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Le transparent et l’opaque
par Patrick CALLET
Enseignant-chercheur
Laboratoire de mathématiques appliquées aux systèmes
École centrale des arts et manufactures (Paris)
Secrétaire général du Centre français de la couleur
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La seule façon de comparer des calculs issus de modélisations Exemple : examinons ce que représente ce tristimulus. Imaginons
scientifiques fait donc intervenir les illuminants normalisés. Leur qu’une automobile de couleur rouge (c’est ce que nous nommerons sa
emploi doit toujours être signalé et leur nature exacte précisée [17]. teinte telle qu’elle nous apparaîtrait en lumière du jour) circule dans un
tunnel routier éclairé par des lampes à vapeur de sodium dont le
spectre d’émission peut se réduire approximativement à une seule raie
Comme il a été signalé plus haut, le nombre des systèmes de pour la longueur d’onde λ = 589,3 nm. Si nous nous trouvons dans un
représentation des couleurs est considérable et nous limiterons véhicule voisin et regardons une feuille de papier (blanche en lumière
ici nos descriptions à ceux les plus communément utilisés dans du jour), nous voyons néanmoins une feuille de papier blanche car la
de nombreuses industries. Ainsi les espaces colorimétriques les nature de la chose observée, qui nous est connue et familière, ainsi
plus pratiqués actuellement sont connus sous les noms de que le phénomène de la constance des couleurs nous incitent à dire
CIELab ou CIELuv. que cette feuille est blanche. Un instrument de mesurage tel qu’un
spectrophotomètre enregistrerait à peu de choses près le spectre
d’émission de la source, c’est-à-dire après calcul des coordonnées
1.2 Côté lumière, côté matière trichromatiques, une couleur située dans le « jaune-orangé ». Quant à
« l’automobile rouge », on dira sans aucune hésitation qu’il s’agit d’une
■ Couleur de source automobile grise.
Les coordonnées trichromatiques pour les sources primaires de Cette expérience de la vie courante peut avoir des implications
lumière sont données par : dramatiques en ce qui concerne le témoignage oculaire de personnes
780 (de bonne foi). Chaque fois que l’on omet de préciser les conditions
X = Km S (λ) x (λ) dλ d’éclairage pour la visualisation d’un objet, on commet une faute qui
380 peut se révéler avoir de graves conséquences.
780
Y = Km S (λ) y (λ) dλ (2)
380
780
2.2 Métamérie
Z = Km S (λ) z (λ) dλ
380
avec S (λ) spectre d’émission de l’illuminant de référence D’après ce qui précède, il est aisément concevable que les
employé, intégrales (3) puissent prendre les mêmes valeurs pour des
x, y, z fonctions colorimétriques décrivant la sensibilité fonctions R ( λ ), S (λ ) ou x , y , z différentes. Ainsi, chaque fois
spectrale de l’observateur colorimétrique standard. que deux facteurs spectraux de réflexion (ou de transmission),
deux illuminants ou deux observateurs produiront le même triplet
Km = 683 lm · W –1 est obtenu par normalisation de la compo- (X, Y, Z ), on pourra parler de métamérie. La CIE a fixé les
sante Y de manière que, à la longueur d’onde λ = 560 nm, on conditions d’observation permettant la comparaison visuelle de
obtienne Y = 100. deux plages colorées. C’est d’ailleurs la même idée que celle de
■ Couleur de surface l’égalisation colorimétrique qui donna naissance à la définition de
l’observateur colorimétrique standard.
Bien que la science colorimétrique se soit fondée sur le mesu-
rage et la représentation des couleurs des sources de lumière, elle
s’est considérablement développée pour les couleurs de surface. Exemples : choisir un vêtement exposé dans un magasin éclairé
Même si les attributs perceptifs sont différents dans les deux cas, en lumière artificielle peut causer des déceptions lorsqu’on le regarde
l’adéquation entre source primaire de lumière et source secondaire en lumière naturelle. Le prothésiste dentaire qui doit formuler la
est demeurée, jusqu’à nos jours, dans le même cadre de représen- matière même d’une dent artificielle ne travaille pas dans les mêmes
tation. En fait, aujourd’hui la colorimétrie des surfaces est plus conditions d’environnement lumineux que le chirurgien dentiste qui en
développée que celle des sources de lumière. donne la prescription. De plus, le prothésiste n’a que peu d’informa-
tions sur les dents voisines de la dent « à formuler ». Dans le monde
animal, c’est le camouflage et le mimétisme qui illustrent bien les
notions de métamérie. Toutes ces notions très anthropogéniques, véri-
tablement calquées sur un modèle de la vision humaine, ont été élabo-
2. Calcul du tristimulus rées en dehors de la notion de polarisation de la lumière. Les relations
(X, Y, Z ) complexes entre prédateur et proie ou entre partenaires sexuels
exploitent de tels effets de polarisation en réflexion ou en transmission
de la lumière.
Cette notion de tristimulus, qui a été longue à acquérir, sinon à
admettre, joue un rôle primordial dès que l’on veut quantifier les
attributs perceptifs des sources de lumière ou des surfaces. Examinons plus formellement comment la notion de métamérie
s’exprime.
780 alors de métamérie de sources.
X = Km S (λ) R (λ) x (λ) dλ
380
780 ■ Métamérie de surfaces
Y = Km S (λ) R (λ) y (λ) dλ (3)
380 Lorsque deux facteurs spectraux de réflexion R 1 ( λ ) et R 2 ( λ ) dif-
férents produisent, pour un observateur et un illuminant donnés, la
780
Z = Km S (λ) R (λ) z (λ) dλ même apparence colorée pour deux échantillons matériels (pein-
380 ture ou matière plastique par exemple), on dit qu’il y a métamérie
avec R (λ ) facteur spectral de réflexion. de surfaces. C’est le cas de métamérie le plus fréquent.
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■ Métamérie d’observateurs
Ce troisième cas de métamérie survient lorsque l’observateur y
n’est pas en mesure de discerner des apparences chromatiques 0,9
pour des raisons d’anomalies du système visuel (dyschromatop- 520
sies, par exemple). Les facteurs néanmoins les plus courants et
susceptibles d’altérer la vision des couleurs chez les sujets nor- 0,8
maux sont : 540
— des variétés de pigments visuels ayant un pic d’absorption en
décalage par rapport à la moyenne des sujets « normaux » ; 0,7
— la variation de la densité optique du cristallin avec l’âge et 560
une absorption des plus courtes longueurs d’onde ;
— la présence d’un pigment rétinien inerte, dit pigment macu- 0,6
500
laire [25], se concentrant dans le voisinage de la fovéa, placé devant
les cellules photoréceptrices et ayant une absorption spécifique
0,5
marquée pour λ 500 nm ; 580
— la forme même des cellules en cône, plus longues dans la
600
région fovéale que dans les zones plus éloignées, différencierait le 0,4
cheminement de la lumière, causant ainsi une sorte d’aberration
chromatique.
Ces variations inter-individuelles expliquent la petite dispersion 0,3 780
des résultats d’égalisation colorimétrique [27] ayant conduit à la
définition d’un observateur de référence colorimétrique. La méta-
mérie d’observateurs s’exprime alors sur les intégrales (3) prenant 0,2 480
la même valeur pour deux observateurs différents, c’est-à-dire
ayant des fonctions colorimétriques distinctes x ( λ ), y ( λ )
ou z ( λ ) . 0,1
λ (nm)
380
0
0 0,1 0,2 0,3 0,4 0,5 0,6 0,7 0,8
2.3 Espaces réels et espaces virtuels
x
em
2 000
600
1 500
t
l’appelle le spectrum locus (figure 1). Il a été établi que toute 6 500
ne
0,3 620
couleur ainsi perceptible est nécessairement « à l’intérieur » de la
Lig
10 000 770
courbe limite que constitue le spectrum locus. Les points extrêmes
de cette courbe sont joints par un segment de droite appelé « ligne
0,2 Infini
des pourpres » (figure 1b). On remarque la zone blanche dans le es
rpr
tiers inférieur du diagramme (figure 1a ) qui comprend le point 480 p ou
d es
« achromat ». La courbe qui s’étend du rouge au blanc dans la 0,1 ne
direction du bleu formant un arc convexe représente le lieu des Lig
« températures de couleur » (figure 1b). Cette notion est issue du 475
calcul de la température correspondant au maximum d’émission 450
0
du corps noir théorique (éq. (1)) défini par la loi de Planck [7] [20]. 0 0,1 0,2 0,3 0,4 0,5 0,6 0,7 0,8
Les coordonnées trichromatiques (x, y, z) se déduisent du tristi- x
A : illuminant CIE A (lampe à filament de tungstène)
mulus X, Y, Z par une normalisation commode :
D : illuminant CIE D65
X Y b
x = ------------------------------- y = ------------------------------- x+ y+ z = 1
X+ Y+ Z X+ Y+ Z
De la sorte, deux nombres, généralement le couple (x, y ), sont
alors utiles pour désigner une couleur. Représenté dans un plan, Figure 1 – Spectrum locus
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l’ensemble des couples (x, y ) définit le diagramme de chromaticité seconde. La visualisation sur écran d’ordinateur et la simulation en
tandis que l’ensemble des triplets ( x, y, z ) définit le solide des trois dimensions nous ont habitué à voir les produits en cours de
couleurs visibles et/ou réalisables. conception avec des attributs visuels « réalistes ». Même si les
méthodes et modèles employés la plupart du temps n’ont que des
fondements scientifiques approximatifs, certains d’entre eux ten-
2.3.2 Espace CIELab ou L*a*b* CIE 1976 tent d’approcher l’apparence visuelle qu’auraient réellement les
matériaux simulés.
Cet espace est particulièrement adapté à la description des
couleurs de surface, ce qui explique son emploi majoritaire dans la
plupart des industries manufacturières ayant pour objet l’esthéti-
que de la conception ou le contrôle de la qualité de production, la 3.1 Données et grandeurs pertinentes
reproduction, le contretypage, etc. Les grandeurs colorimétriques
dans l’espace CIELab sont définies par les relations : Pour les physiciens, les chimistes, les ingénieurs, la notion de
couleur passe par la caractérisation d’une grandeur spectrale. Les
L* = 116 Y/Y n 1/3 – 16 spectres de réflexion, de transmission ou d’émission sont alors des
notions primordiales et pertinentes pour la lecture que le spécia-
1/3 1/3
X Y liste souhaite en faire. Dans de nombreux métiers, l’information
a* = 500 ------------ – ----------
Xn Yn apportée par ces spectres n’est ni suffisante ni la plus pertinente.
La principale raison réside dans les variations angulaires des
1/3 1/3
Y Z phénomènes optiques qui se superposent aux variations spec-
b* = 200 ----------- – ---------- trales. L’industrie, dans sa généralité, mais particulièrement le
Yn Zn
champ de la simulation pour la conception de produits, a besoin
aujourd’hui d’une instrumentation de contrôle et de formulation
avec X n , Y n et Z n valeurs de X, Y et Z de l’illuminant de référence
sachant relier les informations spectrales directionnelles entre
utilisé avec Yn valant toujours 100.
source et détecteur. Il est alors nécessaire de se donner des
Par construction, cet espace colorimétrique est appelé uniforme modèles de comportement optique des matériaux en fonction de
en ce sens qu’il possède une métrique euclidienne, ce qui est fort leur nature, de leur structure et de leur état de surface. Parmi ces
commode pour un usage pratique. Cette propriété apparaît trois concepts, le premier s’exprime par l’indice de réfraction.
nettement à travers la notion de différence de couleur entre deux L’ indice de réfraction complexe ou la fonction diélectrique
stimulus : complexe des matériaux homogènes permet de représenter visuel-
lement le phénomène de réflexion métallique, en tant que généra-
∆ E ab
* = ( ∆L* ) 2 + ( ∆a* ) 2 + ( ∆b* ) 2 (4) lisation de la réflexion diélectrique. Bien que cette notion soit très
peu employée, elle demeure la seule pertinente et prometteuse
De même, dans d’autres espaces colorimétriques comme HLS pour la simulation d’aspects optiques du monde industriel ou du
ou mieux encore CIELuv, on définit le chroma et l’angle de teinte monde de l’art, de l’histoire et de l’archéologie. Les indices de
par : réfraction complexes des matériaux et même ceux des éléments
b*
* = a* 2 + b* 2 h ab = arctan ---------- sont difficiles à obtenir et cela explique aussi le peu de travaux
C ab (5)
a* effectués en infographie avec ces données trop rares. Cependant,
nous avons collecté certaines d’entre elles dans des tables de
Il faut néanmoins bien prendre garde au fait que cette formule constantes disponibles au CEA [30]. Il est possible de modéliser
de différence de couleur ne représente pas à proprement parler l’indice de réfraction complexe à partir de formulations simples et
une « formule d’acceptabilité » ou de « tolérance » colorimétrique. classiques du mouvement d’un seul électron lié à un atome et sou-
Les précisions sur ces notions sont en effet propres aux différents mis à un rayonnement électromagnétique incident. Cela permet
secteurs d’activité. d’expliquer qualitativement l’essentiel de ce qui est observé. Le
lecteur pourra se reporter utilement à l’article « Optique des
milieux matériels » du présent traité [7]. Nous employons la nota-
tion de Max Born et Emile Wolf [31] pour désigner l’indice de
réfraction complexe. Ainsi, nous écrirons :
3. Apparence visuelle
et simulation n^ ( λ ) = n ( λ ) [ 1 + i κ ( λ ) ] (6)
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3.2 Indice de réfraction complexe décimales. La perméabilité magnétique intervient également sui-
vant les éléments étudiés (état paramagnétique ou ferromagné-
tique) ; l’influence, pour les terres rares lourdes (Gd, Dy, Tb, Ho),
porte sur la seconde décimale.
3.2.1 Importance
Dans les applications de visualisation en synthèse d’image [11],
L’indice de réfraction complexe est plus pertinent que les nous supposons le plus souvent que µ = µ 0 , c’est-à-dire que la per-
spectres de réflexion ou transmission pour décrire les propriétés méabilité magnétique du matériau est la même que celle du vide
visuelles des corps. C’est parce que les lois de comportement et qu’elle n’a pas d’influence sur l’aspect visuel du corps. La plu-
optique des matériaux, angulaires et/ou spectrales, s’expriment part des surfaces métalliques se recouvrent d’une couche superfi-
toutes à l’aide de cette grandeur qu’elle revêt autant d’importance, cielle d’oxyde ou de composés plus complexes lorsqu’elles sont
plus particulièrement en simulation pour le contrôle ou la création : placées à l’air libre (patines naturelles). Des travaux sur les
— l’opacité et la grande réflectivité des métaux sont caractéris- couches rugueuses d’oxydes métalliques déposées sur le métal
tiques de grandes valeurs de l’indice d’absorption κ (cf. nota 1), parent ont été faits [32] [33] et fournissent des résultats encoura-
tandis que la partie réelle de l’indice reste relativement faible et geants. Cependant, si l’effet visuel recherché et restitué peut être
même inférieure à l’unité (caractéristique de l’évanescence) pour les satisfaisant, le contrôle des propriétés optiques des surfaces réel-
très bons conducteurs (métaux nobles essentiellement) ; les demeure délicat ; les études plus facilement abordables portent
— la semi-transparence des lames minces et la bonne réflectivité sur des matériaux et couches de qualité optique.
des semi-métaux sont caractéristiques d’un indice d’absorption plus
faible et d’un indice de réfraction n qui atteint plusieurs unités ;
— la transparence et la translucidité sont caractérisées par un 3.4 Loi de dispersion pour les oxydes
indice n réel auquel est associé un indice d’absorption k nul ou très
faible. Dans les cas les plus simples, l’indice de réfraction est un
Nota 1 : dans un milieu hétérogène, on définira la partie imaginaire de l’indice de nombre réel dont la dépendance vis-à-vis de la longueur d’onde
réfraction complexe comme un indice d’extinction englobant à la fois les deux phéno- fixe la loi de dispersion. L’indice de réfraction d’un corps ou milieu
mènes d’absorption et de diffusion dans le milieu.
homogène est une fonction de la température, de la densité et de
la composition. Les milieux dilués comme les gaz ont un indice
légèrement supérieur à l’unité. L’indice varie avec la densité et, en
3.2.2 Quelques caractéristiques de l’indice ce qui concerne les milieux transparents formés d’oxydes métalli-
de réfraction complexe ques, il suit une loi appelée relation de Gladstone-Dale. Cette rela-
tion, reliant l’indice de réfraction à la densité, s’écrit dans le cas
À un niveau fondamental, la partie réelle n de l’indice de réfrac- d’un mélange à longueur d’onde fixée :
tion est reliée à la bande de valence [9] du matériau alors que la
partie imaginaire n κ est reliée à la bande de conduction. En n = 1 + d (p 1 k 1 + p 2 k 2 + ...+ pn kn ) (8)
optique existent des méthodes d’extraction ou de mesurage des
constantes optiques n et κ. Il s’agit essentiellement de l’analyse de avec d densité de l’oxyde,
Kramers-Krönig, rapide et efficace pour traiter des spectres de pi concentration en masse du composé numéro i,
réflexion ou de transmission, et de l’ellipsométrie spectrosco- ki coefficient de réfraction du composé i.
pique [10].
Ainsi, n = 1 + 0,21 d pour la silice amorphe
et n = 1 + 0,4 d pour le dioxyde de titane amorphe.
3.2.3 Quelques limitations concernant l’indice Le tableau 1 illustre quelques valeurs caractéristiques de ces
de réfraction complexe coefficients de réfraction.
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Nota 2 : avant Aristote, le philosophe grec Alexandre d’Aphrodisias fut le premier à cations industrielles sous sa forme métallique ou sous forme de
décrire toutes les propriétés visuelles de l’arc-en-ciel. Ainsi, en son honneur, on nomma la
région sombre entre les deux arcs principaux de l’arc-en-ciel, bande sombre d’Alexandre.
composés : oxydes, sulfate, chlorure, etc. Le cobalt est un copro-
duit de la métallurgie du cuivre ou du nickel et la production mon-
Inversement, lorsque les particules constitutives du milieu sont diale de cobalt métal s’élève à quelque 30 000 tonnes par an. Les
plus petites que la longueur d’onde du rayonnement incident (donc
verres antiques et du Moyen Âge étaient toujours colorés soit en
inférieure à 380 nm pour le visible), toute notion de couleur dispa-
brun, soit en vert en raison des impuretés, les ions Fe2+ notam-
raît au profit de la transparence car l’efficacité d’extinction diminue
ment, apportées par les sables siliceux employés. C’est la
avec le paramètre de taille de la particule :
combinaison de l’utilisation de sables siliceux très purs et l’adjonc-
π × diamètre particule tion de manganèse, plutôt fortuite, qui permirent de produire des
α = ---------------------------------------------------------------------
-
λ II verres de grande transparence. En somme, c’est l’intervention, que
l’on ne savait pas expliquer, à l’échelle microscopique, d’effets de
avec λII longueur d’onde du rayonnement électromagnétique polarisation d’ions métalliques dans une matrice vitreuse qui
à l’extérieur de la particule. modifiait la fonction diélectrique du matériau. Cette fonction déter-
Si les gouttelettes de l’émulsion [14] qui constitue le lait étaient mine toutes les propriétés optiques du milieu composite que
plus petites, le lait serait alors transparent ! Certains matériaux constitue le verre, dopé au manganèse dirions-nous en langage
comme le germanium métal possèdent une grande transparence contemporain. Les nanocermets ne sont rien d’autre que des
dans l’infrarouge mais pas dans le visible où leur indice d’absorp- « bleus de Chartres » contemporains. Dans la nature, c’est l’ion
tion n’est pas négligeable ; il est toutefois moindre que celui des chrome Cr+ qui donne la couleur si appréciée et recherchée du
métaux. D’une manière générale, on peut admettre que les semi- rubis.
conducteurs possèdent des propriétés optiques de semi-transpa-
rence en faible épaisseur (les galettes de silicium sur lesquelles on Nota 3 : les nanocermets sont des composites formés d’une phase continue principale
grave les microprocesseurs sont bien connues pour cela). L’emploi diélectrique (isolante) de type céramique ou verre, dans laquelle des agrégats métalliques
sont introduits.
du germanium et surtout de son oxyde GeO2 est de plus en plus
important dans les systèmes de transmission de la lumière
Les colorants alimentaires [35] [36] procèdent de phénomènes
(dopage de l’indice de réfraction des fibres optiques [13]). L’oxyde
d’indium, quant à lui, possède des propriétés apparemment d’absorption bien plus classiques expliqués par la chimie des
contradictoires de transparence dans le visible et de conductivité colorants.
électrique ; il est ainsi utilisé dans la technologie des écrans plats
(LCD [15], plasmas, électrochimiques) mais aussi (associé à l’oxyde
d’étain) dans les systèmes de dégivrage des pare-brise d’avions où
un courant électrique parcourt le dépôt résistif effectué sur le verre.
Ces matériaux sont utilisés en couches « presque minces » (envi- 5. Diffusion de la lumière
ron 0,1 µm pour les écrans LCD).
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5.3 De la diffusion simple particules ; ces grains, de forme quelconque possible, déterminent
la réflectance du système pulvérulent dès que l’on sait évaluer les
à la diffusion multiple réflectances externe K 1 (n) et interne K 2 (n) moyennes (cf. Annexe
§ 7.3, figure 8). Le calcul complet est développé pour des particules
Naturellement, la transition entre les régimes de diffusion simple sphériques (nota 4) incorporant les réflexions internes aux parti-
et de diffusion multiple passe par une diffusion qui n’est plus tout cules et les diffusions entre particules situées dans un même plan.
à fait la première mais pas encore la seconde. Le paramètre de dis- La « réflexion poudreuse », ci-après présentée, s’applique à l’état
tance définissant le libre parcours moyen de la lumière dans le de surfaces diffusantes macroscopiques.
milieu et aussi la perte de cohérence du rayonnement transmis Nota 4 : cette formulation coïncide avec bien des cas pratiques où la forme des particules
permet de régler cette diffusion dite dépendante [53]. Dans l’indus- est ignorée car inaccessible ; néanmoins, le modèle demeure applicable aux particules dont
trie, la recherche de formules d’emploi aisé et rapide a assuré un on connaîtrait la géométrie individuelle, sinon la plus probable du point de vue cristallo-
graphique.
certain succès aux modèles phénoménologiques de diffusion de la
lumière.
Hypothèses :
a) les particules sont faiblement absorbantes (κ est petit) ;
5.4 Modèles phénoménologiques b) une seule couche de particules sphériques identiques est
évaluée ;
c) le diamètre particulaire d est très supérieur à la longueur
Deux modèles historiques se sont dégagés pour décrire de
d’onde λ.
manière aussi simple que possible la diffusion multiple. Les deux
modèles, formulés avec quelques nuances, ont cependant bien des
analogies et des formules assez semblables. Le premier modèle ■ Formulation du modèle
présenté est relatif à la diffusion de la lumière par des poudres à
La diffusion du rayonnement par l’ensemble de la surface sera
gros grains. Le second concerne plus directement les peintures et
produite par l’effet statistique de la répartition spatiale des rayons
matières plastiques. À l’effet spécifique près du liant, le second
réfléchis par des réflexions multiples à l’intérieur des particules,
modèle rejoint le premier asymptotiquement lorsque le liant est
par le substrat et la surface même des particules. Nous suppose-
l’air.
rons donc que les propriétés moyennes en diffusion simple et en
transmission T d’un système de particules d’orientations et de
Historique des modèles formes aléatoires mais de diamètre moyen d peuvent être repré-
sentées approximativement par les propriétés de particules sphé-
riques diffusant selon la loi de Lambert. Pour un flux incident
En 1905, l’astrophysicien Arthur Schuster [37] propose un
unitaire pénétrant la surface d’une sphérule de diamètre d suivant
modèle de milieux diffusants, un mélange de gaz et de poussiè-
un angle θ, mesuré le long d’un diamètre, l’intensité dans la direc-
res, pour représenter le comportement observé des atmosphè-
tion donnée par θ est (1/π) cos θ ; cette intensité est ici évaluée en
res stellaires. Il est ainsi conduit à inclure l’émissivité propre du
flux par unité d’angle solide. Dans l’intervalle angulaire infinitési-
nuage de gaz et de poussière ainsi que l’absorption et la diffu-
mal dθ, du fait de l’absorption spectrale, le flux parvenant à la
sion du rayonnement par cet ensemble. Il emploie, pour ce
« frontière » opposée de la sphère est alors :
modèle, deux flux de rayonnement de sens opposés, inter-
agissant avec l’atmosphère stellaire. Les particules soumises au (1/π) cos θ e–nκd cos θ 2π sin θ dθ
rayonnement étaient de dimensions inférieures à la longueur
d’onde dans le domaine visible. Ainsi, il se plaçait dans les Le flux émergeant de la surface d’une particule après absorption
conditions où la diffusion de Rayleigh est applicable. Sous ces par sa masse même lors de la traversée est donc donné par l’inté-
hypothèses, les flux diffusés dans une direction et dans la direc- gration sur θ de 0 à π/2 de cette fonction ; nous avons alors en le
tion opposée étaient de même importance. Ce modèle est à l’ori- notant M :
gine, grâce à ses deux flux, d’un grand nombre de variantes 2
regroupées sous le nom de théories à deux constantes, la plus - [ 1 – ( n κ d + 1 ) exp ( – n κ d ) ]
M = ------------------------ (9)
( n κ d )2
utilisée étant celle de Kubelka et Munk. Déjà, dans l’article de
1905, Schuster note très explicitement le potentiel applicatif de C’est là qu’apparaît toute la capacité prédictive du modèle car
son modèle à des matériaux plus terrestres. Ce modèle, valable toutes les grandeurs qui suivront seront fonction de ce terme où
pour décrire les atmosphères stellaires, a servi de point de n’interviennent que l’indice de réfraction complexe (n, κ ) et le dia-
départ pour la modélisation du comportement optique des pein- mètre particulaire moyen d.
tures, papiers, textiles, matières plastiques, cosmétiques, etc.
La sommation des rayonnements diffusés permettant d’établir la
réflectance diffuse R est effectuée sur la base des propriétés indi-
Les paragraphes suivants seront l’occasion d’aborder deux viduelles des particules ; sans entrer dans le détail du calcul, nous
modèles caractérisant les milieux hétérogènes que l’on peut indiquons les valeurs corrigées du modèle originel dans la liste des
décrire soit en termes de poudres, soit en termes de couches différents termes successifs définissant la répartition du flux inci-
minces superposées contenant des pigments. dent unitaire (noté 1 sur la figure 3). Nous avons adapté l’expres-
sion de Mandelis et col. [39] à nos notations et particulièrement à
l’expression de l’indice de réfraction complexe n = n ( 1 + i κ ). La
^
5.5 Les poudres : modèle de Melamed formule (9) est, rappelons-le, obtenue par application de la loi de
Lambert sur toute la surface sphérique d’une particule moyenne ;
modifié pour une couche de particules, le milieu inférieur se comporte
comme un substrat de réflectance diffuse R. Melamed, dans son
D’approche phénoménologique, ce modèle présente la réflexion modèle d’origine [38], a montré que le flux transmis par une cou-
diffuse de la lumière par un milieu hétérogène (discontinuum). Ce che de particules identiques est donné par :
milieu se compose de particules sphériques identiques et adja-
centes formant une couche compacte uniforme (réseau hexagonal) [ 1 – K2 ( n ) ] M
T = ---------------------------------------------
- (10)
déposée sur un substrat homogène de facteur spectral de réflexion 1 – K2 ( n ) M
connu. La spécificité du modèle de Melamed [38] ou de sa version
corrigée par Mandelis et col. [39] réside dans la nature discrète des avec K 2 (n) coefficient de réflexion interne moyen.
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R Remarque
Dans l’industrie des peintures, on trie les différentes nuances
d’un même ton par floculation. Les matières issues du broyage
sont déversées dans des cuves contenant de l’eau. Les particules
Les termes ri , ti , ui et Fi désignent les fractions du rayonnement en suspension sédimentent d’autant plus vite qu’elles sont plus
réfléchi, transmis, absorbé et diffusé, c'est-à-dire les fractions grosses. Ainsi, les tons les plus sombres sont obtenus les
spéculaires directes et celles correspondant aux réflexions multiples premiers. Lorsque l’absorption est importante à l’intérieur des
internes. particules, les effets de désaturation de la teinte causés par le
broyage du matériau ne pourraient plus s’exprimer, pour des dia-
Figure 3 – Diffusion par un milieu pulvérulent formé mètres plus petits que 1 µm environ. Ainsi, même en broyant du
de particules sphériques identiques. Le modèle de Melamed noir, on n’obtient pas du blanc !
Après la détermination de toutes les grandeurs précisées sur la 5.6 Modèle de Kubelka-Munk
figure 2, on aboutit en incluant le nombre infini des réflexions
internes aux sphères ainsi que sur le substrat, à une expression
Les théories à quatre flux apparaissent alors comme autant de
pour la réflectance du système, donnée par [38] [39] :
corrections au modèle fondateur. La généralisation à un nombre de
R = 2xK 1 ( n ) + x [ 1 – 2x K 1 ( n ) ] T flux de plus en plus grand semble atteindre son paroxysme avec
les travaux de Mudgett et Richards [40] [41]. Ces méthodes à flux
[ 1 – K 1 ( n ) ] ( 1 – x ) TR + [ 1 – K 1 ( n ) R ]x multiples, d’expression complexe, ont permis de faire la connexion
------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------
- (11) avec la théorie devenue classique de Kubelka-Munk en introduisant
1 – K 1 ( n ) R – ( 1 – x ) [ 1 – K 1 ( n ) ] TR de nouveaux coefficients ; cette dernière théorie, s’appliquerait
assez bien, semble-t-il, aux matières plastiques semi-transpa-
avec x en pratique, probabilité de diffusion du rayonnement
rentes. Abordons à présent la physique du modèle. Pour déter-
vers le haut,
miner le flux émergent (réfléchi ou transmis), on découpe la
(1 – x) celle de diffusion vers le bas, couche diffusante en « tranches minces » d’épaisseur élémentaire
K 1 (n) coefficient de réflexion externe moyen (cf. Annexe dx parallèlement aux interfaces et l’on détermine le bilan radiatif
§ 7.3). pour chacune de ces couches. Puisque, dans le milieu diffusant
La sommation sur tous les rayons entrants ou sortants est lui-même, on peut considérer le rayonnement incident comme
complète ; en ce sens, l’équation (11) dont on tirera R est une complètement diffus et isotrope, il sera nécessaire d’évaluer
équation de bilan radiatif. La résolution de cette équation du l’épaisseur efficace de la couche élémentaire puis de résoudre le
second degré en R conduit, si l’on ne retient que la racine négative système d’équations différentielles couplées obtenu. Les défini-
(car R 1 ), à : tions des symboles ainsi que l’ensemble des formules classiques
que l’on obtient sont regroupées en annexe (§ 7.2). La figure 4 défi-
nit les premiers symboles permettant d’établir le système d’équa-
R = ----------- 1 + AC – BD – ( 1 + AC – BD ) 2 – 4C ( A + xB )
1
(12) tions différentielles de Kubelka et Munk.
2C
Appelons I le flux de rayonnement dans la direction x négatif
avec : A = 2xK 1 (n) et J celui dans la direction x positif. Pour un angle d’incidence par-
ticulier θ sur la couche élémentaire d’épaisseur dx , le chemine-
B = x [1 – 2xK 1 (n)] T ment dξ moyen des rayons dans le milieu est :
C = K 1 (n) + (1 – x) [1 – K 1 (n)] T dx
d ξ = ------------------
cos θ
D = (1 – x) [1 – K1 (n)] T – xK 1 (n)
Si, de plus, nous désignons par I0 le flux total incident dans
Il est intéressant de remarquer que le procédé décrit dans ce l’hémisphère supérieur, alors l’intensité relative dans la direction
modèle ne fait pas intervenir d’échantillon de référence et a, pour définie par θ sera donnée par :
cette raison entre autres, rencontré un certain succès parmi les
spectroscopistes travaillant sur les poudres, car la fonction R 1 ∂I
------- ⋅ --------- d θ
(réflectance diffuse) est établie de façon très générale. La I0 ∂ θ
comparaison avec des résultats de mesurages établis sur des
poudres réelles formées de billes de verre fournit un choix particu- Ainsi, pour avoir la valeur moyenne de ce chemin parcouru par
lier de la probabilité de diffusion vers le haut, soit xu = 0,284. La les rayons dans tous les sens dans la couche élémentaire d’épais-
réflectance définie par (12) est très fortement dépendante du choix seur dx, nous devons intégrer sur toutes les valeurs possibles de
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R X
dr
X -------------------------------------- = S dx
R g r 2 – 2ar + 1 0
I
Puisque le mécanisme de la diffusion isotrope est local, la répar- qui peut se présenter sous les formes variées suivantes comme :
tition angulaire du flux incident (I ou J ) est telle que (cf. raison-
nement effectué pour établir (9)) : K K2 K 1
- + 2 -------
R ∞ = 1 + ------- – ---------- ou R ∞ = --------------------------------------------------------------------- (19)
S S2 S K2
∂I ∂J K K
--------- = 2I 0 sin θ cos θ et ---------- = 2J 0 sin θ cos θ 1 + ------- + ---------- - + 2 -------
∂θ ∂θ S S2 S
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Cette expression conduit également au cas limite de la réflec- air/liant et pigments/liant. Pour un milieu opaque, comme une
tance d’une couche diffusante déposée sur un support idéalement couche diffusante suffisamment épaisse et absorbante, Saunder-
noir. Dans ce cas limite, Rg = 0 et nous avons : son [43] a montré que le facteur de réflexion spectral total se met-
tait sous la forme :
exp [ SX ( 1/R ∞ – R ∞ )] – 1 R ∞ – R 12
R 0 = ------------------------------------------------------------------------------------------------------
- (22) R ′ = R 12 + ------------------------------------------------------------
- (26)
( 1/R∞ ) exp [ SX ( 1/R∞ – R∞ )] – R∞ 1 – R 12 – k 2 ( 1 – R ∞ )
Cette dernière formule se rencontre souvent dans la pratique Dans cette expression, R12 représente la contribution de l’inter-
sous une autre forme, ne faisant intervenir que les spectres R ∞ , Rg face lisse séparant les milieux 1 et 2, soit air/véhicule. Ce terme
et R, soit : désigne le milieu continu homogène d’enrobage commun aux pig-
R∞ ( Rg – R ) ments et aux colorants ; on emploie également, plus couramment,
R 0 = --------------------------------------------------------------------------------- (23) le terme de liant pour ce même matériau. Cette contribution est
Rg – R∞ ( 1 – Rg R∞ + Rg R ) donnée par les formules de Fresnel pour un éclairage naturel (fac-
teur de Fresnel moyen [18] [44]).
(1 – R12) est la fraction du rayonnement incident pénétrant dans
5.6.1 Expression des coefficients de diffusion la couche diffusante, c’est-à-dire la fraction transmise par l’inter-
et d’absorption face 1/2, k 2 est une grandeur plus difficile à exprimer analyti-
quement mais dont le sens est simplement la traduction du
À partir de résultats de mesurage donnant les spectres de rayonnement diffus émergent du matériau et originaire de l’inté-
réflexion, tant pour la couche que pour son substrat et connaissant rieur de la couche diffusante, R∞ est la réflectance de la couche dif-
l’épaisseur de cette couche, on établit, à l’aide des relations défi- fusante telle qu’elle est donnée par les formules de Kubelka-Munk.
nissant R∞ et R0 , soit (19) et (22), les relations donnant directement
le coefficient de diffusion S et le coefficient d’absorption K, ainsi : k 2 semble être fixé plutôt par un ensemble d’essais et, dans
l’exemple de matière plastique colorée par un ensemble de
R∞ R∞ ( 1 – R0 R∞ ) pigments que Saunderson manipulait, la valeur judicieuse aurait
2,303 été de 0,4.
S = ------------------- ----------------------
2
lg --------------------------------------------- (24)
X 1–R R∞ – R0
∞ L’on peut remarquer, compte tenu de ce qui précède, que la
contribution diffuse à la réflectance totale du milieu correspond
2,303 1 – R ∞ R∞ ( 1 – R0 R∞ ) justement à ce que le modèle de Melamed fournit, comme
K = ------------------- ---------------------- lg -------------------------------------------- (25) l’indique l’équation (10) où R∞ prendrait la valeur M qui a d’ailleurs
2X 1 + R ∞ R∞ – R0
la même signification. Les écarts entre valeurs de réflectance
Ces expressions, issues de mesurages sur des objets macro- mesurées pour des mélanges de pigments constitutifs de matières
scopiques, permettent la jonction avec les propriétés microsco- plastiques et valeurs prédites par l’analyse de Kubelka-Munk-
piques des pigments, dès lors que nous savons établir un lien Saunderson ont été analysés par Bridgeman [45] qui proposa
valable entre diffusion simple et diffusion multiple. Le problème d’utiliser un indice de réfraction effectif pour le milieu complet. Cet
n’est pas simple. En effet, l’on sait que les diamètres des pigments indice serait calculé à partir de R12 et non pas à partir de k 2 , en
à couche minéraux comme les ocres (noyau de silice et couche inversant le facteur de Fresnel de l’interface air/véhicule ; ce fai-
d’oxyde de fer) varient de ≈ 13 nm à 10 µm. Les charges minérales sant, on aboutit à un indice de réfraction effectif :
ou d’autres pigments naturels anciens ont des dimensions pouvant n = 1,302 9 lorsque R 12 = 0,04 est supposé pour l’incidence
atteindre ≈ 60 µm. L’oxyde de fer du violet de Mars a, quant à lui, normale.
un diamètre pigmentaire moyen de ≈ 0,7 µm. La théorie à deux
S’il n’y a pas de diffusion par le milieu matériel, le flux émergent
constantes (S et K) de Kubelka et Munk n’est strictement valable
est donné par :
que pour les milieux diffusants éclairés par un rayonnement diffus
1 – K 2 (n )
isotrope ; elle fournit une expression de ce qu’en infographie on
nomme la composante diffuse du rayonnement réfléchi. La sépa- En présence de particules diffusantes, le flux restant et qui est
ration des composantes diffuse et spéculaire du rayonnement diffusé en tous sens contient une fraction, en général plus impor-
réfléchi par une surface matérielle discrimine les modèles locaux tante, de flux diffusé à des angles supérieurs à l’angle limite de
de calcul de l’éclairage d’une telle surface. Habituellement, la loi de réfraction du matériau d’enrobage pour une traversée du rayonne-
Lambert est utilisée pour décrire cette composante diffuse et les ment dans le sens intérieur extérieur. Dans ce cas, les multiples
formules de Fresnel pour décrire cette composante spéculaire. Une réflexions internes sont plus nombreuses et les ordres de diffusion
combinaison linéaire de ces deux composantes donne, à quelques aussi. De ce fait, environ 40 % et même davantage du flux incident
ajustements près, les différents modèles d’éclairage infogra- est aussi émergent de façon diffuse, comme semblent l’indiquer
phiques. Nous avons fait remarquer à plusieurs reprises que ce des résultats expérimentaux [40]. Dans ces mêmes références est
partage des rôles semble globalement correct et qu’il était possible indiqué (p. 1498) qu’aucun coefficient de réflexion interne moyen
d’y apporter un « éclairage » nouveau par la compréhension plus n’a été observé inférieur à 0,59. Ce fait majorerait la valeur que
détaillée des interactions locales du rayonnement avec la matière. Saunderson fixait pour k 2 . N’oublions pas que K2 (n) possède une
Souvenons-nous que la réflexion spéculaire existe pour toute sur- dépendance spectrale dont l’effet n’est peut-être pas toujours
face matérielle suffisamment lisse, indépendamment de sa nature, négligeable.
et qu’elle est déterminée par les formules générales de Fresnel
comprenant un indice de réfraction complexe ; quant à la réflexion
diffuse, elle est bien justifiée par l’hypothèse de Lambert (bien que
des écarts à cette loi existent que nous n’envisagerons pas ici). 5.7 Couleur d’un mélange de pigments
Nous distinguerons les propriétés des pigments de celles des
5.6.2 Correction d’interfaces et réflexion colorants en ceci que les colorants sont des agents dispersés de
spéculaire façon homogène dans la totalité de la masse du matériau
d’enrobage : les colorants ne diffusent pas de rayonnement mais
La théorie de Kubelka et Munk, pour des raisons liées aux en absorbent. Les pigments sont le plus souvent d’origine minérale
méthodes de mesurage des caractéristiques subsurfaciques, a et, par conséquent, sont des petits polyèdres cristallins de taille et
trouvé des raffinements en ce qui concerne le rôle des interfaces de forme variable (le diamètre moyen étant de l’ordre de 50 µm).
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avec Csca = 2π (σF + σB ) et ∆Csca = 2π (σF – σB ) La figure 5 montre les courbes de dispersion normale de deux
verres englobant le domaine visible. Bien qu’une des deux courbes
Les indices F et B employés servent à repérer la diffusion avant de dispersion soit très « horizontale », lors de nombreuses réfrac-
et la rétrodiffusion respectivement. Les σ caractérisent les sections tions dans le verre (BK7) les aberrations chromatiques qui appa-
efficaces différentielles de diffusion. Lorsque le milieu est le siège raissent sont nettement visibles (cf. figures 6 et 7).
d’un rayonnement non polarisé et que les particules sont homo-
Les trois images (figures 6, 7 et 8) représentent le phénomène
gènes et sphériques, la section efficace différentielle de diffusion
de dispersion de la lumière par le verre. Il s’agit de la même scène
par particule s’écrit à l’aide des coefficients de Mie [31] :
3D, le même observateur, le même point d’observation, les mêmes
S1 2 + S2 2 illuminants en lumière naturelle, le même état de surface, le même
σ ( ω ) = -----------------------------------------
- (29) décor (dépouillé) pour un assemblage en triangle équilatéral de
( k II ) 2 billes de verre BK7 (figure 6) et de verre SF11 (figure 7). Le calcul
est effectué par Virtuelium (logiciel de tracé spectral de rayons
avec une fonction de phase ou diagramme de rayonnement telle parallélisé) :
que, avec ω la pulsation :
— processeur AMD Athlon XP2100 ;
4π
p ( ω ) = ---------------- σ ( ω ) (30) — résolution : 800 × 600 × 24 bits ;
C sca
— niveau de récursion : 8 ;
l’exposant II de l’équation (29) servant à désigner le milieu interne — anti-aliassage 4 sous-pixels par pixels ;
à la particule diffusante. — échantillonnage des grandeurs spectrales sur le visible [380 ;
Les formules utiles et très communément employées dans 780] nm au pas de 5 nm (soit 81 valeurs) ;
l’industrie sont données en annexe (§ 7.2). — durée 13 jours.
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3,5
Indice
3
2,5
2 SF11
1,5
BK7
1
200 400 600 800 1 000 1 200
Longueur d'onde (UV-visible-IR)(nm)
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Réflectance moyenne K
0,9 Interne [K2 (n)]
1 – R g a – b coth bSX 0,8
R = f (SX, Rg , R∞) R = --------------------------------------------------------------------------
-
a – R g + b coth bSX
0,7
1 a–R a – Rg Externe [K1 (n)]
SX = f (R, Rg , R∞) SX = ------ arg coth ---------------- – arg coth -------------------- 0,2
b b b
0,1
1 1 – aR 0
SX = f (R0 , R∞) SX = ------ arg coth ------------------------ 1
b bR 0 1 1,3 1,6 1,9 2,2 2,5 2,8 3,1 3,4 3,7 4
SX = f (Ti , R∞) 1 b
SX = ------ arg sinh ------- – arg sinh b
b Ti Indice de réfraction réel n
2 1/2
R0 = f (Ti , R∞) R0 = a – T i + b 2
2
Figure 9 – Tracé des variations des réflectances moyennes K1 (n)
Ti = f (R0 , R∞) Ti = a – R0 2 – b 2 externe (en bas) et K2 (n) interne (en haut),
2 2 en fonction de la partie réelle de l’indice de réfraction
R∞ = f (R0, Ti ) 1+ R0–Ti
a = -----------------------------------
-
2R 0
R 0 – R g ( 2a R 0 – 1 )
R = f (R0 , Rg , R∞) R = ---------------------------------------------------------
-
1 – R0 Rg La définition des principaux symboles utilisés est donnée dans le
tableau des Notations et symboles (page 2).
R – Rg
R0 = f (R, Rg , R∞) R 0 = ----------------------------------------------
-
1 – R g ( 2a – R )
1 R0 – R + Rg
R∞ = f (R, R0, Rg ) a = ----- R + ----------------------------------
2 R0 Rg
- 7.3 Réflectances externe
et interne moyennes
2
R = f (R0, Ti , Rg ) T i Rg
R = R 0 + ----------------------------
-
1 – R0 Rg Seuls les résultats des simulations sont exprimés ici (figure 9).
Le lecteur trouvera l’ensemble du calcul analytique dans « Couleur-
2 1
Ti = f (R, R0, Rg ) Ti = ( R – R 0 ) --------- – R 0 lumière, couleur-matière » [18] et une généralisation du calcul de la
Rg
luminance d’une surface uniformément éclairée en fonction de
R0 ( 1 – Rg ) + R1 Rg ( 1 – R0 ) l’indice de réfraction complexe dans [44] notamment.
R = f (R1, R0, Rg) R = ----------------------------------------------------------------------------------
-
1 – R0 Rg
Les deux courbes de la figure 9 sont obtenues par intégration
R – R0 + R0 Rg ( 1 – R ) numérique de la réflectance unidirectionnelle (facteurs de Fresnel)
R1 = f (R, R0, Rg ) R 1 = -----------------------------------------------------------------
- lorsque l’angle d’incidence varie. C’est ce qui correspond à un
Rg ( 1 – R0 )
rayonnement incident à répartition spatiale orthotrope.
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