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non-sens-de-la-prison/

Sur la fonction du récit →https://www.litteralutte.com/une-histoire-personnelle-de-lultragauche-


entre-theorie-et-recit/ ok

Table des matières


revoir le titre.....................................................................................................................................4
La maladie (mentale) comme fait social.....................................................................................4
La répression psychiatrique........................................................................................................5
Travail, psychiatrie et neuroleptiques..............................................................................................5
La maladie à l’aune du travail.....................................................................................................6
« Chosification » des psychiatrisé·e·s.........................................................................................8

points fondamentaux à évoquer :


→ la maladie comme fait social et non comme fait biologique → ok
→ la citation de Marx → sur les limites physiques comme limites du travail
→ le fait que le facteur essentiel pour déterminer si une personne est malade ou non est le travail →
et que le travail constitue le cœur du « soin » → p.155 à 162
→ sur comment les soignants se protègent avec un vocabulaire nosographique → p.81
→ sur le racisme, comment la discrimination validiste se double d’un racisme pp.87-88 → et
puisque pas « soignables » on préconise leur « rapatriement » pp.88-89
→ sur les neuroleptiques p.98
→ sur la ondition de psychiatre → p.150 / ok
→ sur le rôle des psychiatre et l’interprétation → p.153

Le capitalisme et son Université sont logiques :


ils n’ignorent pas l’identité répressive du geste préfectoral et du
geste thérapeutique, mais essaient, dans un effort moribond de
rationalité, de planifier les rivalités néfastes entre ces différentes
institutions, et de concilier, en un front opérationnel, médecins,
flics et psychiatres.
p.62

J’avais donc ma technique


personnelle pour avoir des prétentions à modifier le milieu. Faire
de l’expression corporelle, c’était s’inscrire contre la psychiatrie
répressive où la première chose que l’on trouve à opposer à une
« entrée agitée », c’est la contrainte musculaire en attendant la
piqûre. À l’extrême, il s’agissait d’installer des relations où se
manifeste le désir. Psychothérapie institutionnelle sans psychiatre,
sans hiérarchie, psychothérapie impossible.
p.74

On dit souvent que la plus grande


difficulté, quand on rentre dans un hôpital psychiatrique, c’est d’en
sortir. Cela a besoin d’être nuancé. Il me semble que lorsqu’on est
malade « frais » en hôpital psychiatrique, la plus grande difficulté
est de sortir quand on a envie de sortir et de rester quand on a [p.114]
envie de rester. C’est pourquoi, chaque semaine, il y avait un cer-
tain nombre de malades qui DEVAIENT sortir, généralement en
fonction du nombre des entrées, et aussi, plus accessoirement, des
statistiques dont le patron avait besoin pour l’aménagement futur de
ses services. C’est ainsi que certains candidats à la guérison étaient
présentés par le personnel, parmi lesquels le médecin-chef choisis-
sait en dernière extrémité. C’est ainsi que tous ces cas bâtards de
malades sans histoire, simplement vidés de leur force de travail au
point d’être contents de trouver là le gîte et le couvert, se faisaient
entendre dire du jour au lendemain qu’ » ils s’étaient assez reposés »
et ressortaient comme ils étaient entrés, avec du Valium en plus.
En général, ils revenaient quelques jours ou quelques semaines
plus tard, et, à mesure que le personnel les assimilait au mobilier,
se transformaient progressivement en chroniques. [p.115]
pp.114-115

J’étais régulièrement pris de vertige. Je me vivais comme le


collaborateur nazi d’un univers morbide. La maladie mentale
n’avait jamais existé, c’était un concept confortable pour aiguiller
les indésirables vers la mort lente, un cache-misère qui permet-
tait, sous le couvert d’institutions prétendument psychiatriques,
toutes les entreprises euthanasiques. Hitler à visage humain
n’avait plus besoin de faire des piqûres d’essence. Le malade
de « Colline » avait-il été pendu ? Ou lui avait-on fait avaler une
ampoule de cyanure ? C’était la première fois que j’étais investi
d’une quelconque responsabilité dans cette société. Chaque cas
me confirmait dans ma conviction que la maladie mentale n’avait
jamais existé. Il faut dire que moi-même n’acceptais, ni pour moi
ni pour les autres, les cadres normatifs de cette société.
J’étais en plein délire…
p.116

maladie comme fait social


et matériel. Elle est le lieu possible d’une pratique proprement
révolutionnaire.

Titre
chapô
intro / encart maison d’édition
la folie sur deux modes, le tabou ou l’esthétisation
évoquer d’emblée le SPK et l’angle dans lequel se situe Gérard Hof,
première partie : La maladie comme fait social
→ revenir sur la manière dont même Guattari ou Deleuze font de la folie une entité
/ Encart Gérard Hof
deuxième partie : «
https://editionsmeteores.com/la-breche/

Je ne serai plus psychiatre. — Initialement publié en 1976 aux éditions Stock, le récit de Gérard
Hof [1943 - 2011] est l’une des voix d’une « constellation révolutionnaire qui, en France, s’est
opposée tant à l’existence de l’asile qu’au mouvement réformateur »1. Je ne serai plus psychiatre
est le récit d’un jeune psychiatre portant l’espoir d’une évolution émancipatrice du soin
psychiatrique, que ce dernier soit certes humain, mais avant tout révolutionnaire. Que le soin
psychiatrique ne soit plus simplement l’instrument du capitalisme, s’articulant à la lutte
émancipatrice contre cette organisation sociale mortifère. Ainsi Gérard Hof s’inscrit dans une
tendance abolitionniste de la psychiatrie.

La réédition de ce Je ne serai plus psychiatre aux jeunes éditions Belges Météores s’inscrit dans
une dimension de transmission. Celle d’une lutte aujourd’hui oubliée — pour ne pas dire ignorée.
Une contestation de la psychiatrie radicalement révolutionnaire, ne se situant pas dans le cadre de la
réforme du soin psychiatrique ou d’un renouvellement de ses pratiques — on peut évoquer à ce
titre, pour ne citer que cet exemple, Abolir la contention du psychiatre Mathieu Belahsen
récemment paru aux éditions Libertalia. En vue de rendre la psychiatrie plus « humaine », mais à la
manière de la lutte anti-carcérale, il s’agit pour Gérard Hof d’en finir avec la psychiatrie, l’abolir
pour de bon.

Notons que cette édition de Je ne serai plus psychiatre s’accompagne d’une riche préface de
l’éditeur : Renaud-Selim Sanli. Elle permet de mettre au jour les enjeux politiques, éthiques et

1 Préface de Renaud-Selim Sanli, p.10.


émancipateurs de l’ouvrage, à sa parution et ce qu’il nous dit encore aujourd’hui de la violence que
subissent les pyschiatrisé·e·s, une préface qui permet par la même occasion de mieux comprendre le
contexte dans lequel s’inscrit le récit de Gérard Hof. Ainsi Je ne serai plus psychiatre serait à
ranger parmi la riche lignée de récits de militants où le « simple » témoignage se double d’une
d’analyse et d’une critique sociale et matérialiste de la psychiatrie 2 — parfois empreinte d’accents
pamphlétaires. Le récit de Gérard Hof est à appréhender dans cette double perspective, testimoniale
et critique — loin des catégories réifiantes qui ont encore cours aujourd’hui en littérature. Et c’est
bien sous ce double prisme que nous aborderons cet ouvrage nécessaire.

J’étais régulièrement pris de vertige. Je me vivais comme le collaborateur nazi d’un univers
morbide. La maladie mentale n’avait jamais existé, c’était un concept confortable pour aiguiller les
indésirables vers la mort lente, un cache-misère qui permettait, sous le couvert d’institutions
prétendument psychiatriques, toutes les entreprises euthanasiques. (…) C’était la première fois que
j’étais investi d’une quelconque responsabilité dans cette société. Chaque cas me confirmait dans
ma conviction que la maladie mentale n’avait jamais existé. Il faut dire que moi-même n’acceptais,
ni pour moi ni pour les autres, les cadres normatifs de cette société.
J’étais en plein délire...
p.116

revoir le titre
Par le récit de son expérience en tant que jeune psychiatre et des analyses qu’il développe, Gérard
Hof n’a de cesse de montrer la violence de la psychiatrie, « chosifiant » celles et ceux qui ont
recours à elle, le rôle primordial joué les personnels soignants dans le cadre de l’organisation
sociale capitaliste.

La maladie (mentale) comme fait social


Une anti-psychiatrie matérialiste et révolutionnaire, qu’on le précise d’emblée, nous sommes bien
loin ici des thèses développées par Gilles Deleuze et Félix Guattari ; point de romantisation de la
« folie » ici, pas trace du mythe du schizo 3, ni schizoanalyse ni psychothérapie institutionnelle. En
effet, le point aveugle, selon Gérard Hof, de ce type d’antipsychiatrie est qu’elle ne tient pas compte
du caractère éminemment social de « maladie mentale ». Ainsi pour Hérard Hof il s’agit
d’appréhender des concepts naturalisés comme « malade mentale » ou « maladie mentale » dans
leur rapport à l’organisation sociale, et plus particulièrement capitaliste, contrecarrant ainsi le
2
3 Point sur lequel, il faut le souligner, Gilles Deleuze et Félix Guattari sont revenus voir
« concept métaphysique d’un principe de folie essentielle ».[p.81].4 Et c’est bien cet élément que
comprend assez rapidement Gérard Hof en tant que jeune psychiatre : l’inefficience du psychiatre
ou plutôt le rôle répressif qu’il joue.

La répression psychiatrique

Au sein de l’organisation sociale articulée autour du travail et de la marchandise, le rôle du


psychiatre s’assimile à celui de la police5 « élaguant de la personne tout ce qui est inutile à la
production » [p.91]. Confronté directement à ce rôle, à cette « responsabilité » [p.116], Gérard Hof,
dans et par sa lecture marxiste de la position de psychiatre, constate que le soignant ne se réduit
qu’à « la fonction de mannequin placé là par le système pour faire illusion et détourner sur lui toutes
les agressivités et revendications qu’il était bien incapable de satisfaire.» [p.88] Que, dans les
conditions de cette organisation sociale, le soigné ne peut être que « chosifié » [p.81]. Le soignant,
de l’autre, se recroquevillant derrière des postures, adoptant dès lors un « vocabulaire
nosographique »6, « parquant définitivement le malade derrière une étiquette n’expliquant rien, mais
affublant le malaise de mots savants. »[p.81]

Le lien entre savoir et pouvoir est ténu, tout savoir relève d’un pouvoir donné. Le savoir
psychiatrique n’échappe pas à cela. Ainsi la lecture de la réalité

À l’hôpital, cette entreprise chargée de traiter la vie humaine en non-vie, pour n’en extraire que le
principe de marchandise, marchandise-travail et consommation de marchandise, il apparaissait, de
façon plus nette que dans d’autres administrations bureaucratiques, que la lutte des classes avait
investi le champ des fantasmes collectifs. L’interprétation en vigueur n’avait rien à voir avec la
réalité, c’était l’interprétation de la classe dominante, celle des médecins et des internes cultivés qui
ONT LE DROIT D’INTERPRÉTER.
p.153

Travail, psychiatrie et neuroleptiques


Loin de toute esthétisation de la folie, mythe qui remonte au XIX e siècle et dont nous avons exploré
certains aspects en retraçant la genèse d’une confrontation entre littérature et psychiatrie, Gérard
Hof appréhende la « maladie » dans son rapport au

4 Nous situant dans le contexte d’un récit, Gérard Hof ne procède pas une analyse historique de la folie, il s’agit pour
lui ‘évoquer la manière dont appréhendée la folie tant depuis sa situation tant du point de vue des psychiatrisé·e·s
que du personnel « soignant ».
5 À l’instar de l’enseignant ou de ...
6 Nosographie : Description et classification méthodique des maladies.
La maladie à l’aune du travail
dans sa relation avec le travail, catégorie centrale du capitalisme. Partant de son expérience de
psychiatre, Gérard Hof dresse le constat que les personnes sont jugées malades ou non en fonction
de leur capacité à « travailler »7. Un témoignage qui se double d’une analyse matérialiste, ayant
pour amorce deux textes théoriques importants : celui de Jean-Claude Polack8, La médecine du
capital [1976, Maspero] et du SPK [Sozialistisches Patientenkollektiv, Collectif socialiste de
patients]9 et de leur manifeste Faire de la maladie une arme [1971, Maspero & 1973, Champs
libre]. Gérard Hof, à l’instar du SPK, appuyent leur analyse sur un extrait de La médecine du
captial où Jean-Claude Polack :

Il n’en est que plus dérisoire de parler de médecine du travail. Notre société ne connaît pas d’autre
spécialité. Toute médecine est acte de régulation de la capacité de travail. La norme du travail
imprègne le jugement du praticien comme un point de repère plus précis qu’une valeur biologique
ou physiologique mesurable.10
Jean-Claude Polack, p.35

Le concept de travail, en tant que catégorie du capitalisme, l’ensemble de l’organiation sociale


capitaliste est articulée autour du concept de travail 11, ce dernier étant naturalisé ; c’est bien à partir
de la capacité de telle ou telle personne à travailler, à participer à la production de la (sur)valeur que
l’on jugera — que l’on interprétera — si la personne est «malade» ou non. La «maladie» apparaît
dès lors comme «limite interne à la reproduction du capital» [p.21, préface]. Et plus
particulièrement ce que l’on nomme la « maladie mentale» car les corps de ces personnes sont
considérés comme valides, chose qu’affirme sans ambages le ministre de la santé [1957-1958] Félix
Houphouët-Boigny [1905-1993] : « Le problème de l’organisation du travail des malades mentaux
s’est posé dès l’origine en raison du fait que ces malades sont en général valides. »12

7 On ne compte pas le nombre d’occurrences à ce sujet : « Le malade est guéri, il a repris son travail » [p.93], « il
fallait, coûte que coûte, le réadapter [le malade], le resocialiser, lui faire reprendre son travail. » [p.96]
8 À l’encontre de qui Gérard Hof portera malgré tout certains griefs, le qualifiant de « marxiste à ses heures »[p.156]
lui reprochant de ne pas appréhender la maladie mentale comme un fait social. [p.83] On notera également que Hof
orthographie (sciemment ou non) son nom en usant de deux « l » tout au long du récit
9 Pour un aperçu du SPK https://www.multitudes.net/praxis-rebelles-et-pragmatiques-collectives-le-sozialistisches-
patientenkollektiv-s-p-k/
10
11 Le travail constituant le médiateur principal selon Moïshe Postone
12 Houphouët-Boigny, Circulaire du 4 février 1958, portant organisation du travail des malades mentaux en traitement
dans les hôpitaux psychiatriques, (non parue au Journal officiel), cité in Gérard Hof, Je ne serai plus psychiatre,
Bruxelles, éditions Météores, 2023, p.156, à retrouver également sur le site Histoire de la psychiatrie en France :
http://psychiatrie.histoire.free.fr/legisl/libre/1958.htm
Ainsi en vue d’éviter que ces corps ne soient oisifs, inutilisés, il est nécessaire de les réadapter au
plus au travail. À l’instar des prisons, nous avons exploré la question avec l’ouvrage du collectif La
brèche, les asiles usent de la force de travail disponible au sein de l’établissement. Ainsi les malades
fournissent « le travail effectif de tous les services généraux, de la lingerie en passant par les
courses, les travaux de terrassement...etc. » [p.150] ; en prison, à l’asile ou en-dehors rien ne doit
échapper au travail, au capitalisme. En effet, au sein d’une organisation sociale capitaliste, « il serait
[inconcevable que] la force de travail de trente mille personnes reste inutilisée ». [p.160]

C’est ainsi que le malade usé, qui ne parvient plus à se prendre en charge dehors en vendant sa force
de travail à faire des gestes atomisés, fragmentés, dépourvus de signification, et qui se retrouve
logé, nourri, brisé, asilifié, ne saurait l’être GRATUITEMENT. Tôt ou tard, il se retrouve confronté
au même travail aliénant, celui qui l’a rendu malade, investi, cette fois, de qualités thérapeutiques
rédemptrices, comme est hypocritement investie de « valeur thérapeutique » la manipulation de
1,50 F par jour. Le gîte et le couvert à ceux que la société n’ose plus supprimer, et la rentabilisation
de l’ennui. Il n’y a rien pour ceux qui sortent de la production, rien que l’ennui récupéré dans un
retour à une sous-production aliénée, concédée comme une charité : travail à façon, « thérapeutique
» dans les hôpitaux psychiatriques, punition dans les prisons.
p.161

« Chosification » des psychiatrisé·e·s

Dans l’ensemble de ce processus, les neuroleptiques jouent un rôle primordial — nous avons traité
de cette question avec Lettres au recours chimique13. Ces neuroleptiques devenus « fenêtre aveugle
contre laquelle le malade ne peut plus que venir éternellement buter. »[p.93] Un constat que tire
Gérard Hof de sa pratique de la psychiatrie, témoignant de la dégradation de l’état de santé de
nombre de psychiatrisée suite à la prise de neuroleptique. Constat qui se double, une fois de plus,
d’une approche théorique, dans le contexte de l’organisation sociale capitaliste le neuroleptique
incarne, au sein du domaine thérapeutique « la tendance autodestructrice du capitalisme qui ne peut
plus contenir les forces productives qu’il a créées. »[p.146]

En d’autres termes les dommages sur la santé mentale que cause le capitalisme et sa course effrénée
à la (sur)valeur, la violence du travail, va d’une part mettre sur la touche un certain nombre de
personnes qui ne pourront se plier aux exigences de cette organisation sociale, ces personnes seront
dès lors considérées comme malades, de l’autre ces pressions engendreront ce que l’on appellera,
communément, des « troubles mentaux ». Dans ce cadre le neuroleptique représente le parfait
moyen pour soit pour réadapter le psychiatrisé : « Le neuroleptisé incarne le citoyen moyen, tel que
le rêve et nous le représente la bourgeoisie, camisolé chimiquement devant sa télévision. » [p.146].
13 Que nous avons lu en le mettant en relation avec Psyhatric hegemony : A marxist theory of Mental Illness
[L’hégémonie psychiatrique, une théorie marxiste de la maladie mentale] de Burce M.Z Cohen [Londres, Plagrave
Macmilan] non traduit en français.
Soit de pratiquer ce que nomme Gérard Hof, à la suite du SPK, une euthanasie différentielle14
« élaguant [débarrassant] de la personne tout ce qui est inutile à la production »[pp.90-91],
permettant ainsi de faire fonctionner malgré tout ces corps au profit du capital. [p.143]

Je n’ai parlé, bien sûr, que de cas extrêmes. Je pourrais aussi raconter comment on conduit des gens
à la mort lente dans le détail quotidien. Le plus triste, quand on est psychiatre, c’est que, avec la
meilleure volonté du monde, on ne sera jamais pour la société que ce geste séparateur entre raison et
folie. Dirai-je la quantité de précautions qu’il faut pour renvoyer la fugueuse de seize ans dans sa
famille, malgré sa famille, et faire le maximum pour pouvoir oser prétendre avoir une chance
quelconque de ne pas avoir commis l’irréparable : que la fille devienne folle, parce que considérée
comme telle ?
p.143

Nous nous sommes bornés à livrer la substance de ce Je ne serai plus psychiatre, en nous appuyant
à la fois sur le versant théorique sur lequel s’est appuyé Gérard Hof, mais également le versant
testimonial. Ce dernier ne devant en aucun cas être considéré comme une faiblesse de l’ouvrage 15. Il
nous semble au contraire que le témoignage de Hof permet de mettre en situation ses analyses,
d’illustrer le propos théorique. Le caractère pamphlétaire 16 de Je ne serai plus psychiatre cristallise
lui aussi un état de la pensée Gérard Hof et de sa situation. Car Je ne serai plus psychiatre reste un
récit, et c’est là sa force principale, s’inscrivant dans la longue tradition des récits politiques, récit
dédié « À tou·tes les enfermé·es et psychiatrisé·es qui luttent contre, ou non. »

14 « Euthanasie différentielle signifie la destruction de masse, systématique et organisée de la vie, par des procédés
subtils, difficilement perceptibles et plus ou moins rapides. Des patients du SPK ont eu l’occasion de faire
l’expérience de tentatives de ce genre à la clinique psychiatrique de l’université de Heidelberg, surtout de la part
des médecins Von Bayer, Blankenbug et Oesterreich. », SPK, « Le Sozialistisches Patientenkollektiv (SPK) »,
Annexe 4, Je ne serai plus psychiatre, op.cit, p.223.
15 Évoquer la critique que fait Guattari de
16 Qui se traduit par un rapprochement entre « fours crématoires » et neuroleptiques [p.163]
Et c’est bien contre ces positions que tente de lutter Gérard Hof en tant que psychiatre, d’abord au
niveau de sa pratique individuelle en tant que psychiatre (citer un passage et un numéro de page),
puis au niveau macrostructurel, en impulsant un mouvement à l’intérieur de la profession. Tentant
de s’organiser collectivement, →
nous avons par ailleurs vu le rôle qu’a joué cette dernière en littérature et sur la concept de style.

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