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Catherine Blatier

Les personnalités
criminelles
Évaluation et prévention

2e édition
actualisée et augmentée
Maquette de couverture :
Atelier Didier Thimonier

Maquette intérieure :
www.atelier-du-livre.fr
(Caroline Joubert)

© Dunod, 2018
11 rue Paul Bert – 92240 Malakoff
ISBN 978-2-10-078635-0
Table des matières
Avant-­propos.............................................................................................................................................................. 7

Chapitre 1 – Les facteurs psychologiques........................................................................... 11


1. Crime, personnalité et psychopathologie................................................................................... 13

Chapitre 2 – Criminalités spécifiques et techniques d’investigation..... 55


1. La délinquance sexuelle.......................................................................................................................... 57
2. Les tueurs de masse, les tueurs en série et les terroristes................................................. 80
3. Les violences conjugales......................................................................................................................... 86
4. La maltraitance envers les enfants................................................................................................... 95
5. La maltraitance envers les personnes âgées.............................................................................. 105
6. Le syndrome de Stockholm.................................................................................................................. 107
7. La délinquance et la criminalité au féminin.............................................................................. 113

Chapitre 3 – L’approche développementale et la prévention......................... 137


1. Les trajectoires développementales de la délinquance de l’enfance
à l’âge adulte.................................................................................................................................................... 139
2. Les facteurs de risque délinquant..................................................................................................... 142
3. Les facteurs de persistance de l’activité délinquante et violente
et la désistance............................................................................................................................................... 149
4. La prédiction des comportements antisociaux
dans les études longitudinales............................................................................................................ 156
5. Les facteurs présents dès la petite enfance et la prévention........................................... 158

En guise de conclusion........................................................................................................................................... 163


© Dunod. Toute reproduction non autorisée est un délit.

Bibliographie............................................................................................................................................................... 167

Index des notions...................................................................................................................................................... 197

Index des auteurs...................................................................................................................................................... 199

5
Avant-­propos
Le criminel, au moment où il accomplit son crime,
est toujours un malade.

Avec Dostoïevski, on peut reconnaître que le crime signe la pathologie.


Pourtant, il se trouve toujours des voisins ou des amis pour estimer que la
personne semblait tout à fait normale les jours précédant le crime.

Qu’on invoque un moment pathologique ou une personnalité troublée,


la question de la pathologie de l’acte criminel se pose. Le juge, mais aussi
la victime, la famille, la société, aimeraient comprendre ou tout au moins
identifier les raisons d’un tel acte.

Que connaît-­on des personnalités criminelles ? Quelles sont leurs carac-


téristiques ? Sont-­elles déterminées ou peuvent-­elles évoluer ? Les mobiles
du crime peuvent-­ils aider à comprendre l’acte et son auteur ?

S’il apparaît nécessaire de placer en détention des criminels afin d’éviter


tout risque de récidive, il est impératif de chercher à assurer un traitement
psychologique adapté à ces personnes, même s’il reste difficile à mettre en
œuvre.

Le travail du psychocriminologue consiste à rencontrer les criminels,


à évaluer les personnalités et les différentes pathologies afin d’offrir des soins
adaptés. Fort des connaissances théoriques, il compare les situations à des
modèles de comportement ou de personnalité bien répertoriés. Il examine
l’étiologie et la criminogenèse afin de réaliser des thérapies cohérentes et
des programmes de prévention adaptés.

Nous proposons d’accompagner le lecteur à la découverte du travail du


© Dunod. Toute reproduction non autorisée est un délit.

psychocriminologue, à partir des théories de la personnalité criminelle et


des spécificités des comportements délinquants et criminels. Des crimina-
lités fréquemment rencontrées dans la pratique clinique seront présentées,
notamment la délinquance sexuelle, les violences conjugales et la criminalité
féminine. Nous exposerons aussi les facteurs utiles pour une meilleure prise
en charge des mineurs délinquants. Un livre dédié aux victimes de tous ces
actes criminels serait nécessaire. Cet ouvrage-ci porte sur les auteurs d’actes
criminels, il sera question des victimes lors de l’évocation de la maltraitance
envers les enfants et envers les personnes âgées.

9
Les personnalités criminelles

Les résultats de nombreux travaux de recherche ont été résumés afin


d’aider les psychocriminologues et leurs futurs collègues. Nous aborderons
ces travaux sous trois angles. Tout d’abord, nous détaillerons les facteurs
psychologiques et les diverses théories des personnalités criminelles. Puis
nous examinerons des criminalités spécifiques, avant de détailler les enjeux
de l’approche développementale. Cette approche permet de comprendre
l’origine de nombreux comportements délinquants et les modalités de
leur extension. Elle décrit des trajectoires de l’enfance à l’âge adulte qui se
révèlent utiles pour la prévention des conduites antisociales.

Nous souhaitons que le lecteur, intéressé ou spécialiste, puisse appro-


fondir ainsi la question des personnalités criminelles avec un regard de
psychocriminologue qui cherche constamment à mieux comprendre pour
mieux prévenir.

10
Chapitre 1
Les facteurs psychologiques
Sommaire
1. Crime, personnalité et psychopathologie........................................... 13
La conception du crime et du criminel a suivi une évolution considérable
au cours des dernières décennies. On s’intéresse toujours à la genèse du
crime espérant que la connaissance puisse conduire à une limitation de ses
expressions. Toutefois, il est difficile de lutter contre une marée d’infor-
mations criminologiques qui envahissent les médias comme les politiques
publiques. C’est également sans compter l’importance des jeux vidéo et des
nombreuses images qui circulent sur Internet. Finalement, notre monde est
profondément imprégné de violence et en rechercher les raisons psycho-
logiques revient à des interrogations fondamentales. Ces questions ont été
abordées par maints ouvrages consacrés à la violence et à ses conséquences
sociales et politiques, c’est pourquoi nous préférons centrer celui-­ci sur
la psychopathologie et les différents courants d’analyse de la personnalité
criminelle.

1. Crime, personnalité et psychopathologie


Il existe différentes approches psychologiques du crime et de la crimina-
lité. À côté des théories sociales et psychosociales, exposées dans l’ouvrage
Introduction à la psychocriminologie (Blatier, 2014), une lecture psychopa-
thologique du crime s’est imposée au fil du temps. Elle a tout d’abord été
clinique, reposant sur l’analyse de certains criminels et s’efforçant d’en tirer
des conclusions plus générales. C’est le cas de l’approche psychodynamique,
qui a posé quelques hypothèses, notamment sur le surmoi des criminels.
Puis elle a évolué grâce à de nombreuses recherches qui ont permis de
définir les contours de la personnalité criminelle.

1.1 L’approche psychodynamique du criminel


© Dunod. Toute reproduction non autorisée est un délit.

À partir des travaux de Freud, Reich et Jung, plusieurs psychanalystes


se sont penchés sur la question de l’agressivité et de la délinquance.
L’agressivité est liée selon Freud aux pulsions de vie et de mort. Dès 1915,
il avait évoqué l’idée d’une criminalité par sentiment de culpabilité incons-
cient auquel le sujet répondrait par un passage à l’acte. Freud considérait que
le surmoi des criminels était trop fort. Se laisser appréhender par la police
leur permettrait de libérer cette tension interne. Le meurtre relèverait d’une
dimension archaïque pouvant émerger à tout moment ou bien résulterait

13
Les personnalités criminelles

d’une hostilité œdipienne. Le surmoi pourrait être trop faible ou encore


changeant. En suivant cette théorie freudienne, Marie Bonaparte a allégué
la suprématie du surmoi sur le ça dans le cas de Madame Lefèbvre, une
criminelle qui assassina de sang-­froid sa belle-­fille enceinte. De son côté,
Mélanie Klein a évoqué la sévérité excessive et la cruauté du surmoi qui ne
pouvaient être contrebalancées du fait de l’absence d’objets bons introjectés.
En abordant la personne dans son milieu, Winnicott a vu dans la tendance
antisociale la recherche d’un environnement stable susceptible de contenir
la personne. L’importance des situations sociales a été également soulignée
par Lagache, qui a décrit le phénomène criminel comme résultant de diffi-
cultés sociales et pas uniquement de phénomènes inconscients. Il contestait
l’idée de psychocriminogenèse, lui préférant celle de criminogenèse, qui
intégrait des éléments multifactoriels.

Aujourd’hui, la psychanalyse insiste sur l’importance des facteurs


psychologiques en sus des éléments biologiques et sociaux. À partir de
l’examen des criminels, elle promeut la compréhension de l’individu dans
sa totalité, soulignant la force de reproduction de modèles intériorisés
au cours de l’enfance. L’approche psychodynamique considère le crime
comme la conjonction de la situation précriminelle (environnement,
contexte, relation victime/auteur), de la vulnérabilité de l’auteur et d’un
conflit psychique en lien avec sa biographie (Villerbu, 2008). Le passage
à l’acte criminel a une fonction défensive permettant une sauvegarde de
l’intégrité psychique du sujet face à un conflit, la vulnérabilité du sujet
fondant sa dangerosité.

1.2 Eysenck et les différentes théories


de la personnalité criminelle
Un des promoteurs de la notion de personnalité criminelle a été Eysenck.
En 1977, il a défini la personnalité criminelle comme la somme des modes
comportementaux actuels ou potentiels déterminés par l’hérédité ou l’envi-
ronnement. Une personnalité criminelle naît et se développe au travers
de quatre secteurs : cognitif (l’intelligence), conatif (le caractère), affectif
(le tempérament) et somatique (la constitution physique). Elle s’organise
selon quatre niveaux : le niveau des réponses spécifiques, celui des réponses
habituelles, celui de l’organisation des actes habituels en traits et celui de
l’organisation des traits en types.

14
Les facteurs psychologiques ■ Chapitre 1

À partir d’un inventaire (Eysenck Personality Inventory, voir Bouvard


et al., 2010), Eysenck repère différentes composantes de la personnalité
devenues classiques : le psychoticisme (P), l’extraversion (E), le névrosisme
(N). La combinaison PEN constituerait le résultat de prédispositions géné-
tiques. Le psychoticisme représente l’agressivité, l’impulsivité, les difficultés
émotionnelles, l’absence d’empathie. L’extraversion conduit l’individu
à rechercher des émotions quelles que soient les informations issues du
contexte. Le névrosisme caractérise chez l’individu l’anxiété, la dépression et
une certaine fragilité émotive. Si ces trois facteurs PEN sont élevés et asso-
ciés à une faible capacité de compréhension et d’assimilation des règlements
et modalités habituelles d’interaction sociale, l’apprentissage et l’intégra-
tion des valeurs sociales sont difficiles, ce qui participe à l’augmentation
du risque de criminalité. Les études sur la personnalité montrent qu’elle
peut créer des vulnérabilités vis-­à‑vis de l’apparition, du maintien et de
la sévérité d’un certain nombre de troubles dont le trouble des conduites
(INSERM, 2006). Ainsi, le modèle du Big Five, qui recense cinq dimensions
(extraversion, névrosisme, agréabilité, conscience, et ouverture aux expé-
riences), identifie sur le pôle négatif de l’agréabilité des individus dont la
personnalité se révèle antisociale.

Outre les travaux d’Eysenck, l’hypothèse de l’existence d’une personnalité


susceptible d’expliquer la production des comportements criminels a été
élaborée depuis longtemps. L’une des premières études épidémiologiques
est celle de Glueck, qui examina la fameuse prison de Sing Sing dans l’État de
New York et y repéra près de 19 % de psychopathes. Démontrer la présence
d’une personnalité criminelle a été un souci au xxe siècle aux États-­Unis et
en Europe, comme en témoignent notamment les écrits de Yochelson et de
Samenow (1976), ceux de De Greef (1956) et ceux de Pinatel (1975, 1987).
Actuellement, il paraît important de développer la connaissance biologique et
neurobiologique des émotions dans les comportements antisociaux comme
celle des processus psychologiques intervenant dans la production de ces
comportements. Notons qu’une méta-­analyse identifie la part de variance
expliquée par la génétique dans la personnalité et le comportement antisocial
comme étant de l’ordre de 56 %, alors que le modèle scientifique standard
a tendance à survaloriser les explications socioenvironnementales (Ferguson,
2010 ; Moffitt et Caspi, 2006). Yochelson et Samenow ont évoqué le sentiment
de puissance du criminel de carrière, sa recherche de sensations, sa colère et
sa suggestibilité, sources de comportements impulsifs, sa méconnaissance
des perceptions et sentiments des victimes étant jugée caractéristique.

15
Les personnalités criminelles

La définition de la personnalité criminelle donnée par Pinatel repose sur


la mise en évidence d’un noyau fait de quatre traits : l’égocentrisme, la labi-
lité, l’agressivité et l’indifférence affective. Ces traits constitutifs du noyau
central de la personnalité criminelle s’articulent entre eux pour conduire
à l’agir délictueux. L’égocentrisme, tout d’abord, correspond à la capacité de
juger un problème moral d’un point de vue strictement personnel. Il a pour
effet une absence d’inhibition et un non-­respect des normes. La labilité est
prise dans son sens d’instabilité du caractère et de soumission aux désirs
sans intégration des conséquences. Elle a pour effet la non-­évaluation des
sanctions encourues. L’agressivité rend possible l’acte criminel et permet
à l’auteur de dépasser les obstacles matériels auxquels il pourrait être
confronté au moment du crime. L’indifférence affective est l’insensibilité
à la souffrance de la victime associée à une absence de culpabilité. Elle évite
au sujet d’être confronté au mal qu’il occasionne à sa victime. Ces quatre
traits doivent être présents conjointement pour que le crime soit commis.
Le processus se constitue progressivement. L’égocentrisme peut produire
un acquiescement mitigé par rapport au crime, permettant au criminel de
se situer au-­delà des éventuelles barrières morales. La labilité l’engage dans
la voie de l’acquiescement formulé, laissant de côté la crainte de sanctions
ultérieures. L’agressivité lui permet de surmonter les contraintes matérielles
liées à la mise en acte. Enfin, l’indifférence affective rend possible le dépas-
sement des limites que pourrait constituer la prise en compte de la victime
et de sa souffrance.

L’analyse de la personnalité criminelle a subi une certaine évolution depuis


l’observation des délinquants présentant un état pathologique, d’instabilité
psychosociale ou correspondant aux critères de la personnalité criminelle
de Pinatel (Cario, Favard et Ottenhof, 2002). Des chercheurs comme Favard
ont travaillé à la mise en évidence des caractéristiques de la personnalité
criminelle en prenant en compte la situation pré-­criminelle et le milieu de
vie. Ultérieurement, trois formes de criminalité ont été retenues : une délin-
quance persistante grave reposant sur une personnalité pathologique, une
délinquance petite et moyenne très dépendante d’une situation précrimi-
nelle, et une inadaptation témoignant plutôt de l’influence d’un milieu de vie.

D’autres chercheurs ont au contraire souhaité questionner la notion de


personnalité criminelle (Debuyst, 1977), préférant considérer la délinquance
plus simplement comme la réponse d’un individu à certains stimuli dans un
contexte spécifique. Les interrogations de Walgrave et de Debuyst ont porté

16
Les facteurs psychologiques ■ Chapitre 1

notamment sur le recrutement des personnes étudiées. En effet, s’appliquant


à des criminels le plus souvent détenus, ces auteurs se sont demandé si les
facteurs de la personnalité criminelle n’étaient pas simplement le reflet de
critères de sélection du système judiciaire et de conséquences de son inter-
vention. Dans ce cadre, on pourrait considérer que les traits de personnalité
ainsi décrits sont unidimensionnels et, de ce fait, réducteurs. Les facteurs
situationnels, très importants, seraient finalement laissés de côté. Enfin, ils
ont estimé devoir tenir plus amplement compte de la variabilité de la person-
nalité, soit dans le temps, soit en fonction des situations. Sans rejeter l’idée
de personnalité criminelle, Debuyst suggère donc de la placer au second plan
et de lui préférer l’analyse que fait l’individu de son comportement.

Pour la compréhension du phénomène délinquant, Marc LeBlanc invite


à considérer non pas une personnalité criminelle, mais des facteurs de
personnalité repérables chez les délinquants. Il est, selon lui, probablement
plus efficace de faire l’analyse de traits à partir de tests de personnalité, qui
mettent en évidence la façon dont les délinquants développent certaines
caractéristiques telles que la primitivité (recours à des processus élémen-
taires), la dyssocialité (difficultés devant les exigences et les contraintes de
la vie sociale) et l’égocentrisme.

Pour De Greef, il faudrait intégrer le fait que la personnalité du criminel


repose aussi sur un sentiment d’injustice subie, qui viendrait comme justi-
fication de l’acte criminel. Le criminel développe peu à peu une logique
interne dans laquelle il s’estime victime ; ce sentiment d’injustice s’associe
fréquemment à la colère (Bègue, 2010). Le sentiment d’injustice subie aide
le criminel à passer à l’acte sans culpabilité (Gassin, 2003). L’acte criminel
apparaît alors comme la résultante d’un long processus fait de situations et
de choix.

Les recherches portent actuellement sur l’analyse des facteurs psycholo-


giques plutôt que sur la recherche d’une personnalité type du criminel. Elles
mettent en évidence des différences susceptibles de conditionner une plus
forte propension à la commission d’actes criminels en termes de fréquence,
de gravité et de persistance.

C’est ce qui conduit LeBlanc à évoquer un véritable syndrome de la


personnalité délinquante, qui se développe peu à peu au cours de l’ado-
lescence. Il est caractérisé par une importante activité délictueuse, par un

17
Les personnalités criminelles

désengagement par rapport aux institutions et aux symboles sociaux et


par un égocentrisme. Nous avons déjà évoqué de nombreux aspects de la
problématique de la personnalité délinquante ou criminelle dans un ouvrage
intitulé La Délinquance des mineurs : l’enfant, le psychologue, le droit ; nous
renvoyons donc le lecteur à cette publication (Blatier, 2014). Finalement,
LeBlanc et Fréchette (1989) et LeBlanc (1991) décrivent la personnalité
délinquante comme un syndrome évoluant peu à peu et se consolidant au
milieu de l’adolescence. Trois symptômes le caractérisent :
– l’enracinement criminel, qui précise la façon dont s’installe la crimina-
lité au sein de la personnalité. Il s’organise à partir des deux processus
que sont l’activation et l’aggravation, autrement dit la précocité de l’agir
délictueux et différentes étapes vers l’aggravation : apparition de la délin-
quance au cours de la latence, exploration (par exemple par de petits vols),
explosion et engagement dans des délits plus graves, puis systématisation
de l’agir délictueux ;
– la dyssocialité : elle correspond à une réduction de la qualité de la socialité
et de l’implication dans la vie sociale. Elle émane de l’éducation familiale,
de l’école, ou de la réaction sociale à des conduites déviantes ;
– l’égocentrisme : le sujet présente une incapacité à ressentir de l’empathie
pour autrui et un isolement du fait de sa difficulté à s’affilier.

Cette approche associe des conduites délinquantes, des traits dynamiques


de la personnalité et l’utilisation d’une large méthodologie d’intervention
permettant une approche globale du processus criminogène. Les éléments
de personnalité constituent un facteur important dans le passage à l’acte
criminel, à côté des facteurs environnementaux. En allant plus loin, ce repé-
rage pose la question de l’existence de troubles psychopathologiques chez
des criminels.

1.3 Criminalité et troubles psychopathologiques


Le passage à l’acte du névrosé reste cliniquement rare en criminologie ; il
se caractérise alors par sa soudaineté et par son imprévisibilité (Bourgeois
et Bénézech, 2001). La culpabilité, cause de certains crimes selon Freud,
peut pourtant être présente chez des névrosés présentant un haut degré de
structuration psychique de la personnalité et une bonne adaptation sociale.
Des psychotiques peuvent aussi être reconnus coupables de meurtre ou
d’attentat aux mœurs. Des personnes atteintes de trouble paranoïaque ou

18
Les facteurs psychologiques ■ Chapitre 1

en phase maniaque peuvent être responsables de crimes passionnels, d’actes


violents, etc. La psychose n’est pas seule à provoquer une altération du
jugement ou du contrôle des impulsions. Le retard mental ou la démence
peuvent provoquer des actes impulsifs, ou impliquer des actes de délin-
quance primaire, sans but utilitaire. L’impulsivité est souvent présente dans
les cas de délinquance. On sait par exemple que les détenus évalués au
MMPI (Minnesota Multiphasic Personality Inventory) montrent plus d’im-
pulsivité, d’hostilité, d’égocentrisme et moins de maturité que la moyenne
des personnes non incarcérées. De même, on repère assez aisément par des
tests tels que le MCMI (Millon Clinical Multiaxial Inventory) ou le CPI
(California Psychological Inventory) une corrélation entre les crimes violents
et un faible contrôle de soi, une intolérance à la frustration et une difficulté
à la responsabilité. D’autres tests sont utilisés pour évaluer la personna-
lité, parmi lesquels on peut citer le NEO-­PI-­R (Revised NEO Personality
Inventory) et l’Inventaire de problèmes interpersonnels de Barkham (traduc-
tion et validation Blatier, 2011).

La criminalité des psychotiques est en lien avec les processus morbides


de décompensation psychotique, avec l’émergence d’angoisses archaïques
comme l’angoisse de morcellement et des mécanismes de défense primaires
comme le déni. Des troubles de la différenciation entre soi et non-­soi ou de
séparation/individuation traduisent une confusion des limites internes et
externes, un débordement pulsionnel et une difficulté d’accès à la relation
d’objet du fait d’une peur d’envahissement de l’objet primaire. Le double
diagnostic de schizophrénie et de toxicomanie (50 % des schizophrènes)
accroîtrait la probabilité de violence par rapport à la population normale,
le risque supplémentaire pour un crime violent étant de 10 % et, pour un
homicide, de 15 à 25 % (Potvin, Tikasz et Dumais, 2017). Ces informations
confirment les travaux de Hodgins et de ses collaborateurs (1992, 1996).
La pathologie entraîne à elle seule (sans association avec la toxicomanie)
un risque accru de violence. La réalisation d’une évaluation psychiatrique
à chaque crime violent permet d’analyser la présence éventuelle d’une
pathologie psychiatrique.

Les personnes atteintes de schizophrénie sont à plus haut risque de


violence, de suicide et de victimisation. Très peu d’études portent sur les
problèmes de régulation émotionnelle et notamment la difficulté à s’inhiber
en contexte émotionnel particulièrement colérique, la prise de risque et
l’absence de planification, la recherche de récompense immédiate. Des

19
Les personnalités criminelles

altérations ont été repérées en neuro-­imagerie au niveau du système


limbique (amygdale) par Hoptman (2010), du système exécutif (cortex orbi-
tofrontal latéral) par Joyal (2007) et du système de récompense (Schiffer,
2013). Des travaux de recherche confirment les niveaux du système
limbique et du système exécutif, tandis que le système de récompense
apparaît lié avec l’impulsivité et pas directement avec la violence (Potvin
et al., 2017).

Dans une étude sur 1 594 homicides au Royaume-­Uni, on a dénombré 34 % d’au-


teurs qui présentaient ou avaient présenté l’un des troubles suivants : trouble de
la personnalité (9 %), alcoolisme (7 %), troubles de l’humeur (7 %), toxicomanie (6 %),
schizophrénie (5 % ; Toal et al., 2005). Des études de cohortes portant sur près de
360 000 Scandinaves suivis depuis la naissance pendant plus de quarante années
ont montré que le risque de commettre un crime variait de 5 à 35 % pour tous les
diagnostics psychiatriques (par rapport au risque pour ceux n’ayant reçu aucun
diagnostic psychiatrique). Une étude longitudinale pendant plus de trente ans sur
plus de 3 700 personnes atteintes de troubles bipolaires et leur fratrie a montré
un risque de criminalité 2,4 fois plus élevé que dans la population générale, et une
association claire entre bipolarité et criminalité en cas d’addiction surajoutée (Fazel
et al., 2009).

1.4 Troubles de la personnalité et psychopathie


La prévalence des troubles de la personnalité a été évaluée dans la popu-
lation générale autour de 10 %. Les principaux troubles impliqués dans
les faits de violence, de délinquance et de criminalité sont la personnalité
antisociale (marquée par l’irrespect et la violation des droits d’autrui) et
la personnalité borderline (caractérisée par une instabilité des relations
interpersonnelles, de l’image de soi et des affects, associée à une forte
impulsivité). Les conséquences sociales sont nombreuses, parmi lesquelles
on peut citer les violences conjugales ou encore les mauvais traitements
envers les enfants.

Dans cette partie, nous examinerons ces deux principales personnalités


pathologiques en lien avec la commission d’actes délictueux ou criminels.
Il existe d’autres types de personnalité, narcissique, passive-­agressive, schi-
zotypique, dans lesquelles l’élément crime ou délit n’intervient pas de façon
majeure. Nous détaillerons ensuite la psychopathie, qui est fréquemment
invoquée concernant la population criminelle.

20
Les facteurs psychologiques ■ Chapitre 1

‡‡ La personnalité antisociale

En France, le trouble de personnalité antisociale concerne environ 3 % chez les


hommes et 1 % chez les femmes (Gales et al., 2002). Aux États-­Unis, la prévalence
est estimée à 3,5 % de la population (5,8 % d’hommes et 1,2 % de femmes ; selon la
National Comorbidity Survey), et à 2,5 % selon d’autres études (4,5 % d’hommes
et 0,8 % de femmes ; Koocher, 2005). Un rapport de la Royal Society fait état d’une
prévalence en Angleterre et au Pays de Galles estimée à 7,7 % pour les hommes et
à 1,9 % pour les femmes.
Chez les détenus le taux de prisonniers présentant un trouble de la personnalité
antisociale est estimé selon les études entre 34 % (Trestman et al., 2007) et 50 %
(Coid et al., 2009).

La terminologie « personnalité antisociale » (Antisocial Personality


Disorder, APD) voudrait correspondre dans le Manuel diagnostique et
statistique des troubles mentaux (Diagnostic and Statistical Manual of
Mental Disorders, DSM) à la réalité clinique observée sous le terme de
psychopathie ; nous exposerons quelques divergences. Le Manuel DSM-5
identifie ce trouble selon les caractéristiques suivantes (APA, 2015) :

La personnalité antisociale (ASPD) selon le DSM-5


Un mode général de mépris et de transgression des droits d’autrui qui survient
depuis l’âge de 15 ans et dont témoignent au moins trois de ces manifestations :
– le non-­respect des normes sociales qui déterminent les comportements légaux,
comme l’indique la répétition de comportements passibles d’arrestation ;
– une tendance à tromper par profit ou par plaisir, indiquée par le fait de mentir de
façon répétée, d’utiliser des pseudonymes ou d’escroquer les autres à des fins
d’intérêt personnel ou pour le plaisir ;
– le fait d’agir de façon impulsive ou ne rien planifier à l’avance ;
– le fait d’être facilement irritable ou agressif, ce qui se traduit par la répétition de
bagarres ou d’agressions ;
– le fait d’avoir un mépris flagrant pour sa sécurité ou celle d’autrui ;
– une irresponsabilité persistante, indiquée par l’incapacité répétée d’assumer un
emploi stable ou d’honorer des obligations financières ;
– une absence de remords, indiquée par le fait d’être indifférent ou de se justifier
après avoir blessé, maltraité ou volé autrui.
La personne doit être âgée d’au moins 18 ans et doit avoir présenté les manifesta-
tions d’un trouble des conduites avant l’âge de 15 ans.
Les comportements antisociaux ne doivent pas survenir exclusivement pendant
l’évolution d’une schizophrénie ou d’un épisode maniaque.

21
Les personnalités criminelles

Cette classification a été établie selon un modèle prédictif, indiquant


les éléments habituellement repérés chez un grand nombre d’individus
concernés par une pathologie donnée. Elle laisse nécessairement peu de
place à l’individu dans sa singularité, car tel n’est pas son objectif premier.
Elle vise à permettre un repérage des grands traits de personnalité d’une
pathologie pour son identification par les spécialistes.

Le taux de prévalence repéré à partir du Diagnostic Interview Schedule


pour le DSM est situé selon les études entre 28 et 62 % de trouble de person-
nalité antisociale chez des sujets arrêtés par la police ou rencontrés en milieu
carcéral. Le trouble APD est souvent associé à une addiction aux drogues
ou à l’alcool. Il existe d’autres tests pour évaluer un adolescent délinquant
et repérer les éléments de personnalité en lien avec son comportement
antisocial, comme l’Inventaire de Jesness ou la Mesure de l’Adaptation
Sociale et Personnelle pour les Adolescents Québécois (MASPAQ, LeBlanc).
Plusieurs tests et inventaires intègrent également des questions permettant
d’évaluer l’adaptation sociale (e.g. MMPI, California Personality Inventory,
Eysenck Personality Inventory, Rorschach, méthode française ou Exner).
Par ailleurs, les personnalités antisociales seraient atteintes d’anomalies
du système nerveux central qui les empêcheraient de faire l’expérience de
l’anxiété dans des situations stressantes ; de ce fait, ces personnes n’appren-
draient pas à éviter un comportement aux conséquences négatives. En outre,
elles présenteraient un déficit de neurotransmetteurs, surtout la sérotonine,
impliquée dans les comportements d’agressivité.

‡‡ La personnalité borderline

La personnalité limite ou borderline est une personnalité instable sur le


plan affectif, du fait d’une réactivité marquée de l’humeur. Les personnes
ont de grandes difficultés à maîtriser les sentiments de peur ou de colère qui
créent une tension importante dont elles éprouvent le besoin de se libérer
immédiatement. Elles sont très sensibles et leur réactivité émotionnelle
intense et non maîtrisée renforce l’instabilité de l’humeur. Le sentiment
de chaos ou de vide est dominant. Le recours aux automutilations ou aux
tentatives de suicide est fréquent pour éviter cette tension. Ces personnes
évoluent de façon paradoxale entre proximité et distance, ne parvenant
jamais véritablement à établir une relation stable non empreinte de méfiance
ou de crainte d’abandon, tout en présentant un important besoin rela-
tionnel vis-­à‑vis d’autrui. Les remarques sont rapidement perçues comme

22
Les facteurs psychologiques ■ Chapitre 1

des critiques, ce qui conduit à des confrontations et à des conflits quasi


permanents avec l’entourage. L’hyperactivité du système émotionnel est liée
à une perturbation du système de contrôle. Elle résulte à la fois de prédis-
positions génétiques (sensibilité émotionnelle plus marquée, impulsivité
élevée, hyperactivité et troubles de la concentration) et de conséquences de
traumatismes, expériences traumatisantes ou vécus de négligence affective.
Le trouble borderline représente environ 2 % de la population générale.

La personnalité borderline (Borderline Personality Disorder)


selon la définition du Manuel diagnostique DSM-5
Elle présente un mode général d’instabilité des relations interpersonnelles, de
l’image de soi et des affects avec une impulsivité marquée, qui apparaît au début
de l’âge adulte dans des contextes divers, comme en témoignent au moins cinq des
manifestations suivantes (APA, 2015) :
– Efforts effrénés pour éviter les abandons réels ou imaginés (ne pas inclure les
comportements suicidaires ou les automutilations, énumérés dans le 5e critère).
– Mode de relations interpersonnelles instable et excessif caractérisé par l’alter-
nance entre une idéalisation et une dévalorisation extrêmes.
– Perturbation de l’identité : instabilité marquée et persistante de l’image de soi ou
de la conscience de soi.
– Impulsivité dans au moins deux domaines potentiellement dommageables pour le
sujet (par exemple : les achats, la sexualité, la toxicomanie, les conduites dange-
reuses, les crises de boulimie ; ne pas inclure les comportements suicidaires ou
les automutilations, couverts par le 5e critère).
– Comportements suicidaires, de geste ou menace suicidaires, ou d’automutilation,
récurrents.
– Instabilité affective due à une forte réactivité de l’humeur (par exemple, dysphorie
intense épisodique, irritabilité ou anxiété durant habituellement quelques heures
et rarement plus de quelques jours).
– Sentiments chroniques de vide intérieur.
– Colère intense et inappropriée ou difficulté à contrôler sa colère (par exemple,
fréquents mouvements d’humeur, colère constante, bagarres à répétition).
– Idéation paranoïde ou symptômes dissociatifs sévères transitoires et liés au
stress.

Le patient borderline peut présenter des conduites antisociales du fait


de son instabilité et de son impulsivité. À la différence des personnalités
antisociales, il ne fait qu’un avec l’acte au moment où il le commet, sans
émettre de critique. En revanche, il peut se montrer très violent à l’égard

23
Les personnalités criminelles

de lui-­même en dehors du passage à l’acte, en condamnant sévèrement ses


agissements, même si une telle attitude ne dure pas.

La Classification Internationale des Maladies (CIM-10, ou ICD-10 en


anglais) de l’Organisation Mondiale de la Santé considère d’autres regroupe-
ments. Elle recense différents troubles de la personnalité et du comportement
chez l’adulte. La personnalité dyssociale est cotée F60.2, la personnalité
émotionnellement labile F60.3. Cette dernière intègre la personnalité agres-
sive, la personnalité borderline et la personnalité explosive.

Les personnes souffrant d’un trouble de la personnalité borderline


nécessitent un suivi thérapeutique régulier qui peut être accompagné d’un
traitement médicamenteux, le tout constituant un facteur-­clé de guérison
(Granger et Karaklic, 2014).

‡‡ La psychopathie

La psychopathie constitue un trouble caractérisé par des pulsions agres-


sives importantes, des difficultés dans la relation à autrui, une instabilité dans
l’investissement social et, bien souvent, des activités criminelles. Ce trouble
survient chez une personne ayant une prédisposition psychobiologique dont
l’impact est renforcé par des relations d’objet primaire conflictuelles ou
défaillantes (Meloy, 1988). La psychopathie est définie à partir du noyau
affectif et d’éléments de relations interpersonnelles superficielles, tandis que
la personnalité antisociale est surtout définie à partir de comportements. Le
concept de psychopathie serait différent de celui de personnalité antisociale,
car ce dernier pourrait exister indépendamment du premier, alors que tous
les psychopathes présenteraient une personnalité antisociale (Pham, 2013).
La prévalence des personnalités antisociales serait de 50 à 80 % parmi les
personnes incarcérées, tandis qu’il y aurait parmi elles 5 à 10 % de person-
nalités psychopathiques testées à la PCL-­R (Hare, 2003).

La distinction entre ces différentes approches psychopathologiques doit


être réalisée. Elle est l’effet direct d’une histoire de la pensée autour de la
psychopathie. La connaissance historique du développement de la notion de
psychopathie est essentielle à cette compréhension. Les psychopathes ont
tout d’abord été identifiés par de nombreux auteurs (parmi lesquels Koch,
Meyer, Kraepelin, Schneider, Freud, Wittels) comme des aliénés, atteints de
manie sans délire ou de folie criminelle. Au fil du temps, la psychopathie est

24
Les facteurs psychologiques ■ Chapitre 1

apparue comme une catégorie nosographique hors d’une structure névro-


tique ou psychotique. Analysée dans une perspective psychodynamique,
la psychopathie est considérée comme un trouble se manifestant par une
agressivité importante et une incapacité à établir des relations équilibrées
dans lesquelles les autres se trouvent satisfaits. L’affect, lorsqu’il est présent,
est dominé par le narcissisme. L’empathie et l’affection sont peu présentes
car le psychopathe dépend essentiellement pour son équilibre d’un autrui
idéalisé afin de déjouer le sentiment d’ennui et de vide intérieur et la crainte
d’être abandonné. Le bénéfice de cette action défensive reste temporaire.
Les relations servent donc principalement la recherche d’un calme intérieur
qui n’existe pas naturellement. La honte, la culpabilité, le remords sont des
sentiments rarement éprouvés par les psychopathes. Ils peuvent apprendre
à reconnaître les faits, à s’exprimer dans le sens attendu par leurs interlocu-
teurs, mais l’affect n’est pas associé aux paroles prononcées et ne sert pas
à la production d’un comportement ultérieur. Si la catégorie nosographique
est utilisée en France, c’est encore souvent à partir d’un entretien classique
sans recourir à un test ni à un entretien clinique standardisé.

La psychopathie a surtout été développée à partir d’un ouvrage de


Cleckley paru en 1941, intitulé The Mask of Sanity. L’auteur a identifié des
éléments psychotiques et névrotiques dans le comportement des psycho-
pathes et repéré seize caractéristiques de la psychopathie, qui ont servi
de base à de nombreux travaux. En 1976, Cleckley a opéré un rappro-
chement entre son analyse du psychopathe et celle que faisait Kernberg
de l’organisation limite de la personnalité. En effet, Kernberg intégrait
la psychopathie dans les états limites. Des chercheurs comme Hare ont
estimé ensuite que le diagnostic de trouble de personnalité antisociale défini
dans le DSM soulevait un certain nombre de questions quant à sa spéci-
ficité : une proportion importante de sujets atteints de troubles mentaux
graves correspondaient également aux critères du trouble de personnalité
antisociale. Hare a alors proposé un diagnostic de psychopathie. Il s’est
appuyé sur la définition de Cleckley pour créer une échelle d’évaluation des
symptômes psychopathiques (Psychopathy Checklist, Hare, 1991) à travers
les composantes affectives, interpersonnelles et comportementales, et sa
version révisée (Psychopathy Checklist Revised, PCL-­R, 2003). Ce travail
a permis d’identifier chez le psychopathe un égocentrisme, une impulsivité,
une recherche de sensations, un manque de sens des responsabilités. Hare
a constaté un manque d’empathie (également repéré en imagerie cérébrale
par Decety en 2013), une indifférence aux droits et sentiments d’autrui, peu

25
Les personnalités criminelles

de culpabilité ou de remords, une personnalité se montrant habituellement


volubile, usant du mensonge et de la manipulation. Le psychopathe ayant
peu le sens des obligations sociales et des lois, principalement du fait de sa
recherche de satisfaction immédiate, est tôt ou tard confronté à la justice.
Ces traits ont été traduits par Chartier (2003) dans le triptyque « déni, défi,
délit » en supposant que le psychopathe souffre d’une forme de psychose
maniaco-­dépressive agie. Dans cette psychose, il mettrait sa haine en acte
(Chabert et al., 2006). Pham et Côté (2000) l’ont considérée comme une
entité clinique distincte des comportements violents.

Les travaux de recherche ont conduit à des modifications successives de


la catégorie « personnalité antisociale » du DSM. La définition de la psycho-
pathie réalisée à partir des traits affectifs et interpersonnels décrits par Hare
a été modifiée par la publication du DSM-­III : la psychopathie, renommée
Antisocial Personality Disorder (APD), a alors été définie par une violation
répétée des normes sociales, incluant le mensonge, le vol, l’absentéisme
scolaire, un comportement inconsistant au travail, des infractions à la circu-
lation, etc. Les raisons de ce glissement sont de deux ordres : il est apparu
difficile de mesurer les traits de personnalité et plus facile de caractériser
un comportement que ses causes. La troisième édition du DSM a donc mis
l’accent non plus sur la personnalité mais sur les éléments du comportement.
Ce changement a été confirmé dans les versions suivantes. C’est pourquoi la
quatrième version du DSM, sans retenir la totalité de la définition de Hare,
s’en est notablement approchée. Toutefois, la prédominance dans la défi-
nition de la personnalité antisociale reste aux comportements antisociaux,
non systématiquement criminels, mais présents depuis l’âge de 15 ans. La
dernière version du DSM (2013 pour la version en anglais et 2015 pour la
traduction française) constitue un modèle hybride dimensionnel-­catégoriel.
Dans un premier temps le clinicien procède à une évaluation du fonction-
nement de la personne et de ses relations aux autres. Puis il repère dans une
approche catégorielle si certains traits de personnalité (affectivité négative,
détachement, antagonisme, désinhibition et psychoticisme) sont présents
et, dans une approche plus dimensionnelle, évalue leur éventuelle sévérité,
sur un continuum allant de faible à très sévère et ce, à partir de trois à neuf
facettes de la personnalité. Le clinicien doit parvenir à présenter la person-
nalité de la personne évaluée et la comparer, toujours dans une approche
pluridimensionnelle, aux prototypes connus pour le trouble de la personna-
lité antisociale. Si l’ensemble dans le DSM-5 repose sur des descriptions en
termes de traits utilisées lors de la précédente version, certains estiment que

26
Les facteurs psychologiques ■ Chapitre 1

le trait de personnalité antisociale est incomplet du fait que 6 des 18 traits


descriptifs de la psychopathie manquent (assurance de soi, sentiment d’invul-
nérabilité, froideur, sentiment de domination, centration sur soi, opposition),
et qu’il ne réalise pas l’unité entre psychopathie et personnalité antisociale.
Ils contestent le manque de consistance dans la description de l’évaluation
de l’affaiblissement du fonctionnement personnel et interpersonnel ; une
évaluation en termes de faible anxiété et de faible dépressivité serait sans
doute plus pertinente (Lynam et Vachon, 2012).

Le traitement des émotions non verbales a été étudié par Pham (2013)
afin de déterminer si les psychopathes présentaient des déficits dans ce
traitement. Ainsi, des détenus psychopathes et non psychopathes ont été
comparés à un groupe contrôle sur un test de reconnaissance faciale (Pham
et Philippot, 2010). Lorsqu’on leur présente des stimuli faciaux représentant
des émotions fondamentales (colère, tristesse, peur, bonheur, dégoût) selon
un degré d’intensité, les criminels détenus sont moins aptes à détecter les
expressions faciales que le groupe contrôle. Si cet effet peut s’expliquer à la
suite d’une analyse de covariance par la différence de niveau d’éducation
des participants, il reste que les psychopathes sont moins pertinents pour
les émotions amygdaliennes et les signes de menaces.

Le test de Rorschach analysé selon le système intégré d’Exner a permis


de repérer des réponses psychopathiques à travers des éléments fortement
narcissiques, égocentriques et teintés de toute-­puissance ainsi qu’un défaut
d’émotion caractéristique. Le conflit entre la toute-­puissance apparente et
l’image de soi détériorée y est apparu manifeste (Pham, 2006). On a repéré
également une extraversion, testée au MMPI ou au Rorschach Exner,
plus importante chez les psychopathes que dans la population générale.
L’extraversion est associée aux problèmes d’apprentissage, à la difficulté
d’insight, à la dépendance, à la recherche de sensations, aux gratifications
extérieures (voir Abdellaoui et al., 1998, 2011). Il existe aussi une corrélation
entre l’extraversion et la préférence pour des médicaments sympathomi-
métiques (comme la méthamphétamine, la cocaïne).

Une version de l’échelle de Hare en 12 items, la PCL-­SV (Screening


Version ; Hart, Cox et Hare, 1995 ; Walters et al., 2007) montre une corré-
lation de .80 avec l’échelle originale. Dans ce cadre, l’évaluation de la
psychopathie repose sur un entretien semi-­directif concernant différents
domaines de la vie de la personne et permet de déjouer des tentatives de

27
Les personnalités criminelles

simulation. L’échelle a montré une bonne validité et fiabilité dans le repé-


rage des psychopathes, et ce, à partir de nombreux traits psychologiques,
neuropsychologiques et physiologiques.

Côté et Hodgins (1996) ont réalisé une version française validée de


l’échelle de Hare en 20 items. Lors des entretiens qui l’accompagnent, diffé-
rents thèmes doivent être abordés : la scolarité, la vie professionnelle et les
moyens de subsistance financière, les antécédents médico-­psychologiques,
les antécédents familiaux, les relations affectives, maritales et sexuelles, les
comportements antisociaux, la consommation de drogue et d’alcool, et des
questions générales. L’utilisation de la PCL-­R requiert une bonne connais-
sance de la part des cliniciens, qui doivent apprécier si les caractéristiques
en question correspondent ou pas au sujet. Les items sont cotés de 0 à 2
selon leur pertinence à rendre compte du comportement de la personne.
La cotation finale s’établit entre 0 et 40. Une cotation inférieure à 20 fait
exclure le diagnostic de psychopathie, qui n’est assuré qu’à partir de 30. Une
cotation entre 20 et 29 évoque une problématique mixte. Deux facteurs
sont identifiés dans la PCL-­R, que détaille l’ensemble des items de l’échelle.
Le premier facteur regroupe les affects et les relations interpersonnelles :
charme superficiel, surestimation de soi, tendance au mensonge patholo-
gique, duperie/manipulation, absence de remords ou de culpabilité, affect
superficiel et insensibilité/manque d’empathie. Le second facteur réunit des
comportements antisociaux ou associés au comportement antisocial : délin-
quance juvénile, diversité des types de délits, violation des conditions de
mise en liberté, besoin de stimulation/tendance à s’ennuyer, tendance au
parasitisme, faible maîtrise de soi, promiscuité sexuelle, apparition précoce
de problèmes de comportement, incapacité à planifier à long terme et à être
réaliste, impulsivité, irresponsabilité, incapacité d’assumer la responsabilité
de ses faits et gestes, nombreuses cohabitations de courte durée. L’échelle de
Hare présente une consistance interne avec des alpha de Cronbach allant de
.76 à .96, et de bons coefficients de généralisation et de validité convergente.

La psychopathie est une problématique narcissique bien identifiée par


Hart, Cox et Hare (1995). Kernberg (1970) considérait quant à lui la person-
nalité antisociale comme un sous-­groupe de la personnalité narcissique, aux
valeurs superficielles, et davantage impliquée dans des activités d’incivilité,
de délinquance et de criminalité. Les psychopathes seraient plutôt iden-
tifiables par la loquacité, le charme superficiel, la surestimation de soi, la
tendance au mensonge pathologique, la duperie ou la manipulation, leur

28
Les facteurs psychologiques ■ Chapitre 1

apparence pouvant être normale et presque rassurante, ce qui a fait évoquer


un « masque de normalité ».

Martha Stout (2005), professeur de psychologie clinique à l’université de Harvard,


décrit le fonctionnement psychologique du psychopathe de la manière suivante :
« Imaginez (si vous le pouvez) ne pas avoir de conscience, vraiment aucune, aucun
sentiment de culpabilité ou de remords, quoi que vous fassiez, aucun sentiment
limitatif de souci du bien-­être des étrangers, des amis ou même des membres de
la famille. Imaginez ne pas avoir à lutter avec la honte, pas même une seule fois
dans toute votre vie, peu importe le caractère égoïste, paresseux, dommageable ou
immoral de l’action que vous avez faite. Et faites comme si le concept de respon-
sabilité vous était inconnu, si ce n’est comme un fardeau que les autres semblent
accepter sans s’interroger, comme des imbéciles crédules. Maintenant, ajoutez
à cette étrange fantaisie la capacité à cacher aux autres que votre profil psycholo-
gique est radicalement différent du leur. Puisque chacun imagine simplement que
la conscience est universelle chez les êtres humains, cacher le fait que vous n’avez
pas de conscience ne demande presque aucun effort. »

Le taux de prévalence de la psychopathie déterminé à la PCL-­R chez les


détenus masculins varie, selon les études, entre 13 et 24 % en Amérique
du Nord. Hart a montré que les détenus d’un établissement à sécurité
moyenne atteignaient un taux de 34 % contre 18 % pour des détenus d’autres
centres pénitentiaires. Elle serait retrouvée chez un grand nombre d’auteurs
d’agression sexuelle (Porter et al., 2000). Dans les quelques études réalisées
sur les femmes, ce taux de prévalence se situe entre 11 et 38 %. Parmi les
délinquants sexuels, 3 à 15 % sont repérés comme psychopathes ; le pour-
centage est faible parmi les pédophiles. Pham (2013) évalue la prévalence
de psychopathes dans des établissements pénitentiaires belges à 14,3 % (en
utilisant le point de coupure à 30 à la PCL-­R, selon la préconisation de Hare).
La psychopathie de 1 170 jeunes délinquants a été évaluée par Cauffman
et al. (2009) à travers la PCL-­YV, et le Youth Psychopathic Traits Inventory
(YPI), qui ont mis en évidence des liens modérés entre les scores totaux et
des scores faibles à moyens pour les sous-­scores. Il reste donc à avancer
concernant les modes d’évaluation, la PCL-­YV restant le standard pour la
comparaison avec les autres mesures (Kotler et McMahon, 2005).

L’évaluation du risque de violence peut être fort utile. Elle peut être
réalisée grâce au HCR-20 (Historical, Clinical, and Risk Management,
testant 20 facteurs) de Webster, Douglas, Eaves et Hart (1997). Comme on
pouvait s’y attendre, plusieurs auteurs ont montré une corrélation entre la

29
Les personnalités criminelles

psychopathie et la criminalité (Wilson et Herrnstein, 1985 ; Hare, 1991).


Les psychopathes sont responsables de plus de crimes que des criminels
non psychopathes, ils commettent des actes plus violents et plus agressifs
et récidivent plus généralement. Ils montrent une inaptitude à apprendre
d’une punition là où, pour les non-­psychopathes, la peur de la punition
suffit généralement à inhiber l’agressivité. La conception de la psycho-
pathie intègre de plus en plus les déficiences dans divers aspects de la
peur, principalement la détection des menaces et la capacité de réactivité
(Hoppenbrouwers et al., 2016).

Une version de la PCL-­R existe pour les jeunes à partir de 13 ans, la


PCL-­R-­Youth Version (Forth, Kosson et Hare, 2003). La définition de
Hare et son application pratique dans cette échelle PCL-­R-­YV (Youth
Version) a permis d’identifier des troubles psychopathiques chez des
adolescents et de montrer des corrélations importantes entre le score total
de jeunes psychopathes à la PCL-­YV et le degré de sévérité de troubles
d’inattention-­impulsivité-­hyperactivité (IIH). Certains travaux s’efforcent
de repérer d’éventuels premiers signes d’une psychopathie dans l’enfance.
Il s’agirait d’enfants présentant un trouble des conduites, de l’impulsi-
vité, de l’insensibilité et une certaine absence d’émotions. Lynam (1997,
1998) a testé des jeunes de la Pittsburgh Youth Study et leur évolution.
Il a noté des corrélations entre les troubles du comportement et des
troubles de type IIH (inattention, impulsivité et hyperactivité). L’échelle
de mesure développée par Lynam (Child Psychopathy Scale, CPS) permet
une prédiction fiable des comportements pour les trois années à venir. Les
corrélations sont nettes entre la psychopathie et l’impulsivité, mais pas
entre la psychopathie et l’inattention (ce dernier lien est caractéristique
du trouble déficit de l’attention avec hyperactivité). Lynam y associe le
score aux comportements agressifs et délinquants mesuré par le test
d’Achenbach (1991). La mCPS (CPS modifiée) permet de repérer le côté
antisocial et impulsif de la psychopathie (Verschuere et al., 2012). Par
ailleurs, Frick (1998) a relevé la faible capacité d’inhibition des compor-
tements et la faible sensibilité à la punition de ces jeunes. Actuellement,
l’ensemble de ces travaux ne montre pas véritablement qu’un groupe
parmi les délinquants et les jeunes ayant un trouble d’attention puisse être
identifié comme psychopathe. La constitution des échantillons (certains
pris dans la population générale et la population d’enfants à risque et
d’autres dans des populations d’enfants présentant des troubles sérieux)
ne les rend pas aisément comparables.

30
Les facteurs psychologiques ■ Chapitre 1

Une étude utilisant la résonance magnétique nucléaire a comparé des psychopathes


ayant été condamnés pour des délits divers à des psychopathes non condamnés
et à un groupe contrôle. Les psychopathes condamnés, contrairement aux non-­
condamnés, présentaient une réduction de 22 % du volume des cellules grises
préfrontales. Ces anomalies du cortex préfrontal seraient liées à l’impulsivité et
aux comportements violents et délictueux (Leistedt et al., 2009). La comparaison de
psychopathes et de non-­délinquants a par ailleurs permis de repérer chez les premiers
une plus grande longueur et épaisseur du corps calleux et une augmentation de 23 %
du volume de leur matière blanche. Les auteurs attribuent ces anomalies du corps
calleux à des processus neurodéveloppementaux atypiques impliquant soit un arrêt
de l’élimination axonale précoce (mécanisme de pruning) soit une augmentation de
la myélinisation de la substance blanche (Raine et coll., 2003). Par ailleurs, le rôle
de l’amygdale dans la psychopathie et dans la délinquance violente est confirmé
(Tiihonen et al., 2000).
L’équipe de Birbaumer (2005) a également comparé des psychopathes et des non-­
délinquants. Elle montre lors de séances de conditionnement de peur (suivant l’envoi
d’un stimulus douloureux) que le groupe contrôle révèle des activations (RMNf) dans le
cortex cingulaire antérieur, l’insula, l’amygdale gauche, tandis que les psychopathes
ne montrent qu’une faible activation de l’amygdale droite. Ces derniers ne montrent
pas d’activité significative dans le circuit qui s’active chez les non-­délinquants.
Des anomalies structurales ont été identifiées dans la matière grise et dans la matière
blanche de douze criminels violents avec trouble de la personnalité antisociale et
psychopathie comparés à des non-­criminels et à vingt criminels violents avec trouble
de la personnalité antisociale sans psychopathie (Gregory et al., 2015). Les cher-
cheurs ont repéré un plus faible volume de matière grise bilatérale, dans le cortex
préfrontal antérieur et dans les lobes temporaux, soit des zones associées au trai-
tement des émotions prosociales, à la culpabilité, à l’embarras et au raisonnement
moral. Certaines fibres nerveuses de la matière blanche du cingulum postérieur qui
relie le cortex cingulaire postérieur au cortex préfrontal médian sont associées au
manque d’empathie de la psychopathie.

Sheilagh Hodgins, de l’université de Montréal collaborant avec le King’s


College de Londres, estime que les criminels, psychopathes comme non-­
psychopathes, reçoivent des punitions à répétition de la part de leurs parents
et professeurs, pour manquements aux règlements et/ou pour agression.
À l’adolescence, il arrive souvent qu’ils soient incarcérés, ce qui n’empêche
pas la persistance de leur comportement violent envers les autres. La cher-
cheuse constate qu’ils ne tirent pas de leçon des punitions, et que leur réseau
de neurones est caractérisé par une organisation particulière qui conduit
à gérer les punitions et récompenses de façon inhabituelle.

Les techniques d’imagerie fonctionnelle (résonance magnétique fonc-


tionnelle et magnéto-­encéphalographie) ont été intégrées dans la procédure

31
Les personnalités criminelles

médico-­légale destinée à évaluer la responsabilité d’une personne dans un


délit et notamment pour repérer d’éventuels signes anatomiques et/ou fonc-
tionnels (Baskin, Edersheim et Price, 2007 ; Leistedt et al., 2009 ; Puigelier et
Tijus, 2016). Il est probable que les recherches futures auront encore plus
fortement recours à ces techniques afin de mieux connaître la psychopathie
et les mécanismes de l’agressivité.

1.5 Les criminels violents


La violence délictuelle et criminelle donne lieu à des considérations diver-
gentes. On sait que la violence des agressions augmente avec le nombre
d’attaques perpétrées et l’âge de leurs auteurs. Les études indiquent qu’en
moyenne, la violence délictuelle est manifeste à l’âge de 13-14 ans, et qu’elle
s’élève jusqu’à 17-24 ans, pour décroître ensuite. Elle serait donc le fait de
personnes plutôt jeunes. Ces résultats sont discutés notamment par Nagin
et Tremblay (2005), qui estiment que la prédominance de faits criminalisés
dans les études longitudinales ne prend pas en compte les méfaits de la
vie quotidienne. Dès lors, si l’on observe une décroissance au fil des ans
des comportements agressifs parmi les faits repérés, les auteurs soulignent
l’aspect crucial de la prévention.

Lorsqu’il est question de criminalité violente, on évoque immédiate-


ment la psychopathologie. Les femmes présentant un trouble mental ont
un risque multiplié par cinq de commettre une infraction criminelle et
par 27 une infraction violente, la réitération des actes provenant non
seulement du trouble mental mais aussi de l’existence d’une personnalité
psychopathique sous-­jacente (Hodgins, 2004). Il semblerait que les symp-
tômes positifs de la schizophrénie soient associés à une augmentation du
risque de commettre des actes violents ou criminels et que la présence
de symptômes négatifs soit associée à une diminution de ce risque (Shah,
1993). La schizophrénie chez un homme multiplierait par sept son risque
de commettre un homicide (Wallace et al., 2004). La fréquence de l’en-
semble des formes psychopathologiques mériterait d’être plus étudiée
concernant les homicides (Blatier et al., 2010 ; Mucchielli, 2008). Pour
évaluer le lien entre schizophrénie et violence, certains utilisent le PAR %
(population attributable risk per cent) représentant le pourcentage de
violence attribuable à la seule schizophrénie.

32
Les facteurs psychologiques ■ Chapitre 1

Il est certain qu’une typologie des troubles mentaux ne vise ni l’évalua-


tion ni la prédiction du risque de comportement criminel ou violent. On
conçoit la difficulté du soin, qui vise la réduction du trouble, comme celle
du traitement correctionnel, qui a pour objectif la diminution du risque de
récidive. Ces deux buts, sans s’exclure, ne sont pas nécessairement pour-
suivis de front, sauf dans des établissements destinés à la prise en charge
correctionnelle. Il est vraisemblable que le traitement psychologique, en
renforçant l’aptitude du patient à mieux gérer ses manifestations psycho-
tiques, à mieux communiquer et à s’affirmer, ait pour conséquence de limiter
ses liens avec des pairs délinquants comme ses possibilités de commission
d’actes délictueux.

Quelle que soit la pathologie présentée, les personnes incarcérées pour


faits de violence sont statistiquement plus souvent réincarcérées pour des
comportements de violence.

Dans une étude auprès de 693 personnes incarcérées, Taylor et Gunn (1999) ont
montré que dans 90 % des cas, les schizophrènes avaient été diagnostiqués malades
au moment du passage à l’acte. Senninger a comparé 24 patients hospitalisés en
Unité pour Malades Difficiles (UMD) à un groupe de patients schizophrènes sans
antécédent violent. La comparaison visait l’importance relative des événements
stressants de leur vie. Les patients hospitalisés en UMD ont présenté trois fois
plus d’événements stressants que les patients schizophrènes. Les événements
stressants sont considérés comme des facteurs d’éclosion de la maladie et y sont
reliés. Grâce à l’examen IRM de schizophrènes violents, Harms (2002) a constaté
une diminution du volume amygdalien non spécifique et du volume des structures
limbiques statistiquement significative par rapport au groupe témoin composé de
patients schizophrènes sans comportement agressif.

Les auteurs de comportements délinquants et criminels ne sont pas


principalement des personnes atteintes de schizophrénie. Il est possible
de repérer dans les personnes présentant des troubles mentaux des sous-­
groupes de patients à risque de violence criminelle, notamment ceux qui
présentent des convictions délirantes à thème de persécution et des troubles
du comportement.

33
Les personnalités criminelles

Une étude sur les délinquants violents a porté sur un échantillon aléatoire stra-
tifié composé de 728 hommes détenus en attente de procès. La stratification visait
à s’assurer qu’un nombre suffisant d’individus accusés d’un crime grave seraient
étudiés. L’analyse finale a porté sur 644 détenus. Quel que soit le diagnostic établi,
les individus ayant commis antérieurement des crimes avec violence étaient deux
fois plus susceptibles d’être à nouveau arrêtés. La variable prédictive la plus impor-
tante de crimes ultérieurs avec violence était la présence d’antécédents criminels
de violence (Teplin, 1994).
Dans le but de caractériser les indicateurs du risque de violence familiale, des
chercheurs ont passé en revue les dossiers de près de 600 hommes délinquants
incarcérés dans sept établissements correctionnels fédéraux du Canada (Bonta et
Yessine, 2005). Ils ont été groupés en trois catégories : les non-­violents (NV) dont le
dossier ne rapportait aucune incidence de comportement violent, les délinquants
violents avec des étrangers (VE) dont le dossier signalait des antécédents d’agres-
sion mais pas à l’endroit de leur conjointe ou d’autres membres de leur famille, et
les délinquants qui s’étaient montrés violents avec différentes personnes dont des
membres de leur famille (VF). Par membre de la famille, les chercheurs entendaient
une personne en lien de parenté directe, c’est-­à‑dire la conjointe ou la compagne s’ils
cohabitaient, l’enfant naturel, le gendre ou la belle-­fille. Selon les dossiers, quatre
détenus sur dix (41 %) avaient été victimes de sévices graves pendant l’enfance
ou l’adolescence. La comparaison des groupes de détenus a montré que 20,3 % du
groupe NV avaient été victimes de sévices à l’instar de 38,7 % de ceux du groupe VE.
Les détenus du groupe VF étaient les plus susceptibles d’avoir été victimisés ; c’était
le cas de plus de la moitié d’entre eux (54,6 %), dont les dossiers signalaient qu’ils
avaient été victimes de mauvais traitements alors qu’ils étaient enfants. Les cher-
cheurs se sont intéressés au type de violence dont certains de ces délinquants
avaient été victimes dans leur famille ; ils ont constaté des différences prononcées
entre les trois groupes. Les délinquants non violents (NV) avaient rarement été
victimes de violence, ceux coupables de violence avec des étrangers (VE) l’avaient
été modérément, mais les délinquants qui violentaient leurs proches (VF) étaient
les plus susceptibles d’avoir eux-­mêmes été victimes de violence.
Un examen approfondi de la nature des mauvais traitements infligés (physique,
sexuelle ou témoin de violence) a montré que le type de mauvais traitement ne
faisait pas varier l’impact. Les caractéristiques des délinquants qui victimisent leur
famille rappellent celles des populations incarcérées : dans les deux cas, soit les
détenus sont issus d’une famille violente, soit ils ont été victimes de séparations
traumatisantes, ou alors ils sont alcooliques ou toxicomanes. Par ailleurs, ils sont
plus souvent atteints que les autres de troubles psychiatriques ou de troubles de
la personnalité. Plus du tiers présentent des troubles de la personnalité : parmi les
détenus du groupe VF, le taux d’incidence est de 43,5 %, comparativement à 34,1 %
pour les détenus du groupe VE et à 13 % pour le groupe NV.
Cette étude montre que les délinquants qui violentent leur famille sont les plus
susceptibles d’avoir eux-­mêmes été victimes de violence pendant leur enfance.
’

34
Les facteurs psychologiques ■ Chapitre 1

’
L’incidence de la personnalité est grande : les troubles de la personnalité antisociale
sont les plus répandus dans les trois groupes, mais les troubles borderline sont
surreprésentés, particulièrement chez les délinquants du groupe VF. Il est donc
toujours intéressant de repérer d’éventuelles expériences de rupture à l’origine
des passages à l’acte et de considérer quelles situations difficiles les délinquants
violents ont pu vivre (Yahyaoui, 2000).

Les études sur le risque accru de violence mettent en avant quatre facteurs
de risque : la présence d’une atteinte cérébrale (psychoses anciennes, prédé-
mences), de symptômes psychotiques (idées délirantes de mégalomanie,
persécution, hallucinations auditives impérieuses), l’existence d’une person-
nalité psychopathique ou antisociale sous-­jacente ou associée (Hodgins,
2004), l’association de cette symptomatologie productive (notamment de
persécution) avec des troubles dépressifs sévères augmente le risque (Senon
et al., 2006).

En matière d’estimation de la dangerosité, la plupart des études montrent


que l’approche clinique non structurée entraîne une surévaluation impor-
tante et par voie de conséquence le maintien dans des institutions de
personnes dont le risque de passage à l’acte est faible.

Afin de prévenir ces situations violentes, Senon et Lopez (2008) préco-


nisent de repérer les patients ayant été violents, de prendre en compte une
sémiologie médico-­légale préoccupante (délire grandiose, rêveries diurnes
d’agression, fascination pour les armes, menaces de passage à l’acte), et de
planifier la prise en charge ambulatoire sur les 20 semaines suivant la sortie
de l’hôpital, qui représentent une période critique pour la dangerosité des
patients schizophrènes et bipolaires. Un travail conjoint en addictologie est
nécessaire pour certains patients consommateurs de drogue ou d’alcool.
Enfin, le recours à des outils d’évaluation du risque de violence permet une
meilleure prise en charge.

1.6 Toxicomanie et délinquance


La France compte environ 17 millions d’expérimentateurs de cannabis,
5 millions d’usagers, et 1,4 million d’usagers réguliers, dont 700 000 usagers
quotidiens. On évalue à 2,2 millions les expérimentateurs de cocaïne dont
450 000 usagers réguliers dans l’année, à 600 000 les expérimentateurs

35
Les personnalités criminelles

d’héroïne et à 1,7 million les expérimentateurs de MDMA/ecstasy. Les


usagers réguliers d’alcool sont évalués à 8,7 millions et les usagers quoti-
diens à 4,6 millions, tandis que les usagers réguliers et quotidiens de tabac
sont estimés à 13 millions. Concernant le cannabis, 42 % des adultes de
18 à 64 ans l’ont expérimenté et 11 % sont des usagers actuels. Parmi les
jeunes de 17 ans, 48 % déclarent avoir expérimenté le cannabis et 9 % être
des fumeurs réguliers ; en regard, 12 % disent consommer régulièrement
de l’alcool.

Il existe peu d’enquêtes à grande échelle sur les jeunes pris en charge par la Protection
Judiciaire de la Jeunesse. L’enquête de Marie Choquet (1998) sur 15 000 jeunes de 11 à
21 ans pris en charge dans ce cadre a montré leur consommation de cannabis quatre
fois supérieure à celle des jeunes du même âge non judiciarisés. Une autre étude
montre que si plus de 60 % des sujets ont débuté leur conduite addictive avant une
première incarcération, près de 50 % étaient déjà passés devant un tribunal pour
enfants avant d’initier leur toxicomanie (Barré, Richard et Senon, 1997).

Selon l’OMS, la définition stricte de la toxicomanie correspond à quatre


éléments : une envie irrépressible de consommer le produit, une tendance
à augmenter les doses, une dépendance psychologique et parfois physique
et des conséquences néfastes sur la vie quotidienne (émotives, sociales,
économiques).

Les faits de délinquance et de criminalité sont souvent commis par


des usagers d’alcool ou de drogue. L’état d’ivresse ou la consommation
de toxiques (et parfois de benzodiazépines) entraîne une désinhibition
favorisant les actes de délinquance mais aussi les violences ou encore la
conduite désordonnée d’un véhicule à moteur. Le syndrome de manque
conduit la personne à chercher à tout prix à se procurer le produit. De
ce fait, beaucoup d’usagers de drogue sont impliqués dans la petite ou la
moyenne délinquance.

Parmi les entrants à Fleury-­Mérogis, la plus grande prison d’Europe, 43 % se déclarent


dépendants à l’alcool, 44 % fument du tabac, 27 % consomment du cannabis, et 18,6 %
sont consommateurs de cocaïne ou de crack (2015). Il est probable qu’à l’entrée en
prison les détenus ne soient pas enclins à révéler leur dépendance à un produit ou
à un autre. Une étude sur 1 100 détenus avait identifié 39 % d’usagers de drogues
(Barré, 1996). Les statistiques déclaratives sont toutefois voisines dans les pays
d’Europe et aux États-­Unis.

36
Les facteurs psychologiques ■ Chapitre 1

L’association entre toxicomanie et délinquance se fait souvent à la puberté,


à la faveur de rencontres avec des pairs délinquants (Bègue et Roché, 2009)
et s’accompagne de conduites à risque et/ou de décrochage scolaire.

L’usage de substances psychoactives est souvent associé à la violence (Duke et al.,


2017 ; Jennings et al., 2016 ; Tomlinson et al., 2016 ; Torok et al., 2015). Parmi les
facteurs de la relation drogue-­violence, on peut citer une initiation précoce, une
fréquence élevée, une polyconsommation (Duke et al., 2017 ; Jennings et al., 2016 ;
Racz et al., 2016 ; Torok et al., 2015). Les substances psychoactives consommées ne
produisent pas les mêmes effets : un consensus existe pour dire que l’abus d’alcool
entraîne des comportements agressifs et impulsifs (Bègue, 2010 ; Tomlinson et al.,
2016). Lorsque l’alcoolisme intervient sur un fond de troubles de la personnalité, le
caractère violent est renforcé, avec risque de passage à l’acte médico-­légal renforcé
(Howard, 2006). Les benzodiazépines à forte dose entraînent souvent de l’impulsivité.
Pour les cannabinoïdes, les résultats sont plus contradictoires (Ostrowsky, 2011), car
il faut considérer l’influence des traits de personnalité (Tomlinson et al., 2016) et le
fait qu’ils soient parfois utilisés pour diminuer l’anxiété ou contrôler le stress dans
une activité criminelle (Brunelle et al., 2014). L’héroïne, la cocaïne, le haschich, la
marijuana, le LSD ou les amphétamines créent un état d’excitation psychique (surtout
la cocaïne) ou d’indifférence (surtout l’héroïne). Les stimulants de type métamphé-
tamines produisent souvent un comportement agressif chez les consommateurs
en phase de sevrage. Les opiacés sont très rarement associés à de la violence, sauf
parfois dans le contexte particulier du sevrage à l’héroïne (Tomlinson et al., 2016).

Les facteurs de risque de toxicomanie sont assez similaires avec ceux liés
au risque de délinquance : relations parents-­enfants difficiles, alcoolisme
parental et difficultés financières, relations affectives précoces perturbées,
traumatismes dans l’enfance, difficultés scolaires et pairs délinquants
(Blatier, 2002). Lorsque sont présents la consommation de drogue et la
délinquance, on considère les facteurs suivants comme aggravants : antécé-
dents d’arrestation, antécédents de délits violents et trafic de drogue (Brochu
et al., 2017). Les jeunes sont particulièrement à risque et les mineurs délin-
quants doivent être pris en charge dans une approche psychologique, sociale
et judiciaire intelligente, comme le souligne depuis longtemps le juge des
enfants Klajnberg (1992).

Les personnes souffrant d’addiction développent un traitement particu-


lier de l’information, une recherche importante de sensations (Zuckerman,
1999) et des procédures de résolution de problèmes particulières. Barré,
Richard et Senon (1997) mettent en parallèle la biographie stéréotypée des

37
Les personnalités criminelles

toxicomanes délinquants : discontinuité négative des relations affectives


précoces, traumatismes nombreux dans l’enfance (abandons, séparations
violentes, deuils, agressions, etc.) et la description des nouvelles formes
de psychopathie faite par Flavigny dès 1977 : passages à l’acte répétitifs,
impulsivité, auto- et hétéro-­agressivité, besoin de satisfaction immédiate
contrastant avec la passivité, le désœuvrement et la dépendance sur fond
d’angoisse essentielle et de frustration affective permanente.

La psychopathologie des toxicomanes peut être comparée aux fonctionne-


ments limites. Il existe quatre modèles explicatifs des liens entre toxicomanie
et délinquance. Le premier est celui de Goldstein et al. (1989, 1991), qui
donne trois ordres de liens entre délinquance et toxicomanie. Les liens
pharmacologiques indiquent que l’usage de drogue est intrinsèquement
criminogène avec une action confusogène et désinhibitrice. Les liens écono-
miques montrent que le besoin de se procurer un produit illicite conduit
à la délinquance. Les liens sociologiques expliquent les corrélations entre
l’environnement, le milieu criminogène, le style déviant et la toxicomanie.
Le deuxième modèle est fondé sur une absence de cause commune entre
le passage à l’acte délinquant ou criminel et l’usage de drogue, le seul lien
étant la synchronie de leur apparition, fréquente à l’adolescence. Le troisième
modèle est intégratif, combinant des facteurs corrélationnels et le modèle de
Goldstein : la relation drogue-­crime est présentée selon des facteurs de risque
(famille, amis, échec scolaire) d’ordre faible, moyen ou élevé qui favorisent
le maintien, la progression ou l’interruption des conduites délinquantes. La
progression va du stade d’« occurrence » au stade « économico-­compulsif ».
Il est alors question d’un « style de vie déviant » (Brochu, 1995). Le quatrième
modèle (Derivois, 2002) propose une nouvelle hypothèse : le passage à l’acte
violent hétéro-­agressif serait lié au passage à l’acte toxique sur soi, et il s’agi-
rait d’un seul et même symptôme de la problématique antisociale.

Il est fréquent qu’une même personne présente plusieurs types d’addic-


tions, y compris en associant consommation de substances et addictions
comportementales (Décamps et al., 2010). La coexistence (alcoolisme et
tabagisme par exemple) ou la dépendance à la suite d’un sevrage (dépen-
dance à l’alcool à la suite d’un sevrage à l’héroïne, par exemple) met en
évidence une addiction compensatoire qui vise le rétablissement d’un certain
équilibre perçu lors de l’addiction. Certains auteurs ont fait l’hypothèse de
l’existence d’un « noyau addictif » comme une forme de vulnérabilité de
l’individu vis-­à‑vis de l’apparition de troubles addictifs, composé de facteurs

38
Les facteurs psychologiques ■ Chapitre 1

psychologiques dispositionnels et situationnels. Ce noyau addictif repo-


serait sur une recherche de régulation des émotions qui expliquerait la
répétition des conduites (Bonnet et al., 2010) et la présence de schémas
cognitifs dysfonctionnels impliquant des croyances particulières (anticipa-
toires, permissives, apaisantes) justifiant le maintien de conduites additives
voire l’accroissement de leur intensité (Grebot et al., 2010). Un modèle
transactionnel, intégratif et multifactoriel (Bruchon-­Schweitzer et Boujut,
2014) permettrait d’intégrer l’incidence de l’accordage relationnel et des
modèles internes de représentation de l’attachement dans l’évolution des
troubles. La recherche d’un tel modèle permettrait d’envisager la conduite
addictive comme un processus complexe « induit par divers déterminants
(cognitifs, conatifs, émotionnels, contextuels, relationnels, sociaux), se
déroulant de façon séquentielle (processus d’évaluation, processus d’ajus-
tement, processus de réévaluation) et ayant diverses issues possibles sur les
trajectoires développementales des personnes » (Battaglia et Gierski, 2014).

Il reste que le traitement des sujets pharmacodépendants constitue une


priorité pour lutter contre l’augmentation de la délinquance. La possibilité
de prescrire des produits de substitution visant à réduire les symptômes de
manque, à limiter voire arrêter la prise de produits toxiques et à insérer le
sujet dans un processus de soins constitue une avancée considérable. Deux
traitements sont principalement utilisés en France pour le sevrage des sujets
toxicomanes : la buprénorphine et la méthadone. La buprénorphine est un
opiacé utilisé dans le traitement des héroïnomanes. Elle développe à la fois
une action agoniste et antagoniste partielle sur les récepteurs opiacés. Elle
n’introduit pas de dépendance physique significative et permet de limiter le
risque d’overdose en cas d’intoxication aiguë. La méthadone est un opiacé de
synthèse prescrit dans le cadre d’un traitement de substitution. Elle est un
agoniste des récepteurs opiacés au même titre que l’héroïne ou la morphine.
Elle possède les mêmes propriétés antalgiques, euphorisantes et sédatives
que ces produits. Cependant, pour des patients tolérants aux opiacés, la
méthadone ne provoque pas ces effets et permet d’assurer, avec une seule
prise quotidienne par voie orale, une imprégnation suffisante pour éviter les
manifestations de manque. Néanmoins, une prise de méthadone cumulée
à une prise d’opiacés augmente fortement les risques d’overdose. Angel et
Angel (2003) évoquent les remaniements psychiques intenses induits par
la substitution : le sujet recentre ses inquiétudes en devenant plus à l’écoute
de sa santé physique et/ou de sa détresse économique. C’est pourquoi il est
important que ces remaniements soient accompagnés et soutenus par un

39
Les personnalités criminelles

travail psychothérapeutique qui donne sens à cette nouvelle situation. Le


risque pour le sujet et son environnement est de croire que le traitement
de substitution (Angel et Angel utilisent le terme de mythification de la
substitution) visant le somatique est à lui seul source de guérison. Le trai-
tement de substitution permet aux personnes de s’inscrire plus aisément
dans une dynamique de soin. En outre, il a pour conséquence de limiter les
réincarcérations (Levasseur, Marzo, Ross et Blatier, 2002).

Si les délinquants ont une consommation de psychotropes plus élevée


que la moyenne, il est impossible d’en déduire que la délinquance est la
conséquence directe de l’abus de drogues. La majorité des consommateurs
ne semblent pas impliqués dans une autre forme de délinquance que celle
de leur consommation. La nature du lien entre usage de drogue et délin-
quance ne saurait être comprise comme une causalité directe. Les modèles
récents tentent d’intégrer les approches causales et les approches corréla-
tionnelles, venant signifier qu’il n’y a pas un toxicomane ou un délinquant
mais une personne en interaction avec un ensemble de systèmes. Enfin, les
comportements toxicomaniaques et délinquants peuvent être vus comme
deux aspects conjoints d’une socialisation et d’un mode de vie déviants où
le recours aux substances psychoactives est une occurrence parmi d’autres
de conduites à risque dans un syndrome comportemental problématique
(Bonnet et Pédinielli, 2010 ; Ivaldi, 2002 ; Siegel et Senna, 2000).

Quel que soit le modèle invoqué, la prise en charge des toxicomanes peut
s’effectuer sur une base psychodynamique ou cognitivo-­comportementale
en milieu carcéral dans le cadre des Unités sanitaires, chargées de la prise
en charge psychologique et psychiatrique des détenus. Trois niveaux de
soins sont définis pour ces unités sanitaires : le niveau I correspond aux
soins ambulatoires incluant des activités ambulatoires (consultations et
activités de groupe), le niveau II inclut une activité d’hospitalisation de jour
organisée au sein de l’unité sanitaire et le niveau III porte sur les hospitali-
sations à temps complet avec et sans consentement en milieu hospitalier.
L’objectif est de responsabiliser les bénéficiaires en cours de détention ou
en fin d’exécution de peine et de favoriser leur acquisition d’une autonomie
face à l’ensemble des difficultés qu’ils devront résoudre à leur retour à la vie
libre. Selon certains psychologues et psychiatres, la relation du toxicomane
avec les produits qu’il consomme serait une métaphore de ses relations
avec le monde et des relations entre les différents membres de sa famille
(Angel et Angel, 2003). Dans cette optique, l’objectif est de travailler à la

40
Les facteurs psychologiques ■ Chapitre 1

restauration des assises narcissiques afin d’établir un lien de type sécure


avec le thérapeute, non marqué par l’emprise et le contrôle, à savoir une
relation différente de celle qu’il a développée avec le produit. D’autre part,
un traitement psychologique de type comportemental a pour but de rompre
le cycle de dépendance en agissant sur les conduites addictives et sur les
renforçateurs, en permettant des modifications de l’estime de soi et du mode
de traitement des émotions et en favorisant l’autonomisation.

1.7 Détention et troubles psychopathologiques


Nous avons déjà évoqué la psychopathologie de la violence et de la délin-
quance. Il existe également un débat récurrent sur la présence de troubles
mentaux chez les détenus. Selon les études, les méthodes utilisées (entre-
tien clinique, évaluation par des outils validés ou éléments objectivables
d’information tels qu’une hospitalisation psychiatrique), les pourcentages de
détenus présentant des troubles mentaux varient de 5 à 16 %. Selon l’Obser-
vatoire international des prisons (OIP, 2018), plus de 20 % des détenus sont
atteints de troubles psychotiques. Une étude (DREES, 2001) avait indiqué,
à partir des entretiens d’accueil, que 55 % des entrants présentaient au moins
un trouble psychiatrique, que 20 % avaient déjà été suivis dans un secteur
de psychiatrie et qu’un suivi psychiatrique était préconisé pour la moitié
d’entre eux.

En comparant un groupe de détenus à des personnes ordinaires avec


le Diagnostic Interview Schedule, Teplin (1990) a repéré trois fois plus de
schizophrénies, de dépressions graves, de manies et de troubles bipolaires
dans la population incarcérée que dans la population générale.

Une étude française de la Direction de la Recherche, des Études, de l’Évaluation


et des Statistiques (DREES) réalisée par Coldefy (2002) sur les Services Médico-­
Psychologiques Régionaux (SMPR) auprès de 2 300 personnes examinées à leur
arrivée en prison selon les critères de la Classification Internationale des Maladies
(CIM-10) a montré une prévalence de 50 % de troubles psychiatriques. Il apparaît
une prédominance de troubles dépressifs, anxieux, addictifs, et des troubles de la
personnalité antisociale et de l’humeur. Parmi ces détenus, 40 % ont des antécédents
psychiatriques (troubles du comportement auto- ou hétéroagressifs, états délirants
aigus, troubles addictifs, hospitalisation et suivis psychiatriques antérieurs) dont
15 % ont été suivis en pédopsychiatrie.
’

41
Les personnalités criminelles

’
Fazel et Danesh (2002) ont publié dans The Lancet une méta-­analyse de 62 études
représentant 22 790 prisonniers dans 12 pays occidentaux. Cette étude recense,
selon les caractéristiques du DSM, près de 4 % de psychoses chroniques, 10 % de
troubles dépressifs et 65 % de troubles de la personnalité, dont 47 % de personna-
lités antisociales. Parmi les femmes (qui représentent 19 % de l’échantillon initial),
les pourcentages sont de 4 % pour les psychoses chroniques, 12 % pour les troubles
dépressifs et 42 % pour les troubles de la personnalité, avec 21 % de personnalités
antisociales. Il ne faut pas oublier que l’incarcération elle-­même peut produire un
stress aigu et constituer une réactivation traumatique de type syndrome de stress
post-­traumatique. Comparés à la population générale, ces taux sont tous plus élevés
qu’en population générale (sauf pour le handicap mental) et 2 à 4 fois plus élevés
en prison pour les psychoses et la dépression.

Une étude de Vitelli (1998) auprès de 100 adultes détenus âgés de 19 à


70 ans dans une prison de sécurité maximale a montré que 41 % d’entre
eux avaient présenté un trouble de l’attention et une hyperactivité pendant
l’enfance et que 3 % présentaient un trouble des conduites évalué à partir
du Wender Utah Rating Scale. En examinant les antécédents psychiatriques
de près de 300 000 hommes et femmes, Hodgins et al. (1996) ont repéré
une plus forte prévalence de comportements criminels chez ceux qui
avaient été hospitalisés en psychiatrie. Deux principaux types de criminels
peuvent être repérés (Hodgins, 1998) : ceux qui ont débuté précocement une
carrière criminelle sur une personnalité antisociale et ceux qui ont débuté
plus tardivement en étant atteints d’un trouble mental majeur associé à des
comportements transgressifs. Certains auteurs vont jusqu’à invoquer la
présence de symptômes d’un état dissociatif lié à un stress post-­traumatique,
ce qui a pu être argué pour diminuer leur responsabilité.

Les schizophrénies paranoïdes semblent être souvent impliquées dans


la criminalité. Deux formes méritent d’être individualisées : les états hébé-
phréniques d’une part, dans lesquels le rapport au réel est satisfaisant mais
le fonctionnement pulsionnel psychotique préoccupant et, d’autre part,
les formes catatoniques majorées par l’enfermement, pouvant aller jusqu’à
la réalisation de syndromes cataleptiques. Les actes de criminalité des
héboïdophrènes et des délirants paranoïdes sont généralement plus graves
que ceux des autres schizophrènes.

La répartition de ces détenus atteints de troubles psychiatriques pose


des problèmes institutionnels. Les prisons accueillent des criminels atteints

42
Les facteurs psychologiques ■ Chapitre 1

de troubles mentaux et les hôpitaux psychiatriques reçoivent des malades


mentaux ayant commis des actes médico-­légaux. La marge de manœuvre
est délicate dans les deux cas.

En France, plusieurs études rendent compte d’un taux de détenus schi-


zophrènes de 3 à 5 %. En présence d’un criminel atteint de tels troubles
psychiatriques, l’irresponsabilité pénale peut être invoquée par les experts,
en application de l’article 122-1, alinéa 1 du Code pénal, qui dispose que
« n’est pas pénalement responsable la personne qui était atteinte, au moment
des faits, d’un trouble psychique ou neuropsychique ayant aboli son discer-
nement ou le contrôle de ses actes ». La nuance entre abolition et altération
est assez subtile : « la personne qui était atteinte, au moment des faits, d’un
trouble psychique ou neuropsychique ayant altéré son discernement ou
entravé le contrôle de ses actes demeure punissable ; toutefois, la juridiction
tient compte de cette circonstance lorsqu’elle détermine la peine et en fixe le
régime » (article 122-1, alinéa 2). Si l’abolition est rarement retenue comme
motif d’irresponsabilité pénale, l’altération entraîne parfois un allongement
des peines afin d’éviter le risque de récidive. Un rapport de l’Inspection
générale des Affaires sociales sur la santé des détenus (IGAS, 2005) indiquait
un taux d’irresponsabilité pénale de 0,45 %.

Le rapport de la Commission santé-­justice (2005) a rappelé la nécessité de


distinguer, en termes de prévalence, les troubles mentaux liés à une patho-
logie mentale avérée des troubles de la personnalité et du comportement. Les
premiers sont définis comme des manifestations psychopathologiques,
s’organisant le plus souvent en maladie psychiatrique aiguë ou chronique
s’exprimant dans la sphère intellectuelle, affective et/ou comportementale
et relevant de soins psychiatriques codifiés. Les troubles de la personnalité
correspondent à des traits de personnalité rigides, inadaptés et responsables
d’une altération plus ou moins sévère des relations sociales et profession-
nelles. Ces troubles peuvent être aigus, transitoires et réactionnels à une
situation de conflit ou de contrainte. Ils peuvent aussi être permanents
s’ils traduisent une organisation psychique particulière, caractéristique des
personnalités pathologiques ; ces derniers troubles ne relèvent pas tous de la
psychiatrie. Il reste que la population carcérale nécessite des soins psychia-
triques et psychologiques et qu’il ne saurait être question de laisser cet aspect
à l’abandon vu les nécessités. L’enquête de santé mentale réalisée dans les
prisons du Nord-­Pas-­de-­Calais de 2014 à 2017 auprès de 653 adultes entrants
a repéré également que les troubles mentaux étaient très supérieurs à ceux de

43
Les personnalités criminelles

la population générale (au questionnaire MINI présenté dans les 72 heures


suivant l’admission en prison) : 7 personnes sur 10 présentent au moins un
trouble, contre 32 % annoncés en population générale.

Le détenu en attente de jugement qui est atteint d’une pathologie psychia-


trique est orienté après expertise (Abdellaoui et al., 2014). Si celle-­ci conclut
à l’irresponsabilité pénale, on recourt à une hospitalisation d’office en
secteur psychiatrique. Si l’expert conclut à la responsabilité ou à la respon-
sabilité atténuée, les soins seront dispensés en détention (sauf refus du
malade, auquel cas l’article D. du Code de procédure pénale s’applique,
permettant une hospitalisation d’office). Si cela est estimé nécessaire, le
condamné est suivi dans le cadre de la prison par le SMPR, sauf si son état
ne le permet pas ou s’il le refuse. L’organisation des soins en milieu carcéral
permet une prise en charge diversifiée (Coldefy et al., 2005). Dans ces cas
précis, l’article D. 398 rend possible une hospitalisation d’office en secteur
psychiatrique ou en unité pour malades difficiles (UMD). Par ailleurs,
des psychotiques sont accueillis dans les établissements pénitentiaires du
fait de la commission de délits ou de crimes. Les situations sont délicates
à gérer. En premier lieu, le secteur psychiatrique en milieu pénitentiaire
a pour objectif de dépister les troubles psychiques par un entretien avec
les entrants. Les soins médico-­psychologiques courants sont réalisés au
cours d’entretiens individuels, d’ateliers thérapeutiques, des traitements
psychiatriques et psychothérapeutiques sont effectués, ainsi qu’une prépa-
ration à un suivi psychologique à l’extérieur, etc. Ce secteur psychiatrique
a également pour mission la lutte contre l’alcoolisme et la toxicomanie et
est chargé du suivi psychiatrique post-­pénal. La structure de base est le
service médico-­psychologique régional. Il existe des Unités Psychiatriques
d’Hospitalisation (UPH). Chaque établissement devrait à terme disposer
d’une Unité Sanitaire comprenant un dispositif de soins somatiques et un
dispositif de soins psychiatriques coordonnés par un médecin responsable.
En SMPR, l’activité est actuellement essentiellement ambulatoire (92 % des
prises en charge en juin 2001), bien qu’il existe une possibilité d’hospitalisa-
tion (seuls 5 % des détenus sont hospitalisés à temps complet). Cependant,
l’hospitalisation dans les SMPR est assez restreinte, car le personnel soignant
n’est pas présent la nuit, les détenus étant gardés par du personnel péniten-
tiaire. Ces hospitalisations dites « libres » se font avec le consentement du
détenu. Les Unités Psychiatriques d’Hospitalisation (comme à Fresnes et
aux Baumettes à Marseille) offrent à des détenus acceptant l’hospitalisation
une permanence médicalisée 24 heures sur 24.

44
Les facteurs psychologiques ■ Chapitre 1

Dans le dispositif de soins psychiatriques en milieu pénitentiaire, on peut


travailler avec les unités de consultations et de soins ambulatoires (UCSA).
Les UCSA sont des unités hospitalières qui assurent les soins infirmiers,
de médecine générale, les soins dentaires et des consultations spécialisées
englobant les soins psychiatriques ambulatoires réalisés par les équipes
du secteur de psychiatrie générale. Il existe quelques Unités pour Malades
Difficiles implantées dans des centres hospitaliers spécialisés (tels Cadillac
en Gironde, Montfavet dans le Vaucluse, Sarreguemines en Moselle et
Villejuif en région parisienne). Ces structures assurent l’hospitalisation
à temps complet de patients détenus, de patients déclarés irresponsables,
ou encore de patients ne relevant pas des secteurs de la psychiatrie générale,
qui « présentent pour autrui un danger tel qu’ils nécessitent des protocoles
thérapeutiques intensifs adaptés et des mesures de sûreté particulières, mis
en œuvre dans une unité spécialement organisée à cet effet » (article 1er de
l’arrêté relatif au règlement intérieur des Unités pour Malades Difficiles).

La loi Perben II dispose dans son article L. 3214-1 que « l’hospitalisa-


tion, avec ou sans son consentement, d’une personne détenue atteinte de
troubles mentaux est réalisée dans un établissement de santé, au sein d’une
unité spécialement aménagée ». Ce type d’unité hospitalière spécialement
aménagée (UHSA) assure des soins spécialisés avec ou sans consentement
grâce aux équipes du secteur psychiatrique, avec une sécurisation par l’admi-
nistration pénitentiaire. Ces unités sont rattachées au secteur de psychiatrie
en milieu pénitentiaire. Selon Lévy (2005), ces unités permettent d’éviter
les allers-­retours prison-­hôpital, jugés inefficaces et souvent préjudiciables
pour le traitement des patients détenus.

Une étude épidémiologique sur la santé mentale des détenus (Rouillon, Duburcq,
Fagnani et Falissard, 2004) a porté sur près de 1 000 personnes détenues dont
800 hommes tirés au sort dans les établissements pénitentiaires de France
métropolitaine (plan de sondage en grappes en fonction du type d’établissement
pénitentiaire) : 100 détenus dans 2 maisons centrales, 250 détenus dans 5 centres
de détention et 450 dans 13 maisons d’arrêt, 100 femmes détenues (dans 2 établis-
sements) et 100 hommes détenus en Martinique, Département et Région d’Outre-­Mer
(DROM). En moyenne âgés de 38 à 39 ans, 43 % d’entre eux n’ont pas de diplôme (37 %
des femmes et 77 % dans les DROM). Le temps d’incarcération effectué varie entre 15
et 26 mois. Plus de six détenus sur dix sont incarcérés pour atteinte aux personnes ;
55 % des hommes font l’objet d’une procédure criminelle (60 % des femmes et 47 %
dans les DROM). Un homme détenu sur deux (49 %) a déjà été incarcéré par le passé
contre une femme détenue sur quatre (26 %).
’

45
Les personnalités criminelles

’
L’étude de Rouillon et al. (2004) estime la prévalence des troubles mentaux dans la
population carcérale française. Les comorbidités sont fréquentes. Plus de 21 % des
détenus sont identifiés comme psychotiques, répartis comme suit : schizophrénie
(7,3 %), bouffée délirante aiguë (0,1 %), schizophrénie dysthymique (2,6 %), psychose
chronique non schizophrénique (paranoïa, etc. : 7,3 %), type de psychose non précisé
(4,1 %). Parmi les 66 % de troubles thymiques on compte des détenus souffrant d’un
syndrome dépressif (40,3 %), d’une dépression endogène-­mélancolique (7,5 %), d’un
état dépressif chronique (7,4 %), d’une manie/hypomanie (6,2 %), de troubles bipolaires
(4,6 %). Parmi les détenus souffrant de troubles anxieux (56 % des hommes et 54 %
des femmes), l’étude recense des pathologies intriquant des troubles anxieux divers
dont les attaques de panique et la névrose d’angoisse (7,6 %), l’agoraphobie (16,7 %),
la phobie sociale (16,3 %), la névrose obsessionnelle (9,2 %), la névrose traumatique
(19,6 %), l’anxiété généralisée (32,7 %). La majorité des détenus est concernée par une
dépendance aux substances (70 %) dont l’alcool (33 %). Un tiers a déjà consulté pour
des motifs psychiatriques et 16 % ont déjà été hospitalisés pour raisons psychia-
triques, 8 % ont été suivis par le dispositif de lutte contre l’alcoolisme et 6 % par
celui contre la toxicomanie (6 %).

Les syndromes dépressifs actuels sont différemment présents : entre 35 et


40 % en métropole et 21 % dans les DROM. Le risque suicidaire évalué par le
MINI (Mini International Neuropsychiatric Interview) est repéré pour 40 %
des hommes détenus et 62 % des femmes, ce risque est jugé élevé pour la
moitié d’entre eux. La proportion est plus élevée en maison d’arrêt que dans
les autres établissements. Le MINI identifie une personnalité antisociale
(vie entière) chez 28 % des hommes détenus, 14 % des femmes et 22 % des
détenus des DROM (la proportion est de 22 % en centre de détention et de
32 % en maison d’arrêt). Les prévalences brutes observées dans les DROM
(sans aucun ajustement sur les profils de détenus) apparaissent inférieures
à celles observées en métropole, pour tous les troubles hormis l’abus ou la
dépendance aux substances illicites où elle est nettement supérieure.

Concernant le passé des détenus avant l’âge de 18 ans, il s’avère que : 28 %


ont été suivis par un juge pour enfants, 22 % ont été placés en foyer ou en
famille d’accueil, 28 % ont déclaré des maltraitances physiques, psycholo-
giques ou sexuelles.

En France, la population détenue est pour une grande part de faible niveau
scolaire et professionnel et le plus souvent en situation d’emploi précaire.
Les psychologues travaillant en prison ou en réinsertion savent que la prise
en charge dépasse largement le rapport aux normes et à la loi. Les multiples

46
Les facteurs psychologiques ■ Chapitre 1

pathologies psychologiques et addictives nécessitent une bonne connais-


sance des modalités thérapeutiques.

Dans le cadre du traitement, il faut également estimer la dangerosité et


le risque de récidive.

1.8 Dangerosité et évaluation du risque de récidive


L’évaluation de la dangerosité est très importante. Elle peut intervenir lors
de la mise en examen, lors de l’incarcération, dans le cadre de l’application
des peines, ou encore au moment de la libération.

Plusieurs techniques peuvent être mises en œuvre pour évaluer la dange-


rosité. L’entretien clinique non structuré a montré une surévaluation de la
dangerosité et un recours important aux théories implicites et naïves de la
personnalité. Les échelles actuarielles ont cherché à répondre aux faiblesses
de cette évaluation clinique non structurée. Elles reposent sur l’analyse de
personnes condamnées pour des actes antisociaux. Ces méthodes reposent
sur l’exploitation purement statistique de certaines caractéristiques de l’in-
dividu concerné en indiquant une probabilité de récidive (de 0 à 100 %)
fondée sur des informations cliniques, sociales et institutionnelles dont
il a été montré qu’elles étaient fortement corrélées statistiquement à la
récidive.

L’une des principales méthodes est l’échelle de psychopathie de Hare


(2003), qui fournit une évaluation intéressante du risque de récidive. Le
score de psychopathie à la PCL-­R est lié à la commission d’actes violents :
les coups et blessures, le port d’arme, le vol avec violence, mais pas l’homi-
cide (corrélation négative) ni le délit sexuel. La récidive violente est associée
aux traits de personnalité (facteur 1) et la récidive générale aux compor-
tements antisociaux (facteur 2). Cooke et ses collaborateurs (2001, 2007)
préfèrent considérer une structure en trois facteurs en retenant 13 critères
parmi les 20, ce qui permet de cerner l’importance des traits psychopathiques
en laissant de côté les traits antisociaux. Cette échelle de Hare apparaît de
meilleur pronostic que d’autres échelles, notamment la VRAG ou la HCR-20
(Tengström et al., 2000). Il existe aussi la PCL-­R, VPS (Variante Prediction
Scheme), utilisée surtout pour les patients en obligation de soins. Davod
Cooke et ses collaborateurs ont également mis au point une méthode

47
Les personnalités criminelles

d’évaluation du trouble de personnalité psychopathique, le Psychopathic


Personality Disorder (PPD), le Comprehensive Assessment of Psychopathic
Personality (CAPP), traduit dans de nombreuses langues (Cooke et al., 2012).

Par ailleurs, Pham (2013) a indiqué que la PCL-­R Youth Version repré-
sentait un bon outil d’évaluation du risque de récidive : parmi 220 mineurs
délinquants examinés au cours de 55 mois, ceux qui ont présenté les plus
hauts scores à la PCL-­R ont également le plus récidivé (Gretton et al., 2001).
Ceux qui ont eu un score élevé de psychopathie (30 et plus) ont commis
trois fois plus de délits violents (Gretton, Hare et Catchpole, 2004).

Si pendant longtemps on a considéré la dangerosité en termes de présence


ou d’absence, on en est venu à la percevoir comme un phénomène lié au
contexte, à la situation, aux circonstances, susceptible d’évolution. C’est
pourquoi on s’est intéressé peu à peu à l’évaluation du risque ; cette notion
implique l’idée d’un continuum sur lequel l’individu peut être situé en
fonction de facteurs tels que les troubles psychiques, les addictions, la
problématique familiale. D’autres facteurs peuvent avoir un effet réduc-
teur, tels que la famille, le degré d’empathie pour les victimes, le statut de
libération conditionnelle, etc.

La VRAG (Violence Risk Appraisal Guide) est une échelle actuarielle à


12 items cotés selon un guide. Les items examinent :
– le fait ou non d’avoir vécu régulièrement avec ses parents jusqu’à l’âge de
16 ans ;
– une mauvaise adaptation durant la scolarité primaire ;
– des antécédents familiaux ou personnels de consommation d’alcool ;
– des antécédents criminels non violents ;
– le statut marital ;
– un manquement antérieur à une libération sur parole ;
– l’âge au moment du délit ;
– les atteintes à la victime ;
– le sexe de la victime ;
– un trouble de la personnalité selon le DSM ;
– une schizophrénie selon le DSM ;
– le score de psychopathie à la PCL-­R.

Les résultats à la VRAG sont répartis selon 9 catégories de risque de


récidive violente. Plus le score de la personne est élevé, plus grand est le

48
Les facteurs psychologiques ■ Chapitre 1

risque de récidive violente dans les 10 prochaines années. Une révision


de la VRAG a été publiée en 2013, à travers un outil plus facile à coter,
et testé dans le temps, permettant de prédire de façon assez bonne
(AUC1 = .82) une récidive violente et une récidive générale (AUC = 0.74 ;
Rice, Harris et Lang, 2013). Un aspect clé de ces instruments actuariels est
que les scores obtenus sur les individus peuvent être liés à des données
statistiques collectées à grande échelle. Cependant, le VRAG présente
quelques limites. Tout d’abord, la prédiction du risque de récidive violente
ne permet pas de préciser la nature, la sévérité, l’imminence ou encore la
fréquence de la violence future (Cooke, 2000).

Le Level of Service Inventory-­R (LSI-­R), conçu par Andrews et Bonta


(1995), est un instrument utilisé pour les délinquants, et dans le cas de
violences conjugales. Il évalue les facteurs de risque en intégrant les anté-
cédents criminels, l’emploi, la situation de famille, les partenaires, les
problèmes d’alcool et de drogue, les troubles affectifs et personnels ainsi
que les attitudes et l’orientation. Il permet de préciser les besoins des délin-
quants en matière de supervision et de services.

Citons quelques autres méthodes actuarielles : Sex Offender Risk Appraisal


Guide (SORAG), Rapid Risk Assessment for Sex Offence Recidivism
(RRASOR) et Statique (autre outil d’évaluation rapide du risque de réci-
dive sexuelle, Hanson), le Sex Offender Needs Assessment Rating (SONAR).
Lorsqu’elles sont correctement utilisées (Moulin et Gravier, 2013), ces
méthodes permettent une évaluation dont la sensibilité et la spécificité sont
bien meilleures que l’évaluation individuelle (Harris et al., 2008). Leur qualité
est assez bonne, même si on peut regretter qu’elles repèrent le risque de réci-
dive violente plus que le risque de récidive générale. En ce qui concerne la
récidive générale on peut repérer quelques-­uns des prédicteurs de récidive :
les facteurs statiques (en premier lieu les antécédents criminels, puis l’âge,
les méthodes d’éducation des parents, le comportement antisocial pendant
l’enfance ou l’adolescence, la structure familiale, le fait d’être un homme,
le fonctionnement intellectuel, le statut socio-­économique) et les facteurs
dynamiques : l’existence d’une personnalité antisociale, la fréquentation

1. L’aire sous la courbe (Area Under Curve, AUC) est la mesure de l’aire de la surface située
sous le tracé d’une fonction mathématique dessinée dans un repère. Cette valeur correspond
à l’intégrale de cette fonction.

49
Les personnalités criminelles

de pairs délinquants, les comportements antisociaux, l’absence de réussite


sociale, l’abus de substances, la détresse personnelle (Bénézech, 2002).

Une autre méthode repose sur des guides cliniques structurés. Leurs
défenseurs estiment que les méthodes actuarielles sont fondées sur des
données du passé et délaissent de ce fait des éléments cliniques actuels
et, bien souvent, l’appréciation du clinicien (Buchanan, 2008 ; Niveau,
2012). Une nouvelle génération d’instruments d’évaluation intègre dès
lors des facteurs sociodémographiques, criminologiques et cliniques. Un
calcul informatique avance ensuite un risque de récidive, fournit des orien-
tations concernant le traitement ainsi que des perspectives d’évolution.
Citons parmi eux l’outil suisse Forensic Operationalized Therapy and
Risk Evaluation System (FOTRES ; Urbaniok, 2007) et le Risk Matrix 2000
(Niveau, 2012 ; Thornton et al., 2003).

Les cliniciens sont conduits à examiner un certain nombre de variables


pour l’évaluation des risques. Ce type d’évaluation est fondé sur les connais-
sances acquises auprès des malades mentaux, en médecine légale et en
milieu carcéral concernant les facteurs qui devraient être pris en compte
lors de l’évaluation des risques. Parmi les guides structurés qui précisent
les domaines à explorer et indiquent les différentes cotations, citons : la
HCR-20 (Historical Clinical Risk Management) dans le cadre d’entretiens
semi-­structurés et son test associé (START, Short-­Term Assessment Risk
ad Treatability), le SAVRY (Structured Assessment of Violence Risk in
Youth), qui inclut des variables protectrices. De même, le Jail Screening
Assessment Tool (JSAT) de Nicholls, Roesch et al. (2005) repose sur un
entretien semi-­structuré permettant d’identifier les problèmes psychia-
triques et les risques de suicide, d’autoagressivité, de violence et de
victimisation lors des admissions dans les prisons. Nous pouvons égale-
ment évoquer le Sexual Violence Risk (SVR-20) pour évaluer le risque de
violence sexuelle, le SARA (qui sera présenté dans la partie consacrée aux
violences conjugales). Présentons la constitution de la HCR-20 (Historical
Clinical Risk-20), qui est une échelle élaborée avec des cliniciens sur la
base de facteurs statistiquement associés au risque de violence. Avec le
SVR-20, elle fait partie des outils plus prédictifs que les outils actuariels
tels que VRAG et Static, et c’est l’échelle la plus utilisée. Elle comporte
20 facteurs résumant les informations pertinentes sur le passé (histoire
du patient), le présent (appréciation clinique : introspection, résistance
au traitement), et le futur (gestion du risque probable). La structure de

50
Les facteurs psychologiques ■ Chapitre 1

l’échelle sert de trame à la récolte et à l’analyse d’informations. La qualité


prédictive en termes de récidive violente et de récidive générale est assez
bonne (AUC entre 0,70 et 0,75 dans les versions anglaise, française et alle-
mande). Chaque item est coté 0 = absent, 1 = faiblement présent, ou 2
= très présent, sur un grand total de 40. Le jugement final du risque est
présenté comme faible, modéré ou élevé.

Les items constituant la HCR-20

Échelle historique
H1 Violence antérieure
H2 Premier acte de violence commis à un jeune âge
H3 Instabilité de la relation
H4 Problèmes d’emploi
H5 Problèmes de toxicomanie
H6 Maladie mentale grave
H7 Psychopathie
H8 Inadaptation pendant l’enfance ou l’adolescence
H9 Troubles de la personnalité
H10 Échec antérieur de la surveillance

Échelle clinique
C1 Introspection difficile
C2 Attitudes négatives
C3 Symptômes actifs de maladie mentale grave
C4 Impulsivité
C5 Résistance au traitement

Échelle concernant la gestion des risques


R1 Plans irréalisables
R2 Exposition à des facteurs déstabilisants
R3 Manque de soutien personnel
R4 Inobservation des mesures curatives
R5 Stress

L’échelle ci-­dessus sert de trame à la conduite de l’entretien et à l’analyse


des informations cliniques.

51
Les personnalités criminelles

Certains facteurs historiques témoignent de la stabilité dans le temps


d’éléments de risque.
– H1 Violence antérieure : c’est l’un des facteurs prédictifs les mieux iden-
tifiés. Il s’agit de considérer la densité, le poids de la violence antérieure,
en tenant compte du nombre d’événements et de leur gravité. Tous les
comportements de violence survenus jusqu’à l’évaluation, voire pendant
celle-­ci, sont analysés.
– H2 Premier acte de violence commis à un jeune âge : la précocité d’un
premier acte de violence est souvent liée à un risque accru de violence
subséquente (des limites d’âge arbitraires sont utilisées : moins de 20 ans,
entre 20 et 40 ans, plus de 40 ans).
– H3 Instabilité des relations intimes : un bon réseau et un soutien social
agissent comme modérateurs du risque de violence. Cette évaluation
permet de déterminer la capacité à s’engager dans des relations intimes
stables et à les maintenir. L’expert détermine si le sujet a connu beau-
coup de relations courtes, d’intenses conflits dans le cadre de relations
de longue durée ou pas de relations intimes.
– H4 Problèmes d’emploi : une association a été démontrée entre la récidive
de violence et le chômage, un bas revenu ou des changements fréquents
d’employeurs.
– H5 Problèmes de toxicomanie : l’utilisation de substances psychoactives
confère un risque de violence plus grand. L’abus de médicaments pres-
crits est également pris en compte. L’évaluation de cet item est fonction
des répercussions de l’utilisation des substances sur la santé, l’emploi, les
loisirs, les relations interpersonnelles et d’éventuels problèmes légaux liés
à cette toxicomanie.
– H6 Maladie mentale grave : le risque de violence est accru lorsque le sujet
présente des troubles schizophréniques et/ou maniaques. L’évaluation ne
prend pas en compte les troubles « mineurs » tels que les troubles anxieux,
somatoformes ou les troubles du sommeil.
– H7 Psychopathie : il s’agit d’un facteur prédictif essentiel. Son évaluation
est réalisée grâce à l’échelle PCL-­R. La psychopathie est caractérisée par
l’impulsivité, la polycriminalité, la cruauté, l’absence d’empathie et de
remords.

L’estimation finale du risque s’appuie sur un jugement clinique structuré


selon le nombre total de facteurs de risque, mais également la façon dont ils
se combinent et le poids qu’ils peuvent avoir les uns par rapport aux autres.
Ainsi, certains facteurs sont plus graves que d’autres et leur présence dans

52
Les facteurs psychologiques ■ Chapitre 1

un profil péjore le jugement final. Il reste que la plupart de ces outils ne four-
nissent des éléments fiables ne dépassant pas en général une AUC de .76.

En outre, il est maintenant jugé important de pouvoir évaluer, en plus


des facteurs de risque, les facteurs de protection, qui réduisent le risque
de comportement violent ultérieur, en visant les capacités de la personne
et de son environnement. Ceci peut être réalisé grâce à un instrument
spécialement conçu pour repérer les facteurs de protection liés au risque
de violence, le SAPROF (Structured Assessment of Protective Factors for
Violence Risk ; De Vogel, 2011). Développé avec une approche de jugement
clinique structurée, il constitue un complément aux autres outils d’éva-
luation du risque de violence. Utilisé auprès de 94 personnes, 48 auteurs
d’infractions violentes et 46 auteurs d’infractions sexuelles violentes suivis
trois ans après leur sortie de prison, en complément des deux outils actua-
riels et des deux outils dynamiques les plus utilisés dans le domaine de
l’évaluation du risque de conduites délictueuses violentes et/ou sexuelles,
à savoir d’une part le HCR et le SVR et, d’autre part, le VRAG et le Static, le
SAPROF a apporté des informations très intéressantes dans le cadre de la
prévention, en offrant des pistes de mobilisation et en présentant des leviers
de renforcement positifs, permettant ainsi non plus seulement de prédire,
mais aussi de prévenir la récidive (Moulin et al., 2015).

Ce champ de recherche mérite encore toute l’attention des cliniciens et


des chercheurs.

Le chapitre suivant abordera à la fois des criminalités spécifiques et des


techniques d’investigation, et donnera des outils de compréhension pour
le soin et la prévention.

53
Chapitre 2
Criminalités spécifiques
et techniques d’investigation
Sommaire
1. La délinquance sexuelle...................................................................... 57
2. Les tueurs de masse, les tueurs en série et les terroristes................ 80
3. Les violences conjugales.................................................................... 86
4. La maltraitance envers les enfants.................................................... 95
5. La maltraitance envers les personnes âgées...................................... 105
6. Le syndrome de Stockholm................................................................. 107
7. La délinquance et la criminalité au féminin......................................... 113
1. La délinquance sexuelle
L’agression sexuelle est définie dans le Code pénal comme une
atteinte sexuelle commise avec violence, contrainte, menace ou surprise
(article 222-22 du Code pénal). « Le viol et les autres agressions sexuelles
sont constitués lorsqu’ils ont été imposés à la victime dans les circonstances
prévues par la présente section, quelle que soit la nature des relations exis-
tant entre l’agresseur et sa victime, y compris s’ils sont unis par les liens du
mariage. Lorsque les agressions sexuelles sont commises à l’étranger contre
un mineur par un Français ou par une personne résidant habituellement
sur le territoire français, la loi française est applicable… ». Tout acte de
pénétration sexuelle, de quelque nature qu’il soit, commis sur la personne
d’autrui par violence, contrainte, menace ou surprise est un viol. Le viol est
puni de quinze ans de réclusion criminelle (article 222-23 du Code pénal).
Le Code pénal distingue également le viol aggravé (précédé, accompagné ou
suivi d’actes de torture et de barbarie, ou encore lorsqu’il a entraîné la mort
de la victime), l’attentat à la pudeur, l’exhibition sexuelle et le harcèlement
sexuel. Ces qualifications attestent la grande diversité des profils d’agres-
seurs sexuels et la complexité d’une prise en charge unique.

Sur la base d’études européennes effectuées en population générale sur


des échantillons représentatifs d’adultes, les taux de femmes ayant subi au
moins une agression sexuelle dans leur vie varient jusqu’à atteindre 22 %.
Une étude de l’Observatoire national de la délinquance et des réponses
pénales sur un échantillon de 67 000 personnes de 18 à 75 ans montre que
1,25 % des répondants ont déclaré avoir été victimes de violences et que
près de 2 % des femmes ont subi, en l’espace de deux ans, des violences
physiques ou sexuelles de la part de leur conjoint ou ex-­conjoint (ONDRP,
2012). Ces violences sexuelles seront évoquées lorsque nous aborderons la
question des violences conjugales.
© Dunod. Toute reproduction non autorisée est un délit.

Beaucoup se posent la question d’une éventuelle pathologie mentale


à l’origine de ces agressions sexuelles. Il existe plusieurs classifications
des comportements sexuels délictueux, dont la synthèse a été réalisée par
McKibben (1993). Elles permettent de décrire les diverses motivations du
criminel.

57
58
Tableau 2.1 – Classification des comportements sexuels délictueux
(McKibben, 1993, 2001)

Guttmacher
McCaldon Cohen (1969, Groth Rada
et Weihofen Gebhard (1965)
(1967) 1971) (1977, 1979) (1978)
(1952)
Violeur
Violeur
Les personnalités criminelles

Recherche de recherchant la
recherchant le
pouvoir confirmation de
pouvoir
sa virilité
Violeur
Recherche de présentant un
Violeur défensif
pouvoir et rage conflit quant
à son identité
Violeur Violeur
caractérisé par déplaçant Violeur animé
Rage
la violence de ses pulsions par la rage
ses assauts agressives

présente de ce fait un certain intérêt clinique.


Violeur
fusionnant
Sadisme Violeur sadique ses pulsions Violeur sadique Violeur sadique
agressives et
sexuelles
Comportement Violeur Violeur Violeur
Violeur amoral Violeur impulsif
antisocial antisocial sociopathe sociopathe
Violeur ayant
Violeur
une image clivée
circonstanciel
Divers de la femme
Violeur
Violeur explosif
psychotique
Violeur ivrogne

Dans la littérature française, il n’existe pas de classification systématisée


des agresseurs sexuels « violeurs ». Le repérage réalisé par Coutanceau
Criminalités spécifiques et techniques d’investigation ■ Chapitre 2

Tableau 2.2 – Classification des agresseurs sexuels (Coutanceau, 2001, 2010)


Immaturo-­
Névrotique Pervers
pervers
Reconnaissance
Contrainte lors indirecte,
Reconnue Déni
de l’acte négation
banalisante
Vécu surmoïque Ni anxiété ni
Culpabilité Honte
de l’acte honte apparente

Ressentiment
Banalisé
possible pour la Reconnu Nié
Minimisé
victime
Reconnue
Position face Acceptée avec
comme Défiée
à la loi (légalité) difficulté
structurante

Selon Coutanceau, l’auteur du viol ne correspond pas à un type de person-


nalité spécifique, même si une majorité de sujets se situent dans un spectre
de déséquilibre psychopathique avec une efficience intellectuelle restreinte.
Le violeur reconnaît rarement l’intrusion corporelle que représente le viol.
Les sujets fonctionnant sur un mode pervers constituent une minorité parmi
les agresseurs sexuels, de même que ceux qui ont développé une patho-
logie mentale psychiatrique caractérisée. Ces personnes présentent le plus
souvent de l’impulsivité, de l’agressivité, une intolérance à la frustration
et une fragilité des capacités de mentalisation. Plus largement, l’organisa-
tion perverse doit être distinguée des moments pervers (aménagements
périodiques, relations spécifiques avec une personne donnée). La perver-
sion serait, selon Coutanceau, une dynamique psychologique plutôt qu’une
structure. Les angoisses des pervers reposent sur une peur de l’abandon et/
ou une recherche de dépendance (Ciavaldini, 2000). L’auteur présuppose
une relation de type anaclitique ambiguë, l’objet étant à la fois recherché
pour s’y soumettre (état de dépendance) et particulièrement agressé car
susceptible d’abandonner la personne. Le risque dépressif est important
du fait de la possibilité d’effondrement psychologique. Ces troubles du
comportement sexuel sont souvent plus que des troubles de la sexualité.
Ils correspondent à une recherche de solutions défensives vis-­à‑vis d’an-
goisses concernant le sentiment identitaire (fonction d’autoapaisement).
La plupart des agresseurs présentent un clivage et une dénégation des faits
criminels. Hood (2002) évoque le fait qu’il y aurait 30 à 35 % de la popula-
tion d’auteurs de violences sexuelles qui seraient dans un déni total de leur

59
Les personnalités criminelles

acte. Leur capacité adaptative sur le plan social et familial est apparemment
satisfaisante. Le moi clivé permettrait d’une part une prise en compte de
la réalité, d’autre part des angoisses et des recours à l’acte. L’adaptabilité
résiderait plutôt dans un fonctionnement social superficiel, marquant des
comportements en faux self plutôt qu’une véritable adaptabilité. Le sujet,
désorganisé par l’émergence de l’excitation, ne pourrait plus identifier l’objet
comme objet du désir et passerait du désir au besoin de faire cesser la
menace que représente l’excitation (Ciavaldini et al., 2001). La perversion
constitue plutôt selon Balier (1996) l’impossibilité pour le sujet de faire face
à une relation d’objet primaire dont il se sent dépendant tout en refusant
cette dépendance, et dont il ne pourrait sortir que par de la violence à l’égard
de la personne ou d’un substitut. Notons que la perversion n’est pas établie
en tant que diagnostic psychiatrique dans les classifications internationales,
mais qu’elle est intégrée aux paraphilies (DSM) et aux troubles de la préfé-
rence sexuelle (CIM).

1.1 La pédophilie
La pédophilie n’apparaît pas dans la loi française en tant que telle, à la
différence des lois américaines (Snyder, 2000). Elle est reconnue en France
comme une agression sexuelle sur mineur de moins de 15 ans (art. 227-25
et suivants, Code pénal). Une revue internationale réalisée par Putman
(2003) à partir d’études de victimisation indique une prévalence moyenne
des violences sexuelles avant 18 ans de 16,8 % chez les filles et de 7,9 %
chez les garçons. Un rapport de l’OMS rendu public en 2014 faisait état
de 20 % des femmes et entre 5 et 10 % des hommes dans le monde qui
avaient subi des violences sexuelles pendant leur enfance. Une étude pour
l’Unicef (Salmona et al., 2015) sur 1 214 victimes de violences sexuelles
âgées de 15 à 72 ans rapporte qu’une femme sur cinq et un homme sur
quatorze déclarent avoir déjà subi des violences sexuelles. Dans 81 % des
cas, les victimes sont des mineurs, et dans 94 % des situations les agres-
seurs sont des proches. Le rapport de l’Observatoire National français de
la Protection de l’Enfance (ONPE) déclare que les forces de sécurité ont
enregistré 19 700 plaintes pour violences sexuelles sur mineurs en 2016,
dont 78 % concernaient des filles, et 7 050, des viols. Dans l’ensemble de la
population des mineurs de France métropolitaine, le rapport fait état de
1,4 jeune sur 1 000 ayant subi des violences sexuelles (2,2 filles sur 1 000
contre 0,6 garçon sur 1 000).

60
Criminalités spécifiques et techniques d’investigation ■ Chapitre 2

En France, le trop faible nombre des études de victimisation rend difficile


le croisement des chiffres issus de différentes sources. Dans l’étude de Marie
Choquet (enquête sur les comportements sexistes et les violences envers
les jeunes filles, 2007), 6 % de l’échantillon de plus de 1 500 adolescentes de
Seine-­Saint-­Denis déclarent avoir subi des violences sexuelles à 14 ans, 12 %
à 18 ans, et 14 % à 21 ans contre 2 % chez les garçons.

Il est intéressant de comparer les définitions de la CIM-10 et du DSM-5.


La pédophilie (répertoriée F65.4 dans la CIM-10) est décrite comme un
trouble de la préférence sexuelle (F65). Elle est intégrée aux troubles du
comportement comme « préférence sexuelle pour les enfants, générale-
ment d’âge prépubère ou au début de la puberté ». Il est précisé que certains
pédophiles sont uniquement attirés par les filles, d’autres uniquement par
les garçons, et d’autres encore par les deux sexes. Le pédophile peut être
hétérosexuel, homosexuel ou bisexuel.

Le DSM-5 donne des critères précis pour diagnostiquer la pédophilie


(APA, 2013). Il s’agit d’une paraphilie, c’est-­à‑dire d’une attraction sexuelle
ou de pratiques sexuelles qui diffèrent des comportements sexuels consi-
dérés comme faisant partie d’une sexualité normale d’après les normes
sociales. Trois critères doivent être remplis :
– présence de fantaisies imaginatives sexuellement excitantes, d’impulsions
sexuelles, ou de comportements, survenant de façon répétée et intense,
pendant une période d’au moins six mois, impliquant une activité sexuelle
avec un enfant ou des enfants prépubères (généralement âgés de 13 ans
ou plus jeunes) ;
– la personne a cédé à ces impulsions sexuelles, ou les impulsions sexuelles
ou les fantaisies imaginatives sexuelles sont à l’origine d’un désarroi
prononcé ou de difficultés interpersonnelles ;
– le sujet est âgé de 16 ans au moins et a au moins 5 ans de plus que l’enfant
mentionné en 1.

Pour le DSM-5, on doit spécifier si le pédophile est exclusif ou non


exclusif, c’est-­à‑dire s’il est attiré uniquement par les enfants ou si une
sexualité adulte coexiste avec cette dernière. Cet aspect rejoint ainsi un des
points soulevés dans la CIM-10. Selon Abel et Harlow (2001), les pédophiles
exclusifs représenteraient seulement 7 % des pédophiles avérés. Le DSM-5,
à l’instar de la CIM-10, précise si l’attirance est homosexuelle, hétérosexuelle
ou bisexuelle, si la pédophilie est intra- ou extrafamiliale. Le DSM-5 ajoute

61
Les personnalités criminelles

à cette catégorisation la notion de durée (présence des troubles depuis au


moins 6 mois), l’association de fantaisies imaginatives ou de comporte-
ments sexuellement excitants et de souffrance cliniquement significative
ou d’une altération du fonctionnement social, affectif ou professionnel. La
pédophilie est donc avérée lorsque l’auteur est âgé de 16 ans au moins et
lorsqu’il a au moins 5 ans de plus que l’enfant. Plusieurs théories dites « impli-
cites » permettent d’expliquer les motivations de l’agresseur sexuel d’enfant
à passer à l’acte. Définies en cinq catégories, elles précisent la façon dont les
délinquants peuvent percevoir le monde : l’enfant est sexualisé (donc selon
l’agresseur « il peut être d’accord d’avoir des comportements sexuels »), la
nature du mal (« je ne fais pas de mal aux enfants »), le droit (« je mérite le
sexe »), la dangerosité du monde (« le monde est dangereux et je suis plus en
sécurité avec des enfants ») et l’incontrôlabilité des comportements (« je ne
peux pas contrôler ma sexualité » ; Sullivan et Sheehan, 2016). Il est égale-
ment important de noter que l’absence de consensus théorique quant à la
nature des distorsions cognitives a conduit chercheurs et cliniciens à mettre
en œuvre des recherches plus systématiques qui ont mis en lumière deux
conceptions radicalement différentes et qui peuvent correspondre à des cas
cliniques différents : dans l’une les distorsions cognitives sont apparentées
à des mensonges (des distorsions conscientes et délibérées) et dans l’autre,
elles sont assimilées à des croyances ou attitudes perçues comme vraies par
l’agresseur (inconscientes et automatiques) (Vanderstukken et al., 2015).

D’autres troubles ont été relevés, tels que le sadomasochisme, le féti-


chisme, ainsi que des troubles multiples de la préférence sexuelle. Il existe
plusieurs typologies de délinquants sexuels (voir Aubut), c’est pourquoi les
classifications ont visé l’élargissement de la réflexion au-­delà de la préfé-
rence sexuelle en intégrant notamment le niveau de violence physique et
relationnelle (modèle de Groth), la recherche de pouvoir de l’agresseur
et ses différentes formes comportementales ou relationnelles (classifica-
tion de Knight, Carter et Prentky), la motivation de l’acte, la compétence
sociale de l’auteur, ou la relation d’objet (Van Gijseghem). Nous examine-
rons quelques-­uns de ces modèles.

1.2 Le modèle de Groth


Groth et Burgess (1977, puis Groth et Birnbaum, 1979) ont réalisé un
des premiers modèles, portant principalement sur les auteurs de viols, sur

62
Criminalités spécifiques et techniques d’investigation ■ Chapitre 2

les motivations et les modalités de l’acte d’une part, et sur les relations
avec la victime d’autre part. Ils ont proposé un modèle en deux parties :
le viol en cas de désir de domination et d’affirmation de puissance (1) et
l’attentat à la pudeur en cas de séduction et de jeu (2). Chacune des deux
parties est subdivisée : dans l’attentat à la pudeur, les pédophiles fixés sont
distingués des pédophiles régressés (qui deviendront, au fil des classifica-
tions, des pédophiles « régressifs »). Les pédophiles fixés sont attirés depuis
leur adolescence par des individus jeunes alors que les pédophiles régres-
sifs sont fascinés à l’âge adulte et sous l’effet d’un stress par des personnes
jeunes. Par ailleurs, dans le viol, trois types de motivations de l’agresseur
sont distingués : la colère, le désir de puissance et le sadisme (voir figure 2.1).

Attentat à la pudeur

Fixé Régressé

Viol

Colère Désir de Sadisme


puissance

Figure 2.1 – Modèle de Groth

Knight et Prentky (1990) ont poursuivi les travaux de Groth en sélection-


nant des sujets ayant commis des actes sur des mineurs, excluant les actes
incestueux, et les sujets ayant également commis des actes sur des adultes.
Leur modèle présente une bonne fiabilité statistique.

Ils ont construit deux typologies, l’une pour les agresseurs d’enfants,
l’autre pour les violeurs. Les agresseurs d’enfants sont rangés selon l’inten-
sité de leur intérêt pédophile, puis selon leur degré d’adaptation sociale,
élevé ou faible. Ensuite, ils sont classés selon le temps passé auprès des
enfants et selon que le contact était à but sexuel ou non. Chacune de ces
catégories est encore subdivisée. Quatre motivations principales pour les

63
Les personnalités criminelles

agressions sexuelles sont analysées : l’opportunisme, la rage indifférenciée,


la motivation sexuelle et la motivation vindicative.

Leur modèle de classification porte sur la motivation primaire des violeurs


de personnes post-­pubères.

Tableau 2.3 – Classification de Knight et Prentky

Rage
Opportunisme indifférenciée
Sadique
Forte Faible
Aucun
compétence compétence
sous-­type
sociale sociale

Motivation sexuelle Motivation vindicative


Sadique Non sadique
Différée
Forte Faible Faible Compétence
à forte
Manifeste compétence compétence compétence sociale
compétence
sociale sociale sociale moyenne
sociale

Dans les deux types d’opportunisme, l’assaut agressif est impulsif et


repose plus sur une opportunité que sur une fantaisie sexuelle ritualisée.
La compétence sociale est un facteur discriminant. Les sujets à forte compé-
tence sociale ont plutôt tendance à agresser des femmes connues d’eux. Les
sujets à faible compétence sociale présentent une impulsivité plus forte.
La rage indifférenciée caractérise une faible tolérance à la frustration et
une impulsivité très grande. L’assaut est souvent violent et entraîne des
blessures graves. La motivation, le type d’assaut et la fréquence des agres-
sions dominent cette catégorie. La motivation sexuelle émane des fantaisies
sexuelles, qui peuvent être sadiques. Le but de l’assaut est essentiellement
sexuel. Les agresseurs qui n’usent pas d’un mode sadique sont les moins
violents et ont une compétence sociale manifeste, ou bien ont vécu des
insatisfactions importantes à un moment de leur vie. Certains agresseurs
non sadiques ont une faible compétence sociale et sont plus timides ou
dépressifs. Les distorsions cognitives sont fréquentes. Il s’agit de croyances
et de pensées relatives aux comportements sexuels déviants et qui ont pour
fonction de les légitimer ou d’en minimiser les conséquences (Pham, 2006),
par exemple lorsque l’agresseur suppose qu’une femme désire être forcée.
Elles ont donc pour objectif de minimiser le sentiment de responsabilité

64
Criminalités spécifiques et techniques d’investigation ■ Chapitre 2

de l’agresseur. Les sujets manifestant du sadisme ont des fantaisies ou des


comportements sadiques manifestes ou différés (qu’on ne peut pas direc-
tement observer dans leur comportement). La motivation vindicative a une
certaine proximité avec la rage indifférenciée. En revanche, les vindicatifs
ne dirigent pas leur rage contre les hommes dans des bagarres par exemple.
L’assaut vise à dégrader, humilier, détruire la victime. Cette classification en
neuf sous-­types a été longuement testée par Knight et Prentky. On notera
que l’alcoolisme, la toxicomanie, la psychose et la déficience mentale ne
constituent pas en soi des facteurs significatifs : ils viennent influencer
d’autres motivations. Le Questionnaire d’Investigation Clinique Pour les
Auteurs d’Agressions Sexuelles (QICPAAS, Balier et al., 1997) est un guide
d’entretien pour le recueil d’éléments du dossier, pour faire décrire l’acte et
sa perception par le sujet, les conséquences sur la victime, l’investigation de
la personnalité de l’auteur, son comportement relationnel et émotionnel, ses
angoisses, ses antécédentes psychiatriques éventuels, son comportement en
matière d’addiction, ses relations familiales, amicales et affectives.

Concernant les pédophiles, la classification de Knight, Carter et Prentky


(1990) repose sur une méthodologie d’analyse statistique à partir d’un
questionnaire construit dans une perspective cognitivo-­comportementale.
Cette classification a été affinée en 1997 afin de déterminer six profils de
pédophiles (voir figure 2.2 ci-­contre), puis revue en 2009. Le modèle de
classification intègre à la fois le degré de fixation, c’est-­à‑dire l’intérêt du
pédophile pour les enfants, la place qu’ils prennent dans sa vie fantasma-
tique, et le niveau de compétence sociale, variable qui différencie beaucoup
les pédophiles les uns des autres.

Quantité de contacts

Grande quantité de contacts Faible quantité de contacts

Violence réduite Violence élevée

Signification Signification
interpersonnelle narcissique Non Non
Sadique Sadique
(type I) (type II) sadique sadique
(IV) (VI)
(III) (V)
Figure 2.2 – Profils de pédophiles (Knight et Prentky)

65
Les personnalités criminelles

Sur un second axe, le modèle analyse la quantité de contacts. Le temps


passé avec des enfants spécifie les pédophiles, notamment si leur métier
les place au contact régulier des enfants. Si la motivation est de type inter-
personnel, les activités sexuelles qui marquent le délit sont le plus souvent
des caresses, des étreintes et des masturbations. Si la motivation est de type
narcissique, plus égocentrique, la victime est utilisée comme objet pour
l’assouvissement de la pulsion jusqu’à l’orgasme.

Les pédophiles qualifiés comme étant « à faible quantité de contacts »


sont analysés en fonction de la violence dont ils ont fait preuve. Le niveau
de violence est réduit si la victime n’est pas blessée. Ce niveau de violence
réduite concerne deux types d’agresseurs. Ceux du type III utilisent séduc-
tion et persuasion ; ils ne prennent pas plaisir à faire mal ou à voir la peur
de la victime. Si c’est le cas, il s’agit d’un type IV, qui utilise des fantaisies
sadiques, a recours à la sodomie, insère des objets dans le vagin ou l’anus,
sans volonté de blesser l’enfant. Le niveau de violence élevée regroupe
là encore deux types. Si la victime est brutalisée sans recherche d’éroti-
sation il s’agit d’un type V. La victime est alors agressée en fonction de
sa classe sociale, d’une haine vouée à un parent, etc. Le type VI, sadique,
érotise l’agression comme la peur de la victime. Les comportements sont
bizarres et souvent ritualisés (piqûres, mutilations, utilisation d’objets). De
tels modèles de classification permettent de rendre compte de différentes
variables auxquelles renvoient les comportements de délinquance sexuelle
selon les particularités de leurs auteurs. Toute classification est réductrice,
mais ce procédé permet un repérage des modalités d’engagement dans l’acte
d’agression et peut inspirer des traitements spécifiques.

Le second critère du DSM nécessaire à un diagnostic de pédophilie n’est


pas rencontré chez certains des détenus agresseurs sexuels d’enfants consi-
dérés comme pédophiles (Proulx et al., 2000). Ceux-­ci commettraient leurs
actes de façon égosyntone et ne montreraient aucune détresse psychologique
ou autre forme de problème concernant leur vie sociale ou professionnelle.
Ils seraient plus proches de certains pervers sexuels sadiques. Proulx préfère
ne plus utiliser le terme de pédophile et distingue les agresseurs sexuels
d’enfants extra- et intrafamiliaux. Il note aussi que le DSM ne mentionne
pas si le fantasme du pédophile est préférentiel ou non. En effet, certains
pédophiles présenteraient seulement un intérêt pour les enfants avec une
préférence pour les adultes tandis que d’autres seraient attirés par les
enfants de manière élective, qu’ils soient en couple ou non.

66
Criminalités spécifiques et techniques d’investigation ■ Chapitre 2

À partir d’une approche psychodynamique, Van Gijseghem (1988)


distingue huit types de pédophiles en se fondant notamment sur le prin-
cipe de la relation d’objet des personnes étudiées, ainsi que sur la structure
du caractère. Il décrit plusieurs paramètres comme les enjeux dans les
éléments contre-­transférentiels, les facteurs déclencheurs de l’abus sexuel
et les éléments étiologiques. Il établit différentes problématiques à l’origine
de la pédophilie : carence passive-­dépendante versus agressive-­dévorante,
prépsychose, borderline, structure perverse, psychopathie, paranoïa, registre
névrotique, troubles organiques et déficience mentale.

Dans la revue réalisée par McKibben pour ces classifications, des carences
ont été mises en évidence, telles que l’absence de critères diagnostiques
opérationnels et l’absence de fiabilité interjuges. Selon lui, la description
des sous-­types proposés est insuffisamment détaillée et repose sur des
critères subjectifs. Des critères comme l’abus d’alcool ou de drogues, la
déficience mentale ou la psychose se révéleraient être des modulateurs
pouvant influencer la classification sans la déterminer. Proulx note que les
classifications proposées évoquent très peu la personnalité des agresseurs
de même que la phase pré-­criminelle et se fondent essentiellement sur des
critères comportementaux.

Si on ne peut réaliser un profil type du pédophile, il est possible d’avancer


des éléments biologiques. Cantor et ses collaborateurs (2008) évoquent une
présence moindre de substance blanche chez les pédophiles. Ceci aurait
pour résultat une déconnexion partielle dans le réseau des reconnaissances
sexuelles. De la même manière, Schiltz et al. (2007) estiment l’amygdale
plus petite avec moins de substance grise dans cette région du cerveau des
pédophiles, signes d’un désordre développemental ou environnemental.
Toujours dans une approche biologique, certaines études (Blanchard et al.,
2007, 2010 ; Cantor et al., 2007) fournissent des données précises sur la
taille, le quotient intellectuel ou la latéralisation : les pédophiles seraient
en moyenne plus petits, auraient un quotient intellectuel plus faible et
seraient plus nombreux à être gauchers. Ces caractéristiques n’ont pour
les auteurs pas d’autre intérêt que de signaler des perturbations. D’autres
recherches récentes font état de perturbations neurochimiques telles que
des dérèglements sérotoninergiques. L’éducation ou le climat familial ont
été pris en compte dans les études. Actuellement rien n’a été probant sur
le plan génétique. Blanchard (2002) relie la pédophilie à l’effet d’un facteur
neurodéveloppemental à la suite de modifications au niveau de la substance

67
Les personnalités criminelles

grise et des parties spécifiques de l’insula. Il évoque néanmoins un parallèle


intéressant avec le syndrome de stress post-­traumatique (Post Traumatic
Stress Disorder, PTSD) en faisant remarquer que les personnes atteintes de
PTSD et les pédophiles présentent des signes identiques. Il existe selon lui
un lien entre le fait d’avoir été abusé sexuellement et de devenir pédophile
une fois adulte. Une hypothèse serait que le fait d’avoir été victime d’abus
sexuel provoquerait un trouble de stress post-­traumatique, engendrant ainsi
des modifications neurologiques qui seraient à l’origine des comportements
pédophiles. L’influence environnementale la plus étudiée est celle concer-
nant le cycle abusé-­abuseur (victim-­to-­abuser). Le fait d’avoir été victime de
pédophilie augmenterait-­il le risque de devenir pédophile ? Cette question
s’applique au-­delà de la pédophilie aux agressions d’enfants en général.
Cependant, le pourcentage de pédophiles ayant été précédemment abusés
est variable selon les études (Blanchard et al., 2000), la majorité se situant
entre 15 et 30 %. Une étude plus récente indique que la victimisation sexuelle
dans l’enfance serait cinq fois plus fréquente chez des délinquants sexuels
que chez des délinquants non sexuels (McCuish, Cale, Corrado, 2017).
Albernhe (1997) avance que les pédophiles auraient un passé de difficultés
ou de carences affectives ou éducatives et que la relation à la mère aurait
été dysfonctionnelle, marquée par l’absence ou l’hostilité. Il est possible
que le fait d’avoir eu une mère en traitement psychiatrique augmente le
risque. Nombreuses sont donc les hypothèses biologiques, psychologiques
ou environnementales, qui constituent plutôt des facteurs de risque que
de véritables hypothèses étiologiques. Comme en témoignent les études
de Mikorski et Szymanski (2017), le fait que des groupes de pairs mascu-
lins approuvent le fait d’user de la force dans les relations sexuelles avec
les femmes et défendent l’idée d’une masculinité hostile (soutenant le viol
et les attitudes hostiles envers les femmes) prédit l’implication dans des
trajectoires hautement agressives sexuellement. Les distorsions cognitives
semblent donc ne pas être uniquement internes mais également soutenues
par certains groupes sociaux. Cela montre une nouvelle fois la nécessité de
la psychoéducation concernant les cognitions associées aux femmes auprès
d’une population d’hommes assez vaste. En effet, le partage et l’acceptation
de tels comportements et pensées renforcent le risque d’agression sexuelle
des femmes.

68
Criminalités spécifiques et techniques d’investigation ■ Chapitre 2

Tableau 2.4 – Problématiques psychologiques des pédophiles


(Bouchet-­Kervella, 2000)
Éléments différenciateurs
Défenses fondées sur le recours Défenses fondées sur le recours
à la destructivité à l’érotisation
Déficit majeur d’amour parental Perte trop soudaine ou trop
primaire : sentiment d’avoir été précoce des échanges sensuels et
Traumatismes
dès le début un enfant indésirable. narcissiques primaires avec la mère.
narcissiques
Parfois atmosphère familiale Sentiment d’être devenu
de base
de violence, négligence des besoins secondairement indésirable
élémentaires, ou maltraitance. pour le couple parental.
Terreur innommable Effondrement de l’estime de soi
de néantisation, d’intrusion, et vacillement de la représentation
Type
de confusion sujet/objet identitaire en cas d’échec
d’angoisse
dans les relations avec autrui. relationnel (déception, abandon,
humiliation, rejet).
Pauvre, défensivement fondé Quête de relations affectives
Mode sur la domination d’autrui. et érotiques comme support vital
relationnel du sentiment d’existence.

Traumatismes archaïques Figuration des traumatismes subis,


impensables, maintenus à l’écart sous une forme déguisée qui les
de la vie psychique en raison renverse en leur contraire.
Défenses de leur impact désorganisant. Clivage oscillant en alternance
mises en Clivage radical et déni massif entre déni et reconnaissance
œuvre des affects de détresse. de la détresse narcissique
contre les Représentation identitaire fondée et de la dépression.
traumatismes sur un idéal de toute-­puissance Représentation identitaire
phallique. dont l’instabilité est combattue
par le recours à l’excitation
sensorielle érotisée.
Perception de l’enfant comme être Surinvestissement érotique
faible et passif, qui ranime soudain et narcissique de l’enfant comme
les vécus infantiles désastreux double externe idéalisé doté
internes : moment d’effraction d’une séduction irrésistible.
brutale du clivage protecteur de la Affirmation de l’attrait érotique
Place de la cohésion du moi, et de confusion de l’enfant pour l’adulte, visant
rencontre psychotique dedans/dehors. à dénier et à renverser en son
avec l’enfant Annulation radicale du risque contraire le désintérêt parental
dans d’identification confusionnelle subi.
l’économie à l’enfant fragile, soit par Confusion entre affectivité
psychique, l’affirmation d’une toute-­puissance et sexualité : pratiques sexuelles
et modalités phallique dominatrice (viol dénué « douces », allure plus « maternelle »
sexuelles d’investissement érotique), soit que génitalisée, visant à incarner
utilisées par la suppression de l’objet externe une représentation idéale des
inducteur du retour des traces échanges mère/enfant trop tôt
traumatiques (meurtre). perdus.
Identification directe et Projection des aspects négatifs
massive à des images parentales des images parentales sur le monde
omnipotentes et mortifères. des adultes.

69
Les personnalités criminelles

Bouchet-­Kervella (2000) a choisi de distinguer les pédophiles pervers selon


leurs modalités défensives : on différencie donc les défenses fondées sur le
recours à la destructivité et celles fondées sur le recours à l’érotisation (voir
tableau 2.4). Bouchet-­Kervella précise que le tableau ne vise évidemment
pas à réduire à deux cas de figure caricaturaux la complexité des conduites
pédophiliques. Il a seulement pour but de proposer un repérage des éléments
psychodynamiques à explorer pour déterminer la place des conduites pédo-
philes dans l’économie psychique des diverses organisations mentales.

Parmi les modèles de délinquance sexuelle, citons le modèle des trajec-


toires, mis en avant par Ward et Siegert (2002), qui repose sur l’existence de
quatre mécanismes dysfonctionnels impliquant cinq trajectoires distinctes
aboutissant au passage à l’acte. Les mécanismes sont les déficits sur le plan
de l’intimité et des habiletés sociales (difficulté à entrer en relation intime
ou sexuelle avec un adulte), les scripts sexuels déviants (cognitions liées à la
sexualité), la régulation émotionnelle dysfonctionnelle (difficulté à gérer des
émotions d’autrui, les émotions négatives ou lors de stress émotionnel) et les
distorsions cognitives (issues des croyances erronées que l’agresseur a sur
son comportement, ses justifications, et l’attitude des autres). Les cinq trajec-
toires reflètent ces mécanismes problématiques : les problèmes d’intimité
(avec bien souvent un style d’attachement insécure ; ceux qui s’inscrivent
dans cette trajectoire ont des scripts sexuels normaux mais, dans certaines
circonstances, l’enfant serait préféré à l’adulte), la régulation émotionnelle
dysfonctionnelle, les scripts sexuels déviants, et les schémas relationnels,
multiples mécanismes dysfonctionnels (les mécanismes sont déficients), et
les cognitions antisociales (les attitudes antisociales sont rationalisées ou
justifiées par l’agresseur). Un modèle plus récent, celui de Ward et Beech
(2006), a voulu constituer une théorie intégrative de l’agression sexuelle qui
retienne l’essentiel des facteurs antérieurement validés. Ils considèrent que
l’agression sexuelle est le produit de l’interaction dynamique d’un ensemble
de facteurs proximaux et distaux biologiques (génétiques et liés au déve-
loppement cérébral), neuropsychologiques (liés aux systèmes émotionnel,
motivationnel, de contrôle de l’action, de perception, de mémoire) et
environnementaux (liés au milieu de vie social, culturel, qui peut faciliter
l’agression voire l’accès à la victime). Ces facteurs seraient à l’origine des
problèmes rencontrés par les agresseurs sexuels, qui les conduiraient à la
réalisation des agressions sexuelles. Afin de savoir repérer les difficultés
auxquelles peuvent être confrontés les pédophiles, l’évaluation de la délin-
quance sexuelle peut se révéler fort utile.

70
Criminalités spécifiques et techniques d’investigation ■ Chapitre 2

1.3 Les caractéristiques et l’évaluation


de la délinquance sexuelle
Les études sur la population pédophile permettent de rendre compte de
certaines caractéristiques. La première est que les pédophiles sont essen-
tiellement des hommes. Nous aborderons la question de la criminalité
des femmes dans le chapitre sur la délinquance au féminin. Concernant
les hommes, quelques caractéristiques peuvent être identifiées, telles un
sentiment d’infériorité, une vie principalement marquée par la solitude ou
l’isolement, une faible estime de soi, ou encore une immaturité affective
(Cohen et al., 2002 ; Murray, 2000). On retrouve également des difficultés
relationnelles ou dans l’éprouvé d’affects douloureux envers les victimes.
Ces dernières caractéristiques occasionnent la mise en œuvre de méca-
nismes de défense tels que l’intellectualisation, le déni, la rationalisation, la
minimisation, accompagnés de distorsions cognitives (Cohen et al., 2002 ;
Fuller, 1989). À travers un Test d’Associations Implicites, des chercheurs
ont montré que le fait d’associer, sans en avoir conscience puisque ces
associations sont implicites, les femmes à des objets ou à des animaux,
augmenterait la propension à commettre des agressions sexuelles (viol ou
harcèlement sexuel). Ces résultats montrent l’effet primordial des cogni-
tions des agresseurs sexuels et la complexité de les modifier puisqu’elles
peuvent être automatiques. Encore une fois, le rôle de la prévention
semble primordial afin d’éviter ces associations d’idées chez les hommes
en général, puisque, comme montré dans l’étude, ces idées ne sont pas
uniquement présentes dans l’esprit des auteurs d’agressions sexuelles, mais
peuvent l’être aussi dans une population d’hommes tout-­venant (Rudman
et Mescher, 2012).

L’évaluation des pédophiles est encore trop peu réalisée en France. On


évoquera donc ici essentiellement la perspective développée à l’Institut
Philippe-­Pinel de Montréal, destinée à des personnes ayant purgé leur
peine et remises en liberté. L’un des outils est le phallomètre, qui permet
de mesurer les intérêts sexuels déviants. L’évaluation pléthysmographique
est construite à partir d’un indice de pédophilie, calculé en fonction de la
réponse érectile des pédophiles à la présentation de photos ou à l’écoute de
séquences mettant en scène des enfants. Cette estimation permet de savoir
par quel type d’enfants le pédophile est attiré, leur âge, s’il s’agit principale-
ment ou exclusivement de garçons ou de filles, et si la violence est nécessaire
à l’excitation. À cette évaluation sont associés des questionnaires (comme

71
Les personnalités criminelles

l’Abel Assessement of Sexual Interests, AASI) qui visent à préciser l’intérêt


sexuel déviant mais aussi la dépression, la désirabilité sociale ou encore les
attitudes cognitives. Des entretiens viennent assurer l’évaluation du sujet.
Ainsi sont recueillies les informations permettant d’orienter la prise en
charge. L’entretien cognitif peut être utilisé pour examiner des criminels (Py
et Demarchi, 2006). Dans ce but il est utile de connaître l’historique sexuel,
relationnel ou criminel du sujet ainsi que l’âge et la présence de paraphilies,
dont la présence constitue un facteur de risque connu dans la récidive des
pédophiles (Barbaree et Seto, 1997). C’est d’autant plus important lorsqu’on
sait que 50 % des auteurs d’infraction sexuelle avouent avoir commencé
leur carrière criminelle à l’adolescence, alors qu’ils sont condamnés pour
la première fois à 26 ans en moyenne (Rabaux, 2007).

Le protocole d’analyse comportementale des infractions sexuelles extra-


familiales (PRACTIS, Bénézech et al., 2008) réunit les informations de
l’enquête judiciaire, les expertises, les témoignages. Dans ce cadre, trois
stades pré-­criminels (préparation, approche, attaque), trois stades criminels
(présexuel, sexuel, post-­sexuel) et deux stades post-­criminels (immédiat,
tardif) sont examinés. Ce protocole permet d’analyser une chronologie
détaillée des faits, de relever des éléments d’un passage à l’acte qui n’appa-
raissent pas liés dans un premier temps à celui-­ci et la nature des interactions
entre l’agresseur et sa victime, puis la déclaration de la victime.

Les méthodes de traitement de la pédophilie découlent directement


de l’évaluation qui en est faite et sont de type cognitivo-­comportemental.
Plusieurs objectifs sont visés à travers la psychothérapie. Tout d’abord
il s’agit d’augmenter le contrôle de la personne sur ses intérêts sexuels
déviants, prédicteurs puissants de la récidive sexuelle. Pour cela, diffé-
rentes méthodes sont utilisées comme la thérapie aversive. Dans un second
temps, il s’agit d’approfondir la connaissance de soi et, conséquemment,
d’augmenter le contrôle sur la problématique sexuelle, grâce à des modules
comme la sensibilisation voilée, la restructuration cognitive ou la prévention
de la récidive. Enfin, il est nécessaire d’intervenir sur l’adaptation sociale des
participants afin de l’améliorer, grâce à des modules de gestion du stress et
de la colère. De l’éducation sexuelle peut être adjointe au programme pour
les participants dont les connaissances sur la sexualité sont limitées. Des
traitements pharmacologiques (anti-­androgènes et antidépresseurs notam-
ment) peuvent être associés à cette prise en charge, car la dépression a été
identifiée comme faisant partie des facteurs facilitant le passage à l’acte.

72
Criminalités spécifiques et techniques d’investigation ■ Chapitre 2

En France, la prise en charge des agresseurs sexuels et des pédophiles


repose sur différentes approches thérapeutiques, socio-­éducatives, psycho-
thérapeutiques, généralement centrées sur le sens du passage à l’acte. Des
composantes d’inspiration canadienne comme la prévention de la récidive
sont testées actuellement. Encore trop peu de psychologues et de respon-
sables sont formés à ce type d’approche (Smith et Petibon, 2005).

1.4 La récidive sexuelle


On considère la récidive comme la commission d’un nouvel acte judicia-
risé, quel qu’il soit (et non comme la réitération du même acte judiciarisé).

À partir d’une méta-­analyse regroupant une soixantaine d’études et concernant


près de 20 000 agresseurs sexuels, Hanson et Bussière (1998) ont montré un taux de
récidive de nouveaux délits sexuels sur quatre à cinq ans de 13,4 % pour l’ensemble
des agresseurs sexuels. Ce taux de récidive est plus élevé chez les violeurs (18,9 %)
que chez les pédophiles (12,7 %). Une autre étude (Harris et Hanson, 2004) sur le
taux de récidive officiel de 4 724 agresseurs sexuels à partir de suivis de 5 à 20 ans
indique, pour une période de 5 ans, un taux de récidive sexuelle de 14 % ; pour une
période de 10 ans un taux de récidive sexuelle de 20 % ; pour une période de 15 ans
un taux de 24 % ; et pour une période de 20 ans, ce taux monte à 27 %. Ces chiffres
montrent que le taux de récidive n’augmente pas de façon exponentielle en fonction
du temps. Le pourcentage déclinerait même après 41 ans (Hoffman et Beck, 1984).
Il en irait de même pour les psychopathes, jusque-­là plus violents que les autres :
leurs activités délictueuses diminueraient à cet âge pour rejoindre le niveau des
autres délinquants.

Les prédicteurs de la récidive sexuelle chez les délinquants sexuels sont


principalement les infractions sexuelles antérieures, l’âge plus jeune, les
préférences sexuelles déviantes et le mode de vie criminel. En fonction de
ces critères, Hanson (2000, 2005) a montré que les délinquants sexuels qui
suivaient un traitement psychologique risquaient moins de récidiver. La
fréquence d’utilisation de la pornographie contribue à la prédiction de la
récidive violente (y compris sexuelle) lors de la prise en compte d’autres
facteurs de risque d’agression sexuelle (Kingstone, Fedoroff et al., 2008).

L’évaluation du risque de récidive peut être réalisée grâce à différents


outils, parmi lesquels la SORAG (Sex Offender Recidivism Appraisal Guide)
et la Statique-2002-R, échelles citées lorsque nous avons abordé l’évaluation

73
Les personnalités criminelles

du risque de récidive. La SORAG présente une validité prédictive élevée


pour la récidive générale mais assez faible pour la récidive sexuelle. La
Statique est une échelle d’évaluation fondée uniquement sur des facteurs
non susceptibles de changer et connus pour être liés à une nouvelle condam-
nation pour infraction sexuelle chez les hommes adultes. Les atouts de
la Statique sont les suivants (Harris et Rice, 2008) : elle se fonde sur des
facteurs de risque dont on a démontré de façon empirique qu’ils étaient
liés à la récidive sexuelle ; des règles explicites permettent de combiner ces
facteurs pour établir un score total et ainsi coter le risque. Ses faiblesses
concernent : son exactitude prédictive, qui reste modeste (FER [fonction
d’efficacité du récepteur] = 0,71) ; elle ne comprend pas tous les facteurs
qui pourraient être inclus dans une évaluation du risque de plus grande
envergure (Doren, 2002).

Pham, Ducro et Houillon (2008) ont analysé la structure d’échelles d’évaluation du


risque de récidive sexuelle en réalisant une analyse factorielle de la SORAG et de la
Statique. La population était composée de près de trois cents agresseurs sexuels
adultes incarcérés. Les analyses indiquent parmi différents facteurs que celui des
antécédents criminels constitue le seul prédicteur significatif des récidives géné-
rales, violentes et sexuelles.

Parmi les grilles actuarielles d’évaluation du risque d’agression sexuelle,


citons également l’échelle d’évaluation des besoins sexuels SONAR (Sex
Offender Need Assessment Rating), qui porte sur cinq facteurs assez stables
(problèmes sur le plan de l’intimité, fréquentations ayant une influence
négative, attitude tolérante à l’égard des infractions sexuelles, maîtrise de
soi sur le plan sexuel et maîtrise de soi en général) et quatre facteurs aigus
(toxicomanie, humeur négative, colère et accès aux victimes). En compa-
rant 208 délinquants sexuels ayant récidivé et 201 délinquants sexuels
n’ayant pas récidivé, cet outil montre l’intérêt de l’étude des facteurs de
risque statiques et dynamiques. Il permet d’évaluer de façon intéressante
les facteurs de risque dynamiques et les changements dans les niveaux
de risque que présentent les délinquants sexuels. Selon Hanson et Harris
(2001), la SONAR approfondit les distinctions entre différents groupes
après avoir contrôlé les indicateurs de risque tels que l’âge et les scores à la
Statique et à la VRAG (Violence Risk Appraisal Guide, voir l’évaluation
du risque de récidive générale). D’autres outils existent tels que le Rapid
Risk Assessment for Sex Offence Recidivism (RRASOR) ou le Minnesota
Sex Offender Screening Tool-­Revised (MnSORT-­R) et, pour les mineurs,

74
Criminalités spécifiques et techniques d’investigation ■ Chapitre 2

l’Estimate of Risk of Adolescent Sexual Offence Recidivism (ERASOR). La


plupart de ces outils testent la violence et également la récidive violente.

La Sexual Violent Risk-20 (SVR-20) tente en 20 items d’évaluer le risque


de violence sexuelle. Onze items testent l’ajustement psychosocial, sept
concernent les délits sexuels et deux, l’avenir. On en sait actuellement
encore assez peu sur sa capacité de prédiction ; son principal intérêt réside
dans l’évaluation clinique.

Selon Hanson et Morton-­Bourgon (2009), les mesures actuarielles


demeurent les plus précises pour évaluer les agresseurs sexuels. Il convient
malgré tout de rester prudent concernant l’utilisation de ces échelles
(Coutanceau et al., 2010). L’analyse faite par le clinicien doit compléter les
informations obtenues grâce à l’utilisation de l’instrument. L’évaluation
peut intégrer des informations issues de plusieurs sources, être plurimodale
et pluridisciplinaire (Michel et al., 2008). En outre, l’entretien permet de
détecter des éléments que ne repèrent pas les instruments ; ceux-­ci sont
donc utiles pour donner une première appréciation qui doit être confortée
par le clinicien.

Sur le terrain, des mesures ont été prises pour prévenir la récidive, notam-
ment le suivi socio-­judiciaire. Il contient une injonction thérapeutique
contrôlée par le juge, assortie en cas de non-­respect d’une réincarcération.
Une des missions des psychologues est de prévenir la récidive via les prises
en charge thérapeutiques. Celles-­ci peuvent être exercées dans le cadre de
l’injonction de soin, en Service Médico-­Psychologique Régional (SMPR)
ou en Unité de Consultations et de Soins Ambulatoires (UCSA) pendant
l’incarcération et lors d’un suivi à la sortie. Il est rare qu’une personne, ayant
commis une voire plusieurs agressions sexuelles, exprime une demande
de prise en charge thérapeutique. Il est plus fréquent que ces accompa-
gnements soient agencés dans le contexte d’une judiciarisation des faits.
Nous allons présenter ici différentes prises en charge psychothérapeutiques
pouvant être proposées aux auteurs d’agressions sexuelles. En France, le
traitement proposé est majoritairement une psychothérapie d’orientation
psychodynamique. Coutanceau et Lacambre (2016) décrivent schémati-
quement quatre paliers successifs possibles : reconnaissance des faits et de
la réalité psychosexuelle, reconnaissance des situations à risque (externes,
puis surtout internes), insight sur la problématique relationnelle (égocen-
trisme, tentation de l’emprise, négation de l’altérité) enfin, apprentissage

75
Les personnalités criminelles

d’une relation « sociabilisée » à l’autre dans la sphère psychosexuelle. Ainsi,


l’articulation cohérente d’une évaluation clinique structurée et d’une stra-
tégie thérapeutique dynamique adaptée permet selon ces praticiens aux
personnes ayant commis des violences sexuelles de réinvestir leur libido de
manière adaptée d’une part et d’épargner aux victimes, à la société, et aux
responsables d’actes criminels eux-­mêmes, de nouveaux passages à l’acte
d’autre part. Au cours du traitement, Coutanceau et Lacambre préconisent
de travailler au niveau individuel les capacités d’autoanalyse, la connaissance
et la gestion des affects, les distorsions cognitives (en se fondant sur les
théories implicites), la reconnaissance de la victime, et au niveau du groupe
de pairs, ou à travers les entretiens de couples et entretiens familiaux, de
décentrer le patient de lui-­même en le confrontant à d’autres points de vue
et à d’autres modes de fonctionnement.

Les évaluations de ces traitements en détention sont trop rares. Le plus


souvent, des soins complémentaires en groupe tels que des séances de
relaxation, de psychodrame et parfois de psychothérapie familiale y sont
associés. À l’étranger, le traitement se fait généralement sous forme de
psychothérapie cognitive et comportementale, qui analyse la chaîne des
événements ayant conduit à l’abus sexuel, et s’accompagne d’un suivi
individuel. Des modules thérapeutiques spécifiques sont proposés : trai-
tement systématique des distorsions cognitives, traitement de l’excitation
sexuelle avec un volet pharmacologique et un volet psychothérapeutique,
entraînement à l’empathie (fondé sur l’hypothèse qu’une augmentation des
sentiments d’empathie diminue le risque de récidive sexuelle), interventions
pour augmenter la motivation des sujets au traitement comme à la forma-
tion scolaire et professionnelle, etc.

La psychothérapie de groupe est également utilisée. Elle a pour objectif


de favoriser une prise de conscience de l’acte, de permettre le fonctionne-
ment du préconscient, d’éviter le passage à l’acte comme dernier recours
d’un effondrement psychique. Elle ne peut véritablement être pratiquée
que lorsque le sujet reconnaît les faits qui lui sont reprochés. Il apparaît
important de favoriser la conscientisation de la responsabilité de l’auteur
car son lien avec la diminution de la probabilité de récidive a été prouvé
(Harkins et al., 2015).

76
Criminalités spécifiques et techniques d’investigation ■ Chapitre 2

Långström et ses collaborateurs (2013) ont cherché à évaluer l’efficacité d’interven-


tions médicales et psychologiques actuellement proposées à des individus à risque
de commettre des délits sexuels sur des enfants, qu’ils soient déjà passés à l’acte et
risquent de récidiver, ou considérés comme à risque (pulsions pédophiles avouées).
Il existe à ce jour peu d’études permettant d’avancer des mesures préventives
efficaces. L’étude a porté sur trois essais randomisés, l’un mené sur des adultes,
un autre sur des adolescents et le troisième sur des enfants à conduites sexuelles
déviantes vis-­à‑vis d’autres enfants. Cinq études observationnelles ont permis de
compléter ces sources. S’agissant des adultes, aucune de ces interventions de type
psychologique, thérapie cognitive ou autre, n’a fait la preuve manifeste et majeure
de son efficacité.

En revanche, une étude consacrée à la prise en charge d’adolescents


responsables d’agressions sexuelles sur des enfants assure de l’efficacité
d’une thérapie multisystémique pour la prévention des récidives (RR [risque
relatif] = 0,18 ; intervalle de confiance à 95 % de 0,04 à 0,73 ; Viens et al.,
2012). Aucune étude complémentaire n’a pu être retenue pour comparer et
analyser l’efficacité des autres types de traitements destinés aux adolescents.
Enfin, l’étude de la prise en charge des enfants ayant des conduites sexuelles
inappropriées vis-­à‑vis d’autres enfants n’a pu être réalisée que sur un seul
essai permettant une évaluation, lequel ne prouve pas l’efficacité de la prise
en charge proposée. Il existe donc trop peu d’essais fiables évaluant les prises
en charge possibles des sujets repérés comme à risque d’agressions sexuelles
sur des enfants car, bien souvent, la seule évocation de pulsions pédophiles
délivre le médecin du secret médical et signe l’arrêt des consultations. Il
apparaît donc urgent de mettre au point des programmes de prévention et
de soin dont l’efficacité soit attestée.

La délinquance sexuelle prend appui sur différents troubles psychopa-


thologiques dont nous allons poursuivre l’examen à travers les troubles de
la préférence sexuelle.

1.5 Les troubles de la préférence sexuelle


‡‡ L’exhibitionnisme

La Classification Internationale des Maladies CIM-10 distingue les


troubles de la préférence sexuelle (F65) et, parmi eux, l’exhibitionnisme
(F65.2). Il s’agit d’une tendance récurrente ou persistante à exposer ses

77
Les personnalités criminelles

organes génitaux à des étrangers, en général du sexe opposé, ou à des gens


dans des endroits publics, sans désirer ou solliciter un contact plus étroit.
Une excitation sexuelle accompagne généralement l’exhibition suivie d’une
masturbation. Les manifestations de cette tendance peuvent se limiter à des
moments de crise ou de stress émotionnel puis disparaître pendant des
périodes prolongées. L’exhibitionnisme ne concerne pratiquement que des
hétérosexuels masculins se montrant à des adolescentes ou à des femmes
adultes dans certains endroits publics en restant à une distance respectable.
La vie sexuelle de certains peut se résumer à l’exhibitionnisme. D’autres
conservent cette habitude parallèlement à une vie sexuelle conjugale.

Le DSM-5 (APA, 2013, 2015) intègre la notion du temps, en considérant


que pour évoquer l’exhibitionnisme les comportements doivent intervenir
de façon de façon répétée et intense pendant une période d’au moins six
mois. Il y ajoute la notion de souffrance, le comportement exhibitionniste
trouvant son origine dans une souffrance cliniquement significative ou une
altération du fonctionnement social, affectif ou professionnel.

‡‡ Le fétichisme

Il représente l’utilisation d’objets inanimés comme stimuli pour l’excita-


tion et la satisfaction sexuelle. Les fétiches représentent des prolongements
du corps, comme les vêtements ou les chaussures. Il peut s’agir également
d’une texture particulière comme le caoutchouc, le plastique ou le cuir.
Dans certains cas, les objets fétiches ne servent qu’à renforcer l’excitation
sexuelle, atteinte par ailleurs dans des conditions normales. Le diagnostic
de fétichisme ne peut être porté que si le fétiche représente la source la
plus importante de stimulation sexuelle ou s’il est essentiel à l’obtention
d’une réponse sexuelle satisfaisante. Les fantaisies fétichistes ne constituent
pas en elles-­mêmes un trouble, sauf quand elles conduisent à des rituels
contraignants et inacceptables perturbant les relations sexuelles et respon-
sables d’une souffrance. Le fétichisme concerne presque exclusivement des
hommes. Le DSM-5 ajoute à ces critères des notions de durée et de souf-
france, mais ne retient pas la surreprésentation des hommes.

‡‡ Le voyeurisme

Il correspond à une tendance récurrente ou persistante à observer


des personnes se livrant à des activités sexuelles ou intimes (comme le

78
Criminalités spécifiques et techniques d’investigation ■ Chapitre 2

déshabillage) à l’insu des personnes observées, qui conduit généralement


à une excitation sexuelle et à une masturbation.

‡‡ Le sadomasochisme

Il représente une préférence pour une activité sexuelle qui implique


douleur, humiliation ou asservissement. Si le sujet préfère être l’objet d’une
telle stimulation, il s’agit de masochisme. S’il préfère en être l’exécutant, il
est question de sadisme. L’excitation sexuelle vient généralement à la suite
de comportements à la fois sadiques et masochistes. Cette catégorie est
utilisée si l’activité sadomasochiste est la source la plus importante de la
stimulation. Le sadisme sexuel est parfois difficile à distinguer de la cruauté
dans des situations sexuelles, ou de la colère sans relation avec l’érotisme. Le
diagnostic peut être établi lorsque la violence est nécessaire pour atteindre
un état d’excitation érotique. Le DSM-5 différencie masochisme sexuel et
sadisme sexuel. La durée reconnue d’au moins six mois pour les troubles
(fantaisies imaginatives impliquant des actes réels, non simulés dans le cas
du sadisme sexuel) et la notion de souffrance cliniquement significative
sont nécessaires au diagnostic du masochisme sexuel. Les études récentes
démontrent que contrairement aux idées reçues, les agresseurs sexuels qui
font montre de sadisme ne diffèrent pas des agresseurs sexuels ne sura-
joutant pas du sadisme à leur acte, en ce qui concerne le degré d’empathie
envers les stimuli positifs et d’aversion vis-­à‑vis des éléments négatifs. Ces
résultats suggèrent aux chercheurs (Nitschke et al., 2012) que les sadiques
sexuels sévères se distinguent par une réponse sexuelle pathologique et non
par un déficit dans les processus émotionnels.

Les troubles sexuels peuvent s’associer en troubles multiples de la préfé-


rence sexuelle, tels que la nécrophilie (recherche de la relation sexuelle avec
les morts), le frotteurisme (se frotter à autrui dans des endroits publics
combles à la recherche d’une stimulation sexuelle), la zoophilie (recherche
d’un contact sexuel avec les animaux). Chacun de ces troubles présente des
particularités qui ne sont pas nécessairement liées à un type de personnalité.
C’est pourquoi nous invitons le lecteur à consulter des ouvrages spécialisés.

Nous allons maintenant aborder la question des tueurs en série et leur


psychopathologie.

79
Les personnalités criminelles

2. Les tueurs de masse, les tueurs en série


et les terroristes

Un grand nombre de pays ont assisté à une augmentation de tueries


soit réalisées par un seul tueur soit par un groupe. Les meurtres prennent
différentes formes, qui différencient leurs auteurs. Les analyses qui sont
conduites par les spécialistes du profilage tiennent compte de ces différents
aspects pour mener leur analyse du comportement criminel.

2.1 Les tueurs de masse


On distingue le tueur de masse, qui tue plusieurs personnes dans un
même temps et dans un même endroit, du terroriste dont le mode d’action
peut être solitaire ou en groupe, relié ou non à une organisation de laquelle
il pourrait se revendiquer. Il peut dans certains cas s’agir d’un tueur en
série arrêté lors d’un premier geste homicide. On connaît plusieurs cas
de ces tueurs, comme les deux adolescents qui ont ouvert le feu, tuant un
12 lycéens et un professeur et blessant 24 autres victimes à Columbine dans
un établissement secondaire du Colorado en 1999. Citons également le cas
de Breivik, qui tua 77 personnes en 2011 en Norvège, et qui posa question
aux experts. En effet, ses actes avaient été savamment préparés au cours de
neuf années et ils ont dû, dans leur analyse, faire la part entre sa revendi-
cation contre le multiculturalisme, son anamnèse et la cruauté de la tuerie
de masse dont il a été l’auteur. On peut évoquer encore le cas d’Andreas
Lubitz, âgé de 27 ans en 2015, copilote du vol 925 de la Germanswings, qui
tua 149 personnes en les entraînant dans son suicide lorsqu’il fit tomber
son avion, ou encore celui de Stephen Paddock en 2017, qui tira pendant
plusieurs minutes à l’arme automatique sur le public à partir du 32e étage
d’un hôtel-­casino à Las Vegas, faisant au moins 59 morts et 127 blessés,
avant de se suicider. Les cas sont si nombreux qu’il n’est pas possible de
tous les évoquer. Il peut également s’agir d’une tuerie familiale inaugurale
à la maison suivie d’une tuerie des gens du village. En principe, la classifica-
tion du FBI retient le critère de quatre homicides simultanés pour évoquer
le meurtre de masse (dans le cas de trois homicides simultanés, on parle
d’homicide triple). Le plus souvent, le tueur de masse abandonne des blessés
sur le lieu du crime, à la différence du tueur en série, qui laisse rarement la
possibilité à la victime d’en réchapper (Auxéméry, 2011). Le tueur de masse

80
Criminalités spécifiques et techniques d’investigation ■ Chapitre 2

utilise généralement une arme à feu, tandis que le tueur en série privilégie
l’arme blanche et le contact direct avec la victime par la strangulation.

Sur le plan psychopathologique, le passage à l’acte du tueur de masse


peut constituer un accès psychotique, mais la plupart des analyses font la
place à un tueur sans pathologie psychiatrique, dont les motivations sont
complexes (Richard-­Devantoy et al., 2010). L’acte est planifié de longue
date et un élément vient le déclencher. En analysant des meurtriers de
masse, Cantor et al. (2000) ont identifié des personnalités structurées par
des traits rigides obsessionnels et narcissiques, isolées socialement et affec-
tivement. L’identification préalable à un criminel de masse dont ils ont
entendu parler et leur fascination fréquente pour les armes ont servi de
support à la construction fantasmatique du crime. Il a suffi d’un élément
déclencheur tel qu’un deuil ou une perte d’emploi pour lancer le processus.
Les meurtriers de masse analysés dans cette étude avaient tous prévu de se
suicider. Les tueries de masse dans les établissements scolaires sont un peu
à part (Auxéméry, 2001). Dénommées tueries scolaires (school shooting),
elles sont le plus souvent la résultante de passages à l’acte planifiés. Preti
(2008) a étudié une soixantaine de ces tueries scolaires et a montré que ces
jeunes, souvent arrêtés ensuite, avaient envisagé l’éventualité du suicide
comme en témoigne le courrier qu’ils avaient laissé avant de commettre
leur crime. Si certaines personnes bien identifiées sont visées pendant la
tuerie, celle-­ci se termine en tuant indifféremment (Vossekuil et al., 2002).

Certains auteurs considèrent qu’il s’agit d’une forme de suicide indirect,


lorsque le tueur force la police à le tuer. Dans leur étude sur 140 meurtriers
de masse pour la plupart non psychotiques, Lester et al. (2005) repèrent plus
de tués et de blessés lorsque le meurtrier n’a pas décidé de se rendre mais
a préféré le suicide. Une question a régulièrement été posée concernant la
manière de relater ces meurtres de masse, ce qui a conduit l’OMS à rédiger
des recommandations sur la façon de rendre compte dans les médias de ces
homicides souvent suivis de suicide.

2.2 Les tueurs en série


Les tueurs en série (serial killers) sont des criminels auteurs de plusieurs
homicides à des moments différents. Ils agissent différemment du tueur
de masse : au contraire de ce dernier, le tueur en série peut commettre ses

81
Les personnalités criminelles

crimes pendant des mois ou des années. Il est calculateur, manipulateur,


bien souvent psychopathe. Le plus souvent il ne connaît pas sa victime
avant de la choisir. Il tue pour le plaisir. Souvent très intelligent, il fomente
tout un scénario pour mettre en place des crimes, qui peuvent également
être sexuels. Son attitude engendre la confiance de la victime, qu’il cherche
à dominer sexuellement et de façon sadique jusqu’à la mort. Les armes
blanches sont préférées aux autres armes, car elles permettent un contact
direct avec la victime. Le désir de domination peut être vu comme une
réponse à un sentiment d’impuissance ancien et ravivé. De ce fait, les
relations sexuelles ne peuvent se réaliser pour eux qu’avec des partenaires
sous contrôle ou morts. Les actes viennent souvent comme une tenta-
tive de vengeance ou de retournement d’une situation de victimisation.
Citons l’exemple de Michel Fourniret, violeur, pédophile et tueur en série
qui a assassiné au moins huit jeunes filles en France et en Belgique, et a
été soupçonné d’avoir commis plusieurs autres meurtres accompagné
de sa troisième épouse qui rabattait les victimes pour lui, jusqu’à leur
arrestation et condamnation en 2003, alors qu’il tentait d’enlever une
fillette en Belgique. Certains psychiatres ont supposé chez Fourniret une
colère cristallisée le jour où il découvrit que sa première femme n’était pas
vierge, cette trahison ayant heurté son désir d’être « le premier ». Selon
Stéphane Bourgoin (2011), qui s’est entretenu avec des psychopathes, on
peut noter dans le cas Fourniret une situation profondément carencée
dans l’enfance par un attachement précoce défaillant ou réduit et l’absence
d’expérience d’attachement positif, ainsi qu’une perception négative de
la discipline parentale vécue comme injuste, hostile ou inconsistante, qui
l’a poussé à l’isolement et à une fantasmatisation exacerbée (Bourgoin,
2011). Fourniret est tristement associé à d’autres tueurs en série tels
que le Belge Marc Dutroux, les Français Émilie Louis, Francis Heaulme
ou encore Pierre Chanal, parmi d’autres. Si des psychotiques peuvent
commettre des crimes atroces, on les distingue, d’après Bénézech (1992),
par leurs antécédents psychiatriques, l’absence d’antécédent pénal, un
traitement psychotrope insuffisant ou arrêté, une vie solitaire, avec des
comportements dangereux et surtout un acte commis avec pas ou peu
de préméditation, initiant peu de dialogue avec la victime. Le passage
à l’acte du psychotique comme celui du psychopathe peut être sexuel et
sadique, il s’inscrit plutôt dans un syndrome hallucinatoire délirant et/
ou dépressif. Le psychotique peut ainsi tuer plusieurs victimes à la suite.
À la suite du crime, il arrive que des psychotiques restent prostrés auprès
de leur victime, ou se dénoncent à la police, ou bien encore se suicident.

82
Criminalités spécifiques et techniques d’investigation ■ Chapitre 2

Le portrait psychologique des meurtriers non identifiés est réalisé par des
enquêteurs sur la base des faits et du mode opératoire. Deux catégories ont
été distinguées : le crime organisé, prémédité, conçu jusque dans les moindres
détails et dont l’auteur est psychopathe, et le crime désorganisé, résultant
de comportements impulsifs d’une personnalité psychotique (Davis, 2008).
Il existe souvent un point commun entre toutes les victimes d’un tueur en
série, il peut avoir recours au même type de macabre scénario. Si la plupart
des tueurs en série sont des hommes, on connaît quelques tueuses en série.
Elles agissent plus souvent pour de l’argent, tandis que les motivations des
hommes sont généralement la sexualité et la recherche d’un sentiment
de puissance. Plus que les hommes, les femmes ont tendance à tuer des
proches, des personnes de leur entourage ou de leur famille. Il est difficile
d’imaginer qu’une femme soit responsable de meurtres en série. Pourtant
on pourrait citer quelques meurtrières célèbres, telles que Rosemary West,
convaincue de 10 meurtres avec son mari, Dorothea Puente, propriétaire
d’une pension dans laquelle elle escroquait des personnes âgées, les assassi-
nait et les enterrait dans son jardin, Marie Besnard, qui empoisonna douze
personnes dont son mari, Belle Gunness, qui tua ses six enfants dont sa
fille adoptive, ses deux maris, ainsi qu’une trentaine d’ouvriers agricoles
travaillant dans sa ferme, ou encore Gwendolyn Graham et son amante
Catherine Wood qui tuèrent par perversité sexuelle cinq femmes dont elles
s’occupaient en tant qu’aides-­soignantes, et malheureusement bien d’autres
tueuses. Cette difficulté à penser les femmes tueuses en série est sans doute
la raison pour laquelle elles échappent longtemps à l’arrestation.

En étudiant de nombreux meurtriers et sur la base de l’interview systé-


matique de tueurs en série, le FBI a construit un modèle examinant les
motivations ayant pu présider à l’acte (Burgess et al., 1986 ; Montet, 2002).
Cinq facteurs conduisant les meurtriers à assassiner leurs victimes ont
été identifiés : tout d’abord un environnement familial et social inefficient
ou défaillant, avec bien souvent du rejet ou de la négligence. L’enfant vit
dans un milieu qui n’est pas protecteur. Le deuxième facteur porte sur des
événements déstructurants dans l’enfance, maltraitance ou abus sexuels,
qui engendrent un ressentiment puissant. Le troisième facteur porte sur
les fantasmes violents de contrôle et de domination, qui ont pour objectif
une activité compensatoire de ces traumatismes initiaux, un attachement
social négatif et une diminution de tout engagement émotionnel. Le recours
privilégié à l’imagination permet de revisiter les événements traumatiques
et de faire d’une autre personne la victime. Le quatrième facteur porte sur

83
Les personnalités criminelles

des comportements auto- et hétéroagressifs dont la violence et la cruauté


vont aller croissant. Pendant l’enfance, la cruauté s’exerce contre les autres
enfants et contre les animaux, l’agressivité est marquée vis-­à‑vis des autres.
À l’adolescence, les comportements agressifs peuvent aller jusqu’au viol,
à l’homicide, sexuel ou non. La décharge pulsionnelle se fait sur une victime
chosifiée. Le cinquième facteur porte sur la planification des agressions,
une analyse de ses erreurs qui va permettre l’augmentation du sentiment
de puissance et de domination. Les scénarios imaginés doivent à la fois
donner au tueur en série le sentiment d’exister mais aussi faire opposition
à tout son vécu de victime. Il perfectionne ses agressions et le fantasme se
mêle à la réalité. Le tueur en série met en acte ses fantasmes et la jouissance
qu’ils procurent doit être sans cesse renouvelée pour parer l’émergence des
failles fondamentales de la personnalité (Ressler et al., 1997).

Les tueurs en série agissent généralement seuls. La plupart répondent


au diagnostic de psychopathe sadique sexuel (Leistedt et al., 2008). Ils ont
vécu dans un milieu souvent chaotique, en présence d’adultes présentant
des troubles psychiatriques graves (alcoolisme, polytoxicomanie, paraphi-
lies, psychose…), avec dans certains cas de la maltraitance physique et/ou
des abus sexuels ayant occasionné des blessures narcissiques profondes.
Ils ont appris la violence physique et psychologique au cours de leurs
premières années, et montrent ensuite violence et cruauté sur les animaux.
Les victimes des crimes sont fréquemment retrouvées mutilées, traduisant
à la fois la volonté de ne pas laisser la possibilité d’identifier la victime
(mutilations défensives) et celle de provoquer une dépersonnalisation et
un anéantissement (mutilations agressives et nécromaniaques ; Leistedt,
2008 ; Senninger et al., 2004). Pourtant leur QI est normal voire supérieur
à la moyenne. Assez systématiquement, ils présentent des conduites antiso-
ciales à l’adolescence et ont du mal à gérer leurs émotions. Tous les enfants
ayant vécu dans des contextes familiaux aussi chargés ne deviennent fort
heureusement pas des tueurs en série. Il convient donc de repérer des
éléments associés, tels qu’une dimension sadique ou une structure parti-
culière de personnalité, un intérêt pour la pornographie violente (Leistedt
et al., 2008).

Ces tueurs en série ne pourraient-­ils être détectés plus tôt ? Des inter-
ventions sont certainement possibles dans les stades initiaux, elles sont
beaucoup plus complexes par la suite, dès que le processus se systématise.
C’est tout l’enjeu actuel face à cette criminalité.

84
Criminalités spécifiques et techniques d’investigation ■ Chapitre 2

2.3 Les terroristes


Le terrorisme a atteint les populations civiles de façon de plus en plus
marquée depuis la fin du xxe siècle. De très nombreux pays sont concernés
par ces attaques (attentats suicides ou non). Les motivations sont multi-
factorielles. La recherche d’impact dans la création d’un climat de peur
représente une violence visant à contraindre les populations à changer radi-
calement de point de vue, de lieu de vie, ou de forme de société.

Le point fondamental qui différencie les terroristes des tueurs en série


et des tueurs de masse est la motivation profonde, fortement annoncée,
reposant sur une idéologie justifiant à la fois l’acte meurtrier et l’acte
suicidaire. S’il est possible de parler de fanatisme violent, la question de
la psychopathologie des auteurs se pose. Il est difficile de généraliser les
causes psychologiques du terrorisme, parce que la plupart des terroristes ne
présentent pas de psychopathologie actuellement reconnue comme telle, et
la personnalité des auteurs d’actes terroristes n’est pas unique. Le terrorisme
implique un choix entre différentes possibilités plus ou moins violentes et
la création d’un groupe se considérant comme une élite visant à agir pour
justifier une violence religieuse ou politique (Leistedt, 2017).

Sur le plan psychopathologique, les terroristes ne diffèrent guère des


criminels violents, ils présentent souvent des traits de personnalité narcis-
siques et paranoïaques. Dans leur passé, on trouve une fréquence élevée de
condamnations par des tribunaux pour mineurs et de l’échec scolaire. Le cas
des attentats-­suicides, qui heurte toute logique humaine d’autoconservation,
a été étudié à part, et démontre surtout une capacité de détermination et
d’action par sang-­froid et en l’absence d’empathie. Les attentats-­suicides
sont plutôt confiés à des personnes mentalement instables. En effet, on
peut considérer le terrorisme comme une entreprise de recrutement de
personnes en vue d’une réforme idéologique. À cette fin, et par le truche-
ment de la radicalisation, un certain nombre de moyens connus peuvent
être utilisés : persuasion, contrôle mental, coercition, contrôle comporte-
mental. Les techniques de la psychologie des groupes, de l’influence et de
la soumission librement consentie ou des influences sournoises (Beauvois,
2011) sont bien connues, jusqu’à la recherche de radicalisation de nouveaux
membres. On développera chez eux un sentiment de dépendance ou de peur,
sans leur laisser percevoir la recherche de transformation, et on contrôlera
peu à peu leur environnement, leurs choix et leurs pensées. La culture du

85
Les personnalités criminelles

martyre se développe souvent chez des personnes ayant quitté leur pays
pour, loin de leur terre et de leur famille, se battre dans des missions suicides
aux côtés de nouveaux frères et amis (Fekih-­Romdhane, 2016). Sageman
a repéré que 84 % des terroristes suicidaires avaient quitté leur pays natal
pour rejoindre le djihad (Sageman, 2005). Ce chercheur note, parmi les
400 cas de terroristes étudiés, que le terroriste suicidaire est un homme
jeune, occupant un bon emploi, marié dans les trois quarts des cas. Selon
les situations, certains n’ont au contraire plus rien à perdre, comme c’est le
cas apparemment de femmes kamikazes.

Jusqu’ici trop peu de travaux de recherche en psychologie se sont


intéressés de près à la question du terrorisme et de la radicalisation. Les
événements des dernières années ont poussé des chercheurs à se pencher
sur cette question pour essayer de prévenir, d’une part en ciblant les jeunes
susceptibles d’être recrutés ou dans les premiers temps du recrutement et,
d’autre part, pour développer une aptitude à mieux repérer ceux qui sont
susceptibles de passer à l’acte. Enfin, il faut penser également à la prise en
charge de ceux qui reviennent des pays où ils ont combattu et qui veulent
reprendre une place dans la société.

Il était important d’évoquer les terroristes au regard de l’impact humain.


Au quotidien, il est des violences qui sont exercées dans les familles, par
les proches, qui sont fréquemment responsables des faits de violence
(MacDonell et Watson, 2012). C’est le cas des violences conjugales, dont
l’ampleur ne cesse d’augmenter et qui interpellent de plus en plus de
professionnels.

3. Les violences conjugales


L’Organisation Mondiale de la Santé définit les violences à l’encontre des
femmes comme tous les actes de violence causant ou pouvant causer à celles-
­ci un préjudice ou des souffrances physiques, sexuelles ou psychologiques,
y compris la menace de tels actes, la contrainte ou la privation arbitraire
de liberté, dans la vie publique ou dans la vie privée (Krug et al., 2002).
Les violences conjugales se déclinent sous forme d’insultes, de chantage
affectif, de pressions psychologiques, de harcèlement moral, d’agressions
physiques, de viols et autres pratiques sexuelles imposées. La fréquence

86
Criminalités spécifiques et techniques d’investigation ■ Chapitre 2

des violences subies est homogène selon les catégories socioprofession-


nelles. Ces violences sont liées à l’âge : les femmes les plus jeunes (20-24 ans)
sont environ deux fois plus exposées que leurs aînées. Les auteurs sont en
majorité des hommes bénéficiant, de par leur fonction professionnelle, d’un
certain pouvoir.

La Mission Interministérielle pour la PROtection des Femmes contre la


violence et la lutte contre la traite des êtres humains (MIPROF, 2016) avance
que 225 000 femmes âgées de 18 à 75 ans déclarent avoir été victimes de
violences physiques et/ou sexuelles par leur conjoint ou ex-­conjoint sur une
année et les trois-­quarts disent avoir subi des faits répétés. Sur une année,
157 personnes sont mortes en France de violence conjugale, 123 femmes et
34 hommes (ministère de l’Intérieur, 2016). Parmi les couples officiels (tels
que conjoint, concubin, pacsé ou ex), une étude de la Direction générale
de la police et de la gendarmerie et de la Délégation aux victimes compte
138 décès, pour lesquels 109 femmes ont été victimes de leur compagnon
ou ex-­compagnon, 28 hommes ont été victimes de leur compagne ou
ex-­compagne, et un homme a été victime de son compagnon, à quoi il faut
ajouter 19 homicides commis sur 14 femmes et 5 hommes, de couples non
officiels (amant, petit ami, maîtresse ou relation épisodique).

Pour tenir compte de l’ensemble des formes de couples, Dixon et


Graham-­Kevan (2012) ont retenu comme définition de la violence conju-
gale n’importe quelle forme d’agression et/ou de comportement de contrôle
visant un partenaire intime actuel ou passé, quel que soit son genre ou le
statut de la relation. Cette définition, proche de celle de l’OMS, permet
d’englober la question des hommes victimes.

L’étude Henrion (2001) note parmi les auteurs de violences conjugales une propor-
tion très importante de cadres, de professionnels de la santé et de membres de la
police ou de l’armée. Une autre étude du ministère de l’Intérieur sur les décès au
sein du couple (2006) indique que sur les 168 personnes décédées victimes de leur
compagnon ou compagne, 137 étaient des femmes (82 %). Une femme décède tous
les 3 jours sous les coups de son compagnon, un homme décède tous les 13 jours
victime de sa compagne. Près d’un tiers des crimes conjugaux est lié à la sépara-
tion. L’Observatoire National de la Délinquance note une hausse continue depuis le
début du xxie siècle.

87
Les personnalités criminelles

Selon la Commission des droits de l’homme des Nations unies, les


violences au sein de la famille, dites violences domestiques, impliquent des
situations de mauvais traitements, de viol conjugal, d’inceste, de pratiques
traditionnelles comprenant des mutilations génitales, une sélection préna-
tale favorable aux garçons, un mariage précoce, des violences liées à la
dot et des sanctions telles que la lapidation ou la flagellation en vertu de
lois religieuses ou de pratiques traditionnelles. Les violences au sein de la
collectivité concernent le viol et la violence sexuelle, le harcèlement sexuel
sur le lieu du travail, dans les établissements d’enseignement et, par ailleurs,
la prostitution forcée, le trafic des femmes à des fins d’exploitation sexuelle
ou de travail domestique, la violence à l’encontre des travailleurs migrants
de sexe féminin et la pornographie liée à la violence contre les femmes. La
violence perpétrée ou tolérée par l’État concerne la violence à l’encontre de
femmes détenues par les autorités, y compris le viol, les violences sexuelles
et les mauvais traitements, la violence dans des situations de conflit armé,
ainsi que la violence contre les réfugiés et les femmes déplacées à l’intérieur
de leur propre pays.

Les victimes de violences peuvent présenter divers troubles psycholo-


giques et psychosomatiques : troubles du sommeil (de l’endormissement,
réveils nocturnes, cauchemars), troubles émotionnels (honte, colère, anxiété,
panique, phobies, sentiment d’impuissance, de culpabilité, de dévalorisa-
tion), troubles cognitifs (troubles de la concentration, de l’attention, pensées
intrusives, flash-­backs, pertes de mémoire), troubles psychosomatiques
(céphalées, asthénie, tachycardie, palpitations, sensations d’oppression et
difficultés à respirer, troubles digestifs, lombalgies chroniques) et troubles
de l’alimentation (anorexie, boulimie, inappétence). Les violences psycholo-
giques ont des conséquences sur la santé ou le bien-­être des victimes souvent
décrites comme comparables à celles résultant des violences physiques
(Carney et Barner, 2012). Ces symptômes psychologiques peuvent aller
jusqu’à constituer un syndrome de stress post-­traumatique. Des troubles
d’allure psychotique peuvent survenir (désorientation, confusion mentale,
troubles dissociatifs ou paranoïaques, déréalisation, dépersonnalisation).
Une psychose peut se décompenser à la faveur d’un tel stress. Un recense-
ment de 122 études empiriques publiées entre 1989 et 2012 dans des revues
scientifiques a montré que les femmes victimes de violences physiques de
la part de leur partenaire ou ex-­partenaire présentaient un affaiblissement
conséquent de leur bien-­être et des taux augmentés de dépression, d’an-
xiété et de stress post-­traumatique (Lawrence et al., 2012). Un abus de

88
Criminalités spécifiques et techniques d’investigation ■ Chapitre 2

substances psychoactives est fréquent (tabac, alcool, drogues psychoactives,


médicaments analgésiques, anxiolytiques, antidépresseurs ou hypnotiques).
Certaines femmes victimes abusent également de sédatifs, de somnifères
ou encore d’analgésiques.

Les auteurs de ces violences sont généralement des hommes autori-


taires, qui ont des responsabilités dans leur travail, des hommes impulsifs
avec une faible estime d’eux-­mêmes ou dont la personnalité est perturbée.
Certains d’entre eux sont psychopathes, ou pervers, ce qui les conduit
à user des relations afin d’équilibrer leur narcissisme. D’autres ont recours
à des faits coutumiers dans des pays étrangers mais qui sont jugés comme
des crimes en France. Enfin, les alcooliques représentent la majorité des
hommes violents ; l’alcool rend possible la désinhibition et le passage à l’acte
violent. Les violences conjugales qui font suite à une séparation ou à un
divorce s’opèrent souvent sur un fond de jalousie, de chômage ou de préca-
rité. En ce qui concerne les femmes victimes, il n’est pas possible de brosser
un portrait type, elles sont issues de tous milieux socio-­économiques et
socioculturels. Très souvent, les femmes n’osent pas dénoncer la violence
par peur des représailles sur elles ou sur leurs enfants. Elles se sentent
coupables de l’échec du couple et bien souvent craignent de se retrouver
sans ressources.

Cinq phases ont été repérées dans l’escalade de la violence conjugale. La


première constitue toute la période préliminaire à la violence en tant que
telle, et représente une émergence du conflit sur des sujets tels que la famille,
les enfants, le budget, etc. Il s’agit d’une étape de menaces. Le deuxième
stade représente la première explosion de la violence verbale, psychologique,
physique ou sexuelle. Un rapport dominant-­dominé s’instaure avec une
victime terrorisée qui fait l’expérience de l’impuissance et du désespoir. La
troisième phase est celle du déni de l’auteur, qui rend l’autre responsable
des difficultés. La victime estime être la cause de la violence. La quatrième
phase correspond à un moment de répit, voire de reprise du lien amoureux.
L’auteur s’excuse et sollicite un pardon, que lui accorde la victime et qui
atténue alors son sentiment de responsabilité. La lune de miel est souvent
d’autant plus forte que la violence a été dévastatrice. La cinquième phase est
un moment intermédiaire avant un nouvel assaut. L’auteur mesure l’absence
de conséquences de ses actes violents. Il jouit du pouvoir qu’il a acquis,
tandis que la victime est satisfaite de ce temps de calme. Ce cycle d’escalade
de la violence conjugale (Lopez et Tzitzis, 2004) renforce chez la femme une

89
Les personnalités criminelles

incapacité qui devient une « impuissance apprise » (en référence aux travaux
de Seligman, 1974) au sens où la personne se situe dans une dynamique de
résignation, qui l’empêche pendant longtemps de se rendre à la police, en
créant un véritable syndrome de la femme battue (Walker, 1979).

Parmi les hommes violents, Coutanceau (2006) distingue trois profils


majeurs. Le premier met en évidence des individus immatures, parfois
proches de la normalité, pour lesquels la domination masculine est une
donnée importante. Ils peuvent reconnaître leur violence et même souffrir
des actes commis. Le deuxième profil est le fait de sujets centrés sur eux-­
mêmes, violents, présentant des failles narcissiques et des problématiques
diverses, banalisant ou minimisant les faits, plus préoccupés des consé-
quences pour eux-­mêmes, sans capacité d’autocritique véritable, mais plus
accessibles aux techniques de groupe. Le troisième profil concerne des
personnalités problématiques, souvent à dimension paranoïaque et mégalo-
maniaque, vivant quotidiennement dans le conflit, associant mégalomanie et
emprise sur autrui. Paradoxalement, il semblerait qu’en expertise un grand
nombre d’hommes violents ou violeurs expriment une peur des femmes
(Daligand, 2006). Ces derniers font rarement appel à une aide psychothé-
rapeutique. L’intervention est plus régulièrement engagée dans le cadre
de l’obligation de soins. Un travail de groupe initial permet de les sortir de
leur « problématique égotiste » (Coutanceau). L’entretien avec le couple est
généralement différé, car il convient d’attendre que la victime ait retrouvé
son statut de sujet et que l’auteur des violences ait pris conscience de ses
actes pour que l’échange soit productif.

Les procédés de violence psychologique dans les violences conjugales sont


assimilés par Hirigoyen (2005) aux techniques de lavage de cerveau, avec des
méthodes comportementales consistant à isoler la personne, à contrôler l’in-
formation qu’elle reçoit, à la mettre dans un état de dépendance économique
et à la fragiliser psychologiquement et physiquement. À cela s’ajoutent des
techniques de type émotionnel de manipulation verbale et de chantage.
Enfin, des processus cognitifs par le contrôle du langage et de la communi-
cation induisent chez la personne une certaine confusion. Ces attitudes la
placent dans un état de vulnérabilité et d’impuissance lui rendant difficile
toute action et toute opposition. Différents éléments peuvent augmenter
le risque de s’engager dans des violences conjugales : des facteurs indivi-
duels (antécédents de violence familiale, consommation d’alcool ou de
drogues, troubles de la personnalité), des facteurs communautaires (statut

90
Criminalités spécifiques et techniques d’investigation ■ Chapitre 2

socio-­économique faible, chômage), des facteurs sociétaux et culturels


(sociétés où le divorce est difficile, où les hommes détiennent le pouvoir),
et des facteurs événementiels (grossesse, rupture, déménagement, change-
ment de travail, maladie, deuil, etc.).

Actuellement certains faits de violence ne sont pas comptabilisés comme


de véritables violences conjugales. Il s’agit notamment des fausses alléga-
tions d’abus sexuel sur les enfants, prononcées le plus souvent à l’encontre
du père, mais aussi du délit de non-­représentation d’enfant, ou de l’aliéna-
tion parentale (abordée au chapitre sur les maltraitances à enfants).

Les femmes victimes sont les plus nombreuses et, comme la plupart
des études portent sur les hommes auteurs de violences conjugales, il est
probable que le nombre réel d’hommes qui sont victimes reste longtemps
méconnu.

Suzanne Steinmetz, sociologue américaine, a créé le concept de « mari battu » (1978),


en estimant que le crime le plus sous-­estimé n’était pas celui de la femme battue,
mais celui du mari battu. Elle a constaté que 10 à 15 % des violences conjugales
étaient exercées par les femmes, et précisé que les hommes seraient en réalité plus
touchés, notamment par des violences psychologiques (honte, peur d’être ridicu-
lisés, de ne pas être crus s’ils portent plainte, etc.), ce que confirme Laroche (2005).
Sylvie Frigon (2003) s’est intéressée à l’homicide conjugal au féminin, en compa-
rant la violence des femmes à celle des hommes. Elle rapporte les témoignages de
14 femmes canadiennes et de 8 Françaises condamnées pour l’homicide de leur mari.
Ces violences conjugales entrent dans le cadre des violences volontaires, commises
par un proche, ce qui constitue des circonstances aggravantes.

Il existe un guide d’évaluation du risque de violence conjugale, le Spousal


Assault Risk Assessment (SARA), élaboré par Kropp et al. (1995). Cet outil
comprend 20 indicateurs axés sur les antécédents criminels, l’adaptation
psychologique, les antécédents en matière de violence conjugale et l’infor-
mation sur l’infraction. À partir des indicateurs, l’évaluateur détermine si
l’auteur présente un risque faible, moyen ou élevé de causer un tort imminent
à son partenaire intime ou à une autre personne (Helmus et Bourgon,
2011). Il rend possible la mise au point d’un plan de traitement pour les
délinquants permettant de décider du niveau de surveillance nécessaire
(Braff et Sneddon, 2007). Des mesures cliniques réalisées par un psycho-
logue complètent les informations recueillies ; à défaut, les renseignements
peuvent être rapportés à partir du dossier psychologique ou psychiatrique.

91
Les personnalités criminelles

Spousal Assault Risk Assessment (SARA)

Antécédents criminels
1) Agression antérieure des membres de la famille
2) Agression dans le passé d’étrangers ou de connaissances
3) Non-­respect antérieur des conditions liées à la libération conditionnelle/surveil-
lance dans la collectivité
4) Adaptation psychosociale
5) Problèmes relationnels récents
6) Problèmes d’emploi récents
7) Victime et (ou) témoin de violence familiale comme enfant ou adolescent
8) Toxicomanie/Dépendance récente
9) Idéation ou intention récente d’un suicide/homicide
10) Symptômes psychotiques/maniaques récents
11) Trouble de la personnalité avec colère, impulsivité ou instabilité comportementale

Antécédents en matière de violence conjugale


12) Agression physique antérieure
13) Agression sexuelle/jalousie antérieure à l’égard d’un(e) partenaire intime
14) Utilisation antérieure d’armes ou menaces de mort crédibles
15) Gradation récente de la fréquence ou de la gravité des voies de fait
16) Non-­respect antérieur d’ordonnances de non-­communication
17) Minimisation extrême ou dénégation des antécédents de voies de fait contre la
conjointe
18) Attitude qui soutient ou tolère les voies de fait contre le (la) conjoint(e)

Crime présumé (actuel)


19) Violence et (ou) agression sexuelle grave
20) Utilisation d’armes ou menaces de mort crédibles
21) Non-­respect d’une ordonnance de non-­communication.

Le SARA est composé de divers facteurs statiques et dynamiques liés à la


fois à la violence en général et à la violence envers le partenaire intime. De
plus, il est sensible aux changements qui s’opèrent chez les délinquants. La
capacité de prédire une nouvelle agression a été validée (Guo et Harstall,
2008). Le SARA a donné lieu à un nouvel outil plus court, qui a pour objectif
l’évaluation du risque : le questionnaire bref d’évaluation des risques en cas

92
Criminalités spécifiques et techniques d’investigation ■ Chapitre 2

de violence conjugale (B-­SAFER). Conçu par Kropp, Hart et Belfrage (2005)


pour les professionnels du système de justice pénale, il ne requiert donc pas
d’autres spécialistes (Millar, 2009). Cet outil de gestion du risque comporte
10 éléments, dont certains portent sur les antécédents de l’auteur en matière
de violence envers le partenaire ainsi que sur ses difficultés d’ajustement
psychologique et social, et un guide d’entretiens.

Le B-­SAFER
Les cinq premiers facteurs de risque se rapportent aux antécédents de violence
conjugale de l’agresseur :
1) actes de violence,
2) menaces ou idées de violence,
3) intensification de la violence,
4) manquements aux ordonnances des tribunaux,
5) attitudes violentes.
La deuxième partie concerne les problèmes d’ajustement psychologique (personnels)
et social (interpersonnels) de l’agresseur :
1) criminalité générale,
2) difficultés dans les relations intimes,
3) problèmes professionnels,
4) toxicomanie,
5) problèmes de santé mentale.

Le B-­SAFER comprend également une évaluation des stratégies de gestion


des risques afin d’envisager la surveillance et le contrôle, l’évaluation et le
traitement, ainsi que la planification de la sécurité de la victime, et une partie
concernant la violence imminente et les victimes probables (Millar, 2009).

Exemples de questions d’évaluation des dangers de violence


entre partenaires intimes (Bott et al., 2004 ; Velzeboer et al., 2003)
1) La violence physique est-­elle devenue plus fréquente au cours de l’année écoulée ?
2) La violence physique est-­elle devenue plus grave au cours de l’année écoulée ?
3) A-­t‑il jamais essayé de vous étrangler ?
4) Y a-­t‑il une arme à feu chez vous ?
5) Vous a-­t‑il jamais forcée à avoir des rapports sexuels contre votre gré ?
6) Prend-­il de la drogue ? Par drogue, je veux dire des uppers, des amphétamines,
du speed, de la poussière d’ange, de la cocaïne, du crack, des drogues de la rue ou
des mélanges.
7) Menace-­t‑il de vous tuer ou pensez-­vous qu’il est capable de vous tuer ?

93
Les personnalités criminelles

8) Se soûle-­t‑il tous les jours ou presque tous les jours ?


9) Contrôle-­t‑il la plupart de vos activités quotidiennes ou toutes ? Par exemple, vous
dit-­il avec qui vous pouvez être amie, combien d’argent vous pouvez emporter pour
faire du shopping ou quand vous pouvez prendre la voiture ?
10) Vous a-­t‑il jamais battue quand vous étiez enceinte ?
11) (Si vous n’avez jamais été enceinte de lui, cochez ici ____)
12) Est-­il violemment et constamment jaloux ? (Dit-­il, par exemple, « Si je ne peux pas
t’avoir, personne ne le pourra » ?)
13) Avez-­vous jamais menacé ou essayé de vous suicider ?
14) A-­t‑il jamais menacé ou essayé de se suicider ?
15) Est-­il violent envers vos enfants ?
16) Est-­il violent hors du foyer ?

Il est important d’évaluer et de planifier la sécurité afin d’éviter les dangers


auxquels elles peuvent être exposées, qu’il s’agisse du danger d’agression
imminent, du risque d’auto-­agression ou du développement de pensées et
d’impulsions suicidaires, de conséquences graves pour la santé.

Des questions simples peuvent être posées pour que les femmes puissent
évaluer le risque encouru. Il est ensuite nécessaire d’élaborer avec elles un
plan pour assurer leur sécurité (Conseil de l’Europe, National Women’s
Health Center, 2008). Le professionnel s’assurera notamment de la possi-
bilité pour la femme de trouver refuge en cas d’urgence, en cas de besoin
de protection, de savoir où aller pour se faire soigner en cas de violence
sexuelle, de connaître par cœur les numéros de téléphone d’organisa-
tions pouvant fournir de l’aide, de demander à des voisins de se tenir prêts
à appeler la police s’ils remarquent des événements inhabituels, de conseiller
aux enfants quoi faire et où aller pour demander de l’aide en cas d’actes de
violence (Bott et al., 2004 ; Velzeboer et al., 2003).

Les violences conjugales nécessitent dans tous les cas une prise en charge
lourde dans la mesure où elle est curative et parfois également préventive.
Des travaux de recherche sont en cours sur la violence interpersonnelle et
les techniques thérapeutiques pour l’endiguer (Eckhardt, 2011). L’ampleur
de ce phénomène impose de le considérer avec une grande attention et
d’engager des recherches pour trouver des méthodes de traitement efficaces.

94
Criminalités spécifiques et techniques d’investigation ■ Chapitre 2

4. La maltraitance envers les enfants


La maltraitance à enfants regroupe, selon la définition du Conseil de
l’Europe, un ensemble d’actes et de manquements venant troubler grave-
ment l’enfant, attenter à son intégrité corporelle, à son développement
physique, affectif, intellectuel et moral, ces manifestations étant dues à une
négligence (manque de soins, d’attention à la santé et à la sécurité) et/ou
à des lésions d’ordre physique et/ou psychique et/ou sexuel, de la part d’un
proche ou d’une autre personne qui en a la charge. La nature psychologique
des mauvais traitements est plus difficile à définir. Il existe un recensement
d’actes psychologiquement dommageables et de leurs conséquences. Aux
catégories de maltraitance que sont la négligence, l’abus physique, l’abus
psychologique et l’abus à caractère sexuel, l’Organisation Mondiale de la
Santé ajoute l’exploitation commerciale des enfants.

On recense, de façon non exhaustive, des sévices physiques (ecchymoses,


hématomes, fractures, brûlures, empoisonnements, morsures, griffures,
hématomes sous-­duraux, lésions viscérales, hémorragies), des sévices
psychologiques (injures, brimades, rejets, abandons affectifs, comporte-
ments sadiques et/ou pervers, punitions excessives, négligences physiques,
affectives et/ou morales), des sévices sexuels (attouchements, viols, inceste,
prostitution, pornographie). Dans les cas d’abus sexuels, l’abuseur est plus
âgé que l’enfant (d’au moins 5 ans) et se trouve le plus souvent en position
d’autorité, de contrôle ou de pouvoir. Il arrive que l’enfant soit utilisé dans
un but de stimulation et de satisfaction sexuelle de l’abuseur ou d’une autre
personne. Le délit peut prendre différentes formes, recensées par l’OMS :
appels téléphoniques obscènes, outrage à la pudeur, voyeurisme, images
pornographiques, rapports ou tentatives de rapports sexuels, viols, inceste
ou prostitution des mineurs. La définition de l’abus sexuel par Finkelhor
introduisant la question clinico-­éthique des rôles familiaux est intéressante,
puisqu’il considère l’implication d’enfants et d’adolescents dépendants et/
ou immatures dans des activités sexuelles dont ils ne comprennent pas
pleinement le sens ou en violation des tabous sociaux concernant les rôles
familiaux. Les négligences et des exigences disproportionnées par rapport
à l’âge de l’enfant sur le plan physique ou psychologique sont considérées
de la même façon par les tribunaux.

Les plus fréquents actes de maltraitance sont la négligence et les


abus physiques (Trocmé et al., 2001). Les abus physiques concernent

95
Les personnalités criminelles

principalement la discipline abusive, les excès de punitions corporelles visant


initialement à faire entendre raison à l’enfant et les brutalités d’impulsion,
dans lesquelles le parent ne parvient pas à maîtriser sa colère (Chamberland,
2003). Les indices permettant d’identifier des gestes comme relevant de
mauvais traitements tiennent compte à la fois de l’intentionnalité, des types
de gestes, de leur intensité et de la gravité de leurs effets. Les mauvais trai-
tements psychologiques sont plus délicats à évaluer puisqu’ils reposent sur
une violence émotionnelle (Tourigny et al., 2002).

Les mauvais traitements à enfants apparaissent dans toutes les classes


sociales mais sont plus souvent présents lorsque les conditions de vie sont
défavorables. Une modification dans l’équilibre familial ou social, une
augmentation du stress et des difficultés personnelles représentent les prin-
cipaux facteurs de déclenchement.

Le risque de maltraitance physique est plus important pour les enfants


prématurés ou handicapés. La plupart des enfants victimes de maltraitance
physique sont les enfants d’âge scolaire. Ceux qui sont maltraités physique-
ment avant l’école primaire le sont de façon plus violente. Les garçons sont
victimes de façon plus sévère que les filles entre 8 et 11 ans, les filles sont
plus victimes que les garçons entre 12 et 17 ans.

Les signes psychologiques accompagnant une maltraitance sont :


– des troubles du développement psychomoteur : retard de langage, retard
moteur, difficultés scolaires, troubles cognitifs ;
– des troubles du comportement : anxiété, syndrome dépressif, régression,
trouble des conduites, hyperactivité, agressivité, absentéisme scolaire,
tentative de suicide, vols ;
– des troubles somatiques : troubles du sommeil, énurésie, anorexie,
boulimie, maux de ventre ;
– des signes repérables à l’observation : présentation de soi différente,
phobie du contact, lavage au coucher, langage ou gestes inhabituels en
fonction de l’âge de l’enfant, activité autoérotique importante, identifi-
cation à l’agresseur dans les jeux.

Les interactions mère-­enfant ont été étudiées, notamment les carac-


téristiques physiques distinctives et les configurations des traits et des
mouvements expressifs servant de déclencheurs aux différentes activités
de maternage. Il existe chez les parents une prédisposition biologique

96
Criminalités spécifiques et techniques d’investigation ■ Chapitre 2

à répondre à la configuration faciale et aux conduites des enfants nouveau-


­nés. La relation parent-­enfant se trouve modifiée du fait que certains
enfants, prématurés ou non, ne présentent pas les mouvements et attitudes
correspondant aux schèmes de perception des parents. Selon la perspective
béhavioriste, la maltraitance infantile est la résultante de techniques éduca-
tives inefficaces. Le rôle de l’enfant intervient comme stimulus, une attitude
parentale vient en réponse et le bénéfice de l’interaction agit comme nature
du renforcement et comme apprentissage vicariant.

Au-­delà des problèmes psychiatriques que peuvent rencontrer les parents,


l’alcoolisme et la toxicomanie sont des facteurs connus. La maltraitance a été
l’objet de différentes analyses en fonction des approches théoriques diverses
de ce phénomène. Le modèle systémique, par exemple, considère que le
comportement maltraitant s’intègre dans la logique du système familial. On
relie généralement les causes à des problèmes conjugaux, à des problèmes
de santé ainsi qu’à des principes éducatifs rigides.

Le signalement des situations de maltraitance est une obligation pour


toute personne et autorise la levée du secret professionnel. Le procureur
de la République reçoit les plaintes et les dénonciations, et juge de la suite
à leur donner. Il avise le plaignant ainsi que la victime des suites de l’affaire
ou de son classement. Les suites des signalements judiciaires sont de la
compétence du procureur de la République et du substitut aux mineurs, qui
peuvent saisir un juge d’instruction pour engager les poursuites et le juge
des enfants au titre de la protection de l’enfant en danger (Corrado et al.,
2010). Le signalement peut se faire par voie administrative ou judiciaire.
La voie administrative conduit à la réalisation d’une enquête et permet la
mise en œuvre de mesures d’aide et de protection en collaboration avec
la famille : suivi médico-­social, intervention d’une travailleuse familiale,
mesure d’action éducative en milieu ouvert. Lorsque le signalement est
adressé directement à la justice, une enquête est diligentée, accompagnée
ou non de mesures (mesure judiciaire d’investigation éducative, mesure
d’action éducative en milieu ouvert). Des mesures de placement dans un
établissement ou dans une famille d’accueil peuvent être décidées. Dans
une situation de maltraitance ou de révélation d’abus sexuel, le recours aux
autorités administratives ou judiciaires permet de prendre des mesures de
protection immédiates et d’engager des investigations complémentaires.
L’adhésion des familles est recherchée, car même dans le cas où les parents
ne sont pas à même d’assurer la sécurité de leur enfant, il leur est demandé

97
Les personnalités criminelles

d’adhérer aux principes de prise en charge et/ou de placement décidés pour


le (ou les) enfant(s).

Les conséquences des mauvais traitements sont repérables à court et


à plus long terme. L’International Conference on Psychological Abuse of
Children and Youth a retenu la définition des mauvais traitements psycho-
logiques envers les enfants comme des actes ou des faits de négligence
pouvant nuire immédiatement ou ultérieurement au fonctionnement
cognitif, comportemental, affectif ou physique de l’enfant. Il peut s’agir
notamment de manifestations de rejet, de dévalorisation, de mépris, d’in-
sultes, de menaces, de contraintes à vivre des situations dangereuses, de
punitions, d’isolement, d’exploitation, de corruption, ou bien de négligence,
d’absence de réponses affectives, d’indifférence, mais cette définition intègre
en outre l’exposition à la violence conjugale. La quasi-­totalité des enfants qui
subissent des agressions physiques sont aussi agressés psychologiquement
(cris, injures, menaces). L’impact est d’autant plus grand que l’enfant est
plus jeune (Keiley et al., 2001). En effet, ces jeunes enfants sont très sensibles
à leur environnement, qui est influencé par la qualité du rôle parental perçu
durant une période critique où le développement cérébral est rapide (Boivin
et Hertzman 2012 ; Harden et al., 2016). L’attachement des enfants est de
type insécure avec une possible augmentation des troubles intériorisés et
extériorisés, une perception négative de soi et des autres, un pessimisme face
à l’avenir, une faible estime de soi et une anxiété (Gagné, 2001 ; Solomon et
Serres, 1999 ; Scher et Stein, 2003). Les retards de développement sont plus
fréquents chez ces enfants, qui présentent des atteintes cognitives et neuro-
psychologiques (Moran et al., 2004) et des troubles du langage (Nolin, 2003).
L’attention en classe et la concentration sont réduites, et le niveau scolaire
s’en ressent. Les difficultés concernent également l’investissement émotif et
les réactions agressives aux conflits interpersonnels (Chamberland, 2003).
Outre les blessures faisant suite à la maltraitance, les enfants manifestent
souvent des comportements agressifs et délinquants (Bolger et Patterson,
2001). Les comportements à risque pour la santé sont fréquents, tels que la
consommation de drogue, l’abus d’alcool (Moran et al., 2004) et les compor-
tements suicidaires (Anderson et al., 2002). Les enfants maltraités ont une
faible estime d’eux-­mêmes et ont tendance à développer des problèmes de
dépression. D’autres études montrent un lien entre le fait d’avoir subi des
sévices physiques et des troubles émotionnels, un retrait social, des compor-
tements à risque, la présence de troubles psychiatriques ultérieurs tels qu’un

98
Criminalités spécifiques et techniques d’investigation ■ Chapitre 2

syndrome de stress post-­traumatique ou des troubles du comportement et


de la personnalité (De Becker et Leurquin, 2010).

L’impact de la maltraitance dans l’enfance sur le développement cérébral


de la génération suivante a été évalué par des chercheurs auprès de 131
femmes enceintes recrutées au cours du premier trimestre de leur grossesse.
La maltraitance était évaluée via le Childhood Trauma Questionnaire (CTQ).
Une IRM cérébrale a été réalisée chez 114 nouveau-­nés dans les premières
semaines après leur naissance (en moyenne à 26 jours). Les données démo-
graphiques, une échelle de dépression (Center for Epidemiological Studies
Depression scale – CES-­D), d’anxiété (State-­Trait Anxiety Inventory ; STAI),
de stress (Perceived Stress Scale) et d’évaluation de la détresse pré-­natale
(Prenatal Distress Questionnaire – PDQ) étaient analysés à chaque visite
durant la grossesse. Les auteurs (Moog et al., 2018) ont observé une dimi-
nution du volume de matière grise de 6 %, qui est de la même amplitude que
celle rencontrée dans les troubles neurodéveloppementaux, et pourrait, si
ceci est confirmé par d’autres travaux, être de nature à expliquer le risque
accru de troubles psychologiques et psychiatriques chez les enfants de mères
ayant été maltraitées.

Les conséquences d’une exposition précoce à la violence ordinaire sur


le risque de suicide chez le jeune ont été identifiées par une méta-­analyse
de 29 études longitudinales, concernant au total 143 700 victimes de toutes
formes de violence entre personnes, en se limitant aux conséquences sur
les personnes entre 12 et 26 ans. Il s’avère que les antécédents de violences
subies augmentent le risque ultérieur de tentative de suicide de près d’une
fois et demie en cas de violence dans les fréquentations, de plus de deux
fois en cas de mauvais traitements dans l’enfance, abus physique ou sexuel
ou négligence, exposition à la violence interpersonnelle ou en cas de
harcèlement.

Le risque de mort par suicide est décuplé lorsque la personne est prise
à partie, à un jeune âge, dans la violence interpersonnelle. Cette augmen-
tation du risque suicidaire en cas de jeunes victimes de violences entre
personnes impose de s’intéresser de près aux violences précoces (Castellvi
et al., 2017).

99
Les personnalités criminelles

4.1 Le syndrome de Silverman


L’étude de la maltraitance envers les enfants a surtout été développée avec
Frédéric Noah Silverman, médecin au Children’s Hospital de Cincinnati,
assistant de John Caffey, qui se demanda à la suite de ce dernier si les lésions
multiples observées sur des radiographies d’enfants n’étaient pas dues à des
coups. La description qu’il fit avec Henry Kempe, directeur du Département
de pédiatrie au Colorado, des traumatismes non accidentels de l’enfant
engagea de nombreuses recherches sur la maltraitance à enfants. Il existait
déjà une loi de protection des enfants concernant leur santé, leur sécurité,
leur moralité. Cependant, la question fut examinée de façon isolée afin de
mieux repérer des situations particulières.

Le syndrome de Silverman, également appelé syndrome des enfants


battus, est le fait d’enfants de tous âges, victimes pendant plusieurs mois
ou plusieurs années de violences repérables grâce au bilan radiologique.
Les traumatismes et localisations donnent lieu à des fractures très spéci-
fiques, à type de lésions métaphysaires sur les os longs, de fractures de côtes
postérieures, ou spécifiques et multiples, d’âges différents, des fractures de
doigts, des fractures complexes du crâne, ou bien peu spécifiques, comme
des fractures de la clavicule, des fractures médianes d’un os long, des frac-
tures linéaire du crâne, ou encore des fractures non explicitées par la famille.
Des examens complémentaires tels que l’IRM cérébrale peuvent être néces-
saires. Une fois éliminés les diagnostics de pathologie de la minéralisation
osseuse, comme l’ostéogenèse imparfaite, les investigations sont notamment
réalisées grâce à l’entretien anamnestique avec la famille. Il s’agit souvent de
résultats de sévices corporels ou de méthodes éducatives déraisonnables des
parents ou d’autres adultes, telles qu’une discipline abusive, une incapacité
de l’adulte à contrôler son agressivité et sa colère.

4.2 Le syndrome de Münchausen par procuration


Le syndrome de Münchausen par procuration (Münchausen Syndrome by
Proxy, MSBP) a été identifié en 1977 par le pédiatre britannique Meadow.
Ce syndrome repose sur l’utilisation d’un enfant par son parent ou par un
tiers pour requérir que des soins répétés et inutiles lui soient prodigués. On
le conçoit maintenant comme l’effet d’un déséquilibre de personnalité (et
dans certains cas d’une psychose) conduisant à la présentation réitérée de

100
Criminalités spécifiques et techniques d’investigation ■ Chapitre 2

l’enfant à des médecins pour des soins. Il s’agit le plus souvent de troubles
de stress post-­traumatique, de dépression, avec des symptômes psycho-
logiques plus ou moins clairement identifiables. Ainsi des parents ont-­ils
ajouté du sang avant l’analyse d’urine de leur enfant ; d’autres ont fait croire
à tort à des enfants qu’ils étaient atteints d’une maladie incurable les obli-
geant à restreindre leurs déplacements. Des médecins ont ainsi été conduits
à soigner des enfants pour divers troubles, dont l’épilepsie, la fistule recto-­
vésicale, la colite ulcérative, des troubles de la conscience, des convulsions,
des apnées, des vomissements, des diarrhées, etc. La multiplicité des services
et des hôpitaux consultés est caractéristique. Des mères ont présenté à des
médecins des enfants pour des examens pelviens en supposant des coups.
D’autres mères ont dilaté le vagin de leur fille pour qu’elle présente une
évidence physique d’abus sexuel. Le règlement des divorces (Jaffé, 2001) est
propice à ces fausses allégations : dans le but d’obtenir la garde de l’enfant, le
parent est prêt à accuser son ex-­conjoint d’abus sexuel ou de maltraitance
envers l’enfant (DeBecker et Ali-­Hamed, 2006 ; Van Gijseghem, 1999, 2009,
2010, 2011). Dans ce cas, le syndrome de Münchausen par procuration peut
faire partie du syndrome d’aliénation parentale.

4.3 Le syndrome d’aliénation parentale


Le syndrome d’aliénation parentale a été décrit par Gardner (Parental
Alienation Syndrome, PAS, 1987, 2006). Il représente l’effet de l’action d’un
des parents sur l’enfant afin de détruire l’image de l’autre parent dans son
esprit par un dénigrement continu. Les fausses allégations d’abus sexuel
sont fréquentes. L’objectif souvent atteint dans les cas de divorce est que
l’enfant adopte le point de vue du parent et rejette totalement l’autre
parent, qu’il aimait auparavant (Van Gijseghem, 1988, 2009, 2011). Selon
Gardner, dans les cas les plus graves, le parent faussement accusateur, le
plus souvent la mère, est atteint d’une pathologie psychiatrique identifiable.
Depuis plusieurs années, ce syndrome est mieux connu et les professionnels
sont plus vigilants. De surcroît, les études sur le témoignage des enfants
indiquent que leur parole ne doit pas être prise en compte telle quelle, mais
nécessite d’être corroborée par d’autres informations. Ce syndrome a été
difficilement détecté car les mères se présentent comme très attentives
et soucieuses du bien-­être de leur enfant, avec lequel elles entretiennent
une relation symbiotique et surprotectrice. L’enfant ne contredit pas les
propos de sa mère afin de ne pas porter atteinte à ce semblant d’unité. Les

101
Les personnalités criminelles

professionnels s’interrogent lorsque la cause d’une pathologie persistante


ne peut être identifiée, ou bien quand des éléments discordants émaillent
l’histoire de la maladie. Ils s’interrogent lorsque les symptômes disparaissent
en l’absence de la mère ou que celle-­ci utilise de façon évidente la situation
pour décrire les troubles avec de nombreux détails. Le récit des faits et le
contexte temporel doivent être minutieusement étudiés. Des personnes de
la famille peuvent être interviewées. Des tests sont utiles pour guider l’éva-
luation de la situation. Le risque est bien entendu de passer à côté d’enfants
qui nécessiteraient des soins.

4.4 Le syndrome du bébé secoué


Le syndrome du bébé secoué (Shaken Baby Syndrome, SBS) représente
environ 1 % des cas de mauvais traitements physiques envers les enfants
(Trocmé et al., 2001). Il s’agit le plus souvent de bébés de moins d’un an,
un peu plus des garçons que des filles. Le constat est celui d’un hématome
sous-­dural, d’hémorragies rétiniennes, de fractures au niveau des côtes
et des os longs (Labbé et Fortin, 2004). Sur le plan comportemental, les
bébés secoués présentent des symptômes d’irritabilité, de somnolence,
des vomissements, des convulsions. Une perte de conscience peut suivre
le traumatisme avec un arrêt de la respiration, voire un décès. Dans une
étude sur 71 bébés secoués, plus d’un tiers des adultes ont affirmé ne
pas être responsables du traumatisme. Le plus fréquemment, ils ont dit
que l’enfant était tombé à terre ou avait été frappé à la tête. Il arrive
que des épisodes traumatiques aient précédé l’incident qui conduit à la
consultation.

Les conséquences du syndrome du bébé secoué (que l’Académie améri-


caine de pédiatrie recommande d’appeler Abusive Head Trauma, qu’on
peut traduire par « traumatisme crânien intentionnel ou infligé ») sont
très importantes, allant de problèmes neurologiques ou de développement
jusqu’à un retard mental, des paralysies, des problèmes de motricité, une
cécité, des troubles comportementaux ou cognitifs, sans parler de la mort,
représentant jusqu’à un tiers des cas selon certaines études (Kivlin et al.,
2000 ; Reece, 2001 ; Starling, Holden et Jenny, 1995). L’agresseur est géné-
ralement un homme (le père ou son substitut dans 30 à 50 % des cas). La
mère pourrait être incriminée dans 13 % des cas (King et al., 2003) ou bien
d’autres personnes de la famille ou gardiennes de l’enfant. Les facteurs de

102
Criminalités spécifiques et techniques d’investigation ■ Chapitre 2

risque sont le fait d’être une gardienne adolescente, inexpérimentée ou un


jeune parent, avec des attentes inadaptées à l’âge de l’enfant (Prasad, 2002)
ou des parents en difficulté socio-­économique ou émotionnelle (du fait
d’une maladie, d’une violence conjugale, d’une addiction, etc.). Les jumeaux,
les enfants prématurés ou atteints de handicap sont plus vulnérables. Les
pleurs ou les difficultés de nourrissage déclenchent l’exaspération (Goldberg
et Goldberg, 2002 ; Showers, 2001). La prévention reste un des meilleurs
moyens pour éviter l’apparition de ce syndrome, tant en expliquant la
physiologie du bébé que les éventuelles difficultés à conserver son calme
pour un adulte responsable d’un nourrisson.

4.5 Les facteurs de risque


Si la pauvreté a souvent été associée à la maltraitance (Black et al., 2001 ;
Tourigny et al., 2002), le chômage, une situation de migration ou d’isole-
ment, des conditions de vie stressantes et des violences conjugales sont
fréquemment associés aux mauvais traitements des enfants. Le pourcen-
tage d’enfants maltraités devenant eux-­mêmes responsables de mauvais
traitements de leurs enfants varie, selon les études ou les époques, du tiers
à 45 % (Belsky et Stratton, 2002). Les grossesses adolescentes et le fait d’être
jeune mère constituent un facteur de risque (Brown, Cohen, Johnson et
Salzinger, 1998). La comparaison entre des mères maltraitantes et des mères
n’ayant pas maltraité leur enfant a montré que les premières usaient moins
de démonstrations positives vis-­à‑vis de leurs enfants et qu’elles répondaient
moins à leurs initiatives positives, trouvant le comportement de leur enfant
plus problématique.

Les enfants le plus souvent victimes de violences physiques sévères sont les
garçons (Clément et al., 2000 ; Tourigny et al., 2002). Les enfants handicapés
ou en mauvaise santé physique sont plus à risque d’être abusés (American
Academy of Pediatrics, 2001 ; Sullivan et Knutson, 2000 ; Vig et Kaminer,
2002). Les conséquences comportementales à long terme sont désastreuses,
notamment en termes de comportements délinquants et criminels, d’agres-
sivité et même de difficultés dans les relations romantiques. Par ailleurs,
l’adulte qui en vient à maltraiter est souvent celui qui utilisait la punition
corporelle pour se faire entendre de son enfant. Le lien entre la punition
corporelle et l’abus physique est maintenant largement démontré (Clément
et al., 2000 ; Gershoff, 2002 ; Tourigny et al., 2002).

103
Les personnalités criminelles

4.6 Les facteurs de protection


Parmi les facteurs de protection des familles vulnérables on peut citer
les interventions de prévention de type soutien, groupes d’entraide, assis-
tance pratique aux familles en difficulté économique ou éducative (Peirson,
2001 ; Peter, Laurendeau, Chamberland et Peirson, 2001). Le sentiment
d’appartenance communautaire se traduisant par des actions collectives
d’amélioration du logement ou des conditions de vie a pour but de favo-
riser le mieux-­être des familles et leur insertion Dans la famille, la cohésion
des liens, les valeurs communes et le temps passé ensemble (Morimoto et
Sharma, 2004), un attachement de type sécure, de bonnes stratégies de
résolution de problèmes permettent de lutter contre les risques associés
à la maltraitance.

Dans un groupe de mères ayant des antécédents de maltraitance, celles


qui n’ont pas reproduit les abus sont celles qui ont eu une relation positive
avec un parent ou un autre membre de la famille ou qui ont pu conscientiser
leur expérience traumatique (Narang et Contreras, 2000). Pour des enfants
vivant dans un milieu à risque, les pratiques parentales positives, faites de
constance, de respect du rythme et de l’individualité de chacun, de soutien
émotif et d’encouragement à l’exploration constituent des facteurs de
protection. Les enfants qui parviennent à développer une relation significa-
tive et privilégiée avec au moins un adulte (membre de la famille, éducateur,
professeur, voisin, etc.) s’en sortent beaucoup mieux que les autres. Du côté
des enfants eux-­mêmes, un tempérament facile, des habiletés à la résolution
de problèmes, de bonnes habiletés interpersonnelles, un sens de l’humour
et de l’affirmation de soi, une forte estime de soi, un lieu de contrôle interne
(Peirson, 2001) constituent de bons facteurs de prévention. Pour les plus
jeunes enfants, des études ont montré la possibilité de favoriser ces habiletés
en réduisant l’incidence des facteurs de risque et en renforçant les facteurs
de protection (Tourigny et al., 2002). Les approches préventives les plus
efficaces sont les approches multidimensionnelles, intégrant les relations
parents-­enfants, la vie quotidienne et matérielle des parents, proposées de
façon précoce, avec un rythme soutenu et continu (Blatier, 2006 ; Mrazek
et Brown, 2002).

Pour le professionnel, il n’est pas toujours aisé de différencier des


blessures accidentelles de celles faisant suite à une maltraitance. En ce
qui concerne les lésions traumatiques, on dispose d’indices (nombre,

104
Criminalités spécifiques et techniques d’investigation ■ Chapitre 2

localisation, contexte temporel à la suite d’une absence de l’école, etc.).


Pour le comportement, on peut s’interroger au sujet d’un enfant méfiant,
fatigué, apathique, évitant ou rejetant. Il est rare que l’enfant détaille ce
qui lui est arrivé : il est plus fréquent qu’il donne des indices, même s’il se
rétracte par la suite par crainte des représailles ou par désir de protection
de son agresseur. Sur le plan psychologique, la palette des réactions est
étendue : certains enfants se montrent passifs tandis que d’autres utilisent
le registre agressif. Les premiers sont plutôt réservés, timides et préoccupés,
manquant de confiance en eux et enclins aux accidents (Tourigny et al.,
2002). Les seconds ont tendance à agresser, intimider, terroriser ou ridicu-
liser, se montrent hyperactifs, cruels envers les animaux, cherchent à voler
ou à détruire (Haesevoets, 2003). Le discours des parents sur les hématomes
de l’enfant ou sur ses attitudes, entre dissimulation et justifications falla-
cieuses, peut révéler des situations d’abus. Sur ce dernier point, des attitudes
de parents colériques, centrés sur leurs propres besoins, impatients face
aux pleurs de l’enfant ou manquant d’empathie devant sa souffrance, sont
importantes à repérer.

5. La maltraitance envers les personnes âgées


La maltraitance à personnes âgées concernerait 5 % des personnes de
plus de 65 ans. Les auteurs de cette maltraitance sont pour plus de la moitié
des membres de la famille, des professionnels du soin à domicile ou en
institution (22 %), des voisins ou amis (16 %), et d’autres personnes peu
connues. La plus grande part de cette maltraitance concerne des violences
psychologiques (menaces de rejet, insultes), physiques (contusions, coups,
gifles, etc.), financières (vols, signatures forcées, héritages anticipés),
relatives à la citoyenneté (privation de papiers d’identité, de droits élémen-
taires), ou physiologiques (privation du traitement médical, administration
de traitements neuroleptiques ou autres). Le signalement de maltraitance
à personne âgée s’effectue auprès d’un médecin, ou des autorités sanitaires,
sociales ou judiciaires. Les personnes ou les professionnels de santé ayant
connaissance de tels sévices dans l’exercice de leur profession les signalent
aux autorités médicales, administratives ou judiciaires. Les autorités dili-
gentent une enquête pouvant conduire à des poursuites judiciaires.

105
Les personnalités criminelles

En 2007, l’association française ALMA (Allô maltraitance des personnes âgées et/ou
des personnes handicapées) a analysé les signalements qu’elle avait reçus. Parmi
les dossiers suivis, 25 % concernent des faits de négligence, 18 % de maltraitance
psychologique, 11 % de maltraitance physique et 12 % des faits sans véritable maltrai-
tance. Les auteurs identifiés par les plaignants en institution sont pour 42 % un
personnel soignant, pour 25 % un personnel non médical, pour 13 % la famille et pour
11 % d’autres personnes. Il est évident que donner des chiffres émanant de plaignants
rend compte d’une réalité au travers du prisme des personnes en institution, d’où
une forte proportion de personnel soignant désignée, ce qui n’intègre pas les maltrai-
tances intrafamiliales. Il convient donc de considérer ces données de façon prudente.
À domicile, les principales maltraitances seraient psychologiques (22 %), financières
(18 %) et physiques (14 %), tandis qu’en institution, il s’agirait de négligences (40 %), de
maltraitances multiples (18,5 %), psychologiques (15 %) ou physiques (11,5 %). Presque
quatre faits de maltraitance sur cinq sont signalés dans le cadre familial, ce qui
nécessite une prévention et un traitement reposant sur un dialogue avec la famille.
L’Organisation Mondiale de la Santé a réalisé des estimations de la prévalence
pour les types les plus courants de maltraitance dans les pays à revenu élevé ou
intermédiaire (2016) :
–– abus financiers : 1,0 à 9,2 % ;
–– violences psychologiques : 0,7 à 6,3 % (sur la base de critères significatifs de seuil) ;
–– négligence : 0,2 à 5,5 % ;
–– violences physiques : 0,2 à 4,9 % ;
–– violences sexuelles : 0,04 à 0,82 % ;
La fréquence est plus élevée pour les personnes vivant en institution. Cette
maltraitance peut s’exprimer par la contrainte physique à l’égard des patients, le
non-­respect de leur dignité – par exemple en négligeant de changer leurs vêtements
souillés – et de leur liberté de choix concernant la vie quotidienne, le manque inten-
tionnel de soins (entraînant par exemple l’apparition d’escarres), l’abus ou le défaut
de traitement médicamenteux, ainsi que la négligence et la violence morales.
Les personnes âgées victimes craignent de subir des représailles, d’être placées
dans un établissement ou changées d’établissement. Elles s’estiment souvent
responsables des conflits et sont marquées par la peur de l’abandon. Les visites
à domicile sont délicates pour les soignants, qui ne peuvent recevoir des doléances
d’ordre familial, ce qui rend complexe la décision ou non de signaler. Comme pour
tout signalement, la réalité de la plainte est difficile à déterminer. Dans le cas de
certaines personnes âgées, la maladie ou les défaillances de la mémoire imposent
la prudence. Des symptômes liés à la vieillesse ou à la maladie, tels que l’inconti-
nence, les troubles du caractère, les fugues ou les déambulations conduisent parfois
certains membres de la famille à ne pas contrôler leurs réactions.

Les facteurs de risque pouvant accroître les possibilités de maltraitance


d’une personne âgée sont d’ordre individuel, familial, communautaire, et

106
Criminalités spécifiques et techniques d’investigation ■ Chapitre 2

socioculturel. Parmi les risques au niveau individuel figurent une mauvaise


santé physique et mentale de la victime et un éventuel abus d’alcool, de
substances ou de médicaments. Au niveau familial, la dépendance (souvent
financière) de l’auteur des actes de violence à l’égard de la personne âgée
accroît aussi le risque de violence. Le soin aux parents âgés peuvent
devient vite un fardeau pour des familles éloignées géographiquement,
dont certaines sont monoparentales, ou disposant déjà de peu de temps et
d’énergie pour s’occuper des enfants, ce qui accroît le risque de violence.
Au niveau communautaire, l’isolement social des personnes âgées, et l’ab-
sence de soutien social est un facteur de risque important de la maltraitance
des personnes âgées. Au niveau socioculturel, les personnes âgées ne sont
souvent perçues que comme étant uniquement une charge, notamment
du fait de l’affaiblissement des liens intergénérationnels. En institution, il
faut que les intérêts de ladite institution restent pris en compte sans nuire
à ceux des pensionnaires, en veillant à ce que le personnel soit bien formé
et rémunéré, sans surcharge de travail.

En matière de maltraitance, une attitude préventive est essentielle. On


conçoit maintenant la nécessité de prendre en charge les aidants familiaux
(Monfort et al., 2013) en considérant aussi l’importance de leur fardeau.

Parmi les comportements problématiques liés aux procédures criminelles,


nous avons souhaité aborder une attitude paradoxale assez fréquente lors
des prises d’otage. Il s’agit d’une réaction connue sous le nom de syndrome
de Stockholm.

6. Le syndrome de Stockholm
Le syndrome de Stockholm définit une relation paradoxale qui s’éta-
blit entre des victimes de prise d’otages et leurs ravisseurs. Contre toute
attente, les otages développent peu à peu un sentiment de sympathie voire
de confiance envers leurs ravisseurs et considèrent négativement les auto-
rités et les forces de l’ordre en leur adressant des reproches concernant leur
façon d’opérer et parfois leur violence à l’égard des ravisseurs. Ce syndrome
a été étudié à partir d’un cas de hold-­up avec prise d’otages qui s’est déroulé
en 1973, dans une banque de Stockholm.

107
Les personnalités criminelles

6.1 Les différentes phases


Le déroulement de la prise d’otages peut être décrit en quatre phases avec
Crocq : la phase de capture, la phase de séquestration, la phase de libération
et la phase séquellaire.

‡‡ La phase de capture

Au début de la prise d’otages, le sentiment de surprise domine. Au niveau


psychologique, cette phase de capture est susceptible d’entraîner un état
de sidération prolongé accompagné d’une agitation anxieuse jusqu’à une
véritable confusion mentale. Si les réactions émotionnelles perdurent
au-­delà de la situation de stress, elles peuvent être à l’origine de réactions
comportementales pathologiques. Confronté à la peur de mourir, le « mythe
personnel d’invulnérabilité » mis en place par la personne est profondément
ébranlé. Une fois la réaction d’effroi passée, l’otage cherche soit à s’enfuir,
soit à s’opposer à ses ravisseurs. Ce n’est que secondairement que, ses résis-
tances s’épuisant, il a envie de collaborer. Si cette tentative de collaboration
est suivie d’une réponse adaptée de l’agresseur, les conditions sont réunies
pour que le syndrome de Stockholm apparaisse.

‡‡ La phase de séquestration

La phase de séquestration, de durée variable, survient dans un contexte


où la perception du temps est profondément modifiée par le stress. C’est
pendant cette phase que se constitue véritablement le syndrome de
Stockholm (Crocq, 1989). Elle comporte 3 périodes :
– le déni de la situation, qui correspond à un état second, au cours duquel
l’otage s’abstient autant que possible de penser, de ressentir et de souffrir.
Cette phase relativement brève s’estompe progressivement ;
– l’espoir avec une illusion de répit, où l’otage se souvient de sa vie normale
encore récente. Il est lucide et tient un raisonnement logique, mais si
la situation se prolonge et qu’il ne perçoit pas de signes de libération
possible, s’il est isolé et n’a pas d’activité mentale de contrôle (conser-
vation de la notion de la durée, surveillance du comportement de ses
ravisseurs ), il risque de perdre peu à peu espoir ;
– la perte d’espoir et l’acceptation du statut d’otage : l’otage se sent détaché
de la réalité extérieure et sa seule préoccupation est de se montrer
docile aux ordres de ses ravisseurs afin de conserver le maximum de

108
Criminalités spécifiques et techniques d’investigation ■ Chapitre 2

possibilités de retrouver sa vie antérieure. Il peut s’ensuivre un moment


de dépersonnalisation.

L’otage se sent déshumanisé par des conditions de séquestration souvent


dégradantes. Paradoxalement se développent au cours de cette phase de
séquestration des sentiments de dépendance, puis de sympathie à l’égard
de l’agresseur. Des éléments issus d’une dynamique de groupe entre les
otages et les ravisseurs qui vivent ensemble une situation particulière
s’y ajoutent. L’otage s’interroge sur ses propres valeurs et son passé. Le
groupe peut déployer un sentiment défensif de cohésion autour du projet
commun de recouvrer la liberté. Si l’isolement perdure, l’agresseur, en
quête d’un interlocuteur, finit par se tourner vers sa victime à laquelle
il restitue ainsi une valeur humaine. Le fait que l’agresseur, qui apparaît
comme tout-­puissant, n’attaque pas physiquement sa victime renforce le
sentiment pathologique de gratitude à son égard. L’otage a le sentiment
de perdre son identité sociale, puisqu’il devient une monnaie d’échange
pour son ravisseur. Il espère retrouver de la dignité en s’accordant avec
lui (Muller et Fayant, 2010). L’otage a alors recours à l’identification au
seul modèle avec lequel il puisse encore communiquer et qui possède en
outre le pouvoir d’adoucir son sort. Pendant cette phase la victime peut
craindre que l’agresseur se fasse agresser par les sauveteurs, d’où la réaction
de protection vis-­à‑vis de l’agresseur.

‡‡ La phase de libération

L’angoisse est à son paroxysme puisque l’otage craint un dénouement


fatal. La stabilité des défenses réaménagées pendant les négociations est
brutalement remise en question. Des otages peuvent être libérés, tandis
que d’autres restent prisonniers ou que certains sont tués. Il est habituel
que les otages libérés ressentent de la culpabilité. Des réactions paradoxales
de rejet des libérateurs peuvent émerger, ainsi que des tentatives destinées
à protéger les ravisseurs contre l’assaut des forces de l’ordre.

‡‡ La phase séquellaire

Le moment de la libération est suivi d’une euphorie, mais des troubles


de l’humeur accompagnés de culpabilité peuvent apparaître. C’est à ce
moment qu’on peut parler de syndrome de Stockholm constitué, ou de l’une
de ses formes atténuées avec une rationalisation secondaire de l’épisode

109
Les personnalités criminelles

traumatisant et une remise en question du système de valeurs sociales et


culturelles. Les séquelles de ce syndrome se manifestent classiquement par
des symptômes de stress post-­traumatique, des éléments dépressifs avec des
sentiments paradoxaux de culpabilité. Les souvenirs sont mal remémorés
malgré des techniques sophistiquées (Bertone et al., 1995 ; Ginet et al., 2006 ;
Ginet et Verkampt, 2007 ; Py et al., 2004). L’évolution du syndrome peut
entraîner un bouleversement fondamental de la personnalité du sujet et
provoquer des perturbations graves dans son existence comme dans celle
de son entourage (divorce, séparation, actions militantes, vie consacrée à la
cause des auteurs de prise d’otages…).

6.2 Les facteurs de risque


Des facteurs de risque sont identifiables dans l’apparition du syndrome
de Stockholm :
– l’âge de la victime, qui détermine sa vulnérabilité, ou une immaturité
affective, qui peut faciliter l’apparition de la relation de confiance néces-
saire à la genèse du syndrome, ou un sujet dont l’âge est relativement
avancé qui, de ce fait, est plus épargné et respecté par ses ravisseurs
(Audet et Katz, 1999) ;
– le sexe de la victime : les femmes semblent plus vulnérables au syndrome
de Stockholm lorsqu’elles occupent une position hiérarchique inférieure
au sein du groupe des otages, car les ravisseurs auraient plus tendance
à les ménager ; les personnes qui ont déjà vécu une peur intense, voire
une terreur, liée à un événement violent et soudain qui leur a fait frôler
la mort, sont plus à risque. En effet, cette peur intense et brutale les fait
basculer toujours pour survivre, dans un autre univers de pensée où la
logique et les repères ne sont plus les mêmes. Où pour se protéger et
avoir moins peur, la victime est « obligée » de prendre parti pour le parent
agresseur, de le « comprendre », de l’excuser, voire d’affirmer qu’il n’avait
pas le choix et que son action somme toute était « normale » ;
– l’existence de tensions internes au sein du groupe d’otages favorise l’appa-
rition du syndrome de Stockholm et, a contrario, la cohésion du groupe
ainsi que son homogénéité constituent des paramètres pour en limiter
l’apparition ;
– le traitement infligé à l’otage est déterminant, puisque toute haine de
l’agresseur envers sa victime empêche en principe l’identification et l’ap-
parition d’un sentiment de sympathie. Le syndrome de Stockholm apparaît

110
Criminalités spécifiques et techniques d’investigation ■ Chapitre 2

d’autant mieux si les ravisseurs instaurent un contact positif avec les


otages. Ces derniers s’identifient alors à leurs ravisseurs, les comprennent
et se sentent finalement moins menacés par eux que par une intervention
intempestive venue de l’extérieur ;
– la sympathie qu’inspire la cause des ravisseurs aux otages (ou celle des
terroristes), bien que cette idée reste encore discutée aujourd’hui ;
– la victime doit ignorer la dynamique du syndrome de Stockholm ;
– la personnalité des ravisseurs est plus importante que celle des otages car
celle des victimes est très peu prédictive. En effet, de nombreux auteurs
considèrent que le comportement des individus confrontés brutalement
à cette situation extrême est relativement imprévisible ;
– la durée de la prise d’otages : plus elle est longue et plus la communication
entre les otages et leurs ravisseurs risque de s’installer, entraînant une rela-
tion susceptible de favoriser le déclenchement du syndrome de Stockholm.

6.3 Analyse psychopathologique


Le mécanisme d’identification à l’agresseur a été décrit par Anna Freud
en 1936. Une personne confrontée à un danger extérieur s’identifie à son
agresseur soit en reprenant l’agression, par exemple en reportant telles quelles
sur une autre personne les critiques qui lui sont adressées, soit en imitant
physiquement ou moralement l’agresseur, soit encore en adoptant certains
symboles de puissance qui le représentent. Ce mécanisme serait prévalent
dans la constitution préliminaire du surmoi, l’agression restant alors dirigée
sur l’extérieur et n’étant pas encore retournée contre le sujet sous forme d’au-
tocritique. On retrouve l’expression d’identification à l’agresseur dans les écrits
de Ferenczi dans le cas particulier d’un adulte atteint par un fort sentiment de
culpabilité et qui commet un attentat sexuel sur un enfant. Le traumatisme
ainsi vécu par l’enfant peut le conduire, par peur, à se soumettre totalement
à son agresseur. Pour Louis Crocq (2012), le traumatisme psychique est un
phénomène d’effraction du psychisme et de débordement de ses défenses par
les excitations violentes afférentes à la survenue d’un événement agressant
ou menaçant pour la vie ou l’intégrité physique ou psychique d’un individu
qui y est exposé comme victime, témoin, ou acteur.

Pour l’otage qui développe le syndrome de Stockholm, la perception


objective de la réalité quitte les références et les normes habituelles. Le
traumatisme psychologique subi entraîne un comportement régressif

111
Les personnalités criminelles

aboutissant à un processus d’identification au ravisseur. Certains auteurs


considèrent que pendant les négociations, le sentiment de carence de la
société à protéger l’otage est fortement ressenti par celui-­ci. Dans ces condi-
tions, le ravisseur, en raison de sa toute-­puissance, peut endosser une image
de personne forte, mais aussi se substituer à l’image du père idéal dans
l’esprit de la victime. L’existence d’une dépendance réelle de l’otage vis-­à‑vis
du ravisseur produirait une régression à un stade précoce de la vie infantile
(stade préœdipien).

Un contact affectif neutre et dénué de toute forme d’agressivité indivi-


duelle entre les ravisseurs et leurs otages rend possible cette projection. En
effet, des sentiments de haine des agresseurs envers leurs victimes empêche-
raient toute forme d’identification. Les ravisseurs peuvent alors être perçus
comme de bons parents qui protègent les enfants (Bigot et Bornstein, 1998).
Cette identification représente une « réponse élaborée pour faire face à la
peur et pour lutter contre l’angoisse de mort engendrée par la situation et
le rapt de son identité subjective » (Tomasella, 2015).

Parmi les divers exemples connus pour avoir déclenché un syndrome


de Stockholm chez les otages, citons celui de l’enlèvement de l’ambassa-
deur de Grande-­Bretagne en Uruguay par les Tupamaros, qui dura environ
huit mois. Le diplomate finit par partager les idées de ses ravisseurs et par
adhérer à leurs revendications pendant et après le rapt, ou encore celui,
non moins fameux, de Patricia Hearst, fille d’un magnat de la presse qui
fut enlevée par un groupe terroriste en Californie et qui, impressionnée par
la bienveillance de ses agresseurs et par leur puissante détermination, se
rangea parmi eux pour militer pour une « cause juste » jusqu’à braquer une
banque, armée d’une mitraillette (Oliveira, 2005).

Le plus souvent, le syndrome de Stockholm ne dure que quelques


semaines après la libération des otages. Il semblerait que la prévention soit
efficace : elle consiste à faire connaître ce syndrome, ce qui empêcherait
ou limiterait singulièrement son développement. Lorsque le syndrome est
déclaré, on peut éviter un stress post-­traumatique et freiner le développe-
ment d’un sentiment de culpabilité (particulièrement lorsque tous les otages
n’ont pas été libérés ou que certains d’entre eux ont été tués) en proposant
une prise en charge psychologique. Dans un certain nombre de cas, les
victimes développent un état de stress post-­traumatique, qui doit lui aussi
occasionner une prise en charge thérapeutique.

112
Criminalités spécifiques et techniques d’investigation ■ Chapitre 2

7. La délinquance et la criminalité au féminin


La délinquance et la criminalité au féminin ont longtemps été abordées
à partir des connaissances développées auprès des hommes délinquants
et criminels (Blatier, 2006). Les études restent encore à la marge, la délin-
quance féminine ne représentant qu’un faible pourcentage de l’ensemble
de la délinquance. Nous examinerons tout d’abord la question des adultes
délinquantes et criminelles puis celle des mineures.

7.1 Les délinquantes et criminelles adultes


Les statistiques établies chaque année par les services de police et de
gendarmerie rendent compte de la faible participation globale des femmes
parmi les auteurs d’actes délictueux. Pour expliquer la constance du nombre
global de femmes appréhendées, certains estiment que la vigilance des poli-
ciers est moins attirée par la gent féminine, supposée commettre moins
d’actes délictueux ; ils pensent que les filles et les femmes bénéficient d’un
traitement pénal adouci, ce qui expliquerait le plus faible nombre de femmes
pour lesquelles une peine est prononcée (Agrapart, 2012). Selon eux, les
magistrats et les jurés sont plus cléments lors de leur verdict, au motif
qu’une femme est souvent soutien de famille et qu’une pénalisation grave
pourrait nuire à ses enfants. Un examen approfondi des dossiers montre
que pour des faits similaires, les femmes sont effectivement moins pénali-
sées que les hommes. Des magistrats insistent toutefois pour dire que les
attitudes changent dans ce domaine.

En quoi une distinction est-­elle opérée entre les délinquants et les délin-
quantes ? Bloom et Covington (2000) identifient les cinq éléments clés d’une
approche des délinquantes : « l’importance de l’aspect relationnel, le besoin
de soin des traumatismes psychologiques et des pathologies psychiatriques,
une compréhension de l’importance du lien avec l’enfant (rôle parental),
la reconnaissance du besoin de réintégration et d’appartenance commu-
nautaires et la mise en valeur des forces et du potentiel d’auto-­efficacité »
(Ashfield et al., 2013).

Plusieurs études et méta-­analyses rendent compte d’un faible nombre


de crimes sexuels commis par les femmes et recensés dans les rapports de
police (de l’ordre de 2 %) tandis que les études de victimisation indiquent

113
Les personnalités criminelles

que 12 % des crimes sexuels ont été commis par des femmes (Cortoni
et al., 2017).

Parmi les femmes auteures d’infractions à caractère sexuel, trois princi-


paux styles d’agression ont été distingués : tout d’abord celui qui correspond
à une planification méthodique du crime par des femmes qui se sentent
à l’aise avec leur crime, dans une approche explicite ; ensuite celui d’une
approche un peu évitante, de femmes qui n’ont pas planifié, qui éprouvent
un affect négatif lorsqu’elles songent à leur acte, et ont eu besoin d’une
pression longue voire très longue pour commettre leur crime. Le dernier
type est celui du rapport implicite désorganisé de femmes qui n’établissent
aucune planification, qui associent à leur acte des affects soit positifs soit
négatifs, et qui sont surtout très impulsives. Tandis que les deux premiers
groupes ont des motivations très variées, les dernières montrent seulement
deux motivations à l’acte : la peur de leur coauteur masculin ou la possibilité
de gagner de l’intimité avec leur coauteur (Gannon et al., 2014).

Les facteurs de risque de criminalité des femmes sont assez similaires


à ceux des hommes : attitudes antisociales, déficit d’intimité, consommation
de substances psychoactives, haut niveau d’hostilité envers le genre opposé,
victimisation (McCuish et al., 2017). Toutefois, des recherches sont encore
nécessaires afin d’améliorer la connaissance des similarités et différences
dans la délinquance et la criminalité des femmes et des hommes (Bouffard
et al., 2016).

‡‡ Les femmes violentes

Il existe assez peu de travaux de recherche sur les femmes criminelles et la


violence. Toutefois, quelques études qualitatives renseignent sur les facteurs
explicatifs liés aux comportements violents des femmes. Rappelons que
l’agression renvoie à un comportement destiné à nuire à un autre qui devient
victime, et que la violence est une agression dont les éléments objectifs
prouvent une volonté de porter gravement préjudice, par des blessures, voire
par la mort (Bushman et Huesmann, 2010). Les femmes qui commettent
un crime violent envers une personne extérieure à leur famille sont plus
nombreuses à présenter un trouble de la personnalité, notamment antiso-
ciale, et à avoir des antécédents judiciaires. Ces femmes qui commettent
des crimes violents ne constituent pas un groupe homogène (Trébuchon
et Léveillée, 2017).

114
Criminalités spécifiques et techniques d’investigation ■ Chapitre 2

Des chercheurs ont repéré deux trajectoires chez 85 femmes arrêtées


pour comportement violent hors du domicile (Sommers et Baskin, 1994). La
première de ces trajectoires concerne 60 % des femmes ; elle est marquée par
un début précoce dans la délinquance et la déviance. La seconde implique
principalement des femmes s’étant rendues violentes après une consom-
mation de psychotropes. D’autres recherches montrent l’impact de la
toxicomanie ou de l’alcool.

Dans une étude comparative de délinquantes violentes (âge moyen 32,4 ans) et de
délinquantes n’ayant pas eu recours à la violence (âge moyen 34,5 ans), on s’aperçoit
que les plus violentes sont plus susceptibles d’avoir des problèmes de toxicomanie et
sont deux fois plus à risque de consommer abusivement de l’alcool (Blanchette, 1999).
Les délinquantes violentes sont souvent sans emploi au moment de l’arrestation
et ont eu beaucoup d’emplois instables. Elles ont le plus souvent vécu leur enfance
sans lien familial (30 % contre 12 % des autres délinquantes). Un tiers d’entre elles
ont des enfants, contre la moitié pour les autres délinquantes. Sont aussi associés
à la violence des facteurs tels que des antécédents de tentatives de suicide, à tel
point que le risque de suicide pourrait constituer un élément fondamental de la
prévention du risque de récidive violente.
Harrati et al. (2007) ayant étudié les caractéristiques psychopathologiques et psycho-
criminologiques de 40 femmes condamnées à des peines criminelles, montrent que
22 ont été condamnées pour meurtre en tant que complices et/ou auteurs, 13 pour
viol ou agression sexuelle en tant que complices et/ou auteurs et 2 pour actes de
tortures et actes de barbarie. La plupart d’entre elles ont déjà commis des actes
délinquants tels que vols, viols, escroquerie, violences. Parmi elles, 35 évoquent des
dysfonctionnements intrafamiliaux en lien avec des problèmes d’alcoolisme et de
violence qui apparaissent traumatiques. En outre, 16 ont été victimes d’agressions
sexuelles (quatre au moment de l’adolescence, 12 pendant l’enfance et l’adolescence).
Les auteurs avancent l’hypothèse d’une répétition transgénérationnelle (famille
d’origine/famille actuelle) des problématiques d’alcoolisme et de violence physique.
Pour la majorité des femmes de l’échantillon, il semble que le contexte familial et
environnemental suscite une entrée précoce dans la vie active, avec un faible niveau
d’instruction ou de qualification, ainsi qu’une entrée précoce dans la vie de couple,
avec des grossesses précoces, ce qui rejoint d’autres études (Tardif et al., 2005). Une
autonomie sociale satisfaisante n’empêche pas les situations socio-­économiques
précaires qui facilitent la répétition des problématiques connues dans la famille
d’origine comme l’alcoolisme ou la violence (Harrati et Vavassori, 2015).

Rappelons, comme nous l’avons évoqué dans le chapitre dédié, qu’il existe
des cas de violence conjugale dont les auteurs sont des femmes.

115
Les personnalités criminelles

Femmes auteurs de maltraitance ou d’abus sexuels sur mineurs


En France, le Service national d’accueil téléphonique pour l’enfance maltraitée reçoit
chaque année plus de 700 000 appels signalant des faits de maltraitance. Il procède
à des vérifications et ne transmet aux Conseils généraux que les cas les plus crédibles
exigeant un suivi social et judiciaire, soit environ 9 000 par an. Les statistiques sur
les affaires transmises établissent les auteurs des mauvais traitements comme étant
principalement la mère (52,3 %), le père (29,6 %), le beau-­père (7,8 %), les femmes en
général étant plus souvent responsables que les hommes (à plus de 56 %).

Parmi les actes criminels contre les enfants, il faut différencier le liberi-
cide et l’infanticide. Le libericide concerne les enfants de 1 à 11 ans plutôt
que les bébés et son auteur est généralement une femme plus âgée, ayant
déjà élevé d’autres enfants. Au contraire, l’infanticide a le plus souvent pour
auteur une jeune femme. Tous les infanticides sont différents ; ils sont le fruit
de mères aux personnalités psychologiques diverses. L’infanticide découle
dans la grande majorité des cas d’un désarroi et d’un sentiment d’impasse
absolue (Archambault, 2012). Il peut s’agir d’un déni de grossesse suivi d’un
refus de maternité, ou du résultat d’une incapacité matérielle ou psycholo-
gique à accueillir un enfant ; certains y voient une signification ultime quasi
psychotique de se soustraire à la réalité. L’infanticide est exceptionnelle-
ment prémédité, sauf dans une forme grave de dépression, dans laquelle la
personne, convaincue de l’inutilité et de la cruauté de l’existence, emmène
avec elle son enfant dans la mort.

D’autres maltraitances ou morts sont engendrées dans le cadre du


syndrome de Münchausen par procuration. Cette pathologie psychiatrique
que nous avons évoquée au chapitre sur les maltraitances pousse les parents
à consulter pour leurs enfants à propos de troubles qu’ils ne présentent pas
ou a minima. Les mères violentes finissent par faire prendre en charge leur
enfant par des médecins de façon régulière. Le diagnostic est rendu difficile
vis-­à‑vis de maladies souvent longues et inexpliquées, mettant en échec les
modes thérapeutiques habituels et des mères qui s’expriment en semblant
porter la plus grande attention à leur enfant. Le diagnostic est facilité lorsque
l’enfant, éloigné de sa mère, présente une régression spontanée des symp-
tômes. En revanche, le diagnostic est délicat chez un enfant de moins de
deux ans, pour lequel le personnel peut soupçonner une maladie rare, avec
des symptômes mettant en jeu le pronostic vital, et se doit donc de tout
mettre en œuvre pour assurer sa santé.

116
Criminalités spécifiques et techniques d’investigation ■ Chapitre 2

Certaines femmes se rendent responsables d’abus sexuels sur les enfants :


malgré les représentations habituelles des femmes comme nourricières,
et protectrices, la détection et le dévoilement des infractions sexuelles
commises par des femmes se développent (Freeman et Sandler, 2008 ;
Saradjian, 2010).

Deux catégories peuvent être repérées : les femmes qui abusent sexuelle-
ment de jeunes enfants ou adolescents, et celles qui se rendent complices
de leur partenaire masculin (Saradjian et Hanks, 1996). Les femmes auteurs
d’abus sexuels sont souvent à la recherche d’une sexualité par défaut,
par compensation voire par identification à la victime. Ces conditions
peuvent inclure solitude et isolement, une fausse et hostile représenta-
tion de potentiels partenaires, reliée à un manque d’empathie et à une
forte impulsivité (Baker et al., 2006). Les femmes criminelles agissent
peu par coercition, recherchent peu le plaisir sexuel et blessent rarement
physiquement leurs victimes (Nathan et Ward, 2002). Elles connaissent
généralement leur jeune victime, soit parce qu’il s’agit de leur enfant, soit
parce qu’elles en ont la garde. Dans plusieurs études, une forte propor-
tion d’entre elles (dépassant les 70 %) se sont mariées à l’adolescence.
Certaines sont dans une relation à connotation incestueuse (incestuelle
selon certains, voir Defontaine, 2002), jalouses de la rivalité que provoque
l’attention de type abusif accordée par le partenaire à l’enfant en question.
Pour les décrire, Harris (2010) a dégagé des caractéristiques communes
dans les typologies existantes. Le premier type regroupe les femmes qui
ont agressé sexuellement des adolescents en dehors de la famille. Elles
considèrent l’adolescent comme un adulte. Elles-­mêmes ont rarement été
victimes d’agression sexuelle pendant l’enfance, mais ont plutôt souffert
de l’absence ou du comportement distant de leur père. Le deuxième type
caractérise les femmes ayant agressé sexuellement leurs enfants ou des
enfants prépubères. Elles peuvent avoir recours à des fantaisies sexuelles
déviantes, à des comportements sexuels déviants, ou à de la violence
(Coulborn-­Faller, 1999). On relève pour ce type une polyvictimisation
pendant l’enfance, notamment sexuelle, sur une longue période. Le troi-
sième type regroupe les femmes ayant agressé sexuellement (souvent leur
propre fille) avec un complice masculin sous l’emprise duquel elles ont
agi. Le quatrième type concerne les femmes ayant agressé sexuellement
des adultes, le plus souvent des femmes, et ces actes ne sont pas toujours
portés à la connaissance de la police.

117
Les personnalités criminelles

La méconnaissance de la problématique spécifique des femmes auteurs


d’agression sexuelle sur les enfants va de pair avec une difficulté à repérer
les signes précoces de victimisation chez les enfants et adolescents.

Dans une étude sur 50 femmes auteurs d’agression sexuelle et volontaires pour
un traitement, Eldridge (2000) a montré que 20 % avaient abusé d’enfants dans le
cadre de baby-­sitting. Parmi ces jeunes femmes, 29 sur 50 ont avoué avoir des
fantasmes sadiques ou des fantasmes d’actes de barbarie. Un tiers d’entre elles
avaient subi des violences sexuelles soit dans leur enfance soit au début de leur
vie de femmes. Ces violences ayant été peu signalées à la justice, elles n’avaient
pas reçu de soins appropriés.
Dans l’étude de Deschacht et Genuit (2000), 59 femmes sur les 69 étudiées étaient
responsables de viol aggravé ou de complicité de viol aggravé (les autres étant
responsables de viol simple ou d’agression sexuelle) ; les quatre cinquièmes avaient
agi sur des enfants de moins de 15 ans (en moyenne âgés de 8-9 ans), principalement
des filles, leurs propres enfants pour les trois quarts. Ces femmes avaient un faible
niveau scolaire et, pour la majorité d’entre elles, vivaient en couple. Elles étaient
âgées en moyenne de 32 ans, n’avaient pas d’antécédent psychiatrique majeur ;
25 présentaient des troubles dépressifs, et des manifestations d’alcoolisme ou
de toxicomanie. Près de la moitié d’entre elles déclaraient un passé de violences
physiques souvent liées à l’alcoolisme des parents et 24 reconnaissaient avoir subi
des violences sexuelles dans l’enfance ou l’adolescence. La vie sexuelle chaotique
de ces femmes était fréquente, avec violence et dynamique sadomasochiste. Leur
difficulté à situer leur place de femme et de mère était caractéristique, de même
qu’une problématique de l’image et du rôle maternel, avec une absence de perception
du caractère déviant de leur comportement. Leurs besoins émotionnels se trouvaient
satisfaits à travers l’érotisation du contact avec le corps de l’enfant. Cette étude
a le mérite de présenter les caractéristiques d’une population française. En effet, il
faut noter que les études portant sur un large échantillon sont rares, et concernent
souvent les cas les plus graves (Saradjian et Hanks, 1996).

Pour tenter de comprendre les abus sexuels des femmes, on peut tout
d’abord examiner leur vie. Les conséquences à long terme de celles qui
ont vécu une agression sexuelle dans l’enfance, incluant les difficultés
psychologiques, relationnelles puis conjugales, constituent des facteurs
qui augmentent les risques de victimisation sexuelle pour leur enfant. La
plupart ont un vécu de carences, de violence et de situations d’emprise
dans l’enfance : ces séquelles, en plus d’être exacerbées ou réactivées par
la maternité, interfèrent avec leur rôle parental. Une mère qui utiliserait
le déni et la suppression de ses émotions pour faire face à son propre
antécédent d’agression sexuelle utiliserait les mêmes stratégies pour gérer

118
Criminalités spécifiques et techniques d’investigation ■ Chapitre 2

les émotions que suscite chez elle la violence vécue par son enfant (Baril
et Tourigny, 2015). La situation de mère ou de future mère est difficile et
l’obligation de se comporter de façon mature est vécue comme impossible,
tant sont mêlés la maternité, la filiation, la sexualité, les désirs, leur vie et
celle de leur enfant. Les « stratégies de coping sexuelles peuvent offrir un
apaisement des détresses et/ou une réponse aux besoins d’intimité, d’affec-
tion, d’attention et de contrôle. » (Bushman et al., 2001 ; Levenson et al.,
2014). Tardif (2001) préconise de reprendre ces éléments de l’enfance de
façon à parvenir à une élaboration psychique qui conduise à une meil-
leure intégration de l’identité sexuelle féminine et de l’identité maternelle
actuellement instables. Certains de ces troubles peuvent, en effet, conduire
à l’inceste.

L’inceste a lieu dans un système familial pathogène. Selon Caillot et


Decherf (1989), dans le cas de l’inceste, le fonctionnement de la famille est
bloqué au niveau de la position narcissique paradoxale. Dans une famille
à transactions incestueuses, la place centrale de la mère contribue et facilite
ce système transgressif. La mère est partagée entre le désir de protéger son
enfant et l’incapacité à rompre la relation d’emprise de son partenaire. Le
lien familial incestueux se met ainsi en place contre des angoisses massives
d’abandon et de perte et il fonde le couple.

Même si la mère n’est pas l’auteur de l’inceste, sa responsabilité est bien


souvent engagée. Barudy envisage la mère comme l’un des trois person-
nages de la tragédie incestueuse dont le père est l’auteur, selon deux cas
de figure. Lorsque la mère est soumise et subordonnée, le père-­abuseur
est absolutiste et la fille-­victime « adultifiée », et lorsqu’elle est dominante
et contrôlante, le père-­abuseur est infantile et la fille-­victime dominée.
Plus l’enfant occupe la place de mère auprès du père, plus le degré de
complicité (passive ou active) est important. Certains auteurs considèrent
que l’inceste du père ne peut perdurer que si la mère fait preuve de cécité.
Elle peut souhaiter la paix au prix de l’inceste, avec parfois le bénéfice
secondaire qui consiste à être exemptée de relations sexuelles avec son
mari. Ce retrait psychoaffectif et relationnel constitue un mécanisme de
défense permettant aux mères de fuir leurs responsabilités. On considère
qu’il s’agit d’agression passive, que l’on peut évaluer grâce au question-
naire de Richardson sur le conflit et la réponse (RCRQ, Richardson et
Green, 2003) en l’associant à d’autres mesures telles que le questionnaire
d’agressivité de Buss et Perry (1992), le questionnaire d’anxiété trait-­état

119
Les personnalités criminelles

de Spielberger (STAI) ou l’inventaire de colère trait-­état de Spielberger


(STAXI), qui permettent d’éclairer l’agressivité indirecte (Richardson et
Hammock, 2011). Ces femmes ne présentent pas de syndrome psycho-
tique, mais on relève des troubles dépressifs importants (Lewis et Stanley,
2000), des troubles de la personnalité de type limite (Mayer, 1992) et de
type dépendant (Grayston et DeLuca, 1999). Toutes les femmes présentant
un trouble de la personnalité ou un trouble de stress post-­traumatique ne
commettent fort heureusement pas d’agressions sexuelles. Selon Green
et Kaplan (1994), ce serait l’interaction entre les psychopathologies et
certains facteurs de risque qui serait déterminante, telles une expérience
d’abus physique et/ou sexuel, une sexualité débridée, une faible estime de
soi et un besoin de contrôle (Matte, 2014). Le centre parisien des Buttes
Chaumont propose, comme d’autres centres thérapeutiques en charge des
femmes auteurs d’agression sexuelle, une thérapie familiale. Les psycho-
logues, les travailleurs sociaux et les assistantes familiales travaillent en
partenariat. La thérapie, qui peut intégrer le génogramme comme outil
d’appréhension du lien parent-­enfant, dure jusqu’au procès. Elle peut
initier une prise en charge spécifique pour les enfants. Il apparaît que ces
femmes sont le plus souvent issues d’un milieu carencé avec des négli-
gences parentales ou des maltraitances, notamment avec des relations
mère-­fille carencées et conflictuelles qui rendent difficile l’intériorisation
de leur propre rôle de mère (Tardif et al., 2005). Les femmes auteurs
d’agression sexuelle rejoueraient cette victimisation en s’identifiant à la
fois au parent agresseur et à la victime qu’elles étaient. Dans l’étude de
Krug et al. (2002), 88 % des femmes présentaient des troubles dépressifs
et 63 % des troubles toxicomaniaques. Les abus ont débuté par un degré
élevé d’intimité physique entre l’enfant et sa mère. Les conséquences sur
les filles sont en général manifestes : Héritier (1994) estime que cette forme
d’inceste est le prototype de l’inceste le plus radical. Il s’appuie sur une
relation spéculaire imaginaire dans laquelle la fille est comme le double
de la mère et la mère, le double de la fille. Dans le cas du garçon, l’impact
est dévastateur, étant donné qu’il suppose, selon Lebovici et Soulé (1969),
que le fils dépasse l’horreur du sexe de sa mère et se montre actif dans
la relation sexuelle jusqu’à son aboutissement. Le travail thérapeutique
du ou des parents vise à rompre les relations d’emprise agie ou subie et
à vivre une relation à l’autre qui ne soit pas dangereuse.

Une méthode d’analyse clinique et psychopathologique a été mise au point


par Harrati (2003) auprès de 40 femmes condamnées à des peines criminelles.

120
Criminalités spécifiques et techniques d’investigation ■ Chapitre 2

Il s’agit d’une analyse psychocriminologique et pathobiographique minu-


tieuse qui permet de reprendre avec les femmes leur parcours de vie.

L’examen de femmes condamnées à des peines criminelles pour viol et/ou agressions
sexuelles, en tant qu’auteurs et/ou complices, a été réalisé lors d’entretiens et de
la passation de tests projectifs (Harrati, Vavassori et Villerbu, 2005). L’âge moyen
de ces femmes est de 39 ans. Dans la quasi-­totalité des cas, la ou les victimes sont
des mineurs de moins de 15 ans, deux sont adultes. Huit ont eu pour victime(s) des
enfants légitimes, et deux des enfants de la famille élargie (nièces, neveux). Les
autres victimes sont connues mais ne sont pas de la famille.
Au moment de l’incarcération, douze ont une vie maritale et un ou plusieurs enfants.
Sept ont une activité professionnelle et six sont mères au foyer. Deux seulement ont
suivi une instruction de niveau secondaire. Douze d’entre elles se disent insatisfaites
de leur vie sexuelle et affective en raison de difficultés conjugales (violence, alcoo-
lisme, pratiques sexuelles imposées). Quatre ont déjà consulté des psychologues
à la suite d’événements traumatiques ou de tentatives de suicide. Elles ont toutes
eu des difficultés relationnelles avec les hommes dans des situations où elles se
sentaient victimes. Elles présentent des symptômes liés à un sentiment d’infériorité,
une méfiance, de l’hostilité, des éléments dépressifs et paranoïaques. Aucune d’entre
elles n’a été incarcérée préalablement à l’acte, qu’elles sont nombreuses à dénier.
Selon elles, cet acte peut coïncider avec une période particulière de leur vie (diffi-
cultés psychologiques ou conjugales, décès d’un proche) : cinq d’entre elles décrivent
un malaise psychique lié au retour d’événements traumatiques (violences physiques
ou sexuelles), six rapportent des sentiments d’étrangeté ou de dépersonnalisation,
et deux des sentiments de colère (liés aux difficultés conjugales). La ou les victimes,
majoritairement de sexe féminin, apparaissent soit menaçantes ou dangereuses,
soit elles ne représentent rien et sont perçues comme déshumanisées. Les femmes
étaient rarement seules lors du passage à l’acte. Elles étaient accompagnées pour
cinq d’entre elles de leur conjoint et pour cinq autres de deux ou plusieurs amis. Au
moment du passage à l’acte, elles disent avoir éprouvé un sentiment d’apaisement,
de dégoût, de haine ou de colère. Sept sur treize se sont perçues comme anormales
au moment de l’acte en raison de sentiments d’étrangeté et de dépersonnalisation.

‡‡ Les femmes incarcérées en France

La France compte actuellement près de 200 établissements pénitentiaires :


63 accueillent des femmes mais seuls six sont plus spécifiques à cette popu-
lation. Il s’agit de trois maisons d’arrêt situées à Fleury-­Mérogis, Rennes et
Versailles, et de trois établissements pour peines situés à Rennes, Bapaume
et Joux-­la-­Ville. Pour donner un ordre d’idées, près de 2 200 femmes sont
écrouées en France, dont environ sont 31 % prévenues. Elles représentent
autour de 3,5 % de l’ensemble des détenus. Leur âge moyen est de 32,4 ans

121
Les personnalités criminelles

(avec un écart type de 3 ans). Parmi elles, près de 180 ont moins de 21 ans,
une trentaine moins de 18 ans (ministère de la Justice, ces chiffres de 2017
sont assez stables au fil des dernières années). Leur niveau d’instruction
voisine celui des hommes incarcérés, soit 16 % d’illettrées déclarées, 39 %
ayant reçu une instruction en classe primaire et 45 % une instruction secon-
daire ou supérieure. La population carcérale, hommes et femmes, a très
rarement suivi des études longues.

L’analyse de toutes les infractions ayant conduit à la condamnation indique des


différences entre les hommes et les femmes. Trente pour cent de ces femmes sont
incarcérées pour des peines criminelles. En premier lieu, les femmes sont incarcé-
rées pour crime de sang (22 %) alors que les hommes ne sont incarcérés pour ce
motif que dans 9 % des cas. Les incarcérations pour faits de violence ou violence
sur mineur sont de l’ordre de 15 %, proportion identique à celle des hommes. Les
femmes détenues ont été condamnées pour viol ou autre agression sexuelle dans
13 % des cas, alors qu’il s’agit du motif d’incarcération le plus important pour les
hommes (23 %). Elles dépassent très légèrement les hommes en matière de trafic de
stupéfiants (13 % contre 11 %) et d’infraction à la législation sur les chèques, incen-
dies volontaires, vagabondage, etc. (10 % contre 9 %). En revanche, les hommes sont
plus incarcérés que les femmes pour vol simple (11 % contre 10 %) et vol qualifié (11 %
contre 5 %).

Les femmes incarcérées sont accompagnées sur le plan psychologique par


le Service Médico-­Psychologique Régional (SMPR). En prison, près d’une
femme sur deux consomme des psychotropes. Contrairement aux hommes
détenus, elles ressentent plus fréquemment un sentiment de honte et de
culpabilité lié à leur détention. Les plaintes somatiques sont fréquentes et
le taux de suicide et d’automutilations est élevé. Actuellement, les trois
quarts d’entre elles sont mères de famille. Chaque année, environ cinquante
enfants naissent de femmes incarcérées dans les prisons françaises. La gros-
sesse de ces femmes est surveillée par l’équipe médicale du SMPR. Certains
établissements accueillent les mères incarcérées et leur nouveau-­né. Elles
peuvent le garder avec elles pendant 18 mois. À cette date, si la mère reste
incarcérée, l’enfant est prioritairement confié au père ou à la famille élargie.
À défaut, il est placé en famille d’accueil ou en institution. Depuis peu, des
lieux sont aménagés pour que les parents en détention puissent recevoir
leurs enfants dans des conditions plus convenables.

Les femmes sont incitées à suivre différents programmes de réinsertion. Il


reste encore beaucoup à faire dans ce domaine en France afin de proposer,

122
Criminalités spécifiques et techniques d’investigation ■ Chapitre 2

comme au Canada par exemple, des aides cohérentes de réinsertion fondées


sur l’apprentissage du mieux-­être et le développement des relations avec
les autres dans la collectivité.

7.2 Les filles délinquantes


Les statistiques du ministère de la Justice montrent que la délinquance
juvénile est principalement le fait des garçons. Sur près de 60 000 mesures
judiciaires prononcées en France chaque année, 90 % concernent des
garçons. Il faut nuancer ces chiffres en considérant que la délinquance
masculine est généralement plus bruyante et violente donc plus aisément
identifiable, alors que la délinquance féminine est plus cachée et repérée
plus tardivement. Dans la plupart des pays d’Europe, la délinquance des filles
représente entre 7 et 30 % de l’ensemble de la délinquance judiciarisée des
mineurs, selon les infractions et la pénalisation décidée par certains pays,
qui font peu de distinctions entre filles et garçons (Blatier, 2000a, 2014).
Globalement, les filles sont rarement engagées dans la délinquance, leur
carrière démarre plus tardivement et la désistance intervient plus rapide-
ment. Le genre a un impact différent selon les infractions. Pour les vols
mineurs, le rapport garçons-­filles est de 2 pour 1. Pour les coups et blessures
volontaires et la violence à autrui, il peut atteindre 14 pour 1. La différence
d’engagement observée chez les garçons et les filles s’explique surtout par
la supervision parentale.

Afin de déterminer l’ampleur de la différence entre la délinquance des


filles répertoriée par les services de police et de gendarmerie, celle présentée
devant les tribunaux, et la délinquance réelle, les études de délinquance
autorévélée peuvent se révéler utiles. Ces études sous forme d’enquêtes
consistent à demander à des personnes (le plus souvent des jeunes) d’indi-
quer, sous couvert d’anonymat, si elles ont commis tel ou tel acte délictueux
au cours de l’année passée. Pour analyser la délinquance féminine, cette
méthode apporte des éléments essentiels.

123
Les personnalités criminelles

L’une des seules enquêtes françaises de délinquance autodéclarée a été conduite


par Roché auprès de collégiens et de lycéens de 13 à 19 ans (2000, 2005). Elle révèle
que les filles commettent moins d’actes délictueux que les garçons (environ un tiers
de moins), mais bien plus que n’en recensent les services de police. Ce phénomène
s’observe particulièrement pour les dégradations simples et les vols graves. Les
disparités entre filles et garçons concernent également les types d’infraction. Ainsi,
une fille sur dix et un garçon sur trois déclarent avoir commis une agression physique
en dehors de la famille. Les filles sont un peu plus semblables aux garçons pour les
vols, qui sont le fait d’une fille sur trois et d’un garçon sur deux. Si l’on ne considère
que les adolescents agressifs, les filles ont moins de risque (4 %) que les garçons
d’être présentées devant un tribunal ; pour ces derniers, le risque atteint 45 %.

Si la délinquance des filles est de moindre ampleur, il est évident


qu’elle n’est pas encore autant répertoriée que celle des garçons, comme
en témoignent les statistiques de la police et celles des tribunaux. Les
recherches sur l’engagement dans la délinquance mettent en évidence
des différences majeures dans les représentations des rôles masculin et
féminin et dans les processus de socialisation des garçons et des filles.
Quels facteurs vont les faire poursuivre leur activité délinquante, voire
aggraver celle-­ci ? Cette question interroge d’emblée la validité du modèle
d’analyse de la délinquance masculine appliqué à la délinquance féminine.
La plupart des travaux portent sur la période de l’adolescence et montrent
que les garçons sont plus délinquants que les filles (plus longtemps et
de façon plus importante). Le facteur biologique a été invoqué pour les
garçons. Du côté des filles, plusieurs études montrent que celles qui sont
précocement réglées ont plus de risque de s’engager dans la délinquance.
En fait, cet engagement dans la délinquance tient beaucoup à l’association
avec des pairs délinquants qui accompagne la précocité du développe-
ment sexuel. Ces pairs sont souvent des copains plus âgés, qui entraînent
les jeunes adolescentes dans des activités délinquantes. Inversement, on
constate qu’une arrivée tardive des premières menstruations est asso-
ciée au non-­engagement dans la délinquance. Une étude multicentrique
longitudinale portant sur 2 607 filles et a montré que les filles à la puberté
précoce étaient plus à risque de s’associer avec des pairs délinquants
ou d’influence négative, et ce, quelle que soit leur origine culturelle. Le
risque de délinquance est stable dans le temps mais ne joue pas sur le fait
d’agresser les personnes ou pas (Mrug et al., 2014). Plus encore que le
développement biologique, les facteurs d’entrée dans la délinquance des
filles concernent les processus de socialisation et d’internalisation des
rôles sexués.

124
Criminalités spécifiques et techniques d’investigation ■ Chapitre 2

La dominance des hommes dans l’activité criminelle n’a pas d’explication


univoque. Des facteurs hormonaux pourraient entrer en ligne de compte et
s’ajouter aux traditionnels facteurs invoqués que sont l’agressivité et l’édu-
cation des garçons, cette dernière étant moins normalisante que celle des
filles. Ces dernières sont nettement engagées dans une éthique du soin
et de la protection (Gilligan, $réf. ?$), ce qui les rend plus conformes aux
normes sociales.

Certaines féministes, notamment américaines, ont développé des


recherches sur cette question. Elles ont lié le comportement délinquant
des adolescentes au statut des femmes dans les sociétés patriarcales et capi-
talistes. D’autres se sont intéressées au rôle féminin voué à l’assistance et au
sentiment de responsabilité vis-­à‑vis des autres (Bègue et al., 2013). Cette
disposition d’esprit leur a semblé protéger les filles d’un engagement dans
la délinquance. Finalement, certaines caractéristiques plutôt développées
par le sexe féminin, notamment la capacité à prévoir le comportement des
autres et à favoriser les comportements en accord avec l’image qu’elles
se font des femmes, en d’autres termes l’internalisation des rôles sexués,
constituerait une force de protection pour les filles. En cas de difficulté
psychologique, les filles sont plus promptes à mettre leur sécurité en ques-
tion. Elles s’efforcent de contrôler leurs émotions négatives sans impliquer
d’autres personnes, ce qui peut expliquer, au moins en partie, les fugues, les
comportements autodestructeurs et la consommation de drogue. Les filles
sont connues pour leurs comportements internalisés et les garçons pour
la prédominance des comportements externalisés, comme nous l’avons
montré dans une recherche sur les troubles présentés par des enfants de
8 à 11 ans (Blatier, 2005 ; Blatier, Paulicand et Pez, 2002). La différence
d’appréhension des situations de conflit trouve une réponse majoritaire
en termes de violence physique pour les garçons et de violence indirecte
pour les filles.

Si les troubles psychologiques des filles sont moins apparents que les
troubles externalisés des garçons, elles sont tout aussi vulnérables. Leur
mode d’engagement dans la délinquance est différent de celui des garçons
(Hirschelmann et Hubert, 2018). En effet, le comportement délinquant
des garçons résulte d’une déficience des mécanismes de contrôle. Il s’agit
principalement de contraintes internes et externes inadaptées. L’origine de
la délinquance des filles réside surtout dans l’exposition à des influences
déviantes. Cette exposition constitue une cause directe et proximale du

125
Les personnalités criminelles

comportement déviant et délinquant des filles pour Lanctôt et LeBlanc


(2000). Si le mode d’engagement des filles et des garçons est différent, on
peut supposer que les modes de persistance du comportement délinquant
ne seront pas les mêmes non plus. En effet, la plupart des filles ne s’ancrent
pas dans la délinquance. Celles qui persistent sont des filles au parcours un
peu particulier. La modélisation de leur entrée dans la délinquance et de la
persistance de leur comportement peut être la suivante : les conflits avec
l’autorité apparaissent assez tôt, suivis par de la délinquance cachée, puis
par des actes potentiellement violents commis ouvertement.

Nous aborderons plus loin les trajectoires développementales, où il sera


question des modalités d’évolution de la délinquance des filles.

Le parcours d’adolescentes présentées devant les tribunaux de la jeunesse


donne des indications intéressantes. Pour la moitié d’entre elles, les conflits
avec l’autorité ont commencé à l’âge de 7 ans. À l’âge de 10 ans, ils existaient
pour les trois quarts, et pour toutes à l’âge de 15 ans. Vers l’âge de 9 ans,
elles ont commencé par des vols discrets, puis ont opéré de façon plus
ouverte vers l’âge de 11 ans. À 13 ans, 75 % des filles se trouvaient engagées
dans la délinquance (Loeber et al., 1993). À cet âge, la moitié d’entre elles
avaient déjà eu des conduites dangereuses comme une consommation de
drogue (Odgers et al., 2008). Tout comme pour les garçons, la précocité de
la délinquance constitue pour les filles un facteur de risque de persistance
(Lanctôt, 2015 ; Lanctôt et LeBlanc, 2000). Ainsi constate-­t‑on que la parti-
cipation précoce aux activités délinquantes et déviantes est prédictrice d’un
agir marginal ultérieur fréquent et persistant.

Des entretiens avec 150 jeunes filles judiciarisées âgées de 15 ans, puis
dans un deuxième temps à l’âge de 17 ans, montrent que le déclin de la
délinquance est marqué par des corrélations positives avec l’attachement,
le respect de l’autorité (Lanctôt, 1999) et des corrélations négatives avec la
fréquentation de pairs marginaux, la maladaptation sociale, les punitions,
la propension à déformer la réalité selon des besoins et désirs propres. Il
existe des facteurs de résilience pour les adolescentes délinquantes.

126
Criminalités spécifiques et techniques d’investigation ■ Chapitre 2

En cherchant à mettre en évidence les facteurs familiaux qui limiteraient les compor-
tements délinquants, Rasseneur et Born (2004) ont travaillé avec des adolescentes
délinquantes placées en institution et des adolescentes non délinquantes qui
suivaient un enseignement de type professionnel ou technique. Ces adolescentes,
toutes âgées de 12 à 18 ans, ont été réparties en sous-­groupes selon leurs niveaux
de risque et de délinquance avérée. Une analyse comparative des différents groupes
a été réalisée afin d’établir les éléments qui auraient un rôle protecteur. Les prin-
cipaux éléments mis en évidence concernent la relation et le soutien maternels.

Actuellement on peut faire le constat suivant : la délinquance féminine


bénéficie peut-­être encore d’une certaine clémence de la part des institu-
tions policières et judiciaires. Les statistiques de délinquance autorévélée
conduisent pourtant à tirer la sonnette d’alarme : elles indiquent claire-
ment une assez forte participation des filles adolescentes à la commission
d’actes délictueux. Les travaux de recherche sur les modèles masculins
de la délinquance ne suffisent pas. Ils peuvent servir de point de départ
mais la motivation, l’internalisation et le rapport aux contraintes ne sont
pas les mêmes selon le sexe. Si les adolescentes agissent souvent en petits
groupes ou gangs, leur persistance fait moins appel au groupe. Vu le peu
d’études sur le sujet, il est urgent de développer des recherches sur les
filles délinquantes afin de mener une politique de prise en charge adaptée
et de prévention.

7.3 L’établissement de l’identité


et la socialisation différentielle
Différents courants ont cherché à décrire les modalités de construction
de l’identité. Dans le modèle psychanalytique, la fillette ne diffère du garçon
qu’à partir de l’apparition du complexe de castration : le garçon (tout comme
la fille) comprend l’absence de pénis chez la fille comme la conséquence
d’une castration. Le garçon se met à craindre que cela ne lui arrive. La fille
jalouse le garçon, ce qui fait naître une envie de lui ressembler. La problé-
matique œdipienne est alors rapidement évacuée par le garçon, qui renonce
à sa mère et s’identifie à son agresseur potentiel (Rogé et Ionescu, 1996).
Le garçon développe alors un surmoi très puissant. De son côté, la fille
éprouve un sentiment d’infériorité qui impulse un désir de compensation.
Son surmoi est moins fort, plus dépendant, plus impressionnable et plus
accessible aux sollicitations de l’environnement (y compris de la part des
éducateurs).

127
Les personnalités criminelles

L’apport kleinien (Klein, 1932-1972) a modifié radicalement cette


importance de la reconnaissance de la différence des sexes pour favoriser
l’inscription dans une identité sexuée avant la phase génitale, en fonction
d’identifications précoces et de l’apprentissage d’un rôle social.

Cette conception a été renforcée par des auteurs nord-­américains (e.g.


Kohlberg, 1969) qui ont insisté sur la capacité cognitive de reconnaissance
de la stabilité du genre (se reconnaître garçon ou fille et identifier un autre
comme garçon ou fille) et sur l’importance des stéréotypes sociaux dans
l’acquisition de l’identité sexuelle. L’établissement de la constance du genre
(gender) serait aussi rendu possible par des schémas cognitifs qui, très tôt,
permettraient de classer les stimuli correspondant aux modèles masculins
et féminins. Les facteurs biologiques faciliteraient l’élaboration de l’identité
et du rôle sexuel.

Le genre s’établirait donc à la fois à partir de la biologie, d’une préprogram-


mation des structures cérébrales, mais aussi des influences de l’inconscient,
de l’éducation et de l’environnement. Ce développement ne repose pas
uniquement sur des élaborations inconscientes ou des préprogrammations.
Il passe aussi par l’éducation, donc principalement les parents et l’environ-
nement, qui n’ont pas une influence égale sur les garçons et les filles.

De nombreuses études font également état d’une différence importante


entre les filles et les garçons quant à l’agressivité et ce, depuis les premières
années de vie. Depuis qu’elles sont toutes petites, on a appris aux filles
qu’agressivité ne rimait pas avec féminité. La plupart d’entre elles ne sont
pas agressives. Quelques-­unes le deviennent, souvent en réaction. La plupart
expriment leur agressivité autrement : l’agression indirecte (dire ou lancer
des rumeurs sur quelqu’un, persuader les autres de ne pas jouer avec tel ou
tel camarade, etc.) est typique des filles. À 11-12 ans, elles utilisent plus leur
capacité à manipuler les autres et à les déstabiliser. À cet âge, l’agression
physique est toujours plus importante chez les garçons que chez les filles,
mais l’agression verbale directe n’est pas différente.

La discrétion et la retenue dans le comportement des filles adolescentes


ne sont plus des valeurs autant prônées par les sociétés occidentales que
par le passé. L’identité des filles et des garçons évolue : les comportements
de type masculin, y compris dans le domaine de l’agressivité, sont plus
fréquents chez les filles ; on rencontre aussi plus de filles violentes.

128
Criminalités spécifiques et techniques d’investigation ■ Chapitre 2

Il apparaît de façon évidente que les filles sont traitées différemment


des garçons par leurs parents. Les aspects de cette socialisation différen-
tielle ont été examinés de près. Cette différence d’interaction mène à des
issues dissemblables en termes de délinquance. On constate notamment
que les adolescentes sont sujettes à plus de supervision parentale que les
adolescents.

De leur côté, les filles n’ont pas les mêmes attentes que les garçons par
rapport à leurs parents. Elles attendent plus de communication intime
(par exemple des sentiments) et instrumentale (par exemple des projets
d’avenir). Elles souhaitent vivement que leurs parents aient des marques
d’attention et d’affection vis-­à‑vis d’elles et se montrent sensibles à l’accueil
qu’ils font de leurs copines ou copains. Elles sont plus sensibles que les
garçons à un manque de qualité dans la communication avec les parents ;
a fortiori, elles sont plus affectées par les éventuels conflits. C’est ce qui a fait
noter par certains chercheurs que le fait d’être à risque trouvait sa source
à la maison (Arthur, 2007). Si l’on examine la relation parents-­enfant, l’élé-
ment le plus important permettant de prédire la délinquance est, pour les
garçons, le manque de supervision et de communication instrumentale et
intime. Les filles sont quant à elles marquées par le manque d’acceptation
parentale de leur personnalité et de leurs choix, la désapprobation paren-
tale des pairs, ainsi que par les conflits et le manque de communication
instrumentale.

On retrouve des constantes dans les familles des jeunes délinquants :


les liens d’attachement sont plus fragiles, la communication intrafamiliale
est défaillante, les parents présentent des attitudes favorisant les conflits
familiaux ou la violence et/ou ils ont des difficultés dans le contrôle de
leurs adolescents. Les difficultés rencontrées dans la famille conduisent
naturellement les jeunes à rechercher des compensations auprès de leurs
copains. Après les données personnelles et les relations intrafamiliales, les
pairs vont constituer un troisième facteur important dans l’activité délin-
quante. L’attente vis-­à‑vis du groupe de pairs est aussi importante pour les
filles que pour les garçons. La prise en charge des jeunes délinquantes doit
en tenir compte (Zermatten, 2003). Elle doit aussi s’appuyer sur certains
ressorts essentiels du développement psychologique des adolescents.

129
Les personnalités criminelles

7.4 Le rôle des pairs dans l’activité délictueuse


L’importance du groupe de pairs dans l’activité délictueuse n’est pas négli-
geable. La recherche d’un tel groupe est aussi importante pour les filles que
pour les garçons. Certains facteurs, telles la prise d’alcool ou la consomma-
tion de drogue, en renforcent le plus souvent la cohésion ; un grand nombre
de vols sont commis sous l’emprise de l’alcool ou de la drogue. Si dans le
groupe se trouvent des adolescents plus âgés, et plus encore s’ils sont exté-
rieurs au milieu scolaire, les jeunes des deux sexes auront généralement
une plus forte consommation d’alcool. La recherche du contact avec les
pairs a un impact important sur le type d’activité dans lequel s’engage un
adolescent. Cette attirance contrebalance sérieusement l’influence éducative
des parents. L’agressivité dont témoignent certains jeunes peut également
être issue de ces rencontres avec les pairs, qui influencent les garçons et
les filles plus particulièrement à la préadolescence et à l’adolescence, avec
quelques différences entre les uns et les autres.

7.5 Les filles et la violence


Les filles ayant des antécédents de violence sont plus susceptibles de
fréquenter des pairs délinquants que les filles non violentes. On note aussi
des corrélations positives entre la violence physique et verbale du père ou
de la mère et la violence dont les filles font usage à la maison ou à l’égard
de leurs pairs. Il existe également une corrélation entre violence physique
persistante et désunion de la famille, et ce, uniquement dans le cas des
filles.

Au Canada, en Angleterre, aux États-­Unis, on estime que les crimes


violents perpétrés par des adolescentes augmentent. Il convient de rappeler
que les adolescents sont toujours beaucoup plus nombreux à commettre
des crimes avec violence que les adolescentes, la proportion passant de 1
sur 3 à 1 sur 12 selon la nature de l’infraction. Il n’existe pas de différence
entre les sexes dans le cas d’une première infraction avec violence, mais les
garçons l’emportent sur les filles si l’on tient compte des cas de récidive.

S’agissant des filles, on a pu là encore repérer une comorbidité entre


violence et autres troubles mentaux (dont la dépression, l’anxiété et les
idées suicidaires) plus fréquente que pour les garçons. On peut toutefois

130
Criminalités spécifiques et techniques d’investigation ■ Chapitre 2

interroger les facteurs explicatifs de la violence chez les filles. Certains cher-
cheurs ont observé que plus les tendances suicidaires étaient marquées,
plus le comportement violent était fréquent. L’expression de la violence et
son degré peuvent alors donner une idée de la gravité du comportement
suicidaire. On constate donc chez les filles une présence souvent associée
de violence physique et de tendances autodestructrices ou suicidaires.
Cette violence physique pourrait répondre à une victimisation physique
ou sexuelle dans la famille, ou au moins au sentiment d’être ou d’avoir
été victime de violence. Le coefficient de corrélation entre dépression et
violence est de 0,41 dans un tel échantillon (Vannata, 1996). Des résultats
semblables entre dépression et violence sont signalés chez des préadoles-
centes (Messer et Gross, 1994).

Sibylle Artz, chercheur spécialiste des jeunes filles délinquantes, a mené des
entretiens avec des adolescentes judiciarisées en leur demandant de justifier leur
comportement violent. Elles rapportent que la plupart des bagarres auxquelles elles
ont été mêlées avaient été planifiées de façon précise : les filles visaient à se faire
remarquer par les garçons, afin de leur montrer qu’elles étaient capables de se battre
comme eux, mais également afin de les exciter sexuellement. Les filles victimes
étaient choisies en raison du fait que l’agression permettrait de les remettre « à leur
place », soit parce qu’elles avaient des vues sur le même copain, soit parce qu’elles
méritaient une leçon au titre d’un règlement de compte. Pour finir, la responsabilité
des bagarres était imputée à ces victimes. Artz aboutit à plusieurs conclusions. Ces
adolescentes reproduisent un comportement violent souvent établi dans la famille,
et copient son système de punitions. Elles semblent se vivre comme une minorité
méprisée et opprimée ; elles cherchent alors à attirer l’attention du groupe dominant
constitué par les garçons. Aux mobiles retenus pour expliquer la violence des filles et
des garçons (rivalité, affirmation de soi, volonté de dominer), il faudrait alors ajouter
un mobile propre aux filles : exercer leur influence sur les autres. On constate que
chez les garçons, le mode d’engagement dans cette violence s’effectue en réponse
à une impulsion, tandis que les filles passent plutôt d’une violence verbale à une
violence avec manipulation, pouvant y associer une violence physique.
En réalisant une étude longitudinale auprès de jeunes filles délinquantes, Chauhan
et ses collaborateurs (2014) ont montré que les traits de psychopathie (quelle que
soit la mesure utilisée, ici l’inventaire de traits psychopathiques chez les jeunes –
YPI, ou la liste des traits de psychopathie pour les jeunes – PCL-­YV) n’avaient pas
été retrouvés quatre ans et demi après la première analyse. La plupart des études
qui présentaient une certaine stabilité dans le temps de la psychopathie se sont
intéressées aux garçons, et ces traits ne sont peut-­être pas les mêmes. Le facteur
affectif semble jouer un rôle très important pour les problèmes externalisés des
filles et pour leur violence.

131
Les personnalités criminelles

Qu’est-­ce qui fait qu’une fille est plus portée à la violence qu’une autre ?
Le rejet de la part des parents ou leur peu de soutien sont des variables
évoquées comme liées à la violence des adolescentes. On a également
analysé les différences entre filles violentes et filles non violentes en fonc-
tion de l’influence du comportement des parents lorsque un problème se
présente. On a pu constater que les pères des filles violentes avaient des
capacités limitées en matière de résolution de problèmes, comparativement
aux pères des filles non violentes. Sur le plan de la résolution de problèmes
interpersonnels, seules les mères ont une influence significative. Les mères
des filles violentes sont plus susceptibles de recourir à l’indifférence ou à la
réprimande, et moins susceptibles de discuter des problèmes à résoudre
avec leurs filles, comparativement aux mères des filles non violentes. Les
filles ressentent manifestement plus fortement que les garçons les indices
parentaux suivants : un comportement des pères qu’elles jugent inadéquat
et une certaine distance des mères qu’elles ne supportent pas.

L’appartenance à un gang joue un rôle dans le choix des comportements


violents des filles. Le plus souvent, un adolescent ou une adolescente se
joignent à un gang pour échapper à un milieu difficile, pour se valoriser,
ou pour développer un sentiment d’appartenance et d’identité. Chez les
adolescentes, une telle attitude peut répondre à un désir de vengeance ou
à un besoin d’assurer leur protection et d’être reconnues dans un groupe.
Elles peuvent y apprendre à se défendre contre la violence dans leur famille
ou leur entourage. Cette possibilité de se regrouper en gang affaiblit les
barrières qui pouvaient les limiter dans l’adoption de comportements
violents et criminels. La violence physique et les bagarres y sont valori-
sées comme des signes de force. À la différence des garçons, les activités
délinquantes et criminelles des filles font aussi l’objet de plus de prépara-
tion et sont choisies en fonction de leur aspect lucratif, comme c’est le cas
pour le trafic de drogue et la revente d’objets volés. C’est pourquoi on peut
s’attendre, dans les années à venir, à une poursuite de l’augmentation de
la délinquance des filles. La prise en charge devra tenir compte de cette
évolution.

7.6 La prise en charge des filles et des garçons judiciarisés


Pendant longtemps on n’a eu affaire qu’à un faible pourcentage de jeunes
filles dans le secteur judiciaire ; on n’avait par conséquent pas de difficulté

132
Criminalités spécifiques et techniques d’investigation ■ Chapitre 2

à ordonner des mesures de contrôle social en cas de délit. Actuellement,


la prise en charge institutionnelle se diversifie (LeBlanc et LeBlanc, 2014).

L’accompagnement des jeunes par les institutions judiciaires ne se fait pas


de façon identique pour les filles et pour les garçons. Les filles présentent
plus de détresse psychologique, d’idées de suicide, de troubles alimentaires,
de somatisation en général. Le travail avec le patient doit renforcer non
seulement la qualité de la communication, mais aussi l’estime de soi et
favoriser la gestion des émotions et de l’agressivité.

On parvient à éviter le recours à la violence des filles lorsqu’elles


apprennent à améliorer leur estime de soi et à développer un sentiment
d’empathie pour les victimes. La prise de conscience des effets de la victi-
misation a pour effet le développement de la capacité à maîtriser le désir
de violence. La prise en charge des filles et des garçons nécessite un accom-
pagnement qui renforce le lien éducatif. C’est pourquoi même la détention
doit être conçue dans le respect de la personne du mineur, sans brutalité.
Cette attitude ne signifie pas que les éducateurs ne le confrontent pas à la
réalité de son acte et à ses conséquences. Cependant, le moment du passage
en institution ou en détention devrait toujours être un temps d’incitation
à la réalisation de soi à travers l’apprentissage d’un métier, des études et des
activités constructives. Peu de pays conçoivent la détention des mineurs
dans un réel enjeu éducatif.

Un exemple de programme destiné à des filles agressives canadiennes a été réalisé


à travers l’Earlscourt Girls Connection (EGC), mis en place par un centre de santé
mentale pour enfants agressifs et antisociaux âgés de moins de 12 ans à Toronto.
Ce programme est destiné aux filles et intègre les connaissances sur les facteurs de
risque de l’agressivité féminine. Il s’agit d’un des rares programmes de traitement
spécifique aux filles préadolescentes agressives. Walsh, Pepler et Levene (2002)
ont évalué le programme EGC en analysant les changements de comportement
chez les filles qui y étaient admises. Les objectifs de l’EGC sur le long terme sont
le maintien des filles dans le système scolaire et la prévention contre les risques
potentiels tels que délinquance, grossesse durant l’adolescence et comportement
antisocial. Le programme comprend 22 sessions portant sur trois composantes. La
première est constituée par un groupe SNAP (Stop Now And Plan) et repose sur des
jeux de rôles. L’objectif est d’aider les filles à gérer leur impulsivité, à réfléchir sur
les conséquences de leurs comportements, et à développer des démarches socia-
lement appropriées pour, par exemple, trouver un camarade de jeu ou demander de
’

133
Les personnalités criminelles

’
l’aide. La deuxième composante correspond au groupe SNAPP (Stop Now And Plan
Parenting) formé par les parents. Elle a pour but de promouvoir les compétences
parentales dans la gestion de la colère tout en mettant l’accent sur les formes
sociales d’agression que leurs filles peuvent subir ou faire subir. Après avoir suivi
les étapes 1 et 2, la troisième, appelée GGUH (Girls Growing Up Healthy) peut débuter.
Elle est destinée aux filles et à leurs mères car, selon l’expérience des auteurs, la
relation et l’identification au parent de même sexe sont des facteurs clés dans le
développement de l’agressivité quand celle-­ci touche les filles. Le GGUH se focalise
aussi bien sur la santé physique et sexuelle que sur les questions affectives. Il
a pour but d’améliorer la relation et les modes de communication entre mère et fille.
On sait combien une bonne relation à la mère constitue un facteur protecteur
vis-­à‑vis de la délinquance et que les filles délinquantes, surtout celles qui ont
été victimes d’abus, sont susceptibles de souffrir de problèmes de communication
pouvant affecter la qualité de leurs relations, notamment familiales. Les mesures
d’évaluation du programme effectuées au bout de 6 mois ont concerné 72 filles
(Lipman, Offord et Boyle, 1996), celles effectuées après 12 mois de suivi ont été
réalisées auprès de 58 filles. Les filles avaient entre 5 et 11 ans, l’âge moyen était de
8,9 ans. Le questionnaire d’évaluation rempli par les parents était composé de trois
sous-­échelles mesurant les troubles extériorisés : une sous-­échelle pour les troubles
du comportement, une pour l’opposition, la troisième évaluant l’hyperactivité. Trois
autres sous-­échelles mesuraient les troubles internes : hyperanxiété, angoisse de
séparation et dépression. De plus, une échelle concernant les relations sociales était
administrée afin d’évaluer comment l’enfant était en relation avec ses pairs, avec ses
enseignants, et avec les membres de sa famille. Les résultats de l’étude montrent
une amélioration significative entre l’admission au programme et les dates de suivi.
Selon les parents, il y a eu diminution des problèmes de comportement extériorisés
au bout de 6 mois et de 12 mois de suivi. Au niveau de l’échelle des relations sociales,
on a constaté une amélioration des relations sociales au bout de 6 mois de suivi,
amélioration qui restait stable au bout de 12 mois de suivi.
Cependant, bien que les résultats indiquent une amélioration pour les filles ayant
suivi le programme EGC, 68 % d’entre elles présentent toujours des troubles de
comportement extériorisés qui relèvent du registre clinique au bout de 6 mois, et
39 % en ont toujours au bout de 12 mois. Selon les auteurs, ceci viendrait étayer
le constat de Moffitt et al. (2001), selon lequel les comportements antisociaux des
filles sont aussi stables que ceux des garçons. Les auteurs notent qu’il existe une
comorbidité significative parmi les filles dont les symptômes demeurent dans le
champ clinique : en effet, elles ont des mesures aussi élevées sur les échelles
de comportements extériorisés que sur l’échelle de la dépression. Ces filles ont
à l’admission des scores plus élevés sur ces échelles que les filles dont les scores
se déplacent au fil du suivi mais restent dans le champ non clinique. Le programme
EGC a montré son efficacité, même dans le cas de filles dont les comportements
extériorisés continuaient à se situer dans le registre clinique au fil du suivi. En
’

134
Criminalités spécifiques et techniques d’investigation ■ Chapitre 2

’
effet, plus le niveau de difficulté mis en évidence à l’admission est élevé, plus
les troubles ont du mal à évoluer vers un registre non clinique, même si les
scores vont dans le sens d’une amélioration. Les auteurs notent en conclusion
qu’il est essentiel de considérer le rôle de la dépression des filles qui présentent
des problèmes de comportement. Leurs comportements extrêmement aliénants
et perturbateurs détournent l’attention tandis qu’existent de réels problèmes
comme la dépression.

7.7 Un modèle qui reste à construire


Les adolescents délinquants, filles et garçons, évoquent régulièrement
leur mal-­être mais s’en accommodent et font bonne figure. D’autres entrent
dans une économie parallèle dont ils ne souhaitent pas sortir. La réponse
judiciaire que l’on peut donner aux premiers doit intégrer les différences
constatées entre les sexes. Garçons et filles ne sont ni éduqués ni socialisés
de la même façon et leurs comportements diffèrent (Paulicand, 2010). Il faut
donc rester attentif à l’évolution de la délinquance des mineurs et notam-
ment au fait que de plus en plus de filles s’engagent dans la délinquance et
dans la violence.

Le modèle de prise en charge s’élabore peu à peu, il est en constante


mutation, puisqu’il s’adapte nécessairement aux changements observés. Ce
que nous connaissons du fonctionnement psychologique des adolescents
sert de guide permanent. De plus, nous disposons d’informations précieuses
grâce à l’expérience de nombreux professionnels qui gagneraient à être plus
écoutés, afin de mieux faire correspondre la réponse à la réalité que vivent
les adolescents délinquants.

Pour mieux adapter les prises en charge et les diversifier, il devient urgent
de développer les études sur les filles délinquantes. Il est essentiel de fonder
les recherches à venir sur les expériences propres aux filles délinquantes et
violentes et non plus sur le phénomène de la violence au féminin à travers
le prisme de la violence au masculin.

Les différentes situations abordées jusqu’ici tant du point de vue des


auteurs que des victimes font partie du champ de la criminologie. Dans ce
domaine on peut ajouter l’approche préventive, qui s’est largement déve-
loppée au cours des dernières années. Elle examine maintenant jusqu’aux

135
Les personnalités criminelles

premières années de la vie de l’enfant. Des trajectoires ont ainsi pu être


mises en évidence et de ce fait mieux endiguées, car les logiques successives
qui les caractérisaient ont permis de construire des schémas de prévention
pertinents pour chacune des formes de délinquance. La prévention est ainsi
adaptée à chaque moment du développement.

136
Chapitre 3
L’approche développementale
et la prévention
Sommaire
1. Les trajectoires développementales de la délinquance de l’enfance
à l’âge adulte...................................................................................... 139
2. Les facteurs de risque délinquant...................................................... 142
3. Les facteurs de persistance de l’activité délinquante et violente
et la désistance.................................................................................. 149
4. La prédiction des comportements antisociaux
dans les études longitudinales............................................................ 156
5. Les facteurs présents dès la petite enfance et la prévention............. 158
Depuis plusieurs décennies, principalement Outre-­Atlantique, des
travaux de recherche ont été réalisés en vue de prévenir différentes situa-
tions où le risque de délinquance s’avérait important. L’Europe a développé
des programmes qui bénéficient peu à peu d’une évaluation. Les travaux les
plus récents intègrent donc cette nouvelle approche qui allie développement
de l’enfant et prévention des troubles de l’enfance et de l’adolescence.

1. Les trajectoires développementales


de la délinquance de l’enfance à l’âge adulte

Dans quelle mesure des enfants évoluent-­ils vers la délinquance et pour-


suivent-­ils dans ce sens ? Une telle dynamique a suggéré la présentation de
trajectoires criminelles, variables en fonction de l’âge initial. Il convient de
rappeler qu’il s’agit d’études statistiques, et donc qu’il est toujours question
de généralités, de constats a posteriori, et pas de prédire un avenir à une
personne donnée. Si ces données sont bien utilisées pour ce qu’elles sont,
avec les restrictions qui s’imposent, elles peuvent être d’une grande aide.
Selon LeBlanc et Morizot (2000), chaque type de délinquance appelle des
stratégies spécifiques de prévention primaire et secondaire et des méthodes
de réadaptation dont les modalités varient également (LeBlanc et al., 1998).

La plupart des chercheurs s’entendent pour reconnaître trois trajectoires


développementales pour la délinquance.

1.1 La délinquance sporadique


© Dunod. Toute reproduction non autorisée est un délit.

La première trajectoire révèle une délinquance sporadique, occasionnelle.


Dans la plupart des cas, les actes délinquants sont commis à un moment
particulier de la vie de l’individu, par exemple l’adolescence, et ne sont pas
reproduits à une autre période. La délinquance sporadique est le fait de 45 %
des adolescents et se manifeste par des délits mineurs ou des conduites que
l’on associe au processus d’adolescence. Ces adolescents sont le plus géné-
ralement attachés à leurs parents et à l’école ; ils sont insérés dans la société
dont ils reconnaissent les normes sociales. Cette délinquance d’occasion est
plutôt le résultat d’influences et d’opportunités. La plupart des adolescents

139
Les personnalités criminelles

sont à risque de devenir des délinquants d’occasion. En matière de préven-


tion, l’action habituellement préconisée est une prévention primaire, qui
concerne l’ensemble des adolescents. Elle peut se faire par des échanges au
sujet des différentes influences auxquelles ils sont soumis. Elle peut compléter
une prévention situationnelle, correspondant à une restriction matérielle
des possibilités d’infraction. Au sujet des formes de prévention (Zermatten,
2004), et de prévention situationnelle, nous renvoyons le lecteur à un
ouvrage sur la délinquance des mineurs en Europe (Blatier et Robin, 2000).
Des programmes d’éducation peuvent être mis en œuvre dans les écoles.
La sensibilisation des parents et leur implication dans les activités de leurs
adolescents permettent d’augmenter leur degré de supervision. En parallèle
sont développés des moyens de lutte contre l’accès des revendeurs de drogue
aux sorties des établissements scolaires et le démantèlement des réseaux de
trafic qui entraînent les mineurs dans la délinquance. Pour lutter contre cette
délinquance sporadique, des mesures alternatives particulièrement destinées
aux mineurs sont préconisées dans le cadre de la justice restaurative (Blatier
et Corrado, 2003 ; Blatier, Roesch et Corrado, 2007 ; Zermatten, 2004).

1.2 La délinquance transitoire


La deuxième est de type transitoire. Elle concerne, selon LeBlanc, encore
45 % des adolescents et près de la moitié des enfants passant devant le juge
pour enfants. Elle débute généralement vers 11 ans et répond à des sollici-
tations circonstancielles en vue de l’acquisition de biens ou d’un bénéfice
en termes de reconnaissance par un groupe. Certains adolescents initient
leur délinquance transitoire par des actes de type exploratoire ou d’oppo-
sition aux parents ou aux valeurs parentales vers le milieu de l’adolescence
et la terminent avec l’entrée dans la vie professionnelle et/ou une rencontre
affective durable. Toutefois, on constate depuis quelques années que cette
forme de désistance, à savoir l’arrêt des conduites délictueuses, est moins
fréquente à la majorité ou à l’entrée dans la vie active et a tendance à être
repoussée vers 24 ou 25 ans (Born, 2003 ; Moffitt et al., 2002).

1.3 La délinquance persistante


La troisième trajectoire développementale est de type persistant : la
délinquance se poursuit plus longtemps, à l’âge adulte, à travers des actes

140
L’approche développementale et la prévention ■ Chapitre 3

délictueux de plus en plus fréquents ou dont la gravité s’accroît. Le type


persistant concerne 10 % des adolescents délinquants. Deux processus
assurent le développement des conduites délinquantes transitoires et persis-
tantes. Il s’agit de l’activation et de l’aggravation (LeBlanc et Loeber, 1998).
Le processus d’activation représente l’entrée dans la délinquance de façon
relativement intense, diversifiée et avec une tendance à se répéter. La préco-
cité renforce le phénomène d’activation.

Le second processus est l’aggravation. L’enchaînement des délits est


caractérisé par une augmentation de la gravité, s’exprimant suivant cinq
stades généralement repérables :
– l’apparition,
– l’exploration,
– l’explosion,
– la conflagration,
– le débordement,

La période de latence est marquée par la possibilité d’accélération, de


stabilisation et de diversification de cette activité délinquante.

L’apparition se fait le plus souvent par de menus larcins, entre huit et


dix ans, suivis d’une aggravation des délits lorsque le jeune passe au stade
de l’exploration, généralement entre dix et douze ans, principalement par
le vol à l’étalage et le vandalisme. L’explosion traduit la variété et la gravité
des délits lorsque sont commis, vers l’âge de treize ans, des vols simples,
des désordres publics, des vols avec effraction. La conflagration signe une
forme plus grave, avec le commerce de drogue, le vol de véhicule à moteur,
le vol grave et l’attaque d’une personne. Le cinquième stade intervient le
plus souvent à l’âge adulte, avec le débordement vers des formes astucieuses
ou plus violentes.

En ce qui concerne les filles, on a identifié plusieurs types de délinquance,


en fonction du degré de leur engagement ou de leur persistance dans la
délinquance. Le premier groupe est constitué de filles présentant une délin-
quance légère ou occasionnelle, débutant vers 11 ans. Le deuxième groupe
réunit des filles dont le degré d’engagement dans la délinquance est élevé
mais transitoire ; la délinquance se développe jusque vers l’âge de 15 ans puis
décroît. Le troisième groupe rassemble celles qui sont entrées précocement
dans la délinquance et persistent en commettant un nombre important

141
Les personnalités criminelles

d’infractions. Elles présentent le plus souvent des difficultés psychologiques


et sociales. Le schéma qui définit les trois modes évolutifs des adolescents
délinquants, à savoir la délinquance occasionnelle, transitoire et persistante,
vaut donc aussi pour les adolescentes. Toutefois, ce modèle général prend
des formes différentes pour les filles, tant au niveau de l’âge que des facteurs
qui renforcent la délinquance ou la font décroître (Loeber et Farrington,
2012). Loeber et Loeber retiennent les deux types principaux de délinquants,
qu’ils dénomment les expérimenteurs et les persistants, ce qui revient aux
transitoires et aux persistants précédemment décrits.

2. Les facteurs de risque délinquant


La notion de risque délinquant représente la possibilité ou la probabilité de
s’engager dans la délinquance. L’étude des facteurs de risque vise à établir une
représentation des caractéristiques pouvant s’associer et représenter pour un
sujet donné une vulnérabilité face à un risque. L’évaluation du risque permet
une meilleure organisation des réponses et des politiques médico-­sociales
(Blatier, 2002). Elle passe par l’identification de personnes de la population
susceptibles de se trouver dans une situation personnelle ou psychosociale
difficile qui les affaiblisse, même temporairement, au point d’augmenter
ce risque. Elle rend possible la mise en œuvre de mesures adaptées et de
procédures de prévention primaire, qui se révèlent moins coûteuses finan-
cièrement et humainement que la prise en charge de personnes directement
touchées par le problème. La notion de « groupes à risque », pour être très
souvent reprise, n’en est pas moins essentielle dans une approche indivi-
duelle et sociale. Appliquée à la délinquance, la question apparaît cruciale,
car on sait identifier un certain nombre de facteurs susceptibles de favo-
riser l’apparition d’un comportement délinquant chez un mineur. Certaines
personnes ne sont pas favorables à une démarche qui consisterait à repérer
des enfants et à les identifier comme de possibles délinquants ultérieurs.
Nous sommes assez en accord avec ce point de vue car, si le processus est
mal conçu et mal géré, il peut constituer une forme de stigmatisation. En
revanche, il est possible de repérer certaines difficultés et de lutter contre
l’émergence de troubles de nature psychopathologique, afin de prévenir
non pas la délinquance mais un grand nombre de difficultés ultérieures. On
connaît par exemple des troubles préexistant régulièrement à l’apparition de
la délinquance des adolescents. Ainsi, « les jeunes déprimés, en particulier

142
L’approche développementale et la prévention ■ Chapitre 3

les femmes, peuvent développer un manque d’appréciation ou d’intérêt pour


les conséquences de leurs comportements, ce qui augmente par la suite leur
prise de risque et la probabilité d’implication dans des actes délinquants.
La dépression peut aussi mener au retrait des activités sociales, ce qui peut
entraîner un sentiment de rejet par les pairs et des attachements prosociaux
affaiblis, entraînant une attirance pour les groupes antisociaux et le compor-
tement délinquant » (Bauer, Chesin et Jeglic, 2013).

Il convient dès lors de ne pas fermer les yeux et de travailler à une préven-
tion générale, de même qu’on lutterait contre l’apparition d’une surdité ou
d’un trouble visuel chez l’enfant dès le plus jeune âge. On pourrait concevoir
une prévention de la délinquance, y compris chez les jeunes enfants, mais
elle ne saurait être ciblée sur ce seul trouble. Il faut considérer ces symp-
tômes comme une émergence de difficultés qui pourraient être atténuées,
par exemple avec une intervention préventive destinée à toute une tranche
d’âge. Nous avons développé l’intérêt d’une prévention très large de toutes
les difficultés psychopathologiques et des troubles du développement dans
un ouvrage sur la prévention de la délinquance dès la petite enfance (Blatier,
2006). En matière de délinquance des mineurs, on peut citer les principaux
éléments de vulnérabilité à l’apparition d’un comportement délinquant :
quels que soient les pays, la délinquance répertoriée par les services judi-
ciaires est un fait majoritairement masculin, dépassant le plus souvent 90 %.
Les études de délinquance autorévélée menées auprès de jeunes lycéens ou
de collégiens atténuent très légèrement cet effet : les filles reconnaissent aussi
être les auteurs de certains vols, mais la proportion reste moindre que pour
les garçons. Différents facteurs de risque interviennent au niveau individuel,
familial et communautaire. Les travaux de Glowacz et Bourguignon (2015)
soulignent également « l’importance d’intégrer la variable pubertaire dans
les recherches sur la délinquance juvénile et au niveau de l’intervention ».

Si l’on choisit de réaliser une délinquance ciblée, on peut intégrer les


conclusions de la méta-­analyse réalisée à partir de 39 études concernant
9 084 jeunes délinquants à risque de persistance, âgés de 6 à 20 ans. Elles
indiquent l’intérêt de réaliser des programmes basés sur le comportement,
fondés sur le développement des compétences parentales, et travaillant
directement des changements comportementaux au sein de sa famille
plutôt qu’individuellement ou en groupe. Ces programmes ont ainsi réussi
à s’adapter au niveau de risque de délinquance, permettant d’en limiter les
effets (De Vries et al., 2015).

143
Les personnalités criminelles

La recherche en psychopathologie du développement a construit un


modèle conceptuel qui identifie des facteurs de risque concernant les
troubles affectifs et du comportement. Le risque est d’autant plus élevé
que les facteurs de risque sont nombreux, que l’exposition est plus forte et
touche différents domaines de la vie. Les facteurs de risque suivants ont été
reconnus comme prédicteurs statistiques des troubles du comportement
de type délinquant.

2.1 La précocité dans la délinquance


Plus l’individu s’engage dans une activité délictueuse à un âge précoce,
plus la probabilité est grande de le voir s’engager dans une démarche
d’habitude. La précocité du comportement délinquant engendre un taux
plus élevé de délits. Il s’agit notamment de menus larcins, de vols à l’éta-
lage et de vandalisme apparaissant entre 6 et 9 ans. Par ailleurs, plus la
première condamnation survient tôt, plus la probabilité de récidive est forte.
Au contraire, l’absence de précocité entraînerait une faible productivité
(Fréchette et LeBlanc, 1987). Dishion et Loeber (1985) repèrent que l’entrée
dans la délinquance grave se fait chez des adolescents qui avaient présenté
des comportements d’opposition au cours de la petite enfance.

2.2 L’ampleur du phénomène à son origine


Si le comportement antisocial avant 12 ans a concerné plus d’un cadre
de vie (maison, école ou rue), il a plus de risque de s’installer durablement.
Près d’un tiers des enfants qui montraient un comportement délinquant
dans deux cadres de vie ont été en contact à l’adolescence avec la police,
contrairement à ceux dont le comportement antisocial se confinait à la
maison (Moffitt, 2007 ; Raine et al., 2005 ; Reid et al., 1982). De plus, parmi
des enfants identifiés comme voleurs réguliers par un parent, 14 % sont
devenus récidivistes. Parmi ceux qui avaient été repérés comme voleurs
par un enseignant, 45 % ont été récidivistes ; l’identification conjointe par
le parent et l’enseignant est un facteur de plus grande prédiction puisque
71 % des enfants identifiés comme voleurs à la maison et à l’école ont réci-
divé plus tard.

144
L’approche développementale et la prévention ■ Chapitre 3

2.3 Les éléments de personnalité et de relation aux autres


Des études rétrospectives ont porté sur le passé des adolescents. Elles
ont relié le comportement délinquant d’adolescents à des manifestations
comportementales évaluées par leurs enseignants lorsqu’ils étaient à l’école
maternelle (Tremblay, Haapasalo et Pulkkinen, 1991). Les garçons les
plus à risque étaient décrits à la maternelle comme hyperactifs-­impulsifs,
fortement orientés vers la recherche de nouveauté, peu sensibles aux
récompenses sociales et peu enclins à éviter les situations dangereuses.
Les mêmes chercheurs ont également mis en rapport les comportements
délinquants des adolescents avec les pratiques éducatives parentales. Ils
se sont intéressés aux enfants de cinq ans hyperactifs-­impulsifs, évitant
peu les situations dangereuses, ainsi qu’aux propos des mères aux dix ans
de leur enfant. Les éléments les plus importants liés à la délinquance ulté-
rieure sont le caractère hyperactif-­impulsif de l’enfant et son attitude peu
encline à éviter les situations dangereuses. Plusieurs études ont montré un
lien entre hyperactivité et comportement délinquant ultérieur. Il semble
difficile de dire dans quelle mesure l’hyperactivité est par elle-­même un
prédicteur de la délinquance, car les liens ne semblent pas totalement
établis, mais on sait que les enfants hyperactifs qui sont devenus délin-
quants étaient aussi bien souvent des enfants agressifs (Farrington, Loeber
et Van Kammen, 1990). Près d’un tiers (32 %) des enfants reconnus comme
hyperactifs à la maison et présentant des problèmes de conduite à l’école
ont montré des troubles du comportement marqués quatre ans plus tôt
que ceux qui présentaient ces difficultés dans un seul cadre de vie, c’est-­
à‑dire uniquement à la maison ou uniquement à l’école par exemple. On
sait aussi que le lien entre le fait d’avoir été maltraité (abus physique ou
négligence) et le fait de développer un comportement délinquant, d’avoir
des amis déviants et de consommer des substances et de s’associer à des
pairs déviants est d’autant plus important que le jeune a peu de self-­control
(Kort-­Butler et al., 2011).

Parmi les éléments de personnalité et de relation aux autres, les facteurs


de risque les plus fortement et fréquemment associés à la délinquance sont
l’agressivité précoce et l’association avec un groupe de pairs délinquants.
Certains considèrent que la stabilité du délinquant précocement agressif est
très forte et serait prédictrice de délinquance future (Moffitt, 1993, 2006 ;
Olweus, 1979), d’autant plus si elle s’accompagne de fréquentation de pairs
délinquants (Loeber et Farrington, 2012).

145
Les personnalités criminelles

Gimenez et Blatier (2004), répliquant l’étude de Tremblay et al. (1999) sur une popula-
tion française de 100 femmes évaluant les comportements de leur enfant de 17 mois,
ont montré que près de 90 % des enfants étudiés de cet âge manifestaient ou
avaient manifesté au moins l’un des comportements identifiés comme agressifs
pour cet âge. Les comportements agressifs sont donc présents très tôt. La majorité
des enfants apprennent à ne plus manifester ces conduites entre un et trois ans.
Il semble donc qu’il existe une période sensible pour apprendre à l’enfant à inhiber
ces comportements agressifs.
Des recherches ont été réalisées en vue d’identifier des marqueurs précoces,
y compris biologiques, qui seraient liés à une délinquance ultérieure. Ainsi, en exami-
nant la fréquence cardiaque de 1 795 enfants de trois ans au tempérament et au
comportement désinhibés, des chercheurs ont mis en évidence une faible réactivité
du système nerveux autonome, mesurée par une fréquence cardiaque et par une
conductance électrodermale peu élevées (Raine et al., 1997, 2003 ; Scarpra et Raine,
2007). Ces mêmes enfants ont été suivis jusqu’à l’âge de onze ans. Les résultats
montrent que l’agressivité forte à onze ans est corrélée à une fréquence cardiaque
faible à l’âge de trois ans. Or, ce caractère réactif est considéré comme un facteur
de risque de délinquance juvénile ou de conduites agressives à l’âge adulte. Selon
les auteurs, cet index biologique pourrait servir de marqueur précoce d’un compor-
tement agressif ultérieur (Combalbert et al., 2002).

Il est certain que ce genre d’argument est discutable tant qu’il n’est pas
largement confirmé. En effet, les urgences des chercheurs et celles des
politiques ne sont pas les mêmes. Là où certains souhaiteraient prendre
le temps d’affiner des premiers résultats, d’autres pourraient estimer que
ceux-­ci, même en l’attente de confirmation, pourraient se révéler utiles
sur le terrain. Or, avant de se montrer aussi affirmatif, il serait prudent de
procéder à plusieurs études sérieuses sur une population européenne. La
recherche française a encore besoin de développer des études d’envergure
pour analyser la délinquance des mineurs et vérifier si les modèles existants,
qui sont reconnus comme étant opérants pour d’autres populations, valent
aussi pour la délinquance en Europe.

2.4 L’influence des pairs


Elle est déterminante dans l’ampleur que peut prendre le comportement
délinquant. Les pairs délinquants ont plus d’influence que les pairs d’in-
fluence positive, ce qui amène certains jeunes à participer à des bandes ou
à des gangs. L’attachement aux pairs délinquants a été plus particulièrement
relié à la délinquance des 13-15 ans. Ce facteur est le premier à peser dans

146
L’approche développementale et la prévention ■ Chapitre 3

l’adoption des conduites délinquantes, suivi du facteur de la réaction sociale


négative. Pour les éléments concernant la vie en société, le risque vient
des mauvais résultats scolaires et/ou du manque d’intérêt pour l’école, de
l’association avec des pairs délinquants et du fait de vivre dans un quartier
ayant de graves problèmes (Bergheul et LeBlanc, 2005), de la forte concen-
tration d’adultes impliqués dans une activité criminelle, et enfin de la facilité
à obtenir de la drogue (Loeber et Farrington, 2012).

2.5 Les facteurs familiaux


Le risque d’engagement dans la délinquance tient au rapport parents-­
enfants et surtout à la qualité de la supervision parentale, considérée
comme la capacité des parents à surveiller leur enfant et ses sorties, ainsi
qu’à la discipline en vigueur à la maison. Les parents des mineurs délin-
quants montrent souvent un défaut de supervision parentale ou bien
exercent une discipline trop sévère ou inconstante. La discipline est carac-
térisée selon l’intensité et la fréquence des manifestations, physiques ou
non, de désapprobation parentale à certains comportements de l’enfant. Le
manque de supervision et une discipline sévère ou irrégulière sont corrélés
avec la délinquance révélée comme officielle. Ces éléments sont claire-
ment identifiés dans les travaux de plusieurs chercheurs comme Marc
LeBlanc, qui ont établi une véritable modélisation de l’engagement dans
la délinquance (LeBlanc et LeBlanc, 2014). Un comportement coercitif
ou hostile des parents, leur abus ou leur négligence et les effets produits
par ces comportements demeurent les principaux facteurs de risque une
fois les facteurs socio-­économiques et familiaux statistiquement contrôlés
(English et al., 2002 ; Hawkins et al., 1998 ; Maxfield et Widom, 1996 ;
Widom, 2014). Ces comportements de supervision parentale se révèlent
donc être parmi les meilleurs prédicteurs du comportement antisocial
futur. D’autres facteurs familiaux peuvent constituer des éléments de
risque pour la délinquance des mineurs, mais dans une moindre mesure :
la dépression de la mère, la violence physique, la négligence, l’exposition
précoce à un comportement violent, la consommation de drogue et l’acti-
vité criminelle dans la famille.

147
Les personnalités criminelles

2.6 La faiblesse des mécanismes de régulation de la conduite


On peut également considérer que la délinquance émerge et se déve-
loppe à la faveur de la faiblesse des mécanismes de régulation de la
conduite. Selon LeBlanc (2006), les mécanismes de régulation de l’activité
délinquante reposent sur les liens que l’individu noue avec la société et
ses membres, le niveau d’allocentrisme de l’individu, la contrainte exercée
par les institutions sociales et le degré d’exposition aux opportunités
sociales. Le développement de l’être humain est destiné à l’allocentrisme,
mécanisme de régulation reposant sur la disposition à s’intéresser aux
autres pour eux-­m êmes. À l’inverse, le délinquant fait dépendre ses
rapports aux autres de son propre intérêt. En principe, l’égocentrisme
naturel s’atténue au fur et à mesure que faiblissent la primitivité et des
facteurs qui isolent l’adolescent des autres. Les exigences sociales relatives
à son âge sont alors mieux acceptées. LeBlanc repère huit dimensions
structurales de la personnalité égocentrique qui soutiennent l’activité
délinquante : la primitivité, la dyssocialité, la vindicativité, l’alloplastie,
l’irréalisme, le scepticisme, la vulnérabilité émotionnelle et la dérobade
face aux affects. Ces dimensions rendent compte du degré d’allocentrisme
atteint par un individu. Lorsqu’elles sont positives, elles constituent
des éléments protecteurs vis-­à‑vis de l’engagement dans une activité
délinquante.

Un autre mécanisme de régulation émanant de la société repose sur


les contraintes sociales. Il s’agit des remarques que la famille ou les amis
adressent à l’enfant, mais aussi des normes et règles dont le non-­respect
pourrait entraîner des sanctions. Le processus général de socialisation des
enfants favorise l’internalisation des conduites. L’exposition aux influences
et aux opportunités prosociales est bien connue depuis les travaux de
Sutherland sur l’association différentielle. Les influences déviantes et les
opportunités criminelles ont un impact fort si elles sont associées à la
fréquentation de pairs délinquants ou à la vie dans un milieu à tendance
délinquante. Si le niveau de relation et d’allocentrisme n’est pas suffi-
sant, il ne permet guère le choix de modèles prosociaux et l’acceptation
de contraintes sociales. La perspective développementale retient quatre
éléments principaux sur lesquels doit porter l’attention :
– un développement social compromis, qui a pour conséquence le déploie-
ment de relations pauvres ou insatisfaisantes ainsi qu’une difficulté
à résoudre les problèmes sociaux ;

148
L’approche développementale et la prévention ■ Chapitre 3

– un apprentissage qui prouve au mineur que l’activité délinquante procure


un sentiment de domination sur les autres, notamment lorsqu’elle s’ac-
compagne de violence ;
– un relatif échec dans le développement des liens sociaux, et donc un
manque de perception des contraintes sociales et d’habiletés relatives
à tous les comportements qui pourraient causer du tort à d’autres
personnes ;
– une supervision inadéquate, qui rend plus aisée l’agrégation du jeune à un
gang. L’intégration dans un groupe de pairs délinquants facilite l’engage-
ment dans la délinquance ainsi que la fréquence de la commission d’actes
délictueux. En outre, elle engage le comportement délinquant sur un
plus long terme. L’ensemble du système de régulation est en constante
évolution, ce qui signifie que l’adolescent qui n’est pas encore entré dans
la délinquance est toujours susceptible de s’y engager.

3. Les facteurs de persistance de l’activité délinquante


et violente et la désistance

Les délinquants qui poursuivent leur activité à la fin de l’adolescence et


parfois jusqu’à l’âge adulte sont dits persistants. Nous avons signalé que
plusieurs auteurs avaient défini des typologies de délinquants fondées sur les
catégories pénales (délits ou crimes, contre les biens ou les personnes, etc.).
Nous avons préféré ici celle de Fréchette et LeBlanc (1987), qui intègre à la
fois le moment d’entrée dans la délinquance, son importance, sa gravité et
son degré de persistance. Elle retient les catégories déjà repérées (délin-
quance sporadique et transitoire) et considère deux formes de délinquance
persistante : l’une intermédiaire, l’autre grave. La délinquance persistante
dite intermédiaire, de gravité moyenne, se poursuit sur différentes périodes
de la vie d’un individu (par exemple l’adolescence et l’âge adulte). La répéti-
tion d’actes de délinquance n’implique pas nécessairement une aggravation
ou une tendance à la violence. La délinquance persistante grave se caractérise
par l’importance des actes commis, et a généralement commencé pendant
l’enfance ou l’adolescence. Parmi les facteurs de risque de récidive, outre les
antécédents criminels, le contact régulier avec des pairs délinquants et une
attitude favorable aux activités délinquantes sont particulièrement repérés
(Bonta et Andrews, 2007).

149
Les personnalités criminelles

LeBlanc et Girard (1997) ont montré que quatre formes de conduites


marginales étaient classiquement présentes avant 11 ans, et se succédaient
comme suit : la rébellion à l’école, la rébellion dans la famille, les vols
mineurs, puis les agressions.

3.1 La séquence développementale


des comportements délinquants et violents
En se fondant sur l’âge moyen d’apparition de ces comportements, LeBlanc
repère les premières manifestations de rébellion familiale, les premières
bagarres, les premiers gestes de rébellion familiale et les premiers larcins.
Ensuite, à la fin de la 11e année, c’est le temps des agressions impulsives,
suivies d’autres conduites marginales telles que du vandalisme. Au cours
de la 13e année, les adolescents commencent à pratiquer des agressions
à l’aide d’une arme et à s’affilier à un gang ou à une bande marginale, qui les
conduisent à des vols plus graves et à la consommation de drogues douces.
À la fin de la 13e année et au cours de la 14e, ce sont des agressions avec inti-
midation qui apparaissent en même temps que les vols graves et les relations
sexuelles. Vers la fin de la 14e et le début de la 15e année surviennent les
agressions les plus graves et le début de la consommation des drogues (dures
et chimiques). Au cours de la 15e année, l’adolescent(e) délinquant(e) peut
être amené à voler une automobile, à vendre de la drogue ou à se prostituer.

La connaissance de cette séquence développementale des comporte-


ments délinquants et violents incite à la recherche de moyens de prévention
précoces.

Parmi ces facteurs viennent ensuite les comportements agressifs et


l’ethnicité, puis les caractéristiques psychologiques, les relations entre les
parents et l’enfant, les liens sociaux, les problèmes de conduite, l’expérience
scolaire, la santé, le quotient intellectuel ainsi que d’autres caractéristiques
de la famille. Finalement, les prédicteurs les moins influents sont un foyer
brisé, des parents abuseurs et des pairs antisociaux. Avec l’âge, la réussite
scolaire, les caractéristiques psychologiques, les relations parent-­enfant
gagnent énormément en importance (Proulx, Cusson et Ouimet, 2000).

À partir de critères très larges, Farrington (1989 ; Farrington et Loeber,


1995) s’est également intéressé à la mise en évidence des antécédents des

150
L’approche développementale et la prévention ■ Chapitre 3

comportements violents, qu’il repère à partir des indices suivants, dans


l’ordre d’importance de la contribution à leur corrélation multiple.

Concernant les antécédents de violence, la méta-­analyse de Lipsey et Derzon (1998)


est intéressante puisqu’elle rassemble 66 rapports de recherche et 34 études indé-
pendantes analysant 793 effets d’indices sur la conduite violente des individus entre
15 et 25 ans. Les chercheurs ont étudié les prédicteurs de la délinquance sérieuse
et violente auprès d’enfants et d’adolescents de 6 à 11 ans et de 12 à 14 ans. Pour
les premiers, un délit commis entre 6 et 11 ans est le meilleur prédicteur d’une délin-
quance sérieuse et violente ultérieure comme de l’abus de substances toxiques.
Pour le groupe des 12-14 ans, ce prédicteur passe en seconde position tandis que
le manque de soutien social et l’engagement avec des pairs antisociaux viennent
en première position.
Les indices les plus significatifs, mesurés entre 6 et 11 ans sont, par ordre d’impact :
–– les autres conduites délinquantes ;
–– la consommation de drogues illicites ;
–– le fait d’être un garçon (les filles sont moins concernées) ;
–– le statut socio-­économique faible de la famille ;
–– le fait d’avoir des parents antisociaux.

‡‡ Pour la violence physique entre 12 et 14 ans :

– une conduite turbulente entre 8 et 10 ans ;


– de faibles résultats scolaires à 11 ans ;
– la fréquentation d’une école où le taux de délinquance est élevé à 11 ans ;
– le fait d’être nerveux et isolé à 8-10 ans ;
– un quotient intellectuel verbal faible à 8-10 ans ;
– la présence de problèmes de discipline à 8-10 ans.

‡‡ Pour les comportements violents entre 16 et 18 ans,


les prédicteurs reposent sur le fait de :

– manifester une délinquance élevée à 14 ans ;


– avoir ses premières relations sexuelles avant 14 ans ;
– avoir quitté l’école à 15 ans ;
– obtenir un résultat élevé d’agressivité à 12-14 ans ;
– vivre dans un logement détérioré à 8-10 ans ;
– être plus grand que la moyenne à 8-10 ans.

151
Les personnalités criminelles

‡‡ La violence présente à l’âge de 18 ans est liée à :

– une attitude antisociale à 18 ans ;


– une absence d’implication du père dans les activités de l’adolescent ;
– un manque d’économies à 18 ans ;
– un haut niveau de délinquance révélée à 18 ans ;
– des revenus familiaux faibles au milieu de l’adolescence ;
– la participation à de la violence exprimée en groupe à 18 ans ;
– un comportement de défi déjà présent à l’âge de 8-10 ans.

3.2 Les indices de gravité et de persistance


En s’appuyant sur des facteurs prédicteurs recueillis tous les deux ans
entre 8 et 18 ans, Farrington arrive à la conclusion selon laquelle les meil-
leurs prédicteurs de la violence interpersonnelle entre 16 et 18 ans sont
repérables au cours de la première partie de l’adolescence, entre 12 et 14 ans.
De même, les prédicteurs de la délinquance violente officielle après 18 ans
sont repérables dans la deuxième moitié de l’adolescence, les variables de
la première moitié de l’adolescence n’ajoutant rien à la prédiction.

On constate dans les travaux de prédiction de la délinquance et de la


violence interpersonnelle que le plus fort prédicteur est le comportement
marginal antérieur, avant toute variable du milieu social ou toute caractéris-
tique personnelle ( Loeber et Farrington, 2012). Il apparaît donc important
de considérer la phase précédant tout juste l’apparition des comporte-
ments délinquants ou violents pour apprécier le risque de poursuite de
cette activité.

De plus en plus, on considère que la délinquance sérieuse et persistante


trouve ses racines dans la petite enfance. On repère des différences dans
l’impulsivité, les compétences sociales, les sentiments à l’égard des autres
enfants. Le plus grand facteur de rejet par les pairs dans les écoles est
l’agressivité. L’étude longitudinale réalisée auprès des enfants et adolescents
associant une faible motivation pour l’école et des problèmes de conduites
agressives montre pour Loeber que l’agressivité enfantine est le meilleur
prédicteur des comportements délinquants à l’adolescence. Selon une étude
française, l’agressivité serait le trait le plus discriminant, ainsi que l’hyperac-
tivité, mais de façon moins nette. Un taux élevé de comportements hostiles

152
L’approche développementale et la prévention ■ Chapitre 3

et perturbateurs en bas âge constituerait un élément prédictif de problèmes


d’inadaptation psychosociale à l’adolescence.

Il existe un continuum allant des conduites agressives aux délits avec


violence. Loeber avance l’idée de deux voies vers la délinquance grave, l’une
impliquant des conduites agressives (conduites agressives mineures suivies
de bagarres et de crimes contre les personnes), l’autre n’incluant pas de
comportements violents mais des comportements de plus en plus sérieux
contre les biens.

LeBlanc (1999) a calculé l’âge moyen du début de seize comportements violents


entre 10,5 ans (se battre à coups de poing) et 15 ans (agression sexuelle). Voici
les quatorze autres comportements violents : agresser un membre de sa fratrie
(moyenne de 11,9 ans), se fâcher et frapper (12,1), être bousculé et chercher à se battre
(13,3), accuser les autres d’avoir commencé la dispute (13,3), lancer des objets à des
personnes (13,3), utiliser la force physique pour dominer (13,4), porter une arme (13,8),
utiliser une arme pour se battre (13,9), encourager d’autres à s’en prendre à quelqu’un
(13,9), se battre en groupe (14), menacer pour imposer à une personne des gestes
qu’elle ne veut pas faire (14,2), battre quelqu’un qui n’a rien fait à l’agresseur (14,2),
menacer et malmener pour avoir ce que l’on veut (14,3), et agresser physiquement un
parent (14,7). Cette séquence comportementale évolue nettement vers les compor-
tements les plus graves.

Plusieurs études montrent que les délinquants persistants sont nombreux


à avoir des difficultés scolaires, à s’absenter de l’école, à consommer diverses
drogues ou à associer drogue et alcool (Loeber et Farrington, 2012). Pourtant,
il est difficile de dire ce qui a été premier, de la consommation de drogue ou
de la délinquance. L’agressivité, la consommation de drogue, la commission
d’un acte délinquant grave avant l’âge de 17 ans restent actuellement de
plus grands prédicteurs de persistance que l’absentéisme scolaire. Parmi les
variables liées aux interactions parents-­enfants, les travaux des chercheurs
et notamment de LeBlanc l’indiquent : la supervision parentale en termes de
manque de surveillance ou de surveillance inadaptée est le meilleur prédic-
teur de persistance, plus encore que le peu d’engagement des parents, leur
éventuel rejet de l’enfant, ou encore une discipline inadaptée. Le caractère
antisocial des parents, qui n’est pas nécessairement suivi de condamnations
judiciaires, est un fort prédicteur de conduites persistantes des enfants, et
ce, jusqu’à l’âge adulte (Lahey et al., 1995, 2005). Par ailleurs, les parents des
délinquants judiciarisés pouvaient établir des règles mais avaient des diffi-
cultés à les imposer. Le lien entre les pratiques éducatives et la délinquance

153
Les personnalités criminelles

est médiatisé par le caractère de l’adolescent et la façon dont il réagit habi-


tuellement : opposition, taquinerie, égoïsme, brutalité, vantardise, bagarre,
irresponsabilité. Si le statut socio-­économique n’est pas en lui-­même un
facteur de délinquance persistante, les classes sociales les plus faibles sont
plus représentées dans ce groupe. Finalement, les problèmes de conduite
précoces tels qu’une agressivité, un absentéisme, une consommation de
drogue, des problèmes de supervision parentale et un caractère antisocial
des parents prédisent la délinquance générale mais aussi la délinquance
persistante, quels que soient les pays et dans les deux sexes.

Il existe quelques études de grande ampleur permettant d’avancer des


conclusions solides sur le devenir des délinquants. Il s’agit en grande partie
des études de Farrington, que nous évoquerons au chapitre suivant.

En outre, Tracy, Wolfgang et Figlio (1986, 1990) ont reproduit une recherche longi-
tudinale du même type que celle que Wolfgang et al. avaient réalisée. Ils se sont
intéressés cette fois à une cohorte de naissance de près de 28 000 garçons et filles
nés à Philadelphie. West et Farrington ont poursuivi avec 411 garçons (Farrington et
West, 1990), tandis qu’Eliott et Huizinga étudiaient près de 1 700 jeunes Américains
à partir de mesures de délinquance autorapportée. Un index a été établi pour indiquer
les scores élevés avec une histoire de criminalité chez les parents et les frères et
sœurs naturels. Farrington et West ont identifié 51 % de ceux qui étaient devenus
persistants et 5 % comme étant à risque. Cependant 49 % n’ont pas été identifiés
par cet index (faux négatifs ; en épidémiologie, ce sont les individus atteints par la
maladie mais chez lesquels les signes ne sont pas repérés par les mesures utilisées.
Il s’agit ici des jeunes délinquants persistants qui n’ont pas été repérés comme tels
par l’index) et la moitié de ceux qui étaient prédits comme étant à risque ne sont
pas devenus récidivistes (faux positifs ; en épidémiologie, ce sont les individus qui
présentent des signes mais qui pourtant ne sont pas atteints par la maladie. Il
s’agit ici des jeunes délinquants qui selon les prédictions devaient être récidivistes
et ne l’ont pas été). Rappelons que les faux négatifs sont ici des jeunes déclarés
non délinquants alors qu’ils le sont, et les faux positifs sont des jeunes déclarés
délinquants et à risque de récidive, mais qui n’ont pas récidivé.
Bien évidemment, de tels résultats se rencontrent dans des études de prédiction
de la délinquance. Signalons simplement que Farrington et West (1990) ont repéré
que les faux positifs qui avaient vécu des difficultés familiales précoces avaient
tendance à l’âge adulte à être sans emploi, socialement isolés et à vivre dans un
état de pauvreté. Il existe assez peu d’études longitudinales sur des délinquants
ayant commencé tôt leur carrière criminelle. Farrington et West, à l’issue d’une étude
de ce type, ont montré que l’activité délinquante dominée par le vol ne rendait pas
compte de l’ensemble de l’activité délinquante d’un individu. Des critères tels que
’

154
L’approche développementale et la prévention ■ Chapitre 3

’
des tatouages, des attitudes hostiles, des amis antisociaux, une conduite en état
d’ivresse, une instabilité dans les emplois occupés, une consommation élevée de
cigarettes, une consommation régulière de drogue, ou des jeux d’argent, ont été
identifiés comme des facteurs caractéristiques chez des adultes de 32 ans, délin-
quants persistants.

3.3 La désistance
Il existe plusieurs modèles concernant la désistance (McNeill, 2006) en
fonction des facteurs individuels ou du milieu (Glowacz et Born, 2017).
La sortie de la délinquance est considérée comme un processus qui n’est
pas forcément linéaire. Il peut se décliner en une désistance primaire
correspondant à une limitation des actes délictueux, et en une désistance
secondaire, qui signe un ancrage plus important dans une forme de vie
qui n’intègre plus la délinquance, avec une certaine modification dans la
personnalité. Si certains ont vu la désistance comme résultant d’une inte-
raction entre facteurs individuels, processus cognitif et influence sociale
(Laub et Sampson, 2001), c’est que des recherches ont été réalisées dans
ces trois domaines majeurs et que leurs effets cumulatifs ont été étudiés.
Les facteurs principaux de désistance qui peuvent aussi être dans certains
cas des facteurs de protection pour ceux qui ne sont pas délinquants sont la
maturité de la personne, les événements positifs tels qu’une relation amou-
reuse, la naissance d’un enfant, un environnement stable, mais aussi une
meilleure aptitude à gérer les émotions et à s’intégrer avec des pairs non
délinquants, personnellement et professionnellement. Afin de faire avancer
la question de la désistance, Farrington (2007) suggère que les recherches
portent encore plus sur la situation des criminels et pas uniquement des
délinquants, à savoir des personnes qui ont des antécédents importants
d’infractions criminelles.

Ces notions servent de base à de nombreux travaux de recherche et


permettent d’analyser les facteurs de risque et les facteurs de protection.
Parmi les facteurs de protection, on peut citer les caractéristiques person-
nelles telles qu’une certaine compréhension des situations, une adaptabilité,
une empathie, un contrôle de soi, mais aussi des facteurs motivationnels
tels que le fait d’avoir un but dans la vie, de penser pouvoir l’atteindre, et
avoir un bon réseau social (De Vogel et al., 2011).

155
Les personnalités criminelles

Dès lors, il convient de se demander si l’on pourrait prévoir et éviter


l’adoption d’une conduite délinquante.

4. La prédiction des comportements antisociaux


dans les études longitudinales

Un certain nombre d’études ont été réalisées de façon longitudinale pour


observer l’évolution des enfants et adolescents présentant des conduites
antisociales. Nous en citerons ici quelques-­unes. Ces études représentent
un travail considérable car il faut non seulement éviter les « perdus de
vue » mais aussi s’assurer que toutes les personnes acceptent de témoigner
quelques années après le début de la recherche, parfois jusqu’à l’âge de
40 ans (Tremblay, 2006).

La Cambridge Study s’est intéressée à 411 enfants de la banlieue londonienne,


suivis de l’âge de 8 ans à 32 ans. Elle a mis en évidence différents facteurs liés
à la commission d’actes délictueux, notamment le fait d’avoir été : évalué comme
enfant téméraire par ses parents ou enfant difficile à l’école, avoir eu un faible
niveau de scolarisation, avoir des parents séparés, un logement inadéquat, un parent
condamné pour délit criminel (Farrington et al., 1990).
Joan McCord, à partir de la Somerville Youth Study, a montré auprès de 201 jeunes
de 9 ans à 40 ans que les variables les plus prédictrices de la délinquance à l’âge
adulte étaient l’affection de la mère, la supervision, les conflits parentaux (expliquant
30 à 32 % de la variance), et que l’absence du père n’était pas prédictrice. Dans le
cadre de la Pittsburgh Youth Study les chercheurs ont mis en évidence plusieurs
évolutions possibles vers la délinquance (Loeber, Keenan et Zhang, 1997) : dans la
première, des conflits avec l’autorité sont présents avant 12 ans, caractérisés par
de l’obstination, de la défiance et de l’évitement. Dans la deuxième, des actes délin-
quants mineurs restent cachés, incluant du vandalisme et se terminant par une
délinquance modérée ou forte. Dans la troisième forme d’évolution, un comportement
d’agression manifeste débute par des agressions mineures, des batailles, puis se
poursuit avec de la violence (vol avec violence, viol). Les jeunes présentant des
troubles du comportement persistant sont plus susceptibles d’être engagés dans
deux ou trois de ces cheminements, à un degré déjà avancé. Il apparaît bien souvent
que ces comportements sont repérables avant l’âge de 5 ans et se retrouvent
à l’adolescence (Moffitt et al., 1995).
’

156
L’approche développementale et la prévention ■ Chapitre 3

’
Pulkkinen (2004) a travaillé sur un échantillon de 369 jeunes suivis de l’âge de 8 ans
à l’âge de 42 ans, en étudiant l’agression évaluée par les pairs et les inquiétudes
de l’enseignant : ces deux éléments semblent prédire les condamnations à l’âge
adulte pour les hommes. Sampson et Laub (1993) ont réexaminé les statistiques
des Glueck (1950) qui comparaient 500 jeunes délinquants à 500 non-­délinquants.
Ils ont montré en analyse transversale que les facteurs familiaux (relation parent-­
enfant, supervision, attachement et pratiques disciplinaires) expliquaient la plus
grande part de variance, plus encore que les tendances antisociales précoces. En
analyse longitudinale, les variables familiales, considérées après l’âge de 14 ans, ne
jouent pas selon eux un rôle majeur dans la criminalité adulte, mais elles peuvent
jouer un rôle avant 14 ans.
Dans le cadre du Metropolitan Project, Kratzer et Hodgins (1999) ont montré que les
délinquants persistants étaient plus nombreux que les autres délinquants à avoir
présenté des troubles du comportement avant l’âge de 12 ans. Une autre étude
réalisée par LeBlanc (1992) auprès d’adolescents de Montréal, à partir d’un échantillon
initial de 1 611 garçons de 12 à 16 ans, puis d’un sous-­échantillon aléatoire de 458
d’entre eux, 2 et 14 ans plus tard, a permis de montrer la trajectoire délinquante de
certains d’entre eux. Certaines variables constituent des indices de prédiction de
la criminalité : la performance scolaire, l’attachement aux parents, la délinquance
à l’adolescence.

Ces études montrent que des conditions socio-­économiques et un statut


familial difficile complexifient l’attachement de l’enfant au milieu familial et
l’investissement scolaire. Les résultats scolaires ne sont pas excellents, de même
que les rapports parents-­enfants en termes de supervision et de pratiques
éducatives inadaptées (manque ou excès d’intervention, ou bien encore
interventions incohérentes). Ces éléments se renforcent les uns les autres.

Parmi les exemples de programmes qui ont révélé une certaine efficacité, nous
pouvons évoquer avec Tremblay (2006) l’expérience de Weikart, psychologue
qui a travaillé avec des jeunes enfants sur le développement de leurs fonctions
exécutives en planifiant leurs activités et en rendant compte régulièrement à leur
éducateur des tâches accomplies parmi celles dont la réalisation était souhaitée, etc.
Le programme a duré deux ans pendant lesquels les enfants ont été pris en charge
à l’école maternelle deux heures et demie par jour, par petits groupes de 5 ou
6 enfants. L’après-­midi des éducateurs était consacré à des visites des parents pour
leur communiquer les stratégies éducatives apprises par leurs enfants. Les résultats
ont été probants : à l’âge de quatre, cinq et six ans, les enfants ont dépassé ceux
du groupe témoin aux épreuves cognitives. Leurs performances étaient meilleures
en mathématiques et en lecture à 14 et 19 ans. À l’âge de 19 ans, 51 % des enfants
du groupe témoin avaient un dossier judiciaire contre 31 % des enfants suivis en
maternelle. Tous les enfants étaient bien entendu issus du même quartier.

157
Les personnalités criminelles

Pour intervenir face à la délinquance, il apparaît essentiel de réaliser une


analyse des risques minutieuse.

Des chercheurs ont testé un modèle de contrôle psychosocial des comportements


problématiques chez les jeunes, incluant la recherche de sensations et les compor-
tements à risque chez les pairs, qui pourrait servir pour la délinquance au début et
à la fin de l’adolescence, ainsi que chez le jeune adulte. Un échantillon de 329 élèves
australiens (groupes d’âge 13-14 ans et 15-17 ans, 50,6 % de filles) et de 334 étudiants
(groupes d’âge 18-20 ans et 21-24 ans, 68,4 % de filles) ont participé à une enquête en
utilisant une mesure de délinquance autodéclarée qui pouvait déceler des comporte-
ments antisociaux non détectables à première vue. Ils ont montré le rôle médiateur
des comportements de prise de risque par les pairs sur les liens avec l’école, la
gravité perçue des comportements à risque, et la délinquance. Le comportement
à risque des pairs fait la différence quant à la délinquance, dans chacun des quatre
groupes. L’impulsivité prédit la délinquance chez les jeunes de 13 à 20 ans, tout
comme la recherche de sensations chez les jeunes de 15 à 24 ans, ce qui suggère
des influences différentes mais cumulatives sur les trajectoires de développement
de la délinquance (Curcio et al., 2017).

C’est dans cette perspective que l’on peut faire du développement des
processus résilients un élément majeur de la prévention précoce.

5. Les facteurs présents dès la petite enfance


et la prévention

Depuis les travaux de Bowlby, il est devenu clair qu’il existe un besoin
primordial du jeune enfant d’établir un lien stable et sécurisant avec une
figure maternelle (la mère, le père, une tante, ou toute autre personne
significative pour l’enfant) susceptible de répondre à ses besoins. Le terme
d’attachement dans ce contexte désigne le lien particulier unissant l’enfant
à la figure maternelle. La théorie de l’attachement avance que l’attache-
ment à la figure maternelle servirait de base de sécurité à l’enfant pour
explorer son environnement. Ainsi, dès la petite enfance, l’enfant dévelop-
perait un modèle d’attachement particulier en fonction de l’attitude de la
figure maternelle à son égard. Ce type d’attachement une fois intériorisé au
cours de l’enfance deviendrait un modèle pour toutes les relations intimes
et sociales de l’individu.

158
L’approche développementale et la prévention ■ Chapitre 3

À la suite des travaux de Bowlby, Mary Ainsworth a testé l’attachement à la mère


en situation anxiogène. Elle a créé une situation standardisée, appelée « situation
étrange », qui place l’enfant une vingtaine de minutes dans un local inconnu avec
des jouets et teste comment les enfants de 12 à 18 mois utilisent leur mère comme
base de sécurité dans une situation anxiogène. Ainsworth identifie trois modèles
d’attachement, fondés sur la façon dont la mère répond aux sollicitations du bébé
à un moment de détresse. Le modèle sécure est celui d’une mère (ou figure mater-
nelle) sensible aux signaux de son enfant, l’enfant sécure est celui qui se laisse
consoler s’il a eu peur de la situation. Le modèle ambivalent est marqué par une
ambivalence des réponses maternelles alternant entre la disponibilité et le rejet. Le
modèle évitant marque l’oscillation entre des interactions intrusives et « rejetantes »
de la part de la mère, surtout dans les moments où l’enfant présente une vulnéra-
bilité émotionnelle. Mary Main a introduit une quatrième catégorie d’attachement
insécure désorganisé qui mélange des conduites de chacun des groupes de façon
imprévisible. Elle a adapté le modèle à l’attachement de l’adulte (sécurisé autonome,
détaché, préoccupé ou désorganisé).

Des enfants qui n’auraient pu bénéficier d’un attachement sécure dans


leurs premières années de vie en raison d’une présence maternelle rarement
sensible à leurs besoins risquent de se détourner de la vie relationnelle et de
devenir détachés, voire de présenter des comportements sociaux inadéquats.
Les conséquences sont tant sociales que cognitives pour les enfants qui
n’auraient pas pu développer avant l’âge de deux ans une capacité d’attache-
ment solide. Les spécialistes de la délinquance ont confirmé cette période
critique pendant l’enfance pour le développement harmonieux des habi-
letés sociales (Loeber, 2009). La stabilité des patterns d’attachement a été
démontrée par plusieurs études (Raby et al., 2015). Ainsi, 70 % des sujets
présentent à l’âge adulte le même type d’attachement qu’à l’âge d’un an. Il
semblerait également que ces patterns aient tendance à suivre une trans-
mission intergénérationnelle (Saint-­Antoine, 2000).

Quand les entretiens avec la mère indiquent qu’elle est de type préoc-
cupé ou détaché, près des trois quarts des enfants, après le bref épisode de
séparation de la situation étrange, répondent à leur mère de façon évitante
ou inconsolable. Les difficultés de la mère dans les réponses à son enfant
seraient expliquées par ses propres défenses contre la reconnaissance et la
compréhension d’affects négatifs en elle-­même. En revanche, 80 % d’enfants
de mères autonomes répondent, au retour de celles-­ci dans la situation
étrange, par une diminution notable de l’angoisse. Les résultats avec les
pères s’avèrent moins probants mais statistiquement significatifs. Steinhauer

159
Les personnalités criminelles

(1996) a établi une liste de facteurs susceptibles de rendre compte d’un


attachement potentiellement pathologique parmi lesquels le fait d’avoir
vécu des ruptures ou une négligence sévère, de présenter une absence de
réactions manifestes à la séparation, de développer une relation superficielle
à l’autre (enfant qui présente un sourire artificiel et une absence d’émotions
véritables, se lie de façon mécanique, fait et dit ce que les autres attendent
de lui, se montre manipulateur et centré sur ses intérêts).

Un attachement insécure est également considéré augmenter la proba-


bilité d’agression sexuelle parce que ces personnes sont plus susceptibles
d’essayer de satisfaire leurs besoins intimes dans des relations inappro-
priées (Seto et Lalumière, 2010). Pour ceux qui se sont développés dans
un environnement premier de type insécure, il est spontanément difficile
voire, pour les plus démunis psychiquement, quasi impossible d’investir un
cadre de soin ou d’institutions supports pour le soin psychique (Ciavaldini,
2000).

L’attachement des délinquants a également été étudié en fonction des


aspects transitoires ou persistants de la délinquance. Au niveau de la qualité
de la relation parents-­enfant, les délinquants persistants se distinguent
des délinquants transitoires par le manque de communication avec leurs
parents. Quel que soit le contenu de l’échange (projets, sentiments, pensées)
et la personne ayant pris l’initiative de cet échange (le parent ou l’ado-
lescent), les délinquants persistants communiquent moins avec leurs parents
que les délinquants transitoires, encore moins avec leur père qu’avec leur
mère. L’assimilation affective est encore plus défaillante chez les délinquants
persistants que chez les délinquants transitoires, en particulier vis-­à‑vis du
père, auquel ils disent ne pas vouloir ressembler. Les délinquants persistants
se sentent aussi plus souvent rejetés que les délinquants transitoires, en
particulier par leur père. Ces lacunes sont d’autant plus significatives qu’au
cours de cette phase du développement, l’adolescent a un besoin accru du
parent du même sexe pour se construire (Gimenez et al., 2008). Ces analyses
ont permis de quantifier les perturbations au niveau de la qualité de la rela-
tion parent-­enfant des délinquants persistants (moins de communication,
moins d’assimilation affective, plus de rejet), mais également de qualifier le
déficit d’attachement. La majorité des délinquants persistants présentent un
attachement de type insécure détaché. Une modélisation a permis d’extraire
les facteurs familiaux les plus significatifs dans la persistance des conduites
délinquantes. Ce modèle rend compte de l’interaction de facteurs familiaux

160
L’approche développementale et la prévention ■ Chapitre 3

statiques et dynamiques. Les délinquants persistants vivent bien souvent


dans un éloignement affectif et éducatif de la part de leur père. Les variables
les plus significatives correspondent aux stratégies primaires et secondaires
d’attachement de l’enfant. Cela signifie qu’un attachement de type insécure
détaché est très significativement lié au caractère persistant des conduites
délinquantes.

L’attachement aux parents est donc une variable très importante pour
l’engagement dans l’activité délictueuse. La première source d’attachement
est bien entendu dans la famille. L’attachement peut par exemple constituer
un processus résilient s’il est de type sécure tandis qu’il peut être facteur de
risque s’il est de type insécure (et engendrer un risque plus grand encore
dans le cas où il est détaché ou désorganisé). Les styles éducatifs paren-
taux décrits par Baumrind ont été examinés en fonction des trajectoires
développementales de l’activité délinquante. Le style autoritaire valorise
l’obéissance, les règles strictes et intangibles affirmées sans discussion.
Les parents opposent à l’enfant de fermes refus mais peuvent par ailleurs
l’encourager à l’indépendance de façon réfléchie et à une certaine affirma-
tion de soi. La limitation reste dominante, tant sur le plan comportemental
que psychologique. Le style permissif est caractérisé par la discussion et
l’échange, ainsi que par des exigences et une absence de punition. L’opinion
de l’enfant est prise en compte pour l’établissement des règles familiales.
L’enfant est renvoyé à sa capacité d’analyse plutôt que contrôlé par ses
parents. Les manifestations d’autorité restent très limitées. Enfin, le style
démocratique associe des règles familiales clairement énoncées et une forte
sollicitation pour que l’enfant développe son individualité. La discussion
est favorisée pour que l’enfant exprime un point de vue raisonné sur les
situations, en même temps que des normes de conduite claires lui sont
proposées. L’autorité parentale est présente mais sans excès. L’autonomie
est donc favorisée tout en maintenant des restrictions comportementales
sans entrave à la personnalité.

Pour Baumrind, la place du contrôle parental est essentielle. La sensibilité


des parents aux besoins de l’enfant, la restriction de ses comportements
inadéquats sont le reflet de l’équilibre recherché entre les demandes expri-
mées par l’enfant et celles exprimées par la société, par l’intermédiaire des
parents (Born, 2003). Les actions parentales visent la reconnaissance, le
respect de la personnalité de l’enfant et les exigences concernent la disci-
pline et la maturité (Born, 2003).

161
Les personnalités criminelles

En examinant 118 adolescents âgés de 15 à 17 ans, complétant la Mesure de l’adap-


tation sociale et personnelle pour les adolescents et le Questionnaire d’autorité
parentale de Buri (Gimenez, Born et Blatier, 2009) fondé sur la typologie des styles
parentaux de Baumrind (styles autoritaire, permissif ou démocratique), il a été
supposé que le style éducatif parental démocratique avait pu jouer un rôle de limi-
tation de la délinquance. Les délinquants entrés tardivement dans la délinquance
percevaient leurs parents comme plus démocratiques que ne le faisaient les délin-
quants précoces. Les délinquants persistants avaient, lorsqu’il était possible de
renseigner cet aspect, soit deux parents autoritaires (32 %), soit deux parents permis-
sifs (21 %), soit un père permissif et une mère autoritaire (13 %). En comparaison, 12 %
des délinquants transitoires avaient deux parents permissifs, 23 % avaient deux
parents autoritaires et 8 % un père permissif et une mère autoritaire. La majorité
des délinquants tardifs avaient au moins un parent au style démocratique. En outre,
les mères des délinquants précoces étaient jugées par eux comme étant plus auto-
ritaires que les mères des délinquants tardifs. Il semblerait qu’il existe un impact
délictogène de certaines configurations éducatives parentales dans lesquelles les
styles permissifs et autoritaires interviennent, sans que le style démocratique d’au
moins un des parents vienne pallier les effets de ces modalités de parenting.

162
En guise
de conclusion
Comprendre le crime est un vaste objectif qui intègre des données
générales mais également individuelles. Les situations sont très variées et
recouvrent des enjeux très importants. Certains psychocriminologues s’at-
tachent à décrire les mobiles apparents ou inconscients du crime. D’autres
décident d’intervenir en amont, dans la prise en charge des mineurs ou
dans une prévention universelle. Les motivations des délinquants ou crimi-
nels sont rarement totalement expliquées ou explicables, mais la prise en
charge permet à un grand nombre de réintégrer un parcours sans délin-
quance. L’enfance de nombreux délinquants a laissé en eux une trace
indélébile, qui a construit peu à peu une personnalité ou une trajectoire
particulières, renforcées par des rencontres amicales incitant bien souvent
à la délinquance. L’analyse de ces trajectoires aide considérablement à la
compréhension de l’évolution du comportement. De nombreux éducateurs
travaillent sur le terrain avec des jeunes délinquants en tentant de leur offrir
de meilleures perspectives développementales. Ils forcent l’admiration car
il ne suffit pas d’identifier des trajectoires et des personnalités troublées.
Il est également nécessaire que des psychologues les accompagnent et que
des éducateurs leur procurent les conseils, le soutien et les encouragements
dont ils ont besoin.

Nous avons abordé ici de nombreux aspects non exhaustifs de la person-


nalité criminelle, des crimes et délits, des violences sexuelles, des violences
conjugales et des maltraitances afin d’en présenter les principaux contours.
Il existe de nombreux ouvrages permettant d’aller plus loin. Nous espérons
avoir suscité l’intérêt du lecteur pour poursuivre cette quête de connaissance.

La psychocriminologie cherche à répondre mais aussi à prévenir des


situations souvent complexes, mais non irréductibles. C’est pourquoi les
psychologues ont estimé pouvoir intervenir dans ce champ de la crimino-
logie pour modifier avec les autres professionnels, dans le cadre d’un travail
d’équipe, certaines trajectoires bien souvent incomprises jusqu’alors.

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195
Index des notions

A Évaluation 19, 22, 25, 27, 29, 41, 42,


71, 72, 73, 74, 102, 133, 134, 142, 146,
Addiction 20, 22, 37, 103
157
Agressivité 13, 15, 16, 21, 22, 25, 30,
32, 38, 50, 59, 96, 103, 112, 125, 128, F
130, 133, 134, 145, 151, 152, 153 Filles délinquantes 127, 131, 134, 135
Alcool 22, 36, 89
Alcoolisme 20, 44, 65, 67, 90, 97, 98, H
115, 118, 121, 130 Hyperactivité 23, 30, 42, 96, 134, 145
Attachement 98, 104, 129, 146, 157,
158, 160, 161
I
Inventaire 15, 19, 22
D
M
Délinquance sexuelle 9
Maltraitance 21, 46, 69, 95, 96, 97,
Délinquants persistants 16, 126, 127,
98, 101, 103, 104, 105, 116, 120
140, 142, 149, 152, 153, 154, 155, 157,
160, 161, 162 P
Délinquants sexuels 29, 47, 58, 60, Persistance 17
62, 64, 66, 68, 69, 71, 72, 73, 74, 76,
Personnalité antisociale 20, 21, 22,
88, 95, 101, 116, 120, 121, 122, 153, 165 23, 24, 25, 26, 28, 41, 42
Délinquants transitoires 140, 141, 142, Personnalité borderline 20, 22, 23,
149, 160, 162 67
Délinquants violents 30, 31, 32, 33, Prévention 32, 72, 103, 104, 106, 112,
36, 38, 47, 62, 64, 73, 74, 88, 89, 90, 115, 127, 133, 139, 140, 142, 143, 150,
114, 122, 123, 131, 132, 133, 135, 149, 158, 165
151, 152, 153, 156 Prison 15, 41, 42, 45, 46, 50, 122
© Dunod. Toute reproduction non autorisée est un délit.

Détenus 33, 40, 41, 42, 44, 74, 75, 121,


122, 133 R
Drogue 22, 36, 38, 40, 67, 89, 90, 98, Récidive 33, 72, 73, 74, 75, 115, 130,
125, 126, 130, 132, 140, 141, 147, 150, 144, 154
153, 155 Récidive générale 47
Récidive violente 47
E
Risque 15, 20, 29, 33, 37, 38, 39, 40,
Échelle 25, 27, 28, 30, 74, 134 50, 59, 68, 69, 72, 73, 74, 90, 98,
Égocentrisme 16, 17, 18, 19, 25, 148 102, 103, 104, 110, 111, 115, 124, 126,

197
Les personnalités criminelles

127, 129, 133, 139, 140, 144, 145, 147, Toxicomanie 19, 20, 23, 36, 38, 40, 44,
152, 154, 155, 158, 161 46, 65, 74, 97, 115, 118, 120

T V
Test 17, 19, 22, 25, 27, 30, 102, 121 Violence 20

198
Index des auteurs

A K
Abdellaoui S. 27 Knight R. A. 62, 63, 64, 65
Arthur R. 129
Aubut J. 62
L
LeBlanc M. 17, 18, 22, 126, 139, 140, 141,
B 144, 149, 152, 157
Born M. 127, 140, 161 Loeber R. 126, 141, 142, 144, 145, 156,
159
C
M
Chamberland C. 96, 98
McKibben A. 67
Chartier J. P. 26
Moffitt T. E. 134, 140, 145, 156
Corrado R. 97, 140
Côté G. 28 P
Coutanceau R. 59, 90
Pham T. H. 26
Crocq L. 108
Pinatel J. 15, 16
D Prentky R. A. 62, 63, 64, 65

Debuyst C. 16, 17 R
De Greef E. 15, 17
Raine A. 31, 146
F Roesch D. 140
Roesch R. 50
Farrington D. P. 145, 147, 152, 154, 156
Fortin G. 102 T
Fréchette M. 18, 144, 149
Tremblay P. 145
© Dunod. Toute reproduction non autorisée est un délit.

H Tremblay R. E. 32, 146

Hanson R. K. 73, 74 V
Hare R. D. 25, 26, 27, 28, 30
Van Gijseghem H. 62, 101
Hart S. D. 27, 28, 29
Hodgins S. 28, 32, 42, 157 Z
Zermatten J. 129, 140
J
Jaffé P. 101

199

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