et on ne peut aboutir à sa
connaissance par l’expérimentation. Ce n’est que dans et par nos activités
qu’elle se révèle à nous ; activités dont l’ensemble constitue ce que l’on est
convenu d’appeler vie psychique ou vie mentale (psychique : qui concerne
l’esprit, la pensée. Ex : Maladie organique à cause psychique).
Ainsi, l’âme comprend tout un ensemble d’états et de phénomènes
intérieurs qui tendent à s’extérioriser plus ou moins directement et
clairement dans notre conduite ou comportement. Ce sont nos sensations,
nos perceptions, nos souvenirs, nos sentiments, nos désirs, nos tendances,
nos motivations, etc.
Etant donné que l’âme est un phénomène insaisissable, se basant sur les
principes irréalistes, les psychologues ont cherché à tout prix, à partir des
découvertes et de l’expérimentation, à se détacher de la science
philosophique. C’est ainsi qu’à partir du 20e siècle, et principalement sous
l’influence de l’américain John Watson (1878-1958), la psychologie est
définie comme « une étude scientifique du comportement ou de la
conduite », entendez par là, la réaction physique de l’organisme à une
stimulation elle-même aussi physique du milieu ambiant. Ici, on ne
s’intéresse plus seulement à la constitution de la vie intérieure (ou
psychique), aux contenus de conscience mais surtout aux actions, c’est-à-
dire ce que les individus font à la manière dont ils se comportent dans telle
7

ou telle circonstance. Dans ce cas, la psychologie est l’étude de l’homme


tout entier, corps et âme, avec ses facultés ou puissances, ses états d’âme
et ses réactions sur le milieu.
La psychologie étudie ainsi certaines fonctions de l’organisme
rendues objectives aux moyens du langage ou par d’autres formes du
comportement. Les réactions extérieures sont généralement considérées
comme représentant le comportement, de même que les réactions
intérieures. Les réponses verbales sont appelées comportement verbal.
En définitive, la psychologie ne s’est affirmée en tant que science
qu’en se séparant, à la fin du XIXe siècle, de la philosophie.
Progressivement, malgré de graves crises intérieures (ou grâce à elles), elle
s’est constituée en discipline humaine autonome. Sa méthode, comparable
à celle des autres sciences, consiste à soumettre des hypothèses aux faits
objectifs ; ses moyens essentiels sont l’observation et l’expérimentation.
Primitivement centrée sur l’homme normal, adulte et civilisé, elle a étendu
ses investigations au malade, à l’enfant, au primitif, aux groupes sociaux et
même à l’animal. Par son action pratique, elle a prouvé son existence et
démontré son importance. Son champ d’application, qui semble illimité,
augmente sans cesse.
Ses techniques particulières forment un ensemble irremplaçable d’action
et de connaissance de l’être humain.
0.2. DEFINITION DE LA PSYCHOLOGIE MEDICALE
La psychologie médicale, selon P.B. Schneider in Précis de psychiatrie
clinique de l’adulte, 1990, p. 373), est une branche fondamentale de la
médecine dont le champ spécifique d’étude et d’action est l’homme
malade ; dans sa totalité physique, psychique et sociale, en relation avec le
monde médical.
Elle donne au médecin des connaissances qui lui permettent de mieux
comprendre son patient et de le traiter, en tenant compte à la fois des
données scientifiques habituelles, provenant des sciences exactes et
biologiques et des éléments en relation avec le contexte socio
psychologique.
Centrée sur la compréhension de la signification consciente et inconsciente
de la relation médecin-malade, elle l’étudie pour que le médecin puisse
8

mieux s’en servir pour faciliter la guérison et prévenir les réactions


défavorables à n’importe quelle maladie, ce qui permet au patient de
mieux contrôler et vivre son affection.
La psychologie médicale se définit comme une psychologie de l’homme
malade, c’est-à-dire qu’elle fournit des informations sur les caractéristiques
psychiques, émotionnelles du patient et leurs formes d’expressions dans
une série des situations : la maladie grave, la maladie chronique, les soins
palliatifs, les handicaps, etc. Enfin, la Psychologie médicale se définit
comme une psychologie du médecin dans sa relation avec les malades, les
aspects de communication et de compréhension du malade, et de manière
plus large, la dimension psychologique dans la pratique médicale y sont
privilégiés.
C’est l’étude de tout ce qui est de la psyché dans la relation médicale :
 Fonctionnement mental du malade
 Fonctionnement mental du médecin et de soignants
 Représentation de la maladie

La psychologie médicale est une discipline qui donne au médecin des


informations et des connaissances suffisantes pour l’aider à comprendre
son malade en tant qu’une personne humaine souffrant d’une maladie et
à mieux le traiter selon les données scientifiques habituelles mais en tenant
compte de ces donnée psychologiques.
La relation médecin-malade est l’objet privilégié de la psychologie mais il
n’est pas exclusif car d’autres thèmes existent également.
En fait, le médecin doit avoir un ensemble des connaissances qui
prend corps et aboutit à une praxis (activité en vue d’un résultat) centrée
sur le malade, ses réactions à la maladie et sa relation psychologique avec
son médecin.
Par l’homme malade ou patient nous entendons l’homme souffrant ou
atteint de n’importe quelle maladie somatique, lésionnelle ou
fonctionnelle ou purement psychique, aigue ou chronique.
Les notions apprises par le médecin lui apprennent comment traiter un
homme malade, c’est-à-dire l’ensemble des connaissances techniques qu’il
doit acquérir. Cependant il doit acquérir une relation psychologique avec
9

son patient, ce qui constitue la deuxième moitié de la médecine. Le


maniement harmonieux de cette relation médecin-patient ne peut
s’acquérir que dans la pratique mais avant d’y aller, le médecin doit être
avisé.
La psychologie médicale n’est pas un secteur de la psychiatrie, même si des
liens historiques et actuels la rapprochent des tendances
psychothérapiques et psycho dynamiques de celle-ci, et même si la
majorité de ses enseignants sont des psychiatres, pour la plupart
psychanalystes.
Elle ne peut accomplir ses tâches avec efficacité que si elle devient
autonome, ce qui lui permet d’ailleurs d’enrichir des rapports féconds avec
toutes les branches de la médecine et de maintenir un lien privilégié avec
la psychiatrie qui lui a fourni la plupart des cadres théoriques de référence.
0.3. METHODES D’APPROCHE DE LA PSYCHOLOGIE MEDICALE
La psychologie médicale recourt aux mêmes méthodes que celles utilisées
par la psychopathologie étant donné qu’elle fut longtemps une partie de la
psychologie, s’occupant du fonctionnement anormal de l’esprit humain.
Ainsi, les méthodes d’approche en psychologie médicale concernent
l’approche du malade et de la maladie. Nous nous limiterons dans cette
démarche à trois méthodes :
1. L’observation : méthode ayant pour but de relever un certain nombre
de faits naturels, à partir desquels il sera possible de former une hypothèse
que l’on soumettra à la vérification expérimentale.
L’observation constitue la phase fondamentale de l’expérimentation.
Elle peut être simple (au cours de l’entretien et des tests, le psychologue
note les attitudes du sujet, sa mimique, sa manière de faire) ou « armée »
(enregistrement, glace sans tain permettant à l’observateur de voir sans
être vu) ; limitée à un échantillonnage de temps (cinq minutes toutes les
trois heures, p. ex.) ou continue et de longue durée (en internat), etc. Dans
une consultation rapide, il arrive que l’observation soit faussée par les
conditions mêmes de l’examen et la présence de l’expérimentateur.
Lorsque la gravité de la situation le nécessite, on poursuit l’étude entreprise
en introduisant un éducateur spécialisé dans le milieu du sujet («
observation en milieu ouvert »), en recueillant, périodiquement, des
10

éléments d’information sur le comportement de l’enfant ou de


l’adolescent, chez lui, à l’école, dans la rue, etc., ce nouvel observateur
permet de mieux comprendre ce « cas ».
Le problème qui se pose dans cette approche est de savoir comment
l’homme malade se situe par rapport à l’observateur (le médecin). En effet,
la maladie paraît être l’objet même de l’observation scientifique. Or, celle-
ci ne prend forme et ne s’exprime que par l’homme et en l’homme. Ce qui
fait que, concrètement, l’objet véritable de l’observation, c’est l’homme
malade.
Une première liaison s’établit entre l’observateur et le malade. C’est
la liaison sujet-objet. Elle est la plus objective et non la seule car, le malade
perçu comme l’objet demeure également un sujet. Ainsi, s’établit un autre
type de liaison : sujet (observateur) – sujet (malade). Cette liaison,
proprement humaine, vise et exprime une relation réciproque dont la
communication reste l’élément central quel que soit son qualificatif :
totale, partielle, déformée, etc.
2. La compréhension et l’explication
La compréhension et l’explication constituent les deux voies d’approche
pour l’étude et la connaissance de la maladie et du malade.
a) La compréhension
C’est la connaissance par interprétation psychologique. Il s’agit non de
percevoir mais d’éprouver et de se représenter ce que vit le malade. Dans
ces conditions, on adopte l’attitude phénoménologique (1) dans le sens du
recours au vécu original.

La méthode utilisée est celle d’intuition (formes de connaissance


immédiate qui ne recourt pas au raisonnement, comprendre par intuition)
ou d’introspection dont Jaspers différencie l’aspect statique actuel et
l’aspect génétique.
Le premier se rapporte à une prise de conscience directe sur l’état d’esprit
du malade (tristesse, angoisse, etc.) et le second se rapporte à un
enchaînement intrinsèque des événements vécus, du développement
historique interne et significatif. Par ex., le sentiment de culpabilité
11

engendre le désir de punition qui conduit à l’auto-dénonciation ou au


suicide.
b) L’explication
Elle correspond au développement destiné à éclaircir le sens de quelque
chose commentaire, éclaircissement ; ce qui rend compte d’un fait cause,
motif, raison ; éclaircissement sur les intentions, la conduite justification.
Ex., Je ne trouve aucune explication à son attitude. Ou encore, discussion
dans laquelle on s’explique.
3. L’expérimentation
L’expérimentation est une méthode qui permet de démontrer des relations
de cause à effet entre les phénomènes à l’étude. Nous savons
instinctivement que différentes causes peuvent engendrer le même
résultat. Les psychologues ont le même problème lorsqu’ils veulent faire
des déclarations précises sur la causalité. Pour pallier cette ambiguïté, les
chercheurs utilisent des méthodes expérimentales : ils manipulent une
variable indépendante (V.I) et cherchent l’effet sur la variable dépendante
(V.D).
Ex. : Dans les années 1970, à partir des résultats d’étude de cas, des
chercheurs ont émis l’hypothèse que le sucre, les édulcorants (subsistance
qui donne une saveur douce) et certains produits chimiques pouvaient
causer l’hyperactivité (Feingold, 1975).
 le sucre, les édulcorants V.I
 l’hyperactivité V.D
Phénoménologie : Philosophie qui écarte toute interprétation abstraite
pour se limiter à la description et à l’analyse des seuls phénomènes perçus.

Pour qu’une expérimentation soit concluante, elle doit respecter


certaines règles, dans le but de réduire, d’une part, le risque que les
résultats soient biaisés ou erronés et, d’autre part, de contrôler l’effet de
hasard.
L’expérimentation est la seule méthode de recherche qui permette
d’établir les relations de cause à effet entre les variables à l’étude.
12

Cependant, il faut se rappeler que l’information ainsi obtenue peut parfois


ne pas se généraliser à d’autres situations si les conditions varient.
La méthode expérimentale, pour A. Lamoureux (2000, p.75), est une
méthode de recherche explicative qui vise à établir une relation de
causalité entre deux événements. Pour leur part, C. Tavris et C. Wade
(2007,p.50) est une méthode qui rend possible la mise à l’épreuve d’une
hypothèse dans des conditions données, au cours de laquelle le chercheur
manipule les caractéristiques d’une variable (V.I) pour déterminer
l’influence qu’elle exerce sur une autre variable.
Cette méthode permet à l’expérimentateur de contrôler les
conditions d’une expérimentation afin de tester ses hypothèses. Pour ce
faire, il modifie certaines conditions qui, selon lui, influeront sur le
comportement des sujets, il maintient constant l’ensemble des autres
conditions expérimentales pour tous les autres sujets et il observe ensuite
ce qui se passe selon les résultats obtenus, il pourra tirer des conclusions
pour déterminer la présence ou l’absence de relation de cause à effet entre
les différentes variables sélectionnées.
Ainsi, chaque expérience a pour but de tester au moins une
hypothèse et comporte toujours deux types de variables : la ou les variables
indépendantes et la ou les variables dépendantes.
La variable indépendante est une variable qui manipulée ou
provoquée par l’expérimentateur et qui constitue la cause présumée de la
variable dépendante. Synonymes : traitement expérimental et variable
manipulée.
La variable indépendante est une variable qui est mesurée par
l’expérimentateur et qui peut être modifiée par l’influence de la variable
indépendante. Synonymes : variable mesurée
En d’autres mots, pour la variable indépendante, l’expérimentateur
contrôle ou modifie une condition tandis que pour la variable dépendante,
le comportement des sujets dépend de ce que fait l’expérimentateur.
Exemple : Hypothèse : l’usage de la nicotine nuit à la conduite d’un véhicule
V.I : l’usage de la nicotine
V.D : la conduite d’un véhicule
13

Pour bien mener l’expérience, le traitement, ou la manipulation, de la V.I


doit aussi s’accompagner d’une condition où le traitement est absent,
c’est-à-dire une condition de contrôle utilisée dans un groupe contrôle ou
groupe témoin. C’est un groupe de référence où les sujets ne sont pas
soumis à la V.I.
Cette façon de procéder permet de déterminer ce qui se produit en
l’absence de tout traitement.
L’hypothèse d’une influence du traitement ne peut alors être confirmée
que par l’observation d’une différence statistiquement significative entre
le groupe expérimental et le groupe témoin ou groupe contrôle.
Si les mêmes effets se produisent dans la condition expérimentale et dans
la condition de contrôle, ils ne peuvent alors être attribués au traitement
expérimental.
Dans l’exemple ci-dessus, les sujets qui fument juste avant de conduire
constituent le groupe expérimental et ceux qui ne fument pas constituent
le groupe témoin. Les premiers fument la vraie cigarette et les seconds
fument un placebo.
0.4. LA PSYCHOLOGIE MEDICALE ET LES AUTRES DISCIPLINES
0.4.1. Rapport de la psychologie médicale avec la médecine
psychosomatique
La médecine psychosomatique a comme objet d’étude bien précis, la
relation étiopathologique entre la vie psychique (le conflit émotionnel) et
les troubles somatiques fonctionnels et même lésionnels. Ainsi, la
médecine psychosomatique est une médecine totale, s’occupant à la fois
de l’âme et du corps. Ce nom a été donné par J.C. Halliday (1943) au
mouvement moderne qui tend à renouveler les conceptions de la maladie
élaborées par R. Virchow et L. Pasteur. Sans méconnaître les mécanismes
physiques, chimiques et physiologiques, qu’elle veut dépasser, la médecine
psychosomatique, s’appuyant sur l’étroite solidarité qui régit toutes les
fonctions de l’organisme, s’efforce de comprendre la réalité humaine
vécue, l’affectivité et son rôle dans le déterminisme de nombreux troubles
fonctionnels ou organiques.
Les travaux de H. Selye (Hans Selye, médecin canadien d’origine
autrichienne, 1907-1982), montrent que le corps réagit en mobilisant
14

toutes ses défenses lorsqu’il est menacé par un agent physique, chimique
ou psychique. Un violent choc affectif ou une tension émotionnelle
persistante ont les mêmes effets somatiques qu’une longue exposition au
froid intense : ulcération gastroduodénale, hypertrophie des glandes
surrénales, etc. On comprend dans ces conditions que les déceptions
sentimentales, la solitude affective, les soucis ou les échecs professionnels,
qui sont autant de traumatismes psychologiques, puissent être
responsables de maladies organiques. Mais, si tous les individus répondent
somatiquement aux émotions, leurs réactions n’ont pas la même intensité.
Ce sont ceux qui extériorisent le moins leurs sentiments qui ont les
réponses 2neurovégétatives et 3endocriniennes les plus perturbatrices, il
existe, semble-t-il, une prédisposition constitutionnelle à ce mode de
réaction, accentuée, dans certains cas, par des expériences antérieures :
carence affective précoce, traumatisme psychique, etc.
On a observé, p. ex., que la plupart des sujets asthmatiques ou
allergiques avaient été objectivement frustrés d’amour maternel dans leur
enfance, ce qui, d’après F. Alexander (Franz Alexander, psychanalyste
américain, d’origine hongroise, Budapest, 1891-1964), et T.M. French,
déterminait les réactions suivantes : désespoir et colère rejet par
l’entourage insécurité profonde et tendance à inhiber les manifestations
extérieures des émotions accentuation des réactions neurovégétatives,
désordres fonctionnels et lésions. Selon ces auteurs, la crise d’asthme
correspondrait à un accès de pleurs inhibés, l’hypertension artérielle à une
colère rentrée, l’ulcère digestif à un conflit permanent entre les désirs de
lutte et de fuite.
Tous les appareils de l’organisme peuvent être intéressés par les
maladies psychosomatiques : système digestif (ulcère, colite), endocrinien
(hyperthyroïdie ; diabète), génito-urinaire (impuissance, énurésie), cardio
vasculaire (infarctus du myocarde), respiratoire (asthme, tuberculose
pulmonaire), peau (eczéma), etc.

2 Neurovégétatif : qui contrôle les grandes fonctions involontaires (vie végétative) ;


circulation sanguine, excrétion, etc.
3 Endocrine : se dit des glandes à sécrétion interne, dont les produits sont déversés

directement dans le sang. Ex : Le foie, la thyroïde, opposé à exocrine (ex : les larmes)
15

En somme, les phénomènes somatiques accompagnent les différentes


émotions (affects). Ces émotions ont été groupées en deux grandes
catégories :
- l’angoisse, signalant le danger ;
- la dépression, signalant la perte, le changement ayant l’individu un
sens négatif
En fait, la dépression est un état mental caractérisé par de la lassitude, du
découragement, de la faiblesse, de l’anxiété.
→neurasthénie, Ex : Dépression nerveuse.
Les symptômes somatiques ou les pathologies organiques les plus courants
qui entrainent les troubles psychiques sont :
- la douleur articulaire
- la dorsalgie (douleur du rachis dorsal)
- l’hyperthyroïdie
- les céphalées
- la fatigue
- la douleur thoracique
- la douleur des membres supérieur ou inférieur
- la douleur abdominale
- le vertige, le sentiment d’instabilité
- l’hypertension artérielle
- l’asthme
- etc.
Unité soma-psyché
L’hypothèse de base de la médecine psychosomatique est l’unité
fonctionnelle soma-psyché.
L’étude de l’histoire de la philosophie montre que l’interaction de ces
deux principes, corps-âme, soma-psyché, a été l’objet d’une réflexion
constante depuis qu’Anaxagore, environ 500-428 ans avant notre ère, fit la
distinction entre psyché et soma. Ce dualisme fut maintenu par Platon
(427-347 avant notre ère), repris et réélaboré dans l’hylomorphisme (corps
et esprit forment une substance complète) d’Aristote (384-322), selon
lequel l’âme donne la forme au corps, le 1er (âme) devenant ainsi le principe
16

vital du second (corps), celui-ci étant conçu dans une unité étroite avec le
psychisme.
La psychologie a pris son autonomie par rapport à la philosophie à la
fin du XIXe siècle, avec, notamment, H. Von Helmholtz, G.T. Fechner et W.
Wundt (tous allemands). Le développement de la discipline fut marqué par
le béhaviorisme, pour lequel elle devait se fonder uniquement sur l’étude
des comportements.
La psychologie comprend beaucoup de branches :
- la psychologie expérimentale
- la psychologie du développement
- la psychologie différentielle
- la psychologie clinique ou comparée
- la psychologie générale
- celle de l’enfant et de l’adolescent
- celle animale
- celle médicale
- la psychopathologie
- la psychologie des organisations
- la psychologie du sport
- la psychologie de la santé
- la psychologie scolaire
- la psychologie du comportement
- la psychologie cognitive
- la psychologie analytique (ou psychanalyse)
- la psychologie génétique
- etc.
0.4.2. Rapport de la psychologie médicale avec la psychiatrie
La psychiatrie est une étude et traitement des maladies mentales.
Vers la fin du Moyen Age, en Occident, la maladie mentale était considérée
comme d’origine surnaturelle. Sous l’ancien Régime, quelques places
étaient réservées dans les hôpitaux pour les « fous », mais le caractère
pathologique de leur état n’était pas encore reconnu. Il fallait attendre la
Révolution française pour que, sous l’influence de Philippe Pinel (médecin
français, 1745-1826), ces malades fussent confiés aux médecins. Mais leurs
conditions de vie, dans les établissements psychiatriques, restaient
17

misérables. Au XIXème siècle, le nombre des « aliénés » internés augmenta


considérablement ; la loi du 30 juin 1838 réglementa les conditions de
l’internement.
Après 1920, la pratique des « placements libres » se répandit. En 1936, les
« asiles » se sont transformés en « hôpitaux psychiatriques ».
Au lendemain de la seconde guerre mondiale, les psychiatres
s’efforcèrent de développer la vie sociale des malades (thérapie
d’occupation, ergothérapie), mais les moyens thérapeutiques restaient
limités : isolement, hydrothérapie, sédatifs, chocs (cures d’insuline,
électrochocs), traitement moral.
Ce n’est que dans les années 50 que des médicaments actifs dans les
psychoses font leur apparition : neuroleptiques (1952), antidépresseurs
(1957), lithium (1957), qui contribuent à transformer l’atmosphère des
établissements et facilitent l’abord psychothérapeutique des patients. Les
sorties se font aussi plus nombreuses et l’on voit se créer, en marge de
l’hôpital, des dispensaires, des « hôpitaux de jour », des foyers de postcure,
des ateliers protégés, des centres d’aide par le travail, etc. Les hôpitaux de
jour concernent les malades qui ont un domicile et peuvent le regagner le
soir. Ils offrent aux patients des activités de groupe (expression verbale,
corporelle, artistique, culturelle, …), la possibilité de surveiller la
chimiothérapie et le recours à un dispositif psychothérapique. La
fréquentation régulière de l’hôpital de jour constitue un réapprentissage
de la vie sociale. Elle limite aussi les risques de désagrégation du milieu
familial en évitant le placement des enfants, p. ex. Grâce à la
chimiothérapie et aux structures d’accueil légères, de nombreux malades
n’ont plus besoin de passer par l’hospitalisation traditionnelle.
La clientèle des psychiatres s’est aussi diversifiée et étendue, ce qui
prouve que la maladie mentale inquiète moins qu’auparavant. Désormais,
on traite les patients, comme des personnes souffrantes, dans leur milieu
social naturel. Tous ne guérissent pas, il est vrai, mais un patient sur deux
finit par trouver un équilibre suffisant pour être dispensé de soins
psychiatriques.
0.4.3. Rapport de la psychologie médicale avec la psychologie de la santé
La psychologie de la santé est une discipline relativement récente
dans le contexte de la psychologie française. Créée en 1979 par
18

l’américain Psychological Association (APA), elle s’est développée dans le


cadre des recherches, essentiellement dans les régions nord-américaines
et anglo-saxonnes. De ces travaux, s’est dégagée une définition de la
psychologie de la santé dans un sens large comme la compréhension de la
santé est de la maladie à partir de savoirs psychologiques. D’une manière
plus précise, elle est envisagée comme l’étude des différents types de
facteurs : psychologiques, sociaux et biologiques, intervenant dans le
maintien de la bonne santé ou dans le déclenchement et l’évolution des
maladies. La psychologie de la santé s’organise sur trois axes principaux
suivants :
- La prévention et la promotion des comportements et styles de vie sains :
elle s’intéresse aux comportements à risque qui peuvent être directement
la cause des pathologies : cancers, sida, maladies cardio-vasculaires, etc. et
aux actions susceptibles de les prévenir ;
- Les situations des maladies : elle s’occupe des aspects concernant la prise
en charge des maladies (conditions du traitement thérapeutique avec les
différents niveaux d’intervention aux relations soignés-soignants, à
l’information et à la communication, aux prises de décisions médicales et
aux facteurs qui déterminent la compliance pulmonaire ;
- Les comportements adoptés par les malades et les conséquences sur leur
état de santé : les aspects psychologiques du vécu de la maladie, les
stratégies d’adaptation, la réaction à la douleur et la qualité de vie des
patients, la gestion du stress et le soutien social …).
0.5. LA SIGNIFICATION DE LA SANTE
La santé est un état de celui qui, se portant bien, se sent fort et assuré.
Ce concept est étroitement lié à la notion d’adaptation, au point que
l’Organisation mondiale de la santé (OMS) juge utile de préciser que « la
santé est la pleine jouissance du bien-être social, mental et physique, et pas
seulement l’absence de maladies et d’affection ». Lorsqu’on parle de santé,
on se réfère, implicitement, à l’équilibre dynamique existant entre
l’organisme et son milieu. L’individu capable de résoudre ses conflits
(d’origine interne et externe) et de résister aux frustrations inévitables de
la vie sociale est en bonne santé. Celui qui n’y parvient pas tombe malade.
Les symptômes névrotiques sont l’expression d’une résolution inadéquate
19

des tensions, tandis que les psychoses signent la faillite de l’adaptation au


monde normal.
0.6. DISTINCTION ENTRE LE PSYCHOLOGUE, LE PSYCHOLOGUE CLINICIEN
ET LE PSYCHIATRE
0.6.1. Le psychologue est celui qui a effectué au moins deux ans d’études
supérieures et a obtenu soit une maîtrise, soit un doctorat en psychologie.
0.6.2. Le psychologue clinicien : est celui qui détient soit une maîtrise, soit
un doctorat, et s’est spécialisé dans un domaine clinique et a fait une année
de stage supervisé de thérapie pour acquérir de l’expérience dans le
diagnostic et le traitement de comportements anormaux.
Les psychologues cliniciens n’évaluent pas les causes physiques ou
neurologiques de problèmes mentaux et ne prescrivent pas de
médicaments.
Il a pour tâche d’évaluer des personnes avec des troubles
comportementaux et affectifs qui entravent sérieusement leur
fonctionnement et leur bien-être ; il évalue l’état du client et décide du
traitement de concert avec le psychiatre. Sa formation l’a préparé à
pratiquer la psychothérapie tant auprès des personnes qui se présentent
des troubles profonds qu’auprès des personnes qui se sentent légèrement
perturbés ou malheureuses, ou qui souhaitent apprendre à mieux faire face
à leurs problèmes.
Il a aussi pour rôle de comprendre et d’améliorer la santé physique et
mentale des individus. Il travaille dans des centres hospitaliers, des
établissements psychiatriques, des cliniques spécialisés, des centres locaux
de services communautaires, des écoles et des cabinets privés. Il évalue
donc et traite les troubles et les déficiences d’ordre comportemental,
psychique ou émotionnel.
0.6.3. Le psychiatre : est un docteur en médecine qui a effectué plusieurs
années de stages cliniques. Il peut poser un diagnostic établissant les
causes physiques ou neurologiques des comportements anormaux, et
traiter ces comportements, souvent en prescrivant des médicaments.
20

CHAPITRE 1 : LA REACTION A LA MALADIE


L’apparition subite ou insidieuse de n’importe quelle maladie
(somatique ou psychique) peut modifier la vie du sujet qui en est atteint,
son comportement et le fonctionnement de sa vie psychique, ce qui
entraîne des répercussions sur son entourage intime, d’habitude la famille,
mais également sur la société. Mais, indépendamment de ces modifications
qui surviennent chez le patient, la famille, les proches et la société vont
également modifier leurs attitudes à l’égard du patient dès qu’ils prennent
conscience que celui-ci est atteint d’une maladie. Nous sommes donc
confrontés à un réseau complexe d’interactions, dont nous allons passer en
revue les plus importantes en les attribuant artificiellement, par souci de
clarté, soit au patient, soit aux proches ou encore à la société.
1.1. LA PSYCHOLOGIE DE LA MALADIE
Les différences individuelles sont 4flagrantes lorsqu’il s’agit du
comportement durant la maladie. Certains refusent d’aller chez le médecin
à moins d’être incapable de se déplacer.
D’autres se ruent chez le médecin à moindre symptôme ; certains nient la
douleur et les autres symptômes ; d’autres amplifient la douleur ; certains
encore considèrent les maladies chroniques, telles que l’hypertension
artérielle essentielle et le diabète, comme des 5revers de fortune
temporaires. D’autres les perçoivent à juste titre comme des problèmes
persistants. Certains font Don usage des visites chez le médecin. D’autres
pas ; certains tiennent compte des avis médicaux. D’autres s’en fichent.
Dans cette section, nous examinons d’abord les facteurs qui
déterminent si nous demandons de l’aide lorsque nous nous sentons
malades et les façons dont nous conceptualisons la maladie.
Puis nous évaluons le « rôle de malade » qui est joué dans notre société.
Enfin, nous discutons de l’interaction patient-médecin et des problèmes
soulevés par notre respect ou non de l’avis du médecin.

4Flagrant : qui paraît évident aux yeux de tous. Ex : Une injustice flagrante
5 Revers : événement inattendu, qui change une situation en mal→échec. Ex : Revers
militaires, Revers de fortune
*De fortune : imposé pour parer au plus pressé
21

1.1.1. Les facteurs qui déterminent la volonté d’obtenir des soins


médicaux
Vous connaissez l’expression : « Faites ce que je dis et non ce que je fais ».
Ce dicton s’applique au comportement face à la maladie, car les gens sont
beaucoup plus enclins à conseiller aux autres de rendre visite au médecin
que d’y aller eux-mêmes (Feldman, 1966). La répugnance à demander des
soins médicaux est reliée à la crainte de ce que le médecin pourrait
découvrir, aux facteurs démographiques et sociaux, comme le sexe, le
statut socio-économique et les antécédents ethniques, aux
caractéristiques des symptômes, et aux façons dont nous conceptualisons
la maladie.
Les femmes, par exemple, sont plus portées à demander de l’aide
médicale que les hommes, même lorsqu’on relativise les visites de
grossesse et d’accouchement (Rosenstock et Krischt, 1979). La différence
sexuelle peut refléter les traits associés au rôle sexuel masculin stéréotypé
de robustesse et d’indépendance dans notre société.
En d’autres mots, on s’attend que les hommes soient autosuffisants. Selon
un rapport du U.S. Department of Health, Education and welfare (1979), les
individus de conditions socio-économiques privilégiées sont plus disposés
que les personnes démunies à demander une aide médicale, même si ces
dernières sont plus susceptibles de tomber malades et d’être hospitalisées.
Mechanic (1978) a découvert que 4 traits symptomatiques
contribuent également à déterminer si nous demanderons une aide
médicale.
1. La visibilité du symptôme par exemple, toutes choses étant égales,
une éruption ou une coupure au visage est plus susceptible
d’inquiéter qu’une éruption ou une coupure au torse ou à la jambe.
2. La gravité perçue du symptôme : les symptômes plus graves
entraînent une inquiétude plus grande et sont plus susceptibles de
provoquer une visite chez le médecin.
3. L’intrusion de symptômes dans la vie d’une personne : nous serons
plus portés à rendre visite au médecin lorsque les symptômes
affectent par exemple l’élimination, les activités sexuelles,
l’alimentation et la mobilité.
22

4. La fréquence et la persistance des symptômes : les symptômes qui


surviennent souvent et persistent sont plus susceptibles de
provoquer une visite chez le médecin que les symptômes
intermittents.
1.1.2. Nos façons de conceptualiser la maladie
Les façons dont nous conceptualisons la maladie sont importantes,
car elles influencent ainsi notre comportement dans les moyens envisagés
pour améliorer notre santé. Howard Leventhal et ses collègues (1980 ;
Meyer 1985) ont identifié 4 composantes de nos conceptualisation de la
maladie :
1. L’identité de la maladie : Notre conception du « malaise », nous
procure un cade d’interprétation des symptômes. Des douleurs
intenses à la poitrine, par exemple, peuvent être des symptômes de
crise cardiaque, de spasme de l’œsophage (canal musculaire par
lequel passent les aliments pour se à l’estomac), d’ingestion et
d’autres problèmes. Nous avons tendance à attribuer les symptômes
à des maladies mineures courantes car ces maladies sont plus
susceptibles de faire partie de nos expériences (Lan et Russell, 1983).
Une identification correcte est le fondement d’un comportement
adéquat face à la maladie, comme celui de chercher de l’aide ou de
suivre le traitement.
2. L’évolution de la maladie et le traitement : Une conceptualisation
précise de l’évolution d’une maladie est importante pour maintenir
un schéma de traitement adéquat. Même si les professionnels de la
santé leur disent le contraire, les gens ont tendance à considérer à
tort l’hypertension, le diabète et les troubles bipolaires comme des
problèmes aigus temporaires. Ces maladies et bien d’autres peuvent
nécessiter une adhésion prolongée à un traitement thérapeutique.
3. Les conséquences de la maladie : Parfois, nous évitons de consulter
un médecin en dépit de certains symptômes, car les maladies
généralement associées à ces symptômes sont mineures, comme
dans le cas des symptômes de la grippe. Mais nous pourrions aussi
éviter de demander un avis médical au sujet de symptômes comme
une bosse sur le sein ou du sang dans l’urine, parce qu’ils suggèrent
la possibilité de maladies graves.
23

4. Les attributions causales de la maladie : Les attributions causales de


la maladie sont importantes, parce qu’elles influencent le
comportement préventif ainsi que la recherche d’un traitement
adéquat. Si nous attribuons aux troubles cardiovasculaires et au
cancer des facteurs purement génétiques, nous pourrions adopter
une attitude défaitiste selon laquelle il est impossible d’influencer
leur apparition, ce qui servirait à ignorer nos mauvaises habitudes
alimentaires et le manque d’exercice. Toutefois, la reconnaissance
que ces maladies comportent de multiples facteurs de risque peut
nous motiver à adopter des comportements salutaires dans notre vie
quotidienne.
1.2. DU COTE DU PATIENT
Le premier travail psychologique qui l’attend est la prise de conscience de
la différence qui existe entre l’état de santé et celui de maladie. Si cette
reconnaissance est souvent dramatique lors d’affections aigües, elle peut
tarder lorsque les troubles s’installent lentement, et parfois elle n’est pas
vécue par le sujet qui continue à se déclarer en bonne santé, alors que les
signes d’atteinte de son corps deviennent évidents. Ainsi, la maladie peut
être niée dès son apparition, ce qui explique pourquoi des femmes
certainement très soucieuses de leur corps consultent parfois si
tardivement leur médecin alors qu’un cancer du sein ne pouvait être ignoré
depuis longtemps. Cette négation de la maladie est plus ou moins stable et
solide et prend tous les degrés, de la simple négligence au déni de
l’existence d’une déchéance corporelle menant rapidement à la mort ou de
troubles psychiques caricaturaux.
Dans la règle, cependant, celui qui est devenu un malade a pris
conscience du changement minime ou important qui est intervenu dans
son corps, mais aussi dans toute sa personne (malaise, fatigue,
indifférence, dégoût, etc.), signes d’atteinte globale que l’on ressent aussi
bien lors d’une grippe banale qu’après avoir été blessé lors d’un accident
ou lorsqu’une maladie chronique s’installe (diabète p. ex.). L’entrée dans la
maladie prend aussi de nos jours un autre aspect. Grâce aux examens de
prévention et de dépistage, des affections parfois très graves sont
découvertes précocement chez des personnes qui se sentent en bonne
santé. Du jour au lendemain, la médecine les déclare malades et leur
demande de se soumettre à des traitements difficiles, de longue durée,
24

entraînant souvent des effets secondaires désagréables, et de plus les


empêchant parfois de travailler. Ces sujets risquent de réagir fortement à
ce changement subit dans leur existence, qui n’a pas été précédé par les
signes avant-coureurs du mal vivre corporel.
Se savoir atteint d’une maladie correspond à reconnaître que sa
personnalité dans son ensemble souffre d’un mauvais fonctionnement ou
d’une lésion localisée, dont les répercussions s’étendent au-delà de la zone
touchée. Cet événement est d’habitude accueilli avec souci, peine et
inquiétude, mais il peut aussi être le bienvenu, lorsqu’il permet au « malade
» d’abandonner une tâche difficile à accomplir, de mettre de côté des
préoccupations sans espoir de solution ou de surseoir à des décisions
angoissantes. La maladie peut donc représenter une étape désirée, si ce
n’est positive, dans une existence lorsque les conflits intérieurs ou
relationnels ne peuvent être résolus.
Tentons d’énumérer brièvement les mouvements psychologiques qui
peuvent survenir lorsqu’un sujet prend conscience de la « maladie », et
qu’il entre dans son rôle de patient dont il accepte, dans la règle, le statut.
Ainsi, divers facteurs déterminent notre état de santé et le cas
échéant, le type de maladie dont nous souffrons. Le sociologue Talcott
Parisons (1978) a noté dès que nous nous considérons malades, nous avons
tendance à jouer « le rôle de malade »
Le rôle de malade est fondé sur 3 hypothèses :
1. D’abord, que nous ne devons pas nous sentir responsable de notre
maladie,
2. Ensuite, que le fait d’être malade nous soulage de nos responsabilités
normales,
3. Enfin, que les gens malades font ce qui est nécessaire pour se rétablir.
La notion de blâme personnel à l’égard de la maladie est complexe et
dans bien de cas, elle n’est vraie qu’en partie.
Par exemple, si nous sommes affectés par des cellules cancéreuses, comme
dans le cas d’un cancer du poumon, devons-nous attribuer la maladie aux
cellules cancéreuses ou à notre comportement personnel, qui nous a
exposé la maladie et qui dans de nombreux cas, aurait pu être évité ?
25

Avant que les études sur l’incidence du tabagisme sur le cancer des
poumons ne soient effectuées, les gens ne pourraient pas connaître les
comportements susceptibles d’accroitre la possibilité d’exposition. Mais
aujourd’hui, les comportements à risque ont été largement diffusés. Nous
pouvons dire par conséquent, que dans la majorité des cas, la maladie et le
comportement de la personne (fumeur) sont conjointement responsables.
Quant aux troubles cardiovasculaires, il y a sûrement des facteurs
génétiques mis en cause, mais nos habitudes d’alimentation et d’exercice
jouent également un rôle.
Selon la maladie, on peut ne pas s’attendre que les individus malades
aillent à l’école, coupent le gazon ou prennent soin des enfants. Certaines
personnes trouvent difficile d’adopter ce rôle de malade et insistent pour
poursuivre leurs activités professionnelles autant que possible. D’autres
sont trop heureux d’être relevés de leurs responsabilités ! Cet aspect du
rôle de malade est parfois renversé dans le cas d’un comportement
anormal.
Vivre à la maison et continuer de travailler, les gardent en contact avec les
réalités de la vie quotidienne, tout en soutenant leur degré d’attente
d’efficacité.
On s’attend à trouver le désir de se rétablir chez les personnes malades.
Dans le but de se rétablir, les individus malades doivent souvent rencontrer
des experts médicaux et respecter les ordonnances médicales.

1.2.1. L’atteinte 6narcissique


- L’ombre de la mort devient plus réelle, même s’il s’agit d’une affection
dite banale. Le sujet se sent davantage menacé dans son existence même.
- Craintes et angoisses concernant l’intégrité physique et psychique. « Est-
ce grave ? Que vais-je devenir ? »
- L’incertitude quant au déroulement de la maladie, avec la crainte de ne
pas se retrouver après comme avant.

6 Narcissique : admiration, contemplation de soi-même. Fixation affective à soi-même, amour


excessif de soi.
26

- Des inquiétudes, même la panique, devant la douleur déjà là ou qui peut


survenir.
- L’appréhension de la perte d’une fonction ou d’un organe (le réveil de
l’angoisse de castration) ou même de sa dignité d’homme (« Vais-je devenir
invalide ? » Un « 7légume ? ».
- Des préoccupations concernant son avenir : personnel, professionnel,
familial et social.
- Crainte d’une restriction des satisfactions intimes (affectives, sexuelles,
les loisirs, le sport, les voyages, professionnelles, etc.).
- Peur de la perte d’indépendance et d’autonomie du fonctionnement, tant
matériel que psychique.
Toutes ces angoisses, craintes et incertitudes atteignent le noyau
narcissique de la personnalité, ce lieu imaginaire où l’amour et l’estime de
soi se construisent. Il risque donc de s’affaiblir, de se fissurer et de se
désintégrer, ce qui ouvre la voie à des sentiments d’impuissance et au
désespoir, qui peuvent aboutir à la résignation, au renoncement et, à la
limite, à la désorganisation de la personnalité, c’est-à-dire à l’abandon de
la lutte contre la maladie. Mais la blessure narcissique peut au contraire
déclencher une réaction positive et amorcer une reprise énergétique
favorable aux processus de guérison, et une réparation de l’estime de soi
qui avait été atteinte avant la maladie peut survenir grâce, si l’on peut dire,
à l’atteinte physique.
1. Narcissisme : amour excessif de soi
En psychanalyse, on parle de narcissisme quand toute l’énergie de la
libido, primordialement investie sur le moi, puis normalement répartie
entre le moi et les autres, est détournée de ceux-ci au profit exclusif de
celui-là (le moi). Pour Freud, le narcissisme est le « complément libidinal »
de l’égocentrisme humain. On retrouve le narcissisme chez certains
adolescents, chez les artistes et la plupart des personnes (narcissisme
secondaire), car la maladie entraine toujours un repliement sur soi, on a
constaté aussi que, fréquemment, des sujets (de statut inférieur, surtout
des enfants) tirent une satisfaction de leur état en se faisant plaindre et
dorloter.

7 Grosse légume : un personnage important, influent


27

2. Libido : énergie motrice des instincts de vie.


La libido a une importance fondamentale dans les conduites
humaines, qu’elle conditionne en grande partie.
N’étant pas attachée exclusivement au fonctionnement des organes
génitaux, elle peut s’orienter vers des objets ou des personnes (libido
objectale), se tourner vers le corps propre (libido narcissique) ou encore
alimente les activités intellectuelles (libido sublimée)
1.2.2. L’émergence de sentiments de culpabilité, l’expiation des fautes
Avant l’apparition de la maladie, ceux-ci existaient bien dans l’inconscient
du sujet, mais l’affection les ravine, en accord avec la représentation «
populaire » (d’essence surtout religieuse) qu’elle est la punition des
péchés. Par sa souffrance, le sujet va pouvoir expier (réparer, en subissant
une expiation= se racheter, se repentir : souffrance imposée ou acceptée à
la suite d’une faute et considérée comme un remède ou une purification
rachat, réparation, repentir) ses fautes et subir un châtiment réparateur.
1.2.3. La séparation réelle du milieu par l’hospitalisation et la mise en
question des liens affectifs avec les membres de la famille ou d’autres
intimes
« Que vont-ils penser et faire ?, vont-ils s’occuper de moi avec
sollicitude (attention soutenue et affectueuse) ou m’abandonner ? Que
puis-je attendre d’eux et comment veulent-ils que je sois ? » Après le
narcissisme et la culpabilité, nous voici dans le domaine de l’abandon (ou
du moins de sa menace) et de la reviviscence des relations aux premiers
objets de la vie du malade, les images parentales.
Des sentiments archaïques entrent en jeu, entraînant ou non un
remaniement des schémas relationnels habituels. L’observation montre
qu’une maladie importante peut survenir peu de temps après une perte
affective importante, que ce soit un décès, une rupture sentimentale ou
une déception professionnelle.
La maladie physique permet de compenser le manque affectif résultant de
la perte par les nouveaux liens qu’elle suscite avec d’autres personnes, dont
l’équipe soignante ; elle revêt alors une fonction réparatrice.
28

1.2.4. Les bénéfices qu’offre l’état de maladie


Qu’ils soient primaires ou secondaires, cela importe peu. Ils sont
matériels et psychologiques. Le patient attend qu’on s’occupe de son corps
souffrant, et qu’on rétablisse son bien-être. Il peut cesser de travailler,
abandonner ses soucis, ses obligations et jouir de l’inactivité forcée, alors
qu’il pensait auparavant qu’il n’avait pas le droit de « décrocher ». La
Sécurité Sociale le prendra en charge et, à la limite, c’est à la société de
pourvoir à ses besoins puisqu’il est malade. S’il s’engage dans cette voie, il
risque la chute dans la régression, la dépendance et la passivité qui
favorisent la chronicité psychologique de la maladie. Cependant, la maladie
peut aussi être vécue comme une période qui permet des expériences et
des remaniements psychologiques positifs, sur la base même de la
régression et de la passivité, et un véritable bénéfice psychologique en
résulte.
1.2.5. Les mécanismes de défense devant la maladie
En général, les patients atteints avant tout physiquement, bien
davantage que les malades psychiques, vivent leur maladie, même si elle
est grave, en s’y adaptant sans trop de difficultés et en établissant un
nouvel équilibre psychologique qui leur permet d’ailleurs d’en sortir plus
facilement. C’est que l’homme possède des fonctions autonomes de sa
personnalité, de son Moi, et des mécanismes de défense qui lui permettent
de faire front avec souplesse aux attaques dont il est la cible, donc à celles
de la maladie.
Pour S. Freud (cité par C. Tavris et C. Wade (2007, p. 138), lorsque les
désirs de son ça se heurtant aux interdits de la morale ou lorsque la réalité
impose des exigences qui dépassent ses capacités d’adaptation, la
personne peut ressentir de l’angoisse. Son moi cherchera à atténuer cette
tension en recourant à des mécanismes de défense. Ceux-ci présentent
deux caractéristiques : ils servent à nier ou à déformer la réalité ; et ce sont
des phénomènes inconscients. Freud affirme que les mécanismes de
défense du moi sont utiles et nécessaires pour échapper à des conflits
désagréables et à l’angoisse ; ils ne deviennent nuisibles que lorsqu’ils
causent des troubles émotionnels ou des comportements
autodestructeurs. Freud décrit 17 mécanismes de défense ; d’autres
psychanalystes ont par la suite enrichi et modifié cette liste. Voici quelques-
uns des principaux mécanismes de défense reconnus de nos jours par la
29

plupart des psycho dynamiciens (Horowitz, 1988 ; vaillant, 1992) et par la


fille de Freud, Anna (1946), elle-même éminente psychanalyste.
a) Le refoulement consiste à empêcher une idée, une émotion ou un
souvenir menaçant d’atteindre la conscience. Par exemple, nous disons
d’une personne qui ne peut se rappeler une expérience terrifiante vécue
durant son enfance qu’elle en refoule le souvenir. Le terme « refoulement
» n’a rien à voir avec le fait de se mordre consciemment la langue pour ne
pas révéler un secret coupable. Il désigne l’effort du moi pour garder cachés
des pensées et des sentiments honteux résidant dans l’inconscient, de
sorte que personne elle-même n’en est pas consciente. Du point de vue
psycho dynamique, ceux qui disent ne jamais se souvenir de leurs rêves ou
n’avoir jamais de fantasmes sexuels font probablement recours au
refoulement. Le refoulement est généralement considéré comme la base
de tous les autres mécanismes de défense, chacun d’entre eux y ajoutant
quelque chose de particulier.
b) La projection consiste à refouler les pulsions que le surmoi considère
comme honteuses ou menaçantes et à les attribuer ensuite à quelqu’un
d’autre. Ainsi, un garçon qui déteste son père (pulsion agressive) peut se
sentir angoissé de ne pas aimer une personne dont il dépend (conscience
morale). Il projettera alors (défense du moi) ses propres sentiments sur son
père et affirmera : « Il ne m’aime pas ». De même, une personne se sentant
mal à l’aise d’éprouver une attirance sexuelle envers des membres d’une
ethnie autre que la sienne est susceptible de projeter son embarras sur eux,
en disant par exemple : « Ces gens ont l’esprit mal tourné : ils ne pensent
qu’au sexe ».
c) La formation réactionnelle consiste à transformer un sentiment suscitant
de l’angoisse sur le plan inconscient en son contraire sur le plan conscient.
Par exemple, une personne excitée par des images purement érotiques
(manifestation du ça) affirmera sur un ton indigné que la pornographie est
dégoûtante (réaction du moi et du surmoi). De même, une femme ayant
peur d’admettre qu’elle n’aime pas son mari se raccrochera sur le plan
conscient à la croyance qu’elle l’aime vraiment. Comment déterminer,
alors, l’authenticité d’une émotion ? La plupart du temps, quand il y a
formation réactionnelle, le sentiment conscient est excessif : la personne «
en fait trop », elle ne peut s’empêcher de manifester de façon exagérée ce
qu’elle prétend ressentir (par exemple, « Est-ce que je l’aime ? Mais bien
30

sûr que je l’aime ! Je n’ai jamais eu la moindre pensée malveillante à son


égard ! Il est parfait ! »).
Lorsque la maladie, écrit P.B. Schneider in Précis de psychiatrie
chimique de l’adulte, cf. P. Deniker et al. 1990, p. 376), est ressentie comme
une attaque injuste du monde extérieur, de la fatalité ou de Dieu, le patient
ne peut que se défendre et devenir agressif.
Alors que dans la régression (cf. ci-dessous) son comportement dit
clairement « Que l’on s’occupe de moi » - « on » étant le monde extérieur
– dans la formation réactionnelle agressive le patient déclare : « On me
veut du mal ». Il devient donc difficile, capricieux, méfiant et exigeant, et
son caractère, de doux et aimable qu’il était, change du tout au tout.
En revanche, certains individus colériques et susceptibles avant
d’être malades deviennent doux, collaborant et effacés. C’est la formation
réactionnelle de soumission. L’intellectualisation défensive entre dans le
même cadre, de même que la suractivité, qu’elle se manifeste par le besoin
de tout contrôler, d’agir sans cesse, de s’occuper avec fébrilité (état
d’excitation, d’agitation intense) ou de résoudre tous les problèmes de la
famille et même du monde.
d) La fixation et la régression sont respectivement le maintien et le retour
d’un individu à un stade primitif de son développement. Selon Freud, la
personnalité se développe en suivant des stades, s’échelonnant de la
naissance à la maturité. Notons toutefois que chaque stade s’accompagne
d’une certaine frustration et d’anxiété. Dans le cas où ces sentiments sont
trop intenses, le développement normal est interrompu, et l’enfant reste
fixé au stade en cours (par exemple, il continuera indéfiniment à dépendre
étroitement des autres). Une expérience traumatisante peut aussi causer
une régression. Ainsi, un garçon de huit ans que le divorce de ses parents a
rendu anxieux recommencera à sucer son pouce ou à se cramponner aux
autres. Les adultes font parfois preuve de fixations partielles qu’ils ne
dépassent jamais (par exemple, se ronger les ongles) et certains régressent
quand ils sont soumis à de fortes tensions, adoptant alors un
comportement immature (par exemple, se mettre en colère à la moindre
contrariété).
Toute atteinte de la santé, écrit aussi P.B. Schneider, cf. P. Deniker et al.,
1990, p. 375), amorce un mouvement comportemental et psychique de
31

régression qui permet au patient, en se laissant aller comme s’il redevenait


un enfant, d’accepter les soins et les traitements, de cesser son activité
professionnelle et d’abandonner ses responsabilités. L’état d’un adulte
régressé ne présente, on le sait bien, qu’une analogie grossière avec celui
d’un enfant. Idéalement, la régression ne devrait pas dépasser le degré
permettant le traitement adéquat et elle devrait disparaître au fur et à
mesure de l’amélioration de l’état du patient. Mais comme cet état est
souvent vécu comme très agréable, le patient, parfois encouragé par sa
famille et également par l’équipe soignante, tend plus ou moins
consciemment à en prolonger la durée. Inversement, certains sujets qui,
par exemple, ne peuvent pas supporter d’abandonner la moindre parcelle
de contrôle d’eux-mêmes, ne peuvent régresser et présentent, lorsqu’ils
sont gravement malades, des problèmes importants de traitement. Enfin,
disons que les malades régressés sont très sensibles à la frustration.
e) Le déni est le refus de reconnaître qu’une chose désagréable est en train
de se produire, pratiquement sous nos yeux. Par exemple, une personne
au visage empourpré (rougit de colère, de honte, …) serre les poings en
disant rageusement qu’elle n’est pas en colère ou un alcoolique nie sa
dépendance à l’alcool. Par ailleurs, le déni entretient l’illusion
d’invulnérabilité (« Cela ne m’arrivera jamais ») et il explique bien des
comportements autodestructeurs ou dangereux. Une femme qui fait
semblant de ne pas savoir qu’elle a une tumeur à un sein, un homme qui
se dit « Ce n’est qu’une indigestion » alors qu’il vient d’avoir une crise
cardiaque, une personne diabétique qui ne prend pas ses médicaments,
voilà autant d’exemples de déni.
Confronté à la maladie physique, le patient peut ne pas la vivre
comme telle et refuser complètement sa présence et son existence malgré
des preuves réelles inscrites et visibles dans le corps. C’est le déni (de la
réalité physique de la maladie), mécanisme de défense archaïque de type
plutôt psychotique. En revanche, lorsque le patient ne va pas aussi loin mais
demeure sourd à ce que son médecin et ses proches lui disent de sa
maladie, lorsqu’il affirme que le cancer dont on lui a parlé n’est qu’un «
rhumatisme » ou une « maladie virale quelconque » et qu’une tuberculose
pulmonaire n’est qu’une « grippe », il utilise inconsciemment le déni, lequel
est en rapport étroit avec le refoulement névrotique.
32

f) L’intellectualisation consiste à transformer un problème concret auquel


nous ne voulons pas faire face en un problème théorique très abstrait, plus
vague et moins menaçant. Par exemple, à la puberté, un adolescent peut
éprouver de la culpabilité à se masturber (surmoi, conscience morale) tout
en ayant l’impression d’être incapable de s’en abstenir (ça, pulsion
sexuelle). Une fois intellectualisé, le moi peut se transformer en
interrogation philosophique sur le rôle du plaisir sensuel dans la vie
humaine : s’agit-il d’un penchant naturel bénéfique ou d’un asservissement
avilissant au monde limité de la matière et des sens ? Ce qui était à l’origine
un problème personnel et concret devient un problème théorique
hautement abstrait. Cela ne veut pas dire que ce questionnement
philosophique ou moral n’ait pas de valeur en lui-même : cela signifie que
les réflexions de cette personne sont teintées d’une dynamique affective
très personnelle.
g) Le déplacement et la sublimation sont des processus par lesquels une
pulsion (souvent agressive ou sexuelle) délaisse un objet pour s’orienter
vers un autre, plus accessible ou moins menaçant. Par exemple, un jeune
garçon à qui on a interdit de se mettre en colère contre son père « se
déchargera » de cette pulsion sur ses jouets ou sur sa sœur cadette. Nous
pouvons déplacer des pulsions agressives suscitées par un conflit vers les
sports de contact plutôt que de les exprimer directement. Dans le cas où le
déplacement sert un but supérieur utile, de nature culturelle ou sociale,
comme la création artistique ou l’invention scientifique, il porte le nom de
sublimation. Ainsi, la sublimation des pulsions sexuelles peut mener
l’individu à écrire des poèmes ou d’autres textes littéraires dans lesquels il
exprime la passion.
h) La rationalisation consiste à donner une explication moralement
acceptable à une action dont les véritables motifs sont refoulés. Imaginons
un père qui déteste le petit ami de sa fille par jalousie, parce qu’il éprouve
lui-même des désirs sexuels envers sa fille. S’il exprime son hostilité à
l’égard du jeune homme, il n’en dévoilera cependant pas les véritables
motifs, ni aux autres ni à lui-même. Il s’inventera donc une raison
parfaitement « raisonnable » de ne pas l’aimer : il dira que ce n’est pas un
garçon convenable, qu’il est insolent ou que c’est un bon à rien.
Selon Freud, les mécanismes de défense protègent le moi contre
l’angoisse et lui permettent ainsi de remplir ses tâches sans trop
33

d’inconfort, mais ils entraînent par ailleurs une perception faussée de soi-
même ou du monde extérieur.
La diversité des personnalités naît, d’une part, du fait que les individus
n’emploient pas les mêmes défenses avec le même degré de rigidité et,
d’autre part, du fait que les mêmes défenses permettent à certains
individus d’agir adéquatement, alors qu’elles causent des troubles chez
d’autres (Bernstein et Warner, 1993, Vaillant, 1992).
Somme toute, la théorie psychanalytique repose sur l’idée que tout
être humain est perpétuellement en état de conflit, que ce soit à la
recherche de l’équilibre intérieur entre les demandes du ça et celles du
surmoi ou à la recherche de l’équilibre extérieur entre ses désirs et les
exigences du milieu (voir figure ci-dessous). Freud était tout à fait conscient
que la culture, les coutumes et les lois modèlent le comportement et les
désirs d’un individu.
1.3. DU COTE DE LA FAMILLE ET DES PROCHES
Le groupe familial et des proches peuvent partager les mêmes inquiétudes
que le patient, car il est également atteint dans sa sécurité et son équilibre
par la maladie d’un de ses membres, même et surtout s’il s’agit d’un enfant.
A ce propos, l’espace nous fait défaut pour décrire les réactions à la maladie
selon l’âge du malade. Mutatis mutandis, il est licite de reprendre les
éléments que nous avons décrits au sujet du malade et de les étudier au
sein de la famille, en y associant les résultats des recherches fécondes des
différentes écoles qui étudient les transactions familiales, en particulier sur
l’homéostasie familiale et sur les liens de filiation. Ces données dites
familiales ne sont pas incompatibles avec les considérations psycho
dynamiques, en particulier psychanalytiques, mais on ne peut pas les réunir
impunément, car elles s’appuient chacune sur un référentiel
essentiellement différent. Plus concrètement, la maladie d’un membre –
clé d’une famille, de la mère ou du père, surtout si elle risque de durer
longtemps, représentera le point de départ d’une restructuration
matérielle mais surtout affective, restructuration consciente et
inconsciente, de tous les membres du groupe.
1.4. DU COTE DE LA SOCIETE OU DU POUVOIR
Son intervention à différents niveaux devient de plus en plus importante
(hôpitaux, assurances, Sécurité Sociale, profession, assistance sociale), et
34

malgré les efforts dits d’humanisation qu’elle fait, ses rapports avec le
malade et son groupe d’intimes sont toujours difficiles et frustrants, car les
représentants de ces instances, aussi désireux soient-ils de personnaliser
les relations qu’ils doivent entretenir avec le patient et ses proches, sont
obligés d’agir en fonction d’un ensemble (les malades, les assurés) et non
d’un individu.
Seuls le médecin et, à l’hôpital, le personnel soignant peuvent
prendre d’emblée une autre attitude, et tous les développements que nous
venons de faire n’ont de valeur que par rapport à la compréhension que le
médecin peut en avoir et qu’il exprimera, de façon si possible adéquate,
dans sa relation avec le malade.
35

CHAPITRE 2 : RELATION MEDECIN – MALADE


La relation médecin-malade était déjà présente entre chaque ligne du
chapitre précédent sur la réaction à la maladie, car dans notre civilisation
l’homme malade pénètre rapidement dans le champ médical, et ses
relations avec le médecin, désirées ou obligées (les vaccinations, les
examens d’embauche, par exemple) se nouent dès la plus petite enfance.
2.1. CARACTERISTIQUES DE LA RELATION MEDECIN – MALADE
Comme elle s’établit entre un être souffrant, demandant dans la règle
de l’aide, et un autre être possédant des connaissances spécifiques, un
savoir et un savoir-faire grâce auxquels cet inconfort et cette souffrance
pourront être atténués, elle est essentiellement hétérogène, asymétrique
et fondée institutionnellement sur les différences entre le statut et le rôle
du patient et ceux du médecin. Le statut et le rôle du malade comprennent
l’exemption (dispense d’une charge, d’un service commun. Ex. : exemption
d’impôts, d’obligations) de la responsabilité pour la maladie, le droit à
l’aide, l’obligation de désirer la guérison et l’obligation de coopérer avec le
médecin, parmi d’autres droits et devoirs mais importants. Quant au
médecin, la compétence technique, l’attitude universaliste, la spécificité
fonctionnelle, la neutralité affective et une attitude 8altruiste et de
désintéressement appartiennent à son statut et à son rôle.
Parmi ces quelques caractéristiques – il en existe d’autres – la
neutralité affective, à bien différencier de l’indifférence affective, est un
des ingrédients les plus importants entrant dans la 9relation médicale, qui
permet « l’empathie » (capacité de s’identifier à autrui par l’émotivité) du
médecin pour son malade.
La relation médecin-malade n’est pas seule qui soit asymétrique. La
relation enfants-parents l’est aussi, comme le rapport qui existe entre le
maître et l’élève. Dans chacun de ces exemples, l’un des protagonistes de
la relation est située en bas et l’autre en haut, l’un possède de l’autorité si
ce n’est du pouvoir, et l’autre beaucoup moins ou en est même dépourvu.
Ces inégalités flagrantes, scandaleuses aux yeux d’une certaine jeunesse
contemporaine qui refuse apparemment toute autorité et qui a tenté, mais

8 Altruisme: disposition à s’intéresser et à se dévouer à autrui (opposé à égoïsme)


9 Relation
: Lien de dépendance ou d’influence réciproque (entre personnes). Ex : relations
humaines, relations d’amitié, relations professionnelles, etc.
36

en vain, de les gommer par quelques manifestations tapageuses,


appartiennent à l’ordre même de la nature humaine, les parents étant nés
avant les enfants et le savoir et la compétence dans un domaine donné
appartenant à ceux qui les ont acquis, les autres en étant démunis, donc
dans une situation d’infériorité dans ce secteur.
En médecine ces inégalités sont, comme nous l’avons déjà relevé,
inhérentes au vécu psychologique de la maladie, qui entraîne régression et
dépendance, et elles sont plus importantes que dans d’autres types de
relation, puisqu’elles surviennent dans un contexte imprégné de souffrance
avec la perspective d’une atteinte à l’intégrité du corps et de l’esprit, de la
perte de fonctions importantes (comme la sexualité) et de la mort.
Il en résulte que le médecin, face à son malade, possède de l’autorité,
cette qualité que les autres, en l’occurrence les patients, lui reconnaissent
et qui est en rapport avec son savoir et ses compétences techniques et
psychologiques. Mais en même temps le patient lui demande d’être
puissant, si ce n’est tout-puissant, et de posséder du pouvoir, lequel est
dans notre domaine avant tout d’essence divine ou magique, issu de la
médecine archaïque sacerdotale ou surnaturelle (les chamans et les
sorciers), toujours présente dans l’esprit de nos contemporains lorsqu’ils
tombent malades. On parle aussi d’autorité rationnelle lorsqu’elle est
assise sur le savoir, la compétence technique et psychologique, et
d’autorité irrationnelle lorsque le malade fait appel à ce pouvoir de guérir
que posséderait le médecin devenu un véritable thaumaturge (qui fait des
miracles). Il est important que le praticien puisse connaître ce qui
appartient à son autorité et quel est le pouvoir que le patient lui demande
d’exercer. Lorsqu’une affection aiguë guérit d’elle-même, comme c’est
souvent le cas, dans la pratique courante du généraliste, celui-ci peut être
tenté de croire à sa puissance, laquelle ira au-devant de défaites lors de
maladies chroniques qui nécessitent davantage de compétence technique,
donc d’autorité, ne serait-ce que pour obtenir une 10compliance suffisante
du patient lorsqu’un traitement actif et de longue durée est indispensable.
Lorsqu’une relation est bien établie, le médecin considère le sujet
qu’il traite comme « son malade », et le patient le médecin comme « son
docteur ». Le lien devient très personnel sous la forme d’une appropriation
réciproque, sous-tendue par des sentiments de confiance, de respect et
10 Compliance pulmonaire : élasticité des poumons que l’on mesure dans le bilan des maladies
37

d’une affection très particulière que l’on pourrait à la limite désigner du


nom « d’ « amour médical », qui comporte chez le médecin un désir d’aider
un être qui se confie à lui et dont il perçoit la faiblesse et la dépendance
dues à la maladie. Mais cet amour médical exige qu’il soit très
soigneusement dosé pour que la dépendance et la régression soient juste
suffisantes, et qu’elles ne se perpétuent pas pour que le patient puisse
devenir autonome une fois l’affection améliorée. Lorsqu’une maladie dure
longtemps, l’idéal serait que le malade apprenne à se traiter lui-même,
comme on le fait pour les diabétiques ou des rhumatisants.
Si l’on peut constater des analogies entre les relations que nous
entretenons avec nos intimes et nos proches et celle du médecin avec son
patient, il serait inexact de penser qu’elles sont semblables.
Lorsqu’on dit que le patient attend que son docteur agisse comme un père
ou comme une mère, il s’agit d’une métaphore (image). Le médecin peut
bien adopter une attitude d’autorité rassurante ou de sollicitude pleine
d’une certaine tendresse, qui surviennent à la suite d’une identification
partielle à son patient ; il n’est cependant ni un « véritable père », ni une «
véritable mère ». Il peut, au plus, se comporter par moments assez brefs
comme un père ou une mère le feraient à l’égard de leur enfant, le temps
nécessaire à accomplir un acte médical important ou à faire passer un
moment très difficile de la maladie. Il peut aussi adopter des attitudes
fraternelles ou très amicales, sachant bien qu’il ne peut les assumer que
passagèrement, dans le cadre bien délimité de l’ « amour médical ».
En effet, s’il tient compte de la neutralité affective liée à son statut,
le médecin doit surveiller autant que possible les sentiments qu’il ressent à
l’égard du patient pour les élaborer selon les objectifs thérapeutiques qu’il
s’est fixés. Toute la sympathie et même l’amour qu’il peut éprouver pour
telle patiente, mais également l’antipathie et l’agressivité que tel autre
sujet suscite en lui, tous ces sentiments doivent passer par le filtre que
représente ce que l’on peut appeler la « conscience professionnelle »,
instance psychologique au service de ce que les psychanalystes désignent
par 11l’idéal du Moi, en l’occurrence un idéal professionnel. Ces processus
psychologiques d’ajustement des sentiments au but de l’action
thérapeutique se déroulent en grande partie inconsciemment, et ils

L’idéal du moi : sous-système du surmoi, il comprend des normes morales et sociales qu’on
11

en vient à faire siennes. Il correspond à notre conception de ce qui est bien.


38

permettent au médecin de traiter avec 12sollicitude et intérêt tous les


patients qui se présentent à lui, auxquels il peut manifester de l’empathie.
Alors que la sympathie se fonde sur une identification étendue et profonde
à l’autre, pouvant aller jusqu’à la fusion, l’empathie admet la critique même
du mouvement identificatoire et sa maîtrise, ce qui permet au médecin de
toujours maintenir une distance le différenciant de son patient, et lui
permettant de garder une position d’observateur, ce qui est indispensable
à l’efficacité de l’investigation diagnostique et du traitement. L’empathie
épargne au médecin les explosions sentimentales de sympathie, lui permet
de traiter avec bonté tous ses malades d’une manière à peu près égale et
ne l’oblige pas à user de la séduction, qui n’appartient pas à l’ « amour
médical ».
En somme, notons que la relation médecin-malade est très différente
des relations que nous avons vécues avec nos parents en tant qu’enfants,
et que nous entretenons avec nos intimes. S’il se forme entre le médecin
et ses patients, surtout dans le cadre de la médecine de famille, comme
une filiation, le praticien pouvant se considérer comme le père de tous ses
patients et ceux-ci comme les enfants de leur médecin, ce lien n’existe
vraiment que lorsque le sujet est malade et consulte, et il disparaît pour
ainsi dire complètement aussi bien chez le malade que chez le médecin, dès
que l’épisode morbide est terminé. L’empreinte de la filiation (lien de
parenté unissant l’enfant à son père, à sa mère) est donc peu marquée et
peu stable, contrairement aux mêmes sentiments qui existent dans la
famille.
Il est impossible de mettre sur le même plan les liens que nous
entretenons avec nos intimes, quels qu’ils soient, et ceux qui existent entre
le médecin et son malade. Si l’on peut constater certaines analogies et
même des éléments semblables, ces deux types de relation sont
fondamentalement différents.
Tout d’abord, leur but n’est pas le même. Nos relations sentimentales ont
pour premier objectif de permettre aux partenaires de vivre ensemble,
l’objectif de la relation médicale est d’aboutir au traitement le plus adéquat
et le plus économique de l’homme malade. On ne commence pas une
relation sentimentale en prévoyant déjà sa fin, tandis que la relation
médecin-malade est d’emblée limitée à la période pendant laquelle le
12 Sollicitude : attention soutenue et affectueuse
39

patient a besoin de l’aide technique et psychologique du médecin et pas


au-delà, même dans la médecine de famille. Enfin, et je pense qu’il faut
souligner cette différence, le médecin se fait payer pour ses prestations,
que ce soit directement ou indirectement, cela importe peu à notre propos.

2.2. DIFFERENTS MODELES DE LA RELATION MEDECIN – MALADE


2.2.1. Les modèles synthétiques
Ils s’adressent assez globalement à l’ensemble des situations
médicales et décrivent quelques processus essentiels.
a) Les niveaux de la relation selon le degré d’activité ou de passivité du
patient et du médecin (Hollender).
Le patient peut être complètement passif (coma, opération
chirurgicale) et manifester, dans d’autres situations, une activité normale.
Quant au médecin, son activité peut varier mais il n’est jamais passif.
- Premier niveau : le médecin est actif, le patient passif. Cette situation
se présente lors d’urgences, d’accidents graves et surtout lors d’un
coma et d’une opération sous narcose (sommeil provoqué
artificiellement = 13narcotique, hypnose …). On peut comparer cette
relation à celle que la mère établit avec le nouveau-né complètement
dépendant d’elle.
- Deuxième niveau : le médecin prend la direction de l’investigation et
du traitement. Le patient coopère. C’est à ce niveau que la plupart
des actes médicaux ont lieu (maladies aiguës, etc.). C’est la situation
de l’enfant face à ses parents.
- Troisième niveau : participation mutuelle et réciproque du médecin
et du patient. Le médecin apprend au patient à prendre en charge sa
maladie et à se traiter. Il lui transmet une partie de son savoir-faire
technique, l’encourage et l’autonomise. La relation à ce niveau est de
plus en plus utilisée dans les maladies chroniques et lors des
réadaptations (post-opératoires, posttraumatiques, dans les
affections de longue durée). Le prototype est la relation entre deux
adultes.

Narcotique : qui assoupit, engourdit la sensibilité, médicament qui provoque la


13

narcose=barbiturique hypnotique
40

b) Les phases relationnelles lors de la consultation (cfr. Von Gebsattel). Lors


d’une consultation médicale ordinaire, cet auteur distingue trois parties :
- La consultation débute par un appel de la part du patient qui souffre
et s’inquiète. Il a besoin du médecin, qui répond qu’il est là, à sa
disposition. Pendant ce début de la consultation, médecin et patient
se rapprochent beaucoup. La distance psychologique entre les deux
est courte ;
- Suit une phase où la distance devient beaucoup plus grande. Le
patient, dont l’anxiété initiale a disparu par l’accueil du médecin, lui
demande inconsciemment de faire preuve de son autorité technique.
« Il doit savoir ». Le médecin examine le malade et, comme nous le
verrons, doit se mettre à distance pour assurer l’objectivité de cet
examen. Le patient devient « un cas » pendant cette phase
d’objectivation.
- le diagnostic posé ou la situation suffisamment éclaircie, le
traitement et la prise en charge peuvent commencer. C’est la phase
de la 14personnalisation.
Une relation plus complète s’est créée qui correspond à l’appropriation
réciproque dont il a déjà été question : « c’est mon malade ». « Voici mon
médecin ». Médecin et malade se sont rapprochés.
2.2.2. Modèle analytico – synthétique
D’une réflexion qui s’est poursuivie longtemps sur la manière dont on
abordait l’étude psychologique de notre thème, sur les modèles proposés
et sur la réalité des différentes pratiques médicales qui diffèrent beaucoup
l’une de l’autre, au point de vue psychologique également, nous avons
conclu qu’il était peut-être préférable de décrire un modèle de la relation
médecin-malade qui aurait l’ambition d’englober toutes les situations (si
différentes et disparates) de la pratique journalière, mais de recenser dans
un premier temps les paramètres ou items psychologiques les plus
fréquents et les plus significatifs. Autour de ces paramètres, plusieurs types
de relation médecin-malade se sont imposés, qui se sont en quelque sorte
échelonnés naturellement en fonction de la quantité d’implications psycho
dynamiques qu’ils contiennent. Le cadre théorique que nous avons choisi
est un mélange d’empirisme, la doctrine traditionnelle cherchant à

14 Personnalisme : système philosophique pour lequel la personne est la valeur suprême


41

expliquer la relation médicale dont on ne peut pas encore se passer, et de


psychanalyse. Les facteurs ci-dessous donnent un aperçu synoptique de
l’articulation des paramètres psychologiques et des différents types de
relation.
a) Relation « scientifique » : meilleure connaissance « scientifique » par le
médecin des processus physiopathologiques et psychopathologiques de la
maladie.
b) Service de réparation : retour à un niveau de fonctionnement de
l’organisme assimilable à la santé.
c) Service d’entretien : maintien d’un niveau donné de fonctionnement de
l’homme, en évitant si possible une dégradation.
d) Relation du consultant : donner un avis compétent dans un domaine
médical spécialisé.
e) Relation d’expert : production d’une expertise (examen technique par
un expert, pendant l’instruction d’un procès ; estimation de la valeur d’un
objet d’art, étude de son authenticité par un expert : Ex. : l’expertise a
prouvé que le tableau était un faux), c'est-à-dire d’un avis écrit motivé
concernant un problème médical et destiné à une autorité.
f) Relation d’aide : le médecin tend à agir à la place du patient, selon la
conception qui s’est faite de ce que celui-ci devrait faire.
g) Relation pédagogique : apprentissage par le patient, aidé par le médecin,
de certaines attitudes et comportements en relation avec le fait d’être
malade.
h) Relation suggestive : le médecin incite le patient à accomplir des
changements de comportement et d’attitudes en se servant de
mécanismes d’identification passagère.
i) Relation de soutien : le médecin soutient les parties saines et les
mécanismes de défense du patient pour que celui-ci puisse surmonter, si
possible d’une manière autonome, les difficultés en rapport avec la
maladie.
j) Relation interpersonnelle subjective : permettre au patient d’acquérir
une meilleure connaissance de lui-même.
42

Donnons enfin quelques précisions au sujet de quelques types de


relation :
1) La relation « scientifique » : elle survient chaque fois que le médecin ne
considère plus l’homme malade, mais un organisme, un organe dont il doit
étudier et comprendre le mauvais fonctionnement. Il se trouve devant un
« objet » d’étude, comme dans un laboratoire d’une science exacte, ce qui
lui permet l’attitude la plus objectivante possible. Chaque médecin utilise
la relation « scientifique » qui, à la limite, ne possède plus les
caractéristiques d’un rapport humain, lors de l’examen physique de son
patient. Elle a, dans un passé récent, été exploitée par une certaine «
médecine de pointe » dont les excès ont été critiqués à juste titre.
2) La relation du service de réparation : probablement la plus employée,
avec la relation de soutien, par le généraliste et certains spécialistes
(chirurgiens). Le patient lui confie une partie de lui-même qui souffre, qui
est détériorée et qui fonctionne mal, pour qu’une réparation survienne,
ramenant l’état de santé antérieur. La relation est analogue à celle qui
existe entre le mécanicien qui répare une automobile et le propriétaire de
celle-ci.
3) La relation du service d’entretien : la plus fréquente lors d’affections
chroniques. Il ne s’agit plus de rétablir la santé comme lors d’une
réparation, mais de maintenir si possible l’homme malade à son niveau de
fonctionnement le plus élevé en utilisant dans la relation un objet
intermédiaire, tel le médicament, la physiothérapie, etc. Une telle relation
peut durer des années et doit être mise périodiquement en question par le
médecin, pour juger de sa nécessité et de son utilité.
Opposons maintenant, après avoir laissé de côté les relations de
consultant et d’expert, la relation d’aide et la relation de soutien qui,
apparemment très proches, sont essentiellement différentes.
4) La relation d’aide : héritière de siècles de charité religieuse et laïque, elle
a occupé une place primordiale dans les soins médicaux hospitaliers et à
domicile. Le malade est considéré comme un « pauvre » que l’on doit aider,
assister et envers qui il faut exercer de la bienfaisance. L’aide consiste à
donner au patient ce dont on estime qu’il a besoin et à faire à sa place ce
qu’on pense lui être utile. Ce modèle a influencé les services sociaux à leurs
débuts, puis a été remplacé par d’autres modèles, mais il subsiste encore
43

et le médecin est souvent tenté d’agir à la place de son patient, de faire


exemple telle ou telle démarche auprès d’un service administratif ou d’une
autorité, même sans obtenir l’accord de l’intéressé. Cette fuite en avant
cache souvent une culpabilité inconsciente, en rapport avec une
déconvenue (désappointement causé par un insuccès, une mésaventure,
une erreur = déception) thérapeutique.
5) La relation de soutien : elle a heureusement remplacé le plus souvent la
relation d’aide qui maintient le patient dans une situation d’inférieur et
d’obligé.
L’aide se concrétise par des actions, effectuées par le médecin, le soutien
par un travail psychologique qui exige la collaboration du patient. Le
médecin s’appuie sur les parties saines du patient et, tout en respectant
ses mécanismes de défense, il cherche à le rendre le plus autonome
possible, donc capable d’effectuer toutes ces actions qui sont faites par le
médecin au cours de la relation d’aide.
6) La relation pédagogique : tout médecin est un « docteur », un enseignant
et a toujours quelque chose à apprendre à son patient, ne serait-ce qu’à
prendre correctement le médicament prescrit. L’action médicale
pédagogique se développe de plus en plus, et est à la base de tous les
programmes de réadaptation.
7) La relation suggestive : pure, elle est l’ingrédient principal de certaines
méthodes thérapeutiques comme l’hypnose et les relaxations. Elle fait
appel à la toute-puissance du thérapeute et à l’impuissance assumée du
malade.
« Assumée » signifie qu’il désire être impuissant devant celui auquel il se
soumet. Beaucoup de patients adoptent cette attitude dès qu’ils sont
malades et entent facilement dans une relation suggestive avec leur
médecin. Il est donc utile que celui-ci connaisse les propriétés de cette
situation psychologique pour pouvoir utiliser celles qui peuvent favoriser le
traitement.
8) La relation interpersonnelle subjective : il s’agit de la relation
psychothérapique et de la relation psychanalytique. Elle peut être utilisée
par le médecin non psychiatre, lors de son activité quotidienne, soit par des
interventions brèves (le « flash » ou « éclair » de Balint), soit par une action
de plus longue durée, mais à condition qu’il acquière une formation
44

supplémentaire dans ce secteur, par exemple par la fréquentation d’un


groupe Balint (ou analogue) de formation à l’abord psychologique du
malade et de la relation médecin-malade.
2.3. ALITEMENT, HOSPITALISATION, INVALIDATION
2.3.1. L’alitement peut se faire soit à domicile, soit à l’hôpital.
Dans les deux cas il est le témoin d’une régression. Si celle-ci ne se produit
pas, il est très difficile pour la famille, le médecin et le personnel médical
d’obtenir le maintien au lit d’un patient, même gravement atteint, et
surtout d’un enfant. Mais si la régression persiste, l’alité ne se lèvera qu’à
contre cœur lorsqu’il ira mieux. L’alitement complet exige aussi d’accepter
de devenir dépendant de membres de sa famille ou du personnel soignant,
ce qui n’est pas supporté par certaines personnalités, surtout lorsque le
patient doit être nourri et qu’il ne peut accomplir seul ses besoins naturels.
Lors d’affections létales (mortelles) et débilitantes (qui affaiblissent,
démoralisent), la difficulté à se lever indique souvent la proximité de la
mort et ce signe peut permettre aux proches et au personnel soignant
d’aborder avec le patient sa fin prochaine.
Mais se mettre au lit ne témoigne pas forcément de la gravité d’une
affection organique. Le syndrome du renoncement, à supporter une
maladie ou simplement à vivre, peut débuter ainsi, surtout mais pas
seulement chez des personnes âgées.
2.3.2. L’hospitalisation
Elle représente toujours un événement important dans la vie de
n’importe qui, car l’hôpital est encore lié dans notre inconscient à la mort,
à la douleur et à l’abandon, ceci même si l’on est hospitalisé à sa
demande pour des examens de routine désirés. Mais aussi l’hôpital peut
devenir le refuge souhaité lorsqu’on se sent très mal et affaibli, mais
également lorsque, sans être très malade, on désire s’éloigner de son
milieu professionnel ou personnel truffé de conflits, ou que l’on espère
être soigné avec attention en étant déchargé de toute responsabilité.
En règle générale pourtant, l’hospitalisation est une épreuve
entourée de menaces et provoquant de l’incertitude, de l’anxiété et même
de l’angoisse, surtout si elle n’était pas prévue et qu’on n’ait pu la préparer
(urgences).
45

Dans leurs grandes lignes, les considérations sur la réaction à la


maladie et sur la relation médecin-malade restent valables pour décrire les
événements psychologiques liés à l’hospitalisation, mais en tenant compte
des complications qui résultent du fait que le malade quitte d’habitude son
médecin dit de famille et que le médecin d’hôpital n’agit pas seul, mais qu’il
est entouré de collaborateurs plus ou moins liés en une équipe soignante
intégrée dans un système hiérarchique favorisant la dilution des
responsabilités et rendant difficiles les communications avec le patient. De
plus, la fragmentation horizontale de la médecine hospitalière en une
multitude de secteurs spécialisés introduit dans la relation médicale encore
d’autres personnages.
L’entrée à l’hôpital modifie les rapports du patient avec sa famille et
ses proches, et peut réveiller des sentiments d’abandon et de rejet que le
personnel soignant devrait détecter, car s’ils ne sont pas pris en
considération ils vont augmenter l’impuissance du patient qui va se
décourager. Toutes ces anxiétés et ces angoisses que vit le sujet hospitalisé
se résolvent mieux s’il sait quel médecin, parmi tous ceux qu’il rencontre
journellement, est « son médecin » et si ce médecin se sent véritablement
responsable de « son malade », c'est-à-dire responsable des décisions
diagnostiques et thérapeutiques, et responsable de lui en faire part et d’en
discuter avec lui. Or ce problème, qui paraît d’une simplicité enfantine,
trouve très difficilement une solution satisfaisante dans un grand hôpital.
Si l’on se réfère au modèle de la relation médecin-malade fondée sur
le degré d’activité et de passivité des acteurs, on peut l’appliquer aux trois
types d’hospitalisation :
a) L’hospitalisation d’urgence : médecin actif, patient passif et d’habitude
régressé. L’hospitalisation représente une mesure nécessaire et
sécurisante, tant pour le patient que pour le médecin.
b) L’hospitalisation préparée : le médecin prend la direction des opérations
et explique au patient et à sa famille la nécessité de cet acte et discute avec
le patient des craintes que celui-ci ressent : craintes de mourir à l’hôpital,
d’une maladie grave, du cancer, d’interventions douloureuses et répétées,
d’une longue hospitalisation, de la promiscuité d’une salle commune, du
risque de la perte de l’identité et de sa vie personnelle, d’avoir à subir des
soins devant tout le monde et d’être exposé nu, d’être pris pour un cobaye
46

(surtout dans les hôpitaux universitaires) avec la crainte d’être présenté à


des étudiants en médecine sans que l’on prenne des égards nécessaires.
c) L’hospitalisation concertée : le médecin désire des mesures de contrôle,
de rééquilibration d’une maladie chronique ou de réadaptation. La pleine
collaboration du patient est nécessaire et l’hospitalisation ne peut remplir
ses buts que s’il existe un commun accord entre le médecin et le patient.
Enfin, dans une proportion non négligeable de cas, l’hospitalisation
ne résulte pas de causes primairement médicales, mais est la conséquence
d’un processus social ou parfois affectif.
Lorsqu’une personne n’est pas bien tolérée par sa famille, son
entourage ou la communauté, l’utilisation « sociale » d’une affection
médicale, par ailleurs peu grave et ne justifiant pas à elle seule une
hospitalisation, aboutit tout de même à l’admission à l’hôpital, et souvent
en urgence. Il en est de même lors de conflits conjugaux, familiaux ou
autres, qui entraînent des explosions d’angoisse immédiatement convertie
en symptômes physiques qui en font des faux cas d’urgence somatique.
2.3.3. L’invalidation.
Toute affection héréditaire ou acquise, aiguë ou chronique, peut
laisser des séquelles lésionnelles ou fonctionnelles qui se manifestent par
une invalidité. Le sujet atteint peut accepter les restrictions qui limitent
l’usage de son corps ou de son psychisme et, comme on dit, s’y adapter. Il
peut aussi en nier l’importance ou même l’existence. Enfin, il peut vivre
cette invalidité, même si elle est minime, dramatiquement et en faire la
trame (ce qui constitue le fond et la liaison d’une chose organisée = texture.
Ex. la trame d’un récit. Texture : arrangement, disposition des éléments
d’une matière, d’un tout) de son existence en devenant un malade «
chronique psychologiquement », c'est-à-dire régressé, passif et dépendant,
et ne pouvant renoncer aux bénéfices primaires et secondaires de
l’invalidité « psychologique ».
2.4. LA DOULEUR
Quelle que soit l’origine d’un fait psychologique, avoir mal touche
l’homme dans son ensemble et une douleur purement physique (colique
néphrétique = qui se rapporte au rein) enclenche des phénomènes
47

psychiques, de même qu’une douleur psychique (on disait morale),


s’accompagne de répercussions physiques.
C’est vraiment le prototype du symptôme psychosomatique, et c’est sous
cet angle qu’il convient de l’envisager et de le traiter, en déchiffrant au
mieux sa signification qui est toujours double : d’une part le signe d’un
dysfonctionnement et d’une lésion organiques et, d’autre part et en même
temps, le témoin d’un mal-être existentiel.
Sur le plan thérapeutique, la douleur peut être calmée ou abolie, en
éliminant sa cause, mais aussi par des médicaments agissant sur les
structures cérébrales qui la concernent, donc la complexité neurochimique
est beaucoup mieux connue de nos jours (les endorphines8 par exemple),
et également par des moyens psychologiques (l’action rassurante du
médecin, l’hypnose, et certainement la part psychologique des médecins
dites naturelles ou parallèles).
Des centres de recherche interdisciplinaires étudiant la douleur, des
cliniques « de la douleur » (pain clinics) sont apparus récemment, et des
médecins spécialisés dans ce domaine se sont installés en clientèle privée.
Or la douleur, comme la mort, appartient à toute la médecine et les progrès
réalisés dans les centres de recherche et les cliniques spécialisées doivent
être diffusés à tous les médecins et au personnel soignant pour qu’ils
puissent mieux traiter la douleur globalement, celle-ci abolissant la
distinction que l’on peut toujours faire, artificiellement, entre psychogène
et organique.
2.5. LA MORT
Au cours des trente dernières années, la mort a réintégré la médecine
comme elle est devenue à nouveau l’objet des préoccupations
philosophiques et anthropologiques de nos contemporains. Sous l’angle
psychologique – la psychologie étant, en reprenant la définition de K.
Lorenz, « l’étude des processus subjectifs de l’expérience vécue qu’on ne
peut observer d’une manière directe que sur soi-même » - notre mort
personnelle échappe à notre connaissance, ce qui aboutit aux notions
d’immortalité et à tous les processus de dénégation philosophiques et
religieux de cette réalité, qu’on ne peut constater que par l’anéantissement
des autres et surtout des proches.
48

Pourtant, nous pouvons penser à la mort en nous référant à la vie et


elle représente alors la séparation d’êtres chers, l’abandon par ces mêmes
personnes, la peur de l’inconnu et le renoncement à tout ce qui nourrit
notre existence et surtout à l’avenir. Ces préoccupations appartiennent au
conscient. Sur le plan inconscient, la mort est vécue comme une
destruction, un meurtre et une désintégration de type prégénital, ravivant
des fantasmes archaïques très inquiétants.
En s’approchant très chaleureusement des personnes en fin de vie,
des médecins, des infirmiers, des aumôniers, dans des hôpitaux, des homes
recevant des mourants, à domicile (dans les pays anglo-saxons surtout) ont
permis de mieux entourer et soutenir les personnes à l’agonie qui
n’intéressaient pas une certaine médecine « scientifique ». Ces
mouvements ont fait tache d’huile et les soins aux malades en fin de vie
préoccupent à nouveau le monde médical.
E.Kübler – Ross a décrit les différents stades qui aboutissent à
l’acceptation de la mort :
- la dénégation et l’isolation (« ce n’est pas moi qui vais mourir) ;
- la colère et le ressentiment (« pourquoi moi ? Tout le monde, Dieu y
compris, est méchant » ;
- le marchandage (« je serai gentil et je ne mourrai pas ») ;
- la dégression et le chagrin (« Je vais tout perdre, le présent, le passé,
mais surtout l’avenir ») ;
- enfin, l’acceptation, qui passe par le renoncement.
Le médecin, l’infirmier ou l’aumônier, s’ils ont pu aborder en eux-
mêmes ces problèmes, mais aussi l’étudiant en médecine et les proches du
malade, peuvent certainement l’aider à accomplir ce travail psychologique
au sujet duquel existe maintenant une très importante littérature.
La mort peut avoir lieu à deux endroits bien connus :
a) La mort à domicile : de plus en plus d’hommes et de femmes désirent
terminer leur vie chez eux, et être entourés et soutenus par leur médecin
traitant. Il appartient donc à celui-ci de se former dans ce domaine récent
de connaissances psychologiques par des lectures, mais aussi par la
participation à des groupes de formation type Balint, où ces problèmes sont
abordés par l’étude d’exemples de cas concrets suivis jusqu’à la fin. Ce que
demande le patient en fin de vie, c’est qu’on soit honnête avec lui, qu’on
49

l’accompagne et qu’il puisse continuer jusqu’au bout à communiquer avec


son médecin et ses proches et parler, s’il le désire, de ce qu’il éprouve
devant sa mort. Il demande que les autres soient disponibles, ce qui
diminue l’opacité mensongère qui a entouré de plus en plus le passage de
la vie à la mort dans une civilisation qui avait eu la tendance à expulser cette
dernière de ses préoccupations, en partie parce que la médecine, par
l’ampleur de ses progrès, pouvait lui laisser entendre que la mort allait être
vaincue. Mais la mort concerne très intensément les proches du malade, sa
famille et ses amis, et le soutien du médecin s’adresse aussi à ce groupe
qu’il ne peut plus ignorer.
b) La mort à l’hôpital et dans les institutions pour handicapés et personnes
âgées : le but à atteindre est de ne plus laisser le patient ou le vieillard
mourir seul, sans posséder la liberté de parler de sa mort, très souvent dans
une angoisse qui peut être diminuée si ce passage est humanisé et vécu
comme un événement personnel naturel pour tout le monde. Dans certains
hôpitaux, on a créé des sections spéciales pour les personnes en fin de vie,
avec un personnel désireux de se former dans ce domaine.
Si ce modèle ne peut être appliqué partout, il a eu le grand mérite de
démontrer éloquemment comment, par des mesures psychologiques et
sociales simples, on pouvait renverser la vapeur en atténuant les
mécanismes défensifs inconscients que nous avons tous devant la mort, la
nôtre ou celle d’autrui, mais qui étaient devenus très intensifs en milieu
hospitalier lorsque le médecin et les soignants vivaient la mort de leur
patient uniquement comme un échec insoutenable qui devait être oublié,
c'est-à-dire refoulé, à tout prix.
Bien que l’on recommence à désirer mourir à domicile, cette
tendance n’empêche pas qu’en France près de 80% des décès ont lieu dans
une institution hospitalière. Or, on observe chez les malades gravement
atteints et chez les personnes en fin de vie des états dégressifs en relation
étroite avec le vécu douloureux. Le médecin doit faire le diagnostic, et il
sera souvent amené à prescrire des médicaments antidépresseurs à petites
doses, qui éclairciront la tristesse sans la faire forcément disparaître.
50

CHAPITRE TROISIEME : LE MALADE ET SA MALADIE


3.1. NOTION
La maladie, selon Back J.F. et al. (1975) est une altération de l’état de
santé ou une perturbation des fonctions normales d’un ou plusieurs
organes dont les causes sont en général connues, et qui se traduit par des
signes et des symptômes.
Le malade souffre donc d’un état morbide. Il doit se présenter chez un
médecin ou un psychothérapeute pour se faire soigner. Le malade est un
être humain qui a une histoire derrière lui, comprenant les circonstances
physiques psychologiques, conscientes ou inconscientes. Ces circonstances
sont l’hérédité, le tempérament, le milieu familial et social, l’enfance,
l’adolescence, l’âge adulte, etc. le tout constituant l’homme malade.
C’est pourquoi, l’homme n’est pas divisé en une série de pièces détachées
qu’il faut réparer séparément mais constitue un tout indivisible. Par
conséquent, la maladie est une réaction de la totalité de l’organisme. Que
la cause soit physique ou psychologique, la maladie est toujours générale.
3.2. LE PREMIER ENTRETIEN ENTRE LE MEDECIN ET LE PATIENT
Selon P.B. Schneider (1971, pp. 163-171), le premier entretien avec
le malade sert à la prise de contact avec un être humain. Il peut être utile
lorsqu’on traite le malade et non la maladie ; de laisser la liberté au patient
d’établir ce contrat à sa façon, à le comprendre en tant qu’homme malade.
Lorsque le médecin intervient le moins possible et d’une manière neutre et
non suggestive, le malade de dévoile d’une manière très vivante en
montrant ses faiblesses, ses psychologiques.
La consultation a un début et une fin. Ainsi, le médecin doit se faire
une opinion même très provisoire, prendre des décisions qui sont en
quelque sorte le dénouement normal de la consultation. Il prend encore
une décision lorsqu’il doit revenir pour un examen complémentaire.
Pour récolter les informations lors de premier entretien, on recourt à deux
techniques principales suivantes :
1° L’anamnèse méthodique : dès que le malade décrit les troubles dont il
souffre, le médecin construit une hypothèse pathologique qu’il utilise pour
couvrir le champ informatif qui lui sera nécessaire. Il dirige donc l’entretien
et pose, en tenant compte de cette hypothèse de travail, des questions sur
51

l’affection actuelle, maladies passées, sur les antécédents héréditaires si


cela est nécessaire.
L’examen physique permettra de confirmer ou d’infirmer cette hypothèse,
d’en formuler une nouvelle dans la seconde éventualité, qu’il élabora par
des nouvelles questions.
2° L’entretien non directif : son but est d’élargir son champ informatif et
d’apprendre à connaître à la fois l’homme et la maladie. Cela exige une
disponibilité du médecin.
Celui-ci doit observer le patient dans sa manière d’être, de se présenter, de
parler et de réagir et adopter son attitude et son langage.
Les résistances du patient donneront des indications sur sa structure
psychologique. Le patient considérera le médecin selon sa pathologie
personnelle et de fera une figure, une image, qui peut aller du personnage
bienveillant. Lorsque l’entretien se déroule normalement et
convenablement, les problèmes sont abordés au moment précis où ils
doivent l’être, certains thèmes très personnels touchant aux sentiments, à
la sexualité, à l’argent, peuvent trouver une solution satisfaisante.
2.3. LES DIFFERENTS SECTEURS DE L’ANAMNESE PSYCHOSIALE
Toute une série de questions spécifiques doivent être posées si on
veut diagnostiquer une maladie ou si on veut élucider dans une vue
d’ensemble des troubles physiques ou mentaux dont souffre un patient.
Ainsi, nous allons analyser les secteurs suivants :
1° La maladie actuelle : il faut commencer par les troubles que ressent le
patient, sa souffrance. Il faut donc laisser le patient parler de ce qui
l’inquiète. C’est pour cela qu’il vient chez le médecin. Il faut poser des
questions et pénétrer dans la vie même du patient et établir des
corrélations qui peuvent exister entre des situations personnelles,
psychiques ou psychologiques et le début d’une affection.
Ex : Une obésité peut coïncider avec un divorce, le début d’une tuberculose,
avec l’éloignement du milieu familial.
 L’attitude du patient à l’égard de « sa maladie » est très importante
à noter.
52

Que pense-t-il de son affection ? La participation affective ou au contraire


le fait qu’il prend une distance face à sa maladie, qu’il minimise les troubles
ou même qu’il semble en partie les ignorer alors qu’ils sont évidents,
éclairent la relation du malade à son corps et à sa maladie de se défendre.
 La conception que le patient se fait de sa maladie est aussi un facteur
important dans cet entretien. La pathogénie que le patient invoque
dévoile ce que le patient attend d’un traitement et du médecin. Il
peut alors exprimer ses sentiments sur la situation d’examen, son
désir de guérison, le gain secondaire que lui procure la maladie, la
dépendance à l’égard de celle-ci et du médecin. Lorsque le malade
est hospitalisé, l’attitude à l’égard de l’hôpital, du personnel soignant,
est très importante à connaître.
2° L’anamnèse familiale comporte des renseignements sur l’hérédité et sur
la structure de la famille : composition, niveau social, professionnel,
caractères des membres … On peut aussi connaître la position du patient
dans la fratrie dans laquelle il a été élevé, des attachements qu’il a eu avec
sa famille à sa petite enfance… Cela peut permettre de connaître ses zones
de conflits.
3° L’anamnèse personnelle : celle-ci a déjà été abordée et comporte les
sous-points suivants :
- L’enfance : savoir si c’est un enfant désiré ou non et quelles étaient les
réactions des parents à la naissance, se renseigner également sur la
grossesse de la mère (accouchement), la manière dont le bébé était nourri,
sevré, élevé, pendant les deux premières années de la vie et le reste de son
entourage, son développement psycho-affectif, l’attitude de l’entourage et
des parents, ses succès et ses échecs scolaires, son attitude à l’égard de ses
maîtres, son adaptation dans le groupe, ses loisirs, jeux, solitude, tolérance
à un groupe ou la vie solitaire.
- La vie militaire : le désir du patient de faire du service militaire ou son
refus : ses motivations, son adaptation au groupe militaire et à la discipline.
La fuite de la vie civile et de ses responsabilités par le service militaire.
- L’adaptation religieuse et les loisirs actuels : sports, possibilités de
rapports sociaux dans les loisirs et des réactions du patient dans ce
domaine.
53

- Maladies et accidents avec leurs répercussions psychiques.


- Développement psycho-affectif : vie sexuelle et sentimentale. C’est ici que
l’on enregistre des résistances ; il n’est pas facile d’obtenir à tout prix des
renseignements à ce sujet lors du premier entretien. Cela dépend de l’âge
et de l’état-civil du patient.
Ainsi, on peut obtenir des renseignements sur :
 l’éducation sexuelle reçue ;
 les premières manifestations sexuelles (première masturbation,
pollutions nocturnes, rêves érotiques …) et surtout les réactions du
sujet ;
 l’érotisme en général ;
 l’homosexualité et l’hétérosexualité ;
 l’adaptation sexuelle : l’orgasme, sa qualité, les troubles de la
puissance pour l’homme et les signes de frigidité pour la femme.
4° L’attitude générale du patient pendant l’anamnèse
Les réactions et l’impression que le patient donne au médecin
doivent être notées. Il est à noter que la prise des notes sur les
renseignements anamnestiques peut troubler certains patients, d’où, il
faut leur expliquer la raison et leur assurer sur le secret médical. Parfois,
pour protéger la relation médecin-malade, il est préférable de s’abstenir
d’écrire pour que le patient se sente plus libre de communiquer. L’entretien
doit permettre de reconnaître les zones de conflits, les délimiter et
d’obtenir des voies d’accès à ses secteurs.
L’entretien doit avoir des moments de tension et de détente, de
rapprochement et d’éloignement, de participation affective et de
neutralité. Le début d’une investigation doit être neutre. Les quelques
paroles d’ouverture du médecin doivent « détendre » l’atmosphère comme
on dit selon le rituel social : pour permettre au patient de décrire très
rapidement ce qui le gêne, le fait souffrir ou l’inquiète. Les questions qui
sont posée dans ce secteur doivent pénétrer dans la sphère personnelle. Le
patient doit dominer cette première anxiété, le médecin y répondant par
une attitude d’auditeur attentif.
54

Chaque entretien a un début, un déroulement et une fin ; le premier


entretien, dans le cadre d’une consultation, aboutit souvent à un acte
thérapeutique.
La durée de la première consultation dépend de la situation réelle dans
laquelle se trouve le médecin et de ses disponibilités.
3.4. LES FACTEURS PSYCHOSOCIAUX DE LA MALADIE
3.4.1. La résistance à la maladie
C’est un ensemble des forces psychologiques qui, chez un sujet en
analyse, s’opposent aux progrès de la connaissance de soi. C’est une
capacité d’annuler ou de diminuer l’effet d’une force.
Cette opposition inconsciente se manifeste sous les formes les plus
diverses : doute et méfiance à l’égard du thérapeute, critique des théories
psychanalytiques, non-respect des consignes, silences, absences, etc. Elle a
pour but d’interdire l’analyse des symptômes morbides et des mécanismes
psychologiques afin de préserver l’équilibre précaire difficilement construit
par le sujet et de conserver les bénéfices procurés par la maladie. La cure
psychanalytique consiste moins à fournir des interprétations au malade
qu’à analyser ses résistances pour les combattre et les supprimer.
De temps en temps, on trouve que plus un sujet a un statut élevé,
c’est-à-dire plus il assume des responsabilités, plus en moyenne sa
résistance à la maladie est forte. Cette réaction dont la réalité statistique a
été démontrée serait liée au fait que la maladie est perçue comme un signe
de faiblesse, en contradiction avec le rôle assumé (Ex. le cas de l’ex.
Président Mobutu).
3.4.2. L’optimisme
C’est une attitude de celui qui regarde de préférence de bon côté des
choses, qui croît en l’homme, au progrès et à l’amélioration du genre
humain.
L’optimisme n’est pas le sujet candide, (naïf) que l’un croît trop
souvent, mais, au contraire, un individu courageux, qui ne se laisse pas
rebuter (décourager) par les obstacles et qui maintient son action alors
même que tout semble perdu.
55

L’optimisme est le forment (ce qui fait naître ou détermine (un sentiment,
un changement, …) de la créativité.
3.4.3. La crainte du diagnostic et du traitement
L’acceptation de la maladie entraîne celle de l’autorité du médecin et
celle du traitement qui sera imposé. L’adhésion à certaines sectes
religieuses handicape parfois l’acceptation de la maladie. Les membres de
ces sectes soit nient simplement l’existence de la maladie, soit la
considèrent comme la conséquence du péché.
3.5. LES REPRESENTATIONS CULTURELLES DE LA MALADIE ET DE LA
SANTE
Il nous semble doublement nécessaire, écrivent Ph. Jeammet et al.
(1996, p. 250), d’en dire quelques mots car toute culture a une certaine
représentation de la maladie et donc du normal et du pathologique ; et,
d’autre part, nous sommes probablement à un moment où, du fait de
l’efficacité de nos moyens techniques, les effets de cette représentation a
prévu de la maladie et de la santé ont le plus de conséquences. L’ampleur
même de ces conséquences va probablement nous obliger à une réflexion
collective qui peut changer la nature de cette représentation.
3.5.1. Figures sociales et culturelles de la maladie
Chaque société s’est donné une représentation de la maladie. Nous
ne les passerons pas toutes en revue. Retenons qu’on peut les séparer en
deux grands courants :
a) Le premier se réfère à une conception ontologique (partie de la
philosophie qui traite de l’être indépendamment de ses déterminations
particulières. Ex. : preuve ontologique de l’existence de Dieu) de la maladie,
c’est-à-dire lui conférant une existence autonome. Elle existe
indépendamment de l’organisme qui la supporte et qu’elle vient attaquer
de l’extérieur. G. Canguilhem citant Sigerist (G. Canguilhem : Le normal est
le pathologique, PUF, 1966) fait remarquer que cette conception résulterait
d’une condensation (réduire, ramener l’expression de la pensée, abréger,
résumer, Ex. Texte condensé) opérée par la médecine et l’expérience
orientale des affections parasitaires. La découverte des microbes par
Pasteur devait contribuer à renforcer cette vue en lui donnant son cachet
scientifique.
56

Les conceptions religieuses de la maladie, comme sortilège (artifice


de sorcier ; action, influence qui semble magique, maléfique, sort),
envoûtement (exercer sur quelqu’un un attrait, une domination irrésistible
capturer, ensorceler, fasciner. Ex. : Cette femme l’a envoûté. Envoûter son
auditoire) ou possession, participent de la même façon de voir ; la
conception chrétienne de la maladie – châtiment également, mais d’une
façon peut-être plus ambiguë, dans la mesure où le sujet pêcheur prend sa
part de responsabilité dans ce qui lui arrive.
b) Le deuxième courant considère la maladie comme une réaction, de
l’organisme et de l’individu dans leur totalité, à une perturbation de leur
équilibre
C’est Hippocrate et son école, dans l’Antiquité Gracque, qui ont
illustré le mieux cette conception. Pour eux, la nature est équilibre et
harmonie. Cet équilibre résulte d’un jeu dynamique de fluides à l’intérieur
de l’organisme. La maladie reflète la rupture de cet équilibre et traduit déjà
un effort de guérison de l’organisme à la recherche d’un nouvel équilibre.
La maladie ne peut pas être localisée, elle concerne l’homme dans son
entier. Ici, les facteurs externes ne sont que des occasions pour le
déséquilibre interne de se manifester, elles ne sauraient être les causes.
La maladie y est tout à la fois expression du tempérament, ou, d’une
façon plus moderne, de la personnalité, et déjà effort d’ « adaptation ». Elle
n’est plus obligatoirement l’ennemi à abattre mais demande une alliance
thérapeutique ou, au moins, une compréhension du rôle qu’elle joue dans
le nouvel équilibre.
Dans la pratique médicale, il nous semble plus intéressant de voir les
deux courants comme complémentaires plutôt que s’excluant
mutuellement. Les positions qui en découlent seront de ce fait plus
menacées et plus adaptées à chaque cas.
La première conception est en effet plus optimiste et conduit à des
attitudes plus combatives que la seconde. Il faut rejeter hors de l’organisme
le microbe, le parasite, représentant du mal, tout comme on repousse hors
des frontières l’envahisseur. La thérapeutique est une guerre et trouver un
ennemi commun facilite l’alliance entre malade et médecin.
La deuxième conception se montre plus exigeante sur ce plan-là. Le
mal est en nous, mais nous avons aussi la possibilité « naturelle » de rétablir
57

notre équilibre. Il faut pour cela connaître ce qui nous « agite » et le jeu des
forces à l’œuvre en nous. L’individu est impliqué dans son trouble comme
dans sa guérison.
3.5.2. Qu’est-ce que la santé ? Le normal et le pathologique
La santé, comme nous l’avons signalé dans l’introduction, est un bon
état physiologique d’un être vivant, fonctionnement régulier et
harmonieux de l’organisme. Bref, la santé est un état de bon
fonctionnement de l’organisme.
La santé, selon la définition de l’OMS, se caractérise par un « « état
de complet bien-être physique, mental et social ne consistant pas
seulement en une absence de maladie ou d’infirmité ». (I. Jeuge Maynant
et al., 2007, p. 845 cf. Petit Larousse de la médecine dans la bibliographie).
Le normal est ce qui se conforme à une règle. La normalité
socioculturelle est une notion relative, variable avec les milieux
socioculturels et les temps : c’est ce qui s’observe le plus souvent, dans une
société et à une époque données. Dans un ensemble statistique dont la
dispersion est normale (courbe en cloche), les notes qui se rapprochent de
la moyenne arithmétique caractérisent la normalité ; au contraire, celles
qui se situent aux extrémités de la courbe sont anormales. En médecine,
on a tendance à assimiler ‘homme normal à l’individu parfaitement sain,
qui, en toute rigueur, n’existe pas.
La pathologie est une étude du développement des maladies. La
pathologie examine notamment les causes, les symptômes, l’évolution
ainsi que les lésions (10) et les complications éventuelles des maladies.
Le pathologique est un état de ce qui est morbide. (11) Le
pathologique signifie plus que l’anormalité, à laquelle il ne se réduit pas. Un
individu, une situation exceptionnelle peuvent être parfaitement sains : le
génie, les sextuplés (qui vaut six fois une quantité donnée), quoique
rarissimes, ne sont pas des phénomènes morbides. Tandis que l’anormal
est ce qui dévie mènes considérablement de la moyenne statistique, le
pathologique est ce qui provoque la souffrance de l’individu (lésion
organique, complexe psychologique, etc.).
58

La psychologie pathologique est une discipline ayant pour objet


l’étude des troubles du comportement, de la conscience et de la
communication.
Située à mi-chemin de la psychologie et de la psychiatrie, la psycho
pathologie vise, d’abord, à comprendre le fait pathologique par un effort
de pénétration dans l’univers morbide du sujet, en saisissant la signification
du symptôme tel que celui-ci le vit, puis, à l’expliquer en établissant des
relations de causalité entre les phénomènes observés ; enfin, à tirer des lois
générales concernant les processus mentaux. A psychopathologie
complète l’approche clinique par des méthodes expérimentales (études
des neurones provoquées chez l’animal, par exemple), les tests et la
statistique.
3.6. LES EFFETS PSYCHOLOGIQUES DE LA MALADIE
3.6.1. La situation de malade et ses implications
Etre malade signifie peu ou prou :
- Être en situation de faiblesse. La maladie est presque toujours souffrance,
atteinte corporelle et limitation des possibilités physiques quand ce n’est
pas invalidité. Nous avons vu que la définition de la maladie comportait
inéluctablement une atteinte de l’intégrité du sujet est une gêne à
l’exercice normal de sa vie. Elle ne peut initialement et consciemment
qu’être ressentie comme un manque, un défaut, une diminution.
- Être en situation de dépendance. C’est le corollaire de la situation de
faiblesse. Dépendance à l’égard de ceux censés avoir le pouvoir de réparer
le manque, dépendance à l’égard de l’entourage, physiquement et
moralement.
La douleur, symptôme type de l’état de maladie, reflète bien cette situation
de faiblesse et de dépendance. Il est vain de vouloir séparer la douleur
physique de la souffrance morale, tant les deux composantes sont
intimement associées en cas d’atteinte physique. La douleur est avant tout
un phénomène subjectif et ou ne peut la dissocier de sa perception par
celui qui souffre. Nous nous contenterons de citer R. Leriche qui en a fait
une étude devenue classique : « La couleur physique n’est pas un simple
fait d’influx nerveux courant à une allure déterminée dans un nerf. Elle est
59

la résultante du conflit d’un excitant et de l’individu entier ». C’est là le


prototype de toute situation de maladie ou d’accident.
3.6.2. Les conséquences psychiques pour le malade
Ce sont :
a) La régression. Il s’agit là d’un mécanisme inévitable, universel que tout
médecin doit connaître et comprendre dans ses diverses implications.
La régression, selon N.Sillamy, 2007, p.225), est une adoption plus ou
moins durable d’attitudes et de comportements caractéristiques d’un X
niveau d’âge antérieur.
Ce terme n’implique pas le retour à une conduite passée mais à un
état de moindre maturation. Il ne signifie pas qu’un comportement
précédemment observé dans l’histoire psychologique du sujet réapparaît,
mais que celui-ci se conduit typiquement comme un individu plus jeune. Ce
mouvement rétrograde vers un stade antérieur du développement
s’observe régulièrement quand une frustration est imposée par la réalité.
Par exemple, un jeune enfant, momentanément séparé de sa mère, ne
mange plus seul et n’accepte plus que des aliments semi-liquides.
L’énurésie ou la réapparition du « langage bébé », qui coïncident souvent
avec la naissance d’un petit frère ou d’une petite sœur, sont des contes
régressifs. Chez l’adulte incapable de résoudre ses conflits. Le même
mécanisme joue parfois, constituant une fuite de la réalité et une aliénation
de la personne, tel cet homme de 25ans, emprisonné pour escroquerie qui
se transforme en nourrisson larmoyant, toujours alité, énurétique et
encoprétique (émission involontaire et répétée de matières fécales en
dehors des lieux réservés à cet usage, chez un enfant de plus de 4ans
indemne de toute maladie organique=encoprésie) se nourrissant
exclusivement de lait.
Notons que toute blessure, toute maladie, entraînent une réaction
de protection. C’est une réaction naturelle à tout organisme que de se
replier sur lui-même en cas d’agression et de souffrance. La composante
psychologique est évidemment primordiale chez l’homme. Nous avons
envisagé ses diverses significations dans la théorie freudienne de l’appareil
psychique :
60

- La régression : Se caractérise chez l’homme, au–delà du retrait sur soi, par


l’émergence d’un comportement infantile avec :
- réduction des intérêts : Le malade ne vivant que dans le présent et l’avenir
proche, ne supportant pas l’attente ;
- égocentrisme : Le malade n’envisageant plus le monde que par rapport à
lui, m’imaginant pas que les autres puissent aussi être malades ou fatigués,
ne supportant pas la frustration ;
- dépendance de l’entourage pour la nourriture, la boisson, les soins
corporels, accompagnée d’une hypersensibilité aux réactions de cet
entourage, le malade se comportant comme un enfant cherchant une
bonne mère ; retour à des satisfactions archaïques : sommeil ou recherche
de satisfactions orales pouvant favoriser l’alcoolisme ou le recours au
médicaments ;
- mode de pensée magique, illogique, avec croyance en la route puissance
du médecin, des médicaments ou de la maladie.
- Le mot de régression a souvent une connotation péjorative : Il évoque le
retour à l’état infantile et le laisser-aller du vieillard sénile. En fait la
régression est, en règle générale, très utile et même nécessaire. Régresser
c’est en effet :
- quitter ses soucis et les exigences habituelles et recentrer ses forces sur
soi-même. Elles seront utiles pour lutter contre la maladie et protéger le
malade rendu vulnérable ;
- accepter aide et soutien de la part de l’entourage, s’en remettre plus ou
moins à lui pour la conduite du traitement et ne s’opposer à sa bonne
marche par des initiatives intempestives et un activisme gênant.
Le refus de régression reflète souvent la peur de régresser, traduisant
la crainte d’une passivité excessive ou le rapprocher avec des images
maternelles intériorisées, engloutissantes et dangereuses. L’absence de
régression peut, dans ces cas, avoir de graves conséquences. En refusant
d’être porté par l’entourage, et ainsi être soulagé de ses tensions
excessives le malade se condamne à une sudation très coûteuse pour sa
santé.
b) La dépression : étant morbide, plus ou moins durable, caractérisé
essentiellement par la tristesse et une diminution du tonus et de l’énergie.
61

Anxieux, cas, découragé, le sujet déprimé est incapable d’affronter la


moindre difficulté.
Aussi ne prend-il plus aucune initiative. Il souffre de son impuissance
et à l’impression que ses facultés intellectuelles, notamment et la mémoire,
sont dégradés. Le sentiment d’infériorité qui en résulté augmente encore
sa mélancolie.
3.7. LES MEDICAMENTS
a) Notion
Dans la mouvance de la vie, trouvée, conservé, éventuellement
reconstruire un équilibre, est le souci premier de chacun.
Menacé dans sa santé, l’individu recentre son énergie vers un seul
but ; guérir. Toutes ses espérances humaines vont alors vers le médecin qui
diagnostiquera le mal et les médicaments qui l’indiqueront.
On entend par médicament, une préparation utilisée pour prévenir,
diagnostiquer, soigner une maladie, un traumatisme ou pour restaurer,
corriger, modifier les fonctions organiques.
Longtemps, les médicaments m’ont été préparés qu’à partir des
végétaux (alcaloïdes tels que la digitaline [principe actif très toxique extrait
de la digitale, utilisé en cardiologie digitale ; plante herbacée vénéneuse
portant une longue grappe de fleurs pendantes à corolle en forme de
doigtier] ou la morphine [substance tirée de l’opium, doué de propriétés
soporifiques (1) et calmantes]), des animaux (vaccins) Ou des minéraux
(aluminium). Aujourd’hui, l’ensemble des médicaments est fabriqué par
l’industrie pharmaceutique, ce qui permet une plus grande précision et une
plus grande sécurité d’emploi. Parallèlement, la pharmacie (science de la
préparation des médicaments) propose de plus en plus de produits
synthétiques, qui copient plus ou moins fidèlement des substances
naturelles ou sont entièrement originaux (benzodiazépines).
L’introduction sur le marché de nouveaux médicaments obéit à des
directives administratives complexes, variables suivant chaque pays. Les
nouveaux médicaments doivent subir des tests (sur des animaux de
laboratoire, sur des volontaires humains sains en milieu hospitalier puis sur
des malades) destinés à évaluer l’efficacité et les effets secondaires de leurs
principes actifs avant que les pouvoirs publics ne marché. Des contrôles de
62

fabrication doivent avoir lieu régulièrement pendant la période de


production.
Les médicaments peuvent être en vente libre ou n’être délivrés que
sur présentation d’une ordonnance. La délivrance d’un médicament sur
présentation d’une ordonnance ayant déjà servi une ou plusieurs fois est
réglementée.
b) Effets secondaires des médicaments
Les effets secondaires d’un médicament sont les effets, habituels ou
non, qui s’ajoutent à l’effet thérapeutique recherché.
Un effet secondaire peut être indésirable dans une utilisation donnée
d’un médicament et recherché dans une autre utilisation du même
médicament ; il peut même devenir un effet principal. L’effet indésirable
peut être lié à l’effet principal du médicament. Par ex., des médicaments
anticancéreux attaquent aussi bien les cellules saines que les cellules
cancéreuses, des anticoagulants peuvent provoquer une hémorragie si le
traitement est prolongé ; les médicaments toxiques peuvent léser le
système auditif, les médicaments écotoxiques néphrologiques ou
hépatotoxiques peuvent altérer le rein oui le foie, allant jusqu’à provoquer
des lésions, réversibles ou permanentes. Dans tous cas, l’effet indésirable
est prévisible et inévitable.
Dans d’autres cas, l’effet indésirable est imprévisible ; il apparaît chez
un malade présentant des facteurs de risque. (Absence d’une enzyme
spécifique de la dégradation du médicament, réaction allergique, etc.), en
cas de tolérance ou d’accoutumance au médicament ou encore de
dépendance envers lui (pharmacodépendance ou toxicomanie), de
persistance ou d’accumulation du médicament dans l’organisme ; il varie
aussi avec l’importance de la consommation et le type du médicament.
Les effets indésirables mineurs ne demandent pas d’hospitalisation
ni de traitement ; les effets modérés demandent un traitement ou une
hospitalisation ; les effets graves, qui mettent en danger la vie du malade,
comme lors des intoxications volontaires ou accidentelles, exigent un
traitement intensif et peuvent laisser des séquelles importantes.
c) Formes médicamenteuses
63

La forme sous laquelle se présente le médicament est différente


selon le mode d’administration : voie orale, rectale ou parentérale (par
injection).
d) Passage du médicament dans l’organisme
Une fois administré, un médicament suit trois phases : la résorption,
la distribution et l’élimination. Leur étude est nommée pharmacocinétique
 Résorption
La résorption est le passage du médicament de son site
d’administration vers la circulation générale. Une fraction seulement de la
dose administrée atteint la circulation générale. Elle dépend des propriétés
physicochimiques du médicament (solubilité, vitesse, de dissolution, etc.).
 Distribution
Après son entrée dans la circulation générale, un médicament se
distribue dans tout l’organisme, sa répartition entre les différents tissus est
inégalée, du fait des différences de perméabilité, de volume ou d’irrigation
sanguine de tissus.
 Élimination
L’organisme tente d’éliminer le plus rapidement possible route
substance étrangère et/ou toxique qui y a été introduite. L’élimination se
fait par excrétion directe (élimination sans transformation du médicament)
ou par excrétion des métabolites (produits résultant de la transformation
du médicament dans l’organisme) grâce aux divers organes servant à
évacuer les déchets du métabolisme : rein, foie, pouvoir, intestin, etc.
e) Prescription et surveillance
Beaucoup de facteurs influençant le comportement des
médicaments dans l’organisme doivent être pris en compte dans la
prescription : l’âge et le poids du patient, l’existence éventuelle d’une
maladie, les interactions médicamenteuses, la voie d’introduction du
médicament dans l’organisme. Une fois la prescription établie, il faut
continuer à surveiller le comportement des médicaments dans l’organisme,
en particulier leur concentration dans le plasma, doivent être
particulièrement surveillés les taux sanguins des digitaliques dans le
traitement de l’insuffisance cardiaque, des théophyllines (médicaments
64

utilisés dans le traitement de l’asthme) dans le traitement de l’asthme, du


lithium dans le traitement de la psychose maniaco-dépressive, des
anticoagulants, surtout au long cours, et de divers médicaments anti
arythmiques.(destinés à corriger certains troubles du rythme cardiaque) et
hormonaux.
3.8. LE RESPECT DES ORDONNANCES ET DES PROCEDURES
MEDICALES
Après avoir rencontré un médecin, combien d’entre nous se plient aux
ordonnances et aux procédures médicales ? Dans une étude de dossiers,
Sackett et Snow (1979) ont conclu qu’environ 75% des personnes
respectent les rendez-vous qu’elles ont pris mais seulement 50% les
rendez-vous prévus par le médecin. Les personnes sont plus disposées à
prendre des médicaments pour soigner les maladies que pour les
prévenir.
77% prendront des médicaments à court terme pour soigner les maladies
alors que 63% en prendront pour les prévenir. A long terme, le respect
des ordonnances chute à 50% environ, ce qui est particulièrement
troublant dans le cas de maladies comme l’hypertension, qui peut être
asymptomatique et représenter un traitement prolongé. De même, on a
constaté que seulement 50% environ des patients respectent les
programmes d’exercice clinique après les six premiers mois (Dishman,
1982).
Le médecin lui-même compte parmi les facteurs qui déterminent le
respect ou non des ordonnances. En effet, les patients sont plus portés à
suivre les conseils de médecins qui sont perçus comme compétents,
amicaux, chaleureux et attentifs (DiNicola et DiMateo, 1984). Les patients
sont moins disposés à respecter les ordonnances des médecins qu’ils
perçoivent comme condescendants (hautain ou supérieur) et autoritaires
(Gastorf et Galanos, 1983).
Il y eut une époque où la formation médicale était presque
exclussivement technique, mais des résultats de recherche comme ceux-ci
ont incité les facultés de médecine à former les étudiants à traiter
« humainement » les patients.
65

Les psychologues de santé ont découvert que les patients sont plus
enclins à se conformer aux ordonnances médicales lorsque la maladie est
grave (Becker et Maiman, 1980) et quand ils trouvent les
recommandations améliorent leur état, les femmes, par exemple, seront
plus disposées à pratiquer l’auto-examen des seins lorsqu’elles pensent
qu’elles seront vraiment en mesure de détecter les tumeurs anormales
(Alanga et Reddy, 1984). Les diabétiques seront plus enclins à utiliser
l’insuline lorsqu’ils croient que leur schéma posologique contribuera à
normaliser le taux de sucre dans le sang (Brownlee-Duffeck et Al, 1987).
Certains médecins prescrivent souvent des médicaments et d’autres
schémas thérapeutiques sans expliquer aux patients les buts du
traitement et les complications possibles. Cette approche peut mal
tourné. Lorsqu’il s’agit de prendre des médicaments prescrits, les patients
ont souvent tendance à ne pas les prendre ou à les prendre de façon
négligée (Haynes et Al, 1979). Les patients sont particulièrement portés à
cesser de prendre les médicaments lorsqu’ils éprouvent les effets
secondaires, surtout s’ils sont imprévus. Par conséquent, il semble très
utile de fournir des instructions précises et une information exacte sur les
effets secondaires possibles, pour inciter les patients à respecter les
ordonnances (Baron et Byrne, 1987 ; Keown et Al, 1984).
Les facteurs culturels influencent également le respect des
ordonnances médicales. Il a été démontré, par exemple, que les latino-
américains sont plus disposés à respecter les ordonnances médicales
lorsqu’elles sont émises par un personnel ayant une compréhension de la
culture latino-américaine. Une étude au Zimbabwe, en Afrique, souligne
que certaines personnes ne respectent pas les traitements médicaux,
parce qu’elles croient en des méthodes non scientifiques mais
traditionnelles de guérison (Zyazema, 1984).
Comme dans bien d’autres secteurs de la vie, le soutien social est
utile pour stimuler le respect des ordonnances et procédures médicales.
Une étude, par exemple, a révélé que les hommes comptant sur une
conjointe très présente sont plus portés à modifier leurs habitudes
d’alimentation et d’exercices pour éviter les troubles cardiovasculaires
(Doherty et Al, 1983).
66

GLOSSAIRE:
1. HORMONE: P9 substance chimique complexe, qui, déversée
directement dans le sang circulant exerce une action spécifique sur certains
organes .nombreuse et diverses, elles sont produits par les glandes, dites
"endocrines», telles que l’hypophyse, la thyroïde, les surrénale et les
glandes, mais aussi par des tissus : muqueuse du duodénum, placenta,
hypothalamus …
Les hormones jouent un rôle primordial dans le fonctionnement de
l’organisme : elle intervient dans l’équilibre du milieu intérieur du corps
humain, conditionnant sa morphologie (l’apparition des caractères sexuels
secondaire à la puberté dépend des hormones sexuelles), agissent sur le
comportement (activité sexuelle conduite maternelle …), le caractère(la
femme qui subit l’ablation des ovaires devient irritable) et l’intelligence
(l’insuffisance d’hormone thyroïdiennes entraine une diminution de
l’attention et la lenteur de l’esprit).
Lorsqu’elles ne sont pas présentes en grandes quantités normale dans le
corps, on observe de graves désordres mentaux (crétinisme, asthénie
intense, …)
2. ASTHENIE: fatigue générale, état de dépression, de faiblesse
neurasthénie.
3. PSYCHOSOMATIQUE P9: se dit d’un trouble organique ou
fonctionnel dont l’origine est psychique. la médecine psychosomatique est
la discipline qui s’intéresse aux troubles physique d’origine psychique et
aux retentissements psychique de maladies. La malade psychosomatique
est caractérisée par la transformation (dite conversion) d’un trouble
psychologique, ne pouvant pas s’exprimer en tant que tel, en un trouble
somatique (organique).
Les maladies psychosomatique peuvent toucher tous les appareils de
l’organisme : système digestif (ulcère, colite), endocrinien (hyperthyroïdie,
diabète), génito−urinaire (impuissance, énurésie), cardiovasculaire
(infarctus du myocarde), respiratoire (asthme, tuberculose pulmonaire),
peau (eczéma),…
Le traitement d’une maladie psychosomatique passe d’abord par celui du
trouble physique. Ensuite, une psychothérapie est parfois nécessaire.
67

4. GASTRODUODENAL P9: relatif à l’estomac et au duodénum.


5. DUODENUM: partie initiale de l’intestin grêle, succédant au pylore
(sphincter musculaire à l’extrémité de l’estomac) et se poursuivant par le
jéjunum (deuxième portion de l’intestin grêle)
6. GLANDES SURRENALES (p. 9), les glandes surrénales sont situées
de part et d’autre de la colonne vertébrale, justes au-dessus des reins. Elles
secrètent diverses hormones qui jouent un rôle dans l’émotion et la
réaction au stress.
Leur périphérique secrète le cortisol qui augmente le taux de sucre dans le
sang et qui accroît l’énergie leur partie centrale secrète l’adrénaline et la
noradrénaline. Lorsque ces deux substances sont libérées dans l’organisme
elles stimulent le système nerveux sympathique, qui augmente le degré
d’excitation de l ‘organisme et qui prépare ainsi à agir.
7. ASTHME (p10) : affection inflammatoire chronique des bronches,
caractérisée par des crises de dyspnée (gêne respiratoire) paroxystique
suffisante témoignant d’une contraction brutale de muscles commandant
l’ouverture et la fermeture de bronche auxquelles s’associent un œdème
et une hypersécrétion de muqueuse aérienne ( pharynx, larynx fosse
nasales)
8. NEUROVEGETATIF (P10) système neuro végétatif que contrôle les
grandes fonctions involontaires (vie végétative : circulation excrétion etc.
9. ELECTROCHOC OU SISMOTHERAPIE (p11) : thérapeutique
psychiatrique consistant à provoquer une crise épileptique artificielle, en
faisant passer un décharge électrique à travers le cerveau ce traitement, dû
à U. Cerletti et L. Bini (Millan, 1938) à une influences réel sur de nombreux
mélancoliques et, parfois sur les jeunes schizophrènes. Mais son mode
d’action reste mystérieux. Plusieurs hypothèses plus au moins satisfaisante
ont été avancées : la stimulation électrique libère des hormones et de
substances encore inconnue. Le choc mobilise les défenses de l’organisme,
le psychisme se reconstruit selon un ordre nouveau ; le courant électrique
agit sur un centre régulateur de l’humeur situé à la base du cerveau. Malgré
ses avantages pratiques, cette technique répugne à beaucoup de
psychiatre qui suspectent son côté « magique » (en appuyant sur un
bouton, on guérit le malade) et lui préfèrent le psychotropes.
68

10. NEUROLEPTIQUE (P11) : médicament qui a pour effet de réduire


les symptômes psychotique tel que l’agitation, le délire ou les
hallucinations. Les premiers les plus connue des neuroleptiques et la
chlorpromazine (Largactil) dont les propriétés thérapeutique ont été
découverte en 1952 par J.Delay et P.Deniker. Bien que parfois utiliser a
faible dose dans le traitement de crise d’angoisse ou des obsessions et,
chez l’enfant, les troubles du comportement (instabilité, agressivité), les
neuroleptique sont, essentiellement les médicament de psychose
11. ANTIDEPRESSEUR (P11) médicament utilisé dans le traitement de
la dépression. Les antidépresseurs classiques sont soit des tricydiques
(amitriptilyne,amoxagrine etc,…) , soit les inhibiteurs de la monoamine
oxydase.
12. LITHIUM : métal (Li) dont les sels sont utilisés dans le traitement
de troubles psychiques. Les sels de lithium sont indiqués dans une maladie
psychiatrique, la maladie maniaco-dépressive, caractérisé par des
alternances d’accès de dépressions et d’excitation euphorique. Ils sont
administrés par voies orales.
13. INSUDIEUX (P14) : qui a les caractères d’un piège trompeur ou
dont l’apparence bénigne masque au début la gravité réelle.
14. RESIGNATION (P16) : fait d’accepter sans protester (la volonté de
quelqu’un, le sort) ; tendance à se soumettre.
15. RENONCEMENT (P16) : fait de renoncer (à une chose) au profit
d’une valeur plus haute (surtout contexte normal ou religieux) ; attitude
qui en résulte. Renoncer = ressert de prétendre à quelque chose
16. PERSONNATILE (P16) : élément stable de la conduite d’une
personne ce qui la caractérise et le différencie d’autrui. Chaque individu a
ses particularités intellectuelles, affectives et conatives (relative à la
volonté, au tempérament) dont l’ensemble organisé détermine la
personnalité.
17. EMPATHIE : capacité de s’identifier par les émotivités.
18. OPACITE (P36) : propriété d’un corps opaque à la lumière. Opaque
= qui s’oppose au passage de la lumière, exemple verre opaque.
19. GENITAL : qui se rapport, qui sert à la reproduction sexuées des
animaux et des hommes
69

20. SOPORIFIQUE (P48) : qui provoque le sommeil →somnifères


21. ETIOLOGIE : étude des causes des maladies.
22. PATHOGENE : qualifie ce qui provoque une maladie, en particulier
un germe capable de déterminer une infection.
23. PATHOLOGIE : étude du développement des maladies. La
pathologie examine notamment les causes, les symptômes, l’évolution
ainsi que les lésions et les complications éventuelles des maladies.
24. PSYCHOLOGIE :
- Étude scientifique des phénomènes de l’esprit (au sens le plus large).
- Connaissance spontanée des sentiments d’autrui ; aptitude à
comprendre, à prévoir les comportements = intuition
- Analyse des états de conscience, des sentiments, dans une œuvre.
25. FOETOSCOPIE : examen destiné à examiner le fœtus dans l’utérus
maternel à l’aide d’un fibroscope (tube muni d’un système optique). La
fœtoscopie peut se pratiquer de la 19eme semaine jusqu’au terme de la
grossesse. Les progrès de l’échographie en ont réduit les indications.
26. TENSIOMETRE : instrument de mesure de la pression artérielle.
Synonyme : sphygmomanomètre.
27. STETHOSCOPE : appareil acoustique amplifiant les sons, utilisé
pour l’auscultation.
28. MEDECINE : médicament, remède. Science qui a pour objet la
conservation et le rétablissement de la santé ; art de prévenir et de soigner
les maladies de l’homme.
Sortes de médecine :
- Médecine préventive ;
- Médecine sociale ;
- Médecine du travail ;
- Médecine mentale= psychiatrie ;
- Médecine générale, qui s’occupe de l’ensemble de l’organisme ;
- Médecine interne ;
70

- Médecine légale, exercée pour aider la justice, notamment en cas de


crime supposé= médico-légale
29. DOCTEUR :
- Personne qui possède le titre de docteur en médecine et qui exerce la
médecine ou la chirurgie ;
- Personne promue au plus haut grade universitaire d’une faculté.
30. SYNTHESE :
- Suite d’opérations mentales qui permettent d’aller des notions simples
aux notions composées (opposé à analyse) exemple : la synthèse
reconstitue ce que l’analyse avait séparé ;
- Opération intellectuelle par laquelle on ressemble des éléments de
connaissance en un ensemble cohérent.
31. ANALYSE : opération intellectuelle consistant à décomposer un
tout en ses éléments et d’en établir les relations.
32. ALITER : faire prendre le lit à un malade.
33. HOSPITALISATION : admission dans un hôpital; séjour dans un
hôpital.
34. REGRESSION : évolution qui ramène à un degré moindre= recul.
Retour à un stade antérieur de développement psychique.
35. RENONCER : cesser de prétendre à quelque chose; abandonner
l’idée de quelque chose.
36. MORT : cessation de la vie (humains et animaux).
37. DOULEUR : sensation physique pénible.
38. ANAMNESE : retour à la mémoire du passé vécu et oublié ou
Refoulé (s’oppose à l’amnésie).
39. NEPHROLOGIE : discipline médicale qui se consacre à l’étude des
reins, à celle de leur physiologie et de leurs maladies.
40. HEPATOLOGIE : spécialité médicale qui étudie le fonctionnement
et les maladies du foie et des voies biliaires, principalement les hépatites,
les cirrhoses et les cancers.
71

41. ENZYME : protéine accélérant les réactions chimiques de


l’organisme.
42. ENTECEDENTS : fais antérieurs à une maladie, concernant la santé
du sujet examiné, de sa famille. Actes, faits appartenant au passé de
quelqu'un, en relation avec un aspect de sa vie actuelle
43. AMNESIE : perte totale ou partielle de la mémoire (s'oppose à
anamnèse, mémoire, souvenir)
44. RESORPTION : disparition d'un produit pathologique repris par la
circulation sanguine ou lymphatique (lymphatique : relatif à la lymphe=
liquide organique incolore ou ambré, d'une composition comparable à celle
du plasma sanguin).
45. PLASMA SANGUIN : partie liquide du sang= sérum.
46. METABOLISME : ensemble des réactions biochimiques se
produisant au sein de l'organisme. Le métabolisme comprend deux grand
processus :
- l’anabolisme : ensemble des réactions aboutissant à une fabrication, il
nécessite généralement une consommation de l’énergie.
- le catabolisme : ensemble des réactions aboutissant à une dégradation ;
il entraîne généralement une libération d’énergie.
47. COMPLIANCE : rapport d'une variation du volume pulmonaire à
la variation de la pression d'air correspondante. Une bonne compliance
signifie que le poumon se distend facilement à l'inspiration et reprend
facilement son volume initial à l'expiration. Ou encore, élasticité de
poumon que l'on mesure dans le bilan des maladies respiratoires.
48. ECZEMA : affection cutanée caractérisée par des vésicules, des
rougeurs et la formation des squames (chute de tissus). L’eczéma provoque
des démangeaisons.

Vous aimerez peut-être aussi