mardi, 30 juillet 2019 à 10:40 par Nicolas Gricourt
Lorsque l’on interviewe Christian Vander, batteur-leader de
Magma, parmi tous les détours et chemins de traverse que l’exercice nous fera prendre, il y a au moins un passage ENVOYEZ VOS obligatoire : John Coltrane. Ça pourrait paraître curieux qu’un batteur puisse avoir pour première influence un CONTACT [at] RADI saxophoniste, mais on comprend vite que chez Vander, la FR musique transcende bien des choses, dont l’instrument. Et après tout, John Coltrane a toujours su merveilleusement s’entourer, y compris à la batterie, entre autres Elvin Jones qui l’a longtemps accompagné, si ce n’est jusqu’à la fin, jusqu’au sommet de sa carrière. L’admiration de Christian Vander pour John Coltrane est profonde, intacte 52 ans après la mort de l’auteur de Blue Train ou A Love Supreme. L’inspiration et les enseignements qu’il puise dans l’œuvre de ce dernier sont encore prégnants malgré l’expérience acquise au fil des décennies. Ainsi, nous avons profité de notre dernier entretien avec le batteur pour lui offrir une sorte de tribune, afin qu’il nous parle, avec ses propres mots, son propre ressenti, son propre vécu, d’un des génies musicaux du XXe siècle : de ses débuts à sa mort, ses collaborateurs, son engagement émotionnel, etc., nous donnant des pistes pour mieux appréhender l’œuvre de John Coltrane.
« Si j’ai envie d’apprendre, c’est toujours John que j’écoute.
Ce n’est pas le tout de jouer du saxophone ou d’un autre instrument. C’est la manière dont on développe un solo, un chorus, une construction, etc. Quand je développe des choses, surtout dans l’improvisation, je travaille vraiment en fonction de ce que nous a légué John Coltrane. Car même à partir du moment où il jouait un thème qui n’était pas de lui, par exemple « My Favorite Things », à l’écoute, on a l’impression qu’il se l’octroyait. On avait l’impression que ça ne pouvait pas être autrement que lui le compositeur. Il avait fait une version de « Nature Boy » aussi, et quand on l’écoute, on a l’impression que c’est lui qui l’a composé. Il fallait regarder après sur les pochettes et se dire : « Ah bah non, ce n’est pas un thème de John. » Ce ne sont pas les seuls, il y a « I Want To Talk About You », etc. Une fois que John les avait travaillés, malaxés, on pouvait penser que c’était lui le compositeur. Je ne fais pas de la musique pour l’argent, donc je ne vous cache pas que quand je signais pour mes droits, je versais tous mes droits à la famille Coltrane. C’est-à-dire qu’en fait, je signais toutes les compositions « de John Coltrane » au lieu de signer les compositions « de Magma » [petits rires]. Quand je déclarais les droits sur les feuilles SACEM, je mettais « John Coltrane, tel morceau ». Sauf ceux qui étaient déclarés officiellement à la SACEM, bien sûr, mais quand je jouais en concert, je déclarais les droits pour John Coltrane. Et puis, il y a eu prescription à partir du moment où Alice Coltrane, sa femme, a également quitté ce monde. A partir de là, j’ai dit « j’arrête ». Car je faisais ça pour Alice qui restait là, qui n’a pas vécu centenaire… A partir du moment où c’était ses fils, Ravi Coltrane et Oran Coltrane, j’ai arrêté.