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Les bases de la psychopathologie

Widiane CHAKKOUCHE
Docteur en psychologie clinique
et psychopathologie
Histoire de la
psychopathologie
Histoire de la psychopathologie 1/3

Ce terme est employé pour la première fois en 1878, en


allemand, par Emminghaus pour désigner une psychiatrie
clinique qui s’intéresse à des individus malades mais de
manière singulière.

Celui qui marque la naissance de la psychopathologie en France


est Théodule Ribot. Il va créer un enseignement de
psychopathologie au début du 20ème siècle, au moment où la
psychologie commence à être séparée de la philosophie sur le
plan de l’enseignement.
Histoire de la psychopathologie 2/3

Ribot va surtout développer un enseignement sur la


méthode pathologique. Il veut comprendre les troubles de la
personnalité dans le but de comprendre le fonctionnement
normal. Sa méthode concerne l’étude de tous les traits
psychologiques : la perception, la mémoire, la volonté, les
sentiments, le langage...
La maladie est vue comme une situation expérimentale.
Selon Ribot, la psychologie morbide est une façon d’accéder
à la psychologie normale. Il voit en la psychopathologie un
continuum entre l’esprit sain et malade.
Histoire de la psychopathologie 3/3

Plus tard, en 1913, en Allemagne, K. Jaspers, en publiant


son livre Psychopathologie générale, donne naissance à
la psychopathologie nommée comme telle. Il
représente un courant bien différent de celui de Ribot.
Définitions
Définitions de la psychopathologie 1/2

La psychopathologie est l’objet de définitions multiples,


dont le dénominateur commun est le suivant : « il s’agit
de l’étude des troubles mentaux, des maladies
mentales, du fonctionnement mental anormal, soit
encore de la psychologie des conduites
pathologiques ».
Définitions 2/2
La psychopathologie est donc définie par « son champ d’étude
qui est le même que celui de la psychiatrie. Cependant, les
buts et les moyens diffèrent.
Le but de la psychopathologie est la compréhension et la
connaissance ; La psychopathologie utilise de façon non
exclusive la méthode clinique.
celui de la psychiatrie est la thérapeutique, la prophylaxie et
la réadaptation.
Les moyens de la psychiatrie ne sont pas seulement
psychologiques mais aussi médicaux, biologiques, sociaux,
Psychopathologie ou psychologie clinique?

Pedinielli (1994) considère que la psychopathologie fait partie de la


psychologie clinique qu’il définit comme « la sous-discipline de la
psychologie qui a pour objet l’étude, l’évaluation, le diagnostic, l’aide et
le traitement de la souffrance psychique, quelle que soit son origine ».
Ménéchal (1997) : la psychopathologie doit être définie comme « la science
de la souffrance psychique » et «l’épistémologie de la psychologie
clinique et de la psychiatrie ».

Ces définitions discutables illustrent l’ambiguïté des rapports qui lient les deux
disciplines. Pedinielli ne les distingue pas, tandis que Ménéchal considère que
la psychopathologie fonde la psychologie clinique.
Le point commun : la souffrance psychique.
Deux types de références de la
psychopathologie
Deux grands types de références semblent s’opposer et résumer la psychopathologie
:

• une psychopathologie dynamique fondée sur la théorie psychanalytique qui


renvoie à une tendance unitaire psychopathologique (voir D. Lagache, 1903-1972)
qui défend l’unité de la psychologie (1949).

• une psychopathologie cognitive et comportementale qui renvoie à une tendance à


l’éclatement faisant disparaître la psychopathologie au profit des méthodes
(méthodes des tests, méthodes statistiques pour définir la personnalité
pathologique, méthodes psychothérapiques), des théories qui effacent la dimension
pathologique (comportementalisme).
Une tentative de regroupement est entreprise sur un plan descriptif avec la mise au
point d’échelles d’évaluation et de diagnostic qui aboutit à la classification DSM.
Quelle est la différence entre
psychopathologie et psychiatrieet
psychologie clinique ?
La psychiatrie
La psychiatrie. Psychopathologie et psychiatrie sont
très liées sur le plan historique : jusqu’au 18ème siècle,
elles constituaient une branche unique de la médecine.
La psychiatrie naît en discipline spécifique à la fin du
18ème, son but est de traiter les troubles mentaux. La
psychopathologie n'est alors qu'un enseignement
parmi d’autres, au sein des écoles de psychiatrie, au
même titre que la physiologie, la biologie ou le droit.
La psychologie clinique1/2
La psychologie clinique. Celle-ci est liée au mot grec
"Kline" qui signifie "lit" : la psychologie clinique
n’intervient pas spécifiquement dans le domaine de la
santé mentale déficitaire ;.
Elle s'occupe donc autant du normal que du
pathologique : un deuil par exemple?
La psychologie clinique2/2
Elle se fonde sur des méthodes particulières, des
techniques d’observation qui peuvent inclure :
-l’anamnèse d’un sujet (c’est l’ensemble des
informations sur le passé du patient nécessaires au
praticien pour établir son évaluation),
-l’observation des comportements,
-l’analyse du discours,
-les échelles d’évaluation, les tests intellectuels, les
tests de personnalité, les questionnaires, l’étude de cas,
des entretiens, etc.
Quelques définitions 1/2
 La psychopathologie est composée de psycho (psyché, ) et de logos (langage, étude) et
aussi de pathos (la souffrance, maladie). C’est donc l’étude de la pathologie du psychisme.
 La psychiatrie est l’étude de la souffrance du psychisme et de la maladie, c’est le
traitement des maladies mentales (psyché = âme et iatos = soins). Le diagnostic
psychiatrique va porter sur la clinique psychiatrique. Elle isole et hiérarchise des
symptômes pour les grouper en syndrome.
 Le symptôme est le signe d’un trouble, c’est le phénomène particulier qui provoque dans
l’organisme l’état de maladie.
 Le syndrome est un groupement de signes et la réunion d’un groupe de symptômes qui
se produisent en même temps dans un certain nombre de maladies ayant des causes
différentes; exemple le syndrome fébrile : tachycardie, sueurs, hyperthermie… que l’on
peut trouver dans plusieurs maladies (grippe rougeole etc.)
 Le diagnostic permet et va viser le groupe de symptômes.
La notion de structure
La notion de structure

Chaque individu s’organise selon une structure psychique ;


Jean Bergeret, distingue les trois grandes structures ou
organisations suivantes :

– La structure névrotique concerne une organisation


fantasmatique centrée autour du complexe d’Œdipe et le respect
du principe de réalité.
L’organisation névrotique rend compte de l’intégration de la
problématique œdipienne. Elle est caractérisée par l’existence de
conflits intra-psychiques.
Le type d’angoisse dominant est l’angoisse de castration. –
.
La structure psychotique
Prend son départ au niveau des frustrations très
précoces qui ne permettent pas d’atteindre le niveau
d’élaboration psychique de la structure névrotique.
Le conflit sous-jacent se joue entre la réalité et les
besoins pulsionnels bruts.
Les astructurations ou fonctionnements limites

 Le sujet n’a ni une structure névrotique ni une structure psychotique.


 Son fonctionnement psychique est plus ou moins à la limite du
fonctionnement névrotique ou du fonctionnement psychotique.
 La problématique centrale concerne l’angoisse de perte de l’amour de l’autre. Le
type d’angoisse est l’angoisse de « perte d’objet ».

Chaque individu présente un type de fonctionnement psychique privilégié se


situant dans l’une ou l’autre de ces trois grandes entités, sans être « malade »
pour autant.
S. Freud compare la structure mentale à un bloc minéral
cristallisé. Si on laisse tomber à terre un corps cristallisé, il se
brise. Toutefois, il ne se brisera pas au hasard. Le cristal va se
casser selon – des lignes de cassure préétablies, constantes, –
selon des lignes de clivage propres à la structure interne du
minéral. Ces lignes, bien qu’invisibles de l’extérieur, existent à
l’intérieur de la matière. Les lignes de clivage sont visibles
lorsque le cristal se casse ou s’il est observé au microscope. S.
Freud pense qu’il en est de même pour la structure mentale.
Le psychisme individuel s’organise selon des lignes de force,
selon des lignes de faiblesse, lignes intérieures, originales,
complexes, propres à chaque psychisme.
Les nouvelles
classifications
Objectifs de nouvelles classifications

la nécessité de trouver un langage commun


satisfaisant pour l’ensemble des cliniciens d’écoles de
pensée différentes, pour décrire les troubles.
Amélioration de la correspondance entre les
classifications adoptées d’un pays à L’autre,
l’importance des divergences internationales
concernant les diagnostiques psychiatriques –
la nécessité de répondre par des définitions moins
floues et internationalement reconnues,
Les nouvelles classification : pourquoi et comment? 1/2
1970, une réflexion sur les classifications psychiatriques s’est imposé.
 (1961) mobilisation de la communauté psychiatrique sur la mauvaise
fiabilité des classifications existante
Au troisièmes congrès mondial, a été souligné le manque
d’homogénéite des pratiques diagnostiques internationales. certains
auteurs recommandent d’opter pour les définitions opérationnelles
des troubles mentaux dans une démarche pragmatique de description
des troubles.

1970, une série de travaux viennent confirmer ces doutes sur la


nosologie psychiatrique
d’où l’idée de mettre des regroupements symptomatiques pertinents au
regard de diagnostic cliniques,
Particularités de cet l’objectif 1/3

La première contrainte repose sur le choix de critères


(symptômes) à retenir pour faire le diagnostic.

La nécessite de retenir les symptômes les plus clairs et


les plus objectifs afin d'améliorer la convergence des
jugements des psychiatres et d’éviter que l’intuition du
clinicien qui pourrait autoriser un certain flou dans les
définitions des signes et de perdre toute objectivité
concernant la description.
Particularités de cet l’objectif 2/3

Les symptômes les plus fréquemment retrouvés chez


tous les malades, vont être retenues pour poser le
diagnostic.
Le parti pris est celui de sélectionner des signes
fréquents de la maladie plutôt que des signes
spécifiques mais très rares ( ex : barrages dans la
schizophrénie)
Particularités de cet l’objectif 3/3
Un symptôme isolé ne peut en aucun cas évoquer un
trouble mental mais le diagnostic de celui-ci impose
la présence d’un regroupement de symptômes
(syndrome) est nécessaire pour faire un diagnostic.
 Besoin de s’entendre sur le nombre de symptômes
nécessaires pour qu’un un tel diagnostic puisse être
porté.
Evolution de cette nouvelle approche 1/2
1952 : Le DSM-I, établit 60 diagnostics,
1968 : DSM II
Ces deux premières éditions du manuel étaient influencées par la psychopathologie psychanalytique
. Elles suivaient la structuration des  psychoses et des névroses, en héritage de Freud. 

1980 : l’APA publie la 3ème édition du DSM-III . Il représente la première tentative d’approche du
diagnostic de maladie mentale par des définitions et des critères standardisés.
 1987 : DSM-III-R est publié en tant que révision du DSM-III, Les catégories sont renommées,
réorganisées et des changements significatifs dans les critères ont été effectués. 
1994 : DSM-IV, prolongeant et approfondissant le DSM-III, reconnaît 410 troubles psychiatriques.
2000 : le DSM-IV-TR. Les sections textuelles donnant une information complémentaire sur
chaque diagnostic ont été mises à jour dans l'ordre de maintenir une cohérence avec la 
Classification Internationale des Maladies.
2013 : DSM 5

Tous ces outils ont cherché à identifier les symptômes les plus discriminents de chaque pathologie et à fixer les
limites de chacune des entités décrites.
La Classification internationale des
maladies (CIM)
La Classification internationale des
maladies ou CIM est une classification médicale
codifiée classifiant les maladies et une très vaste
variété de signes, symptômes, lésions traumatiques,
empoisonnements, circonstances sociales et causes
externes de blessures ou de maladies.
La CIM 10 a fait l'objet d'une publication sous la forme
de trois volumes
2018 : la CIM 11
Les dernières classifications
Devant cette multiplication de systèmes classifications, la nécessité
d’adopter une version commune à l’ensemble de la communauté s’est
rapidement imposé.
Les deux dernières classifications internationales,
 l’une, élaborée sous l’égide de l’OMS
CIM 11 : (11ème classification internationale des maladies), en 2018,
 l’autre sous l’égide de l’Association Américaine de Psychiatrie Manuel
Diagnostic et statistique des troubles mentaux, (DSM V), en 2013.
Tous deux ont tenté d’offrir des correspondances entre elles.
Ces dernières classifications proposés sont le résultat d’un nombre
considérable d’études ayant permis d’apporter des données sur des
points litigieux des premières classifications et d’offrir certaines
garanties de l’existence de catégories décrites.
L’objectif des systèmes diagnostiques
L’élaboration d’un langage commun à partir de critères
diagnostiques facile à identifier
Pour les cliniciens, Cet objectif représente la garantie
possible d’un diagnostic plus fiable et de traitements
mieux ciblés.
Pour les chercheurs sur la nature du trouble = l’espoir
d’une sélection plus fiable des patients étudiés et
d’échanges de connaissances entre chercheurs du
monde entier sur des entités comparables
Bibliographie 

Bergeret, J. (1985). La personnalité normale et pathologique. Paris : Masson.


Besançon, G. (1993). Manuel de psychopathologie. Paris : Dunod.


Ionescu, S. (1995). Quatorze approches de psychopathologie. Paris : Nathan Université.


Ionescu, S. (1992). Normal et pathologique (chapitre 3). In Ghiglione, R. et Richard, J.F.
Cours de psychologie : I. Origines et bases. Paris : Dunod, 50-66.


Ménéchal, J. (1997). Introduction à la psychopathologie. Paris : Dunod.


Pedinielli, J.L. (1994). Introduction à la psychologie clinique. Paris : Nathan Université.

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