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Samira CHELHAOUI, Claire JOLY

Direction des Risques Accidentels

Juin 2001

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I- Les propriétés de l’hydrogène
II- L'accidentologie disponible
) le point sur l'Hindenburg

) bilan sur les accidents répertoriés dans la base de données ARIA du BARPI

III- Les risques à travers des exemples concrets


) étude des phénomènes de dispersion et explosion

) sécurité d ’un dispositif de stockage sous haute pression


) fuite d’hydrogène dans un garage

IV- Les aspects réglementaires et normatifs


V- Les problèmes soulevés pour son utilisation comme vecteur
énergétique

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I. Propriétés de l’hydrogène

Propriétés Unités Hydrogène

Masse molaire g/mol 2


Point d’ébullition (PE) °K 20
Masse volumique du liquide (à PE) kg/m3 70
Masse volumique du gaz (à Patm et Tamb) kg/m3 0,08

Source : Commission of the European Communities


and the Government of Québec, novembre 1993

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Conditions d’inflammation de l’hydrogène

présence d’un combustible (hydrogène)

présence d’un comburant (oxygène / air)

apport d’une énergie d’inflammation (20 µJ)

concentration volumique d’hydrogène allant


de 4 à 75% dans l ’air.

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Propriétés de l ’hydrogène (suite)

Propriétés Hydrogène Méthane Essence

Chaleur de combustion (inférieure) (kW/g) 120 50 44,5


Température d’auto-inflammation (°C) 585 540 228-501
Température de la flamme (°C) 2 045 1 875 2 200
Plage d’inflammabilité dans l’air (Vol.%) 4-75 5,3-15 1,0-7,6
Energie minimale d’inflammation (mW) 0,02 0,29 0,24
Plage de détonabilité (Vol.%) 13-65 6,3-13,5 1,1-3,3
Energie théorique d’une explosion (kg TNT/m 3gas) 2,02 7,03 44,22
Coefficient de diffusion dans l’air (cm²/s) 0,61 0,16 0,05

Source : Hydrogen, The Energy Carrier, TÜV BAYERN GROUP

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Régimes d’explosion :
forme des ondes de pression

Déflagration Détonation
vitesse de flamme subsonique vitesse de flamme supersonique
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Quel régime d’explosion ?
Les paramètres influant sur la vitesse de propagation des flammes sont :
la présence d'obstacles et la turbulence ;
la source d'inflammation :
• énergie d'inflammation grande « vitesse de flamme grande mais pas
de règle quantitative précise
• position de la source dans le nuage :
inflammation au cœur du nuage « vitesse de flamme généralement plus
grande mais pas de règle absolue car des effets antagonistes existent
• composition du nuage inflammable : réactivité propre au combustible et
à sa concentration dans le mélange avec l'air
le confinement.

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Transition déflagration-détonation

Possibilité d ’une transition déflagration - détonation (TDD) :

dans le cas d'un confinement (parois d'un tube dans lequel est
contenu le mélange, obstacles répétés) : turbulence générée par la
présence d’obstacle

en milieu non confiné : divers mécanismes tels que les


perturbations acoustiques, la turbulence, les forces d ’Archimède, ...

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II. Accidentologie de l ’Hydrogène

II.1. HINDENBURG
± Zeppelin gonflé avec 200 000 m3 d'H2
± 6 mai 1937 : accident à Lakehurst (Etats-
Unis) « 35 morts (sur 97 passagers)
± Causes (source NASA) :
décharge électrostatique au niveau du
matériau combustible de l'enveloppe
« inflammation de l'enveloppe et de l'H2
contenu ; pas d ’explosion.

Hydrogène injustement incriminé lors de cet accident :


¨ « Syndrome Hindenburg »
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II.2. Base de données ARIA du BARPI

defaillance du
Causes des accidents impliquant de l'H2 matériel
43% 2% rupture de
20%
canalisation
erreur humaine

fuite

foudre
8% 27%
% du nombre d'accidents répertoriés dans la
base ARIA du BARPI, 57 cas de 1929 à 2000.

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II.2. Base de données ARIA du BARPI (suite)

Conséquences des accidents impliquant de l'H2

Dégâts sur les Atteinte aux personnes


équipements et structures

² dégâts faibles : bris de ² blessures (20 cas


glace, équipements répertoriés sur les 57)
endommagés (environ 2/3 ² mort d'une ou plusieurs
des accidents répertoriés) personnes (9 cas répertoriés
² dégâts importants : sur les 57)
destruction totale ou partielle
des bâtiments

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III. Les risques liés à la mise en œuvre de l ’Hydrogène

Trois exemples d’études :

1. Mécanismes de dispersion et d'explosion lors de fuites d'hydrogène


liquide (C. Proust, INERIS, 1999)

2. Sûreté des dispositifs de stockage de l ’hydrogène sous haute


pression équipant des véhicules routiers (J. Chaineaux, INERIS, 2000)

3. Dispersion of hydrogen clouds (M.R. Swain and al., University of


Miami, 1998)

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III.1. Mécanismes de dispersion et d'explosion lors de
fuites d'hydrogène liquide (C. Proust, INERIS, 1999)

@ Formation du nuage (dispersion à l ’air libre)


± Essais réalisés par INERIS
(une dizaine)
± Utilisation d’hélium liquide
pour des raisons de coût
± Essai d’épandage pour :
- une plage de débit de 1,4
à 2,3 kg/s ;
Exemple de nuage (débit = 1,2 kg/s ; vent = 2 m/s) - et une vitesse de vent de
2 à 5,5 m/s.

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Résultats des essais et interprétations :
± forme allongée du nuage, pouvant atteindre 80 m de longueur ;
± partie rampante puis élévation du nuage de l'ordre de 30° ;
± zone explosive a priori nettement plus restreinte que la partie visible
(dans les conditions d’humidité, soit 80%) ;
± dimensions du nuage fortement dépendantes du débit d’épandage, peu
de la vitesse du vent ;
± existence de forces internes au nuage : forces d ’Archimède, agissant
sur la dispersion (élévation facilitée).
± Zone explosive estimée à :
- 5 m de diamètre et 9 à 12 m de longueur pour D = 1,2 à 1,4 kg/s
- 8 m de diamètre et 20 m de longueur pour D = 2,3 kg/s

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@ Essais d ’inflammation d ’un mélange hydrogène / air en milieu
non confiné

Ballon hémisphérique PE à armature contenant un mélange inflammable H2 - air

But :
± évaluer la vitesse du front de flamme en fonction du débit
d’alimentation en mélange inflammable
± mettre en évidence l’influence des mécanismes internes au
mélange hydrogène / air (turbulence)

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Estimation des vitesses maximales de flamme possibles :

Débit H2 (kg/s) 0,5 1 2 3 5 7 9 12

Vfmax (m/s) 110 200 600 700 1000 1200 1350 1700

Conclusions de l ’étude :

• forte influence des turbulences internes au nuage sur la


vitesse des flammes
• risque éventuel d’une transition déflagration - détonation dans
le cas de présence d ’obstacle pour des débits supérieurs à 2
kg/s. Conclusion à valider dans le cadre d ’une étude
complémentaire.

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III.2. Sûreté d’un dispositif de stockage de l’hydrogène
sous haute pression (J. Chaineaux, INERIS,2000)

But de l’étude :
± Concevoir un réservoir de stockage d’hydrogène composite
de 9 litres sous 700 bars (prototype), muni d’un orifice limiteur
de débit et d’un thermofusible
± Examiner son comportement lors d’agressions thermiques
ou mécaniques, simulant des situations accidentelles

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Type Description de l’agression Observations
d’agression
- Comportement à un jet - Eclatement de la bouteille avec
d’hydrogène enflammé propagation d’une onde de
surpression
Thermique
- Comportement à un feu - Ouverture du thermofusible et
d’hydrocarbure inflammation du jet d’H 2
- Rupture par cordeau détonant - Eclatement de la bouteille avec
projection de débris et propagation
d’une onde de pression (= effets
mécaniques) ; inflammation de
l’hydrogène mais effets thermiques
courts (0,3 s) et équivalent
énergétique faible
Mécanique
- Comportement à l’impact - Pas d’éclatement ; décharge de
d’une balle de fusil l’H 2 par les deux orifices de
pénétration de la balle
- Essai de chute sur bouteille - Diminution des caractéristiques
remplie d’eau + essai mécaniques de la bouteille
d’éclatement
- Essai de « crash » sur bouteille - Délaminage des couches
sous pression d’azote, montée superficielles de composite ; pas
sur un véhicule de diminution significative de la
résistance de la bouteille.

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Boule de feu concomitante à la rupture par cordeau détonant.

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Vues de l’essai de chute et de la
bouteille après essai

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Principales conclusions de l’étude
± La longueur et le volume maximum du nuage inflammable H2-air formé
en cas de fuite d’hydrogène à l’air libre valent respectivement :
1,9 m et 20 L ;
± Le thermofusible ne permet pas d’éviter l’éclatement de la bouteille
pour une agression thermique localisée (jet d’hydrogène enflammé)
éloignée du thermofusible ;
± Lors de l’éclatement de la bouteille, l’énergie est libérée sous forme :
- d’effets mécaniques essentiellement, dus à l’expansion de
l’hydrogène ;
- d’effets thermiques, plus faibles, dus à la combustion de
l’hydrogène.
 Intéressant de comparer avec une étude similaire
sur les réservoirs classiques ...
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III.3. Dispersion of Hydrogen clouds (M.R. Swain and al.,
University of Miami, 1998)

But de l’étude :
• modéliser la dispersion d ’hydrogène
dans un garage résidentiel lors d’une fuite
sur le dispositif de stockage
• établir l’influence d’un dispositif
d ’aération
• comparer le comportement de
l ’hydrogène à celui d’autres carburants

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Les 4 étapes de l’étude :

1. Simuler une scénario d ’accident avec une fuite d’hélium et


mesurer les concentrations en différents points
2. Vérifier à l’aide d’un code CFD les données obtenues pour
l’hélium
3. Prédire le comportement de l’hydrogène avec ce même
modèle, avec un débit de fuite de 6800L/h
4. Conclure sur les risques selon la distribution de
l’hydrogène dans l’espace et le temps

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Résultats de l’étude :
• une simple ouverture en partie
basse du garage ne permet pas
d’obtenir des concentrations
d ’hydrogène inférieures à 4% (LIE).
• une ouverture en partie haute et en
partie basse entraîne une meilleure
circulation d ’air. La concentration
d’hydrogène est ainsi ramenée à 2%
(inférieur à la LIE).
• en cas de source d ’inflammation à quelques centimètres de la fuite,
formation d ’un jet enflammé de quelques mètres à quelques dizaines
de mètres de longueur « possibilité de perte d ’intégrité du réservoir et
d ’incendie généralisé de la voiture ; uniquement des flux thermiques
• ces simulations devront être validés par des essais en vraie grandeur.
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Résultats de l’étude (suite)

• Une fuite continue d'essence ou de GPL au niveau du sol « nuage de


vapeurs très volatil qui remplirait toute la partie basse du garage.
• En présence de source d'inflammation, il y aurait une forte explosion.
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III. 4. Conclusion des études sur la sécurité de la mise
en œuvre de l ’hydrogène ; quelles perspectives ?

l’hydrogène est un produit intrinsèquement dangereux mais le risque


est maîtrisable, de la même façon qu ’il est maîtrisé depuis de
nombreuses années dans l’industrie chimique.
de nombreuses recherches sur la phénoménologie de l ’hydrogène
ont été effectuées mais des recherches sont encore à envisager ;
celles-ci devraient permettre de revoir les périmètres d ’isolement
autour des installations mettant en œuvre l ’hydrogène.
ses atouts en tant que vecteur énergétique (peu de rejets et PCI
important) laissent présager une augmentation importante des volumes
d’hydrogène consommés « Nécessité d ’intégrer la sécurité dès la
conception des futurs systèmes (exemple : Pile à combustible)

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IV. Réglementation et normalisation

IV.1. Normalisation :

ISO TC 197
« Technologies de l’Hydrogène »

- créé en 1990
- coopération avec le CEN
- Secrétariat et Présidence : Canada
- 7 groupes de travail, deux normes publiées

- normes pour les systèmes et dispositifs de production, stockage, transport, mesurage


et utilisation de l’H 2
- Comité miroir français : AFNOR

- Informations :
www.afnor.fr
www.iso.ch

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IV. Réglementation et normalisation

IV.2. Réglementation :

- Différents textes applicables car nécessité de prendre en compte la


protection :
des travailleurs,
des équipements,
de l ’Environnement et de la population

- Directives européennes applicables, transcrites différemment au


niveau national « interprétations différentes, pas d ’harmonisation
(exemple, périmètres d ’isolement)

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IV. Réglementation et normalisation

Principales directives européennes :

± Directive SEVESO II 96/82/CE du 9 décembre 1996, concernant


la maîtrise des dangers liés aux accidents majeurs impliquant des
substances dangereuses ;
± Directive Appareils à Pression 97/23/CE du 29 mai 1997, relative
au rapprochement des législations des États membres concernant
les équipements sous pression ;
± Directive 99/92/CE du 29 avril 1999, visant à améliorer la
protection en matière de sécurité et santé des travailleurs
susceptibles d’être exposés au risque d’atmosphère explosive
(ATEX)

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IV. Réglementation et normalisation
La nomenclature des ICPE (installations fixes) :
• Toutes les activités soumises au titre Ier du Livre V du Code de
l'Environnement sont inscrites par décret en Conseil d'État, après avis
du Conseil Supérieur des Installations Classées, dans la nomenclature.
• La nomenclature des ICPE tient compte :
− des substances,
− des activités.
• Les installations sont classées en trois catégories, en fonction des
seuils :
− régime de la déclaration. Elles sont désignées par la lettre D ;
− régime de l'autorisation. Elles sont désignées par la lettre A ;
− régime de l'autorisation et soumises à servitude (A - S).

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IV. Réglementation et normalisation

Rubriques de la nomenclature spécifiques à l ’H2 :

Rubrique n° 1415 - Hydrogène (fabrication industrielle de l')


La quantité totale susceptible d'être présente dans l'installation étant :

1. Supérieure ou égale à 50 t : (A - 2*) S


2. Inférieure à 50 t : (A - 2)

Rubrique n°1416 - Hydrogène (stockage ou emploi de l')


La quantité totale susceptible d'être présente dans l'installation étant :

1. Supérieure ou égale à 50 t : (A - 2) S
2. Supérieure ou égale à 1 t, mais inférieure à 50 t : (A - 2)
3. Supérieure ou égale à 100 kg, mais inférieure à 1 t : (D)

* rayon d ’affichage en km. 31


IV. Réglementation et normalisation
Textes rapportés aux rubriques spécifiques à l ’hydrogène :
± Arrêté du 12/02/98 relatif aux prescriptions technique de la rubrique
1416
Application aux :
- installations de stockage d’H2 liquéfié à basse température ;
- installations de stockage d’H2 sous pression à température ambiante ;
- ou installations mixtes.

± Circulaire du 24/05/76 relative aux dépôts d'hydrogène liquide


Application aux installations soumises à autorisation.

± Arrêté du 24/08/98 relatif aux installations de remplissage ou de


distribution de gaz inflammables liquéfiés soumises à déclaration
(rubrique 1414)

* rayon d ’affichage en km. 32


V. Réglementation et Normalisation : constats

1. Réglementation existant uniquement pour H2 produit chimique


² Écarts importants entre les impositions réglementaires des
différents pays
² Écarts importants entre l’approche transports MD et installations
fixes
2. L’EUROPE (CE) demandeuse de travaux de recherche pré-
normative pour l ’utilisation de l’H2 comme vecteur énergétique
(du type projet EIHP)
3. Normalisation encore à ses débuts ; l’écriture des normes est un
processus lent
4. Implication des Industriels français : trop timide à ce jour

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Sécurité : constats

1. Pas de problèmes spécifiques dans les installations


industrielles et dans les transports : risques connus et
maîtrisables

2. Difficultés d’évaluer les distances de sécurité

3. Peur de l ’hydrogène, syndrome Hindenburg

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V. Conclusion : actions à mener pour promouvoir
l ’H2 comme vecteur énergétique
± Au niveau de la sécurité :
- développer les connaissances sur la phénoménologie et les
risques de l’H2
- intégrer l’aspect sécurité dès la conception d’un système
utilisant de l ’hydrogène, par la réalisation d ’études de risques
± Au niveau humain :
- étude sur l’acceptabilité sociale du risque H2
- travailler sur l ’image de l ’H2 : éducation, formation
± Au niveau technique :
- élaborer une infrastructure de distribution de l ’H2
- promouvoir l ’utilisation d ’équipements spécifiques à l ’hydrogène
adaptés au contexte d ’utilisation (normes, réglementations, …)

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