Le Sorcier du pays des rus
Par Cyriaque Delevallée
Introduction
Présentation
Le Sorcier du pays des Rus est un scénario de
rêve d’archétype d’un genre particulier. En
effet, les voyageurs vont devoir réaliser non
seulement leur rêve d’archétype, mais
également celui d’un autre voyageur. Leur
implication sera donc autant égoïste
qu’altruiste. Il s’avérera que ce n’est pas un rêve
d’archétype, mais un appel à l’aide. C’est aussi
un scénario de voyage, à travers un pays vaste
aux multiples facettes, les voyageurs passeront
un moment au Pays des Rus.
Le scénario, à l’exception de sa dernière partie
où le paysage se réduira fortement, laisse une
grande liberté aux voyageurs. C’est à eux de
Résumé du scénario.
Les voyageurs errent dans le Pays des Rus, un
pays parcouru par de multiples cours d’eau plus
ou moins profonds, et finissent par rencontrer
un rucher, un ancien voyageur qui finit par
s’installer dans un petit village à flanc de
colline. Durant la nuit, les voyageurs font un
rêve où, eux-mêmes villageois, ils assistent à
l’arrivée d’un étrange haut-rêvant sur un tapis
volant, tenant dans sa lampe un Oiseau de Feu
et qui d’un coup de son épée tue le volatile.
Ils se réveillent avec la conviction qu’ils doivent
revoir la scène. Le Rucher est on ne peut plus
d’accord, car il a fait le même rêve, il y a bien
des années, sans parvenir à le réaliser, mais il
en sait long. Grâce à ses indications, les
voyageurs peuvent ainsi localiser l’Oiseau de
Feu, le tapis, la lampe et l’épée. Ces artefacts
sont disséminés à travers le Pays des Rus.
La lampe, supposément la plus facile à trouver,
n’est plus là où elle devait être, mais entre les
mains d’une secte de moines aveugles qui lui
voue un culte. Les voyageurs doivent faire
preuve de discrétion et de tact pour s’en
emparer. Il n’est jamais prudent de se mêler de
la foi des autres.
Le tapis quant à lui appartient désormais à une
vieille sorcière. Elle confie une mission aux
voyageurs, en échange de quoi elle leur prêtera
décider aussi bien l’ordre que la manière de
récupérer les artefacts qui leur seront
nécessaires. Certaines méthodes seront plus
conseillées que d’autre, mais à cœur vaillant
(ou esprit retord), rien n’est impossible.
Il n’y a pas de consigne quant au niveau des
voyageurs, au Gardien des Rêves d’adapter
l’opposition à ses joueurs. Un groupe aux
talents multiples et divers s’en sortira très bien.
Quelques brutes, un ou deux sournois et des
diplomates feront tout à fait l’affaire. Un
groupe mixte de voyageurs et de voyageuses
est éminemment conseillé.
le tapis. Mission périlleuse s’il en est, car ils
doivent apaiser la colère d’un esprit sylvestre et
résoudre une affaire sordide.
L’épée, enfin, appartient à une reine guerrière
d’un peuple qui ne l’est pas moins. De plus, ce
peuple méprise les hommes. Il sera ardu de les
convaincre de céder l’artefact. Les voyageurs
doivent se montrer sous leur meilleur jour, faire
preuve de patience et de persuasion pour
acquérir l’épée… Ou bien passer par un tout
autre chemin tout aussi périlleux.
Une fois en possession de ces artefacts, il est
grand temps de se rendre à Bouïane, l’île où
niche l’Oiseau de Feu. Cependant, l’île est sous
la domination d’un terrible esprit thanataire.
Les voyageurs prudents et discrets doivent
pouvoir s’en sortir sans trop de casse car une
fois l’oiseau dans la lampe, ils doivent s’enfuir à
toutes jambes.
Une fois revenus à la colline, les voyageurs ainsi
que le rucher sont récompensés par la
réalisation de leur vision.
Le Pays des Rus, sa géographie, ses
habitants
Le Pays des Rus est un pays de prairies très
légèrement vallonnées et en partie couvertes
de forêts de bouleaux, de chênes, de pins et
d’épicéas. Les prairies sont peuplées d’animaux
de toutes sortes, que ce soient de cervidés, des
antilopes, des aligates ou de bovins comme les
aurochs ou les trisons, tandis qu’à l’ombre des
bois, loups, grizzals et tigres verts restent à
l’affût. Les rivières et étangs grouillent de
poissons de toutes sortes.
La région est quadrillée par de multiples cours
d’eau, que les autochtones nomment rus et qui
donnent leur nom au pays. Peu profond, les rus
sont rarement navigables et ne forment pas un
obstacle digne de ce nom. Il n’en reste pas
moins qu’ils rendent la région difficilement
praticable pour qui ne connaît par les gués et
comment s’y rendre. Inutile de se fier au
courant, les rus se croisent et se recroisent en
permanence. Un voyageur qui s’y fierait finirait
par tourner en rond sur un îlot cerné par des
rus peu profonds.
Le plus important des rus est le fleuve du Don-
des-dragons. C’est un fleuve tranquille
étendant paresseusement ses larges boucles
sur tout le pays, les rus y convergent si bien
qu’on ne sait jamais si tel ou tel ru est un ru
indépendant ou un bras du Don. Parcourant le
pays du nord au sud, il irrigue la région dans son
ensemble. Sur ses rives fertiles poussent des
champs de blémouds sans fins. Dans ses eaux
nagent de gigantesques et succulents poissons
et crustacés. Son lit large et son courant
paisible facilitent grandement la navigation.
Pour toutes ces raisons, il est synonyme
d’abondance et ses habitants le considèrent
comme une bénédiction offerte par les grands
rêveurs.
La plupart des villages doniens suivent le même
schéma. C’est un ensemble de maisons réunies
autour d’une place centrale ou le long d’un ru.
Ils sont en général entourés d’une palissade de
bois, mais plus on s’éloigne des rus navigables,
plus ces palissades sont rares. Les cités suivent
un modèle similaire, mais sont bien plus
imposantes. Les bâtiments en pierre sont peu
nombreux sur le Don, même dans les grosses
cités. Les matériaux de base sont le bois et
l’argile.
De nombreux bourgs ponctuent le cours du
Don-des-dragons, et le plus grand est Gift-sur-
le-Don. Cette cité est également la capitale du
Pays des Rus où vivent les Stars du Don,
souverains de ces terres. La cité de Gift-sur-le-
Don prospère grâce au commerce et l’artisanat
et elle est une étape importante pour les
caravanes et navires marchands qui sillonnent
le Don des dragons.
Car le pays des rus est une voie commerciale
majeure entre les royaumes de la Stormandie
et les cités de la Mer Caspiée. Ces deux pays
encadrent le pays des rus au Nord-Est et au
Sud-Ouest. À l’Est se trouvent les hautes
montagnes des Kharapates, contrée de
montagnes vagabondes peuplées de groins qui
descendent de temps à autre dans les rus pour
se livrer au pillage. Au sud du pays se trouve
une série de collines et plateaux arides peuplés
par quelques chevriers acariâtres. À l’ouest, les
rus laissent la place à une plaine de hautes
herbes, la Mer d’Herb. Cette steppe est
sillonnée par des clans de cyans ainsi que
d’autres créatures moins sympathiques, et
seules les caravanes les mieux armées s’y
risquent. Tout au nord du Pays des Rus se
trouve le Haut-Cours du Don, un pays de
collines escarpées peuplées par les terribles
ruses, mais nous y reviendrons. La source du
Don-des-dragons se perd ensuite dans des
terres inconnues, l’Outre-Don, loin au nord.
Le Don-des-dragons étant sillonné de toutes
part par de nombreuses embarcations, il n’est
donc pas compliqué pour des voyageurs de
trouver quelqu’un prêt à leur faire faire un bout
de chemin. Les pêcheurs sont tout à fait
disponibles pour arrondir leurs fins de mois et
pour changer de leur ennuyeux métier. Les
vieilles barques à vendre sont légion, mais aussi
souvent pleines de trous la prudence est de
mise. Les marchands peuvent prendre des
passagers contre espèces sonnantes et
trébuchantes, vous les trouverez dans les
bourgs et comptoirs semés sur le cours du Don-
des-dragons. D’autres navettes spécialisées
existent, elles sont plus chères mais ces navires
sont pensés pour prendre des passagers et font
d’agréables croisières. Il existe également la
guilde de la rivière, qui loue des embarcations.
Elle installe des comptoirs dans tous les bourgs
importants du Don, et son siège est à Gift-sur-
le-Don. Les gardes du Star possèdent bien des
embarcations rapides et sûres, mais ne
prennent jamais de passagers en dehors des
notables ou des prisonniers. Même les bleus,
qui sont en général étrangers aux affaires des
peaux-blêmes, mettent à disposition des
embarcations en échange d’objets de valeurs.
Histoire du Pays des Rus
D’aussi loin que remontent les mémoires, le
Pays des Rus a toujours été une région habitée
par l’humanité. Les doniens, car c’est comme
cela qu’ils se nomment, sont des gens aimables
et débonnaires, quoiqu’un peu timide avec les
étrangers. Ils ont le teint rougeaud et les
cheveux clairs. Ils vivent dans de petites
communautés agricoles aux maisons colorées.
En effet, les doniens aiment les images et
ornent leurs maisons de nombreuses couleurs
et sculptures sur bois.
La prospérité de la région a longtemps attiré la
convoitise de leurs voisins, surtout celle des
pillards stormands et des colons caspiés. Bien
obligés de se défendre, les doniens ont élevé
autour de leurs villages des palissades de bois.
Mais la plupart des villages bordant le cours du
Don-des-dragons subit les assauts des pillards
et colonisateurs. Seuls les villages les plus gros,
se constituant en cités-états, parvinrent à
résister.
Ces cités se choisirent des héros, qui s’unirent
pour repousser les envahisseurs, et ainsi
naquirent les Stars du Don-des-dragons. De
nombreuses années de conflits furent
nécessaire pour repousser les envahisseurs. Le
pays des Rus connut enfin la paix, et les héros,
troquant leurs épées pour une charrue,
retournèrent à la terre. Pour remercier les
dragons de leur don et de leur aide dans la
victoire, les doniens érigèrent une cité
fabuleuse, un cadeau pour les grands rêveurs,
et à sa tête fut placé le plus glorieux de ces
Stars. Depuis, le Star de Gift-sur-le-Don est le
souverain du Pays des Rus et assure, en théorie,
la sécurité partout où coule le fleuve.
De nos jours, les Stars peinent à réunir
suffisamment de troupes pour assurer la
sécurité du cours principal du Don-des-
dragons. Chaque communauté du Pays des Rus
assure donc seule sa propre sécurité. En dehors
des cités et des gros bourgs, les bogatyrs et les
polianitsas, des hommes et des femmes en
quête d’aventures et surtout d’exploits, sont en
première ligne contre ce qui menace la
quiétude du Pays des Rus. Ces chevaliers
errants causent souvent plus de problèmes
qu’ils n’en résolvent, mais ils sont populaires
auprès des doniens qui apprécient leurs
aventures et les chansons dont ils sont les
héros, alors les Stars, plutôt que de les
réprimander, les laissent battre la campagne.
La population
Les habitants des rus qui vivent au bord du
Don-des-dragons se nomment les doniens, et
c’est sous ce nom que l’on désigne l’ensemble
des habitants du Pays des Rus. Ce sont pour la
plupart des fermiers, des pêcheurs et des
artisans, habitués à côtoyer les étrangers.
Beaucoup d’entre eux vivent dans des bourgs
et des cités populeuses le long du fleuve.
Les doniens vivant sur les cours secondaires du
Don-des-dragons et sur les rus éloignés se
surnomment les verts, en référence à la
couleur que prennent les rus quand ils longent
les prairies ou passent sous les frondaisons. Ce
sont de solides fermiers, vivant paisiblement de
leurs récoltes. Ils n’ont pas vraiment l’habitude
de voir des étrangers et seront toujours curieux
d’avoir des nouvelles du monde. Cependant,
des siècles de pillages Stormands et Caspiés ont
quelque peu émoussé leur curiosité et ils
peuvent se montrer très méfiants les mauvais
jours. Mais ils sont assez faciles à amadouer et
se feront une joie d’accueillir les voyageurs de
passage.
Les doniens de l’Ouest, vivant aux abords de la
steppe, se nomment les bruns. Leurs rus se
perdent dans des marécages et des bois
brumeux. Ce sont des gens taciturnes, vivant
sur les rares bandes de terres suffisamment
stables pour y pratiquer l’agriculture. Ils
n’aiment guère les étrangers, car ce sont les rus
bruns qui ont le plus souffert de la guerre
contre les cités caspiées. C’était autrefois une
région prospère, ce n’est plus qu’un marigot
peuplé de spectres et de créatures plus
angoissantes encore. C’est pour cette raison
qu’ils ne quittent que rarement leurs villages,
et que leurs sculptures et dessins sont sinistres
et inquiétants.
Les doniens de l’Est, habitant les contreforts
des Kharapates, sont les blancs, en référence à
leur rus rapides et pleins d’écumes bondissants
sur les collines. C’est une région peuplée de
bergers, vivant dans des fermettes isolées, dans
des combes cachées. Des villages trop gros ou
trop voyants seraient des cibles idéales pour les
groins, c’est pourquoi les blancs gardent leurs
murs vierges et leurs vêtements écrus. En
revanche, leurs intérieurs sont décorés par des
tapis de laine magnifiques aux couleurs
éclatantes. S’ils semblent de prime abord des
gens taiseux et secrets, ils se révèlent être
aimables et soucieux du bien-être de leurs
visiteurs.
Le Haut-cours du Don est en théorie sous
l’autorité du Star, mais la région est gouvernée
par un peuple de femmes guerrières d’origine
stormande, nommées les ruses. Elles
descendaient de temps à autre dans les rus
pour piller et asservir les doniens. Aujourd’hui,
ces raids sont rares et la Volga, leur souveraine,
semble privilégier des contacts moins brutaux
et plus lucratifs. Elles restent cependant très
indépendantes et le Haut-cours du Don porte
désormais le nom de Pays de la Volga.
Les rus navigables sont sillonnés par des
marchands caspiés et stormands, des pêcheurs
doniens mais aussi par les bleus. Les bleus se
nomment ainsi non pas en référence au reflet
du ciel sur le Don-des-dragons, mais parce que
ce sont des cyans. Probablement originaires de
la Mer d’Herb, les clans cyans des rivières se
sont installés dans le pays il y a longtemps, bien
avant que les Stars des rus fondent Gift-sur-le-
Don. Chaque clan vit dans une caravane de
bateaux larges et plats qu’ils décorent
superbement, à l’image des maisons de leurs
voisins doniens. Ce sont des pêcheurs, mais
surtout des marchands très friands de perles et
de gemmes. Cependant, il arrive qu’un clan se
mue en pillards, sans aucun signe avant-
coureur, et fondent sur un village ou un bourg
dans une frénésie sanglante. Les doniens s’en
méfient autant qu’ils commercent avec eux.
Le Sorcier du pays des rus
Il y avait au second âge un haut-rêvant du nom
d’Yvan Stareïy. Inlassable voyageur, il fut l’un
des premiers à tenter des excursions
transoniriques, bien avant que celles-ci ne
provoquent le Grand Réveil. Il conçut durant
ses voyages un fabuleux tapis volant lui servant
de moyen de transport et qui, selon ses dires,
était son plus fidèle ami.
Ses voyages finirent par attirer l’attention
d’étranges créatures qui, comme lui, passaient
de rêve en rêve. Tantôt terrifiantes, tantôt
fascinantes, il les étudia et parvint à rentrer en
contact avec elles. Il se lia d’amitié avec l’une de
ces entités de rêve, l’Oiseau de Feu, dont le
nom véritable resta un secret entre eux deux.
Leurs liens furent si forts que ce dernier
enseigna au haut-rêvant comment traverser les
limbes en toute sécurité et lui fit cadeau de
l’une de ses plumes, qu’Yvan sertit dans son
épée.
Avec son épée et son tapis, le haut-rêvant vécut
maintes aventures, devenant célèbre dans tout
le multi-rêve ainsi que dans son pays, le Pays
des Rus. On le disait intrépide et capable de
faire face à tous les dangers, on le disait sage et
l’on cherchait ses conseils, on le disait
imprévisible et on se méfiait de ses allées et
venues suspectes.
Un jour, il reçut un appel en rêve : l’Oiseau de
Feu avait besoin de son aide. La créature était
terriblement blessée et affaiblie. Quelle fut
l’origine de cet état ? Nul ne le sait. Yvan partit
à sa rencontre, sur l’île de Bouïane, sous l’Arbre
de Vie, là où niche l’Oiseau de Feu. Constatant
son état, Yvan conçut un œuf, une cage de verre
et d’or éclatante, sensé restaurer les forces de
la créature et guérir ses maux. Il y glissa l’oiseau
réduit à la taille d’un oisillon.
Pendant un temps, Yvan voyagea en emportant
avec lui un étrange artefact, qu’on se mit à
appeler la Lampe car elle brillait d’un grand
éclat. La beauté de la Lampe subjuguait
quiconque posait les yeux dessus et éveillait
dans les cœurs l’envie de l’admirer à jamais. Le
haut-rêvant ne comprenait pas vraiment
pourquoi ce qu’il persistait à appeler l’œuf
attirait autant l’admiration. Et pourtant, la
Lampe changeait en même temps qu’elle
changeait l’oiseau convalescent. L’Oiseau de
Feu faisait de l’œuf autant une création de Yvan
que la sienne.
Arriva le jour, alors qu’Yvan se reposait au bord
d’un ruisseau, où l’Oiseau de Feu demanda sa
libération. Yvan s’en alla trouver une colline,
faisant face au soleil couchant, selon les
instructions de son ami. Et alors que le soleil
disparaissait à l’horizon, il libéra la créature qui
s’envola vers le couchant, dans un ultime adieu.
Yvan ne le revit jamais plus.
Devenu inutile, l’œuf aurait dû être détruit mais
Yvan n’en eut pas le cœur. Il l’offrit donc à un
souverain de sa connaissance. Yvan vécut
encore longtemps et fit de nombreux voyages,
mais l’âge finit par le rattraper et il se lassa.
Ayant perdu le goût pour le voyage, il donna
son épée à un chevalier errant. L’arme vécut de
nombreuses aventures entre les mains de
maints héros. Avant de se retirer
complètement et de se consacrer à un repos
bien mérité, Yvan confia son plus vieux
compagnon, le tapis volant, à une de ses plus
vieilles amies qui, il le savait, en ferait bon
usage.
Après une longue et paisible retraite, le haut-
rêvant s’éteignit de sa belle mort, dans la paix
et la sérénité. Cela eut lieu des siècles avant la
fin du second âge.
Les artefacts d’Yvan Stareïy
L’Épée-plume est une épée cyane d’apparat,
c’est à dire inutile en combat réel. C’est une très
belle épée parfaitement équilibrée, à la garde
sertie de gemmes et à la poignée enveloppée
de soie. Son pommeau est une grosse gemme
de feu. Sa lame est d’un acier si pur qu’un
gnome en pleurerait de joie en le voyant.
Cependant, la lame ne couperait même pas un
courant d’air. Son intérêt se trouve à l’intérieur.
En effet, Yvan y a fait sertir une plume que
l’Oiseau de Feu lui avait offert, lui conférant
certains pouvoirs. Tout d’abord, elle est
mortellement efficace contre les créatures du
cauchemar, d’autant qu’elle met
automatiquement en phase celui qui la manie
avec les entités du cauchemar qu’il combat.
D’accessoire, elle devient l’arme la plus
mortelle que l’on puisse espérer. Mais ce n’est
que le moindre de ses pouvoirs. Au sommet de
sa puissance, c’était une clef : l’Épée-plume
tranchait à travers les limbes et générait des
passages capables de mener d’un bout à l’autre
du rêve en un instant. Elle permettait aussi de
traverser ces limbes sans encombre. Hélas, le
second âge n’est plus, et ses pouvoirs, surtout
si loin de l’Oiseau de Feu, ne sont plus que
l’ombre d’eux-mêmes.
La Lampe fut façonnée par Yvan pour l’Oiseau
de Feu, un écrin digne de sa splendeur et
surtout un artefact pour maintenir la créature
en vie. Le Haut-Rêvant y a combiné, grâce à la
voie de Narcos de nombreux sorts d’Hypnos,
Oniros et Thanatos. La Lampe irradie le rêve, au
point que cela en devient insupportable pour
qui la regarde directement. Des générations de
haut-rêvants se sont arraché les cheveux pour
tenter de comprendre comment elle pouvait
bien fonctionner. On suppose que si l’ouvrage
est une fabrication d’Yvan, l’Oiseau de Feu l’a
façonné tout autant, sinon plus, que le sorcier
durant son incubation. Après la libération de
l’Oiseau de Feu, n’en ayant plus l’usage, Yvan
s’était d’abord dit qu’il devrait la détruire. Mais
il avait vu à quel point celle-ci avait fait grande
impression, et lui-même se disait qu’il serait
dommage de s’en débarrasser. Ne pouvant pas
l’emporter partout où il allait, il décida de
l’emmener à un endroit où elle serait visible de
tous. Il en fit alors cadeau aux Stars du Don
pour qu’ils l’exposent dans leur palais des
étoiles. Elle devint l’un des plus grands trésors
du Pays des Rus. Depuis, chaque année, lors
d’un festival, elle est promenée dans tout Gift-
sur-le-Don et montrée au peuple dans un grand
moment de liesse.
Le tapis est un magnifique tapis de laine de la
plus grande qualité. Son motif principal est un
long dragon serpentin bleu, aux écailles
scintillantes de pourpre et d’or, qui étend ses
anneaux sur tout le tapis tel le fil d’une trame,
et finit par se mordre la queue en son centre.
Ce motif semble onduler tout en restant
parfaitement immobile, il est cependant
impossible de suivre le dragon de la tête à la
queue sans perdre le fil. Des animaux de toutes
sortes vivent entre ses anneaux, bien souvent
des chimères, des créatures du rêve, et certains
disent y avoir vu Yvan lui-même leur tirer la
langue avant de disparaître. Les franges du
tapis sont d’un splendide vert émeraude. De
son vivant, le haut-rêvant a, à plusieurs reprise,
affirmé que ce tapis était sa plus belle création,
et les narcosiens frémiront à la simple pensée
du nombre de points de rêves dépensés dans
sa conception. Il a été pendant longtemps le
compagnon du sorcier, quand il était jeune et
aventureux. Mais depuis le tapis a vieilli, si bien
qu’il a acquis un caractère rétif et pantouflard.
Le tapis refusera de s’envoler s’il est sale, de
même qu’il ne bougera pas tant qu’on ne le lui
aura pas demandé, voire supplié, en y mettant
les formes. Enfin, il ne volera que s’il juge la
destination digne d’intérêt. Et inutile de le
prendre par les sentiments, il n’en a pas.
 Tchekov le Rucher
Les voyageurs vont faire la rencontre d’un également une pièce servant de chambre,
brave rucher qui va les lancer dans une longue pouvant être divisée en plusieurs espaces
promenade à travers les rus. séparés par des paravents. La maison a une
douce odeur d’herbes et de cire d’abeille.
Champs de Miel
Quand les voyageurs émergent du gris rêve, La maison du Rucher et sa famille se trouve à
c’est le matin. Le soir précédent, ils ont monté côté, ainsi que sa grange et ses greniers.
le camp au bord d’une rivière peu profonde, sur Aujourd’hui il ne reste que lui, sa femme étant
une plage de sable fin. Cela fait quelques jours morte il y a quelques années, et sa fille Ivana,
qu’ils voyagent entre les pins et les bouleaux. qui n’a jamais trouvé d’homme à marier et ne
Ils ont eu à traverser quelques ruisseaux peu semble pas pressée d’en trouver un, préférant
profonds à gué mais le chemin est plutôt s’occuper de son père qui ne va pas en
agréable. Nous sommes au mois de la Sirène, rajeunissant. La réalité, c’est que la situation lui
durant le second quartier. Le printemps bat son convient et elle n’aimerait pas qu’un homme
plein, les bois sont frais et ombrés, les fleurs vienne fourrer le nez dans ses affaires ; le nez
nombreuses attirent les abeilles. Il y a bien de ou autre chose d’ailleurs.
temps en temps des traces d’ours bruns attirés Ivana accueille les voyageurs chaleureusement
par le miel des abeilles sauvages, mais il ne et leur présente leurs quartiers. Elle leur
semble pas y avoir de dangers immédiats. demande de faire leurs besoins sur le tas de
Après avoir marché quelques heures, vers fumier derrière la grange et d’aller se laver dans
l’heure du Dragon, ils arrivent dans une petite le ru au bas du village s’ils en ressentent l’envie.
communauté agricole : le village de Champs de Puis elle s’attelle à la confection d’un repas
Miel. Le village est adossé à une petite butte et revigorant, leur servant une tisane
un ru coule non loin. La colline est couverte de accompagnée de quelques gâteaux au miel
fleurs, les alentours sont composés de prairies pour les faire patienter.
bourdonnantes où paissent des ovins et de
champs de blémouds. Les habitants ont vu les
voyageurs arriver, les plus désœuvrés leur
tournent autour tout en gardant une certaine
distance. Ils redirigent les voyageurs vers la
Maison des abeilles.
C’est la maison des voyageurs. Celle-ci
appartient à Tchekov le Rucher, un vieil
apiculteur qui sert également de vétérinaire et
de chirurgien dans la communauté. Son miel
sert à brasser la liqueur ambrée qu’il fait boire
à tout voyageur de passage. La maison est
tenue par la plus jeune fille du rucher, Ivana. En
effet, Tchekov passe son temps à visiter ses
ruches ou à soigner telles ou telles afflictions
tourmentant hommes et bêtes. C’est une petite
maison de bois avec un toit en chaume. Ses
murs ont été blanchis et décorés de motifs
hexagonaux et de fleurs. Sur la porte a été
gravée une grosse reine, entourée par sa cour
d’abeilles. Elle ouvre sur une salle commune,
servant aussi de cuisine, avec une grande table
entourée de bancs et de tabourets. Il y a
Par l’odeur alléché, et sans doute prévenu par
les villageois, Tchekov fait rapidement son
apparition. C’est un vieux monsieur rougeaud
et plutôt maigre, aux yeux pétillants et aux poils
blancs. Ses cheveux sont ébouriffés et
piquetés, çà et là, de quelques fleurs et brins
d’herbe. Il va nu pieds. Il salue les voyageurs et
s’assied parmi eux. Il leur demande des
nouvelles du monde, afin de faire la
conversation en attendant que sa fille ait fini de
cuisiner. Quelques villageois s’installent à
l’extérieur l’air de rien, faisant mine de vaquer
à leurs propres discussions, pour tendre
l’oreille, timides mais curieux.
Une fois la cuisine faite, Ivana demande au
voyageur le plus fort ou le plus grand parmi les
hommes de mettre le couvert. Elle a préparé
une sorte de bouillie de blémoud,
accompagnée de divers légumes, ainsi qu’un
gros gigot de mouton cuit dans le miel. L’odeur
embaume la pièce. Elle sort un moment et
revient avec une grosse bouteille, le fameux
hydromel de Tchekov, dont elle sert un bon
verre à chaque voyageur, un raisonnable à son
père et un petit pour elle-même, avant de
s’asseoir près de l’âtre pour souffler un peu.
C’est Tchekov qui fait le service et anime la
discussion.
Le repas est bon et de qualité. Une fois celui-ci
terminé, Tchekov invite les voyageurs à faire un
tour du village pour digérer avant que le soleil
ne se couche. Il leur fait faire le tour des
champs, nommant les fleurs et les oiseaux, il
leur présente l’une de ses ruches et détaille le
miel qu’elles produisent, ses qualités et
spécificités, pour finir par grimper la colline et
permettre aux voyageurs d’assister au coucher
du soleil sur les rus. Une fois l’obscurité
tombée, il les salue et va se coucher. N’ayant
pas grand-chose à faire dans ce village paisible,
et sûrement fatigués par leur voyage, les
voyageurs se préparent sans doute à aller
dormir de leur côté.
Le rêve
Le village s’est réuni sur la colline, tout le
monde s’est passé le mot, il se prépare quelque
chose.
À l’heure du Vaisseau, alors qu’elle puisait de
l’eau dans le ru, la Maria avait vu atterrir un
drôle d’oiseau. Un haut-rêvant, juché sur un
tapis volant, s’est posé près de la rivière.
Richement vêtu, il a l’air d’un Star. Il dit se
nommer Yvan Stareïy et porte une étrange
lampe, gigantesque et dorée. Depuis, le haut-
rêvant s’est muré dans le silence. Mais, à en
croire la Maria, il prépare quelque chose. Du
coup, tout ceux qui n’ont rien à faire sont venus
se poser ici et là pour observer et commenter
ce que fait l’étranger.
Alors que le soleil commence à effleurer la cime
des pins, le haut-rêvant se pose au sommet de
la colline. Tirant son épée au clair, il ouvre
délicatement la lampe dorée d’où s’échappent
quelques flammes dansantes. Puis, tendant
son épée vers l’ouest, une vive flamme s’en
échappe, se joignant à celle de la lampe,
prenant peu à peu la forme d’un oiseau.
Les voyageurs se réveillent au moment où
l’Oiseau de Feu s’élève dans le ciel. Ils se lèvent
avec la sensation très nette d’avoir déjà vécu la
scène. Voyageurs chevronnés, ils ont déjà vécu,
ou entendu parler, des rêves d’archétypes. Ils
savent donc qu’ils vont devoir assister de
nouveau à la scène de leur rêve. Commençant
à émerger, ils sont accueillis dans la salle
commune par un Tchekov volubile. Celui-ci leur
a amené des pains d’épices au miel,
accompagnés d’une bonne tisane aux herbes
de prairies ainsi que du beurre de brebis. « Tout
est frais du matin ! » dit-il.
Il attend que les voyageurs se soient quelque
peu réveillés et restaurés pour leur demander
comment s’est passé la nuit. Si les voyageurs
évoquent leur rêve, même un menu détail, il
s’écrit, joyeux, « Enfin ! ». Puis il se lance dans
une explication fébrile :
« Voyez-vous, jeunes gens, j’étais moi-même,
par le passé, un voyageur. Avant de m’installer
ici, j’ai parcouru de nombreux pays. Et un soir
j’ai rêvé de cette colline, de cet Oiseau de Feu,
de ce haut-rêvant à la lampe volant sur son
tapis. Alors je me suis mis en quête. Je n’avais,
à l’époque, pas la chance d’avoir de
compagnons avec qui partager ce voyage. Je
finis tout de même par trouver la colline, faute
de haut-rêvant et d’Oiseau de Feu. Alors je me
suis installé, attendant que l’un des deux pointe
le bout de son nez, ou de son bec. Mais le
temps passant, le rêve perdit de son éclat, et je
rencontrais ma femme, et j’eus des enfants,
une exploitation agricole, des ruches et avant
que je m’en rende compte, j’étais attaché aux
rus par de profondes racines. J’ai bien sûr
continué mes recherches, à ma façon, et le
temps passant, je découvris où je m’étais
trompé et je refis le rêve, plusieurs fois. Cette
nuit même, encore une fois, plus éclatant que
jamais. Depuis longtemps, j’attends qu’un ou
plusieurs voyageurs partagent ce rêve et que
nous puissions enfin, tous ensemble, revoir
l’Oiseau de Feu renaître de la Lampe. Qu’en
dites-vous, voyageurs, accorderez-vous votre
aide à un vieux rucher ? »
Si les voyageurs acceptent, il peut répondre à
toutes leurs questions.
Ce que sait le Rucher
Si on le laisse faire, Tchekov raconte par le détail
la vie et les exploits de Yvan Stareïy, ainsi que
tout ce qui concerne les artefacts. Comment
Tchekov sait-il tout ça ? Eh bien, c’est parce qu’il
a grandement exploré son archétype, par la
méditation notamment, pendant qu’il vivait sa
vie de fermier. Et il s’avère qu’Yvan est l’une de
ses précédentes incarnations. Il a donc pu
réunir un grand nombre d’informations sans
bouger de chez lui. Il ne le dit pas aux
voyageurs, de peur de passer pour un fou ou
par humilité, et prétend avoir eu ces
informations par des contes, des légendes ou
des mythes. En effet, Yvan Stareïy est une sorte
de héros mythologique dont la vie
aventureuse, connue de beaucoup de conteurs
doniens, est toujours populaire dans les rus.
Sinon, il tient une maison des voyageurs : il a
donc tout loisir d’avoir des nouvelles du
monde. Tout ce que ses incarnations
précédentes ne savaient pas, il a pu l’apprendre
part d’autres biais. Il sait par exemple que
l’épée est entre les mains de la Jarl Volga
Volgadottir, tandis que la Lampe se trouvait aux
dernières nouvelles dans la collection du Palais
des Étoiles, à Gift-sur-le-Don. Quant au tapis, il
a sa petite idée. Il pense qu’il est toujours en
possession d’une sorcière, ou de ses héritiers,
dans un village des rus bruns.
Il sait également que Bouïane, l’île de l’Oiseau
de Feu, se trouve quelque part sur les mers
entourant le Pays des Rus. Il a déjà eu l’occasion
de la voir, de loin, quand il était voyageur, mais
l’île se déplace et ne reste jamais bien
longtemps dans les basses-terres du rêve.
L’Oiseau de Feu doit s’y trouver, c’est son nid se
trouve entre les branches de l’Arbre de Vie
après tout. Mais malheureusement, elle est
inatteignable par des moyens normaux. Le
tapis est capable de l’atteindre. L’île possède
également une sinistre réputation : si l’Oiseau
de Feu s’y trouve, et cela le rucher en est
convaincu, il est en mauvaise posture. Il aura
besoin de la Lampe pour se régénérer, et l’épée
ne sera pas inutile face aux spectres et autres
horreurs se trouvant sur l’île.
En résumé, l’Oiseau de Feu aura besoin de la
Lampe pour être transporté. Pour atteindre
Bouïane, il faut impérativement le tapis. L’épée
enfin permettra de tenir en respect les limbes
qui entourent l’île.
Pour préparer leur voyage, les voyageurs
pourront se renseigner au village.
La bayaga est connue, de nombreux contes
circulent sur ses exploits et ses méfaits, et les
voyageurs n’auront jamais de mal à trouver une
piste pour la rejoindre. Cependant, ils n’auront
jamais de position exacte, mais une direction
générale. A Champ de Miel, on leur indiquera
les rus bruns, sans en savoir plus long.
Il se trouve qu’un ruse vit à Champ de Miel,
Kolgierd, un beau-fils de Tchekov, qui sera tout
à fait disposé à exposer les coutumes et
traditions des ruses ainsi qu’à indiquer le
chemin menant Pays de la Volga.
Concernant la Lampe, c’est l’artefact le mieux
connu. Tchekov sera même ravi d’accompagner
les voyageurs jusqu’à Gift-Sur-le-Don pour
l’admirer lui aussi. Il a entendu dire qu’une
procession en son honneur ne devrait pas
tarder à avoir lieu.
Rêve d’Oiseau.
Autre chose, durant leur voyage à travers les
rus, les voyageurs auront plusieurs fois
l’occasion de rêver de l’oiseau, si possible juste
avant ou juste après avoir récupérer un artefact
d’Yvan.
Le premier rêve ne sera qu’un murmure dans le
noir, répétant en boucle le nom du haut-rêvant.
Par la suite, un second rêve montrera une
maison en ruine, avec dans la cheminée un feu
mourant d’où sort la même voix appelant le
magicien, empreinte de terreur et de
supplication. Le troisième et dernier rêve
montrera l’Oiseau de Feu, hurlant de douleur,
le cœur serré par une main osseuse et griffue,
suppliant qu’on le sauve ou l’achève. Le rêve se
terminera sur une supplique à Yvan : « Viens
me chercher. »
 La Lampe Merveilleuse
Les voyageurs auront entendu parler de la
Lampe par Tchekov ou des villageois. Pour la
trouver, ils doivent prendre la route de Gift-sur-
le-Don. Après un voyage agréable sur les flots
du Don, les choses se corseront.
Gift-Sur-Le-Don
Gift-sur-le-Don est la plus grande cité du Pays
des Rus. On y trouve la demeure des Stars, ainsi
que le trésor des rus, un amas d’objets précieux
en tout genre, en lien avec l’histoire et les
mythes du pays, exposé dans le Palais des
Étoiles. La corporation fluviale du Don y a établi
son siège et chaque Bogatyr y débute sa quête.
C’est la Starine Dukoustaya de Gift et son
armée qui assurent la sécurité de l’ensemble du
pays, du fait des traités qui lient les différentes
cités du Don-des-dragons dans une seule et
même confédération, la Constellation du Don.
Par son importance culturelle, politique et
économique, Gift-Sur-Le-Don est la capitale du
Pays des Rus.
Lovée dans une boucle du don, la ville est un
imposant port fluvial. Des centaines
d’embarcations s’agglutinent autour de ses
quais et une forêt de mats et de voiles est
souvent la première vision qu’ont les voyageurs
de la cité. Les quais fourmillent d’activités et
accueillent de nombreux entrepôts ainsi que la
maison de commerce, d’où la corporation
fluviale du Don gère son empire commercial. En
quittant les quais, les voyageurs se retrouvent
dans les nombreuses ruelles qui composent la
basse ville, où s’amassent tavernes bon
marchés et auberges douteuses dont les
bateliers de passages sont la principale
clientèle.
Surplombant la basse ville, le massif Palais des
Étoiles étend ses coupoles dorées. C’est à la fois
un temple à la gloire des dragons et une sorte
de musée conservant les trésors des rus. Il fut
érigé au second âge, pour complaire aux
dragons qui, dans leur sagesse, avaient
accordés aux Stars la victoire sur les pirates
stormands et les conquérants caspiés. Bâti de
marbre bleu, surmonté par des dômes d’or, son
intérieur simule la voûte céleste, peuplée de
créatures fantasmagoriques et de dragons.
En le contournant, on arrive à la ville
proprement dite. Gift est une citée de bois et
de brique, les rues y sont plus larges et mieux
tenues que dans la basse-ville. Les
commerçants y tiennent leurs boutiques et la
plupart des giftois y vivent. Si on y trouve de
tout, les deux industries les plus fructueuses de
la ville sont la confection de lampes et de tapis.
La tradition des luminaires prend racine dans la
Lampe d’Yvan. Nombre d’artisans en leur
temps tentèrent d’émuler, voire de surpasser,
cet artefact. Aucun n’y parvint malgré les
trésors d’ingéniosité dont ils firent preuves.
Leurs travaux eurent cependant de nombreux
admirateurs et les lampes de Gift s’arrachent à
prix d’or. On en trouve chez tout notable digne
de ce nom, même en dehors des rus.
La confection de tapis précède le fabuleux tapis
d’Yvan. De tout temps, les rus ont produit des
tapis. Et on vient en acheter de partout. Les
pillards Stormands sont toujours ravis de s’en
emparer, les royaumes d’au-delà des
Kharapates en réclament à cor et à cri, et les
aristocrates Caspiéss en possèdent tous un, au
minimum.
Gift profite de ces deux commerces. Et un tel
trésor attire les convoitises. Ainsi, les Stars ont
fait ceindre la cité d’épaisses murailles,
défendues depuis le Fort des Héros, d’où
partent nombre de Bogatyrs en quête
d’exploits et d’aventures.
La vie à Gift est douce et agréable. Ses citoyens
en attribuent le mérite aux dragons qui dans
leur sommeil veillent sur la cité, les sages
l’attribuent au commerce et à la force militaire
de la Starine, certes moins importante que
jadis, mais amplement suffisante.
Le vol de la Lampe
Revenons à nos voyageurs. S’ils décident de s’y
rendre avant tout autre destination, Tchekov se
propose pour les accompagner. Lui aussi désire
voire la Lampe, et il sait qu’elle sera promenée
lors d’une procession en son honneur dans
quelques temps. Si les voyageurs l’acceptent, il
se fait un plaisir de leur payer le voyage sur les
bateaux de la corporation fluviale du Don.
Depuis Champs de Miel, Gift est à une semaine
de navigation. Deux jours sont nécessaires pour
rejoindre un bourg sur le Don, et de là, cinq
jours de voyages sur les eaux du Don. Si les
voyageurs décident de s’y rendre après avoir
visité le Pays de la Volga ou les rus bruns,
Tchekov fait le voyage sans eux et se trouve à
Gift quand les voyageurs y arriveront à leur
tour.
Une fois sur place, les voyageurs peuvent
assister à une procession promenant plusieurs
trésors à travers toute la ville. La plupart des
giftois y assistent, applaudissant les artefacts
sur leur passage. Ils sont très fiers de leur
histoire. En voyant la Lampe, Tchekov est pris
d’une colère incompréhensible et il se met à
éructer : « ce n’est pas la Lampe, elle y
ressemble, mais ce n’est pas elle ! » Il faut alors
l’éloigner de la foule qui commence à s’agacer
du vieillard. Comment ça, ce n’est pas la Lampe
? Est-il fou ? Comment ce paysan peut-il
insulter ainsi nos trésors ?
Une fois remis de ses émotions, Tchekov n’en
démord pas, ce n’est pas la Lampe. C’est une
imitation, très jolie certes, mais l’œuvre d’un
faussaire. Il faut des explications, il faut aller
voir le gardien des trésors.
Le gardien est un homme fort occupé et après
avoir présidé la procession, il sera retourné au
Palais des Étoiles. Il faudra des trésors de
persuasion pour obtenir une entrevue. Sinon,
les voyageurs seront expulsés du palais sans
ménagement. Dans tout les cas le gardien finira
par en entendre parler et les invitera à une
réunion informelle dans son bureau.
Depuis quelques années déjà, Vasistas est
titulaire du poste de Gardien des trésors, et il
est parfaitement au courant de la situation. Il
questionnera les voyageurs sur leurs intentions
vis-à-vis de la Lampe et écoutera
attentivement. Le Gardien finira par déballer
toute l’histoire quant au vol de la Lampe.
Il y a des années, l’un de ses prédécesseurs, le
Gardien Sbyte, éprouvait pour la Lampe un
intérêt quasi mystique. Il la vénérait et la
convoitait, souffrant de la voir exposée si
vulgairement à des yeux indignes de la
contempler. Il décida alors de la dérober et de
la dissimuler en lieu sûr. Pour cela, il allait la
remplacer. Puisant dans le trésor des Stars, il
engagea haut-rêvants et artisans pour
reproduire un fac-similé convaincant. Puis, avec
quelques fidèles, il abandonna son poste pour
aller cacher la Lampe hors de portée des yeux
impies.
Quand l’échange fut constaté, ce fut la panique
et on chercha partout la Lampe, en vain.
Vasistas fut chargé de retrouver les faussaires
et de les faire parler. La plupart des complices
avait fui la ville, d’autres avaient été assassinés.
De fil en aiguille, il parvint à reconstituer le fil
des évènements. Il sait désormais comment
cela s’est passé, et pourquoi. Mais il ignore
encore où se trouve la Lampe. Il semblerait que
Sbyte possédait un domaine dans les rus
blancs, mais où ? Il a bien envoyé un homme de
confiance là-bas, mais plus de nouvelles
depuis.
Le Gardien Vasistas propose aux voyageurs, vu
qu’ils ont découvert le pot-au-rose, de mener
leur propre enquête sur place et si possible de
récupérer la Lampe. Le Gardien est dubitatif
quant à leur quête, mais soit, tant qu’ils
ramènent la Lampe au terme de celle-ci.
Les Rus blancs. point nommé pour faire fuir les
Les Rus Blancs sont ainsi nommés pour ses rus assaillants. Le marchand les remercie
bondissants entre combes et collines, formant chaleureusement et leur propose de
des torrents peu profonds et puissants. De ce l’escorter jusqu’au Don-des-Dragons «
fait, la navigation fluviale y est impossible. C’est loin des groins et de ces fous à la
un pays escarpé, aux sentiers sinuant entre les Lampe ». Le marchand leur raconte
rochers et les précipices. Les rus blancs sont comment des fous-furieux ont mis le
surplombés à l’Est par les Kharapates, d’où feu à son chariot et à son stock de tapis
descendent des hordes de pillards groins. La doniens, ne lui laissant que son âne et
région est donc peu sûre et ses habitants vivent quelques ballots de laines. Il se
dissimulés aux fonds de vallées cachées. Les lamente sur son sort et jure qu’il ne
quelques bourgs qu’on y trouve sont perchés remettra jamais les pieds dans ces
en haut de pitons rocheux, fortement fortifiés maudits rus blancs.
pour se protéger des raids groins. En règle • Dans une auberge isolée, servant de
générale, on peut passer des jours sans croiser relais aux voyageurs et aux marchands,
personne. les voyageurs rencontrent des locaux à
l’humeur maussade dans une taverne
Les voyageurs y passeront un certain temps aux meubles d’une sobriété
avant de rencontrer qui que ce soit. Et leur inhabituelle pour la région. Le fils de
premier contact avec les habitants du cru peut l’aubergiste est en train de recouvrir
se faire de plusieurs façons. une fresque sur un mur avec de la
peinture blanche. L’aubergiste est de
• Ils peuvent tomber sur une ruine
mauvaise humeur, mais il offre un
encore fumante d’une maison qui a été
schnaps aux voyageurs et de quoi se
saccagée. Les voyageurs peuvent
restaurer. Au sujet de la fresque, il
découvrir des restes d’icônes
expliquera qu’il fait ça pour éviter que
carbonisées. Plus tard, ils tombent sur
les « fanatiques de la Lampe » viennent
une bande de moines en train de
détruire son commerce, et qu’il a caché
brutaliser une famille de bergers et de
ses plus beaux meubles pour qu’ils ne
saccager leur maison, réunissant des
soient pas mis au feu.
meubles et des tapisseries en tas au
centre de la cour de la ferme. Les
moines sont vêtus de bures sans
ornementation et ont les yeux
exorbités, essayant de cligner des yeux
le moins possible. Leur chef a des yeux
tatoués sur ses paupières. S’ils sont
surpris par les voyageurs, il ordonnera
à ses hommes de les combattre. Ils
sont six, en comptant leur chef, et
armés de bâtons ferrés. Ces hommes
sont ici pour ramener les incroyants
dans la voie de la Lampe, et ils
détruisent les images fausses car seule
la Lampe est digne d’être contemplée.
Les bergers diront aux voyageurs que
les aveuglés, c’est ainsi qu’ils appellent
les moines, descendent régulièrement
dans les vallées pour saccager des
fermes et des auberges pour détruire
les objets peints ou ornés. Les adeptes de la Lampe.
• Un marchand et son âne lourdement Tous ces évènements sont faits pour convaincre
chargé se retrouvent aux prises avec les voyageurs que la région est sous la coupe
des groins. Les voyageurs arrivent à d’une bande de brutes. Ces brutes sont les
Aveuglés, la branche militante du culte des Aujourd’hui, une quarantaine d’adeptes y vit,
illuminés de la Lampe. Les locaux ne subissent et une vingtaine d’hommes semblables aux
ces déprédations que depuis quelques temps. brutes loge dans un petit fortin au pied de la
Au départ, le culte ne gênait personne, les colline, contrôlant le seul accès menant au
illuminés s’étant installés dans une vieille monastère.
forteresse en ruine qu’ils ont transformée en
monastère.
Au début, personne n’avait rien à redire. Mais
au bout d’un moment, les fidèles se firent de
plus en plus nombreux et des bandes se mirent
à descendre du monastère pour prélever une
part des récoltes des paysans locaux, quelques
bêtes et divers services. Il y eut un conflit mais
les paysans, désunis et moins bien armés,
finirent par céder. Ils devinrent les sujets des
illuminés. Puis, récemment, les bandes se
mirent à détruire toutes les images qu’ils
trouvèrent prétendant que seule la Lampe était
digne d’être admirée.
Tout cela est l’œuvre des illuminés. Ces frères
se consacrent à l’admiration de la Lampe car
celle-ci serait une fenêtre sur la réalité des
dragons. Là où le monde n’est qu’une illusion
des dragons, la Lampe permet d’apercevoir la L’ordre des illuminés de la Lampe se compose
réalité, la seule digne d’être regardée. C’est du de trois groupes distincts : les éclairés, les
moins la conviction du Père Sbyte, fondateur de illuminés et les aveuglés. Les éclairés sont des
l’ordre. La plupart des adeptes est persuadée adeptes novices, qui s’occupent des tâches
que la Lampe se trouve toujours à Gift-sur-le- subalternes, de l’entretien du monastère. Ils
Don, et que ce qui se trouve dans la Chapelle accueillent les visiteurs et écoutent les
est une sorte de métaphore, un mystère auquel enseignements de leurs aînés. Ils habitent dans
il faut être initié. les communs et attendent le jour où ils
pourront devenir illuminés. Les illuminés sont
Le premier abbé, le Père Sbyte, s’est contenté les adeptes qui consacrent leurs journées à
d’admirer la Lampe jusqu’à sa mort. Ses l’admiration de la Lampe et l’entretien de la
successeurs se sont radicalisés. Le Père Chapelle, ils vivent dans le cloître du
Glokom, un bogatyr converti, a eu l’idée d’aller monastère. Ils ont renoncé à la vue, se sont
prélever un tribut chez les paysans et a mené la couvert les yeux d’un bandeau et refusent de
guerre contre eux. Son successeur et actuel voir autre chose que la réalité de la Lampe, sauf
abbé du monastère, le Père Cécite, est un le Père Cécite qui a décidé de se crever les yeux
radical, et ses discours enflammés sur le Lampe pour se couper définitivement de l’illusion. Les
ont convaincu les bandes d’aller plus loin. aveuglés sont des adeptes qui ont décidé de
La position du monastère est connue des renoncer à l’admiration de la Lampe et de se
locaux. Il se trouve sur un piton rocheux confronter à la réalité illusoire du monde en
autrefois appelé le Nid-aux-Groins, en effet, les combattant l’illusion et en assurant la survie
ruines abritaient un avant-poste de groins des autres adeptes.
avant que des bogatyrs n’en débarrassent la
région. La ruine avait été rachetée par un
notable, puis laissée à l’abandon jusqu’à ce
qu’un petit groupe d’hommes vienne l’occuper.
Sbyte et ses complices restaurèrent l’ancien
fortin, y fondèrent une chapelle pour la Lampe
et le monastère pour loger les adeptes.
 B 3

2
A

1
B

C
4
7b
6
7a
5

7c

D
1. Le fortin des aveuglés. Cette maison est le
lieu de vie des aveuglés qui, étant donné leurs
vœux, ne peuvent pas revenir dans le
monastère. Ils vivent donc au pied de la colline
dans un bâtiment contenant un dortoir, une
petite chapelle, une cuisine et une cantine. Il y
a une vingtaine d’aveuglés, une dizaine se
trouve actuellement dans le fortin, les autres
sont en maraude. Des barrières barrent le
chemin et des aveuglés surveillent les allées et
venues.
2. Les communs. C’est là que sont accueillis les
visiteurs, que sont conservées les réserves et
logés les éclairés. On y trouve une grande salle
commune où les adeptes se réunissent pour le
repas.
3. Le cloître. C’est ici que l’on trouve les cellules
des illuminés, où ils déambulent et méditent à
longueur de temps. Le petit jardin central sert
de lieu de réunion où ils enseignent aux novices
les préceptes et révélations de la Lampe.
4. La Chapelle. C’est ici qu’est conservée la
Lampe et que les adeptes viennent l’admirer
quotidiennement.
5. Les Cellules inférieures. Anciennes caves du
fortin, inusitées par les frères, elles servent à
certains illuminés voulant s’isoler ou de
prisons. C’est ici que les illuminés ont enfermé
l’espion du Gardien, Topov, en attendant de
savoir qu’en faire.
6. La Crypte. Son existence précède la
fondation du monastère. A la mort d’un
illuminé, ses confrères l’emmènent dans la
crypte, où son corps disparaît. Personne ne sait
ce qu’il arrive aux corps, et personne n’y va.
7. Les logements de Leurdeté. Leurdeté vit
dans la crypte, où il mène une petite vie
tranquille entre son laboratoire (7a), l’ossuaire
(7b) et son salon (7c), occupant son temps
entre ses expériences, ses excursions et ses
bavardages autour d’un thé avec ses amis, une
demi-douzaine de squelettes animés.
A. La porte de l’Illusion relie le commun à
l’extérieur.
B. La porte de l’Initié relie les communs au
cloître.
C. La porte de l’Illumination relie le cloître à la
chapelle.
D. Passage secret de Leurdeté. Il se trouve dans
le ravin entre le piton du cloître et la colline des
communs.
Mystères au monastère.
Les voyageurs n’auront pas de mal à trouver le
monastère. Y entrer est une autre affaire. Les
visiteurs n’ont accès qu’aux parties communes
où ils peuvent espérer croiser des illuminés
voire l’Abbé, le Père Cécite, avec de la chance.
S’ils ont violenté des aveuglés, il y aura une
explication à fournir. Le Père Cécite et les
illuminés ne sont pas au courant de ces
exactions. Ils ne sortent jamais, plus depuis les
« regrettables accidents » durant le mandat du
Père Glokom. Les aveuglés sont en complète
autonomie, et si leurs déprédations satisfont
l’Abbé, il n’en montrera rien. Il se contentera de
mollement réprimander les aveuglés, excusant
leur ferveur, et demandera qu’ils fassent
pénitence en réparant ce qu’ils ont saccagé.
Puis il se désintéressera de la question et
invitera les voyageurs à rester pour la nuit.
A toute question sur la Lampe, que ce soit aux
illuminés présents ou aux éclairés (les aveuglés
refuseront de parler aux voyageurs s’ils les ont
combattus), les réponses restent les mêmes. La
Lampe n’est pas ici. On atteint l’illumination en
méditant, en s’entraînant à voir à travers
l’illusion grâce aux mystères de la foi. La
chapelle est fermée à tous ceux qui ne sont pas
des illuminés. Les voyageurs qui voudraient se
joindre à eux devront renoncer à leurs
possessions terrestres, qui sont de toute façon
illusoires, et deviendront éclairés.
Si les voyageurs insistent trop sur le vol de la
Lampe, les illuminés se méfient et les font
surveiller par un éclairé, et ils ferment
également les portes reliant les communs au
reste du complexe la nuit pour plus de sécurité
jusqu’à leur départ.
En aucun cas les illuminés ne laisseront les
voyageurs approcher la chapelle. Ils ne sont pas
autorisés à pénétrer dans le cloître, et s’ils
insistent ils seront raccompagnés manu-militari
en dehors du monastère.
En passant quelques temps dans le monastère,
les voyageurs pourront se familiariser avec les
adeptes. Les éclairés sont pour la plupart des
jeunes locaux, quelques-uns sont plus vieux,
arrivés il y a longtemps dans l’espoir d’être
initiés aux mystères de la Lampe. La plupart l’endroit. Père Sbyte mena des tractations
vaque à ses occupations, c’est-à-dire suivre secrètes avec lui, lui proposant la pleine
l’enseignement des illuminés, s’occuper de la jouissance de la crypte, contre son assistance
basse-cour et du potager, entretenir les lieux et pour défendre moines si le besoin s’en fait
accueillir les visiteurs. En tendant l’oreille, les sentir. Le haut rêvant accepta, à condition qu’il
voyageurs entendront les ragots et rumeurs du n’ait pas besoin de sortir de sa crypte. En
monastère. échange de sa collaboration, les illuminés lui
livrent les morts du monastère. Le Père Sbyte
Frère Akromat, qui s’occupe des cuisines,
allait régulièrement lui tenir compagnie, le Père
prétend que les illuminés sont plus voraces ces
Glokom ne lui rendait que des visites de
derniers temps, ils mangent au moins une
courtoisie, et le Père Cécite refuse de côtoyer
portion de plus que d’habitude. Frère Strabi
cet individu abject.
ronchonne, chaque nuit il est réveillé par des
bruits d’éboulements, vers les heures du
Serpent et du Roseau, et répète à qui veut
l’entendre qu’il faudrait songer à consolider les
fondations du monastère car tout va
s’effondrer au rythme où ça va. Frère Myo le
contredit en affirmant que la priorité serait de
réparer l’évacuation d’eau du cloître car quand
il va y faire le ménage, une odeur épouvantable
remonte depuis les caves. Frère Vif prétend que
cela vient de la crypte, que les illuminés y
entreposent les cadavres des adeptes ayant
quitté l’illusion, et qu’il serait peut-être
judicieux d’engager un embaumeur. Quant à
Frère Sern, un vieillard cacochyme qui n’a
jamais été initié, en voyant les voyageurs, il
s’inquiétera du départ du « Frère Chim » : il
l’aimait bien et n’a pas eu le temps de le saluer.
Ces rumeurs et ragots sont autant d’indices
visant à faire s’intéresser les voyageurs à ce qui
se trouve sous le monastère.

Thé dans le noir

En observant attentivement les alentours du
piton rocheux, à l’emplacement d’où viennent
les éboulements dont se plaint Frère Strabi, les
voyageurs peuvent découvrir un éboulis assez
curieux. Les pierres sont enchevêtrées d’une
drôle de façon. En tapant dessus, ils pourraient
entendre un son creux. Puis, s’ils retirent une
pierre, les autres suivront et s’écarteront pour
laisser un passage vers la Crypte.
La Crypte précède l’existence des caves et du
monastère. Ce sont des galeries naturelles,
aménagées par les premiers occupants du lieu.
Inutilisée par les moines, elle n’est cependant
pas déserte. Un ermite y habite, un haut-rêvant
de Thanatos un peu toqué. Il était déjà là quand
les moines se sont installés dans les ruines, et
parmi les illuminés la rumeur prétend qu’il était
déjà là quand les groins furent chassés de
Leurdeuté est un haut-rêvant, suivant la voie de
Thanatos. Même s’il est tout à fait capable
d’envoûter quelqu’un ou de lancer des
malédictions, il est inoffensif et n’attaquera
qu’en riposte à une agression sérieuse. Sa
passion est d’animer des squelettes, de faire
parler les crânes et de mener quelques
expériences alchimiques. Il ignore quand il s’est
installé ici, tout ce dont il se souvient c’est que
la lumière du soleil lui était devenue
parfaitement insupportable. Depuis, il ne sort
que la nuit à la recherche d’ingrédients
alchimiques. Comment sort-il ? Eh bien, par là et qu’il peut les aider. C’est un mensonge, il
où il est entré. L’un des tunnels qui composent ignore complètement pourquoi ils sont là, mais
la crypte mène à l’extérieur, au sommet d’un peut les aider à trouver le bon chemin dans les
éboulis. Quand Leurdeuté l’a trouvé, c’était une galeries.
ouverture béante. Il l’a ensuite dissimulé avec
Durant la dégustation du thé, il est à l’affût et
un sort d’illusion. Puis, un soir d’hiver
observe les voyageurs prendre au moins une
particulièrement frisquet, il entreprit de
gorgée de son thé. Il ne pipera mot et regardera
concevoir une véritable porte. Quelques
intensément chaque voyageur qui pourrait
queues et un souffle de dragon plus tard, il
refuser, serrant de plus en plus fort sa théière.
avait créé un astucieux système de pierres
Il suffit de boire une gorgée, que les voyageurs
enchevêtrées les unes dans les autres. Depuis,
la recrachent ou non n’est pas son souci pour
pour sortir ou entrer, il suffit de tirer. En tirant,
Leurdeuté (jet d’exotisme à 10). Ensuite,
les pierres se désolidarisent les unes des autres
rassuré, il commence la discussion qui tient
pour laisser un passage juste assez grand pour
plus du monologue, lâchant mine de rien toute
deux hommes de front, ou un homme en
son histoire personnelle, les expériences qu’il
portant un autre. Il n’a pas réussi à régler le
mène et les liens qu’il entretient avec les
problème des pierres qui s’entrechoquent
illuminés. Il se propose d’ailleurs, après avoir
bruyamment, il se penchera sur ce petit
fini de savourer son thé, de les raccompagner
désagrément après son expérience actuelle qui
jusqu’à l’entrée de la Crypte. Il ne conçoit pas
a pour but de changer le goût de la chair
que l’on puisse connaître l’existence de sa porte
humaine, et c’est un succès ! Un succès mitigé
secrète, même s’il en a parlé cinq minutes
toutefois par la qualité de la viande d’une part,
avant.
par l’odeur pestilentielle que dégage la
préparation d’autre part, et le fait que la viande Une fois le thé terminé (ou discrètement versé
a maintenant le goût de la vase. Mais il est sur sur le tapis), les voyageurs sont libres de
le bon chemin. Leurdeuté pourra enfin faire prendre congé et de rejoindre les caves se
quelque chose de toute cette chair qui trouvant sous le cloître et la chapelle.
encombre sa crypte et dont il ne sait pas quoi
faire. La grande évasion
Les caves sont inoccupées, la plupart du temps.
Leurdeuté passe le plus clair de ses journées
C’est une série de pièces voûtées où sont
dans son salon, où il boit du thé avec ses bons
conservées quelques babioles et servant de
amis, les squelettes réanimés des adeptes de la
cellules. Les portes sont solidement fermées si
Lampe, ainsi que deux anciens squelettes de
bien que les moines ne les font pas garder. En
groins. Ces cadavres sont parfaitement
réalité, les illuminés se méfient des aveuglés et
inoffensifs et sous le contrôle total du
de leur militantisme et n’aiment pas les savoir
thanatosien, qui les manipule aussi sûrement
si près de la Lampe. Pour le moment toutes les
qu’un marionnettiste. Cela donne un aspect
cellules sont vides, sauf une, qui contient un
macabre au salon, qui est également décoré de
homme ayant tenté de s’infiltrer parmi les
tout un tas de bibelots que Leurdeuté amasse
moines jusqu’à la chapelle. Il s’agit de l’espion
lors de ses sorties nocturnes. L’ambiance est
envoyé par Vasistas.
particulièrement oppressante, surtout quand il
vous dévisage anxieusement alors que votre L’espion se nomme Topov et est arrivé au
tasse s’approche de vos lèvres. monastère il y a quelque mois. Il a d’abord joué
le jeu, et s’est intégré à la communauté sous le
Enfin tout cela les voyageurs pourront l’éviter
nom de Frère Chim pour en apprendre le plus
s’ils pénètrent par le passage secret pendant
possible sur les habitudes des illuminés. Il est
les heures sombres, le haut-rêvant étant en
au courant de ce qu’il se trame dans le
maraude pour renouveler son stock
monastère, la Lampe est ici, il en mettrait sa
d’ingrédients alchimiques. Mais il se peut qu’il
tête à couper. Il connaît par cœur les horaires
soit là. Loin de s’en formaliser, Leurdeuté invite
des illuminés et leur rotation. Croyant l’heure
les voyageurs à une petite dégustation de thé
d’agir venue, il s’est infiltré dans le cloître en
dans son petit salon. Il ignore tout refus, même
déjouant la vigilance des gardes. Mais le Père
poli, en prétextant qu’il sait pourquoi ils sont là,
Cécite avait vu clair dans son jeu et plusieurs
illuminés l’attendaient. Même si la plupart sont
des hommes assez âgés, l’Espion a appris
douloureusement qu’il faut se méfier des
vieillards munis de bâtons.
Depuis il croupit dans cette cellule. Un illuminé
vient régulièrement lui apporter un repas, et de
temps à autre le Père Cécite vient le
questionner sur ses intentions. Il n’a pour
l’instant pas lâché un mot, mais il est las. Si les
voyageurs décident de le libérer, il leur prêtera
main forte. Il n’est pas au mieux de sa forme,
l’inquisition du Père Cécite l’ayant laissé dans
un piteux état. Il reste très discret et
n’entravera pas les voyageurs.
Une fois arrivé dans le cloître, les voyageurs
peuvent voir la porte de la chapelle ouverte, et
entendre quelques marmonnements s’en
échapper. S’il fait nuit, une douce lueur en
émane. S’ils se sont fait remarquer par leur
insistance, le Père Cécite a renforcé la sécurité
et une demi-douzaine d’illuminés munis de
bâton ferré déambule à l’intérieur du cloître,
prêts à alerter des aveuglés qui attendent dans
les communs. Sinon, il n’y a qu’un illuminé qui
n’est guère vigilant.
A l’avantage des voyageurs, les illuminés
portent un bandeau sur les yeux, les rendant
aveugles. Il suffit donc aux voyageurs de ne pas
faire trop de bruits suspects pour éviter de se
faire repérer.
La Lampe se trouve dans la Chapelle. Si elle
semble modeste vue de l’extérieur, sans
ornement ni ouverture, l’intérieur est un écrin
somptueux pour celle-ci. On ne peut y accéder
que par la porte de l’illumination, qui n’est pas
gardée contrairement aux deux autres portes,
ni fermée à clef en temps normal. L’intérieur
est décoré de plusieurs bancs en bois précieux,
de somptueuses tapisseries recouvrent les
murs, des draps écarlates pendent du plafond.
Face à la porte, derrière un paravent sublime,
se trouve le tabernacle qui contient la Lampe.
Tout est rehaussé d’or et d’argent pour mettre
en valeur la splendeur de l’objet. Des miroirs
astucieusement placés reflètent la lueur des
bougies pour accentuer l’atmosphère onirique
de la chapelle.
A l’intérieur de la chapelle, le Père Cécite est en
pleine extase, tourné vers la Lampe et chante
des louanges de sa voix grave. Il est aveugle, et
un voyageur assez adroit peut dérober la
Lampe au nez et à la barbe de l’abbé, la
camoufler et repartir par-là d’où il est venu. S’il
se fait repérer en faisant trop de bruit et en ne
parvenant pas à neutraliser Père Cécite, les
voyageurs devront courir vite, loin de la fureur
de l’abbé, ou prendre part à un combat contre
une dizaine d’illuminés, une trentaine
d’éclairés et une vingtaine d’aveuglés.
Ce déroulement est un déroulement comme un
autre. Les voyageurs sont des créatures
capricieuses et pourront utiliser toute autre
méthode qui a des chances de marcher, comme
escalader le piton rocheux et utiliser une zone
de terre en eau à l’arrière de la chapelle, se
déguiser habilement et passer outre toutes les
mesures de sécurité, ameuter des bogatyrs et
prendre d’assaut le monastère. Ils pourraient
même convaincre Leurdeuté de lever une
armée de squelettes : il en a une demi-
douzaine en réserve cachés quelque part dans
une galerie, au cas où, et on ne sait jamais ce
qui pourrait remonter des galeries plus
profondes (et les voyageurs peuvent tout à fait
tomber dessus par mégarde pendant leur
exploration). Et nous ne sommes pas là pour les
brider, l’important est de récupérer la Lampe,
qu’importe la méthode.
Et si…
Les voyageurs ont déjà le tapis et l’épée.
Si le Tapis intriguera les éclairés et hérissera le
poil des aveuglés, l’épée aura un certain succès
auprès des illuminés. L’arme ayant une plume
de l’Oiseau de Feu incrustée dans sa lame, elle
a un attrait similaire à la Lampe. Les illuminés
tenteront de l’acheter, et si les voyageurs
refusent, ils feront mine de laisser tomber
avant d’envoyer, durant la nuit, les Aveuglés les
bastonner puis les enfermer. Le tapis et l’épée
rejoindront la Lampe dans la Chapelle. Les
voyageurs seront expulsés du monastère le
lendemain.
 Les ruses de la Volga
Le pays de la Volga mâles y ont la part congrue et ingrate, ne
Le pays des Rus n’est que l’embouchure du pouvant espérer mieux qu’une place de
Don-des-dragons, et il prend fin dans les serviteur, et les captifs sont condamnés à une
collines du Haut-Cours du Don. Le Haut-Cours vie d’esclave entre les griffes des ruses.
du Don est un grand plateau recouvert par des
Contact
forêts de pins, creusé pendant une éternité
Les voyageurs finiront par arriver dans le
d’érosion par les eaux du Don-des-Dragons. La
Haut-Cours du Don. Les doniens à qui ils
terre éventrée par l’eau laisse apparaître les
confieront leur destination leur conseilleront
richesses du sous-sol. Ces collines escarpées
de faire demi-tour, le Pays de la Volga n’étant
ont longtemps échappé et échappent toujours
pas un lieu agréable. S’ils creusent la question,
à l’autorité des Stars. Ici, le Don se sépare en de
ils apprendront que les Ruses sont des femmes
multiples courants, parfois souterrains. La
arrogantes et violentes qui ne vivent que pour
navigation y est difficile et à moins de connaître
le pillage et n’ont aucun respect pour les droits
les bons canaux, les échouages sont
humains élémentaires. On dit qu’elles colorent
inévitables. Les chemins terrestres ne sont pas
leurs cheveux avec des couleurs criardes,
plus sûrs, les forêts de conifères grouillent de
parlent fort et auraient des comportements
prédateurs en tout genre et les routes sont
impudiques. On prétend qu’elles sont
souvent entrecoupées par des torrents furieux.
gouvernées par leurs émotions et leurs vices.
On peut suivre pendant des jours un chemin
La rumeur dit qu’elles vivent avec des chats
avant de se rendre compte qu’une crue
monstrueux. On murmure également qu’elles
saisonnière a emporté le pont que l’on
détestent les hommes, ce qui semble être
comptait emprunter. Les seuls à pouvoir
particulièrement choquant.
voyager sereinement dans ces collines sont les
locales, les ruses. Les voyageurs persévéreront sûrement en
direction du Haut-Cours du Don. Quelle que
Le Haut-Cours du Don était le repère de
soit leur méthode d’approche, ils finissent par
pillards, de groins et de créatures déplaisantes
rencontrer une vierge à l’épée du nom de Folga
jusqu’à qu’une aventurière, quelque peu
et son contingent de guerrières. Les vierges à
pillarde, probablement un peu grouine selon
l’épée sont un ordre guerrier se consacrant à la
les mauvaises langues et assurément
défense des terres de la Volga. Folga et ses
déplaisante, fasse de ces collines son domaine.
guerrières occupent un petit fortin perché sur
Cette femme se nommait Volga, et donna son
une colline, surplombant l’un des rus
nom au pays. Sous sa juridiction, les pillards
navigables de la région, et elles ont vus arriver
devinrent ses sujets, ce qui ne changea pas
les voyageurs. Elles viennent s’enquérir des
grand-chose pour les doniens. Elle nomma son
raisons de leur présence.
peuple les ruses, un pied de nez aux habitants
de Pays des Rus. Selon le nombre de voyageuses dans le groupe,
l’attitude de Folga est bien différente.
La Volga et ses héritières menèrent une
Méfiante, elle ne s’adresse qu’aux femmes du
politique de pillages et de raids aussi bien dans
groupe et ignore les hommes, et les invite à
le Pays des Rus qu’en Stormandie et en Outre-
partager un repas avec elle pour en apprendre
Don. Les ruses de la Volga devinrent un peuple
plus sur leur quête. Les hommes sont quant à
prospère, redouté et puissant. C’est un peuple
eux logés dans une sorte de grange où Folgierd,
de guerrières et d’artisanes, exploitant les
frère et intendant de Folga, se charge de les
métaux que l’on trouve dans les collines, mais
initier aux coutumes du Pays de la Volga. S’il n’y
également de marchandes, pour écouler le
a que des hommes dans le groupe, elle leur
fruit de leurs pillages et de leur artisanat.
donne l’ordre de faire demi-tour. S’ils insistent,
Riches, vindicatives et puissantes, elles sont elle ne discute qu’avec les plus polis. S’ils
d’autant plus détestables aux yeux de leurs exposent leur quête avec humilité, elle propose
voisins du fait que tout les postes de pouvoirs de les prendre à son service pour tirer cette
et les plus hauts échelons de leur société sont affaire au clair auprès de la cheffe de son ordre
occupés par des femmes. Dans leur culture, les
et de la Volga. En attendant, elle les confie à
Folgierd.
Que ce soit Folga ou Folgierd, les voyageurs
seront mis au courant des règles et coutumes
de la société ruse. Au sein de celle-ci, les
femmes et les hommes n’ont ni les mêmes
droits ni les mêmes devoirs. Chaque homme
est au service d’une femme, soit en tant
qu’esclave, soit en tant que serviteur. Les
hommes sont chargés des travaux des champs
ou de la mine, ainsi que des travaux
domestiques comme le ménage, l’entretien de
la maison ou la cuisine. Les femmes tiennent
les commerces, pratiquent l’artisanat et vont à
la guerre, ce qu’elles nomment les arts féminins
des armes, des arts et des lettres. Ce sont elles
qui prennent les décisions et dirigent la société
ruse. Le pays est gouverné par la Jarl Volga
Volgadottir, descendante de la fondatrice du
royaume, que tout le monde nomme la Volga.
Concernant les voyageurs, ils devront remettre
leurs armes à Folga ou à une voyageuse qui leur
servira de garante, car l’épée, la masse d’arme
et l’arc sont réservés aux femmes. Par cela, il
est entendu que toute arme, en dehors du
couteau, de la lance et du bouclier en temps de
guerre, est interdite aux hommes. Tout homme
qui entre en terre ruse est sous la
responsabilité d’une femme, soit une de leur
compagne de voyage, soit une régente comme
Folga.
Folgierd préviendra les voyageurs qu’ils
devront faire preuve d’humilité et révérence
quand ils s’adresseront à des ruses. Certaines
ruses peuvent se montrer particulièrement
violentes envers les hommes qui leur
manquent de respect. Folga est plutôt
tolérante envers les rustres, ce n’est pas le cas
de nombres de ses camarades. Voici les
quelques règles qu’il serait judicieux de
connaître :
• Tout homme s’adressant à une femme
alors qu’elle ne l’a pas sollicité,
répondant de façon impertinente à
une question ou un ordre donné par
une femme, ou manquant
d’obséquiosité dans son attitude
envers une femme est puni d’une
claque, sentence immédiate.
• Tout homme surpris à déambuler sur la
voie publique seul et sans autorisation
de sa maîtresse sera emprisonné,
jusqu’à ce qu’il soit réclamé par sa
maîtresse, ou qu’il meurt de faim et de
soif.
• Tout homme surprit à pratiquer un art
féminin, c’est-à-dire les métiers des
armes, des arts et des lettres, sera mis
au pilori du lever au coucher du soleil
la première fois, deux jours la seconde
fois, sera battu en proportion du
préjudice causé la troisième fois. Toute
récidive ultérieure sera punie par
l’asservissement du prévenu ou d’un
bannissement si le contrevenant est le
serviteur d’une étrangère.
• Tout larcin d’un homme au détriment
d’une femme sera puni d’un nombre
de coups de bâton proportionnel à la
faute commise, administré par la
victime ou sa représentante
préalablement désignée. Nul larcin est
trop grand pour ne pas être réparé.
• Tout acte de violence envers une
femme sera puni d’un nombre de
coups de bâton proportionnel à la
faute commise, administré par la
victime ou sa représentante
préalablement désignée. Si le
préjudice est trop grand pour être
réparé, il sera battu à mort.
• Les seuls hommes dispensés, dans les
limites du raisonnable et de la patience
des ruses, des trois premières lois sont
les hommes ayant démontrés leur
courage, leur honnêteté et leur respect
des coutumes, ce que les ruses
nomment des bogatyrs. C’est à la Volga
de décider qui est bogatyr et qui ne
l’est pas.
Selon ce que lui disent les voyageurs de leur
intentions, Folga se propose comme guide, et
peut être tout à fait disposée à les
accompagner, à leur servir d’intermédiaire
entre sa société et eux. En effet, les frontières
avec le Pays des Rus sont calmes, on est loin de
l’agitation de la frontière avec la Stormandie.
Elle s’ennuie et la quête des voyageurs
l’intéresse. Si les voyageurs dissimulent leurs
intentions, elle se contente de leur indiquer le
chemin du Palais de la Volga, seul bourg du
royaume qui pourrait les intéresser.
Le voyage qui s’en suit sera plus ou moins facile.
Avec Folga, le voyage est une agréable
randonnée dans la pinède. Sans elle, le voyage
est plus laborieux dans le labyrinthe de collines
et de rus qui compose les terres de la Volga.
Bon gré mal gré, ils finiront par arriver en vue
du Palais de la Volga
À la cour de la Volga
Le Palais de la Volga est une grande salle de
style Stormand au sommet d’une colline. A ses
pieds s’étend un bourg assez important,
composé de maisons en bois et entouré de
murailles. C’est le centre du réseau commercial
des ruses. Un port a été aménagé le long d’un
ru assez profond pour les navires à fond plat
qu’elles utilisent, et plusieurs ateliers longent
les docks. La ville en elle-même est
relativement petite, mais bien entretenue et
populeuse. Elle est ouverte aux étrangers, et
1
10
9 2
8
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3 4
surtout aux étrangères, tant qu’ils respectent
les coutumes locales et renoncent à utiliser le
Haut-rêve, vivement déconseillé, la précédente
souveraine ayant péri sous les coups d’un haut-
rêvant.
1. Le Palais de la Volga. La Grande Salle est un
énorme palais en bois, magnifiquement
décoré, en forme de coque de navire. On
reconnaît là l’architecture classique
Stormande, la première Volga étant originaire
de ce pays. Le palais contient les trésors et
butins amassés par les pillardes ruses depuis
des siècles.
Le Palais de la Volga s’ouvre sur la grande salle,
une immense pièce éclairée par des ajours
dans les murs et un grand feu dans la fosse
centrale. Des piliers de bois soutiennent la
voûte, sculptés de figures féminines, de
guerrières et de dragons. Les appartements de
5
7
la Volga sont accessibles par un escalier 7. Le port. On y trouve des navires venant aussi
derrière son trône, l’ouverture est dissimulée bien des terres septentrionales d’Outre-Don
par une tenture. Une salle de garde est que des marchandes doniennes et des
dissimulée à droite de la grande salle, il s’y stormandes. L’artisanat ruse est assez réputé
trouve un escalier qui mène aux geôles. Les pour valoir le déplacement.
cuisines se trouvent à gauche, et un escalier y
8. Quartier des hommes. Moins clinquant, plus
descend vers les celliers. La salle des butins se
petit que les autres quartiers, ses maisons
trouve dans une grande cave aménagée sous la
servent à loger esclaves et serviteurs qui vivent
grande salle et on ne peut y avoir accès que
en ville au service de la Volga.
depuis l’escalier des appartements de la Volga.
La nuit, seules quelques vierges à l’épée 9. Le Hall des lettres. Cœur administratif et
patrouillent dans la grande salle et autour du culturel des ruses, ces bâtiments renferment
palais. Les portes sont fermées et surveillées l’ensemble des archives du royaume. C’est
par des sentinelles. Personne, hormis les aussi ici que Holga travaille pendant la journée.
serviteurs attachés au service de la Volga,
quelques vierges et la Volga elle-même, ne loge 10. Les forges. C’est ici que les ruses récoltent
au palais. le fer et travaillent le métal de leurs armes.
Kolga s’y rend régulièrement.
2. Le Hall des vierges. La caserne est la dernière
ligne de défense en cas d’assaut sur la ville,
c’est aussi le centre de l’ordre des vierges. On y
trouve aussi bien des écuries qu’un terrain
d’exercice et des logements pour les apprenties
vierges ainsi que la tour de l’ordre, où loge
Yolga.
3. Les grandes places. C’est ici que se tiennent
les marchés et la plupart des commerces de la
ville. C’est aussi ici que sont exécutées les
pénitences, notamment la mise au pilori.
4. La maison des voyageuses. Cette auberge
accueille toutes celles et ceux qui
souhaiteraient y loger. Par un décret d’une
Volga soucieuse d’augmenter l’attractivité de la
ville, les hommes et les femmes y sont traités
de manière rigoureusement égale. Bien que
respectant la coutume du voyage (une nuit et
une bière gratuite !), la tenancière actuelle, une
certaine Zolga, y pratique des prix jusqu’à deux
fois supérieurs aux tarifs habituels des autres
tavernes. Mais hé ! C’est le prix de la liberté.
5. La maison de Holga. C’est un magasin et
laboratoire d’alchimie tenu par la conseillère et
son élève Molga. En réalité c’est Molga qui s’en Les voyageurs peuvent descendre à la maison
occupe, la boutique servant de couverture aux des voyageuses le temps que Folga obtienne
expériences de haute-rêvante de Holga. une entrevue avec Yolga, la cheffe de son ordre.
Sinon, les voyageurs doivent trouver un moyen
6. La maison de Kolga. Elle tient plus du grand d’assister à une audience de la Volga, où celle-ci
atelier que de la maison. La conseillère Kolga entend les doléances de son peuple, rencontre
est la meilleure forgeronne des hautes terres, des ambassadrices diverses et variées et
du moins son atelier est le plus productif. Elle tranche les litiges qu’on lui soumet. Ces
s’est installé un petit nid douillet dans une audiences ont lieu quatre fois par mois, à
dépendance de l’atelier. chaque changement de lune, et sont ouvertes
à toutes. La Volga actuelle ayant 14 ans, ce sont
ses régentes Yolga, Holga et Kolga qui
s’occupent de tout cela, la Volga se contentant
de faire bonne figure depuis son trône.
Volga Volgadottir est la fille de la précédente
Jarl. Cette dernière est morte lors d’un raid en
Stormandie, assassinée par un guerrier Sorde
invoqué par un haut-rêvant, ne laissant pour
héritière qu’une petite fille solitaire. Volga est
sur le trône depuis quelques années déjà, et sa
vie n’est qu’un enchaînement sans fin d’études,
d’entraînements martiaux et de cours de
diplomatie. Depuis la disparition de sa mère,
les régentes Yolga, Holga et Kolga gèrent tous
les pans de sa vie, sans guère lui laisser le choix.
Elle s’ennuie, et ça se voit. Elle vendrait sa
couronne (ou une épée) pour une bonne
distraction. Elle ne défiera en aucun cas ses
régentes, elle en a bien trop peur.
Yolga la Rouge est une puissante guerrière.
C’est elle qui a ramené les troupes du raid raté
qui a coûté la vie à sa Jarl, alors elle s’en veut
beaucoup et se comporte en mère ourse
surprotectrice avec la jeune Volga. Si la plupart
des ruses sont relativement tolérantes envers
les hommes, elle est une traditionaliste et
grincera les dents à chaque fois qu’un homme
aura un comportement qu’elle juge
inapproprié, comme prendre la parole ou une
initiative. Elle a une vision du monde très
arrêtée. C’est en revanche une sentimentale, et
l’histoire de l’Oiseau de Feu a toutes ses
chances de l’émouvoir si on omet l’existence de
Tchekov.
Holga n’est pas une native du Haut-Cours du
Don. C’était une voyageuse avant une
mésaventure qui l’a rendue captive d’un
seigneur Stormand. Puis, lors d’un raid, elle fut
libérée par les ruses, qu’elle rallia sans trop
savoir pourquoi. Elle finit par intégrer leur
culture et à gravir les échelons de la société
ruse. C’est une marchande retorse, son
expérience de voyageuse lui a donné un bon
contact avec les gens et est très savante. Elle a
été nommée préceptrice de la jeune Volga par
l’ancienne souveraine avant son raid fatal, rôle
qu’elle continue à remplir encore aujourd’hui.
C’est aussi une haute-rêvante, de la voie de
Narcos, ce n’est pas un secret, elle le pratiquait
avant et, avec la plus grande discrétion, elle
continue à le pratiquer. Elle sera amicale avec
les voyageurs, et si un ou une haute-rêvante se
trouve parmi eux, elle tentera de gagner son
amitié. Elle est admirative du travail d’Yvan, et
elle aussi aimerait étudier l’épée-plume.
Kolga est la régente la plus discrète. Elle est,
depuis longtemps, la maîtresse absolue des
forges de la Volga et conseillère de plusieurs
jarls. Aimante, amicale, elle accueillera les
voyageurs comme des enfants retrouvés s’ils
évoquent Kolgierd, le beau-fils de Tchekov, qui
s’avère être son plus jeune fils. Très perspicace,
elle percera à jour la moindre tentative de
manipulation. Elle est aussi inflexible que le fer
noir, et n’aidera pas les voyageurs quoi qu’ils
tentent de faire, sauf si leur plan vise à amuser
Volga. En effet, Kolga est soucieuse du bien-
être de sa protégée, et est consciente de son
malheur. Toutes les distractions sont
bienvenues et elle soutiendra les décisions de
la Volga.
L’épée-plume
Comment l’épée a-t-elle atterri entre les mains
des ruses ? Nul ne le sait. L’épée est passée
entre de nombreuses mains avant de rejoindre
le trésor de la Volga. Elle était parfois portée
par la souveraine, mais elle n’a plus quittée le
palais depuis quelques décennies. Même Kolga
ne se souvient pas avoir déjà vu une Volga
porter l’artefact. Selon le dernier inventaire,
elle est toujours là.
Pour l’obtenir, il va falloir s’attirer les bonnes
grâces des régentes et de la Jarl. Chacune a un
point faible sur lequel appuyer. Yolga est une
romantique, et la situation de l’Oiseau de Feu
l’émeut. Si une voyageuse parvient à lui
présenter la situation sous l’angle d’un
sauvetage, ou d’une noble quête, elle aura le
soutien indéfectible de la cheffe des vierges à
l’épée. Pour l’approcher, Folga peut aider, c’est
une fidèle lieutenante qui a toute la confiance
de sa cheffe.
Holga cherche des amis ayant les mêmes
passions qu’elle. Elle en a marre du secret et de
la tromperie, une longue discussion sans chichi
sur ses passions avec une oreille attentive lui
ferait le plus grand bien. Son intérêt pour le
travail d’Yvan est manifeste, et si les voyageurs
possèdent l’un des artefacts et la laisse
l’étudier, Holga n’aura plus qu’une envie : sortir
l’épée de la salle des butins. Elle pourrait
abuser de son rôle de régente pour y accéder.
Volga a besoin de s’évader de sa position, au Sinon, les voyageurs peuvent trouver un autre
moins un peu. Une bonne histoire ou un bon moyen. Ils peuvent faire chanter Holga s’ils
spectacle, voire les deux, pourrait la dérider. connaissent son secret, c’est-à-dire qu’elle
Plus les voyageurs lui feront forte impression, pratique encore le Haut-rêve. Celle-ci a des
plus elle sera attentive à leurs demandes. Elle accès au Palais et peut les aider à s’infiltrer
reste cependant la souveraine des ruses, et jusqu’à la salle des butins. Mais elle leur tiendra
fidèle à son engagement, elle refusera de rancune et une fois hors de danger, elle
confier l’épée sur la seule parole des voyageurs. ameutera tout le monde contre les voyageurs.
Ils doivent faire leurs preuves et attirer sa
sympathie, et ce ne sera plus à des voyageurs Les voyageurs peuvent exploiter la grogne
qu’elle confiera l’épée, mais à des amis. parmi les esclaves. Beaucoup sont issus des
derniers raids d’Yolga, et ils n’ont pas encore
Miser sur Kolga n’est pas une bonne idée. Si elle perdu l’espoir de se libérer de leurs chaînes.
n’est pas hostile aux voyageurs, elle leur refuse Créer une diversion avec leur révolte pourrait
toute aide, même si elle aime discuter avec permettre aux voyageurs de dépeupler le
eux. Elle pourra même augmenter la sécurité palais, les gardes étant parties mater la révolte,
autour de la grande salle et de la salle des et ainsi cambrioler la salle des butins.
butins si elle suspecte un sale coup.
Si les voyageurs volent l’épée, des vierges
Si Yolga et Holga se rangent du côté des seront lancées à leur trousses. Si on la leur
voyageurs, la Volga suivra leurs conseils et sera confie, Kolga leur demandera de la restituer
suivie par Kolga de mauvaise grâce. Si la jarl dès que possible, une menace sourde
prend l’initiative de la confier aux voyageurs dissimulée sous ses sourires.
après une bonne distraction, Kolga la
soutiendra et les deux autres régentes Et si…
rechigneront un peu avant de céder. Si l’une des Les voyageurs ont déjà le tapis et la lampe ?
régentes se retrouve en minorité, elle ne
Les voyageurs peuvent convaincre le Tapis de se
s’opposera pas aux deux autres.
rendre au Palais de la Volga, il connaît très bien
l’endroit et sera ravi de la frayeur qu’il
provoquera. En effet, Bayaga et les ruses ont
des contentieux et se sont déjà affrontées. Très
impressionnée, la Volga les désignera comme
Bogatyrs, vainqueurs de la faiseuse d’hommes.
Ils seront libres de se déplacer où bon leur
semble, elle sera tout ouïe pour d’éventuelles
requêtes et acceptera avec enthousiasme toute
demande des voyageurs ayant trait à cette
histoire d’Oiseau de Feu. Les conseillères
seront prises de court et elles ne désavoueront
pas leur jeune suzeraine, pour une fois qu’elle
s’intéresse à ce qu’il se passe… Elles tenteront
cependant de réfréner les ardeurs de la jeune
fille, aux voyageurs d’en profiter avant que
l’une d’entre elles parvienne à faire remettre
les pieds sur terre à la Volga. La princesse
n’étant pas une idiote pour autant, elle
acceptera de leur remettre l’épée à la condition
qu’ils la restituent le plus tôt possible.
 L’Esprit de la forêt
Pour obtenir le tapis, les voyageurs vont se
rendre dans les rus bruns. Ils y rencontreront la
propriétaire actuelle de l’artefact, qui leur
confiera une mission.
Tchekov mettra les voyageurs sur la piste d’une
sorcière, Bayaga. En réussissant un jet
d’INTELLECT/ Légendes à -6, les voyageurs
peuvent se souvenir que Bayaga est une
sorcière légendaire, intervenant dans maintes
histoires, tantôt mettant des bâtons dans les
roues des héros, tantôt les mettant à l’épreuve
et les récompensant. Elle aurait même
participé aux batailles que connut le Pays des
Rus. Autant mère poule qu’ogresse, la Bayaga
est une figure très ancienne des contes du Pays
des Rus. Selon le rucher, le tapis serait entre ses
mains, du moins celles de ses héritiers, car
aussi puissante soit elle, une sorcière n’est pas
immortelle.
Le pays de la Sorcière
Les rus bruns sont une terre marécageuse. Ici
les rus se fondent dans de larges étangs et
bourbiers piégeux. Les terres émergées sont
couvertes de profondes forêts de bouleaux. La
végétation y est luxuriante. La faune prospère
entre les joncs, aussi bien le bestiaire habituel
des marais du multi-rêve que des animaux
autochtones. L’animal emblématique de la
région est l’Auroch aquatique, un animal plutôt
discret car vivant en solitaire. Sa chair est très
prisée et de nombreux chasseurs et prédateurs
le recherchent.
Autrefois fortement aménagée, la région s’est
peu à peu dépeuplée au fil des années. En ce
temps-là, l’eau n’avait pas autant d’emprise sur
les terres, de vastes donjons dominaient la
région, des champs immenses recouvraient le
paysage. Mais vint la fin du second âge et le
Grand Réveil. La région s’est couverte de
brume, les digues ont cédé et les canaux se
sont embourbés. Les habitants sont donc
partis, soit vers les cités caspiées au Sud, soit
vers le Don-des-Dragons à l’Est.
La population actuelle des rus bruns s’est
réunie dans de petits villages, se battant contre
la vase pour grappiller un peu de terrain pour
les cultures. Isolés, les bruns se tournent vers
leur communauté et se méfient des étrangers.
Ils reconnaissent la domination des Stars du
Don, mais préfèrent régler leurs affaires entre
eux, et ne considèrent d’autre autorité que
celle de leurs anciens et anciennes.
Les seules informations qu’a pu rassembler
Tchekov sur la propriétaire actuelle du tapis est
qu’elle se nomme Bayaga, et qu’elle est une
femme puissante et respectée parmi les bruns.
Dans les villages et bourgs des rus bruns qu’ils
ont traversés, les voyageurs ont pu apprendre
qu’elle vivait pour le moment dans un village
isolé au cœur du marais, dans une région
encore sauvage. Le village se nommerait
Pripiat. Les bruns savent vaguement où il se
trouve et indiqueront un vague chemin aux
voyageurs. En suivant les routes défoncées et
en demandant aux locaux, ils devraient finir par
atteindre la route de Pripiat.
Pripiat, le village de la Bayaga, est semblable à
tout ceux de la région : marécageux. Une vieille
route défoncée traverse le marais pour relier le
village au reste du monde. Il est entouré au Sud
et à l’Est par une forêt de bouleaux
impénétrable, tandis qu’au Nord et à l’Ouest
s’étend un vaste étang poissonneux. Une
vingtaine de maisons de bois humides
entourées d’une palissade vermoulue, à la
peinture écaillée représentant aussi bien des
animaux des marais que des créatures
fantastiques, compose Pripiat.
Avant d’entrer dans le village, les voyageurs
croisent le cimetière de Pripiat. Un fossoyeur
est en train de creuser une tombe en sifflant un
air guilleret. Il salue les voyageurs avec un
grand sourire et se présente, le fossoyeur, ou
Danil pour sa mère, mais tout le monde
l’appelle le Fossoyeur. Si on lui demande
pourquoi il creuse, s’il y a eu un mort
récemment, il répondra que le dernier est en
terre depuis quelques jours, mais que, si les
dragons le veulent, d’autres ne devraient tarder
à le rejoindre. Pour toute autre indication sur le
village, les alentours ou la Bayaga, il conseille
aux voyageurs de discuter avec Aliosha, Vasily
ou Babouchka, lui n’étant qu’un simple
fossoyeur. Il salue de nouveau les voyageurs et
retourne à son labeur en sifflant une marche voyageurs que c’est tout droit. Elles les quittent
funèbre sur un air joyeux. avec de grands sourires (sauf Lys) et retournent
jouer dans le village. Quelques pas plus loin, les
Dans le village, une dizaine d’enfants joue entre
voyageurs tombent sur une masure.
les maisons sous la surveillance d’une très
vieille femme et d’un homme massif. Non loin, La masure, de l’extérieur, ressemblent à une
trois jeunes gens sont en train de sculpter un ruine. Les murs semblent faits de planches de
tronc. Sinon le village est à peu près désert, car bois ajustées au petit bonheur la chance, son
le reste des villageois est aux champs ou à la toit ressemble à une vieille paillasse et sa
pêche. L’homme massif se présente sous le cheminée semble sur le point de s’écrouler. De
nom d’Aliosha, bogatyr de Pripiat. C’est lui qui plus, elle est perchée sur deux vieux troncs
s’occupe d’accueillir les voyageurs. Il s’enquiert tordus. Le tout à l’air bien branlant. Devant la
des raisons de leur venue ici. Si les voyageurs masure, trois femmes s’activent à diverses
évoquent Bayaga, une petite fille aux cheveux tâches. Une femme blonde étend du linge sur
blonds s’exclamera, ravie : « Vous voulez voir un fil, tandis qu’une rousse s’échine à récurer
Baba ? ». Une petite rousse s’approchera à son un vieux chaudron. La femme brune est
tour : « On sait où Baba est en ce moment ! ». occupée à recoudre un vieux drap à carreaux.
Une petite fille brune rajoutera : « Grand-mère Ce sont les filles de la Bayaga, Aurore, Ilona et
Bayaga nous avait dit que vous viendriez, Esther. Aucune d’elles ne réagit à la présence
suivez-nous. ». des voyageurs autrement que pour leur jeter
un regard dénué de curiosité. Après un certain
Si les voyageurs demandent à être logés,
temps, la brune pose son ouvrage et se lève,
Aliosha leur répond qu’ils devraient d’abord
jette un coup d’œil aux voyageurs, puis
aller voir la Bayaga, si c’est pour cela qu’ils sont
escalade les escaliers branlants qui mènent à la
venus, avant de faire quoi que ce soit d’autre.
masure.
Sinon, il leur dit qu’il leur trouvera un coin où
dormir au chaud, et qu’en attendant ils peuvent
s’installer dans la maison commune.
Les trois petites filles se nomment Hélion,
Bouton-d’or et Lys. Elles guident les
voyageurs vers une petite forêt de
bouleaux, derrière le cimetière. Si on les
questionne, Hélion et Bouton-d’or se
font un plaisir de répondre, et elles
poseront des questions en retour, tandis
que Lys se contentera du silence. Elles sont
les petites-filles de Bayaga. Elles vivent
au village et s’amusent avec
leurs amis, elles ne
manquent de rien et sont
bien traitées ; Bayaga fait
peur aux villageois, c’est
pour cela qu’elle reste
dans sa masure dans les
bois. Pourtant elle est très
gentille avec tout le
monde, des gens viennent
de loin pour la voir et
chercher ses conseils.
Après s’être profondément
enfoncées dans le bosquet,
les petites filles s’arrêtent
subitement et annoncent aux
Elle y pénètre puis, après quelques minutes,
elle ressort et annonce : « La Bayaga va vous
recevoir. Veuillez entrer. ».
L’intérieur de la masure est analogue à
l’extérieur. Tout semble sur le point de tomber
en mille morceaux. Il fait sombre, presque
étouffant. En dehors des rais de lumières qui
filtrent à travers les fentes de la porte et des
murs, seul un feu mourant dans la cheminé
illumine la pièce. L’odeur est un mélange de
cendre, de poussière et de musc animal. On
peut entendre les ronflements d’un gros
cornicochon avachi à côté de la cheminé. La
Bayaga fait face à l’entrée, dans son fauteuil à
haut dossier, depuis les ténèbres du fond de la
masure.
Elle ressemble à un tas d’os mélangés pêle-
mêle dans un sac de cuir, le haut de son crâne
a été scalpé et gravé de signes étranges et
tarabiscotés. Elle tripote en permanence un
grand bâton surmonté d’un crâne humanoïde,
probablement celui d’un Cyan à en juger les
gemmes qui l’ornent. Ses yeux passent d’un
voyageur à l’autre avec l’acuité d’un rapace.
Après un long silence, une voix rauque sort de
sa gorge : « Soyez les bienvenus, veuillez-vous
asseoir, par terre suffira bien, et goûtez donc
mon thé. Esther, sers-leur donc un gobelet.
Buvez, et je vous écoute. Que voulez-vous que
vous enseigne la Bayaga ? »
La Bayaga est une haute-rêvante, du genre
ancienne et espiègle ; elle peut sentir les
menteurs et repérer d’un coup d’œil les
arpenteurs des terres médianes. Lui mentir sur
les raisons de leur venue peut coûter cher aux
voyageurs. Dans tous les cas, elle écoute
poliment leurs babillements jusqu’à ce que l’un
d’eux évoque le tapis. À ce moment, elle se met
à sourire de manière sinistre, mais ne dit rien
et laisse les voyageurs continuer. Puis, une fois
le flot tari, elle confirme qu’elle est en
possession du tapis. Elle refuse de s’en séparer
et la discussion s’arrête là. Tant qu’aucun
voyageur n’évoque l’Oiseau de Feu, elle est
inflexible. Nombre d’imbéciles ont déjà essayé
de lui prendre le tapis, et leurs crânes ornent sa
masure, dit-t-elle en désignant le plafond
enténébré, d’où tombent des cliquetis
inquiétants. Une fois l’Oiseau de Feu évoqué,
elle est plus à l’écoute. Et si les voyageurs
possèdent déjà la Lampe, elle est certaine de la
sincérité des voyageurs.
Elle finit par accepter de leur céder le tapis, à
une condition cependant. Que les voyageurs
s’occupent d’un problème pour elle. Oh, trois
fois rien, juste faire en sorte qu’un Liéchi arrête
d’embêter les villageois. La créature aurait tué
un chasseur et interdit sa forêt aux bûcherons,
et à tout le monde en réalité, ce qui est bien
ennuyeux. Voilà le marché, les voyageurs
règlent cette histoire de Liéchi, puis Bayaga leur
prête le tapis. Et il s’appelle revient, précise-t-
elle. S’ils ont des questions, qu’ils aillent
enquiquiner Vasily ou Babouchka. Elle les
congédie aussi sec.
Le Liéchi
Bon, c’est quoi un Liéchi ? En réussissant un jet
d’INTELLECT/Légendes à -6, les voyageurs
devraient se souvenir qu’il s’agit là d’un esprit,
commandant aux bois et aux bêtes, gardien de
la forêt. Il a de nombreux nom, l’Homme-Vert,
Myrddin, Pan et tant d’autres dépendants de la
région du rêve où ce protecteur de la forêt se
trouve. Les voyageurs n’en savent guère plus, et
pour cause : ces bêtes-là sont rares et
n’interfèrent jamais avec les humains, les
informations les concernant sont rachitiques.
Après avoir rencontré la Bayaga, les voyageurs
sont de retour au village. Pripiat est plus animé
que quand ils sont arrivés, la plupart des
villageois sont de retour de leurs travaux. Ce
sont des fermiers et des pêcheurs. Il n’y a pas
vraiment de commerce à Pripiat, chaque
famille pourvoit à ses besoins et toutes
s’entraident si nécessaire.
Les habitants les plus remarquables sont les
suivants :
Vasily est l’ancien, qui assume le rôle de chef du
village. C’est un vieil homme affable, à la
diction lente et réfléchie. Il s’inquiète en
permanence de la bonne marche du village et
est un juge reconnu pour sa sagesse et son sens
de la justice. Il applique les coutumes de
manière implacable mais juste.
Babouchka est l’ancienne. Elle passe ses vieux
jours à surveiller les mômes et à leur raconter
des histoires. C’est la mémoire du village, elle
se souvient de tout. Elle connaît également
beaucoup d’histoires et est une conteuse
appréciée.
 Vasily Babouchka

Aliosha
Nadejda

Danil

Viktor

Waren, Ishram
et Cogneuse Masha
Vasily

Viktor
Aliosha était un bogatyr errant. Il y a quelques
années, il est arrivé dans le village blessé et
mourant. Personne n’arrivant à le soigner, on l’a
confié à la Bayaga. Personne ne sait quel genre
de pacte il a passé avec elle mais il revint tout
fringant et s’est installé au village pour un
temps.
Nadejda est une rebouteuse, connaissant les
plantes et les remèdes. Petite-fille de
Babouchka, encore jeune, elle est devenue une
membre respectée de la communauté. Elle
passe le plus clair de son temps à cultiver ses
plantes dans son jardin ou partie en récolter
dans le marais.
Danil n’est pas fossoyeur à pleins temps. C’est
un fermier, mais c’est le seul qui sache préparer
les corps. Un peu simplet, d’un enthousiasme
confondant, il aime sincèrement son rôle.
Autrefois, c’était Bayaga ou ses filles qui
s’occupaient des morts, mais devant la passion
du Fossoyeur, elles lui ont confié la tâche.
Cogneuse, Ishram et Waren sont des jeunes
gens forts et capables. Ils sont issus des familles
de pêcheurs et de fermiers et passent leur
temps à couper et préparer le bois nécessaire
au bon fonctionnement du village en temps
normal. Actuellement, ils rongent leur frein et
aiguisent leurs haches. Ils sont
particulièrement amers parce qu’ils
comptaient accumuler un petit pécule pour se
lancer à leur tour dans le voyage.
Viktor est un pêcheur, colérique et grande
gueule. Il est le pêcheur le plus respecté et
donc considéré comme le bras droit et
successeur attitré de Vasily par la moitié du
village.
Masha est une fermière, froide et méfiante.
Elle est la fermière la plus respectée et donc
considérée comme la seconde et successeuse
attitrée de Vasily par l’autre moitié du village.
Le problème des villageois est le suivant : un
Liéchi les a maudits. Il y a quelques jours, un
habitant du village, le chasseur Venceslas, a été
assassiné par le Liéchi. Depuis, ce dernier a
interdit l’accès de la forêt aux villageois et
brutalise tous ceux qui tenteraient de pénétrer
au-delà de la clairière au floumier. C’est là-bas
qu’on a trouvé le corps du chasseur, sa
première et pour l’instant unique victime,
engoncé dans des racines. Les villageois
craignent qu’il ne s’arrête pas là. Il pourrait
répandre la maladie parmi les bêtes,
empoisonner les rus voir envoyer ses loups
dévorer les enfants.
Babouchka connaît les mythes et les légendes
entourant le Liéchi, le vieil homme de la forêt.
Elle ignorait toute fois que l’un d’entre eux
vivait à proximité. En temps normal, c’est un
esprit, seigneur des bois et des bêtes, les
corneilles sont ses messagères et les loups ses
soldats. Il évite les hommes, mais il arrive qu’il
leur joue des tours, comme détourner un
sentier pour les faire tourner en rond ou les
mener dans un bourbier. Le meilleur moyen de
se prémunir de ses tours est de lui faire un don,
comme du sel et du pain. Parfois, dans les
contes, il vient réclamer ces offrandes,
menaçant des pires représailles ceux qui
refusent ; on dit qu’un fermier aurait perdu
tout son cheptel après avoir refusé de lui
donner une vache.
Vasily ne connaît pas ces histoires, tout ce qu’il
sait c’est que Venceslas a été tué par les racines
du Liéchi et qu’ensuite, des totems sont
apparus dans la forêt. Selon Babouchka, ces
totems sinistres sont là pour signaler qu’il est
interdit d’aller au-delà. L’ancien signale que
tous ceux qui ont tenté de pénétrer dans la
forêt se sont fait malmener par des corneilles
ou ont été attaqué par des loups. En surplus, on
entend de plus en plus les loups la nuit depuis
cet évènement.
Les bûcherons sont frustrés, ils ne veulent pas
retourner aux champs ou à la pêche avant
d’avoir fini leur travail dans la forêt. Pour
l’instant, ils font de menus travaux de
menuiserie en attendant de voir, mais ils
n’attendront pas longtemps avant de pénétrer
à nouveau dans la forêt pour combattre, avec
leurs haches, l’esprit. Ils savent comment le
faire sortir de son trou, il suffit de détruire les
totems. Vasily, Babouchka et Aliosha s’y sont
opposé, convaincus provoquer le Liéchi ne
causerait que des désastres.
Aliosha ne connaît pas grand-chose du Liéchi,
mais il n’est guère surpris. Les rus bruns sont
remplis de créatures de cauchemar qui mènent
la vie dure aux humains. Ces bois sont
dangereux, il en sait quelque chose ajoutera-t-
il mystérieusement. Il déconseille aux
voyageurs d’aller dans les bois au-delà de la
clairière du floumier. Quand ils sont au village,
Aliosha surveille discrètement les voyageurs,
s’assurant qu’ils n’aillent pas trop loin et ne
brutalisent personne.
De l’avis des villageois, tout cela est la faute de
Venceslas le chasseur. Tous ont des choses à lui
reprocher. Il détruisait les filets de pêche
durant ses chasses dans le marais. Plusieurs
fois, ses proies s’enfuyaient par les champs,
saccageant au passage les récoltes. Il posait des
pièges n’importe où, même sur le chemin des
bûcherons, qui ont failli plus d’une fois en venir
aux mains avec lui. Aliosha dit qu’il brutalisait
les gens, ne supportant pas qu’on s’oppose à
lui. Vasily lui reproche son orgueil et son
manque de respect. Babouchka s’en rappelle
comme d’un enfant turbulent et solitaire. De
l’avis général, c’était quelqu’un de détestable.
Le Fossoyeur n’a rien à dire sur le chasseur, les
vivants n’ont jamais eu d’intérêt pour lui. En
revanche, il ne croit pas en la théorie du Liéchi,
et c’est pourquoi il ne craint pas la créature.
Pourquoi ? Parce que Venceslas a été saigné à
blanc avant d’être entortillé dans ces racines.
Ses os et sa chair ne présentaient aucune lésion
notable, les racines n’ont donc rien à voir dans
la mort de Venceslas. En revanche, alors qu’il
préparait le corps, il découvrit une profonde
entaille dans sa gorge, et les vêtements
ensanglantés tendraient à démontrer qu’il a
été égorgé.
S’ils parviennent à rencontrer Nadejda la
rebouteuse, qui fera en sorte de les éviter mine
de rien, elle dit juste qu’elle est bien ennuyée
de ne pas pouvoir récolter ses plantes
médicinales dans la forêt. Le Liéchi la terrifie
mais elle ne l’admettra pas, surtout devant des
étrangers. Si on la questionne sur le chasseur,
elle se contentera de dire qu’il n’était pas
populaire mais que la mort d’un homme, quel
qu’il soit, est toujours un drame. Elle ne
s’épanche pas sur lui ou ses crimes.
La clairière du floumier est une petite clairière
non loin de la lisière de la forêt. Un floumier
solitaire s’y dresse, ce qui est assez incongru. En
observant la clairière, les voyageurs devraient
trouver assez facilement le lieu où le chasseur
aura été macabrement mis en scène. Les
villageois ont coupé les racines pour retirer le
corps, mais il reste des tronçons. En faisant le
tour, les voyageurs trouvent un totem, tant
qu’ils n’y touchent pas ou ne le détruisent pas,
ils pourront librement inspecter le lieu. Des
corneilles survolent la clairière régulièrement,
quelques-unes sont même venus se percher
dans le floumier et observent les voyageurs.
En observant plus attentivement, ils
découvrent une grande trace de sang et des
herbes coupées dans un coin de la clairière. Les
plantes sont des herbes médicinales. Elles sont
écrasées et éparpillées, semblant indiquer
qu’on s’est battus, et la trace de sang que
quelqu’un a été blessé et a perdu beaucoup de
sang.
Le pacte
Les voyageurs voudront peut-être contacter le
Liéchi. Il existe, selon Babouchka, trois
méthodes. La première, la plus efficace et la
plus dangereuse, est de détruire ses totems. Le
Liéchi finira par réagir violemment à
l’agression. La seconde est de demander une
audience en faisant des offrandes, le Liéchi est
friand de sel et de pain, en en déposant auprès
de ses totems, ou en en donnant à ses
corneilles : le Liéchi pourrait répondre et
convoquer les suppliants dans la forêt. La
dernière consiste à débusquer le repère du
Liéchi : en dormant dans son repère, on peut
rencontrer la créature en rêve.
Le repère du Liéchi se trouve au cœur de la
forêt, sous une vieille tour de pierres
moussues. Mais l’atteindre est une gageure.
Une nuée de corneille accueille les voyageurs
qui tenteront d’entrer dans la forêt. Puis, s’ils
persévèrent, une meute de loup vient les
intimider à force de grognements et
claquements de mâchoires. Les voyageurs qui
continueraient se feraient attaquer par une
multitude de loups. Mais, à force de
persévérance et de chance, les voyageurs
pourraient atteindre l’antre.
Pour s’éviter tous ces désagréments, les
voyageurs peuvent faire une offrande de sel et
de pain au Liéchi. Les pêcheurs récoltent du sel
dans les marais et les fermiers sont tout à fait
disposés à vendre du pain aux voyageurs. Une
fois l’offrande faite, un vol de corneille les guide
jusqu’à l’antre.
L’antre a l’air d’être un terrier sous la tour. Si les
voyageurs dorment à l’intérieur, ils rêveront du
Liechi.
Dans leur rêve, la clairière est nimbée d’une Cela ne mène à rien. Les voyageurs peuvent
lumière douce et tamisée. Est-ce le crépuscule questionner les villageois sur la journée
ou l’aube, le rêveur est incapable de le supposée de la mort de la victime. La plupart
déterminer. Des fleurs lumineuses étranges et des villageois n’a rien vu ni entendu de suspect.
inconnues parsèment la clairière. Au centre se Les bûcherons diront que la journée s’était
trouve un chêne immense. C’est entre ses plutôt bien passée mais dans l’après-midi, une
racines que s’éveille le rêveur. Le Liéchi meute de loups les a chassés du sous-bois.
l’observe depuis le sous-bois, le visage C’est ici qu’ils ont découvert le corps, dans la
faiblement éclairé par une lueur verte. D’une clairière du floumier.
voix semblant provenir du vent dans le
Aliosha dira qu’il faisait comme à son habitude
feuillage, il demandera ce que le rêveur fait en
sa ronde dans le village, rien de suspect. A part
son domaine. Selon la méthode employée, il le
peut être un vol de corneilles au-dessus du
remercie pour l’offrande ou lui reproche d’avoir
bois. Si les voyageurs le questionnent sur
fait couler le sang de ses soldats. Il n’est en
Nadejda, maintenant qu’il y repense, la
aucun cas agressif et se contentera de discuter
rebouteuse a brûlé des déchets dans son
pour le moment.
jardin, alors qu’elle préfère en faire du compost
Si on lui demande pourquoi il interdit la forêt habituellement. Et elle n’avait pas les mêmes
aux villageois, il répond que les assassins n’ont habits que le matin. Elle lui avait dit qu’elle
rien à faire dans sa forêt. Pour autoriser à s’était changée après être tombée dans un trou
nouveau les villageois à parcourir la forêt, il boueux en cherchant des plantes dans le
demande qu’on lui livre, ici même, le meurtrier marais. C’est étrange, elle avait clairement pris
qui a usurpé son nom. Car le Liéchi est innocent la direction de la forêt le matin même. Après
du crime dont on l’accuse. Il
précisera qu’il le veut vivant.
Une fois son offre acceptée, le rêveur
sera libéré, et les voyageurs pourront
retourner sans encombre au village.
Le Liéchi ignore le nom de l’assassin
et serait bien en peine d’en faire une
description, les humains se
ressemblant tant, mais il assure qu’il
le reconnaîtra s’il est amené à lui.

La Rebouteuse
Il faut maintenant trouver le
coupable. Les voyageurs ont peut-
être une idée, mais récapitulons les
indices qu’ils pourraient avoir
trouvés.
Dans la clairière du meurtre, une
grande tache de sang et des herbes
médicinales coupées ont été
trouvée. Le corps de Venceslas a été
saigné à blanc à la suite d’un
égorgement, et non brisé par les
racines, qui sont venues après la
mort du chasseur. Tout le monde
détestait le chasseur, mais personne
ne s’est vanté de sa mort.
avoir dit tout ça, le guerrier plonge dans des
abîmes de perplexité.
Les autres villageois n’ont que du bien à dire sur
Nadejda. Elle soigne les furoncles comme
personne, et ses mains sont une bénédiction
contre les courbatures. Elle leur concocte
potions et tisanes merveilleuses, bien plus
efficace que celles de son prédécesseur qui
avaient toujours un goût infâme. Ils savent
qu’elle est haute-rêvante, mais ferment les
yeux sur cela et ne l’évoqueront pas
ouvertement. On dit aussi qu’elle est une
petite-fille de la Bayaga et qu’elle serait bien
partie pour lui succéder. D’autre ragots traînent
sur elle, notamment qu’Aliosha aurait le béguin
pour elle (pure affabulation, le guerrier ne
s’intéresse pas à la gent féminine), et que
Venceslas avait également des vues sur elle.
Cette dernière rumeur possède un fond de
vérité et est la clef du problème. Le chasseur
avait en effet des vues sur elle, Nadejda ne le
craignait pas, elle le méprisait, et cela
l’insupportait au plus haut point, lui qui
terrorisait tous les villageois. Si on évoque une
potentielle liaison entre la rebouteuse et le
chasseur devant Aliosha, celui-ci devient plus
sombre. En le questionnant, il apprend aux
voyageurs qu’il avait surpris plus d’une fois le
chasseur tournant autour de la maison de la
femme dans l’optique d’y pénétrer. Le guerrier
l’avait alors menacé de lui couper la main s’il
s’avisait de toucher à la rebouteuse. Venceslas
s’était rebiffé et cela aurait pu tourner au
drame si la rebouteuse n'était pas intervenue.
Elle remercia cependant Aliosha de son
intervention. Depuis, le guerrier n’était plus
intervenu, mais il avait vu le regard du chasseur,
convoitant Nadejda, mais à distance sans
tenter d’approche ; pas en présence d’Aliosha
en tout cas.
La rebouteuse évite toujours les voyageurs, et
elle est très forte à ce jeu-là. Elle n’accepte de
leur parler que si Aliosha le lui demande ou
qu’ils la coincent. Si les voyageurs interprètent
correctement les indices et les présentent à la
rebouteuse, elle finit par avouer. C’est elle qui
a tué Venceslas.
Cela eut lieu le matin, alors qu’elle récoltait du
faux-murus dans la clairière du floumier. Le
chasseur était arrivé par derrière, elle n’avait vu
son ombre qu’au dernier moment. Il avait tenté
de la maîtriser et de la dominer, la traitant de
tous les noms, lui décrivant tout ce qu’il
comptait lui faire et que personne n’en saura
jamais rien si elle tenait à sa vie. Elle y tenait,
c’est pourquoi elle se débattit, de toutes ses
forces. La lutte était inégale, mais un coup du
sort fit qu’elle planta sa serpe dans la gorge de
la brute. Elle s’écarta de l’homme agonisant, le
regardant se vider de son sang sur sa récolte.
Tétanisée, elle n’avait pas tenté de le sauver.
Quand il rendit son dernier souffle sanglant,
elle se demanda ce qu’elle allait faire. Un
meurtre reste un meurtre, et elle serait bannie
du village comme le décrète la tradition. Un
vieux conte lui revint en tête et elle décida que
c’était la meilleure chose à faire. Elle ferait
passer la mort du chasseur pour une attaque
du Liéchi. Grâce à un sort de croissance
végétale, elle simula une attaque sur le corps
sans vie du chasseur. Elle rentra discrètement
au village avec son panier détruit par la lutte et
ses vêtements tâchés de sang, qu’elle brûla
pour effacer toutes traces du combat.
Nadejda ignorait tout du véritable Liéchi. A y
réfléchir, elle aurait plutôt dû demander de
l’aide, ou courir le risque d’être bannie, plutôt
que de provoquer le seigneur des bois. Elle s’en
veut beaucoup, aussi bien d’avoir appelé sur le
village la malédiction du Liéchi que d’avoir
laissé mourir Venceslas, quoi qu’il ait commis
contre elle, sans avoir tenter de le sauver. Elle
demande alors aux voyageurs ce qu’ils
comptent faire. Si Aliosha est présent, il est
bouleversé et leur demande de se montrer
clément avec elle.
Un choix
A partir de maintenant, c’est aux voyageurs
d’aviser. S’ils ont rencontré le Liéchi, ils peuvent
tout à fait lui livrer la rebouteuse, ou bien livrer
la jeune femme à la justice du village incarné
par l’Ancien, sinon, ils peuvent s’en laver les
mains et trouver un autre moyen de se
débarrasser du Liéchi.
Les voyageurs peuvent décider d’affronter le
Liéchi pour le chasser de la forêt. Pour cela, il
faut l’amener à combattre. Le meilleur moyen
est de détruire l’un de ses emblèmes. Le
seigneur des bois envoie alors quelques-uns de
ses loups attaquer les voyageurs. Puis, si cela ne
suffit pas, le Liéchi apparaît lui-même avec le
reste de la meute.
L’homme vert est aussi redoutable au corps à
corps qu’à distance. Ses bras se terminent par
des griffes acérées, il est plus grand et fort que
tous les hommes et son corps est aussi solide
que le chêne. Si les voyageurs pensent s’en
sortir en le canardant à bonne distance, c’est
une erreur. Le Liéchi se bat également en
faisant pousser des racines sur ses adversaires,
qui entravent et brisent les os. Enfin ses
corneilles surveillent ses arrières et il ne peut
donc jamais entre pris par surprise.
Les voyageurs peuvent trouver des alliés. Les
jeunes bûcherons sont volontaires pour
combattre la bête, mieux, ils n’attendent que
ça. S’il sait que le Liéchi veut qu’on lui livre un
villageois, Aliosha se présente, en armure,
bouclier et épée en main.
Le combat est rude et probablement mortel
mais une fois vaincu, le Liéchi ne laisse derrière
lui qu’un corps de bois vide, les corneilles se
dispersent et les loups quittent la forêt. Privée
de son Liéchi, la forêt dépérira peu à peu dans
les années qui suivront, mais cela ne concerne
pas les voyageurs.
Si les voyageurs décident de livrer Nadejda au
Liéchi comme convenu avec lui, elle les suit
sans faire d’histoire. Aliosha veut venir, mais
elle lui demande de rester. Le bogatyr se
tournera alors vers les voyageurs, proposant
ses services. Ils peuvent refuser ou accepter, la
rebouteuse ne commente pas le choix des
voyageurs.
En pénétrant dans la forêt, la meute de loups
tourne autour des voyageurs et se contente de
les escorter à distance. Une fois arrivés à la
tour, le Liéchi les attend, assis au-dessus de son
antre. Il invite la rebouteuse à rentrer, et
seulement elle, demandant aux voyageurs
d’attendre ici. Ils disparaissent dans l’antre,
laissant les voyageurs en compagnie des loups
et des corneilles.
Puis, une ou deux heures plus tard. La
rebouteuse ressort, seule et visiblement
secouée. Elle est cependant intacte. Elle ne dit
rien de ce qu’elle a vu ou entendu dans l’antre,
et se borne de répondre qu’elle a passé un
pacte et que le problème est réglé. Elle défait
les totems que le groupe croise, ils ne sont plus
nécessaires.
Les voyageurs peuvent maintenant retourner
voir la Bayaga. Cette dernière ne commente pas
la manière dont ils ont réglé le problème.
Cependant elle désapprouve la violence et aura
le regard dur s’ils ont tué le Liéchi. Si la solution
diplomatique a été préférée, elle semble
satisfaite. Dans tous les cas, elle prête le tapis
aux voyageurs et leur souhaite bon courage
pour la suite. Elle signale qu’elle enverra
quelqu’un le récupérer une fois leur quête
achevée.
Si on lui pose la question, elle a une petite idée
de la nature du pacte qui lie la rebouteuse avec
le Liéchi et que ça ne lui fera pas de mal. Mais
elle rouspétera en disant que ce ne sont pas les
oignons des voyageurs.
Et si…
Les voyageurs sont des brutes.
Les voyageurs peuvent tout à fait décider
d’user de violence et de s’emparer du tapis par
la force. La sorcière est une adversaire robuste,
usant de sorts de Thanatos avec violence et
prodigalité. Elle chevauche à la bataille son
énorme cornicochon. Ses filles interviennent,
sous les apparences d’Aube le chevalier d’or,
Zénith le chevalier rouge et Crépuscule le
chevalier noir, des chevaliers en armure
montés sur de formidables destriers, maniant
la lance et l’épée.
Dans le cas très improbable où ils remportent
le combat, la maison se lève subitement, sur
ses pattes de poulet, et s’enfuit à travers les
bois. La rattraper et l’immobiliser sera
compliqué, pénétrer à l’intérieur bien plus
simple, car sa porte en bois ne résistera pas à
quelques coups de hache. A l’intérieur, ils
trouvent le Tapis, tout poussiéreux et ayant
besoin d’une bonne lessive. Les autres trésors
de la Bayaga ne sont plus, quelques armes
rouillées, des tissus mités et des bouts de bois
sur le point de tomber en poussière.
Les voyageurs ont déjà la Lampe et l’épée. qu’eux pourraient régler. Voyez-vous, un crime
a eu lieu… Qu’ils se chargent de tirer cette
Bayaga est impressionnée et convaincue de la
histoire au claire et qu’ils règlent le problème le
bonne foi des voyageurs, elle accepte de leur
temps qu’elle retrouve le tapis dans son
prêter le tapis de bon cœur… cependant, elle a
capharnaüm.
un problème, que d’aussi braves voyageurs
 L’île du roi squelette
Les voyageurs ont maintenant l’épée, le tapis et
la lampe, c’est le moment de se rendre à
Bouïane. Où se trouve l’île ? Le Tapis le sait.
En route pour Bouïane
L’île fantôme navigue à travers le rêve,
émergeant pour moissonner de nouvelles vies
pour son insatiable maître. Le tapis est capable
de s’y rendre, et l’épée aussi bien que la Lampe
peuvent protéger les voyageurs quand ils
passeront par les limbes.
Mais cela ne règle pas notre problème, où se
trouve Bouïane ? Tchekov dit l’avoir aperçue
dans la mer des tempêtes. Si on demande son
avis à la Bayaga, elle répondra avec assurance
qu’elle se trouve quelque part au large des cités
caspiées. Selon le bibliothécaire du Palais des
Étoiles, le Phénix se trouve au sommet d’un
arbre au cœur d’une cité au centre d’une île au
milieu d’un lac perdu dans les Kharapates. Dans
les ouvrages d’Holga, qui s’intéresse aussi à la
question, il est dit que la question n’est pas tant
où mais quand, et que l’île passerait le plus clair
de son temps dans un cocon de rêve au cœur
des limbes, cela ne nous avance pas. D’autres
personnages ont d’autres théories.
En réalité, toutes ces réponses sont bonnes et
c’est au gardien des rêves de décider de la
localisation exacte de l’île. Ou bien de laisser les
voyageurs échafauder leur propre théorie, les
laisser l’exposer, et répondre d’un air mi-
sérieux mi-amusé « oui, c’est ça. ». Tout cela n’a
pas d’importance, car le tapis les y mènera de
la même manière, en déchirant le rêve pour
rejoindre sa destination à travers les limbes,
c’est encore la méthode la plus rapide.
Le roi et l’oiseau
Dans les légendes et les mythes du second âge,
Bouïane avait la réputation d’être une ville
prospère, siège d’une culture raffinée et à la
pointe des arts et de la beauté. Cette
réputation n’était pas usurpée. Elle avait été
construite sur l’île que l’Oiseau de Feu avait
choisi pour y établir son nid, perché entre les
branches d’un arbre aux feuilles d’or et aux
fruits d’argent, l’Arbre de Vie. Dès que l’Oiseau
de Feu venait se ressourcer chez lui, les
citoyens de Bouïane venaient en nombre
recueillir ses perles de sagesse. Ce que pensait
l’oiseau d’une telle coutume, on l’ignore,
personne n’a songé à le lui demander. L’oiseau
aurait peut-être aimé plus de tranquillité, car il
passait beaucoup de temps loin de l’île et ne
répondait que rarement aux sollicitations.
Comme les astres, chaque chose a son zénith et
son nadir. Le nadir de Bouïane vint le jour de
l’avènement de l’Osseux. Par on ne sait quelles
machinations, il parvint à prendre le pouvoir, et
ce qui était une ville de joie et de lumière devint
une cité d’effroi et de ténèbres. Il tenta de
s’emparer du pouvoir de l’oiseau. Il ne réussit
qu’à le blesser et ce dernier se réfugia auprès
d’Yvan pour se soigner.
Puis l’Oiseau de Feu chercha un moyen de se
débarrasser d’un si gênant voisin. Il n’était pas
assez puissant pour le chasser, pas encore.
Pendant longtemps il accumula savoir et
puissance, et quand il crut le moment venu, il
s’abattit sur la ville. La puissante magie de
l’Osseux faisait presque jeu égal avec celle de
l’oiseau, mais ce dernier eu le dessus. L’Osseux
aurait pu disparaître à jamais si les dragons ne
s’étaient pas éveillés et avaient mis fin au
second âge, déstabilisant la créature de rêve et
permettant à l’Osseux de reprendre l’avantage.
L’Osseux emprisonna l’Oiseau de Feu et utilisa
sa puissance pour stabiliser son royaume et le
faire survivre au cataclysme, en l’arrachant au
rêve. Ainsi disparut Bouïane l’île bénie, ainsi
naquit Bouïane l’île fantôme.
Aujourd’hui, Bouïane n’est plus que l’ombre de
ce qu’elle a pu être. Le roi de Bouïane
sommeille dans son palais parmi ses trésors
maudits. Le ciel est d’un gris verdâtre, les
fontaines sont silencieuses, les rues se sont
assombries, les parcs sont vides. La vie semble
avoir déserté ces ruines. Jamais le vent ne vient
soulever la poussière. Jamais le soleil ne vient
illuminer la façade morne des bâtiments. Les
derniers habitants de Bouïane sont morts il y a
bien longtemps, et leurs corps décharnés
servent les desseins de l’Osseux. Tout est gris,
sombre comme dans un crépuscule d’hiver
permanent. La seule lueur qui survit dans ces
ruines est un Arbre de Vie moribond avec,
entre ses racines, un Oiseau de Feu mourant.
Arrivée sur Bouïane
Le tapis se déplace à travers les limbes. Il forme,
avec les efforts conjugués de la Lampe et de
l’Épée, une barrière protectrice entre les
voyageurs et le néant. Depuis leur petite bulle
onirique, les voyageurs peuvent admirer
l’éternelle obscurité qui sépare les rêves, qui de
leur point de vue ressemble à un ciel nocturne
parsemé de gemmes multicolores, scintillantes
sur la toile du multirêve. Puis ils l’aperçoivent,
l’île de Bouïane, encerclée de brumes
verdâtres, tranchant radicalement avec la
sérénité des limbes. Telle est leur destination,
un petit coin de cauchemar au cœur des rêves.
Le tapis dépose les voyageurs, ou plus
précisément se plaque violemment au sol, sur
une petite place autrefois accueillante. Il refuse
de bouger à nouveau, voire de se laisser
enrouler et il faut se résigner et le laisser là. La
place est circulaire, sous des arbres morts
depuis longtemps. Des bancs de pierres
attendent de nouveaux occupants depuis des
temps immémoriaux et au centre de la place la
fontaine aux moineaux ne chante plus.
En voilà un bien sinistre endroit. Maintenant il
faut trouver l’oiseau. En observant le ciel, s’ils
en ont le cran car il forme comme un couvercle
oppressant tant il a l’air bas, les voyageurs
peuvent noter deux choses : une grande ombre
noire s’élève à l’Est, du moins ce qu’ils
présument être l’Est, car aucun point de repère
ne peut les guider, et à l’Ouest, l’obscurité est
transpercée par quelques lueurs dorées qui se
reflètent sur la voûte céleste. Le voyageur qui
porte l’épée peut la sentir vibrer. S’il la sort de
son fourreau, la pointe se lève en
direction des lueurs dorées. Ils ont
maintenant une direction.
Les architectes de Bouïane
voulaient en faire une ville
aussi agréable à parcourir à
pied qu’à cheval, les rues
sont donc larges et
spacieuses. Les voyageurs n’ont
aucun mal à rejoindre le parc de
l’Arbre de Vie. Et ils feraient mieux de
se dépêcher. Dans toutes les maisons,
les spectres des anciens occupants épient
les voyageurs, et malheur à celui qui voudrait
pénétrer dans leur maison. Ces désespoirs ne
rêvent que de s’incarner à nouveau. Un
voyageur vigilant peut entrapercevoir du coin
de l’œil une ombre dans l’encadrure d’une
porte ou d’une fenêtre.
L’atterrissage n’est pas passé inaperçu. Le roi de
Bouïane a laissé des yeux partout, des
squelettes animés parcourent en permanence
les rues de la ville, et ils ne sont pas aussi
inoffensifs que ceux de Leurdeuté. Les
voyageurs ne devraient pas en rencontrer pour
le moment, mais à la première rencontre,
passée la déplaisante vision d’un squelette
mouvant, ils se rendront compte que la Lampe
leur permet de les toucher sans avoir à
s’accorder sur le courant onirique des
squelettes et de toutes créatures du
cauchemar croisant leur route.
Ils devraient atteindre le parc sans trop de
soucis. A l’intérieur, tout est mort, les arbres ne
sont plus que des vestiges, les herbes se sont
fanées sur pied, et avec aucun insecte ou
moisissure pour s’en régaler, tout est resté en
plan. Les ruines sinistres des belvédères
s’élèvent solitaires. L’Arbre de Vie remonte le
moral des voyageurs, enfin de la couleur. Mais
il ne ressemble pas à un arbre en pleine santé.
Ses branches sont rachitiques et tordues, les
rares feuilles qu’il lui reste pendent
misérablement et son tronc est crevassé,
comme rongé par quelques parasites. Entre ses
racines, une misérable créature, ressemblant à
un poulet qu’on aurait plumé et oublié dans un
cellier, lève des yeux semblables à deux puits
asséchés vers les voyageurs. L’Oiseau de Feu
fait peine à voir.
Une faible voix fantomatique résonne dans la
tête de tous les voyageurs présents : « Yvan !
Enfin, je t’ai tant attendu, tant appelé, j’avais
perdu espoir. J’ai été présomptueux. Je pensais
pouvoir le vaincre, mais je n’ai pas pu. »
Le palais de l’Osseux
Les voyageurs audacieux ou tout simplement
stupides pourraient décider de se rendre au
palais de l’Osseux. Aux alentours du palais de
l’Osseux, des squelettes, armés de vieilles
armes rouillées, font des rondes. Il sera difficile
de rentrer à l’intérieur. L’Osseux lui-même dort
sur son trône au cœur du palais, entouré de ses
trésors. Véritable créature de cauchemar, il n’a
plus rien d’humain, et l’affronter ici est très
risqué car nous sommes au cœur de son
pouvoir ; il est infiniment plus puissant auprès
de ses trésors que nulle part ailleurs. De plus, il
est devenu immortel, et même vaincu il
reviendra peu après d’entre les morts.
Dans la salle du trône s’empilent des coffres
anciens remplis de vaisselles d’argent
piquetées par l’âge. Sous la poussière, des
coupes d’or ornées de pierre précieuses
attendent d’être ramassées. De
somptueux tapis ternis par le temps
côtoient des artefacts plus vieux que le
Rêve. C’est un trésor aussi vaste que
pléthorique. Et tous ces objets, de la plus
petite pièce d’étain à la plus grosse pièce
d’armure de plate antique, sont maudits
par l’Osseux. Quiconque s’en empare se
retrouve automatiquement lié au
thanatosien qui peut dès lors l’envoûter
et peu à peu en faire son esclave. Pour
s’en débarrasser, un jet de VOLONTÉ à -4
sera demandé.
La clé n’est autre que l’épée, mais encore faut-
il que les voyageurs le comprennent. Pour
utiliser l’épée comme une clé, il faut tourner
l’épée d’un quart de cercle, ou plus, comme
une clé dans une serrure. En attendant, les
voyageurs voudront sûrement retourner au
tapis. Le chemin sera plus périlleux qu’à l’aller,
car les patrouilles de squelettes semblent
converger vers eux.
Arrivé au tapis, une douzaine de squelettes les
accueille et, au bout de dix rounds, c’est
l’Osseux qui apparaîtra et se joindra à la
bataille. Le vaincre, même avec l’aide de l’épée
et de la Lampe, est très compliqué. Son escorte
est composée de soldats squelettes
spécialement équipés, et il lance sorts de
Thanatos et malédictions pour briser voire tuer
les voyageurs ; après tout, il n’a pas besoin
d’eux vivants.
Quand le porteur de l’épée comprendra son
fonctionnement, les voyageurs, la Lampe et
tout squelettes à proximité se retrouveront
ailleurs.

Sauve qui peut

Si on lui présente la Lampe, l’Oiseau
tendra le cou vers elle ; les voyageurs
doivent le mettre dedans. La Lampe
réagit et se referme hermétiquement,
cessant d’éclairer quoique ce soit. A
l’intérieur, ce n’est qu’obscurité, hormis
un point rougeâtre, une braise que les
voyageurs voient grossir, sa lumière de
plus en plus forte. Puis une voix tonne
dans leur esprit : « Merci voyageurs, il
faut quitter l’île au plus vite car Il sait que
vous êtes là maintenant. Utilisez la clé. »
Puis c’est le silence.
 Conclusion
Le festival
Ailleurs, c’est à quelques kilomètres au-dessus
des rus. Les voyageurs ont l’occasion d’admirer
de tout leur saoul la chaîne des Kharapates, le
plateau du Haut Cours du Don, les grandes
plaines de la mer d’Herb, le scintillement de la
Mer Caspiée, les brumes de la Mer des
Tempêtes ainsi que les méandres innombrables
du Don-des-dragons, semblables à autant
d’anneaux bleus d’un immense serpent. Si
quelques squelettes, voire l’Osseux lui-même,
ont été emportés par la déchirure provoquée
par l’épée, ils se disloquent et une ombre
s’évapore en direction de l’Ouest.
Laissez les voyageurs profiter pleinement de la
vue avant de faire intervenir le Tapis. Provenant
de nulle part, il rattrape en douceur les
voyageurs puis plonge vers le Pays des rus. Le
tapis dépose les voyageurs à Champs de Miel,
près du ruisseau, au pied de la colline. Une
surprise de taille les attend. En effet, le vieux
Tchekov, ne doutant pas de la réussite de la
quête, a organisé des festivités, et des doniens
de tous les villages alentours sont arrivés sur
place.
Alcool, banquet, ménestrels, tout est présent
pour organiser une fête sans nulle pareille. Le
vieux rucher, malgré tout son travail sur le dos,
vient accueillir les voyageurs dès qu’ils auront
été signalés. Il est drôlement habillé, d’une
robe de cérémonie richement décorée, d’un
chapeau élégant et de bottes somptueuses. Le
tout lui va très mal, comme si ces vêtements
étaient trop grands pour lui. Il ressemble à une
parodie de l’Yvan vu en rêve, il y a de ça des
jours.
Tchekov s’empresse de saluer l’Oiseau de Feu,
et demande aux voyageurs de le lui confier.
Ainsi que l’épée et le tapis. Il va mettre tout en
place pour réaliser leur rêve commun. Il
passera tout le reste de la journée en haut de
la colline, à regarder l’horizon et à parler à la
Lampe.
Les voyageurs ont tout le temps de se restaurer
et se reposer un brin avant le coucher du soleil.
À ce moment-là, tout le monde se réunit autour
de la colline, ou à mi-pente. Tchekov se lève
alors et conte la légende de l’Oiseau de Feu à la
foule. Brandissant avec assurance l’épée, il
ouvre la Lampe qui émet une vive lueur, un
brasier étincelant. Tchekov plonge la lame dans
le brasier ardent. Des étincelles pleuvent tout
autour de lui. Puis, tenant toujours l’épée, il
lève la lampe vers l’Ouest. Une gerbe de
flammes s’en élève et prend la forme d’un
immense oiseau de feu. Émerge alors des
flammes l’Oiseau lui-même, régénéré et en
pleine possession de ses moyens, qui fait trois
fois le tour de la colline en chantant sa joie
d’être vivant, pour finalement s’envoler vers
l’Ouest, sans un regard en arrière.
Bien après que l’oiseau eut disparu dans le
soleil couchant, alors que la fraîcheur de la nuit
commence à s’installer, Tchekov redescend la
colline. Il tend l’épée aux voyageurs. « Je crains
qu’elle ait perdu ce qui lui restait de pouvoir. »
En effet, pour se régénérer complètement,
l’oiseau avait eu besoin de sa dernière plume.
L’épée, quoique d’apparence intacte, n’est plus
qu’un bel objet sans grande valeur. La Lampe
reste quant à elle le bel objet qu’elle a toujours
été, voire plus,car le séjour de l’oiseau, quoique
bref, lui a rendu tout son éclat. Le tapis reste
fidèle à lui-même.
Tchekov semble profondément fatigué. Il
souhaite une bonne nuit aux voyageurs et se
réfugie chez lui, laissant les voyageurs profiter
du festival. Un feu de joie a été allumé, la
boisson coule à flot et les mets sont tous plus
délicieux les uns que les autres. Danses et
réjouissances sont prévues jusqu’à la fin de de
la nuit, aux voyageurs d’en profiter, ou pas.
Dans tous les cas, ils tombent de sommeil à un
moment ou un autre. Le rêve d’archétype se
déclenchera. Il reprend là où il s’était arrêté, il
y a longtemps déjà.
Sur la colline, Yvan, sur qui se fond alors le
visage de Tchekov, faisant face à la lampe,
plonge son épée dans les flammes. Une
déflagration intense à lieu, mais le haut-rêvant
reste ferme, enfonçant sa lame au plus profond
de la lampe, jusqu’à la garde, puis son poignet,
son avant-bras, son coude et jusqu’à l’épaule
entrent dans la lampe, qui crache ses flammes
sans discontinuer. Une expression de peur et de
soulagement mêlée passe sur son visage, et
Yvan-Tchekov retire vivement son arme de la
Lampe, tombe presque à la renverse, et de
celle-ci sort peu à peu un immense oiseau aux
plumes ardentes alors que des cris de
stupéfaction montent de la foule.
L’oiseau semble encore plus réel, plus concret
et bien plus grand que celui que les voyageurs
ont vu durant le jour. Chantant son triomphe, il
s’extirpe de sa coquille, étend largement ses
ailes au-dessus du magicien, puis se met à
battre lentement des ailes. Un vent chaud vient
balayer le visage des rêveurs, chaud comme un
vent du désert. La créature s’élève dans les
cieux en tourbillonnant, portée par son propre
vent ascendant, avant de planer vers l’Ouest, se
confondant avec la lueur du soleil. Yvan-
Tchekov se tourne alors vers les rêveurs, le
visage souriant inondé de larme, et leur dit : «
C’est fait. »
Réveil au Pays des Rus.
En se réveillant, les voyageurs savent qu’ils ont
accompli un voyage digne des chansons, et que
leurs actes ont eu la faveur des dragons. Les
voyageurs gagnent donc 150 points
d’expériences à répartir avec une Tête de
Dragon en prime pour tout le monde.
force, dans ce cas-là, Zénith leur conseille de
quitter le pays au plus vite, car la Bayaga a
survécu et n’a pas de patience pour les brutes.
Plus tard, Topov, ayant visiblement bien
participé à la fête, vient avec une délégation de
bogatyrs. Il propose aux voyageurs de les
escorter jusqu’à Gift, pour rendre la Lampe à la
Starine en personne. Si les voyageurs ne
veulent pas refaire le voyage, l’Espion a toute
autorité pour s’occuper de la Lampe et donner
aux voyageurs la récompense convenue avec
Vasistas. Si l’Espion n’a pas été libéré par les
voyageurs, c’est un Bogatyr du nom de Sergueï
qui a été envoyé par le ministre.
Dans l’après-midi, c’est le beau-fils de Tchekov,
Kolgierd, également fils de Kolga, qui vient
proposer aux voyageurs de l’accompagner
jusqu’au pays des ruses pour rendre l’épée aux
guerrières. Il compte rendre visite à sa mère,
pour lui présenter sa femme et ses enfants. Les
voyageurs peuvent se contenter de lui confier
l’épée, qu’il se fera un devoir de rendre à la
Volga. S’ils refusent de la rendre, la Volga
mettra leur tête à prix. S’ils restent dans les
environs, c’est à leur risques et périls.

Une ribambelle de personnages viendra voir les Dans tous les cas, les voyageurs sont libres de
voyageurs, et le premier n’est personne d’autre faire ce que bon leur semble.
que Tchekov, les larmes aux yeux, remerciant
chaleureusement les voyageurs, pleurant dans
leurs bras et les serrant les uns après les autres
en se confondant en remerciements. Il donne
aux voyageurs tout ce qu’ils demandent, même
la recette de son hydromel, et donne de bon
cœur toutes les réponses aux questions
éventuelles des voyageurs. Oui, Yvan n’était
personne d’autre qu’une incarnation
précédente de Tchekov. Le vieux rucher semble
plus grand, plus vif et infiniment plus sage que
le soir précédent. Il porte encore les vêtements
de cérémonie, et ils semblent bien mieux lui
aller.
Ensuite, assez tôt, une cavalière en armure
rouge vient les voir. Les voyageurs
reconnaissent Ilona, mais elle se présentera
sous le nom de Zénith. Elle transmettra les
félicitations de sa mère aux voyageurs et leur
demandera de rendre le tapis à la Bayaga. Une
fois le tapis rendu, elle leur assure que l’amitié
de sa mère leur est acquise et qu’ils seront les
bienvenus chez elle si le cœur leur en dit. Si les
voyageurs se sont emparés du tapis par la